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 Telles deux âmes en peine [Pv Wriir]

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Mar 10 Oct 2017, 18:23

J’inspirai doucement, la température glaciale du Berceau Cristallin s’engouffrant jusqu’au fond de ma gorge. La marche m’avait essoufflée et, à dire vrai, je ne savais pas où je me trouvais exactement, si ce n’est perdue dans l’immensité d’un lieu dans lequel la nature semblait gelée pour l’éternité. Territoire Lyrienn, il seyait parfaitement à la Reine faite de givre qui martyrisait une grande partie de la population et qui en terrifiait une autre. J’avais beaucoup appris à Megido, sur le Monde et son état, mais je ne pouvais y demeurer plus longtemps. Je voulais rejoindre Caelum et trouver un Maître car, après tout, c’était ce qui me manquait, plus que toute autre chose. Le vide qui régissait mon existence et hantait mon cœur ainsi que mon esprit était si intense qu’il me semblait tomber lentement mais surement dans une dépression mortelle. J’étais née pour servir et mon dernier Maître avait connu une double sentence de la part de l’Orishala ; j’avais connu cette sentence tout autant que lui. Le lien avait été brisé et bien que le temps ait soigné la plaie béante qui s’était ouverte en moi, la honte demeurait. J’avais échoué. La seule rédemption possible, puisque je ne pouvais recréer le lien avec celui qui était mort depuis déjà plusieurs années, était de choisir un nouveau Maître, un homme susceptible de répondre à l’énigme que je lui poserai. Néanmoins, je ne souhaitais plus revivre le calvaire de ces années de prostitution. Mon peuple n’était pas fait pour cela et mon ancien Maître, bien que je n’ose encore formuler mes pensées à haute voix, était un crétin qui n’avait su profiter de sa chance. C’était pour cette raison, en partie, que je souhaitais me rendre à Caelum. Les Magiciens étaient reconnus pour leur bonté et, aujourd’hui, après la victoire de Sympan, en plus de partager mes croyances profondes, ils étaient les bénéfiques les plus puissants et présents. Je voulais contribuer au Destin d’un homme que j’aiderai à s’élever vers les sommets. Je l’espérais ambitieux mais, à dire vrai, je savais que qui qu’il soit, je l’aimerai.

Après une courte pause, je me mis de nouveau à marcher, mon kimono de soie en partie caché par un épais manteau de fourrure que le personnel à mon service m’avait fournie. J’étais également équipée d’un plan qui m'aiderait à rejoindre un lieu apte à accueillir des navires et donc possiblement à me permettre de voyager sur l’Océan en direction de l’Île entre Ciel et Terre. J’avais sur moi assez d’argent pour convaincre n’importe quel marchand. Mes mains nues attrapèrent le tissu rouge sur lequel était brodé un Okae, symbole de la Déesse de la Justice, en fil doré. Je n’étais guère l’une de ses fidèles mais j’aimais particulièrement cet oiseau au corps élancé. Mon kimono ainsi préservé de la neige, j’avançais sur des sandales très peu pratiques en ce genre d’environnement, de grosses chaussettes apparentes couvrant mes pieds. Ce n’était l’affaire que de quelques heures m’avait-on dit avant que je ne recouvre des lieux plus chauds et, surtout, quelqu’un qui serait à même de me faire voyager plus vite, par l’intermédiaire d’une bête ou de magie. Je devais rejoindre l’Océan au plus vite.

Légèrement tremblante, je continuais ma route, ma peau plus que jamais blanche à cause du froid. Il me transperçait avec force et je me demandais si mes longs cheveux, attachés en queue de cheval, n’avaient pas gelé. Une Orine se doit d’être toujours élégante mais, à ce moment précis, je pense que je ne semblais être aux yeux du monde qu’une pauvresse décoiffée à l’épreuve d’une nature particulièrement hostile. Personne ne peut gagner face à Mère Nature et, heureusement, il n’y avait guère âme qui vive ici pour témoigner de mon état ou, du moins, pas dans mon champ de vision immédiat. Le silence était pourtant apaisant, égayé par la valse des fins flocons qui tombaient depuis les cieux. Parfois, le trop plein de neige le brisait un instant, le temps que celle-ci s’affaisse sur le sol blanc.

Alors que mes yeux fixaient l’immensité, mon regard fut capté par un oiseau majestueux qui volait dans le ciel grisâtre. De couleur noire, je suivis son vol un instant, perdant totalement de vue mon chemin et les obstacles qui se dressaient sur ma route. La chute était inévitable tant ma force physique était faible. Ma cheville buta contre un amas et mon corps maigre s’étala de tout son long dans le blanc manteau, mon cri résonnant sans doute à des kilomètres à la ronde.

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Mar 10 Oct 2017, 20:52


Dérangeant, déroutant.

Je n'arrivais pas à poser les mots justes sur ma condition actuelle.

Cela faisait des mois entiers - des années peut-être - que cet artefact était entré en ma possession. Je l'avais mérité, j'avais surmonté de nombreux obstacles pour y parvenir, j'en étais persuadé. J'ignorais juste la raison de cette quête.

Pourquoi vouloir à tout prix obtenir la Couronne des Profondeurs. Pourquoi l'Esprit de la Mort s'encombrerait des considérations de ce peuple plus qu'un autre ? Des pans entiers de mon passé semblaient enfouis dans une noirceur telle que même l'Ombre que j'étais ne parvenait pas à les sonder. Pour autant, les faits étaient là : La Couronne était mienne.

