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Un sourire étincelant s’afficha sur le visage fin de la jeune femme. Elle m’observait de son regard bienveillant tandis que je tentais d’apprivoiser la magie de l’air. A chacun de mes progrès, elle m’ébouriffa les cheveux de cette manière qui m’était si familière. Je souris. Elle était à moi et rien qu’à moi. Je la serrai dans mes bras et, l’instant d’après, elle disparut dans un nuage de fumée.


Je me réveillai en sueur. De grosses gouttes de transpiration perlaient sur mon front, humidifiant mon visage encore fatigué. Cela faisait plusieurs semaines que je me sentais affaibli bien que je n’en connaisse pas la cause. Poussé par le petit Léviathan qui tira la manche de mon pyjama, je quittai péniblement la chaleur de mon lit. Sans attendre, j’aspergeai d’eau fraiche ma figure. Dans la bassine de bois, j’aperçu mon reflet ; de grosses cernes entouraient mes yeux ternes. Etait-ce là ce que les gens apercevaient en me regardant ? Un jeune homme fatigué et érodé par l’affliction qui le consumait ? Le dragonnet gratta la porte de la chambre, impatient.  

« Oui, Lévi. Nous allons déjeuner. »

Je me lavai rapidement avant de me vêtir de vêtements propres. Je m’habillai légèrement d’un maillot en coton blanc et d’un pantalon simple de toile noire. J’enfilai mes bottines noires, attrapai ma cape tâchée de sang et sortis de la pièce.

Une fois en bas, je fus stupéfait de remarquer que l’endroit était désert – ce qui me paraissait étrange à une heure aussi matinale. L’aubergiste ne tarda pas à s’enquérir de ma commande.

« Bonjour Monsieur Taiji, que prendrez-vous aujourd’hui ? »

Sa voix était emplie de sympathie, comme à chaque fois.

« Pour moi, comme d’habitude Lucian : une omelette au champignon et un verre de jus d’orange. »

L’aubergiste caressa le bébé dragon du bout de ses fins doigts.

« Pour Lévi, un bol d’eau et un os de ton succulent ragoût d’hier soir devrait convenir. »

L’homme était un merveilleux cuisinier et je ne cessai de le lui faire remarquer. Timide, il rougit avant de s’éloigner. Il revint quelques instants plus tard avec ma commande. Tandis que j’entamais mon déjeuner, je l’interrogeai sur la situation.

« Pourquoi n’y a-t-il personne ce matin ? »

Le trentenaire écarquilla les yeux, surpris.

« Quoi ? Vous ne savez pas ? Les gens se pressent aux portes d’Aeden certains pour fuir, d’autres nous protéger contre le fléau qui a détruit Avalon et Earudien. La ville n’est plus sûre du tout. »

Je n’arrivais pas à croire ce que je venais d’entendre.

« Avalon et Earudien ont été détruit ? Par quoi ? »

Il haussa les épaules, n’ayant pas plus de détails à me donner.

« Et toi, pourquoi ne partez-vous pas ? »

Il plongea ses yeux rubis dans les miens.

« Pour aller où ? C’est ici ma demeure. J’y réside depuis que le feu Seigneur du Tout Iro a créé cette ville. »

Il n’avait pas tort. Je regardais mon plat, pensif. Que devais-je faire ? Je me sentais affaibli mais je ne pouvais pas me permettre de rester là sans rien faire. Le faible murmure du feu m’ordonnait d’agir avant que tout soit trop tard.

« Je penses que je vais y aller moi-aussi… Il faut que j’essaye de protéger ceux qui – comme toi – restent dans la cité.»

Un faux sourire apparut sur ses lèvres.

« Cela ne m’étonne pas vraiment de vous… Faites attention ! »

J’engloutis mon repas et je précipitai dans ma chambre pour préparer quelques affaires. Lorsque je revins dans la salle principale de l’auberge, mon compagnon était, lui-aussi, prêt à partir.

« Prenez soin de vous! » lançais-je.

« Vous aussi ! Et ne prenez pas de risques inutiles. »

Je lui fis un clin d’œil avant de quitter l’auberge. Je courrais à travers la ville. Les rues, généralement bondées, n’étaient plus que l’ombre d’elles-mêmes. Seule la Place Centrale était engorgée. Des cris et des hurlements parcoururent la foule.

