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Les Adonis sous la Lanterne

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Partenaire - Astriid Cëlwùn
Intrigue - À cause du pouvoir rattaché à la Chandelle, Érina et Astriid se rencontre autour d'un dîner, il y aura des lanternes, des adonis et plein de mignonnerie.

L'Ange se tenait dans un coin de la tente, détournant le regard, nauséeuse, tenant le plateau entre ses mains avec la désagréable sensation que le métal glacé allait consumer sa chair. Elle avait choisi la voie médicale, mais cela ne voulait pas encore dire être en mesure de constater la souffrance sur autrui et d'y demeurer insensible, au contraire, car Érina l'était probablement trop. Sa voie de généraliste convenait bien à son caractère joyeux, son intérêt pour les autres et ses capacités à mettre en confiance ses patients, petits ou grands, mais dans des cas extrêmes comme celui-ci, elle se devait de servir plus Grande Cause. Requestionner, non pas contre son gré, mais au point de devoir assister à ce genre de spectacle auquel son esprit n'était pas préparé. Qu'il craignait plus que tout. Cette terreur interne la paralysait presque, lui donnant envie de se prostré et de ne plus bouger. Pourquoi était-elle là, maintenant ? Elle n'était qu'un poids, autant sortir et laisser plus compétent s'en ... Le corps amaigri de leur patiente fût de nouveau parcouru de spasmes, se contorsionnant dans des formes étranges, presque impossibles. Chaque soubresaut de ses bras, de ses jambes, de ses mains et ses pieds provoquait une nouvelle saignée, le liquide écarlate suintant de ses plaies, telle la plus sanglante des cascades. À ses yeux, cela demeurait d'autant plus impressionnant, le plus terrifiant, le plus douloureux ... Mais Érina allait bien. C'était l'autre qui souffrait.

Tendant sa main tremblante, pressant un tissu blanc contre sa paume, qui devint rapidement maculé de sang, la doctoresse sans compétences chirurgicales essayait d'assister au mieux, mais ce n'était pas un immense succès. Il y avait d'autres plaintes, aux alentours, mais celle devant leurs yeux était prioritaire, car avec ses paupières closes, dans les limbes de la confusion, on ne savait plus vraiment connaître son état exact. Inconsciente ? Morte ? En la regardant, l'Ange eu envie de vomir. Une odeur de fer mêlée à celle, putride, de ses blessures infectées émanait de son corps sursautant. Érina du user de toutes ses astuces pour résister aux soubresauts de son coeur, clore ses yeux un instant, essayant de se soustraire mentalement à cette situation, à tourner ses pensées autre part pour ne pas rendre son repas frugal sur l'herbe, où s'étalait déjà du liquide carmin séché et d'autres fluides organiques. Son souffle était erratique, mais elle ne voulait pas céder. Respirant par la bouche, elle se retournait vers sa collègue, tout aussi perturbée devant la gravité des blessures et du spectacle macabre s'étalant dans leurs yeux. Est-ce qu'elle ... ?

Personne n'osait le demander.

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La clarté des cieux laissait choir sur les dunes lactescentes des mouvements délicats d'ombres et de lumières, laissant l'Ange muette devant la Beauté de cette Nature enchanteresse. Comment ne pas être touchée devant la grâce lunaire devant ses yeux ? Érina n'aurait néanmoins pas su décrire avec exactitude ce paysage reposant au-dehors de ce bâtiment, richement décoré et dont les lanternes aux murs éclairaient l'extérieur d'un trait qui aurait été peint par Harabella en personne. C'était si doux, calme et reposant, en totale inadéquation avec ce qu'elle avait subi au cours de tout cet accident, qui avait coûté la vie à deux personnes. Est-ce que les Aetheri la remerciait de son dévouement par un rêve aussi saisissant que splendide ? Non, elle se souvenait très clairement d'être rentré chez elle, d'avoir serrer Milumi contre sa poitrine, en pleurant longuement, avant de se décider à envisager de manger quelque chose. Il n'y avait nul coeur, ni appétit, mais ce n'était pas une raison. Et elle avait pris une chandelle dans un tiroir, avant de se retrouver ... là. C'était si merveilleux qu'elle en perdait les sens ! Après s'être légèrement calmée, elle se permis d'ouvrir de nouveau les yeux sur son environnement. Tout semblait avoir été méticuleusement préparé à leur intention, elle et un autre invité.

