Partenaire : Solo
Intrigue/Objectif : Léto rend hommage aux Rêves

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Quelle était donc cette sensation ? Un frisson l'avait parcourue dès son entrée dans la chambre, à l'instant même où la Raya passa le rideau de perles colorées. Leur tintamarre s'éternisa durant son immobilisme, ses prunelles en amande écarquillées comme face à un danger. Mais cette fois, ce spectacle relevait davantage d'une anomalie. Bien évidemment, pour le membre préféré du harem – selon les propres affirmations de sa Maîtresse – ceci ne représentait pas sa première visite dans les quartiers royaux. À vrai dire, elle devait être la Chamane qui y passait le plus clair de son temps, après les quelques autres, les mêmes ayant tendance à se raréfier. Takhi en ignorait la raison principale : elle savait juste que son rôle devenait plus pressant depuis l'union de la Sùlfr avec le Darka'Mi'Truor ; ce dernier résidant sur le continent Naturel, les besoins de Léto avaient dû se multiplier. Au détour d'une conversation avec le prince Draaskag, il lui semblait avoir entendu la Hǫfðingi confier son ennui quant à cette distance. C'était en s'attachant davantage à ce que l'on chérit, qu'elle se rendit compte de son égoïsme. Mais que faire lorsque l'un est un espion pour la Marche Terne et l'autre une reine ? La Raya comprenait en partie les sentiments de la Souveraine et exécuterait le moindre de ses caprices pour entériner son chagrin, s'il en était bien un.

Ce fut avec cet état d'esprit que la brunette s'était à nouveau présentée dans le cocon de la Souriante, pour se confronter à un gigantesque dos musculeux. Oh bien sûr, à n'y regarder que d'un air distrait, ce ne serait qu'admirer la carrure de la Titanide. Toutefois, de minimes détails sautèrent aux yeux de la Raya, à commencer par le plus évident : la nudité de cette personne ne laissait aucun doute sur son appartenance à la branche masculine. Takhi déglutit, hautement impressionnée par la prestance de cet homme et par ses formes prodigieuses. Mais plus encore par son identité réelle : son visage ressemblait trait pour trait à sa Maîtresse. Se retournant vers elle, encore en train de s'étirer en cette éreintante matinée, le Titan lui offrit un sourire reconnaissable entre mille.

" Ah, Takhi ! Sa voix était suave, chaude, comme Léto. Pourrais-tu convier Minco ? J'ai passé une sale nuit… " Même apparemment fatigué, il semblait faire preuve d'une forme olympienne. Comme Léto, encore.

" Hǫfðingi, vous… Alors que le Sùlfr commença à s'intéresser aux palabres de sa favorite, un Esprit s'empressa de conter, en toute discrétion, la fameuse affliction de Léto. Oh, je… C'était surprenant et, dans le même temps, si propre à la Reine de faire preuve d'une telle prouesse, si c'en était bien une. Non, rien. "

La jeune femme trembla un brin sur place, mais plus pour les mêmes raisons que sa gêne vis-à-vis de son, tout compte fait, Roi. Ce fut plutôt une odeur assez agressive qui happa son attention, une forte concentration pigmentaire dans l'air qui aurait tôt fait d'asphyxier quiconque n'était pas Chaman. Ce fut à ce moment-là qu'elle les remarqua enfin : tous ces tableaux disposés un peu partout dans la chambre. Des grands, des petits, des plus détaillés, des plus diffus, des colorés ou des grisés. Ce n'était pas tant leur variété qui stupéfia la Raya'Ni que leur nombre indécent. Au vu des effluves, la peinture se montrait bien fraîche, comme si…

" M-Mon Roi, vous n'auriez pas… peint TOUT ça dans la nuit ? " Au-delà de l'exploit, elle s'inquiétait vraiment de l'état du peintre.

Léto haussa les épaules, avec son flegme si personnel. Peut-être gêné, peut-être fier, son regard vogua sur l'ensemble de ses œuvres avec un demi-sourire, ses mains accaparées à détendre les muscles de ses épaules et de son cou. Un autre détail incroyable dans ce capharnaüm étant qu'aucun colorant n'avait été gâché, pas une seule tâche sur le sol, les murs et encore moins les meubles. Même la peau du Souverain en était dénuée.

" Je ne m'en souviens pas. Il vint se tenir aux côtés de la Raya pour observer le chaos. Plus ou moins… Il se massa la tempe, préoccupé. Dans ces moments-là, Takhi préférait toujours le laisser réfléchir et s'exprimer jusqu'au bout. Les Esprits disent que j'étais en transe dans mon sommeil. Ma magie se serait emballée et aurait fait naître tous ces portraits. Il tenta de se faufiler sans en briser aucun par mégarde, afin d'en exhiber un. Ils ont l'air lié à des rêves, car j'ai fait celui-là avec ma femme. "

Takhi papillonna des cils face à l'œuvre onirique. Elle reconnaissait sans grand mal le Titan, assailli par des rubans sous le doigté d'une dame aux traits si caractéristiques. Miles Köerta ? Mais ce dernier n'était pas une femme… Pas plus que Léto était un homme, finalement. Minco aurait bien besoin de s'occuper autant de leur Souverain que d'elle, avec ce satané mal de crâne.

