Lacuna Coil – Losing my religion

Partenaire : Lydia.
Intrigue/Objectif : Lydia et Era sont réunies par des Démons pour réaliser des travaux forcés. Ce sera l’occasion de tisser des liens, de rêver d’un futur fantasmé et, peut-être, de se soutenir dans ce quotidien infernal. Toutefois, pas trop de bavardages ; les geôliers sont proches, et si elles n’effectuent pas leur tâche, les conséquences seront terribles.

Era ne savait pas gérer la tristesse. Elle pleurait, parce qu’elle était faible, démunie, et coincée avec des êtres qui, non contents d’exercer un ascendant hiérarchique sur l’esclave qu’elle était, pouvaient s’avérer bien plus puissants qu’elle ne l’était. Elle pleurait de rage. Des larmes de fiel, qui traçaient des sillons nimbés de haine, et laissaient un goût amer en bouche. Parfois, elle se trouvait plus proche de la mort que de la vie, poussée au bord d’un précipice qui attirait tout son corps et toute son âme. Il aurait suffi d’un coup de lame contre sa jugulaire, et tout aurait été terminé. Seules deux choses la retenaient. D’abord, la peur de la mort qui tenaille la plupart des êtres. Ensuite, Priam. Elle y pensait souvent, en rêvait parfois, espérait toujours. Elle sortirait d’ici, elle le chercherait, et elle le rejoindrait. Ses yeux d’or la hantaient. Son visage, aussi, et puis tout le reste. Il avait dû changer, depuis le temps. Il devait s’être renforcé, ses muscles avaient dû se développer, et son esprit devait être plus ferme et plus brave. La blonde songeait qu’elle aussi, un jour, serait tout autant capable. Elle trancherait des montagnes à coup de hache.

Ces espoirs-là la galvanisaient toujours, surtout quand ça n’allait pas. Ce jour-ci, tout allait bien. Du moins, tout allait aussi bien que possible au beau milieu d’une Terre Blanche grouillante de Démons. On lui avait raconté qu’autrefois, les Anges régnaient en maître sur ces territoires parcourus de promesses. Elle avait du mal à se le figurer. Dire qu’elle était devenue l’une de ces putains d’emplumés… Lumnaar’Yuvon et les Réprouvés lui manquaient. Eux, au moins, ils savaient se défendre. Et faire la fête. Elle se serait bien taillé une tranche de pain et de saucisson, et descendu une bonne bière. La flotte croupie et le pain rassis des Vils, merci mais non merci. Ils pouvaient se les mettre là où elle le pensait. Et s’ils ne le faisaient pas, elle s’en chargerait elle-même, un jour. Une main claqua sur ses fesses. Surprise, elle fit volte-face, prête à cracher au visage de son assaillant, mais ce qu’il dégageait – ainsi que l’énorme masse qui pendait à son flanc – l’arrêtèrent nette dans son entreprise. Il ne lui était pas inconnu. C’était le superviseur de ses actuels travaux. Elle ravala son mollard avec une grimace. Le Démon lui ricana au nez, d’un rire tonitruant. « Vraiment la même gueule, c’est fou. » Toujours la même rengaine, c’était fou. Il attrapa son menton entre ses doigts calleux et planta ses yeux dans les siens. Ses mains lui rappelaient la rudesse de celles des travailleurs des champs. Elles ramenèrent des souvenirs peu appropriés, entre deux buissons ou dans le cours d’une rivière. « J’imagine qu’elle a pas le même cocard que celui que t’as sur la tronche, mais bon… » Un sourire goguenard tordit ses lèvres de perfide. « Ça lui ferait peut-être plaisir qu’on lui envoie ton corps. En pièces détachées. » Un nouveau gloussement désagréable racla sa gorge. Era frissonna. « Elles sont pas très bonnes, les relations entre les Réprouvés et les Anges. Ils vont sûrement encore crever un coup, puis y’aura plus que vous. » Sa paume descendit sur son cou, tandis que son autre main agrippait sa taille. « Juste pour nous. » Son rictus se contorsionna. Il prit cette teinte qui lui faisait toujours froid dans le dos et lui donnait envie de détaler à toutes jambes. Elle crut qu’il allait la violer ; son cœur s’emballa, ses pupilles se dilatèrent et la peur fit frémir ses narines.

« Sven, c’est bon, j’en ai une autre. » - « Ah, parfait. » Il lâcha brutalement Era, la repoussant contre un pilier couché au sol. Propulsée, elle trébucha et tomba assise sur la colonne. Un grognement lui échappa et elle lança un regard noir au Démon. Heureusement pour elle, il s’était déjà détourné. Une Ange blonde accompagnait l’autre geôlier. Le clone de Za la connaissait, de vue. « Bon alors. Ecoutez-moi bien, vous deux. » La seconde Ailée fut jetée à côté d’elle. « Vous avez de la chance, vous allez pas trimer à la mine. Aujourd’hui, c’est étiquetage. » Grâce à la magie, il fit apparaître plusieurs caisses, desquelles dépassaient des monticules gluants et luisants. Une odeur de sang prit l’Ange à la gorge. D’autres boîtes contenaient des récipients en verre. « Vous rangez les organes dans les bocaux et vous collez la bonne étiquette dessus. Si c’est mal fait, on vous écartèle et on vous donne à bouffer aux autres. » Il rit. Era fixait les morceaux de chair sans ciller. Elle en avait vu plusieurs fois, chez elle. « Puis ce qu’il resterait… d’autres de vos petits camarades s’amuseraient à ranger des parties de vous dans des pots. » C’était donc pour cela qu’elle se voyait plus écœurée que les fois précédentes. « Nous, on sera juste là. » fit-il en indiquant une table et deux chaises, quelques mètres plus loin. Des jeux et des boissons reposaient dessus. Les deux ignominies tournèrent les talons et allèrent s’asseoir.

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