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 Sans les jambes | Laëth et Adam

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Kaahl Paiberym
~ Sorcier ~ Niveau VI ~

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◈ Parchemins usagés : 4044
◈ YinYanisé(e) le : 25/06/2015
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Kaahl Paiberym
Jeu 04 Nov 2021, 21:17



Sans les jambes


« Elle ne devrait plus tarder. » dis-je, en relevant les yeux vers Adam. Nous étions tous les deux assis de part et d’autre d’un grand bureau. Nous ne parlions pas beaucoup mais, parfois, l’air de rien, ma peau touchait la sienne. J’étais souvent celui qui provoquait les caresses et tous les prétextes étaient bons. En effet, je faisais mine de changer de livre ou j’allais chercher mon verre, un gâteau ou même un crayon, le tout en même temps que lui. La partie angélique du Réprouvé que j’étais s’illustrait ainsi et j’étais étonnement calme. La vulgarité du Bipolaire ne ressortait pas et je ressentais un trop-plein d’amour. J’avais envie qu’il m’embrassât et je cherchais le contact, même le plus minime des frôlements, dans l’unique objectif de le sentir contre moi. De temps en temps, je lui lançais des regards qui parlaient d’eux-mêmes. Ce bureau, entre nous, m’agaçait fortement. Pourtant, je n’avais pas la possibilité de bouger. Cloué à ma chaise, j’essayais de m’habituer. Je pouvais toujours utiliser la magie pour me déplacer mais je préférais éviter. Surtout, lui, était Humain. Il absorbait donc une partie de ma puissance. « Tu peux rester, si tu veux. » murmurai-je, en sachant très bien qu’il ne valait mieux pas.

Officiellement, Adam était à mes côtés pour m’aider dans mes nouvelles fonctions. Ârès et moi avions réussi à me réhabiliter. Vu l’état dans lequel le Nylmord m’avait retrouvé et les aveux du prisonnier, il n’avait plus douté de mon alignement. J’avais réussi à contrôler Aimé le temps nécessaire à l’opération, chose qui n’avait pas été aisée, tant le Magicien était puissant. Sa volonté avait tenté d’écraser la mienne, petit à petit, de la ronger entièrement pour me chasser et reprendre la maîtrise de notre corps et, ce, malgré les nombreux philtres que j’avais avalés au préalable afin que la Couronne ne le fît pas apparaître. De façon générale, malgré mes nombreuses tentatives, je n’arrivais pas à établir un pont entre lui et moi, comme si nous étions deux personnes différentes. Je savais que c’était faux. J’avais conscience du fait qu’il personnifiait mon désir de fuite et s’incarnait comme tel. Surtout, sa clarté m’effrayait, parce qu’elle était ma clarté avant tout. Le fait qu’il fût seul à porter la lueur m’arrangeait peut-être. En tout cas, pour l’heure, nous ne pouvions pas nous unir, pour une raison qui m’échappait mais qui ne me dérangeait moralement pas. Je ne voulais pas affronter le Magicien que je serais consciemment avec la Couronne. Je ne voulais pas y prendre goût. Je ne voulais pas savoir. Je préférais que ce fût lui. Pourtant, il me faudrait affronter la réalité, à un moment ou à un autre.

Alors, après avoir été lavé de tous les soupçons qui pesaient sur moi, et comme je ne pouvais plus marcher et qu’aucune magie n’avait réussi à me soigner, Alistair et moi-même avions établi qu’il serait plus judicieux de ne pas continuer dans la voie des armes. J’avais abandonné l’armée en même temps que l’idée de le tuer et de prendre sa place. Cet homme me serait utile en temps et en heure. De plus, je préférais l’avoir à mes côtés afin d’être en mesure de le surveiller plutôt que d’essayer de l’éliminer en vain. Il était dévoué à la cause des Magiciens et je commençais à prendre conscience de sa valeur. Si je voulais régner sur les Mages dans leur ensemble, il me faudrait des hommes comme lui. Ce que je devais faire, à présent, c’était éliminer Beth ou la forcer à rejoindre mon camp une bonne fois pour toute. En attendant, nous avions convenu que j’enseignerais aux Palais de Coelya. Puisque j’avais fait le tour de la question magique et que ces postes ne manquaient pas de prétendants, j’avais postulé pour un sujet d’enseignement nouveau : la diplomatie. Ma candidature avait été acceptée et j’allais commencer doucement, en tant qu’apprenti d’un professeur plus ancien qui encadrerait mon travail dans un premier temps et validerait mes acquis. Cette acceptation rendait la présence d’Adam à mes côtés d’autant plus pertinente et crédible, même s'il ne faisait plus aucun doute pour le voisinage immédiat que le Déchu et moi étions devenus amis et qu'il m'aidait au quotidien, en plus de me léguer son savoir en diplomatie.

Restait que mes jambes étaient inopérantes et que, pour le moment, je n’avais vu mes enfants qu’une seule fois. Quant à Laëth, je n’étais pas entré dans les détails dans ma lettre la conviant à me rejoindre. J'avais été bref, lui avais donné l'adresse de l'appartement que je louais et lui avais précisé qu'elle pouvait venir quand elle voulait mais qu'il serait préférable de prévenir un peu à l'avance afin que je me préparasse. Elle avait dû entendre des bruits. Les rumeurs circulaient encore et ne se tarissaient pas. Elles disaient qu’un Sorcier m’avait enlevé et avait pris ma place sans que personne ne se doutât de rien, qu’il avait commencé à assassiner mes proches et m’avait gardé prisonnier dans un endroit macabre dans lequel il m’avait torturé durant des jours et des jours. Grâce à Alistair Vaughan, qui avait démasqué l’individu en y risquant sa vie, j’avais pu être sauvé mais n’en était pas ressorti indemne. Du fait de ces bruits, qui n’étaient pas bien éloignés de la version officielle sauf dans la bouche de certains Magiciens fantasques, j’avais reçu pas moins de cent-cinquante paniers garnis et mots de soutien.

Mon index effleura la main d’Adam lorsque j’allai chercher un énième gâteau. Je lui souris. « Tu arrives à avancer ? » Il écrivait son prochain livre. Le voir travailler en face de moi m’avait prouvé que je me passionnais bien plus pour la contemplation de son visage concentré que pour les livres de diplomatie. Lorsque j’étais un Réprouvé, les études ne m’intéressaient pas beaucoup. Et encore, la partie angélique était la plus studieuse de toutes.

869 mots
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Priam et Laëth
~ Ange ~ Niveau III ~

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Priam et Laëth
Ven 05 Nov 2021, 12:21



Je sais plus, je regarderai

Sans les jambes

En trio | Adam, Kaahl & Laëth



Freyja toqua, et la porte s’ouvrit. La stupeur se figea sur ses traits. « Adam ? » Son regard scruta son visage, entre l’incrédulité et l’incompréhension. Elle avait reçu une lettre de la main de Kaahl, pas du Déchu. Que fichait-il ici ? Avait-il osé usurper l’identité du Mage juste pour la faire venir et la voir souffrir ? La colère s’alluma dans ses yeux. Elle le haïssait. Inutile de faire preuve de tous les efforts du monde : il avait décidé de faire de leur Lien un enfer. Il s’amusait de sa détresse comme un enfant cruel rit en arrachant les ailes d’une abeille : avec une désinvolture qu’un cœur sensible ne pouvait pas subir sans ruer. Elle avait envie de hurler, mais elle savait qu’il ne l’écouterait pas. Tous ses cris n’étaient que des couinements de souris aux oreilles d’un chat. D’un geste vif et brutal, elle poussa la porte et entra. « Qu’est-ce que tu fous là ? » Alors, ses yeux se posèrent sur une autre silhouette, assise derrière un bureau. La dureté imprimée sur son faciès se dilua dans un nuage de surprise. « Kaahl ? » Comme si elle ne s’était pas attendue à le trouver là, comme si elle n’était pas venue pour lui. Tour à tour, elle regarda les deux hommes, sans comprendre. Un malaise aigu perça sa gorge, souffla l’air de ses poumons, et rampa jusque dans son ventre. Pas une seconde elle n’avait envisagé cette configuration. D’abord, elle avait pensé trouver son fiancé seul, parce qu’elle envisageait leurs retrouvailles comme un moment privé et personnel. Il n’y a qu’à deux que l’on peut espérer ne pas être condamné à seulement se croiser, s’effleurer et s’arracher l’un à l’autre. Ensuite, bien que les deux hommes se connussent depuis longtemps, elle n’avait jamais eu l’intention de procéder à leur rencontre. Depuis le Lien, ils appartenaient à des univers diamétralement opposés, à deux parties de sa vie qui n’avaient pas à être mêlées, qui ne devaient pas l’être – douce illusion de croire qu’elles pouvaient exister l’une sans l’autre. Enfin, elle croyait que Kaahl l’aurait prévenue de la présence d’une tierce personne. Elle le regarda. Visiblement, non.

L’Ange avait lu sa lettre à son retour d’Arcadia. Elle s’était empressée d’y répondre et de venir. Elle avait entendu parler de sa capture par un Sorcier – Ârès, sans doute ? – et des jours d’enfermement et de torture qu’il avait subis, depuis. Elle avait écouté ceux qui disaient qu’il avait perdu l’usage de ses jambes et qu’aucune magie ne parvenait à le soigner. Elle s’était rappelée de cette autre blessure à la jambe qu’il avait réussie à guérir. C’était temporaire, elle le savait. Quant aux souffrances qui peignaient son âme, elles ne s’estomperaient sans doute pas tout de suite – les vraies, en tout cas. D’après les dires, le Nylmord avait démasqué le fameux Sorcier durant le Bal, et retrouvé le Magicien quelques temps plus tard. Or, Kaahl était présent lors de la réception, puisqu’il était aussi l’Empereur Noir. Ils avaient dansé ensemble et s’étaient promis de se voir au plus vite – une notion toute relative quand on s’appelait Kaahl Paiberym et Laëth Belegad. Que lui était-il véritablement arrivé ? Cette question la préoccupait – bien qu’il ne fût pas certain qu’elle goûtât ne serait-ce qu’un ersatz de la vérité –, mais pas autant que la présence d’Adam Pendragon ne la perturbait. Elle avait l’habitude des manipulations et des mensonges du Mage, toutefois, elle n’avait jamais été la victime d’un tel coup en traître. Elle se sentait trahie, acculée contre un mur, forcée d’affronter une situation dont elle n’avait pas désiré l’orchestration. Tout cela n’était-il qu’une vengeance mesquine à l’égard du poignard qu’elle lui avait, par inadvertance, planté dans le cœur ? Ce serait injuste. Avant d’entrer, elle s’était imaginée, le palpitant battant, prendre son amant dans ses bras, le serrer contre elle, humer son odeur, et effacer tout le manque que leurs absences et leurs douleurs avaient occasionné. Elle s’était répété en boucle ce qu’elle lui dirait, s’était promis de ne pas être trop insistante dans ses questionnements, s’était rassurée sur le déroulement de leur entrevue, s’était concentrée sur sa joie de le revoir et avait essayé d’oublier tout ce qui l’inquiétait. Ses iris verts se plantèrent fermement dans ceux de Kaahl. « Bonjour. Qu’est-ce qu’il fait là ? » demanda-t-elle, sur la défensive. Elle se faisait violence pour ne pas croiser les bras.