Qui ? L'Ange ne saurait le dire.

Elle ne connaissait que peu de monde, se consacrant surtout à son travail et sa routine quotidienne ; un ami ne l'aurait pas convié d'une aussi curieuse manière. Vu la richesse de ce restaurant et sa situation, un écrin luxuriant et privatisé à la hauteur d'un conte des mille et une nuits, elle songeait à Mancinia, mais la Marquise de Nylmord était une Humaine et la Magie à l'oeuvre ici était une évidence. Un frisson agréable courut sur chaque parcelle de sa peau, comme si elle se préparait et attendait impatiemment de voir de quoi il en retournait.

— Bon ... Bonsoir, bredouilla-t-elle devant l'inconnue. Je suis Érina, enchantée de faire votre connaissance.

Peut-être était-ce une occasion de voir, dans ce curieux rendez-vous arrangé, une rencontre éclatante.

Post I - 784 mots

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Les Adonis sous la Lanterne

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Avant même de prendre en compte son apparence, Érina détaillait ses gestes, à la recherche du moindre indice indiquant un caractère à l'opposé de ce qu'elle voyait. La Guerre lui avait appris à quel point le Mal était retors, mauvais ... et ne pouvait être sauvé. Au départ, l'Ange avait réellement cru que dans tous les êtres nés sous les sceaux de la méchanceté recelait une part de bonté qui ne demandait qu'à s'exprimer, mais la désillusion n'en avait été que plus violente. Elle avait du se battre pour rester en vie, Lumi lui avait également appris les choses, quant à tout ce qu'avait subi son peuple, même si elle restait ouverte aux étrangers, la Pacifiste comprenait les Extrémistes. Comment ne pas ressentir du ressentiment et de la colère devant la passivité qui avait conduit à ce drame sans nom ? Comment ne pas en vouloir à ceux qui leur avait tourné le dos ? ... Fort heureusement, l'alliance avec les Ygdraë et les Humains s'était reconsolidée avec de nouvelles têtes couronnées, ou des diplomates exceptionnels. L'accident de cet après-midi lui avait aussi rappelé, en lui sautant à la gorge, à quel point la vie était éphémère et fragile. Néanmoins, la position de son interlocutrice lui était rassurante, sa voix aussi et Érina distinguait les caractéristiques physiques des Ygdraë, avant de lui serrer sa main à son tour. Si la doctoresse était moins timide et candide qu'autrefois, c'est en raison d'une partie de son éducation chez les Orines. Le reste dépendait surtout de ses rencontres successives avec Mancinia et Lumi.

Astriid Cëlwùn. Elle papillonna des yeux. Celle qui avait remporté l'Épreuve des Sirènes ? Celle dont Mancinia lui avait parlé concernant sa cadette ? C'était la même Astriid ? Érina se sentait soudainement toute petite, loin d'être écrasée, mais il y avait désormais une sorte d'écart, désormais, comme si elle ne pouvait commettre d'impairs. Elle avait décidément une propension à rencontrer des personnes célèbres et méritantes, comparativement à elle-même. Ce n'était pas qu'elle voulait briller, de toute manière, juste que sa personne semblait les attirer sans que la raison ne soit compréhensible. La serveuse vint leur servir une boisson, l'interrompant dans ses digressions. Cet endroit était décidément plein de surprises, car elle n'avait jamais ni entendu le nom, ni vu une couleur aussi remarquable.

— Je n'avais jamais vu cette boisson auparavant, confessa-t-elle.

Au vu de sa grande qualité et, certainement de son prix, ce ne devait pas être surprenant. Loin d'être méfiante malgré sa téléportation impromptue, l'Ange saisi son verre entre ses doigts et bu une gorgée, par curiosité ; elle fut immédiatement conquise par les notes fruitées.

— C'est délicieux !

