Rps liés précédents : Comme si le monde brûlait, Tempête, Accords sombres
Intrigue : Elias retourne sur la Terre Blanche afin de rendormir les Momies après un bref passage à Amestris. Message unique.

Samuel Kim - Reiner Transformation Theme

« Prince Noir. » me salua un Sorcier lorsque j’arrivai sur la Terre Blanche. Les Momies étaient partout, éveillées mais inactives. Ma langue claqua contre mon palais. « Laissez-moi. » dis-je, d’un ton glacé. À cause de ces choses… Je fermai les yeux et serrai la mâchoire. Ce n’était pas à cause d’elles. C’était à cause de moi. À cause de moi, mon château s’était écroulé. À cause de moi, des personnes qui n’avaient rien demandé étaient mortes et d’autres avaient été blessées. Le poids de la culpabilité me rongeait et nourrissait la haine qui m’étreignait. En les laissant ainsi, je m’exposais à d’autres dégâts. Je le savais. Tout avait été consigné dans l’ouvrage qui m’avait été confié. Je l’avais trouvé sans aucun problème dans ma chambre, sur l’une des étagères. Ma mémoire visuelle remarquait chaque petite modification de mon environnement, chaque différence. Ce qui n’avait pas été placé par mes soins sonnait faux et dérangeant. « Je veux que chaque Sorcier présent sur la Terre Blanche entre dans les habitations qui ont été construites jusqu’à ce que j’ordonne le contraire. » ajoutai-je. « Prince Noir ? » Je tournai les yeux vers mon interlocuteur. « Je ferai tuer toute personne encore dehors d’ici trente minutes. » Je jetai un coup d’œil vers la silhouette cadavérique de l’une des créatures de cauchemar qui m’avaient été léguées. Je n’allais pas les utiliser pour assassiner des Sorciers, parce qu’elles étaient bien trop coûteuses en énergie. Néanmoins, la simple menace suffirait. Personne ne savait comment fonctionnait ces choses. Tous pouvaient se douter que je les contrôlais cependant, d’une façon ou d’une autre. « À vos ordres. »

Mes pieds foulaient la terre. J’étais à la recherche d’un endroit qui se prêterait au rituel, l’ouvrage à la main. Je désirais un lieu retiré, où personne ne pourrait me voir. La magie que je m’apprêtais à utiliser m’était inconnue. Je n’étais pas certain des effets qui naîtraient de sa pratique. En marchant, j’ouvris le livre, afin de le consulter, tout en songeant aux ordres que j’avais donnés pour le rapatriement d’Eméliana. Mon frère avait réglé les détails pour la sortir de la Terre d’Edel et j’avais pris le relai, en faisant affréter un navire qui l'avait attendue à la frontière de la Mer Maudite. Je regrettais de ne pas avoir eu l’occasion d’aller la voir entre la prise de la Terre Blanche et son retour à Nementa Corum. Je n’avais aucune idée de ce qu’elle avait vécu parmi les Chamans et les Ombres. Avait-elle appris des choses ? S’était-elle davantage ouverte au monde ? La Sorcière avait une propension à entrer dans le déni toute particulière. Ce qui ne lui plaisait pas était oublié avec une étonnante facilité. Je devrais la voir, dès que mon emploi du temps me le permettrait. Je pensai brièvement à ma sœur également mais la chassai de mes pensées. Elle était un poison.

Arrivé proche d’un ancien temple aux colonnades blanches, je trouvai une construction ressemblant à s’y méprendre à un pupitre. En face de moi, un amphithéâtre se tenait. Quelques Momies étaient inertes en son sein, bloquée dans leur parcours par la réalisation de l’ordre que je leur avais donné. Les Mages Noirs auraient pu avoir raison d’elles, ainsi immobilisées. Pourtant, elles étaient délicates à tuer. Le gaz qui se trouvait dans leur corps était mortel pour quiconque l’inhalait. Je posai le recueil et l’ouvris à la bonne page. Je remontai mes manches et fis apparaître une dague dans ma main. Je taillai mes poignets. Le sang gicla, intraitable. Je grimaçai, tout en lui faisant emprunter un chemin semblable au dessin de la page de gauche. Le symbole m’était connu. Je l’avais déjà vu plusieurs fois, sans être en mesure de le rendre signifiant. « Je suis le noir, le sombre, collé à toi, ton ombre. Je suis l’aboutissement de ta vie, la fin, le trou de ta tombe. Je suis ton pire ennemi, le cauchemar de ta vie, le temps qui passe et qui sourit devant ton agonie. » Le ciel, soudain, s’assombrit. Mon sang devint noir. « En fait, le but de ma quête est de créer des tempêtes dans les profondeurs de ton être. Je suis ton maître, le seul prophète. Viens lire dans mes tablettes. » De la poussière dorée commença à danser dans le liquide. Comme si le temps lui-même ralentissait, l’hémoglobine se mit à tomber plus doucement. « Tu seras mon adepte, alors accepte et, devant moi, baisse la tête. Je suis un Dieu qui dort dans les catacombes. » Derrière moi, un vortex de sang commença à se former. « Mon réveil sera furieux, tu verras comme je suis immonde. Maintenant, ne perds plus ton temps : va mon enfant, du pouvoir des ombres rejoint les rangs. » Les cieux, bientôt, ne furent plus qu’un amas de nuages violacés et terrifiants. Une douleur lancinante commença à m’enserrer. « Je suis le mal, l’impur, le maître de la luxure. L’avarice et le sexe sont les piliers de ma culture. Alors sois sûr, je serai vraiment dur, car telle est ma nature. M’opposer de toute ma haine contre les âmes pures, les hommes, les femmes, les enfants, à tous les opposants du pouvoir des ombres qui s’abat sur la terre maintenant. » Des flammes invisibles vinrent ronger mes entrailles. Le chant devait pourtant continuer pour réussir à rendormir les Momies. J’inspirai et me remis à articuler. La magie commença à aspirer mon sang sous terre. « Voilà, ma haine est si forte contre les hommes de foi qui ont osé claquer les portes fatales du mal. Ils ont inscrit sur une dalle les mots magiques des druides qui m’ont servi de pierres tombales. Mais maintenant j’arrive et le monde dérive. Tu ne pourras pas survivre car, de sang, je m’enivre. » Je frissonnai, pris d’une horreur injustifiée. J’avais l’étrange impression d’être l’esclave d’un dessein plus grand. « La terreur maintenant t’escorte. Le royaume de la peur qui ouvre ses portes. » Je vacillai, blanc comme les ailes des véritables détenteurs de cette terre. Ma magie avait drastiquement diminué, si bien que mon apparence factice avait été aspirée dans le néant. Ma vision se troubla par intermittences. Je m’appuyai contre le pupitre, constatant vaguement la présence d’un bâtiment immense, autant en largeur qu’en hauteur, et l’absence des Momies. Je reculai, nauséeux. Il fallait que je m’enfonce dans le temple, le temps de récupérer.

Quelques difficiles minutes plus tard, je perdis connaissance dans une allée voûtée. Le froid de la dalle ne fut pas une information que je ressentis, ni même le choc que ma chute causa à mon corps.

Manau - Un mauvais dieu, pour les dialogues du rituel