Message I – 736 mots

Allez hop, c'est parti Sans les jambes | Laëth et Adam 1628




Sans les jambes | Laëth et Adam 1628 :


Sans les jambes | Laëth et Adam 2289842337 :
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Adam Pendragon
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Adam Pendragon
Ven 05 Nov 2021, 21:45



Sans les jambes | Laëth et Adam 8au1

Sans les jambes


« Je sais bien. »

L’idée de Kaahl était aussi tordue que prodigieuse. J’aurais aimé pouvoir refuser mais j’avais conscience de ce qu’elle signifiait : plus de temps en sa compagnie, la possibilité d’officialiser une certaine proximité aux yeux du monde et, à termes, peut-être même notre amour. Il avait insisté sur le « peut-être. » parce que rien ne pouvait être sûr. Ça dépendrait beaucoup de ma propre relation avec l’Ange.

Même si j’avais accepté, restait qu’il me faisait peur. Je me demandais quelles idées dans le même style tournoyaient dans sa tête, sans qu’il n’ose les formuler tout haut. Il avait dû planifier mon assassinat cent-sept fois, dans le cas où les choses tourneraient mal. Me tuerait-il ? J’aurais aimé être sûr de ce que me dictait mon intuition.

« Arrête de me toucher. »

Il avait beau ne plus pouvoir se servir de ses jambes, moi je pouvais me servir des miennes. Il n’y avait pas qu’elles que je pouvais utiliser et s’il me donnait trop envie, avec sa tête d’Ange, il allait vite déchanter lorsque Laëth arriverait. Je n’étais pas certain qu’elle veuille nous surprendre tous les deux affalés sur le bureau et à moitié nus.

« Non, je ne veux pas tenir la chandelle. »

J’avais noté dans sa voix quelque chose de semblable à de l’espoir. J’étais désolé de lui briser ses rêves mais il me semblait improbable que l’on puisse se tenir tous les trois dans la même pièce sans aucun dérapement. L’épisode sur Lagherta avait failli mal se terminer, alors même qu’il était Aimé. Pourtant, c’était bien ce qu’il voulait, à me garder près de lui : provoquer le contact. Je ne savais pas si l’idée était folle ou intelligente.

« Arrête je te dis. »

Comme une menace, je lui attrapai les doigts et les caressai.

« Si on nous surprend, ce sera ta faute. »

Je souris et le lâchai, pour reprendre mon écriture. Il m’avait fait perdre mes idées, avec ses bêtises.

« Non je n’y arrive pas, parce que tu n’arrêtes pas de me parler et de me toucher. »

Il était à la fois pénible et excitant. Sa partie angélique me donnait envie de lui faire des cochonneries juste pour déchoir ce côté trop pur et ternir son cœur jusqu’à ce qu’il s’équilibre. J’aimais bien lorsqu’il correspondait plus aux standards des Réprouvés, lorsqu’il se montrait rustre et décidé. La partie angélique était mignonne et je l’aimais aussi, surtout lorsque j’étais Humain, mais mon côté Déchu n’approuvait pas tellement.

Le bruit d’un poing sur la porte retentit. Je passai ma langue sur mes lèvres, dans un geste qui dissimulait mal mes sentiments. Elle avait beau être mon Ange Gardien, j’aurais aimé rester plus longtemps avec lui.

Je me levai et allai ouvrir. Bien sûr, il ne l’avait pas prévenue. Elle n’aurait pas fait une tronche pareille dans le cas contraire.

« Bonjour à toi aussi. »

Je le dis en m’appuyant contre l’embrasure, les bras croisés sur mon torse. Cette femme était infernale. Il me suffisait de penser qu’il me faudrait être gentil avec elle pour avoir envie de me rebiffer.

Je l’observai, elle et ses émotions, elle et ses doutes. Elle allait lui demander des comptes. N’importe qui de normal l’aurait fait. Il nous avait placé tous les deux dans une situation périlleuse. La différence entre elle et moi, et c’était toujours comme ça, c’est que j’avais accepté celle-ci.

Comme si elle ne l’avait jamais interrogé, je me déplaçai dans la pièce pour revenir au bureau. Je fermai le cahier sur lequel j’étais précédemment en train d’écrire et le rangeai sur le côté. Je pris un gâteau et croquai dedans avant de poser les yeux sur Kaahl.

« Je vais vous laisser. Je reviendrai demain pour qu’on continue ce qu’on était en train de faire. Si tu as l’occasion de lire mon texte, ça me ferait plaisir d’avoir un retour. »

Ma voix était calme, mesurée. Je lui parlais comme à un collègue assez proche ou comme à un ami. Il n’y avait pas de barrière pronominale entre nous, juste ce tutoiement qui marquait nos rapports : la caresse de la familiarité.

« Si jamais tu as besoin de quelque chose, n’hésite pas. Je ne pense pas rentrer à Avalon ce soir. »

Je souris.

« J’ai l’intention de profiter des Magiciennes. »

Je chipai un autre gâteau et tournai les yeux vers Laëth.

« Tu devrais goûter, ils sont bons. »

Je pris mon sac et leur fis un geste de la main en signe d’au revoir avant de tourner les talons.

« À plus ! »



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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Sam 06 Nov 2021, 09:23



Sans les jambes


Un sourire s’invita à la commissure de mes lèvres. J’aimais beaucoup l’entendre protester. Lorsqu’il m’ordonnait de ne pas le toucher, je savais que c’était parce que mes caresses l’excitaient et le rendaient instable. J’aurais pu continuer, et me venger pour toutes les fois où je l’avais presque supplié de se dépêcher, mais il avait raison. Ce n’était pas le moment. Quant au reste, je savais qu’il était préférable qu’il ne restât pas. Déjà parce que ce serait périlleux mais aussi parce que je n’étais pas certain d’être aussi doué pour l’ignorer en tant que Réprouvé qu’en tant que Sorcier. Il y avait cette pulsion, à l’intérieur de moi, cette pulsion qui avait envie de lui et envie de rétablir un semblant de vérité. Je n’étais pas sûr de pouvoir mentir. J’avais même plutôt envie de regarder l’Ange et de lui dire que je me tapais Adam, que je l’aimais, que je n’avais pas l’intention que les choses changeassent et qu’elle devrait s’en accommoder. La dureté du Démon se heurtait pourtant à la sensibilité de l’Ange et mon estomac était comme tiraillé. Était-ce si grave d’aimer deux personnes ? Était-ce si grave de coucher avec d’autres qu’elle ? Dans notre situation, elle savait déjà que je ne pouvais pas être fidèle. Alors quoi ? Préférait-elle m’imaginer à détester chacun de mes rapports ? À me faire rouler dessus par mes obligations ? Plutôt que d’envisager que je pusse prendre du plaisir, parfois, avec un autre ? La partie démoniaque ricanait. Ça devrait la rassurer, ma capacité à aimer plusieurs personnes. Je comprenais pourtant la trahison. Il n’avait jamais été question de lui. Il n’avait jamais été question non plus d’aimer qui que ce fût. Quant à Adam, je savais aussi que la situation lui était difficile.

Lorsque l’Humain alla ouvrir, je sentis une forme d’appréhension. J’avais l’impression que je n’avais pas vu Laëth depuis une éternité, ce qui était en partie faux puisque Aimé l’avait croisée. J’inspirai, posai ma tasse et croisai mes deux mains sur le bureau. J’étais heureux de la voir mais j’avais du mal à l’exprimer. Mes craintes paralysaient mon sourire. Je n’avais pas envie d’une rencontre compliquée, pendant laquelle elle me demanderait des comptes, durant laquelle je subirais un véritable interrogatoire. Je désirais que ce fût simple, chose que je ne pouvais pas exiger puisque j’étais celui qui la poussait à se questionner. J’avais toujours été lâche. Je n’aimais pas les confrontations, pas lorsque je ne les avais pas patiemment orchestrées. Elle n’avait de prévisible que l’éruption incessante de ses émotions. « J’essaierai. » répondis-je à Adam, en jetant un coup d’œil au carnet. « Merci. » murmurai-je alors que la suite de ses dires se présentait. Il se foutait de moi, là ? J’émis une sorte de rire crispé qui pouvait parfaitement passer pour une non-appréciation de ses mœurs. J’allais le tuer. « Rentre bien. » lui lançai-je avant qu’il ne partît.

Maintenant, nous étions seuls, elle et moi. Je détestais cette situation. J’allais devoir m’excuser, expliquer, répondre. « Adam est là pour m’aider. » articulai-je enfin, pour ne pas laisser sa question en suspend plus longtemps. « Enfin… » Je souris fadement. « C’est ce qui justifie sa présence ici pour les autres. Tu te doutes bien que je n’ai pas besoin de conseils en diplomatie ou, du moins, pas au niveau que l’on enseigne aux Palais de Coelya. » Peut-être avais-je, cependant, besoin de cours de diplomatie amoureuse. Je savais que je ne disais pas ce qu’il fallait mais je n’en avais pas envie. C’était comme si le Bipolaire avait un trop gros sens de la contradiction pour donner au Sorcier ce qu’il désirait. Même s’il avait envi de chopper Laëth et de la retourner sur le bureau, il s’y refusait. Mon corps, de toute façon, n’aurait pas pu suivre ses envies, mes envies. Je m’appuyai contre le dossier. « La vérité c’est que j’avais envie de le côtoyer et de me rapprocher de lui. » avouai-je. « Puisqu’il est ton Humain, je n’ai pas l’intention de vous laisser vivre tous les deux dans votre coin et je trouve ça plus sain si lui et moi nous voyons. » Mon index caressait les pages du livre qui se trouvait ouvert, devant moi. « Avis qu’il partage aussi. » Je tapotai le papier. « Il m’aide donc officiellement pour la diplomatie et je relis ce qu’il écrit. Il m’aide aussi pour le reste. » Je restai quelques secondes muet puis continuai. « Il m’a dit que vous vous étiez disputés pendant le bal ? » Je soupirai. « J’aurais aimé y être avec toi, même si je ne t’aurais très certainement pas laissée danser avec un autre, que ce soit lui ou pas. » La pointe de possessivité dans ma voix parlait d’elle-même. J'avais réfléchi et je n'avais pas l'intention de laisser mon père s'en tirer si facilement. Il aurait pu jouer l'indifférence : l'indifférence due à sa fonction. Ce n'était pas ce qu'il avait fait.

