Partenaire : Solo.
Intrigue/Objectif (défini par I² ici) : Une porte de sortie – On vous a pris ce qui vous était le plus cher, et vous êtes prête à tout pour sauver Hena des griffes des Goled. Cependant, vous ne pouvez vous permettre de foncer tête baissée : le nombre total d’ennemis est encore inconnu et vous connaissez trop peu les lieux pour vous jeter dans la mêlée sans un plan. Toutefois, les informations fournies par les indigènes orishas donnent une lueur d’espoir quant à la possibilité d’un sauvetage : les souterrains pourraient être une porte de sortie pour évacuer les prisonnières. Mais encore, il faut savoir lesquels emprunter. Votre mission sera donc de trouver le chemin pour vous rendre jusqu’au trou dans lequel se trouve les femmes prisonnières. Les indigènes orishas vous serviront de guide alors que la capacité des Ygdraës à ressentir le Yi permettra de localiser les victimes. (Par contre, dès que vous les aurez localisées, il faudra attendre le OK de Ramiel pour passer à l’action.)


Recroquevillée dans son lit, elle ne savait pas pourquoi elle avait refusé. C’était idiot. Lorsqu’ils étaient rentrés, elle s’était effondrée près de sa tente et n’avait rien dit durant un long moment. L’heure du repas advenue, elle avait à peine touché à son assiette. Elle s’était forcée simplement parce qu’il fallait manger, pour retrouver des forces, pour pouvoir être efficace, pour Hena et Nawen. Elle n’avait pas faim et chaque bouchée avait été difficile à avaler. Des briques encombraient son estomac. C’était comme si ses poumons et son cœur pesaient dessus, incapables de se soutenir d’eux-mêmes. Elle avait mal, de ces douleurs qui s’accrochent et engourdissent tout. L’Ange ferma les yeux et se tourna dans son lit. Sa dispute avec Adriel avait éclaté après. Elle n’aurait pas dû s’énerver, pas quand il essayait juste d’être prévenant, pas contre lui, alors qu’il s’était montré présent presque depuis le début de ses leçons sur la maîtrise du métal. Déjà, elle regrettait amèrement ce débordement. Mais en voyant les membres de l’expédition revenir les mains vides, la rage avait balayé la morosité de la tristesse. C’était elle qui l’empêchait de dormir, désormais. Elle ressassait. Elle ressassait et s’impatientait de savoir ce que les indigènes apprendraient au Général Vaughan. Peut-être qu’il organiserait une expédition de nuit ? Peut-être ferait-elle mieux de rester éveillée ? Pourrait-elle aider, elle, simple recrue ? Pis encore, recrue sans mentor ?

Le sentiment d’urgence ne la quittait pas. Il lui brûlait les entrailles. Elle se retourna pour se mettre sur le dos et posa ses paumes sur ses paupières fermées. Comme elle les pressait, elle inspira longuement. Elle chercha au plus profond d’elle-même ses dernières ressources d’énergie – les combats, puis les pleurs et la colère l’avaient accablée de fatigue. Méticuleusement, elle plaça un à un les verrous destinés à contenir ses émotions. Une petite cage pour chacune, jusqu’à ce qu’il ne demeurât plus rien. Juste un vide abyssal, où rien ne vit et rien ne meurt. Le néant. C’était une tâche fastidieuse, qui acheva de l’exténuer. Elle ne sut trop si elle s’endormit d’épuisement ou d’apaisement. Les deux, sans doute.


Le réveil fut lent mais violent. Il y a toujours un temps où l’acuité de la réalité laisse à désirer. Le monde des songes retire sa main progressivement : les aspérités sont alors dévoilées. Le goût amer de la veille lui revint immédiatement en bouche, et l’Ange, défaite des cadenas qu’elle avait installés, sentit la négativité s’appuyer sur ses épaules. Elle se leva et se prépara en hâte. La fébrilité et la force se mêlaient dans un ballet chaotique. Elle avait autant envie de sortir pour savoir ce qu’il était prévu de faire que de rester dans son lit pour éviter toute mauvaise nouvelle. Se morfondre sur des hypothèses demeurait, somme toute, moins douloureux.