La meilleure façon de comprendre était de la porter. Je connaissais les effets d'un tel objet aussi quittais-je Umbrae vers un autre endroit où un repli serait possible en cas de coup dur. Megido, capitale des Orishas, mon ancienne race. Chiorna y avait été mise à mon service mais du fait de mon secret, je ne la sollicitais guère. Je lui rendis visite pour lui annoncer que je partais de nouveau arpenter les environs et qu'il était possible que je puisse revenir à tout moment. Cela ne l'empêcherait pas de vaquer à ses occupations, loin de moi l'idée de la faire patienter inutilement. Quand je lui annonçais m'enfoncer vers le berceau cristallin, elle me recommanda une chaude - très chaude tenue - . La force de l'habitude de ne plus rien ressentir me faisait oublier l'essentiel pour un quelconque mortel.

Armé dans mon sac à dos de la parfaite petite tenue d'un explorateur en herbe, je quittais la capitale pour des contrées plus calmes à ma future expérience. La logique aurait voulu que je teste la Couronne dans l'eau, quoi de plus normal pour un Ondin après tout. Sauf que je n'en étais pas un. Aussi me retrouver à nager comme un bipède en faisant des remous pour ne pas boire la tasse au milieu de créatures hostiles et à leur aise dans un élément étranger au mien ne m'avait guère attiré.

Plusieurs journées passèrent avant que je ne sois suffisamment éloigné de toute civilisation digne de ce nom. J'arpentais les terres sans le moindre but, parcourant à coup de moult détours les environs.
J'arrivais à la lisière du berceau cristallin, le climat était encore suffisamment clément. Mû par un élan de curiosité, je saisissais le diadème pour le poser délicatement sur la tête.

Dérangeant. Déroutant. Non, douloureux, pathétique seraient des mots plus appropriés.

Un violent spasme me parcourut alors que je me vidais les tripes dans des hauts-le-cœur qui me donnaient la larme à l’œil. Rien ne sortit à proprement parler de ma bouche, n'ayant plus rien mangé depuis des décennies, aussi tout au plus un semblant de bile acre vint toucher le sol à mes pieds.
Si ce relent de douleur était la seule dont je sois victime, j'aurai pu rapidement m'en accommoder. Mes tortures d'enfance m'avaient procuré un seuil probablement plus élevé que la moyenne. Pourtant, je n'étais pas du tout préparé à ça. La Vie, la pire douleur qui soit. Je sentais le vent caresser mon visage comme une gifle perpétuelle. La faim me tenaillait, la soif me tordait l'estomac, mon cœur, cet organe d'habitude si inutile martelait un corps qu'aucune illusion ne saurait reproduire aussi imparfaitement.
J'ouvris mon sac de mes doigts gourds, commençant déjà à m'énerver de ne pas délier le cordon qui l'attachait assez vite. Quand j'atteins enfin la pomme qui logeait au fond du contenant, j'en croquais une pleine bouchée avant de tousser bruyamment, recrachant le tout dans une délicatesse digne d'un Réprouvé dans un bouge.

La première chose à faire était de me changer rapidement. Là où en tant qu'Ombre je trouvais le climat supportable, le fait d'être désormais un mortel multipliait tout au centuple. J'avais l'impression de geler sur place si je ne me rajoutais pas plusieurs couches supplémentaires sur le dos.

Douloureux, pathétique. Toujours pas... Dangereux, mortel plutôt....

Plus les minutes défilaient, moins je comprenais les motivations qui m'avaient poussé à acquérir cette Couronne. Couronne qui d'ailleurs avait complètement disparu de mon crâne. J'étais tenté par aveu de faiblesse de prononcer les mots qui romprait le sortilège, mais quand je ne comprenais pas une chose, je pouvais devenir plus têtu qu'une mule. J'avais décidé une chose, à moi et moi seul de m'y tenir.

Balayant l'horizon du regard, j'étais entouré d'un paysage vide de toute âme. Par réflexe je voulais regarder par mes yeux d'Ombre mais constatais que cela m'était désormais impossible. J'avais perdu tous mes pouvoirs d'Ombre !
Déjà que mes jambes avaient du mal à me supporter, je ne pouvais pas être alerté d'un potentiel ennemi avant qu'il ne me tombe dessus.

Je m'apprêtais à faire demi tour quand un cri de douleur me parvint au loin. Fronçant les sourcils, cet appel spontané à la détresse me rendait perplexe. Je n'avais cure du sort de celui ou celle qui avait pu hurler ainsi, mais de l'autre ... foutue curiosité. Comme premier contact en tant que mortel, autant choisir une personne qui serait susceptible de nous être redevable. S'il y avait rixe, il ne serait jamais trop tard pour décamper.

Je m'enfonçais dans le paysage immaculé du berceau des Lyrienns à la recherche de l'être errant. Plusieurs heures passèrent avant qu'une silhouette ne se dessinait à l'horizon. Elle était seule à première vue et sans les couleurs vives qui se dessinaient çà et là sur sa tenue, je ne l'aurai pas remarquée avec la neige qui s'était déposée sur elle.

Difficile à dire si je serai d'un grand secours alors que je me frigorifiais un peu plus à chaque pas que je faisais dans ces steppes glacées. Mes pas faisaient crisser la neige comme du papier aux allures de coton que l'on froisserait dans son poing. Je n'avais aucune intention d'être discret de toute façon.

Une buée fine accompagnait les paroles que je prononçais dans sa direction, me trouvant à quelques pas d'elle.

- Tout va bien ici ? Je supposais que cette phrase était la plus appropriée vu les circonstances. Besoin d'aide je suppose, m'est d'avis que vous n'allez pas tenir longtemps si vous restez ici ainsi.