823 mots
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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Sam 06 Nov 2021, 11:22



Je sais plus, je regarderai

Sans les jambes

En duo | Kaahl & Laëth



Pour une fois, cet imbécile de Déchu utilisa son cerveau. Les laisser, c’était sans doute la meilleure idée que sa cervelle atrophiée pût avoir. L’Ange fournit des efforts pour ne pas le regarder, parce qu’elle savait qu’il aurait pu la provoquer d’un seul coup d’œil. Elle fixait le bois vernis du bureau. Elle écoutait, et cela l’agaçait suffisamment. Son apparente proximité avec Kaahl, son calme, sa désinvolture, sa perversité, tout l’énervait. Finalement, elle croisa les bras. « Au revoir. » lâcha-t-elle sèchement tandis qu’il prenait congé. Dès que la porte se referma, elle releva les yeux vers le Mage. L’ire et le reproche y siégeaient toujours mais, comme si le souffle du mouvement de la porte avait pu les bousculer un peu, une forme de peine tentait de se faire une place – un mélange de blessure, de mélancolie et de soulagement. Le départ d’Adam avait dissout les tensions qui gainaient son corps et son cœur. Pas une seule seconde elle ne l’interrompit, malgré les remous sauvages de ses émotions. Qu’est-ce qu’il croyait ? Qu’elle comptait partir sur une île déserte pour vivre une idylle avec son Humain ? Il se fourrait le doigt dans l’œil jusqu’à ce qu’il lui ressorte par les fesses, comme on disait par chez elle – de manière plus crue et vulgaire, cependant. Et Adam, partager cet avis ? Adam, qui s’évertuait à lui pourrir la vie à chaque fois qu’ils se croisaient ? Elle fronça les sourcils, plissa les yeux, et joua avec sa mâchoire. Ne voyait-il pas ce qu’il essayait de faire ? Après des semaines passées à traquer la malhonnêteté, la tromperie et la duplicité, elle ne pouvait qu’assimiler l’Aile Noire à ces truands d’Hébé. Il se rapprochait de lui, il lui parlait de leur Lien, de leurs disputes, de leurs difficultés, de tout ce qu’elle, sa fiancée, aurait voulu et du lui dire elle-même. Il s’immisçait là où il n’avait pas le droit d’être, comme un tison brûlant inséré entre deux côtes. Comment Kaahl pouvait-il se montrer aussi aveugle ? Elle secoua la tête, prête à rétorquer, lorsque sa dernière phrase l’interloqua. « Tu as bien essayé sous les traits d’Elias, mais je crois que quelqu’un me jalousait un peu trop. » La vérité était plutôt inverse, et il le savait sans doute. Peu importait. Elle ne voulait pas parler d’Aimé. Elle ne voulait pas même y penser.

Durant une fraction de seconde, l’Ange le dévisagea. Puis, elle baissa la tête et soupira, avant de se laisser tomber dans le fauteuil qu’Adam occupait plus tôt. Sa colère était retombée, comme si penser au Magicien convoquait les bienfaits de sa magie. Et puis, à quoi bon laisser éclater son ire ? Il se serait muré dans son impassibilité implacable, elle aurait craché le feu qui consumait ses poumons, ils ne se seraient pas compris, et elle serait repartie en traînant son palpitant brisé et sanglant derrière elle. Ce n’était pas ce qu’elle désirait : c’était ce qu’elle fuyait depuis des mois. « J’aurais aimé que tu me préviennes de sa présence. » dit-elle, les yeux toujours baissés. « Je pensais que je te trouverai seul. Effectivement, ça ne se passe pas bien avec Adam, et je n’ai pas envie de le voir. Et je crois que c’est un peu blessant – en plus d’être étrange – de constater que tu passes plus de temps avec lui qu’avec moi… » Ça l’était totalement. Son index décrivait des courbes imaginaires sur le bois sombre du bureau. « Je n’ai aucune envie qu’on vive tous les deux dans notre coin, lui non plus, et ça n’arrivera pas. Et je n’ai pas envie non plus de devoir l’impliquer à ce point dans ma vie et de te l’imposer plus que… plus que nécessaire. » La culpabilité revint se lover dans les cavités de son cœur. « Je ne crois pas que ce soient les mêmes raisons que toi qui le motivent à passer du temps en ta compagnie. » Elle se redressa et cala son dos contre le dossier du siège. « Il me déteste et dès que nous nous voyons, il passe son temps à me pourrir la vie, même quand j’essaie de faire un pas vers lui. » L’Ailée s’interrompit, avec l’impression d’avoir dit quelque chose d’extrêmement blessant. « Pour apaiser un peu les choses, pas pour… » Elle balaya sa phrase d’un revers de la main, en secouant la tête. « On s’est disputé, au bal, parce qu’on dansait ensemble, que j’ai essayé d’établir un dialogue, et qu’il m’a envoyée promener comme une malpropre. Je me suis énervée. » Elle haussa les épaules. « De toute façon, c’était une erreur, et on ferait simplement mieux de se voir le moins souvent possible. Je croyais qu’on était bien d’accord à ce sujet. » Une grimace déforma ses traits. « Mais s’il passe son temps avec toi, en tant qu’Humain… » Elle hésita un peu, se tortilla sur sa chaise, replaça ses cheveux derrière son oreille. « Tu ne crois pas qu’il puisse faire ça juste pour me ruiner l’existence ? Tu crois qu’il aurait à ce point et si vite changé d’avis ? » Ses dents coururent sur sa lèvre inférieure. « C’est suffisamment compliqué comme ça… » L’Aile d’Acier ferma les paupières. Elle pensait au Lien en lui-même, aux rumeurs, à Ârès. Elle repensa au bal. « Si tu étais venu en tant que Kaahl… » Elle soupira, puis rouvrit les yeux. « Ça ne sert à rien de refaire l’histoire. Tu étais tenu à ton rôle d’Empereur Noir, et ça n’aurait pas pu être autrement. » Brièvement, elle songea que si quelqu’un essayait de lire dans son esprit, il aurait l’impression qu’elle ne côtoyait que très peu Kaahl, ou leurs rencontres lui paraîtrait étranges. Comme des scènes recousues maladroitement les unes aux autres, dont des lambeaux avaient été dispersés dans les trous noirs de la mémoire. Sa main s’était déplacée plus loin sur la surface lisse. Elle la regarda, si proche de celle du Mage. Elle tendit ses doigts vers lui et, pareille à une adolescente hésitante, effleura délicatement sa peau. Ses iris verts remontèrent jusqu’aux siens.



Message II – 1021 mots




Sans les jambes | Laëth et Adam 1628 :


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Kaahl Paiberym
Sam 06 Nov 2021, 12:43



Sans les jambes


Je ne savais pas s’il me fallait lui en vouloir de ne pas avoir vu. À quel point mon père pouvait-il la tromper ? À quel point en avait-il envie ? J’étais peut-être injuste. J’avais conscience des implications de son acte et, surtout, de ce qui aurait découlé de l’absence d’Elias au bal. Pourtant, je ne pouvais m’empêcher d’être suspicieux. Avait-elle réellement cru qu’il s’agissait de moi ou était-ce ce qu’elle avait désiré croire ? Pour l’heure, je gardai le silence, ravalant mes ressentiments, mais je n’en pensais pas moins. Les souvenirs de Devaraj ne m’aidaient pas à me montrer confiant.

« Excuse-moi, je ne pensais pas que ce serait aussi problématique. Je n’aime pas être seul ces derniers temps et nous avions convenu qu’il s’en irait dès que tu arriverais. » Je croisai de nouveau mes doigts entre eux. « Ce n’est pas la même chose. Nos vies sont ainsi faites que nous ne pouvons pas passer beaucoup de temps ensemble. Lui est disponible en ce moment pour ce qui concerne mon futur travail, c’est tout. Forcément, nous discutons de choses et d’autres à côté. Ce serait idiot de ne pas le faire et, au-delà de cette histoire de Lien entre vous, je l’apprécie vraiment. » Je passai ma main sur mon front et soupirai face à ses remarques sur les intentions d’Adam. « Tu crois vraiment, sincèrement, que s’il était à mes côtés avec de mauvaises intentions, je ne le remarquerais pas ? » Je passai mon ongle sur le bord des pages du livre et levai les yeux vers elle. « C’est difficile à te le demander mais… Est-ce que tu penses vraiment qu’il n’a que ça à faire de te pourrir la vie, même quand tu n’es pas là ? Qu’il est si vil qu’il serait capable d’élaborer un plan qui consisterait… » Mon dos rejoignit le dossier. « Je ne vois même pas en quoi. Tu le surestimes. Il n'est pas si malin et c’est moi qui ai eu l’idée et ai parlé d’Adam au Nylmord lorsque nous avons discuté de ma reconversion. Comme il y avait ce Lien entre vous, j’ai immédiatement pensé à lui, en me disant que ce serait mieux de le côtoyer. Il a accepté ma demande et, très sincèrement, je n’ai pas l’intention de faire comme s’il n’existait pas. Que vous vous battiez ou non, ça ne change rien. Vous vous battez maintenant, d’accord, mais demain ? » Ma paume s’enroula autour de la tasse. Le thé était bien trop tiède pour que je ne le busse, à présent. « Le seul qui agit à desseins ici, c’est moi. Et, finalement, il s’avère que je l’apprécie assez pour me sentir à l’aise en sa présence. Il n’a rien dit ou fait de déplacé et les histoires qu'il écrit sont plaisantes à lire, quoi qu'un peu osées parfois. » Je soupirai. « Écoute… Je sais que c’est compliqué mais je ne te demande pas d’être là quand il est présent. Je veux juste l’avoir près de moi parce que c’est plus facile pour moi d’être proche de lui qu’éloigné. Je préfère être sûr de… Je ne sais pas, juste être sûr que ça se passera bien. » Le fait que mes dires fussent en très grande partie vrais maintenait l’Ange en place. Le fait qu’ils fussent en partie formulés pour arriver exactement où je le souhaitais contentait le Démon. « Surtout que lorsque la nouvelle de votre Lien va se répandre davantage, les choses vont devenir complexes. Certains parlent déjà à cause de Mirabelle Vaughan. Et encore… ils ne savent pas pour sa grossesse. » Personne ne le saurait parce que j’allais m’occuper d’elle. Il y avait une limite à ce que je pouvais supporter et cette femme avait trop joué avec mes nerfs. « Je vais régler le problème mais je ne peux pas régler le problème d’Adam. Il me semble plus acceptable de lui faire une place dans ma vie, en tant que… futur époux de sa Gardienne, plutôt que de l’ignorer ou de le rejeter. De toute façon, soit je le tue maintenant, soit j’essaye de l’accepter. Mais je ne peux pas rester dans une sorte d’entre deux où l’idée consisterait à faire comme s’il n’existait pas et à attendre le moment où tu l’aimeras ou bien celui où tu m’annonceras que lui et toi avaient couché ensemble. »