Alors qu’elle s’apprêtait à sortir de la tente, son œil fut attiré par l’éclat brillant de la bague que Kaahl lui avait offerte. Le temps d’une seconde, elle hésita, les yeux rivés sur le bijou. Puis, elle s’accroupit et l’attrapa. Entre son pouce et son index, elle fit rouler l’objet. Lorsqu’elle l’avait avec elle, c’était autour de son cou, au bout d’une chaîne, afin de le cacher sous ses vêtements. Quelques jours plus tôt, elle avait envisagé de la porter à la main, comme une provocation après que le verdict des médecins eut été donné. C’était chose faite. L’Ange pinça les lèvres. Le désir incongru mais intense que le Magicien fût là rompit l’âpreté de ses émotions. Elle aurait aimé pouvoir se blottir dans ses bras, à la recherche du réconfort qu’ils avaient déjà su lui procurer. Elle aurait aimé pouvoir sentir son odeur, son cœur battre contre le sien et sa main caresser ses cheveux. Ce n’était qu’une chimère, une espérance insensée. Il avait d’autres obligations, tout comme elle avait les siennes. Un soupir discret lui échappa, puis, d’un geste déterminé, elle passa l’anneau à son doigt. De cette façon, il serait un peu avec elle. Peut-être. C’était juste psychologique et elle en avait conscience. Peu importait ; dans la pénombre, n’importe quelle source de lumière était la bienvenue. Elle en avait besoin. La nuit avait remis de l’ordre dans ses pensées et ses ressentis. Adriel avait raison. Il ne fallait pas se décourager. Malgré tout ce que l’on savait des Goled, il restait peut-être encore un espoir. Et le commandement ferait tout ce qui était en son pouvoir.

« Recrue Belegad. » Laëth, occupée à polir ses armes, releva la tête. L’un de ses supérieurs se tenait devant elle, droit et élégant dans son uniforme. Aussitôt, elle délaissa son ouvrage et se leva. Elle le salua selon l’usage. « Vous vous joindrez à la mission de reconnaissance qui doit se rendre dans les souterrains. » Le cœur de la jeune femme fit un bond. D’abord, parce qu’elle effleurait du bout des doigts l’opportunité de retrouver sa mentor et le médecin. Elle ne s’y était pas préparée, songeant avec insatisfaction qu’elle passerait probablement la journée dans l’attente de nouvelles de leur part. Ensuite, et surtout, parce que son esprit associa rapidement le mot « souterrains » à un espace clos, sombre et étroit. Depuis des années, la claustrophobie lui tenait compagnie. Tous les endroits trop exigus déclenchaient dans sa poitrine une panique génératrice de difficultés respiratoires. A ce souvenir, un frémissement la parcourut de bas en haut, cependant, elle se fit violence pour ne rien en montrer. Il n’était pas question de se décourager face à cette vieille peur. Au contraire : il fallait apprendre à l’affronter. Comment pouvait-elle espérer devenir une guerrière accomplie si elle se laissait freiner par des terreurs d’enfant ? L’occasion de se prouver qu’elle était capable de lui faire face se présentait : il lui fallait la saisir. En outre, elle ne serait pas seule : des Magiciens et des Ygdraës, ainsi que quelques Anges, formaient ce groupe de reconnaissance. Si jamais elle ne se sentait pas bien, on pourrait sans doute lui fournir de l’aide. Mais tout se déroulerait sans accroc : elle arriverait à gérer sa phobie. Il le fallait. Pour Hena. Pour Nawen. Pour sauver leurs deux vies. C’était important. A cette idée, elle sentait sa poitrine se gonfler de courage. « Bien. Merci, Capitaine. » Le soldat mit son poing sur son cœur puis s’éclipsa. Sans tarder, la jeune femme se précipita dans sa tente pour revêtir son équipement. Tandis qu’elle laçait ses bottes, elle regarda la bague à son doigt. Si elle la retirait, elle aurait une meilleure prise sur ses armes. Pourtant, elle ne parvint pas à s’y résoudre. Après tout, Kaahl avait mentionné un pouvoir. Peut-être se révélerait-il providentiel, une fois sous terre ou face aux Goled ?

