Biscuits, cannelle et chocolat chaud

Musique

Aäron regarda la tête de gland qui lui faisait un sourire. Quelque chose en lui lui rappelait son grand frère, Kahel. L’Orisha avait également tendance à offrir la vision de ses dents entourées de lèvres insupportablement courbées au monde. Était-ce une sorte de maladie, d’être toujours heureux ? Lui ne devait pas être atteint. « Si tu veux. » Il soupira discrètement et se dirigea vers les placards que lui avait montrés Alcide. Le blondinet ne lui inspirait rien. Il lui semblait aux antipodes de ce qu’il était. Trop de clarté en lui. C’en était désespérant. « Ah ouais ? Intéressant. » Il fournissait des efforts. Il aurait été chez lui, entouré de son père et de son frère, il aurait refusé de participer à cette vaste blague et serait monté s’enfermer dans sa chambre. « Je vois… » Aäron ne connaissait pas du tout Boraür ni même Ësse’Aellun. Il était ce que l’on pouvait appeler inculte. « Moi je vivais dans l’Antre de la Dame, mais la Dame n’était pas là. » se contenta-t-il d’articuler en haussant les épaules et en se disant que ça ne devait de toute façon pas intéresser le blond. Les gens avaient tendance à parler d’eux et à se ficher du reste. « Pas vraiment. Mon père se prend pour le roi des jeux et mon frère est son bouffon. » Il chercha un exemple. « Mon père c’est le genre à t’abandonner nu dans une forêt en pleine nuit après t’avoir vanté son super nouveau jeu qui va t’apprendre pleins de trucs géniaux sur la vie… » Il souffla. « Bref. Rien d’intéressant. Je ne participe plus à ses conneries maintenant. »

Aäron sortit les assiettes et les couverts. « Je ne connais pas Drosera. » dit-il. « Et je n’ai pas envie d’y aller. » Il connaissait de nom et s’imaginait une sorte de château géant. Il était très loin du compte. Ça ne l’intéressait pas. « T’as envie d’aller chez les Magiciens ? » questionna-t-il, toujours dans l’optique de converser un minimum ; le minimum pour qu’il lui fichât la paix ensuite. Il prit la nappe afin de la placer avec Alcide. « Pourquoi ça te rend heureux tout ça ? Je veux dire… c’est toujours la même chose. Pourquoi faut attendre les fêtes pour être heureux et bienveillant ? Franchement, j’ai l’impression que tout le monde est hypocrite. En plus, faut faire semblant d’être heureux sinon ça nique l’ambiance. »

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Biscuits, cannelle et chocolat chaud

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« Ouais. » Aäron n’avait aucune envie de visiter Drosera. Le nom en lui-même ne lui disait rien. Il préférait se tenir loin de ceux de son espèce. Dans l’Antre de la Dame, il avait été bien un temps. Des centaines de domestiques étaient payés rien que pour le servir. Les problèmes avaient commencé lorsque son père lui avait parlé de sa sœur. Quelques mois après, il n’avait plus pu voir son géniteur en peinture, lui et ses exigences tout droit sorties d’il ne savait où. Parfois, il se demandait si c’était un jeu. Avait-il inventé cette sœur, pour le pousser à entreprendre la plus grande chasse au trésor de l’univers ? Finalement, il avait refusé de la chercher et son père avait jugé bon de l’envoyer à Basphel. Pourquoi ? Il n’en savait rien. Il avait simplement été heureux de partir.

La suite fut presque douloureuse pour l’Alfar. Non seulement, Alcide parlait beaucoup mais, en plus, il en était presque convaincant. Il grimaça, comme pour se débarrasser du début de motivation qui commençait à le tirailler. Il détestait ça. Il trouvait que les gens heureux de tout étaient les plus niais. Pour rien au monde il ne voulait devenir comme lui : les yeux pétillants, l’air de vouloir croquer la vie à pleines dents et de profiter de chaque instant. Pour Aäron, Alcide allait forcément être déçu. Lui ne voulait pas l’être. Il préférait se complaire dans son état actuel, plutôt que de risquer de connaître mieux et de tomber de haut. Ainsi, il ne tomberait pas. De plus, il aimait le fait d’être aigri et de cracher sur le bonheur des autres, en attendant que leur bonheur se transformât en malheur. Ce n'était qu'une question de temps. « Nounou Bonbon… » Drôle de nom. « Boraür est une sorte de drogue. » articula-t-il. Certains buvaient pour aller mieux. D’autres devaient habiter là-bas. Et puis… une île qui offrait tout ce qu’on voulait ? C’était trop beau pour être vrai. Le brun décida de classer Alcide dans le groupe des menteurs. « Ouais… » Il n’avait pas d’amis, lui. De plus, pour pouvoir parler de sa peine à autrui, il fallait déjà qu’autrui écoutât. Ce n’était pas si simple. Son père n’écoutait jamais et son frère le barbait avec des paroles niaises qui auraient pu étouffer n’importe quel Ange tellement elles étaient stupides.  

Lorsqu’Alcide lui demanda s’il était malheureux, Aäron fit un arrêt sur image. « Quoi ? » Il espéra presque avoir mal entendu mais c’était bien ce qu’il pensait. Était-il malheureux ? Il n’en savait rien. Comment savait-on qu’on était malheureux ? Après un temps, il décida de hausser les épaules. Qu’est-ce que ça pouvait lui faire de toute façon ? « J’ai fini. » annonça-t-il. « T’as qu’à finir le reste tout seul. Je trouve que ces décorations sont moches. Il y a trop de couleurs. » ajouta l’Alfar, en sortant de la salle à manger en se promettant d'éviter le blond à l'avenir.

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