---

Motivation.

---

Je me réveillai brusquement le souffle coupé par la conclusion d’un rêve odieux qui me hantait toujours lorsque mon esprit s’éteignait. Avec la manche de ma chemise en lin, j’essuyai les gouttes de transpiration qui glissaient le long de mon front. Depuis que Styvan avait disparu, je n’arrivais plus à dormir paisiblement. Sa présence me manquait atrocement. Je soupirai longuement comme pour libérer toutes mes pensées sombres de ma caboche, il ne fallait pas que je me laissasse chuter dans les profondeurs. Heureux comme triste, il fallait que j'avançasse. Alors, à l'aide d'un regain de motivation, je glissai délicatement mon drap en soie afin qu’il ne me touchât plus les jambes. Après m’être relevé et étirer, j’ouvris les rideaux de ma chambre. J'enlevai ma chemise afin de me changer. Mon regard se posa sur une feuille, une enveloppe et un crayon déposés sur mon bureau. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Il n’y avait aucune raison que ces objets fussent ici. Sans m’en rendre compte, je posai mon postérieur nu sur la chaise en bois refroidi par la chaleur inexistante de cette forêt. Ma main profita de la surprise du froid afin d’écrire un début de lettre sans que ma cervelle pût réagir.

“ Bonjour,

J’écris sur ce bout de papier sans attendre quelque chose en retour, je ne sais même pas ce que je fais avec ce crayon de bois. ”

Quelle introduction de débile. J’étais incapable de trouver mes mots. Il fallait que je fisse au plus simple. Je n’étais de toute manière pas capable de faire plus.

“ Je suis un vampire habitant le continent dévasté. Ces derniers jours ont été difficiles pour moi. J’ai perdu un ami. Mon meilleur ami. Sa mère est persuadée qu’il est toujours en vie quelque part. Mais moi, j’ai senti son odeur se dissiper avec la puanteur d’un autre et cela m’inquiète. Je ne sais pas pourquoi je pose tout cela sur ce bout de papier. Peut-être que j’écris, car cela me vide l’esprit.

Mon père a l’air d’avoir abandonné mon éducation depuis la disparition de son neveu et la dépression soudaine de sa sœur. Plus rien n’est comme avant à la maison. Les domestiques ne parlent plus. Les repas sont fades. J’hésite à partir. Je ne sais où. Juste partir loin et essayer de le retrouver. C’est ce qu’il aurait fait à ma place. C’est sûr. Il serait venu me sauver lui. Malgré sa force de moineau, il serait venu. Et moi, je suis là à écrire cette foutue lettre. ”

Heureusement que le ridicule ne tuait pas. Pourquoi j’écrivais tout cela bordel ? Si Styvan me voyait, il me cognerait avec ses petits muscles flasques et je me moquerai de sa frappe de moustique atrophié. Je fracassai mon bureau d’un coup sec de la paume avant de déposer mon front à sa surface. « Bordel Styvan ! » Je ne pus m’empêcher de taper mon crâne contre ce meuble plusieurs fois. Je bloquai mes larmes, je n’avais pas le droit de pleurer alors que je l'avais lâchement abandonné.

“ Que se passera-t-il lorsque j’aurai posé ce crayon ? Aurais-je une réponse ? J’espère. J’aimerais lire votre histoire. Peut-être que cette dernière me réchauffera le cœur et me donnera du courage. Beaucoup de courage.

Passez une excellente journée.

Herman Khanis. Fils de Niklaus Khanis. ”

Il fallait que je fisse quelque chose pour lui. Je ne pouvais pas rester comme cela, à attendre qu’il se fît tuer sans rien faire. Cette lettre aura eu le mérite de me motiver de nouveau. J’allais devoir devenir autonome pour survivre.

---

631 Mots