Les Orishas avaient fourni des informations précieuses quant à la localisation des Goled. Ils avaient confié l’existence d’un réseau de galeries souterraines au Général Vaughan qui, avec ses conseillers, y avait vu l’occasion de se rapprocher de leurs ennemis sans être repérés, et d’évacuer les deux prisonnières. Il avait aussitôt formé une équipe. Celle-ci, dès qu’elle fut au complet, suivit les autochtones. Sous un ciel nuageux et une atmosphère lourde d’une pluie prête à s’abattre, le groupe retourna aux ruines. Sans les quelques taches de sang qui maculaient des roches, çà et là, on n’aurait presque jamais pu deviner qu’un combat, plus récent que celui qui avait pu détruire les constructions, s’était déroulé ici. Les iris de Laëth couraient nerveusement sur le paysage. Adriel marchait près d’elle, silencieux. Elle lui avait demandé pardon quant à son comportement de la veille ; pardon qu’il avait accepté d’accorder. Son mutisme ne résultait que de l’appréhension qui serrait ses tripes, à lui aussi. Après quelques mètres supplémentaires, les Orisha leur indiquèrent de s’arrêter. Ils se trouvaient sur les décombres de ce qui ressemblait à un ancien lieu de culte. Les débris de mur présentaient un travail de fresque et de bas-relief. Deux des indigènes se penchèrent et tirèrent une lourde plaque de pierre : l’entrée des souterrains apparut aux yeux de tous. Laëth serra la main sur le manche du couteau qui pendait à sa ceinture tandis que son cœur s’emballait et que sa respiration s’accélérait. « Ça va ? » demanda Adriel, soucieux. Elle acquiesça, muette. Il fallait que ça allât. Elle n’avait pas le choix. « On agit comme convenu : une part des effectifs reste ici afin d’assurer le relai et d’intervenir en cas de besoin. Le reste, on descend. Restez groupés. N’oubliez pas que nous sommes en contact les uns avec les autres grâce au Général Vaughan. Ne fermez pas totalement vos esprits. » Même s’il était à peu près certain qu’il aurait pu s’imposer à n’importe lequel d’entre eux, il ne fallait pas faire barrière à la circulation de l’information. Son regard passa sur chacun des concernés, dont les deux Anges. Un à un, ils s’engagèrent sur l’escalier qui menait aux sous-sols, suivant les quelques Orishas ayant accepté de les guider.

Les boyaux de la terre étaient sombres et glacés. Loin de la lumière extérieure, il y régnait une atmosphère froide et lugubre. Une lueur magique suivait le groupe où qu’il se rendît. Elle éclairait tantôt des pans de murs, tantôt des surfaces boueuses. Le parfum qui en émanait ressemblait à celui de la nature après la pluie, en plus lourd. Laëth exerçait un contrôle total sur sa phobie, bien déterminée à ne pas se laisser déborder par celle-ci. Au sein d’elle-même, elle l’avait assiégée de sorte à ce qu’elle ne pût pas s’exprimer du tout. Au retour, elle serait fatiguée. Pour le moment, c’était nécessaire. Elle savait qu’elle devait faire ses preuves. Sa présence dans ce groupe pouvait se justifier de différentes façons ; elle y voyait une manière de mettre son tempérament à l’épreuve. Un guerrier ne devait pas se laisser dépasser par ses émotions. Il devait les maîtriser. Y parviendrait-elle, s’ils approchaient des victimes ? Si elles étaient encore en vie ? Saines et sauves ? Réussirait-elle à tout contenir sans imploser ? « Respire. » souffla l’Ange blond qui marchait à ses côtés. Dans un élan de surprise, elle releva la tête vers lui. « Tout va bien se passer. Nous les trouverons. Et nous ressortirons sans problème. Les Ygdraës sont capables de se souvenir de n’importe quoi : ils se rappelleront du chemin pour rentrer. » Elle opina, puis déglutit. Elle avait la gorge sèche. « J’ai peur de ce qu’on trouvera. » Ils parlaient bas, de sorte que leurs paroles devaient être inaudibles pour les autres. Adriel esquissa une moue dérangée. « J’espère de tout cœur qu’elles vont bien. » Il s’arrêta un instant, avant de reprendre : « Elles sont pleines de ressources. Nawen est médecin et elle est très intelligente. Hena est une guerrière aguerrie, et je crois que je ne l’ai jamais vue se décourager. Elles sauront se serrer les coudes. » - « Je l’espère… » Elle pensa brièvement aux enfants Lemingway. A Brethil, à Kyra, à Nefraïm, à Jessica. Si Nawen mourait, comment leur annoncer qu’elle avait péri dans la douleur et l’horreur ? Elle n’osait pas imaginer leurs réactions. La fille de Réprouvés n’avait jamais eu à informer de la mort de qui que ce fût. A Lumnaar’Yuvon, elle y avait été confrontée plusieurs fois, mais jamais de façon intime. Au demeurant, les Bipolaires ne la considéraient pas avec la même tristesse que les Anges. Le voyage continuait. Ses croyances s’étaient altérées depuis son arrivée parmi les Ailes Blanches. A ce jour, la mort la troublait, sans l’inquiéter. C’était un spectre lointain, qui paraissait incapable de l’atteindre. Elle ne l’avait jamais senti si proche que depuis l’enlèvement de sa mentor. Hena, de son côté, n’avait plus personne. Seulement quelqu’un avec qui elle avait partagé un amour fort et prospère, jusqu’à la guerre qui les avait conduits à se déchirer. Laëth se demandait, parfois, quel était véritablement l’état actuel de leurs sentiments. Je ne l’aime plus, mais j’aime encore le souvenir que j’en ai, lui avait-elle dit. Il devait rester de la tendresse, diluée dans la mélancolie. Serait-il peiné, s’il apprenait son décès ? A quel point ?