" Les rêves… Son ton fut plus doux et chuchoté. Ils m'intriguent. Les Ætheri ne me les ont pas montrés par hasard. C'est comme ceux avec cette Ange… "

" … Vous rêvez d'une Ange ? " Il acquiesça, taciturne.

" Depuis plusieurs nuits, je revois souvent cette femme, dans un désert interminable, sous une chaleur étouffante. Nous nous retrouvons au gré d'un feu, parfois accompagnés d'autres gens, nous buvons du thé pour nous réchauffer, nous confions nos peurs, nos aspirations, nous nous soutenons pour… pour je ne sais quelles raisons. Je n'arrive pas non plus à me souvenir de son nom… "

Il soupira. Ce n'était sans doute pas si important tant qu'il ne détiendra pas de plus nettes explications. Les Dieux pouvaient se montrer chiches en indices, il en était de même pour les rêves. Le Sùlfr se nota de consulter l'Oracle à ce sujet.

" Quoi qu'il en soit ! Il bomba le torse. J'ordonne que chacun de ces tableaux trouvent un nouveau propriétaire, j'exige de les envoyer aux quatre coins du monde. Il faut que ces songes subsistent dans notre réalité. Qu'on scinde ces œuvres en quatre collections distinctes. Je les baptiserai… "Festin Royal", "Ruban du Cadeau", "Ombre et Reflet", et "Amour". Il sourit. Oui, c'est parfait. En parlant d'Art : Au fait, où est Momo ? "

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Ses râles de plaisir s'intensifièrent à mesure qu'elle pressa son bassin contre le sien de manière plus effrénée. À califourchon sur lui, penchée en arrière, l'Orine coulait son regard dans le sien, sa main allant chercher tendrement celle du Roi lorsque ses traits se déformèrent sous les spasmes de sa silhouette imposante. Une fois qu'il finit en elle, il se retint tout mouvement qui pourrait s'avérer malencontreux pour sa partenaire. Léto connaissait les inconvénients de son corps et préférait laisser sa partenaire respirer, reprendre en main ses émotions pour se délivrer de leur connexion. Momoko tremblait encore lorsqu'elle réussit à s'allonger à ses côtés, moins qu'elle ne l'aurait cru cependant. Durant sa reprise de souffle, elle songea à la dernière fois où elle avait partagé une telle intimité avec sa Maîtresse ; c'était il y a longtemps. L'Orine l'avait accompagnée sur l'Île Maudite, elle s'était familiarisée aux coutumes de son peuple, elle avait pu admirer la Sùlfr s'élever… et s'éloigner peu à peu. Au fond, son isolement sur Orahza l'avait davantage blessée, car elle demeurait loin de Léto. Le mariage de cette dernière l'avait comblée, la Muse ayant eu l'occasion de jouer de son tambour pour les heureux élus. Une exaltation de joie dans la tempête de solitude. De Souw à Hǫfðingi, la Souriante n'était juste plus la même… Et pourtant aujourd'hui, elles s'étaient à nouveau réunies dans le cercle de combat, l'exercice ayant provoqué le contact de leurs peaux, ses améthystes raccrochées à l'ocre et l'écarlate de ses œillades. Le Lien lui avait fait ressentir cette étincelle si ténue, ravivée par la flamme de l'adrénaline, jusqu'à l'embrassade et le coït s'ensuivant. Servir était un devoir, toutefois l'Orine captait l'affection que lui portait Léto. Ainsi, même lorsque sa Maîtresse s'était présentée sous cette forme masculine, c'était comme si rien n'avait changé : c'était le Titan. Et par Kennocha, qu'il était dangereux. Elle déglutit et se détourna de sa virilité hors du commun. Léto lui tendait en réalité de quoi boire depuis tout à l'heure et semblait s'amuser de la fausse absence de son Orine.

" Tu t'es endurcie, je suis encore un bon enseignant. " Son sourire était à l'identique, qu'il fût un homme ou une femme.

La brune s'empara de l'eau comme si cela allait la sauver, une récompense bien méritée pour une apprentie.

" Merci. " Pour l'eau, pour les esquisses de leur duel, pour leurs tendres ébats ; pour être là.

Un Esprit l'avait prévenue de l'arrivée imminente du "Roi", ce qui lui valut une sacrée surprise lorsque Léto se présenta sur sa propriété légitime. Si peu de présences rôdaient au sein de cette parcelle, l'Orine ne pouvant profiter que de la candeur de Ponpon, le petit Eversha – supposait-on – Lapin qui s'occupait de ses congénères animaux.