L'Ygdraë avait l'air de connaître plus de saveurs que l'Ange, ce qui ne devait pas être étonnant, vu qu'elle n'était pas très au fait de ce qui se réalisait en matière de cuisine. Elle n'était pas un habituée des mondanités et ce qu'elle mangeait habituellement était loin d'être aussi raffiné que ce que cet endroit semblait proposé. Devant la proposition de Jeu d'Astriid, Érina paru quelque peu surprise, ne s'y étant pas attendue, avant de baisser son regard vers le contenant, sur la table, n'étant pas trop encline à l'idée de se saouler, même si la boisson paraissait innocente ... Prenant une légère inspiration, elle acceptât néanmoins, elle compterait ses défaites et, au-delà de dix gorgées, sans doute essayerait-elle de dériver ce projet. Devant la première affirmation de son interlocutrice, Érina sourit, se sentant quelque peu victorieuse au creux de sa poitrine.

— Et non ! J'appartiens au peuple des Ailes Blanches !

Ce n'était pas tellement inscrit sur son visage, parce qu'elle avait été habitué à dissimuler sa nature lors de ses voyages avec Lumi, là où certains Anges avaient eu la notion extrême de trancher leurs ailes pour éviter les trahisons et tout ce que les Vils pourraient leur causer comme tort. Ils avaient été comme les Humains, des pestiférés, des rejetés ... La mélancolie se peignait sur son visage, tandis qu'elle observait de nouveau la jeune femme. Érina eu un sourire, avant de tremper à nouveau ses lèvres dans le liquide violet. Elle ne bu qu'une faible gorgée, pendant que le silence reprenait sa place, le temps qu'elle ne se décide de le rompre, passant alors vu vouvoiement au tutoiement. Ça ne la dérangeait pas, dans son cas.

— Je dirais que tu es une Ygdraë, mais il s'agit sûrement de la triche devant tes oreilles et ta réputation ! Alors, je dirai que ...

Elle fit mine de réfléchir. Il lui fallait trouver une autre affirmation qui ne la mettrait pas trop en péril.

— Vous êtes la marraine de Sif Katzuta.

L'Ange avait un sourire jusqu'aux oreilles, malicieuse. Ce n'était pas un secret d'état et Mancinia n'avait pas manqué de le lui dire, parce qu'elle était visiblement ravie de pouvoir compter sur des membres d'autres races, elle qui n'était qu'une simple Humaine à qui on avait apprit la méfiance des êtres magiques ...

Post II - 875 mots

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Les Adonis sous la Lanterne

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L'Aile Blanche ne pensait pas que l'annonce de son appartenance raciale suscite autant de surprise, mais elle se sentait assez ravie de voir que son aura claire lui correspondait. Sans doute cela se voyait moins en raison du nombre de ses frères et soeurs qui souffraient encore de la Chute où seuls les Soldats semblaient s'être remis, du moins en apparence, tandis que ceux ayant les nuits les plus calmes étaient comme elle ; ils n'avaient pas été présents sur la Terre Blanche pour y voir le massacre. Ils l'avaient appris quelques temps plus tard. Dans son cas, ce n'était qu'en s'arrêtant près d'un petit village qu'elle avait eu vent de la perdition des siens. Trois semaines plus tard. Depuis lors, ils avaient été nombreux à craindre le courroux des Vils, de plus en plus puissants, avec des rumeurs disant que l'Impératrice Blanche avait basculée et qu'elle livrerait les derniers Anges pour préserver les Magiciens. Ce n'était évidemment pas arrivé, ce qui n'avait pas empêché la peur de consumer les esprits au point que certains décident de se trancher les ailes et de vivre comme des Mages Blancs. Avec l'absence de natalité, ils étaient voués à s'éteindre. Dans le silence le plus glacial et dans l'indifférence des autres. À l'image des Humains, sans doute, mais si on les prenait en exemple, alors l'Espoir était possible. Et Érina y croyait. Astriid bu sa gorgée comme son Jeu le stipulait, ce qui ne l'empêchait pas de sourire d'autant plus en voyant la surprise de son affirmation. Ses théories étaient amusantes, même si elle n'avait pas les capacités de lire dans les pensées, ce qui n'empêchait pas son interlocutrice de mettre le doigt sur la vérité.