A un croisement, ils s’arrêtèrent. Plusieurs galeries s’offraient à leur vue. Les Orishas, incertains, échangeaient dans leur dialecte, autant entre eux qu’avec les Ygdraës. Les Magiciens et les rares Anges se tenaient en retrait, attentifs mais silencieux. Laëth scruta les bouches noires qui s’ouvraient devant eux. Elle aurait aimé qu’ils n’eussent pas à s’interrompre. Ce n’était pas la première fois qu’ils y étaient contraints depuis qu’ils marchaient dans les souterrains. Parfois, les Magiciens avaient dû user de leur art pour créer des passages là où la boue leur barrait la route. Elle aurait voulu qu’ils les parcourussent au pas de course et qu’ils trouvassent immédiatement les deux captives. C’était impossible. Elle le savait. L’espoir ne pouvait s’empêcher de s’agiter, et la peur de rôder. « Par ici ! » s’exclama l’une des Elfes après quelques minutes. Joignant le geste à la parole, il s’engouffra dans l’une des artères d’un pas décidé. Adriel se rapprocha de l’un d’entre eux, avec lequel il avait sympathisé au cours de plusieurs parties de jeux de cartes et de Hagydz. « Les sentez-vous ? » L’intéressé acquiesça. « Il est impossible de savoir avec certitude s’il s’agit bien de Nawen Lemingway et de Hena Lilayel, mais il y a bien une présence, plus loin dans ce labyrinthe. Plusieurs présences… » ajouta-t-il, l’air songeur. Laëth les écoutait, le cœur battant. Comme elle sentait des larmes d’émotion gravirent sa cornée, elle se contraignit en imposant un énième verrou. Elle devait garder le plein contrôle de ses capacités. Elle ne devait pas s’émouvoir. Si elle perdait ses moyens, elle pouvait autant compromettre sa carrière militaire que la mission à laquelle elle participait. Ni l’une ni l’autre de ces possibilités n’était souhaitable. Surtout pas la seconde.