Je caressai ses doigts un court instant avant de retirer ma main. « Laëth… » Je m’arrêtai, mon pouce et mon index rejoignant mes tempes. Était-ce une si bonne idée de le lui dire ? Oui. Parce que je n’aimais pas ce qu’il se passait avec mon père. La tête penchée sur le côté, les doigts sur mon front, je me mis à la fixer. « Je n’étais pas au bal. » Et je ne mentais pas parce que, Aimé, jusqu’à nouvel ordre, n’était pas moi et n’avait pas besoin de moi pour vivre. Parfois, j’arrivais à me frayer un chemin à l’intérieur de sa personnalité mais c’était flou. Je me rappelais ce qu’il avait vécu mais n’étais pas acteur de cette vie-là. « Je n’étais pas en capacité de m’y rendre. J’ai demandé que mon père soit contacté en cas d’urgence. » Mon visage trahissait mon agacement. Le Réprouvé, ni l’Ange ni le Démon mais bien le Réprouvé, commençait à se réveiller et le désir de casser le gueule de Jun avec. Il aurait dû l'ignorer, refuser de lui parler de choses privées.

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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Sam 06 Nov 2021, 15:29



Je sais plus, je regarderai

Sans les jambes

En duo | Kaahl & Laëth



Peut-être avait-elle simplement du mal avec l’idée qu’il acceptât la situation mieux qu’elle ? Peut-être aurait-elle voulu le voir tempêter, crier, frapper face à cette trahison ? Peut-être aurait-elle aimé voir en lui le reflet de ses propres émotions ? Peut-être s’en serait-elle sentie soulagée ? Mais le temps avait coulé, et si une colère intense s’était emparé de Kaahl, elle ne la verrait jamais. Pour lui, c’était une autre époque. Pourtant, c’était logique. Bien sûr, le Lien interférait avec sa vie. Il continuerait de l’altérer. Mais il savait qu’elle l’aimait, qu’elle voulait l’épouser et qu’elle resterait, aussi longtemps que ses sentiments perdureraient, et peut-être même encore après. Le Lien ne modifiait en rien les principes et les raisons de son existence propre. C’était à Freyja que tout cela incombait. Et là où il avait toujours semblé s’accommoder de la potentielle fin de leur relation comme on se fait au changement de saison, elle la percevait comme un monstre prêt à surgir et à tout détruire sur son passage. Elle avait peur de le perdre, et désormais, elle avait peur de s’en détourner. Peut-être lui en voulait-elle d’apprécier si facilement Adam ? C’était si difficile, pour elle. Plus ils se voyaient, plus le Déchu lui apprenait à le détester, parfois par sa simple présence. Plus elle le détestait, plus le mal semblait ronger chaque pore de sa peau. Elle détourna le regard. Ses ressentis l’aveuglaient. Son ego aussi, sans doute. Peut-être même la peur : s’ils se haïssaient suffisamment fort, il n’y aurait pas de place pour le reste.

Elle jeta un coup d’œil à la couverture du livre. Elle était encore vierge. Si elle ne l’avait pas été, elle aurait découvert qu’elle connaissait le nom inscrit dessus. Il se trouvait sur la cote de certains ouvrages de sa bibliothèque. « Et quand est-ce qu’il n’est pas présent ? » souffla-t-elle. Et s’il était toujours là quand ils pouvaient se voir, comme aujourd’hui ? Elle refusait de sacrifier le temps dont elle disposait avec Kaahl à cause de lui. « Quoi ? » Son regard s’était soudainement allumé, à la manière d’un bûcher qui s’embrase tout à coup. « Elle est enceinte ? » s’étrangla-t-elle. Des images défilèrent dans sa tête. Ses traits se crispèrent et son poing se serra autour du tissu de son pantalon. Ârès. Ça ne pouvait pas être Kaahl alors c’était forcément lui. Elle allait le tuer. Elle allait le retrouver, lui arracher la tête, la planter au bout d’une pique et la brandir dans tout Vervallée. Elle ferait la même chose avec celle de Mirabelle. Elle n’avait rien dit, elle ne s’était pas interposée, elle avait réfréné sa jalousie mal placée... et cette femme couchait avec celui qu’elle croyait être son fiancé ? Elle en tombait enceinte ? Une envie sourde de pleurer lui tordit la gorge. Tous ces gens qui piétinaient sa vie sans une ombre de remords, tous ces gens qui se dressaient contre ce qui est Juste et Bien pour satisfaire leurs plaisirs mesquins... Elle eut envie de lui demander ce qu’il comptait faire, mais il revint immédiatement à Adam, et le visage de l’Ange se ferma de nouveau. Ses paroles étaient cruelles. Elles avaient le tranchant de la sentence qui s’abat et la renvoyaient à une condamnation à laquelle elle ne pourrait, apparemment, jamais échapper : elle finirait par aimer le Déchu, jusque dans l’étreinte de leurs corps. Une nausée chatouilla son nez. Elle le savait, parce que c’était toujours ainsi que ces histoires finissaient, mais elle n’était pas prête à accepter cette réalité. Elle préférait mille fois se débattre contre l’inéluctable plutôt que de capituler devant l’inévitable. C’était stupide, mais c’était ce qui lui permettait de tenir. Jusqu’à ce qu’elle soit prête à affronter ce qui l’attendait, ou jusqu’à ce que tout s’écroule dans un grand fracas.

La caresse de Kaahl la fit tressaillir. Ça faisait longtemps. Trop longtemps. Puis sa voix l’arracha à ce flot de souvenirs et d’envies, si doucement que c’en fut brusque. Elle le regarda, l’œil inquiet. Dès qu’il parla, elle se figea. Ses mains revinrent brutalement vers elle. « Ne dis pas n’importe quoi... » murmura-t-elle. Ce n’étaient pas des mensonges et elle le savait. Il n’avait aucun intérêt à mentir à ce sujet. Aucun. Par le passé, la relation entre Jun et Freyja l’avait déjà intrigué, et elle avait senti qu’il avait peur de ce qu’il pouvait se passer. Dans ses iris, elle voyait bien son agacement. Désormais, elle comprenait ses craintes. Un long silence s’étendit. Elle eut tout le temps de savourer les gouttes amères que la tromperie d’Ezechyel déposait sur sa langue. De ressasser tout ce qu’ils s’étaient dit, ce qu’ils s’étaient promis, ce qu’ils s’étaient échangé. De repenser au désir qu’il avait éveillé en elle, à la façon dont elle avait pu le regarder, les yeux baignés d’amour. À cet instant, ils étaient baignés de larmes. « Je ne savais pas. » finit-elle par articuler. Comment avait-elle pu se laisser berner ? Comment aurait-elle pu ne pas s’y méprendre ? Y avait-il des failles à déceler, dans l’imitation qu’un Dieu fait d’un mortel ? Freyja appuya ses deux coudes sur le bureau et prit son visage entre ses mains. Elle le détestait, lui aussi. Elle lui avait accordé sa confiance, et il l’avait ruinée pour deux pauvres danses. « Il ne m’a rien dit. » Comme s’il lui devait la vérité. Il la lui devait. Au moins sur ça. Et à lui aussi, à son fils. Elle releva le visage vers Kaahl, les cornées rougies mais les joues sèches. « J’étais sûre que c’était toi… Je suis désolée. » Il n’y avait pas grand-chose à dire de plus. Elle hésita. « Tu étais où ? » Elle croyait savoir.



Message III – 958 mots




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Kaahl Paiberym
Sam 06 Nov 2021, 17:58



Sans les jambes


« Il ne sera pas toujours là, évidemment. Ça dépendra aussi de ses missions et de sa volonté. En plus… » Je m’interrompis et n’allai pas au bout de ma phrase. Je n’avais pas le désir d’en parler tout de suite, sans arriver à en déterminer la cause. Était-ce la fierté du Réprouvé qui entrait en jeu ou y avait-il dans mon mutisme quelque chose de bien plus masculin ? Étrangement, je n’avais eu aucun mal à aborder la question avec Adam et je ne ressentais aucune diminution en sa présence. Ça m’amusait même de le titiller. Si j’y pensais avec Laëth, c’était différent, parce que je ne pourrais juste… pas. « Je n’ai jamais douté des déclarations d’Ârès à ce sujet mais ça commence à se voir maintenant. » Et c’était la raison pour laquelle il me fallait m’occuper du problème rapidement. Si Beth refusait de mener son plan initial à bien, je devrais remplacer Mirabelle par une Sorcière assez compétente pour jouer son rôle. L’enfant n’était pas le mien mais je n’avais pas l’intention de le tuer. Quant à la mère, je n’avais pas encore tranché. J’étais certain de pouvoir faire basculer son cœur dans la noirceur aisément mais, même ténébreuse, elle resterait un problème. Elle était trop intelligente pour son propre bien. Du moins, le souci perdurerait tant qu’elle se dresserait contre moi. Mon double n’avait pas dû lui dire qui j’étais. Elle allait le découvrir. J’aviserais ensuite mais, ce qui était sûr, c’est qu’elle ne rejoindrait jamais plus les terres magiciennes, pas après avoir sciemment pactisé avec lui dans l’objectif de me nuire. « Le problème sera vite réglé. » répétai-je, comme pour rassurer l’Ange.