Nul besoin d'être une Ombre pour voir qu'elle n'en menait pas large ... Le froid était bien traître par ici. Tout en me faisant cette réflexion, une autre me vint à l'esprit : M*rde, un Ondin offrirait-il son aide à une bipède étrangère ?
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Jeu 19 Oct 2017, 17:43

« Humpf » fis-je, les lèvres contre la neige. Le sol était glacé et plus j’attendais pour me relever, plus la chose me semblait avoir le goût d’une douce utopie. Ma volonté fléchissait face au froid, quand bien même je savais que je ne devais pas rester ici. Loin me semblait la douce température de Maëlith où les fleurs de cerisiers valsaient au gré du vent. J’avais été prévenue quant à l’hostilité du climat du Berceau Cristallin qui était semblable à celle de ceux qui vivaient en ce lieu. Les Lyrienns de la Glace étaient particuliers, presque maléfiques m’avait-on dit. Je n’en avais jamais rencontré et n’avais pas l’intention de m’y aventurer. Malheureusement, le sort avait visiblement décidé de me prendre pour cible. J’avais à peine envisagé une énième fois de me relever, imaginant en mon esprit la marche à suivre, que j’entendis une voix s’élever à côté de moi. Mince, avais-je l’air aussi désespérée ? C’était vraie mais l’être et le paraître étaient deux choses totalement différentes. D’un côté que pouvais-je espérer, moi qui gisais par terre ? De l’autre, si je paraissais faible, cela faisait de moi une cible facile. Je relevai donc la tête avec une rapidité toute relative avant de me redresser tant bien que mal pour faire face à l’inconnu. J’avais appris, cachée au cœur du village des Orines, mais ma compréhension du monde en pratique restait archaïque. J’avais connu beaucoup d’hommes mais on ne pouvait pas dire que nous eussions bavardé énormément. En plus de cela, depuis que je vivais à Megido, il aurait été faux de dire que j’avais énormément visité la ville. Le traumatisme avait mis du temps à se résorber.

« N… Non » répondis-je le plus fermement possible. « J’aime simplement euh… ». Je tremblais, ce qui rendait mon discours parfaitement haché. « … sentir la neige. ». Si j’avais à faire à un Lyrienn de la Glace, autant faire bonne impression, même si, après coup, cette justification me semblait totalement tirée par les cheveux. Sans doute le froid avait-il glacé quelques-uns de mes neurones. Après avoir détaillé l’inconnu qui me semblait à la fois imposant et étrange, en quelque sorte, l’une de mes mains s’invita dans mes cheveux pour les remettre un peu en état. J’avais appris l’art du Beau et si cet adjectif ne me qualifiait pas encore, je souhaitais bien paraître en toutes circonstances. Nous avions été faites pour servir et cela signifiait aussi subjuguer le regard de ceux qui le posaient sur nous. « Mais ne vous inquiétez pas… Je ne comptais pas rester sur ces terres. Je suis simplement de passage et je ne veux en rien vous déranger. ».

Je tournai la tête discrètement à droite et à gauche, comme pour vérifier que personne d’autre ne viendrait à moi. Si je me sentais capable de converser avec un homme et essayer de m’en sortir de la sorte, la donne changerait totalement s’il venait dix autres Lyrienns prêts à en découdre. C’était sans doute trop me considérer car lesdits Lyrienns n’avaient cure des étrangers passant sur leur territoire. Ici ils étaient les maîtres et n’importe quel individu belliqueux mourrait sans plus de cérémonie. La Glace était omniprésente et ne laisserait aucune chance à personne. Elle trancherait les veines des présomptueux et formerait un berceau pour les fous. Après un temps où je fus très légèrement rassurée de trouver dans le paysage qu’un horizon blanc, je me dis qu’il serait mieux, afin de prouver ma bonne foi, d’expliquer ce que je faisais là. « En réalité, je viens de Megido et souhaite me rendre au premier endroit proche de l’océan afin de convaincre un commerçant ou un explorateur de me prendre avec lui sur son navire. Je dois aller à Caelum. ». À dire vrai, j’avais totalement oublié que les relations entre les Magiciens et les Lyrienns n’étaient pas au beau fixe et quand je m’en souvins, les mots avaient déjà glissé de mes lèvres bleutées. « Pas que j’aime les Magiciens. Simplement, je dois hum… Disons que j’ai des affaires à régler. ». J’espérais que cela irait. De toute façon, j’avais conscience, dans mon désarroi, que je n’avais nulle part où aller me réfugier. Je doutais que l’Orishala vienne me sauver une énième fois. Cela faisait même longtemps que je ne l’avais plus vu, réduisant mes espoirs de le remercier correctement à néant. J’aurai dû, malgré les difficultés que j’avais vécu à cause de son acte. « Savez-vous quel est le chemin le plus court ? » demandai-je en remettant correctement la fourrure sur mes épaules.

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Jeu 19 Oct 2017, 22:34


Je me sentais nu comme un ver et toute cette flopée de vêtements n'y changerait rien. Il n'était pas question ici d'épaisseurs de tissus mais de cette privation de voir le monde tel que je m'étais habitué à le voir. Entouré d'Esprits, scrutant l'éthéré, libéré des contraintes mortelles de ne voir que la surface des choses.
Impossible de savoir si cette femme était bel et bien ce qu'elle prétendait être, à savoir esseulée et affaiblie, ou simplement un appât pour abruti chevaleresque. Je retrouvais ce désagréable sensation dans la bouche de peur de l'inconnu, de paranoïa du danger, de terreur de la mort, celle-là même qui m'avait déjà ravi il y a plusieurs décennies.