Érina ne disait rien, laissant l'Ygdraë tenter de déterminer si elle était une Soldate aux côtés de la Nith-Haih, ou non. Cette idée aurait fait rire n'importe qui tant elle était délicate et fragile ; un éternuement et elle était au sol. Ce n'était pas faute de s'être entraînée dans des pratiques artistiques, mais sa force restait déplorable. Elles furent interrompues dans leur échange par l'arrivée des entrées, ce qui ne manquât pas de laisser l'Ange pantoise devant la profusion d'aliments, dont de nombreux auxquels elle ne connaissait rien. S'il n'était plus rationner depuis l'acquisition des Terres d'Iyora, ils avaient connus les galères alimentaires et certaines denrées étaient encore rares dans leurs assiettes. Mancinia lui envoyait parfois certains en gage de leur amitié dont elle partageait les repas avec ses collègues, mais retrouver un niveau de vie comparable d'avant la Chute serait encore long. Et pour se réhabituer, il en serait de même.

— C'est probable ... Je n'y avait jamais réellement prêté attention.

Elle laissa Astriid tenté le goût de la découverte, parce qu'elle n'était pas assez courageuse pour ça, mais celle-ci avait l'air conquise par cette fleur aux pétales bleuies.

— J'aime le sucré aussi, dit-elle en essayant l'aliment en question. Oh, mais ... On dirait de la pâte à sucre !

Sur cette entrefaite terminée, tandis qu'elle repiquait une autre, Astriid reprit là où elles en étaient restées. Comment ne pas rester concentré sur le charisme du Capitaine Katzuta lorsqu'on croisait un Ange ? Si ce n'était pas lui, ce serait le nom d'Isiode Yüerell qui avait tendance à être entendu. Avoir ses deux figures emblématiques comme représentants militaires leur convenait bien, mais là où la réputation du premier ne cessait de croitre, celle du second s'apaisait depuis qu'il se trouvait sur Orhmior, loin de la Reine Blanche avec qui on lui prêtait une relation amoureuse, mais interdite, la Souveraine étant mariée. Neah, lui, était connu de leur population pour ses faits d'armes, ses prestations sportives, son Lien avec la Marquise Leenhardt - et leur histoire d'Amour alimenterait des générations d'Espoir entre Liés - mais, surtout, pour avoir voulu activement sauver leur peuple en Terre Blanche, peu importait les contestations. C'était à lui que l'on devait certainement le succès de la campagne militaire des Sorciers. C'était du moins ce qu'il se disait pour ne pas que les Ailes Blanches ne soient trop reconnaissantes envers les Mages Noirs.

— En effet,, admit-elle avec un sourire. Je suis doctoresse et ...

Les souvenirs de ce matin la tiraillaient soudainement, lui arrachant un sursaut de surprise. Se concentrer sur du positif, Érina. Du positif. Elle prit une inspiration.

— Je connais Mancinia de longue date. Bien avant même qu'elle ne soit Marquise !

L'Humaine avait fait un bond en avant plus que surprenant, plus qu'incontestable au vu de ses investissements au sein de sa race. Ce n'était pas que son amour pour le Capitaine Katzuta qui l'incitait à agir ainsi, mais aussi un attachement certain envers eux, le parallèle de leurs souffrances devait résonner en écho dans son coeur comme celui vécu par les Humains. Au-delà du Lien, c'était une fracture séparant les deux races qu'elle tentait de soigner et Érina devait admettre qu'elle se débrouillait bien.

— En fait, en y réfléchissant ... Bien avant même qu'elle ne soit avec Neah.

S'ils étaient Liés lors de leur première rencontre, ils n'étaient pas encore un couple, c'était arrivé plus tard.

— Ne vous forcez pas à boire, par contre. J'ai un peu triché ... donc !

Ce fût elle qui but une gorgée, en compensation.