« LES PORTAILS DE FONCTIONNENT PLUS !!! NOUS SOMMES PIEGES !!! »

Quoi ? Je n’en revenais pas. Le dragon se tourna vers moi et m’observa de ses yeux dorés. Je le hissai dans mes bras – par peur qu’il se fasse écraser – et je me frayai un chemin jusqu’aux portails. Comme la rumeur le disait, les portails ne fonctionnaient plus ; nous étions bloqués dans cette ville. Je donnais un coup de pied dans l’une des portes, espérant que ce choc la ferai fonctionnait, en vain. Soudain, un homme posa ma main sur son épaule. Il se pencha vers mon oreille.

« Si tu veux rejoindre la montagne enneigée, je peux t’y emmener… mais j’aurai besoin de toi. » chuchota-t-il.

Il se redressa et j’observais l’homme à la chevelure violacée. Quelque chose chez lui m’attirait mais je ne savais dire quoi ; peut-être était-ce son regard aux teintes d’améthystes.

« Et que dois-je faire ? »

Un sourire satisfait se dessina sur son visage et il m’attira vers une ruelle vide.

« Bien. Je m’appelle Aleksandre. Je suis capable d’utiliser une magie qui pourrait nous faire sortir d’ici mais, je n’ai plus assez de magie pour la maîtriser. Je cherche une personne qui accepte de faire le vœu de sortir d’ici mais uniquement ce vœu : en réaliser d’autres pourrait épuiser mes dernières forces et me faire disparaitre. Puis-je avoir confiance en toi ? »

Ainsi, c’était un génie. Si l’on m’avait dit de me méfier, ce dernier semblait aussi mal en point que moi. Pouvait-il réellement me faire du mal ? De plus, s’il me donnait son habitacle, j’avais un avantage sur lui.

« Oui, bien sûr. Que suis-je censé souhaiter ? »

Le génie sortit une vieille amulette de sa poche avant de me la tendre.

« Tu dois dire exactement : « Je fais le vœux que Aleksandre et moi-même soyons téléportés dans les montagnes de l’edelweiss enneigé, à proximité du portail menant à Aeden »

Il ne me semblait pas y avoir de faille dans son discours. Aussi, j’attrapai le réceptacle m’exécutai. En un battement de cils, nous nous retrouvâmes au milieu de la foule d’élémentals qui stagnait sur les hauteurs enneigées. Il m’avait fait ! Comme promis, je lui rendis son habitacle sans utiliser mes autres vœux. Il se hâta de le récupérer et me remercia avant de disparaitre aussi vite qu’il était apparu.

Soudain, je l’aperçu. C’était elle. La femme de mes rêves. Je n’y croyais pas mes yeux. Depuis le temps que je la cherchai, je l’avais enfin trouvé. Chaque pas qui m’approchait de la ravissante créature se faisait plus timide. Quand j’arrivai à sa hauteur, je ne pus m’empêcher de sourire. Dans ma poitrine, mon cœur battait la chamade. J’observais chacun de ses traits. Elle était encore plus jolie que dans mes songes.

« B… Bonjour »

La puissance des sentiments que je ressentais m’empêchait de lui parler. Je me concentrai d’avantage et repris.

« Je ne cesse de rêver de vous depuis des semaines. A tout hasard, nous connaitrions-nous ?»

Je marquai une courte pause, le temps de déglutir.

« Si ce n’est pas le cas, permettez-moi charmante demoiselle, de faire votre connaissance. Je m’appelle Raphael. »

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Tandis qu’elle me répondait, j’observais sa bouche pulpeuse qui s’ouvrait et se refermait pour m’offrir les sonorités cristallines de sa voix. Si j’avais succombé à mes pulsions primaires, je l’aurai sans aucun doute serrai tendrement dans mes bras. Cependant, je me contentais de la regarder gardant mes caresses dans la prison de mes fantasmes. La foule autour de nous n’avait guère plus d’importance pour moi ; je m’étais oublié dans le fond de ses yeux et je comptais bien y rester. De temps à autre, un sourire s’échappait de ma bouche pour la rejoindre. Il n’y avait désormais plus de doute : je l’aimais. Je l’aimais bien plus que toutes les femmes que j’avais côtoyées jusqu’ici. Je l’aimais bien plus que toutes autres choses sur terre. Depuis que j’étais près d’elle, mon cœur jouait au rythme des tam-tams de l’amour. Mon visage devait sans doute rougir des images qui me venaient en tête. Enfin, elle s’arrêta de parler.