Je n'étais pas non plus sans défense, je restais à mon sens assez puissant pour faire face à une menace dans cet endroit glacé jusqu'à la moelle. D'ici là, je m'enquérais de l'état de la femme enneigée qui me fit part d'une réponse des plus surprenantes. "Sentir la neige" ? Au point de s'en geler les os ?... J'haussais un sourcil cristallisé par l'air froid, me demandant une fois n'était pas coutume si je n'avais pas loupé un élément clé de compréhension.

- Euh ... Que répondre face à ça ?... Hé bien, pourquoi pas ! J'ai déjà croisé bien plus bizarre qu'aimer sentir la neige après tout.
Sans m'en rendre compte, je singeais la demoiselle qui balayait l'horizon du regard à la recherche d'autres âmes qui vivent proches de nous. Elle finit par reprendre la parole et je me surpris à afficher un léger sourire.

-Vu le monde aux alentours, la seule chose que vous pourriez déranger est le silence pesant de l'endroit. Je suis comme vous un nomade qui a simplement croisé votre route.

Je me secouais un peu sur place histoire que mes muscles ne s'engourdissent pas. Je proposais ma main entourée d'un épais gant à la demoiselle pour l'aider à se relever si elle le souhaitait, ne comptant pas insister outre mesure.
Les coïncidences avaient toujours eu le don de m'amuser toutes proportions gardées, aussi quand elle me dit qu'elle venait de Megido, je fus convaincu que notre rencontre au milieu de nulle part n'était pas le fruit du hasard. Restait à savoir si ce fruit était pourri ou sortait d'une corne d'abondance.

Je ne pus m'empêcher d'écarquiller les yeux quand elle mentionna sa destination. Caelum ?!

- Hé bien .... ce n'est pas la porte à côté Caelum, ce n'est même pas sur ce continent-ci. Traverser cette région hostile seule pour vous rendre à l'autre bout du monde ne vous fait pas peur ?... Difficile à dire s'il s'agit de courage ou d'inconscience.

Même si en tant qu'Ombre, les distances n'avaient aucune espèce d'importance, il m'était déjà arrivé de prendre des moyens de transport plus conventionnels. Je venais de porter un jugement sur mon interlocutrice sans même la connaître. Ne jamais se fier aux apparences, j'étais le mieux placé pour le savoir.

- Désolé si j'ai pu vous vexer. Je viens également de Mégido, mais mon voyage était plus expérimental et moins éloigné que le vôtre. Je marquais un temps de silence, songeant à ce fruit du hasard qui me semblait trop beau pour être vrai. Je puis au moins vous répondre quant au chemin le plus court pour vous rendre à Caelum. Surtout si vous avez des affaires à régler.

Je m'approchais de quelques dizaines de centimètres d'elle tout en gardant une décente distance entre elle et moi. Paume vers le haut, je lui offrais ma main. A vous de voir si vous êtes assez courageuse, ou inconsciente pour suivre un parfait inconnu au milieu d'un endroit mortel.

J'attendis. J'attendis le temps qu'il lui fallait pour sauter le pas et joindre sa main à la mienne. Je l'aidais à la mesure de ce qu'elle voulait bien accepter pour se relever avant de lui lâcher la main. J'avais beau ne plus être Ombre, je disposais toujours du pouvoir de me téléporter, tout en étant suffisamment puissant pour nous amener tous deux aussi loin. Pourquoi se hâter pour autant ?... Marchons un peu, me contentais-je de dire, joignant le geste à la parole en avançant dans une direction totalement aléatoire. Entouré de cette solitude glaciale, je me mis à penser à voix haute.- Cela fait si longtemps que je ne suis pas retourné là-bas. Une éternité presque ... À se demander si beaucoup de choses y ont changé. Je secouais la tête pour chasser ce regard perdu vers un point imaginaire et tournais la tête vers l'inconnue qui m'accompagnait au milieu de nulle part. Peut-être pourrions-nous faire un minimum connaissance avant que nos chemins finissent par se séparer ? En commençant par votre nom par exemple.

Si le Destin avait mis cette femme sur mon chemin avec des indices aussi grossiers, ma curiosité se devait d'être étanchée comme il se devait. Si je me faisais des idées avec des hypothèses branlantes, au moins aurai-je pu expérimenter cette nouvelle forme au milieu d'autres mortels. À plus court terme, j'étais toujours aussi horrible comme Ondin de substitution. Il ne suffisait pas de mettre une Couronne magique sur la tête pour avoir la crédibilité qui sied à son port.

Au loin, une brume blanche se démarquait de la ligne de glace formant l'horizon. Signe évident d'un mouvement lointain, il était difficile d'affirmer s'il s'agissait d'un événement climatique ou des conséquences d'êtres vivants. Bien que privé de ma vision d'Ombre, je penchais pour la deuxième solution : ce nuage avançait vite et dans notre direction. Ces terres arides étaient bien plus habitées qu'elles ne le laissaient croire.
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Jeu 02 Nov 2017, 16:10

En écoutant les dires de l’inconnu, je me fis la remarque qu’il ne devait sans doute pas être un Lyrienn de la Glace finalement. S’il venait de Megido, cela semblait même être une évidence. Qu’était-il ? La question n’avait toujours pas trouvé de réponse. Je ne pouvais l’en blâmer vu que je n’avais guère montré l’exemple. Les présentations n’étaient pas mon fort. Jadis, les clients que je servais pour le compte de mon Maître se fichaient bien de connaître mon prénom. Certains m’en donnaient même de factices, sans doute fruit d’un amour déçu ou d’un fantasme inavoué en public. Les hommes sont de drôles de créatures, surtout ceux qui venaient payer mon Maître pour obtenir mes services. Quoi qu’il en soit, depuis que je me trouvais à Megido, hormis les serviteurs que l’Orishala avait placé à mes côtés, personne ne s’était réellement intéressé à moi. Légèrement confuse de réfléchir à tous ces éléments, je finis par prendre sa main, me relevant, avant de la lâcher.