Post III - 875 mots

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Les Adonis sous la Lanterne

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L'Aile Blanche eu envie de rire en voyant la mine surprise de l'Ygdraë devant elle. C'est vrai que les Écuyers de l'Aurore étaient devenus connus au sein de leur race respective, puis dans celle de l'autre et même au-delà ... Mancinia était considérée comme la Marquise des Anges et Neah était devenu une Aile Bleue chez les Humains. Comment ne pas voir leur Lien comme celui d'une alliance devenue plus forte après des années d'errance ? La révélation de son âge ne manquât pas non plus d'augmenter l'anxiété de son interlocutrice.

— Oh, non, non, non, vous ne m'avez pas manqué de respect, Astriid, ne vous inquiétez pas ! Vous êtes trop adorable pour ça !

Dans certaines races ... mieux valait ne pas se fier à l'apparence. La Magie pouvait faire des miracles sur des individus vieillissants pour qu'ils conservent la santé, voire la beauté pour les plus aguerris, mais dans les races éternelles, on conservait une allure considérée comme idéale avant de cesser de vieillir. Elle n'avait jamais changée depuis sa sortie du Fleuve des Âmes.

— J'approche doucement de la trentaine, sourit-elle. Je suis plus jeune que Mancinia, mais nous avons le même âge ... Enfin, non. Nous avons bien plus d'années d'écart, elle est mon aînée, mais ... Enfin, comme elle a été absente durant dix ans à cause de la Malédiction des Humains, disons que son âge a été comme suspendu et ... Et que je l'ai rattrapée.

C'était très curieux de parler d'un Humain en ces termes. Figée dans le temps, ainsi avait été leur Malédiction. Cent ans, mille ans auraient pu passer que la Guerre des Dieux se serait conclu la veille pour ces derniers.

— Nous avons presque le même âge désormais. Et comme bon nombre d'Enfants de Sympan depuis lors ... J'ai déjà pu noter qu'elle ne semblait plus vieillir non plus.

L'Imprévisible avait tendance à dire que c'était passager, ou une illusion ... elle ne semblait pas vouloir l'admettre. C'est qu'elle était très attachée à ses racines, même si elle devait mourir dans trois ou quatre décennies, dans la fleur de l'âge. Peut-être valait-il mieux qu'elle survive le plus longtemps ... Pour Neah.

— Mancinia n'a pas tellement changée depuis notre rencontre. Elle est restée spontanée et semble se soucier des gens dans le besoin, au-delà même de ses titres de noblesse. Elle veut toujours aider autrui ... mon peuple en sait quelque chose. Elle a énormément soutenu les rescapés de la Terre Blanche, oeuvrée pour que les tensions entre nous s'amoindrissent. Sans doute est-elle moins impulsive qu'à l'époque ? ... Je suis sûre qu'elle s'entraîne encore au combat, elle est très forte ! Et, heu, elle fait tellement d'efforts ! Elle a voulu apprendre la langue des Orines uniquement pour les accueillir convenablement chez les Humains. Elle veut tellement aider les siens sur leur ouverture au monde, c'est admirable !

Érina discutait de son amie avec des étoiles dans les yeux. L'Humaine lui avait sauvé la vie, en manquant elle-même de connaître un sort funeste ; elle en était consciente, désormais.

— Je l'ai connu par un hasard qui n'était pas très heureux de base, ah ah ... J'avais été enlevée par des marchands d'esclaves. Elle nous a tous sauvés ! Avec quelques Réprouvés qui chassaient ces êtes mauvais de leurs terres, oui, on a eu de la chance qu'elle soit là ! Elle n'a pas cillée devant le danger ! Question d'aptitudes de guerrière, je suppose ? ...

L'Ange ne savait pas ce qu'il s'était passé dans les cales du navire. Sans doute aurait-elle été horrifiée de le découvrir.

— Elle a connu Neah peu de temps après, mais j'imagine qu'ils ne s'aimaient pas encore comme maintenant. En plus, avec la guerre ... et leur séparation à cause de tout ce qu'il s'est passé ensuite ... Je suis heureuse de les voir si amoureux, même sans les liens du mariage, ils ont l'air si bien. Enfin, j'espère qu'ils se marieront ! Ça fait cinq ans depuis les fiançailles, mais ils ont tellement dû gérer d'affaires que cela n'a pas été possible.