Je détournai les yeux un instant. Je n’aurais peut-être pas dû. Ma révélation était purement sentimentale. Elle ne s’inscrivait dans aucune stratégie. Pire, elle me desservait, en un sens. Si elle avait pensé que j’avais été Elias, des doutes sur autre chose n’auraient jamais pu être envisagés et formulés. C’était une forme de colère et d’injustice qui m’avaient forcé à parler. Le Réprouvé contrôlait moins bien ses pulsions, surtout celles qui provenaient tout droit de ses tripes. La jalousie y était pour quelque chose. Je le savais très bien. Je doutais de la fausseté de mes intuitions mais, malheureusement, je ne pouvais pas faire surveiller mon père. J’étais obligé d’avancer en aveugle, de faire des hypothèses. Elles me rendaient malade. Je n’avais aucun contrôle sur lui, sur elle lorsqu’elle était à ses côtés et sur ce qu’ils faisaient ensemble. Ils se connaissaient, j’en avais conscience, mais aucun de mes espions ne m’avaient rien rapporté de faits particuliers. L’absence de preuves en elle-même en était une. Ce qu’il ne voulait pas que je susse, il me le cachait, de la même manière que je faisais disparaître les preuves de ma relation avec Adam. Cependant, nous n’avions pas les mêmes armes et le combat me semblait perdu d’avance. « Je lui parlerai lorsque je le verrai. » murmurai-je. Je ne pouvais même pas le défendre, dire qu’il n’avait aucune idée de ce qu’auraient été mes volontés. Ma représentation des Ætheri les rendait aptes à tout savoir. Peut-être me trompais-je ? Peut-être que jouer pleinement mon rôle avait été son seul objectif et que je me méprenais ? Mes questionnements me blessaient. Pourquoi un Dieu s’intéresserait-il à elle ? N’y avait-il pas des Déesses moins manipulables ? Que lui trouvait-il ? Je n’avais pas envie d’entrer là-dedans, parce que ça remettait aussi en question ma propre relation à Jun et ramenait à ce qu’il s’était passé entre nous. Je me refusais à creuser dans cette voie-là.

« J’étais… » Je m’arrêtai un instant. « Hum. » Il valait mieux que je fusse honnête. « J’ai fui mes responsabilités. » Je baissai les yeux sur la table de nouveau. Il n’y avait rien d’autre à dire. C’était exactement ça. J’avais laissé Aimé exister par lâcheté, par envie de ne plus voir, de ne plus entendre et, finalement, de ne plus exister. « C’est lâche, je sais. » Simplement, parfois, je n’étais plus sûr de pouvoir gérer chaque pan de ma vie. C’était aussi la raison pour laquelle je voulais officialiser mes sentiments pour Adam. Ça prendrait le temps que ça prendrait mais sa présence à mes côtés justifierait amplement la naissance de sentiments et de désirs à son égard. Ça ferait souffrir Laëth, surtout s’il s’avérait qu’ils soient incapables de s’aimer malgré leur situation, mais ce serait plus sain que de lui avouer être avec lui depuis tout ce temps, à son insu. Alors, oui, j’allais falsifier la naissance de sentiments, les troubles qu’ils engendreraient. J’allais me mettre dans des états impossibles mais, une fois que ce serait fait, il n’y aurait plus de mensonges. Je devais en finir avec tout ça, avant de ne plus l’aimer, elle. Je savais que ça arriverait forcément à un moment, si je ne pouvais pas lui parler, si je ne pouvais pas lui exposer mes doutes et mes faiblesses. Je savais qu’elle n’approuverait pas tout ce que je lui dirais, parce qu’elle était une Ange, mais je doutais qu’elle en arrivât à me dénoncer, en tant qu’Empereur Noir. Elle n’était pas idiote. Je savais qu’elle savait qui j’étais, au fond. J’en avais assez de dissimuler. Je ne voulais plus la protéger du monstre que j’étais. Pourtant, je n’étais pas prêt à la perdre en lui avouant tout brutalement. Il devait y avoir une transition, un ultime mensonge. Ensuite, elle choisirait.

« Laëth… » commençai-je. « Ne crois pas que je n’ai pas envie de… » Mes lèvres se serrèrent et un sourire en coin naquit sous l’effet de mes propres pensées, assez explicite pour qu’elle pût comprendre que je parlais de sexe. « Surtout que je suis un Réprouvé, actuellement. » Même si ça ne se voyait pas. « Mais… Je ne peux pas. Je ne sens plus rien en dessous de la ceinture. » J’en avais discuté avec Adam. Il pouvait faire renaître mes sens en jouant avec sa magie mais ça restait très léger, trop léger. Il existait des potions pour entrer en érection mais ça ne me procurerait aucun plaisir autre que psychologique. « Cela dit, quand tu en auras envie, il me reste toujours mes doigts et ma langue. » Pour un Bipolaire, je me trouvai assez poétique dans ma déclaration.

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Sam 06 Nov 2021, 19:34



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Sans les jambes

En duo | Kaahl & Laëth



La compassion embua les iris de l’Ange. « Ça n’en est pas moins compréhensible. Avec tout ce qu’il s’est passé… » Elle le regarda. Avant d’être un roi, un père, un amant, un professeur ou tout autre chose, il était un homme. Juste un homme. Avec ses plaies, ses failles, ses imperfections, ses peurs, ses cauchemars, ses défauts. Parfois, la réalité abattait ses cartes, les unes après les autres, avec tant de ferveur et d’implacabilité que l’on préférait la fuir. C’était peut-être lâche, mais sans doute pas le péché le plus condamnable qui fût. Personne ne pouvait se targuer de n’avoir jamais failli, de n’avoir jamais manqué de Force, ne serait-ce qu’une fois au cours de sa vie. Elle ne lui en voulait pas, peut-être aussi parce qu’elle se sentait partiellement responsable.

Encore sous le choc de sa révélation au sujet de Jun, elle ne dit plus rien. Son regard s’évada. La blessure que le Dieu lui avait infligée griffait son cœur de ses serres acérées. Elle était peut-être même plus pénible qu’elle n’aurait dû l’être. Elle ne savait pas. Ezechyel avait été tout à la fois un refuge et une évasion. Un ailleurs rassurant. Une personne sur qui se reposer, quelqu’un à qui se raccrocher, lorsque tout autour d’elle paraissait s’effondrer. Elle n’avait pas craint de le laisser être le témoin de ses états d’âme. Près de lui, elle avait été elle-même. Elle lui avait partagé ses doutes, ses peurs, ses espoirs. Elle s’était livrée. Puisqu’il ne servait à rien de lutter face à un Æther, elle avait rendu les armes, laissé tomber la muraille. Pis encore : entre ses doigts, elle avait glissé sa confiance, comme un cadeau précieux et fragile. Il avait serré son poing et l’avait broyée en milliers d’éclats. Comme si ce n’était rien. Juste de la poussière jetée dans le vent. La jeune femme se détourna, peu désireuse de communiquer avec Kaahl sur les sentiments et émotions qui la traversaient. Ses yeux s’égarèrent sur le verre de la fenêtre. Quelques traces de pluie y persistaient, longues stries ponctuées de gouttes, chacune caressées par les rayons du soleil.

Dès qu’il reprit la parole, cependant, elle le regarda. Le revirement de la conversation heurta ses ressentis. Surprise, elle le dévisagea, avant de mieux comprendre son attitude. « Ah. » Elle se souvenait très bien du Réprouvé. De la façon dont ses lèvres s’étaient emparées des siennes, de la caresse de ses doigts entre ses jambes. Du désir qui l’imprégnait et qui ne demandait qu’à s’exprimer. Elle leva un sourcil. Quelques secondes de flottement. « Ce n’est pas grave. Je m’en fiche. » En avait-elle seulement envie, là, tout de suite ? Non. Elle en avait eu envie en pensant à lui, souvent, et avant d’entrer dans l’appartement, assurément. Mais plus maintenant. Sa remarque la fit sourire doucement. « J’y songerai. » Durant quelques instants, elle demeura immobile. Puis, elle sembla se défaire de la cape de plomb qui la maintenait assise, presque prostrée. Elle se leva, contourna le bureau, et après quelques signes pour qu’il décalât sa chaise, prit place sur ses genoux. Elle enroula ses bras autour de ses épaules, se blottit contre lui et enfouit son visage dans son cou. Son odeur imprégna ses narines : la sérénité l’envahit. Elle ferma les yeux, pour mieux goûter cette étreinte dont le temps et les obligations l’avaient privée. Elle aimait être là. C’était un havre de paix. Un silence dans le vacarme. Une lumière dans les ténèbres. Son palpitant qui bondissait, et le sien qu’elle entendait. Une ode à la vie, dans le mutisme si chantant des corps qui s’aiment. « C’est arrivé comment, tes jambes ? C’était vraiment Ârès ? » S’il avait fui ses responsabilités, avait-il aussi pu fuir le Sorcier ? Cela n’expliquait pas la version officielle des choses, mais c’était une possibilité. « Et à part ça, tu vas mieux, maintenant ? Moralement aussi ? » Une autre interrogation triturait ses neurones. « Et pourquoi être un Réprouvé ? C’est pour compenser la reconstitution de Bouton d’Or que tu n’as jamais pu faire ? » s’amusa-t-elle, en repensant à ce projet que la tempête avait emporté. Elle s’interrompit. Il avait raison : parfois, elle faisait des promesses intenables. « J’espère que mes questions t’avaient manquées. » Contre sa peau, elle sourit. « Si ça peut te réconforter, moi aussi, j’ai des choses à te dire. »



Message IV – 734 mots




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Dim 07 Nov 2021, 10:31



Sans les jambes


Mes doigts frôlèrent le tissu de ses vêtements dans un bruit doux. Je la laissai faire, en pensant brièvement que je ne pourrais pas toujours la protéger. Peut-être que pour l’aimer correctement, je devais envisager de pouvoir la perdre, soit qu’elle me quittât, soit qu’elle vécût trop dangereusement pour son propre bien. Mes espions pouvaient la sauver mais seraient-ils toujours assez rapides ? Le monde était peuplé de monstres. C’était sa fonction de les éliminer, en tant qu’Ange, mais… y parviendrait-elle ? Surtout en en gardant un près d’elle ? Mes mains remontèrent dans ses cheveux. J’en appréciai la texture. Ça faisait trop longtemps que je ne l’avais plus touchée. Le faire me plonger dans une forme d’état second. J’avais à la fois l’impression que c’était la première fois et la sensation d’être précisément à ma place, là où je devais me trouver. Ses gestes m’arrachaient des frissons de bien-être et l’Ange en moi se nourrissait des émotions qui m’entouraient pour exister davantage. J’enfouis mon nez dans son cou à mon tour, tandis que mes paumes continuaient à redessiner son dos, à passer sur sa colonne vertébrale en se rappelant de chaque relief de ses os. Je souris et remontai mes lèvres jusqu’à son oreille. « Un accident de luge. » répondis-je, avant de déposer un baiser sur son lobe.