En ce moment même, je n’avais pour désir que de l’embrasser langoureusement. Je me retins tant bien que mal. Cette demoiselle me connaissait et, en outre, elle savait des choses sur moi qui me semblaient étrangères. Je ressentais qu’elle était la femme de ma vie mais, ressentait-elle la même chose ? Lui avais-je déjà avoué mes sentiments avant mon accident ? Je ne pouvais me permettre de détruire la relation qui nous unissait par le passé à cause de cette vague amnésie. Je décidai de ne rien faire. Je ne la toucherai pas tant que je n’en apprendrais pas plus sur la place qu’elle m’avait attribuée dans sa vie.

Ma jolie élémentale ouvrit la marche. Je songeai à cet instant qu’elle devait avoir un statut important pour que tous les membres de la troupe lui obéissent aussi aveuglément. Comme elle me le demanda du doigt, je m’avançai à ses côtés. Était-elle, à l’instar d’Alyska, l’une des Esprits Elementaires ? En tout cas, sa puissance semblait égale, voire supérieure, à celle de mon mentor. C’était un nouveau mystère qu’il me fallait résoudre.

« Vous êtes donc Lysis… Je me sens désolé de ne pas pouvoir me souvenir de vous… Pourtant, l’évocation de ce prénom me rassure et emporte mon être dans un tourbillon de sentiments tous plus forts les uns que les autres. Nous étions proches, n’est-ce pas ? »

Je regardais le sol. Je me sentais honteux d’avoir oublié la femme de ma vie. Je maudissais ses maraudeurs qui avaient profité de ma faiblesse. Instinctivement, ma main droite se recouvra de flammèches une fraction de seconde avant de revenir à son aspect normal.

« Ainsi, la recherche de ma mère était l’une de mes quêtes ? » bredouillais-je, songeur.

Je fis une pause, comme pour m’imprégner de cette nouvelle information sur mon passé.

« Je suis confus de ne pas vous avoir tenu au courant de mes avancées mais… il s’est passé beaucoup de choses ses derniers temps. Je suis devenu amnésique suite à une attaque de maraudeur – ce sont d’ailleurs eux qui m’ont offert cette affreuse cicatrice sur le visage. Enfin, désormais je me souviens de certaines choses et de certains évènements pour le moins… désastreux dirons-nous. Ces histoires sont assez longues et je ne voudrais pas vous ennuyer en vous contant ces dernières, à moins que vous ne désiriez avoir un récit – quelque peu incomplet – des péripéties que j’ai pu rencontrer ? »

J’avais envie qu’elle accepte. Je voulais qu’elle connaisse ce qui m’avait fait oublier la douceur de son corps et la richesse de son âme. Il fallait qu’elle sache pourquoi elle n’avait pas eu de réponse à sa missive. Lui raconter les évènements passés me rapprocherait peut-être d’elle ? J’avais soif, soif de son amour. Elle était si jolie… En outre, lui narrer mon récit me permettrait de faire un lien entre mon passé et mon présent. Mais, c’était à elle de décidait, je ne l’influencerais en rien. J’arborais un sourire qui se voulait charmeur sans même que je m’en aperçoive.

Derrière nous, la foule marchait dans un brouhaha silencieux. Les hommes et les femmes chuchotaient entre eux. Chacun parlait à voix basse afin de ne pas attirer l’attention de nos prédateurs. Je ne savais rien de cette expédition, je ne savais rien non plus du combat que nous menions. Si j’étais là, c’était uniquement pour être aux côtés de cette femme.

Nous avions bien marché depuis le Portail. Devant nous se dressaient les imposants marécages connus sous le nom d’ « Antre des Marais ». Déjà, j’entendais le bourdonnement des insectes hématophages. Tandis que nous nous enfonçâmes dans  l’inconnu de ces marais, notre visibilité s’amenuisait. Dans la foule, des râles de crainte retentirent ; des citadins dans un terrain paludéen voilà qui risquait de ralentir notre cadence de marche.