Les pauvres, ils devaient tellement avoir envie de s'unir devant les Aetheri.

— Je me demande à quel point Mancinia sera belle dans sa robe de mariée !

Plus enthousiaste que les amis de la fiancée, ça ne devait pas exister. C'est à ce moment que choisi le serveur pour venir retirer leurs plats en leur demandant ce qu'elles en avaient pensées.

— C'était délicieux ! décréta Érina. J'ai adoré chacun de vos plats !

Il était toujours très important de féliciter le cuisinier au travers de ses collègues qui lui transmettrait le message. La suite de sa proposition la laissait confuse. Danser ? Il n'était pas de bon ton de danser entre femmes dans sa race, à moins d'appartenir à la même famille. Elle, cela ne la dérangeait pas, vu le nombre de fois qu'elle avait dansé avec son épouse. Elle ne savait pas exactement comment cela allait chez les Elfes ? Peut-être ne devrait-elle pas s'en soucier, au moins pour cette nuit.

— J'accepte volontiers, dit-elle en prenant délicatement sa main en se redressant. Ne vous inquiétez pas ... Je peux vous apprendre. J'ai quelques notions en danse étrangère.

Son regard se posait un peu partout, sur les changements opérés, qui pourtant ne la dérangeaient pas outre mesure.

— Je n'ai pas l'impression que c'est un rêve. C'est tellement ... net.

Et moins illogique que ce dont elle était habituée.

Post IV - 910 mots

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Les Adonis sous la Lanterne

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Astriid détaillait les choses bien mieux que sa version étriquée. C'est sans doute parce que de nombreux songes de l'Ange s'avéraient êtres des cauchemars ... la nuit n'était pas sa meilleure amie. Elle était souvent assommée de fatigue et avait des nuits sans rêves pour combler entre deux nuits mouvementées. Érina n'avait aucun mal à danser avec une femme qui se calait si bien à son rythme, même si la chose aurait probablement été mal vue chez les Anges si elles n'étaient pas de la même famille.

— Vous avez été au Bal de Lagherta ? demanda-t-elle avec surprise. N'avez-vous pas ... eu peur des Sorciers ?

Si l'esprit d'Érina avait voulu encagé ses souvenirs dans une boîte pour que ses traumatismes restent dans le passé, la mention des Mages Noirs lui semblait douloureuse. Elle avait l'impression de ressentir à nouveau les piqures sur sa peau, la sensation du feu dans sa gorge et tout un tas de choses désagréables. Ça la rendait nauséeuse. Elle ne les aimait pas. C'était sans doute étrange pour une Aile Blanche, d'autant plus qu'elle prônait plus l'entende que la fermeture, mais il lui semblait difficile de faire affaire avec eux, même si son propre Gouvernement s'était allié à eux pour sauver des milliers de vies. Ça la répugnait et les rumeurs sur Elias Salvatore lui faisaient peur. Astriid avait l'air jeune ... heureusement qu'elle n'avait pas été à son goût, ou elle ne serait pas là pour discuter en sa compagnie. Cela lui arrachait un frisson de dégoût. Elle en voulait parfois aux Magiciens de vouloir se rapprocher d'eux, mais essayait de se montrer compréhensive ; peut-être que cela éviterait d'autres victimes.

— Je me le demande ...

Qu'est-ce que Mancinia ne savait pas faire ? L'Ange se voulait sérieuse dans son propos. L'Imprévisible lui avait toujours paru être au-dessus du lot. Au-dessus des autres. Elle avait ce quelque chose de particulier qui vous disait que son Destin ne serait pas le même.

— Je crois malheureusement qu'elle a du devenir polyvalente en raison de sa nature raciale.

