Musique

« Je vais chercher le tissu ! » Iels avaient trouvé le cadeau qu’iels voulaient faire, il ne restait plus qu’à le confectionner. Le jeune Rehla était ravi parce qu’il avait alors l’occasion d’apprendre comment ses parents confectionnaient ces pièces si particulières et surtout il avait la possibilité de voir comment et à quel moment sa mère allait enchanter le tissu. Chaque année, c’était la même chose, c’était pour Daé un moment fascinant. Il voulait qu’il dure des heures. En plus de ça, jamais en plusieurs dizaines d’années de tradition, iels n’avaient été dérangées par une obligation. Peut-être que les prières assidues de la famille étaient entendues, le répit leur était accordé pour un jour.

Sur un coin de la table, Kro se réjouissit de ce voyage, elle portait un petit pendentif gravé du symbole de Dasha qui la protégeait pendant sa traversée des terres. La petite famille s’était mise à découper le tissu que le Somnae avait ramené.

C’était une tradition dans la famille rapprochée de Daé. A chaque fois que la nuit se rallonge, le Somnae et ses deux parents se réunissent autour d’une table et envoient dans le monde, grâce à la chouette de son père, un présent à quelqu’un. C’est Kro, la chouette, qui décide à qui il sera porté, mais c’est l’occasion pour la famille de se retrouver.

Le tissu était d’un noir profond avec des reflets irisés violets, il était relativement lourd et lorsque Daé passa son doigt dessus il sourit tant il aimait les matières satinées. Le Somnae laissa ses parents faire la partie la plus complexe, car pour que l’enchantement soit efficace il fallait que les trois pièces créées soient exactement pareilles en termes de taille. Il alla donc préparer trois chocolats chauds avec du lait d’amande que son père faisait lui-même et du chocolat qu’iels avaient ramené d’un voyage spécialement pour cette occasion.

Une fois que les pièces furent découpées et qu’une pause syndicale ayant pour but de boire du chocolat et de se raconter les dernières anecdotes de Nementa Corum et de Lua Eyael fut réalisée, les trois compères passèrent à la réalisation de la partie que préférait Daé. La symbolique. Armé d’une aiguille et d’un fil violet assez épais, il se mit à représenter tout le long de ce qui ressemblait maintenant à une belle cape noire doublée par un tissu violet très foncé des constellations qui l’inspirait. Pour qui n’aurait pas l’œil astronome, les points violets disséminés sur le bord de la cape dont s’occupait le Somnae n’auraient sûrement pas de sens, mais pour qui avait déjà pris le temps d’écouter un peu les étoiles, iel saurait qu’elles l’accompagneraient.

Après une heure de broderie, Daé et ses parents regardèrent leur ouvrage en souriant. La partie la plus mystérieuse arrivait maintenant. Les deux parents de Daé lui prirent la main pour former un cercle autour des trois capes empilées avec soin les unes sur les autres. Après que les trois aient fermés les yeux, le Somnae plus pour la tradition qu’autre chose, le père de Daé lui proposa d’essayer pour voir si l’enchantement avait marché. Le jeune Rehla ignorait où ses parents avaient appris ça, mais il savait qu’ils avaient une boutique à Nementa Corum où iels vendaient ce genre d’objets et il supposait qu’iels avaient dû ramener ce savoir de l’un de leur voyage.

A peine la cape fut enfilée que les deux autres capes furent soudain soulevée dans les airs et portées par deux répliques conformes et légèrement translucides de Daé. Les deux clones créés alors bougeaient exactement comme lui, même si certains semblaient se décaler parfois de quelques secondes. Comme si le sort n’était pas tout à fait effectif. Sa mère essaya à son tour et cette fois les répliques étaient parfaitement opaques et l’une d’elles semblait même choisir de faire certaines actions parfois. Les trois éclatèrent de rire quand la mère de Daé se mit à danser une ronde avec ses clones.

Iels emballèrent les capes dans une étoffe résistante aux intempéries et la confière à la chouette. Kro devint soudain bien plus grande et imposante et s’en alla dans les cieux. En la regardant partir, Daé se demandait qui aurait la chance de tomber sur cet ouvrage et se réjouissait de peut-être un jour, croiser quelqu’un porter ces capes.

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