Les secondes qui s’écoulaient me semblaient douces, comme elle. Je savais que mon Ange était une guerrière. Elle pouvait se montrer dure, tout comme je pouvais être cruel. Ça ne nous empêchait pas d’être tendres. « Tes questions, je ne suis pas sûr, mais toi… » J’embrassai son cou plusieurs fois. « Toi tu m’as manqué. » Son odeur, sa sensibilité. « Maintenant je vais bien. » C’était vrai. L’avoir contre moi me détendait. C’était comme la promesse silencieuse que tout irait bien. Je ne voulais plus jamais la lâcher et rester là, perdu entre ses bras. Cependant, si je voulais continuer à discuter, il valait mieux que j’arrêtasse de l’effleurer avec mes lèvres. Alors, après un dernier baiser, je me collai davantage au dossier de ma chaise. Mes doigts se posèrent sur son ventre et y peignirent des formes aériennes, des arrondis et des arabesques, sans aucune signification. « Parfois je ne me souviens plus du fait d’être incapable de marcher alors… j’essaye de me lever et je me rappelle la réalité. » Mes yeux suivaient le mouvement de mes mains. « Mais mon corps commence à avoir l’habitude. » C’était plus mon esprit qui ne s’y faisait pas. « Je sais que ce n’est que temporaire mais mon rapport aux autres a changé. Quand on peut se déplacer, on n’y fait pas attention. C’est tellement naturel qu’on ne se dit pas qu’un jour, ça pourrait ne plus l’être. » Je souris. « Si j’étais Humain, je serais dévasté. » La magie me sauvait pour beaucoup, même si je m’étais déjà écroulé par terre. Adam avait dû me ramasser parce que je n’étais pas en état psychologique de le faire moi-même. J’avais voulu être dans cette situation mais le vouloir et l’être n’étaient pas la même chose. Le vivre avait un côté terrible. Il me restait pourtant la crucifixion à passer. Ensuite, peut-être pourrais-je avoir la paix, lorsque j’aurais assassiné tous les religieux de l’Ordre des Justes. J’avais envie de construire Lagherta bien plus que m’occuper des doutes de mon peuple. Je ne désirais plus être l’objet de complots, tout en sachant parfaitement que ça ne s’arrêterait jamais. J’étais une figue à abattre, tant à l’extérieur de mes frontières qu’à l’intérieur. « Mais je suis un Réprouvé, pour le moment. » repris-je, d’un ton plus léger. Mes doigts passèrent entre ses seins pour remonter sur sa gorge. Ils caressèrent son cou puis se stoppèrent sur ses lèvres. « Je me suis dit que tu les trouvais plus séduisants que le reste. Je voulais te plaire même si je ne suis pas en état de faire honneur à mon peuple. » Que ce fût au niveau de la volonté guerrière ou de l’appétit sexuel, j’étais un bien piètre Bipolaire. Je ne pourrais pas brandir une épée avant longtemps, quelle que fût la nature de l’épée en question. Même si elle m'avait dit que ça ne la dérangeait pas, ce n'était pas évident pour moi.

Mes mains se posèrent sur ses cuisses. « J’ai des soucis de magie. » avouai-je. « Quand je suis Réprouvé, elle est moins présente. » Je frôlai le tissu de son pantalon, continuant l’inspection de sa silhouette. « Pour le moment, je n’ai pas d’autres solutions. Si je ne change pas de race, les murmures de ma magie tendent à me rendre fou. » Et ça m’effrayait parce qu’il n’y avait pas que la folie que Lux in Tenebris distillait en moi. Il y avait aussi la cruauté, une cruauté implacable et irraisonnable. J’étais un homme de stratégie. Si je commençais à sortir de mes calculs, je n’étais pas certain de savoir ce dont je serais capable. « Et Ârès va vouloir en jouer. » Je grimaçai. Je n’aimais pas parler de lui. Je le craignais et n’arrivais pas à faire disparaître l’effroi que j’éprouvais à son égard. Il m’avait trop parfaitement conditionné à le considérer comme une menace. « Mais ça n’a pas d’importance. » Parce que je préférais mille fois continuer à la caresser. « Dis-moi ce que tu voulais me dire. » murmurai-je, les mains sur ses hanches.

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Lun 08 Nov 2021, 08:22



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Sans les jambes

En duo | Kaahl & Laëth



Les caresses de Kaahl faisaient courir des frissons et des vagues de chaleur sur sa peau. Leur danse distillait aussi bien l’apaisement que le désir, et chaque geste semblait l’étreindre un peu plus dans un délicieux cocon. Elle aurait pu demeurer ainsi pour l’éternité – c’était toujours la réflexion qu’elle se faisait, dans ces moments-là. La seconde suivante, ils pouvaient être en train de se disputer, elle pouvait douter, questionner, crier, pleurer et lui, rester ce mur contre lequel elle se heurtait sans cesse. Elle était lasse de ces moments jetés sur son bonheur comme des pierres sur la vitre d’une fenêtre. Elle ne voulait pas penser à tout ce qu’il avait pu faire de mal, à tous ses propres remords, à tout ce qu’elle avait vécu avec lui – dans ce monde ou un autre – et qui l’avait si follement terrifiée. Elle ne voulait penser ni à ses cauchemars, ni au Conte, ni à rien d’autre. Le bonheur contenait une part d’oublis, d’omissions, de silences. Pour elle, tout cela relevait de grands sacrifices, mais à cet instant précis, au creux de bras de son amant, elle était certaine d’y être prête. Tant pis si elle devait vivre dans le mensonge ou le mutisme : elle l’avait aimé ainsi, elle l’aimait encore, et elle l’aimerait sans doute toujours de cette façon. L’Ange se blottit un peu plus contre le Mage. Elle sourit, sans savoir si ce sourire était le fruit de ses pensées, des baisers qu’il répandait dans son cou, ou des mots qu’il prononçait contre sa peau. Ça n’avait pas d’importance, elle n’avait pas besoin de savoir : l’amour n’aime pas la raison. Il préfère la folie et ses grands élans dévastateurs, qui ne brisent l’âme que pour mieux faire entendre son chant amoureux.

Elle embrassa son cou, avant de reculer son buste. Ses yeux verts détaillèrent l’harmonie de son visage, la beauté sculpturale de ses traits, l’éclat de ses iris. Elle imprima cette image dans sa mémoire, comme un souvenir dont elle se rappellerait toujours. L’Ange attrapa la main libre de l’homme. Délicatement, à la manière des épis de blé caressent le ventre des oiseaux qui effleurent leurs cimes, ses doigts en parcoururent la paume. Elle acquiesça. Jamais elle ne s’imaginait dépourvue de jambes. Comment aurait-elle fait ? Il lui aurait été impossible de se battre. Voler aurait été compliqué, parce qu’elle n’aurait pas pu gainer tout son corps comme elle le faisait habituellement. Et toutes ces autres tâches du quotidien qu’elle accomplissait sans effort apparent, mais qui lui auraient coûté tant de temps, de patience et de persévérance… Elle aurait dû ajuster tout son quotidien, et c’était ce que Kaahl faisait. Freyja tendit le cou pour mieux accueillir sa caresse, les yeux fermés. Il était terrible. Cinq minutes plus tôt, aucun désir sexuel ne l’assaillait : désormais, tous ses sens appelaient à une rencontre avec les siens. Son contact avait chassé tout ce qui la peinait, pour instaurer une torture bien plus douce. Sa remarque l’amusa : elle sourit et souffla par le nez. Les paupières rouvertes, elle lui jeta une œillade saturée de défi et d’espièglerie. « Tu crois ça ? » fit-elle, sans préciser si elle se référait au fait qu’elle pût préférer les Réprouvés à tous les autres hommes de ces terres ou à la condition du Mage, qu’ils auraient sans aucun doute trouvée déshonorante. Elle sourit, puis déposa un baiser sur sa tempe, avant de retrouver sa position initiale.

L’évocation des soucis de magie la ramena directement au bal. C’était la première fois que la magie d’Elias était si sombre, si tangible, si agressive. Elle se rappelait des stries qu’elle avait laissées sur la peau des invités et de la noirceur dont elle entourait l’Empereur Noir, tout en volutes incandescentes. Comme Ezechyel avait apparemment joué son rôle à la perfection, il n’avait probablement pas inventé ce tourbillon de ténèbres. Son cœur se serra et la peine glissa sur son visage en un voile de tristesse. C’était ce que l’on disait des Empereurs Noirs. Ils atteignaient tous un stade auquel leur magie les dépassait. Vorace, elle consumait tout ce qu’il restait de sain et d’équilibré en eux, jusqu’à ne laisser qu’un cadavre mu par une folie destructrice. Elle savait parfaitement que Kaahl n’était pas ce qu’il avait toujours prétendu être, mais elle avait songé qu’il parvenait à équilibrer les forces. Ce n’était plus le cas, pas maintenant. Il était devenu cet enfant des Ténèbres qu’elle avait si souvent redouté ; cette chose qu’elle n’aurait jamais dû aimer. Cette chose qu’elle aurait dû vouloir tuer. Aucune identité n’excusait sa passivité : les Anges combattaient le mal et les Réprouvés haïssaient les Sorciers. Il n’y avait pas de place pour l’amour, là-dedans. Pourtant, elle était là, contre lui, désireuse et amoureuse. Elle avait peur pour lui plus qu’elle ne s’inquiétait pour elle-même. L’Ange s’inclina pour le reprendre dans ses bras. « Je t’aime. » souffla-t-elle contre son oreille, avant de se redresser pour l’embrasser. Ses lèvres avaient toujours la même douceur. Freyja aurait pu prolonger longtemps leur échange, mais elle devait parler. Elle déposa un dernier baiser au coin de sa bouche, puis le regarda. « Mais ce n’est pas ça que je voulais te dire. » Elle sourit. « Il y a deux choses. Je pense que tu es au courant de la première, mais pas de la deuxième. Je n’en ai parlé à personne. » Elle inspira. « Mes parents ne m’ont pas appelée Laëth, quand je suis née, mais Freyja. Ça veut dire Indésirée ou Indésirable. » Elle n’ajouta rien. Elle ignorait à quel point il connaissait son enfance. Elle ne lui en avait jamais parlé, mais peut-être que ses espions avaient pu la lui relater. Elle frissonna. « Et la deuxième chose, c’est que je ne sais pas si… » Elle pinça les lèvres. « Je ne suis pas encore sûre. Je réfléchis. Mais je ne sais pas si je vais continuer à travailler pour l’armée. » Elle haussa les épaules, comme si elle ne venait pas de dire qu’elle songeait à cesser ce pour quoi elle était venue aux Jardins, ce pour quoi elle avait durement travaillé, ce pour quoi elle s’était battue quand des soupçons pesaient sur elle. Ce à quoi elle se destinait depuis si longtemps. « Si je le fais, ça réglera peut-être le fait qu’on ne se voit pas si souvent. » Mais ce n’était pas pour ça qu’elle envisageait de mettre un terme à sa carrière. Un sourire, plus triste que sincère, ourla faiblement ses lèvres.