Cette époque semblait lointaine, mais elle ne l'était pas aux yeux des Enfants de Sympan dont la vie était semblable à un pissenlit. Les Humains étaient mésestimés. S'ils revenaient sur le devant de la scène, c'est surtout parce que son amie agissait comme une figure de proue aussi curieuse que puissante. Peut-être plus que la Souveraine des Humains. Érina fit un effort de concentration pour écouter Astriid et mémoriser ses demandes pour y répondre ensuite, demeurant muette de surprise à l'idée de rencontrer quelqu'un qui parlait autant qu'elle. Pire ... autant que Mancinia si elle se sentait à l'aise avec quelqu'un. Ce n'était pas pour rien que les deux femmes devaient s'entendre. Elles formaient un beau trio !

— Eh bien ... Nous mélangeons quelque peu les deux coutumes dans le cas d'un Ange et d'un Humain. Il faut dire que les Liens entre nos races sont très anciens et cela fait très longtemps qu'un tel mariage n'a pas eu lieu ! Mancinia et Neah sont vraiment en train de remettre ce dernier sur le droit chemin !  Je ne sais pas trop comment cela se passe du côté des Humains, d'ailleurs, mais chez les Anges ... Il faut dire que le mariage est un acte Sacré et que l'Amour domine toutes les unions. Neah ne se serait jamais mis en couple avec Mancinia s'il ne l'aimait pas sincèrement. Ah, oui ! Ife Ayeye est une Célébration pour les amoureux amoureuse, mais notre mariage se nomme Igbeyawo et celui qui lie un Ange et son Humain, c'est Asopọ Mimọ ! Ainsi, on ne peut pas confondre ... Je ne l'ai jamais fait.

Elle n'en avait jamais eu l'opportunité, mais l'Ange essayait de ne pas se laisser abattre.

— Vous êtes Chocolatière ? Vous avez sûrement entendu parler de cette personne qui a mal préparé sa recette et qui a rendu malade plein de monde à Cael ! Ça a fait du bruit jusque chez nous ! Heureusement, elle a rapidement pris les choses en main en s'en rendant compte. Ah ... Je suis en études de médecine. Je pratique seule certains actes, mais c'est d'ailleurs désolant de voir que j'étudie depuis très longtemps et que Mancinia est terriblement plus doué que moi !

Elle avait démarré au détour d'une envie soudaine, selon son propre aveu. Et depuis plusieurs années, ses patients la portaient sur un piédestal. Une étudiante, non encore diplômée, qui avait parfois plus de talent que ceux qui avaient vingt ans de métier. C'était terrifiant d'être aussi douée.

— Les Magiciens sont adorables. Ils ont sauvés la vie de tant des miens et ils sont certainement les seuls à reconnaître une Humaine en tant que Noble. De toute manière, même nous sommes étrangères, dès leur curiosité passée, ils ne font plus attention au reste.

Érina restait muette devant sa proposition. Le fait qu'elle suive avec aisance Astriid n'avait rien à voir avec les capacités de l'Ygdraë à la guider, son corps réagissant par instinct.

— Je connais l'Isahari. Je ...

Les larmes s'étaient mises à couler toutes seules.

— ... Pardon ! dit-elle en s'arrêtant. Ça me rappelle ma femme.

Elle ne pouvait pas rester là sans quelques explications.

— Personne ne sait que ... C'est une Ygdraë. Chez moi ... les unions interraciales sont rares. Et celles entre femmes sont très mal vues. Depuis qu'elle n'est plus là ... Personne ne sait.

Post V - 900 mots

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Les Adonis sous la Lanterne

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Si l'Ange connaissait la raison de ses tourments et de ses larmes, elle s'en voulait de ne pas agir comme une adulte, de ne pas être forte sur tous les tableaux ; c'était simplement trop dur. À moins que ce ne soit cet endroit qui ne lui permettait pas de dissimuler ses émotions et de demeurer dans son déni, en disant que tout allait bien, alors que son univers s'était fracturé il y a plus de dix ans ... Comme si le surplus émotionnel avait besoin d'être relâché après toutes ces années de non-dits, de doutes et de passivité à demeurer spectatrice de sa propre existence. Suivre le mouvement imposé par son peuple, abandonner ses études chez les Orines, avoir la sensation de ne pas être légitime de souffrir devant le malheur des autres, de ne pas être assez bien pour être l'amie de l'Imprévisible. Comment se sentir mal devant ceux qui avaient endurés plus que vous ? Et, pourtant, Lumi lui manquait atrocement.