Alors qu’il s’éloignait, je pris soin de passer mes doigts froids sur mes vêtements afin de les défaire de la neige qui y avait trouvé une place confortable. Puis, dans le plus grand des silences, je me hâtai de parcourir les quelques mètres qui nous séparaient déjà. Une fois arrivée à sa hauteur, je me demandai de quel endroit il parlait. Était-ce Caelum qui éveillait en lui un semblant de nostalgie ? À moins que cela ne soit qu’une pensée sans la moindre importance qui avait franchi ses lèvres par le plus pur des hasards ? Je faillis faire une remarque à ce sujet mais je restai muette. Dans ce paysage gelé, plus je le regardais, plus je ressentais une certaine tristesse émaner de lui. C’était étrange et sans doute me faisais-je juste des idées. Il aurait pu être Roi de cette étendue glaciale que cela ne m’aurait même pas étonnée. Je n’avais guère beaucoup d’expérience mais, finalement, peut-être que Cocoon Sforza et lui faisaient partie des hommes les plus majestueux qu’il m’avait été donnée de croiser un jour. Ils étaient différents cependant. Cocoon dégageait une aura brûlante de plaisir et de désir, quelque chose d’humide et de dangereux au parfum enivrant. Lui était autre mais je n’arrivais pas à le décrire avec exactitude. Il était d’une beauté discrète, sa prestance pourtant bel et bien présente, une prestance qui, j’en étais certaine, pouvait devenir écrasante. Il me restait néanmoins mystérieux.

Me prenant à le fixer sans répondre à sa question, je finis par détourner les yeux, manquant de trébucher. « Je m’appelle Reira Detrany. » fis-je sans réfléchir. Devais-je lui dire la vérité sur mon compte ? Ce n’était peut-être pas très prudent. Je ne savais toujours pas qui il était, après tout. D’un autre côté, il ne m’avait fait aucun mal jusqu’ici et me proposait même son aide. « Hum… ». Je me mis à hésiter un instant puis, sans doute poussée par l’effet qu’il me faisait bien malgré lui, je lui avouai la suite. « En réalité je viens de Megido mais je n’y ai passé que quelques temps sous la protection de l’Orishala. Il a… ». Je soupirai. Décidément, l’histoire était bien difficile à raconter à haute voix. « Disons que sa politique se veut protectrice envers les Orines et lorsqu’il a découvert que mon Maître se servait de moi pour s’enrichir d’une façon immorale à son sens, il a détruit le lien qui nous unissait. ». Je n’avais pas précisé la fameuse façon mais je n’étais pas certaine que cela ait une réelle importance. Et puis, j’étais encore partagée entre plusieurs idées : la honte de ce que j’avais fait et la pensée de savoir que je l’avais fait pour lui, remplissant mon rôle à la perfection. « Sinon, je n’ai pas grand-chose à raconter. Si je me rends à Caelum c’est dans l’espoir de trouver un nouveau Maître qui me traitera d’une façon différente. Quelqu’un avec de l’ambition que je pourrai servir. ». Je m’interrompis avant de lui retourner sa question. « Et vous ? ».

Seulement, plus nous avancions, plus quelque chose semblait faire de même. Je m’en rendis compte en l’observant, son regard se mettant à fixer un point bien précis. Sentant la peur monter en moi, je lui murmurai doucement : « Si ce sont des Lyrienns de la Glace, nous ferions mieux de nous cacher… Ils risquent de nous tuer et… Comment dire ? Ils ne sont pas réputés pour être compréhensifs ou sympathiques… ». Cela ne me disait rien qui vaille dans tous les cas. S’il s’agissait des Lyrienns, cela posait un souci. S’il s’agissait d’une meute de loups, le risque existait tout autant. Malgré moi, j’attrapai de nouveau la main de l’inconnu.

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Jeu 02 Nov 2017, 23:37


Si fragile, si délicate, furent les premières émotions qui me traversèrent alors qu'elle cherchait de ses doigts ma main proposée. Une fois debout, son air gracile n'en fut que plus confirmé, peu importait le nombre d'épaisseurs de vêtements qu'elle portait.

À ses manières empreintes de vulnérabilité, elle me rappelait Chiorna, l'Orisha que j'avais quittée il y a quelques jours et qui était à mon service depuis la Coupe des Nations. La comparaison s'arrêtait là, le style et l'allure prenaient des directions opposées dans la féminité et la précision des gestes des deux femmes. La demoiselle face à moi semblait calculer ses mouvements, économiser certains disgracieux et en dispenser poétiquement d'autres. Un ballet dans le détail, une ode au perfectionnisme. Le plus étrange dans tout cela était que même dans sa maladresse, la contenance était de mise. Un conditionnement vers l'excellence.

Quelques pas plus tard, je sentis sa présence revenir non loin de moi, réprimant un sourire satisfait alors qu'elle déclinait son identité. Je n'avais pas ma vision d'Ombre pour confirmer ou infirmer ses dires mais étrangement je la croyais. En tout état de cause, mentir n'avait pas une once d'intérêt. Qu'elle s'appelle réellement Reira Delary ou pas, cela restait juste un préambule à une discussion plus ordonnée. En cela elle y mit du cœur à l'ouvrage, bien plus que je ne l'aurai espéré, racontant d'où elle était partie, ce qu'elle était et pourquoi elle se rendait aussi loin de là où elle se trouvait actuellement. Je l'écoutais en silence, adoptant un pas lent et adapté à une discussion dans pareil environnement. Je ne pus m'empêcher de tourner la tête dans sa direction alors qu'elle m'avouait être une Orine avant de regarder de nouveau devant moi.