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Tandis que nous parlions, un homme d’une quarantaine d’années vint nous interrompre. Il s’adressa à ma compagne et enquit son aide ; son chariot s’était embourbé dans les plaines marécageuses. Sans poser de questions, Lysis me quitta pour assister les chevaux qui luttaient pour se dépêtrer de leurs entraves. Je suivis du regard mon amie. Autour de nous, tout le monde s’arrêta comme pour admirer le spectacle que l’Esprit Elementaire nous offrait. Le vent se souleva. La sensation de l’air contre ma joue me fit tressaillir. Chaque contact avec l’élément de ma déchéance était pour moi des plus déplaisants ; il m’avait privé d’une longue partie de ma vie. Sans grande difficulté, la demoiselle libéra les animaux du joug de leur oppresseur. Aussi, quelques minutes suffirent à ce qu’elle revint à mes côtés et à ce que nous nous remîmes en route. Si elle était fatiguée, elle ne laissait – presque –  rien paraître. Alors que nous cheminions vers notre destination, elle m’exhorta à lui conter mon histoire ; je m’exécutai sur le champ.

« Bon hmm… par où commencer ? » bafouillais-je  

Je remis un peu d’ordre dans mes idées avant de commencer mon récit.

« Il y a quelques mois, je me suis réveillé complètement amnésique. Il y a juste le mot « Taiji » qui résonnait en moi ; encore aujourd’hui je n’arrive pas à en définir la signification exacte.  Donc, j’étais blessé et dépourvu de toute magie. J’étais allongé sur le sol sous une pluie battante. Ne pouvant me résigner à mourir, je me suis relevé et ait continué ma route – toujours tout droit comme j’avais la vague impression que l’on me l’avait enseigné. Je suis tombé sur un des campements de Voyageurs, un groupe qui m’a beaucoup aidé. Là-bas, un érudit m’a renseigné sur ma race et m’a annoncé que j’étais un élémental de feu. Si j’étais surpris de prime abord, je finis par le croire. Il m’encouragea à atteindre la Géhenne car, apparemment, elle me permettrait de retrouver la mémoire. »

Je marquai une pause. C’était beaucoup d’informations d’un coup et je préférais laisser mon interlocutrice tout digérer.

« Suite à cette rencontre, je suis parti vers Aeden. Sur le chemin, j’ai rencontré une rehla qui m’a appris que je m’appelais « Raphael ». J’ai également rencontré d’autres gens –  une fée assez amusante et un elfe bien musclé – mais ce n’est pas très important pour le reste de mon histoire alors je vais passer cet épisode. »

Je déglutis avant de poursuivre.

« Donc, arrivé à Aeden, je suis parti en quête d’un Esprit Elementaire pour m’aider. C’est Dame Alyska qui a répondu à mon appel. D’ailleurs, il semblerait qu’elle veuille de moi comme élève. Enfin soit. Il se trouve qu’elle connaissait l’érudit des Voyageurs et ce dernier lui aurait demandé de prendre soin de moi. Il lui a aussi appris la raison pour laquelle j’étais privé de mes pouvoirs. En fait, lorsque j’ai voulu commander l’air, ce dernier s’est rebellé. Il a réussi à rallier les autres éléments à sa cause – excepté le feu – et ensemble, ils m’ont privé de la magie élémental. Donc, Alyska m’a aidé à me faire pardonner auprès des éléments et j’ai recouvré des bribes de souvenirs. Je sais à présent que je me suis fait attaqué par des bandits juste après avoir été privé de mes pouvoirs et que ces derniers m’ont battu jusqu’à ce que je perde connaissance – ainsi que la mémoire. »

J’avais globalement tout expliqué. J’espère que ce n’était pas trop brouillon.

« Ah oui ! Malgré le fait que j’ai perdu tous mes souvenirs, j’ai toujours rêvé de vous. Chaque jour et chaque instant, vous étiez dans mes songes. Vous êtes si ravissante et si gentille. Chaque fois mon cœur battait au rythme des tambours de l’amour. Est-il faux de croire que je vous aimais ?» lui souris-je.

Nous étions sortis des marais. L’Océan s’étendait à perte de vue. Je ne sais pourquoi mais cette scène me semblait familière. Lysis et l’océan ensemble, m’évoquait le sentiment d’un souvenir perdu. Perdu sur ce rivage, un homme prenait soin de son embarcation. Elle n’était pas très grande mais suffirait à tous nous contenir. L’Esprit Elementaire n’eut pas beaucoup de mal à convaincre l’individu de nous laisser monter à bord. La demoiselle et moi restâmes à terre le temps que notre groupe soit en sécurité. Soudain, des rugissements terrifiants retentirent ; il fallait faire vite si l’on ne voulait pas avoir à combattre !  