L’une des Elfes leva la main, et tout le groupe se figea. Face à eux, une paroi se dressait. Elle était faite de terre et de pierres, agencées de sorte à solidifier la construction. « Voulez-vous que l’on dégage le passage ? » s’enquit l’un des maîtres de la magie bleue en s’approchant. « Non, pas tout de suite. » Deux Sylvestres échangèrent un regard entendu. « Elles sont là. Je reconnais leur Yi. » Laëth cessa de respirer. Le sang afflua à ses tempes avant de se propager dans tout son corps avec une force nouvelle. Vivantes. Elles étaient vivantes. Plusieurs questions émergèrent de son intellect : comment allaient-elles ? Pouvait-on communiquer avec ? Souffraient-elles ? Où étaient les Goled et que faisaient-ils ? Les avaient-ils déjà violées ou avaient-elles pu jusque-là échapper à leur étreinte destructrice ? Étaient-elles blessées ? Affamées ? Déshydratées ? Toutefois, elle s’efforça à ne rien demander. Hena le lui avait suffisamment répété : dans les instants de crise, rien ne servait de s’agiter dans tous les sens. Les actions claires et précises étaient toujours plus percutantes. Pour y parvenir, il fallait un temps de réflexion, et non pas foncer dans le tas tête baissée. Il lui fallait donc attendre. Ce qu’elle détestait faire ; mais ce à quoi elle consentait à s’astreindre pour le bien des deux femmes recluses derrière le mur. « Elles ne sont pas seules. Je sens une dizaine d’autres personnes, avec elles… Ce ne sont pas des Goled. » La Recrue cligna des yeux. D’autres prisonniers ? Les Goled possédaient-ils donc toute une réserve de victimes prêtes à l’emploi ? Et si c’était pour cette raison que Hena et Nawen avaient été épargnées ? Parce qu’elles ne figuraient pas encore en tête de liste… Un frisson griffa son échine et elle se rapprocha un peu plus d’Adriel, jusqu’à l’effleurer sans s’en rendre compte. L’Ygdraë se tourna vers les Orishas et commença à leur parler, dans leur langue qui sonnait si particulière aux oreilles de l’Ange. Un frémissement parcourut les autochtones et une agitation sembla s’emparer de certains d’entre eux. Ils s’échangèrent des regards et des paroles sur un ton fiévreux. « Que se passe-t-il ? » - « Ils… Plusieurs années auparavant, des fillettes ont été enlevées par les Goled. Nul ne sait ce qu’elles sont devenues. » Un silence pesa, puis l’Elfe conclut : « Ils supposent que les Yi que nous détectons pourraient être les leurs. » Etonnée mais plus déterminée encore, la brune serra les poings et les dents, en proie à une excitation difficilement supportable. Personne ne bougea. Il n’y eut même pas la clameur d’un murmure. Comme elle avait du mal à écarter le trouble qui la secouait, elle jeta une œillade à Adriel et, croisant son regard, ne put s’empêcher de s’exclamer tout bas, avec agacement : « On doit y aller ! Qu’est-ce qu’ils attendent ? Il suffirait que les Magiciens percent le mur ! » - « Les ordres. » répondit-il le plus simplement du monde. « Comme toi. » Il lui servit une expression appuyée qui laissait entendre que si elle ne tenait pas en place, il l’y ferait tenir contre son gré. Elle fit claquer sa langue contre son palais et croisa les bras, brûlante d’impatience. « Chaque seconde qui passe, c’est une chance de plus pour que les prisonnières soient violentées. » Le blond lui coula un regard froid ; son insensibilité apparente la fit d’autant plus bouillir. Elle sentait les cadenas tressauter, comme si on les soumettait à une pression trop forte. Si elle n’essayait pas de se calmer, ils se briseraient. Elle inspira bruyamment afin de reprendre contenance. De toute façon, seule, elle ne pourrait rien faire. « Perce-t-on le mur, Capitaine ? » interrogea l’un des membres du groupe, soulevant la question que tous se posaient. Les regards convergèrent vers le gradé, qui se détacha de l’assemblée. « Non. Le Général Vaughan a demandé à ce que nous attendions son aval. » Il s’approcha de la paroi et laissa sa main glisser dessus. « Nous ne savons pas exactement ce qui se trouve derrière, de toute façon. Essayez de mesurer son épaisseur, pour commencer, voulez-vous ? » demanda-t-il aux concernés, qui hochèrent la tête avant de s’exécuter. Le Capitaine, qui avait veillé à garder contact avec leur commandant, lui adressa ce message télépathique : « Général Vaughan. Il n’y a plus qu’une paroi entre les captives et nous-mêmes. Quels sont vos ordres ? Les Magiciens affirment qu’ils sont capables de percer le mur. »