Quand elle me questionna en retour, je me devais de lui rendre la pareille.

- Je me prénomme Wriir et j'ai quitté Megido il y a peu pour .... comment dire .... entreprendre un périple expérimental comme je vous le disais tout à l'heure. Je ne pensais pas rencontrer d'autres âmes sur mon chemin. Je voyage énormément et un peu partout.

Vu mon apparence actuelle, j'aurai dû m'affubler d'un nom de substitution, mais il était trop tard. Lors de mes futures transformations, je modifierai également les traits de mon visage et éviter toute déconvenue.

- Ce devait être un honneur de rencontrer l'Orishala, je n'ai jamais eu l'opportunité de le croiser même en ayant représenté notre peuple à la dernière Coupe des Nations. Avec la guerre divine, tout semble dérisoire avec du recul. Je lui donnais de façon détournée mon appartenance au peuple Orisha et je ne doutais pas qu'elle fasse le rapprochement. Pourtant, je dois vous avouer que votre peuple m'a toujours fasciné. Le nôtre a longtemps connu par le passé les liens de l'esclavagisme et prônons depuis la Liberté comme pilier fondamental, mais le vôtre de lien est si .... puissant et réciproque qu'il laisse songeur. Vous êtes une race mystique et précieuse, Maëlith m'a d'ailleurs toujours intrigué.

Le ton de ma voix restait neutre même si elle laissait transparaître quelques pointes d'une curiosité non feinte. En y réfléchissant, n'était-ce pas la première Orine avec qui je m'entretenais ? En tout cas la seule qui annonçait appartenir à ce peuple. Ce que je n'arrivais toujours pas à comprendre était le but de son voyage. À l'écouter, elle se rendait à Caelum sans avoir la certitude d'y trouver un Maître, simplement l'espoir. Voulait-elle d'un Magicien ? Je ne pus me résoudre à ne pas l'interroger à ce sujet. Est-ce un souhait de vouloir servir un Magicien ambitieux ? Vous avez probablement vos raisons et n'y voyez aucune critique, plutôt un souhait de comprendre comment vous êtes-vous décidée à choisir cette destination pour un futur Lien.

Je me rendais compte que je n'avais pas révélé grand chose me concernant, la poussant plutôt à m'en dire plus sur elle qu'étancher sa propre curiosité. Ce n'était pas plus mal dans un sens, je n'étais pas d'humeur à inventer un énième mensonge.

Nous fûmes dérangés dans notre calme discussion par la venue de créatures non identifiées. Reira semblait peu encline à vouloir faire les présentations et me murmura quelques mises en gardes. Je la regardais l'air interrogatif avant de lui gratifier d'un léger sourire. Notre heure n'est pas venue croyez moi. Allons bon, tuer l'Esprit de la Mort même sous forme Ondine n'était pas dans mes projets à court terme. Qu'il s'agisse de Lyrienns ou de n'importe quoi d'autre, je saurai y faire face. Je sentis sa main agripper la mienne comme si ce simple geste formait un rempart plus fort que deux entités distinctes. Sage décision que voilà, vous êtes maintenant en sûreté, lui dis-je d'un air quelque peu mystérieux. Arrêtant de marcher, j'attendis patiemment l'arrivée des intrus.

Aucun Lyrienn de Glace en approche, mais des animaux à première vue affamés. Ils ressemblaient à une meute de hyènes si ce n'était la présence de cristaux de glace qui sortaient tels des pics du dos et des jointures de leurs pattes. Ils ralentirent l'allure et entreprirent de nous encercler en grognant, leurs yeux complètement blancs les faisant ressembler à des spectres bestiaux. Je murmurai quelques mots à ma nouvelle compagne de voyage. La seule règle à retenir dans ce genre de situation est de chercher et trouver le chef de meute. Ensuite le convaincre et l'affaire est réglée.

Les deux camps se jaugeaient mutuellement, me permettant d'analyser les différents comportements des créatures jusqu'à deviner qui tirait les ficelles du clan animal. Je me mis alors à psalmodier quelques paroles dans sa direction, lui faisant dresser les oreilles de surprise, sa queue se baissant aussi rapidement que sa gueule. Au bout de quelques secondes, un jappement sortit de la bête et mû par un mouvement général, la meute repartit comme elle était venue : vivante mais le ventre vide.

- Voilà pour ce problème. Maintenant, résolvons le vôtre. Entourant de mon autre main la sienne, je me concentrais un court instant avant de nous téléporter aux abords de Caelum. Ici la vie grouillait et le climat était bien plus tempéré que le berceau cristallin. Plus de risque de croiser un Lyrienn de glace ou d'autres créatures affamées, en tout cas celles qui ne veulent que se remplir l'estomac. Vu qui elle était, elle risquait des prédateurs bien plus dangereux à leur manière. Vous êtes  arrivée à bon port je suppose, même si rien ne dit que vous trouverez ici ce que vous cherchez. Elle n'avait toujours pas lâché ma main, aussi restais-je immobile en attendant la suite du programme.
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Jeu 09 Nov 2017, 13:43