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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Dim 28 Nov 2021, 21:16



Sans les jambes


Je souris. Je le savais, qu’elle m’aimait. Si elle ne m’avait pas porté un amour sincère, notre situation ne serait pas celle-ci. Elle aurait cherché à me dénoncer et j’aurais dû la tuer. Le fait que je l’aimasse en retour rendait l’ensemble à la fois merveilleux et tragique. Cette impression de maintenir des fils tranchants autour de sa gorge ne me quittait jamais. Sans qu’elle ne le sût, sa vie était en permanence menacée. Je la protégeais du monde extérieur mais le plus gros danger, celui qui la guettait sans cesse, provenait de celui-là même qui embrassait ses lèvres actuellement. Moi, Empereur d’un monde fait de ténèbres, qui glissais mes mains au-dessus de ses vêtements, dans de longues caresses emplies de tendresse. J’avais besoin d'elle à mes côtés, tellement besoin d’elle. Pourtant, je pensais souvent que tout prendrait fin un jour ou l’autre, que ce fût à cause de mes mensonges, que ce fût à cause de ce que j’étais ou bien du fait d’un soubresaut de conscience de sa part. Peut-on vraiment aimer envers et contre tout ? Quand tout ce en quoi l’on croit manque de s’effriter et de disparaître à jamais ? Lorsque toutes les valeurs que l’on chérit sont bafouées par la simple existence de l’autre ? Je ne désirais pas quitter ses lèvres. Je dus me forcer à les lâcher. « Je t’aime aussi. » Avec tout ce que cet amour comportait de malheurs.

« Je t’écoute. » dis-je, pour l’encourager à parler. Mes doigts se déplacèrent et se frayèrent un chemin sous son haut, dans son dos. Je connaissais chaque parcelle de sa peau, sa texture, ses courbes, les cicatrices qui continueraient de la marquer. Son corps reflétait sa vie, sa vie en tant que femme, en tant qu’Ange, en tant que guerrière. Elle était tant de choses à la fois à mes yeux. « Oui, je le sais. » murmurai-je, simplement. Bouton d’Or était un endroit difficile d’accès pour mes espions, mais certains avaient été suffisamment habiles pour se fondre dans la masse, parfois sur des générations. Dans une société où les secrets existaient difficilement du fait de la proximité de chacun, il était aisé d’accéder à n’importe quelle information en faisant soi-même partie du système. « » Mon regard se fit plus interrogatif lorsqu’elle me fit part de son potentiel départ de l’armée angélique. Je n’étais pourtant pas surpris au point d’en rester abasourdi. Depuis que nous nous connaissions, elle avait beaucoup changé. La femme à qui j’avais confié la clef de mon château n’aurait sans doute jamais réussi à aimer un autre homme qu’un Ange. Elle n’aurait pas plus gardé le silence face aux agissements d’un Sorcier. Surtout, jamais elle n’aurait cherché à embrasser ses lèvres. Cependant, cette réflexion qui la hantait n’était pas anodine. Nous voir plus souvent. Était-ce une bonne idée ? Et pourquoi quitter l’armée ? Je l’imaginais difficilement rester chez moi à prendre soin de l’intérieur. Certaines Magiciennes s’y employaient avec un certain plaisir mais jamais elle n’aurait tenu en place. Mes doigts s’étaient immobilisés sur sa chute de reins. « J’aimerais te voir plus souvent, oui. » murmurai-je. « Mais pourquoi est-ce que tu envisages de tout quitter ? L’armée ne répond pas à tes attentes ? » L’idée qu’elle pût envisager de devenir mère m’effleura l’esprit mais je la chassai. Ce n’était pas le moment et, vu mon état, il n’y avait aucune discussion possible. D’autres considérations étaient la cause de son revirement. Adam ? Non. Pas si tôt. Le Lien ne changeait rien.

Alors que je réfléchissais, en attendant sa réponse, une impression étrange m’engloba. L’arrière de ma tête me sembla être parcouru de frissons glacés, comme si, à l’intérieur de ma boite crânienne, quelque chose se préparait, un mal, une conséquence contre laquelle je ne pourrais pas lutter. Au-dessus de mes sourcils, un début de migraine commença à se dessiner, douloureuse mais supportable. Mes yeux contemplaient le regard vert de Laëth et, petit à petit, il me sembla perdre de son importance. Ce que j’y trouvais d’exceptionnel était en train de s’effacer, pour revêtir le voile de l’inconnu. Je restai interdit un temps, un sentiment diffus de perte planant avant de s’enfuir, ne laissant que le vide, le doute et l’incompréhension. Que faisait cette femme sur mes genoux ? Quand est-ce que je l’avais laissée s’y installer ? Pourquoi est-ce que ma magie ne répondait pas à mes appels ? « Excusez-moi mais… Qui êtes-vous et où est Adam ? » Il était présent, avant. « Si c’est toi, ce n’est pas drôle. » ajoutai-je. Avait-il changé de forme pour me surprendre ? Mais, pourquoi ? J’étais impuissant et, dans tous les cas, je l’avais toujours préféré en homme. Je ne comprenais donc absolument pas cette situation. J’enlevai mes mains de son corps, gêné de cette proximité étrange avec une personne que je ne connaissais pas. L'hypothèse qu'il s'agît du Déchu ne trouvait aucun écho en moi. Alors qui était-ce ?

800 mots
Couronne des Objets Précieux | Orisha | En conséquence de ce pouvoir particulier et propre au porteur de la Couronne, sa propre mémoire sera parfois défaillante voire totalement absente, même sans porter l'artefact. Le souci peut perdurer quelques secondes, minutes ou plus longtemps, sur des détails ou sur des pans plus étendus.
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Priam et Laëth
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Lun 06 Déc 2021, 22:34



Je sais plus, je regarderai

Sans les jambes

En duo | Kaahl & Laëth



Le cœur de Freyja tambourinait dans sa poitrine. Elle avait l’impression que si elle prononçait ces mots, ils se transformeraient immédiatement en actes. Elle s’humecta les lèvres. Sa cage thoracique comprimait ses poumons. Ses côtes semblaient presque prêtes à les percer. Elle secoua doucement la tête, ses mèches brunes glissant sur ses épaules. « C’est un peu plus compliqué que ça. » Elle inspira. Si ses espions étaient si efficaces, il devait savoir. Une pointe d’amertume imbiba sa langue. Elle n’aimait toujours pas l’idée qu’il pût la pister comme bon lui semblait. Elle n’avait aucune idée du nombre de fois où cet espionnage s’était mué en protection ; cependant, elle percevait parfaitement l’infraction à son intimité que cela causait, et les questions qu’une telle pratique posait sur la confiance que lui accordait Kaahl. D’une certaine manière, ses espions brisaient aussi leur intimité en tant que couple. Ils écorchaient leur solidité et leur amour, parce que ni l’un ni l'autre ne pouvait être certains qu’elle lui disait les choses parce qu’elle en avait véritablement envie – peut-être qu’elle songeait simplement que, de toute façon, il détenait déjà cette information, et par extension, une part d’elle-même. C’était une forme d’abandon, ou pire, de reddition. Là où le déséquilibre régnait, il ne pouvait pas y avoir de partage. Sauf cette fois-là.

Elle remonta ses mains sur son cou. Ses pouces caressèrent ses mâchoires. Ses yeux verts coulaient dans les siens tel un fleuve entre ses berges, le plus naturellement du monde. C’était comme s’ils avaient toujours été là, arrimés les uns aux autres ; comme si elle n’avait jamais rien vu d’autre que l’éclat chaud de ses iris, et qu’elle ne s’en était jamais lassée. « Ce n’est pas juste l'armée. Tu te souviens du Bal des Douze Cycles Lunaires ? Celui où la Reine était avec Isiode Yüerell. J’étais sur le bateau pour aller jusqu’à Iyora. » C’était vieux. Elle était une jeune Recrue, au cœur enflé de rêves et d’espoirs. Hena vivait encore. Elle connaissait à peine Adriel. Son amour pour le Mage naissait tout juste : elle se souvenait des premiers tremblements de son palpitant à la lecture de ses lettres. De son émoi en découvrant la bague de sa mère. Du supplice que lui infligeaient ses sentiments, aussi sauvages et rebelles que son âme, et qu’elle aurait pourtant tant aimé pouvoir maîtriser. Elle avait tellement changé, depuis. Le bout de ses doigts effleura les cheveux de son amant. « Priam était au bal et il a dansé avec Erza. » L’Ange inspira. « Elle lui a révélé plusieurs choses. » Elle s’interrompit. Elle ne l’avait jamais formulé à haute voix, auprès de qui que ce fût. Sortir ces paroles la tétanisait. Elles ne pouvaient pourtant pas changer la face du monde, pas à elles seules.

Elle allait parler, quand ses prunelles ancrées dans celles du brun captèrent un changement. « Kaahl ? » Elle fronça les sourcils. « Tu m’écoutes ? » Puis, elle resta coite. Qui êtes-vous et où est Adam ? L’incompréhension marqua ses traits. Son palpitant se compressa violemment. C’était comme si tout l’air de ses poumons s’était mis à faire pression dessus pour le réduire en miettes. « Kaahl… » Ce n’était pas drôle, non. Pas drôle du tout. Lentement, ses mains lâchèrent le visage du Mage. Muette, elle le scruta. Il ne plaisantait pas. Il ne pouvait pas plaisanter, puisqu’il n’était tout simplement plus là. Plus là. Le souffle court, elle observa cet homme qui la sondait comme si elle était une étrangère. L’oubli la dévorait. Ses émotions semblaient vouloir sortir de ses yeux : elles repoussaient le bord de ses paupières jusqu’à les arrondirent et s’accumulaient en longues larmes contre sa cornée. Les hypothèses s’agglutinaient en un marasme duquel elle ne parvenait pas à se dépêtrer. Qu’était-elle censée faire ? Appeler un médecin ? Le secouer pour qu’il revînt à lui-même ? Fondre en larmes et attendre ? Inenvisageable. Il était certain que le brusquer n’amènerait rien de bon, et tant qu’elle ignorait la source de son état, elle ne pouvait pas prendre le risque d’impliquer quelqu’un d’autre. Sa magie parvenait-elle à se frayer un passage jusqu’à son esprit, malgré la présence du Réprouvé ? Les Ténèbres l’engloutissaient-elles en dépit de toutes ses précautions ?