— Pardon.

Érina ne cessait de s'excuser. Elle était responsable de gâcher la bonne ambiance qui régnait entre elles. C'était cela dit peu évident de parler d'amour et de voir des couples heureux lorsque le vôtre avait volé en éclats. Pourtant ... le câlin d'Astriid la réconfortait réellement. Les Ygdraë avaient le don d'apaiser les maux de par leur présence.

— Sa Famille ... comportait des Sorciers. Pendant la Guerre, ils ont fait une ... une purge de ce qu'ils considéraient comme impur.

Au départ, sur les terres d'Earudien, elles avaient compris les rumeurs qui venaient directement de la Terre Blanche, comme si le malheur ne se contentait pas de venir une unique fois. Érina avait ainsi encaissé le choc, avant de se mettre en route vers la nouvelle demeure des Anges. Une erreur. C'est ainsi que Lumi avait choisi de l'aider et, en revenant chez les Elfes ... ces derniers l'avaient capturée.

— Je sais qu'elle ... elle n'est pas morte.

Sinon Milumi ne serait plus à ses côtés depuis longtemps. Sa présence la rassurait quant à l'état de santé de son épouse.

— Je le sais.

Sa voix était emplie d'assurance et de détermination, avant que de nouvelles larmes ne coulent.

— ... Mais je n'ai pas assez de force pour la libérer !

Ses mains balayaient ses joues dans l'espoir vain d'interrompre la cascade, alors que des sanglots hachaient ses mots.

— Les Démons et ... les Sorciers ... sont mauvais.

Sa sonnait comme une évidence et, pourtant ...

— Moi ... Je pensais naïvement que l'on ... que l'on pouvait s'entendre, mais ... ce sont tous des monstres.

Elle les détestait. Pour ce que les uns avaient commis contre les siens, pour ce que les autres commettaient à son épouse.

— Lumi. Elle s'appelle Lumi.

Changer d'air, d'endroit, simplement marcher ... cela l'aidait à remettre ses idées en place. Sa crise de larmes semblait se calmer, maintenant qu'elle regardait le tapis céleste depuis la baie vitrée. Mancinia n'avait-elle pas dit que même séparées, les âmes liées observaient le même ciel ?

— Oui ... Tout est si beau, si iréel.

Sa concession s'était suivie d'un sourire, toujours emprunt de tristesse. Pourquoi se sentait-elle le besoin si sérieux de se confier ?

— C'était l'enfant d'un Ange et d'une Humaine.

Ça semblait irréel, mais Neah et Mancinia n'avaient-ils pas eu Sif, après tout ?

— En effet ... elle a été adoptée, mais il n'y avait personne d'autre pour prendre soin d'elle à cette époque. Ces derniers sont décédés au début de son adolescence et ... sa famille a voulu la récupérer. Des Sorciers. Elle a dû réaliser toutes sorte de besognes pour eux, jusqu'à ce que des Elfes d'Earudien viennent la secourir et qu'elle puisse se reconstruire. Elle me parlait souvent de sa meilleure amie, Mircella Rumblee.

Érina n'était pas idiote au point de croire qu'Astriid ignorait cette identité, mais peut-être ne savait-elle pas que les deux femmes avaient même eu un enfant ensemble. C'était secret.

— C'est bien elle, l'ancienne Reine des vôtres. Elle a parcourut le monde pour venir en aide aux Ygdraë opprimés et souffrants. Je ne doute pas qu'elle ait été aimée et continue de l'être, maintenant qu'elle s'applique dans d'autres affaires.

Érina n'avait jamais eu la chance de la voir. C'était une relation que Lumi gardait dans son coeur, bien avant de la connaître. Elles avaient le droit à cet intimité et puis, elle avait confiance en sa fidélité. L'Ange s'était assise sur le lit, sourire retrouvé, en pensant aux bons côtés.

— Je crois que si je m'allonge ... Je m'endors dans l'instant.

Ce qui serait dommage ; elle ne voulait pas quitter Astriid.

Post VI - 822 mots