Un frisson parcourut mon échine. Le froid embrassait mon corps et l’enveloppait. Il était traître, de ceux qui murmuraient des paroles apaisantes en promettant que tout irait bien mais, en réalité, il cachait son jeu. Le froid était un poison qui s’immisçait petit à petit dans le corps et l’esprit de ses victimes jusqu’à ce qu’elles s’éteignent, bercées par une douce illusion. Comme une bouée de sauvetage, je me rattachais aux paroles du prénommé Wriir. Il n’avait pas de nom de famille ou, sans doute, avait-il omis de le préciser. En le regardant toujours en coin, je m’aperçus qu’il s’apprêtait à tourner le visage vers moi. Je détournai alors les yeux pour les fixer sur l’immensité blanche, la scène légèrement flouée par le souffle chaud qui sortait d’entre mes lèvres. Je me sentais pourtant glacée. « Oui, il est réellement impressionnant. ». Je me rappelais très bien de ses bras autour de moi, lorsqu’il m’avait arrachée à l’emprise de mon maître et ramenée en lieu sûr. J’avais été persuadée, à ce moment précis, de n’être qu’une brindille. Il n’avait jamais éprouvé la moindre difficulté à me porter, si bien que je pouvais décemment imaginer que tous ses ennemis pliaient devant lui sur le champ de bataille dès qu'ils l'apercevaient, priant les Ætheri de toutes leurs forces pour survivre. J’étais certaine que si je me retrouvais devant lui dans de telles circonstances, si le sourire sur ses lèvres s’effaçait devant moi et que son visage prenait l’expression de la haine, alors il ne m’en faudrait guère plus pour défaillir. Peut-être était-ce la même chose avec Wriir. Il était courtois, s’intéressait à moi mais pour rien au monde je ne voudrais devenir son ennemie. Aussi, quand fut évoquée Maëlith, ma lèvre supérieure recouvrit l’inférieure en une petite moue inquiète. Le secret de l’emplacement du village était de la plus haute importance et ne devait être divulgué à personne. « Peut-être est-ce difficile à croire mais le lien n’a rien à voir avec de l’esclavagisme. Il s’agit plutôt d’une communion si puissante qu’elle peut tout traverser. Je dirai que, finalement, peut-être est-ce semblable aux bienfaits que l’on prête à l’amour véritable. Il n’y a guère de trahison possible, aucun secret. ». Mon regard passa sur l’horizon. « C’est comme se donner à l’autre entièrement, sans que jamais le regret ne puisse venir entacher la relation. ». Je me mis de nouveau à regarder Wriir, cette fois, sans m’en cacher. « C’est pour cela aussi que je souhaite un Maître qui ne cherchera pas à me nuire. ». C’était douloureux. « Disons qu’aucune Orine, normalement, ne doit connaître la brisure de ce lien. Tant qu’il existe, il n’y a pas de regret, pas de honte. Nous devons servir notre Maître et nous aimons le faire car il est tout pour nous. Seulement, dans mon cas… ». Mes lèvres se serrèrent et je déglutis, détournant le regard pour le poser sur le sol. « J’ai connu la fêlure. Le lien qui avait été si solidement tissé m’a été retiré et m’a fait réaliser que… ». Que je ne voulais plus d’un Maître qui chercherait à me nuire. « … que je préférai rester digne et participer à quelque chose de grand, aux côtés d’un Maître qui serait plus… je ne sais, compréhensif et attentionné sans doute. ». En parler me déboussolait complètement. « Peut-être est-ce égoïste… ».

Heureusement, dans un sens seulement, notre conversation fut coupée par l’arrivée d’animaux sauvages. Le vent glacé me fit frémir de concert avec la peur qui commença à s’installer en mon cœur. Pourtant, mon compagnon de route ne semblait pas partager le même état d’esprit. Il se disait Orisha mais je voyais bien dans son comportement qu’il n’avait en aucune façon peur de la mort. Avait-il assez vécu pour pouvoir la regarder droit dans les yeux, telle une vieille amie que l’on rencontre enfin et que l’on n’hésite plus une seule seconde à enlacer ? Ou savait-il pouvoir s’en sortir à coup sûr ? Je restai muette, assistant à une scène qui me fit oublier le froid quelques instants. Je ne comprenais pas tout mais ce qui était certain c’est que le mâle alpha avait été mis en déroute par plus fort que lui. Cela ne m’étonnait qu’à moitié venant d’un homme qui avait participé à la Coupe des Nations. Ces jeux étaient de renommées mondiales et j’étais bien inculte de ne point pouvoir identifier mon interlocuteur. Quelqu’un d’autre aurait sans doute été capable de le reconnaître en un coup d’œil.

Une fois le danger écarté, je me tournai vers lui, mes cheveux chatouillant alors mon visage à cause de la brise. Je lui souris en signe de remerciement mais je n’étais pas encore au bout de mes surprises. Quelques minutes plus tard, nous étions à Caelum. Je n’y avais jamais mis les pieds mais la couleur rosée des habitations était caractéristique de l'endroit. La chaleur emplit de nouveau mes poumons et mon sourire s’agrandit. Je préférai de loin ce climat. Émue pour une raison inconnue, ma deuxième main rejoignit la première en douceur, entourant celle de l’homme. « Merci. » fis-je. « J’espère que je trouverai, tout comme j’espère que nos chemins se croiseront de nouveau, Wriir. ». Il y avait quelque chose de particulier chez lui, si bien qu’un étrange sentiment commença à naître malgré moi, une envie de rester à ses côtés. Pourtant, nous n’avions pas fait toute cette route pour rien et je me voyais mal lui imposer mon idée. Pinçant de nouveau mes lèvres, je finis par lâcher sa main, me rendant compte que je n’avais toujours pas bougée. « Désolée, je suis très mauvaise pour les au revoir… Partez le premier, sinon nous resterons plantés ici des heures. ».