" Je compte rester le temps de quelques travaux. Il glissa son attention sur l'intérieur du tipi, terriblement vaste mais pas sur les plans finaux. Quelques suggestions me trottent dans la tête… Dont une… " Il ne rajouta rien sur l'instant.

Captivée, Momoko le fixa en attendant ses confessions. Elle le connaissait très bien, bavard comme pas deux. Si ses réflexions bouillonnaient, il finirait forcément par les sortir. Cela s'avérait d'autant plus vrai lorsqu'il était seul : constamment entouré de spectres, il lui suffisait de lâcher quelques phrases gavées de mystères pour ravir les défunts. Il s'en amuserait et leurs commérages serviront ses desseins. Ainsi était le Maître des Esprits, depuis de nombreuses générations. Une bague semblant forgée dans le marbre apparut dans sa main, il la leva au plafond pour la contempler. L'Orine s'accola à son épaule pour mieux suivre son regard.

" Ces derniers temps, mes pas me guident sur des sentiers au-delà de notre monde. Il y a quelques lunes, des songes se sont matérialisés sous mes coups de pinceaux. C'est comme si je transcendais mon Corps. Je vois… plus loin qu'à travers mon Esprit. Momoko garda le silence, convaincue que les Dieux parlaient par son biais. J'ai la ferme conviction que cette bague me permet de traverser ce voile. Au moins quelques temps pour… agir. "

" C'est ce bijou qui te transforme en Ange ? Il approuva sans délier les lèvres. Qu'est-ce que les Anges ont à voir avec nous ? "

" Rien. Pour l'instant, rien… Si son prédécesseur possédait un tel artefact, ceci devait signifier tout le contraire. Et plus que cela, il se rappelait encore cette Kiir'Sahqon, la Grincheuse des Dunes. Mais ce ne sont pas à eux que je pense, ce sont aux Réprouvés. Il fit disparaître la bague magiquement. Je vais les faire venir ici, d'une manière ou d'une autre. J'ai besoin d'eux pour notre projet d'arène. " Plutôt surprise par la révélation, la Yin se redressa.

" On va vraiment la faire, cette arène ? " Léto l'avait tellement émerveillée avec ses histoires sur l'Arène de Cristal, la Chamane avait dépeint les combats comme si elle les dessinait elle-même.

" Bien sûr ! Notre modeste cercle deviendra un gigantesque édifice, avec des estrades tout autour sur plusieurs étages, des murs très grands, et surtout des guerriers, des furies, et des monstres à foison ! Un rire bref. Mais c'est bien plus pour nous amuser que je veuille faire ça. J'ai un rêve, justement, que je veux concrétiser. Il fronça un brin les sourcils, l'air effronté. Un rêve que je veux réaliser avant de le peindre partout sur les murs de l'arène. Avant qu'elle tentât de lui arracher ses pensées, il se tourna en sa direction. Néanmoins, j'aimerais que tu quittes Orahza, le temps de quelques préparations avec les Réprouvés… et les Chamans. L'Orine ne répliqua pas, s'engonçant dans sa déception. C'est temporaire, je ne voudrais pas t'écarter de ce projet. Puis chère Artiste, j'aimerais que tu me suives à Zaowa pour me donner ton avis sur mes dernières créations, avant que je ne les expédie définitivement. " Un demi-sourire raviva le visage de Momoko.

" Elles sont superbes. " Il haussa un sourcil.

" Tu ne les as pas encore vues. "

" Je n'en ai pas besoin. Même s'il est vrai que je suis plutôt curieuse de les admirer. "

Elle en jouait et cela lui convenait ; leur alchimie fonctionnait. Aux prémices de leur relation, autant Momoko que Léto furent incertaines d'un tel lien, la tromperie sur son identité étant en grande partie un accident plutôt qu'une malsaine intention. Mais finalement, pour une Orine, qu'il fût homme ou femme, le Maître demeurait un être cher.

Soudain, une petite boule blanche atterrit sur le lit. La joueuse de tambour soupira très fort, toujours pas habituée à de tels aléas.

" Zut, ils se sont encore écha… ppés… ? "

La Muse papillonna des yeux, son attention entièrement portée sur Léto qui fixait le lapin. Puis, les autres lapins qui arrivaient, qui sortaient d'à peu près partout, du moindre recoin de la pièce. Même jusqu'en dessous des draps. Lorsque les protégés de Ponpon se frayaient à travers une faille de l'enclos, cela ne devenait jamais aussi catastrophique. Toutefois, ce à quoi elle assistât dépassait bien plus ce désagrément somme toute mineur.

" Momo… Le Chaman se tourna vers l'Orine, horrifié. Les lapins me parlent ! " Sur sa tête se dressaient deux grandes oreilles de lapin. Mignon.

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