Nicolae était dubitatif. Il fronça doucement les sourcils, tâchant de dénicher une quelconque cohérence dans cette conversation incongrue. Il peinait à comprendre la moitié de ce qui se racontait. Tout cela semblait bien nébuleux, à ses yeux. Il se contentait donc d’écouter en silence, en piochant de temps à autre un fruit ou une noix, dans le petit panier qui reposait au centre de la table. « Non. » trancha le Phénix, les lèvres un peu pincées. Les négociations n’avançaient pas. Il campait sur ses positions, tout comme son interlocuteur. Ce dernier commençait toutefois à faiblir. Ce n’était pas dans son intérêt, de cesser les échanges avec la Pieuvre. Il fallait absolument qu’il trouve un terrain d’entente avec le Souverain de Spectre. « Coupons la poire en deux. » proposa-t-il en croisant les bras. Cela semblait lui en coûter d’abdiquer de la sorte. Il n’avait plus le choix. Nicolae baissa les yeux sur la corbeille. « Je ne vois pas le rapport. » Il haussa les sourcils, désarçonné par cette intervention. Lucia ricana. « C’est une image, Nicolae. » - « Non, c’est un fruit. » - « Note tout ça sur ton petit carnet. » Il obtempéra sans broncher. Son calepin était déjà noir, rempli de son écriture maladroite et minuscule. Il griffonnait et raturait les pages, à chaque fois que cela lui semblait nécessaire. Assez souvent, en réalité. Il ne comprenait jamais rien. « Ce type est un crétin. Il m’en fait voir des vertes et des pas mûres, avec son incompétence notoire. » gronda Lucia, dès qu’il eut claqué la porte sur son invité. La discussion s’était achevée sur une victoire presque totale du Sorcier. Il restait insatisfait, toutefois. Nicolae dodelina doucement de la tête. « Encore ces histoires de poires ? » Il ricana, en secouant la tignasse brune de son serviteur. « Tu me fatigues. » Il s’empara vivement du carnet, qu’il consulta de façon distraite. « C’est quoi, tout ça ? » Il désigna une page, avec une liste inexplicable. « Des idées pour un cadeau. » répondit-il, impassible. « Qu’est-ce que tu me chantes encore ? » - « Je parle. » - « Va te faire voir, Nicolae. » - « Vous savez bien que je n’ai pas de reflet. » - « Pourquoi cette liste ? » Lucia ne voulait pas se fatiguer inutilement. Ce n’était pas la peine. « Tu penses vraiment qu’un râteau est un cadeau judicieux ? » Nicolae haussa les épaules. « Pazu dit qu’il les collectionne. » - « Ca, c’est certain. A qui tu veux offrir un présent ? » - « Une fille. » - « Une fille ? » - « Une fille. » - « Mais quelle fille ? » - « Je ne la connais pas. » Lucia soupira, en se frottant le visage, avant d’esquisser un petit sourire goguenard. « Moi, je sais ce que je donnerais à une femme. » Il dévisagea brièvement son serviteur. « Dommage que ça ne soit pas possible avec toi. » - « Pourquoi ? » - « Rien. Elle a quel âge, cette fille ? » -  « Je ne sais pas. » - « Elle aime quoi ? » - « Je ne sais pas. » - « Tu sais quoi au juste ? » - « Son nom et son adresse. » - « T’es con comme une valise sans poignée, mon grand. » - « Ah. » Merveille déboula dans le salon comme un boulet de canon. « Majesté ! » s’écria-t-elle. « Votre … invité … revient. » Elle était soufflée. Lucia fronça les sourcils. « Serait-ce à cause de toi, par hasard ? » - « Du tout, votre Majesté. » Elle réajusta un peu sa tenue. Des bijoux s’échappèrent de son décolleté, pour rouler aux pieds de Lucia. Il arqua un sourcil. « Je ne sais absolument pas d’où ça sort. » - « De ... »- « Ta gueule, Nicolae. » Lucia se releva en soufflant. Il attrapa le menton de la jeune femme, tellement plus petite que lui. « Je vais régler le souci. Il va falloir te mettre à genoux pour faire pénitence, ma poupée. » - « Je ne vois pas en quoi la prière va aider. » - « Tu as lu le bouquin qu’on t’a offert ? » - « Je l’ai perdu. » - « Bordel … Range ta chambre, Nicolae ! » - « Elle est rangée. » - « Non ! La prochaine fois, j’entre avec un sac et je jette tout ce qui traîne ! » Merveille pouffa de rire, amusée par la réaction quasi maternelle du Souverain. Elle fit en sorte de se calmer, face au regard pesant de ce dernier. Il donna ensuite une claque sur les fesses de la jeune femme, avant de rejoindre son invité pour le calmer.

Nicolae était debout au centre de sa chambre. Il promenait son regard sur le bric-à-brac de la pièce, en se demandant ce qu’il allait bien pouvoir offrir à cette fille, dont il ne savait rien. Il n’était pas très doué pour ce genre de choses. Il finit par attraper une petite boîte, sous son lit, pour fouiller dedans. Il commença à triturer les ailes d’une grosse peluche toute douce et très mignonne, en forme de chauve-souris. Il se rappelait vaguement que ce nounours faisait des choses bizarres, sans qu’il se souvienne précisément de quoi. Bah … Ca allait bien faire l’affaire.

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