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Ven 10 Nov 2017, 16:20


Notre dialogue de rencontre semblait être la seule source de chaleur dans ce froid immuable. Si la retenue était de mise, nous finîmes par échanger assez rapidement sur des sujets qui ne s'évoquent généralement pas au premier regard. Alors qu'elle abondait dans l'idée que je me faisais de l'Orishala, je me souvins alors l'avoir effectivement rencontré, il y a fort longtemps, lors du premier et seul Conseil des Chefs auquel j'avais assisté. Pour une raison obscure j'avais alors été choisi par l'Esprit de la Mort pour écouter les Grands tisser le Destin du monde et de leur race respective. Était-ce un présage de mon ascension vers le "trône" des Ombres ? À dire vrai j'en doutais, qui aurait pu laisser présager d'une guerre divine et le retour de l'Unique ?... À cette époque, sûrement pas moi.

En tant qu'Orine et moi faux-Orisha, la discussion s'orienta rapidement vers les liens qui régissaient nos races respectives. Les seuls liens que j'avais connus jusqu'à présent étaient coercitifs, entravant, douloureux. On m'avait dépouillé de mon enveloppe corporelle, carcasse ensanglantée donnée en pâture aux rats, avant de me faire rentrer dans le rang de ce qui allait être un tourment perpétuel. L'ultime étape ayant modelé ce que j'étais à présent avait aussi été la pire qui soit, une sorte de fausse âme à l'esprit tronqué, un Grand de ces terres dont il tirait sa puissance du fait qu'il était incomplet. Une nouvelle forme de torture.

Le lien qu'elle me décrivait semblait diamétralement contraire, en tout cas dans la perception qu'elle en avait en tant qu'Orine. Plus qu'une soumission, c'était un abandon à l'autre, dans ses qualités comme ses travers, la Vérité avec un grand V que la parole du Maître était d'or, inébranlable, absolue.

Je lui adressais un triste sourire, las et pesant alors qu'elle décrivait son vécu et ce qu'elle attendait de son nouveau Maître. Je n'ai jamais connu ce que vous décrivez, cet amour véritable, aussi suis-je bien mal placé pour vous donner mon avis. Je sais juste que le regret est omniprésent, tôt ou tard, peu importe la puissance du lien qui unit.

Je fis quelques pas dans la neige épaisse avant de m'arrêter, inspirant longuement pour laisser s'échapper une fine brume le long de mes lèvres. Comment pouvait-on vivre toute son existence dans pareil endroit ?

- Ressentir la douleur nous rappelle à quel point nous sommes vivants. Ne pensez pas que je dénigre ce que vous avez ressenti lorsque vous évoquez cette fêlure mais j'ai l'intime conviction que c'est une bonne chose, une expérience qui vous forge le caractère. Comme vous le dites, vous avez pu vous remettre en question sans être entravé par un lien qui vous empêchait de voir la réalité. Je me tourne alors vers elle et croise son regard pour ne plus m'en détacher. Vous méritez mieux, avoir de l'ambition n'est pas incompatible avec le fait d'avoir des principes. Encore moins à de l'égoïsme. Si vous ne pensez pas un minimum à vous, qui le fera à votre place hmm ?

Il était cruellement amusant qu'un mort puisse parler de cela à une vivante. J'étais vide à l'intérieur, juste une illusion puissante et immortelle qui supervisait ni plus ni moins que le cycle de la Vie et de la Mort. Tous ces à-côtés, ces sentiments "humains" m'acculaient un peu plus dans l'isolement de ma réalité. Tout n'était que chimères, tout n'était qu'illusion.
Notre discussion et ces interrogations existentielles qui me tourmentaient furent troublés par l'arrivée de créatures qu'il me fut aisé de faire déguerpir. Nul besoin de les occire ni même de les blesser, j'avais toujours eu une affection particulière pour les animaux même carnassiers comme ceux qui ne désiraient que notre mort.

Ce constat faisant, force était de constater que ce n'était pas le lieu pour s'attarder à ce genre de discussions. Nous pouvions croiser pire à brève échéance et toute cette vie qui grouillait en moi ne me plaisait guère. Sentir le froid, la mort qui guette, se trouver dénué de pouvoirs qui semblaient aussi innés qu'un vivant a de respirer me dérangeait au plus haut point. Ma curiosité de détenir cette Couronne n'en fut que davantage renforcée. Pourquoi avais-je voulu m'affaiblir de la sorte ?

Le temps de quelques secondes et nous nous trouvions dans un lieu plus civilisé et dans une chaleur que mon épiderme à nu acceptait sans réserve. Je rendis le sourire à celle pour qui les tracas d'un long et dangereux voyage venaient de disparaître. Je me remémorais rapidement les propos qu'elle m'avait tenus sur son souhait de trouver un Maître ici même. Elle ne voulait pas d'un Maître qui abuserait d'elle et du lien qui l'empêchait tout refus. J'ai le sentiment que nos chemins se croiseront de nouveau Reira, d'une façon ou d'une autre. J'en ignore cependant la raison mais permettez moi ce conseil. Je ne sais si cela est possible entre une Orine et son Maître, mais dans ce lien qui ressemble à un amour véritable, cherchez y une part de liberté. Une personne en qui on peut avoir aveuglément confiance n'est pas celle qui se rend aveugle à nos erreurs mais qui nous ouvre les yeux pour qu'elles n'arrivent plus.

Je lui lâchais les mains avant de regarder tout autour de moi. Avais-je quelque chose à faire à Caelum, en Ondin ou en Ombre ? Rien ne m'interdisait un court séjour dans les environs. Je souris alors qu'elle se désolait d'être peu douée dans les adieux. Tout l'inverse de moi et de ce que je représentais. Je vais mettre fin à vos supplices alors et m'en aller. Nous nous reverrons.

Après un bref signe de tête, je disparus de son champ de vision pour me retrouver en plein cœur de la ville. Il était temps de quitter temporairement cette Couronne. Retrouver mes tourments, ma noirceur .... mon quotidien.
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Telles deux âmes en peine [Pv Wriir]

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