Finalement, avec une lenteur marquée par le choc, elle se leva, pour reculer contre le bureau. Ses paumes se fixèrent dessus et ses doigts se fermèrent sur son rebord. « Je suis Freyja, ou Laëth, et… Adam est parti, pour nous laisser tous les deux. » Elle s’interrompit. Pourquoi Adam ? Qu’aurait-il fait sur ses genoux ? Pourquoi diable aurait-il eu ses mains sur lui ? Il délirait, ou le Déchu outrepassait les limites. Les deux, peut-être. « Parce que… parce qu’on avait des choses importantes à se dire. » L’Ange se mordit l’intérieur des joues pour empêcher ses larmes de couler. « On ne s’est pas vus depuis longtemps et il s’est passé beaucoup de trucs depuis… Tu te rappelles ? » demanda-t-elle avec douceur. Elle n’aimait pas cette sensation de hauteur qu’elle avait sur lui. Elle lui donnait le sentiment de se tenir encore plus éloignée. Alors, elle s’assit sur le bois du bureau. « Tu te sens comment ? Est-ce que je peux faire quelque chose pour… » Elle ne termina pas sa phrase, incapable d’y trouver une suite. Les mains jointes, elle déglutit, avant de commencer à jouer avec ses doigts. Ses yeux ne le quittaient pas. Sa magie s’étendit peu à peu autour d’elle, désireuse d’apaiser leurs cœurs, et de combler le vide qui tuait le sien.



Message VI – 926 mots




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Kaahl Paiberym
Mer 16 Fév 2022, 19:44



Sans les jambes


Je figeai mon expression, pour qu’elle fût proche de la neutralité mais ouverte vers l’extérieur. Beaucoup de situations se résolvaient ainsi. J’avais été formé pour faire face à n’importe quel événement. J’avais fauté, plus tôt. Je n’aurais pas dû parler. J’aurais dû rester silencieux et écouter ce qu’elle était en train de me dire. J’avais brisé l’instant à cause d’une réaction disproportionnée qui n’était autre qu’une erreur de débutant. Je ne pouvais me permettre ce genre de comportements. Elle était peut-être une espionne. Peut-être m’avait-elle drogué. Je ne devais pas écarter l’hypothèse. Le fait que je ne me rappelasse rien d’immédiat prouvait qu’elle avait joué, d’une façon ou d’une autre, sur mon psychisme. Je n’ouvris pas la bouche et l’observai. Je l’écoutai autant que je la regardai. Chaque mimique, chaque mouvement, chaque intonation. Soit elle était sincère, soit elle était très douée pour la comédie. J’enregistrai tout. Elle était précédemment sur mes genoux, à une proximité qui ne laissait aucun doute sur notre relation supposée. Elle était sur le point de pleurer, tremblait. Pourtant, d’après elle, nous ne nous étions pas vus depuis un certain temps. Une amante ? Impossible. Elle mentait et, si elle mentait, je devais trouver la raison pour laquelle elle le faisait. Qui aurait intérêt à me faire croire en une relation amoureuse avec cette femme ? Dans quel but ? Ce n’était pas une opération standard. « Oui, pardon Laëth… » Je lui souris et lui tendis la main. « Je suis vraiment désolé. Je crois que mon état n’est pas optimal. » Je désignai mes jambes. J’avais parfaitement souvenir du fait que je ne pouvais plus marcher. « Il va falloir un certain temps pour que tout rentre dans l’ordre. » Elle connaissait Adam. D’où ? Pourquoi ? Que savait-elle au juste ? Était-ce lui qui l’avait amenée ? Si elle n’était qu’une amante de passage, qu’une distraction, elle n’aurait pas réagi ainsi. Quoi qu’elle jouât, ce n’était pas le rôle d’une étrangère. « Reviens… » susurrai-je, en l’attirant à moi grâce à ma magie. Je la trouvais séduisante. Ma main courut dans ses cheveux et caressa sa peau. Une impression de déjà-vu s’imprima doucement, aussi lointaine que des souvenirs égarés. Mon nez s’engouffra dans son cou. Son odeur ne m’était pas étrangère. Ses courbes non plus. C’était flou. Était-ce moi le problème ? Je déglutis, en prenant conscience de cette possibilité. Et si elle ne jouait pas ? Et si je devenais fou ? Ma respiration s’accéléra. Je ne pouvais pas devenir fou. Pas maintenant, pas après avoir pris toutes ces précautions. « Non… Je suis un Réprouvé. » murmurai-je, de nouveau en faute. La Magie des Ténèbres ne pouvait pas m’atteindre ainsi. « Tu… » Je m’écartai de sa peau. « Tu le sais, n’est-ce pas, que je suis actuellement un Réprouvé ? » Ce n’était pas grave qu’elle le sût, qui qu’elle fût. Que le Baron Kaahl Paiberym pût se transformer en Bipolaire pouvait trouver sa logique dans… dans… Je dus fournir un effort considérable pour ne pas marquer mon trouble. C’était logique parce que… Je sus. Laëth.

J’inspirai, comme quelqu’un qui n’avait pas respiré depuis de longues minutes. « Laëth… » lâchai-je finalement. Le plus dur était de régler cette situation. Mon soulagement n’était que la phase visible de mon état. Mon inquiétude existait bel et bien. J’étais heureux de me souvenir, d’avoir retrouvé ce que j’avais sur le bout de la langue mais… Comment avais-je pu l’oublier ? Mes mains s’attachèrent à son dos. « Je crois que je ne vais pas bien. » avouai-je. « C’est la première fois que ça me le fait… » L’idée qu’il était imprudent de lui avouer mon mal me traversa l’esprit. Pourtant, malgré la rationalité que j’essayais de poser, malgré mon injonction au calme, une partie de moi commençait à paniquer. Et si je l’oubliais de nouveau ? Et si j’oubliais mes enfants ? Et si j’oubliais Adam ? Et si j’oubliais mon identité ? Mes valeurs ? Mes objectifs ? Je laissai tomber ma tête sur sa poitrine et la touchai du bout des doigts, ses cuisses, ses hanches, son dos. Nous parlions, avant. « Ce n’est pas grave. Ne t’inquiètes pas. » susurrai-je. « Tu peux reprendre… » Je n’étais pas certain d’être prêt à l’écouter. Je me sentais comme debout au bord d’un gouffre, à le contempler. Malgré moi, mon toucher se fit plus appuyé et pressé. Comme je me sentais tomber, j’avais besoin de me raccrocher à quelque chose, à quelqu’un, à elle. Ma résolution d’écoute ne dura que quelques secondes. « Je veux sentir ta peau contre la mienne. » Pour être certain qu’elle existait.

777 mots

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Mer 16 Fév 2022, 21:08



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Sans les jambes

En duo | Kaahl & Laëth



Irrémédiablement aspirée par la sienne, sa main coula ses doigts contre sa paume. Le contact rompit la glace qui la figeait, dans un long frisson soulagé. Son cœur battait si vite qu’il semblait immobile. Que venait-il de se passer ? Comment expliquer cette absence soudaine ? Cet oubli si violent ? En même temps que sa poitrine se défaisait des ronces de la panique, son esprit libérait des salves de questionnements. L’appréhension et la méfiance persistait dans ses prunelles. Était-ce véritablement terminé ? Cet épisode était-il voué à se répéter ? « Ce n’est pas juste les jambes… » Ce n’était pas juste un accident de luge. Elle l’avait su dès qu’il l’avait dit ; désormais, son inquiétude ne faisait que s’accroître. Ses doigts se resserrèrent sur les siens, comme si elle espérait pouvoir retenir ainsi son esprit fugueur. Et si rien ne rentrait dans l’ordre ? Et si ça empirait ? Et s’il oubliait plus longtemps, jusqu’à oublier tout à fait ? Les pires scénarios s’ébauchaient dans les débris de son palpitant. Il lui avait suffi de quelques secondes pour savoir qu’elle ne pourrait pas le supporter, jamais. La frayeur passée, c’était l’angoisse qui s’invitait. Elle s’apaisa faiblement quand le Mage la ramena contre lui. Elle glissa ses bras autour de son cou et se pressa contre lui. Il était là, c’était lui, il se souvenait, il savait, il l’aimait. Une expression toujours soucieuse imprimée sur le visage, elle caressa tendrement ses cheveux. Lorsqu’il reprit la parole, son cœur se serra à nouveau, et elle se décala pour le regarder dans les yeux. Sa mémoire défaillait encore – au moins la récente. L’Ange fournit autant d’efforts que possible pour demeurer aussi calme qu’elle le pouvait. « Oui, je le sais. Tu me l’as dit tout à l’heure. » lui rappela-t-elle d’une voix patiente. « Tu me l’as dit, je t’ai demandé pourquoi, et tu as prétendu que c’était pour me séduire. » Il avait ensuite avoué qu’il se protégeait ainsi de la Magie des Ténèbres, mais elle préféra interrompre son récit avant. Un sourire encourageant tremblait sur ses lèvres.

À cet instant, un véritable soulagement peignit la figure du brun, et alors elle sut qu’il venait de faire semblant. Elle ne dit rien, ne releva pas, n’accusa pas. Elle se contenta de le regarder et d’acquiescer une fois, avant de faire glisser ses mains de ses avant-bras à ses épaules. Le tissu de sa chemise bruissait à leur passage. Plus qu’inquiète, l’Ailée se mordit l’intérieur des joues. « Tu devrais peut-être aller voir un médecin. » Durant quelques secondes, elle le considéra. « Ou quelqu’un de confiance, qui sache quelque chose à propos du fonctionnement de la mémoire et qui puisse t’aider. » Ses doigts caressèrent sa nuque et revinrent se frayer de merveilleux chemins dans ses cheveux. L’oreille si près de son cœur, il devait entendre sans peine le rythme affolé qu’il chantait. Le passage de ses mains sur son corps distribuait des frissons délicieux, aussi chauds que le réconfort qui cherchait à s’insinuer en elle. « Je serai là quoi qu’il arrive. » murmura-t-elle en embrassant son crâne. Même si ce n’était pas grave. Même s’il ne fallait pas s’inquiéter. Même si. La jeune femme ferma les yeux. Elle avait eu des choses à lui dire, oui. Où en était-elle, déjà ? Le Bal des douze cycles lunaires. Erza et Priam. Elle inspira. Le vertige la gagna. Elle n’avait plus envie d’en parler. Plus les mains de son amant marquaient ses courbes, plus elle ressentait le besoin pressant de le faire sien. Ils ne se voyaient pas souvent ; et entre ce jour et la prochaine fois, une éternité pouvait s’écouler. Ou juste quelques secondes ; quelques secondes de trop pour les priver des suivantes. Ils pouvaient se perdre, s’oublier, mourir. Elle voulait le marquer sur sa peau, l’ancrer dans sa chair, le protéger dans ses entrailles. Elle voulait s’attacher à lui pour le reste de son existence, jusqu’à créer la vie et l’aimer ensemble, toujours. Elle aurait voulu le lui dire, mais aucun mot n’aurait été suffisamment rapide et intense pour satisfaire les pulsions amoureuses qui élançaient jusqu’à son âme. « Ça tombe bien, je crois que c’est là qu’on en était. » confia-t-elle, avec un sourire tendre. Elle s’inclina pour l’embrasser ; et la passion remplaça vite la tendresse de ses baisers.

FIN nastae



Message VII – 726 mots




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