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Nous embarquâmes enfin lorsqu’une horde de sorciers apparurent derrière nous.  Ils riaient, affichant un sourire mauvais, tandis qu’ils incantaient une gigantesque boule enflammée. Bien qu’ils soient assez éloignés, je ressentais l’effet de la chaleur sur mon corps. Déjà, je me délectais des flammes dévorant mon être tout entier. Cela faisant tellement longtemps que je n’avais pas communié avec le feu. Tandis que je profitais de cette vision divine, mon amie luttait pour que nous sortions vivant de cet assaut. A nouveau, elle déchaîna les vents, en vain ; elle réussit à peine à faire bouger l’embarcation. Changeant de stratégie, elle dressa un mur défensif pour contrer l’attaque. J’imaginais déjà la puissance dont elle avait besoin ; Lysis me parut tout à coup incroyablement forte.

Une fois hors de danger, l’Esprit Elementaire s’avança vers l’avant du bateau. Elle s’appuyait sur le parapet, sans doute parce qu’elle n’avait plus la force de tenir debout, mais elle était trop fier pour l’avouer devant son peuple. Je ne fis aucune remarque à ce sujet et je l’écoutais répondre à mes questions. J’étais ainsi un enfant qu’elle avait recueilli. Dans ces conditions, il était improbable que l’amour que je ressentais pour elle soit celui de deux âmes sœurs. Elle était ma deuxième mère et c’était sans doute ce lien qui avait persisté malgré les épreuves. Je la contemplais sourire ; elle était vraiment jolie. Un instant, je songeai que j’aurai aimé qu’elle soit ma vraie mère et qu’elle me serre contre elle, juste une fois. Dans ses yeux, je cru déceler une part de tristesse quand elle prononça le nom d’Alyska. Sans doute était-elle attristée d’être ainsi remplacée par la première venue. J’aurai voulu m’excuser mais tout cela n’aurait servi à rien, j’en étais conscient. Je me contentais de la regarder se cacher derrière un radieux sourire.

Le trajet vers le lac de la transparence fut rapide. Je ne savais si mon amie avait utilisé le vent pour accélérer notre voyage mais je la soupçonnais de ne pas être innocente. Nous débarquâmes sur le sol herbeux, aidé par de bienveillants magiciens qui ne cherchaient qu’à nous aider. Malheureusement, certains élémentals voyaient d’un mauvais œil ces êtres pourtant si charmant et des tensions commencèrent à se créer entre certains d’entre eux. Je n’y fis pas réellement attention, trop occupé à écouter Lysis. Elle allait repartir, à nouveau. Mes yeux s’humidifièrent de cette nouvelle. Je venais à peine de la retrouver, pourquoi devions-nous encore nous séparer ? Si elle me proposa de rester, je savais pertinemment que je ne ferais que l’entraver ; je n’étais pas assez fort pour faire quoique ce soit. Cette traversée m’avait déjà coûté beaucoup d’énergie et je n’étais pas capable de refaire un nouveau voyage. De plus, je devais veiller sur Léviathan maintenant. Les larmes sur les joues et la voix tremblotante, je lui répondis.

« Je ne peux pas te suivre. Je ne ferai que te ralentir, je suis déjà tellement… épuisé. Je ne veux pas que tu partes. Je ne veux pas que tu me laisses à nouveau mais je sais que tu as déjà fait ton choix. Tu dois aider ces gens, je le sais. Alors, prend bien soin de toi et reviens moi. Je t’attendrais ici jusqu’à la fin de ces dramatiques évènements… »

J’esquissai un faux sourire et frottait mes larmes du revers de ma main. Pourquoi étais-je si sensible tout à coup ? Je me retournai rapidement et m’enfonçais dans la foule. Derrière moi, une voix féminine retentit.

« Raphael ! »

Je fus frappé par la familiarité de ce ton. Je me retournai et aperçu une jeune femme encapuchonnée.

« Alyssa ? »

Elle s’approcha de moi rapidement et dévoila son doux visage.

« Que fais-tu ici ? Tu es venue te réfugiée aussi ? »

« Exact ! Marxus m’a encouragé à retourner auprès de ma famille pendant ces temps difficiles. »

« Tu es une élément… »

« Non, non ! Je suis une magicienne. Viens, je vais te présenter à mes parents. Tu pourras rester chez nous ! »

La jeune femme m’attrapa le bras et me guida à travers le dédale des rues. J’étais si content de la revoir. Un instant, je songeai que si nous nous rencontrions à nouveau, Marxus n’était sans doute pas innocent. Cet homme était si mystérieux, que cherchait-il vraiment ?

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