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 [XXXII] - Oups

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Dim 30 Sep 2018, 18:58


Catégorie de Quête XXXII. Autre - RP Dirigé
Partenaire Solo
Intrigue « Oups ». - La mission consiste à régler un souci. En effet, une algue qui a été utilisée pour la fabrication de cosmétiques s'est avérée particulièrement néfaste. Certains clients ont eu d'énormes réactions après cela. Il faut trouver une solution et faire en sorte qu'ils n'aillent pas voir ailleurs.

[XXXII] - Oups Equipe10

Mes mires turquoise dévoraient les mots concupiscents qui noircissaient ces pages anciennement vierges. Pour soutenir mon regard, je caressais les lettres manuscrites qui émoustillaient mes sens. Je me mordais la lèvre inférieure avant de tourner la page de ce roman libertin. Continuant ma lecture secrète, je me penchais vers la table basse qui faisait face au canapé luxueux dans lequel j’étais assise. Dans une boîte, je récupérais d’une main distraite un morceau de chocolat à l’effigie d’un homme qui avait de nombreuses fois infiltré mes rêves. Je le décapitais, de mes dents acérées, sans aucun remord.

J’étais rentrée hier. Mon corps s’était rétabli depuis. Seul une fatigue lasse m’était restée de ce voyage dément, de cette aventure qui s’était terminée aussi mal qu’elle avait commencé. Mon esprit aurait voulu croire à une infâme illusion, à un rêve sordide mais ce n'était pas le cas. Le souvenir douloureux et terrifiant, que j’en avais gardé, me prouvait que tout était vrai. D’autant plus que j’avais manqué un rendez-vous crucial à cause de cette histoire. Et puis… Mes yeux quittèrent quelques instants ma lecture pour se poser sur le parchemin qui trônait sur la table. Et puis, il y avait ceci. J’étais rentrée avec ce parchemin dans les bras. Sur son papier se trouvaient des mots qui me rappelaient à l’ordre et qui m’interdisaient de mettre cette aventure derrière moi.

Mon regard se durcissait. Un combat interne faisait rage en mon sein. Dès mon retour, j’avais tout mis en œuvre pour résoudre cet évènement qui mettait en péril notre activité, et donc nos finances.  J’avais mis de côté mon rétablissement et les préparatifs de mon mariage qui prenaient de plus en plus de retard. Tout cela avait été vain. Rien de ce que j’avais entrepris n’avait fonctionné. Nous avons d’ores et déjà perdu deux clientes et notre notoriété commençait à faiblir, à se faner.

Je décroisais les jambes pour les croiser dans l’autre sens. Quittant des yeux le parchemin, je me plongeais de nouveau dans ma lecture ardente. Mon état s’était aggravé lors de ma quête. Aussi, j’étais cloitrée dans ma demeure par le médecin de la famille. Jusqu’à nouvel ordre. « Prisonnière de sa propre maison » n’était pas vraiment le terme exact. En réalité, je ne m’étais pas reposée depuis longtemps. C’était appréciable.

Une porte claqua. Le bruit sourd qui en fut le produit me laissait penser qu’il s’agissait de la porte d’entrée. Ma déduction se révéla juste lorsque j’entendis la voix de mon père. Il était rentré plus tôt aujourd’hui. « Où se trouve Aylivæ ? » A une salle de l’entrée, je levais les yeux au ciel. Je refermais mon livre et la boite de chocolats. « Elle a demandé à être seule. Pour son repos. » Karsath… Un sourire léger se dessinait sur mes lèvres devant tant de fidélité et de servitude. Mais je savais que cette pauvre phrase n’allait pas arrêter l’humeur massacrante de mon père. Je l’entendis d’ailleurs bousculer Karsath pour avancer lourdement vers la bibliothèque où je me trouvais. Je posais mon livre à la couverture neutre sur la boite de chocolats et me redressa dans le canapé. Je me préparais à l’arrivée de mon paternel. Ce dernier ne me déçu pas et, ouvrant la porte à double battant dans un geste brusque, il plongea son regard froid à la rencontre du mien. « Nous devons parler… » Il entra dans la pièce, suivi de Karsath toujours impassible. Joignant les mains derrière son dos, il s’approcha d’une des nombreuses fenêtres qui donnaient sur le jardin verdoyant. Je pris dans les bras la boite, surmonté du roman, avant de me relever et de m’approcher de Karsath pour le lui donner. L’injonction était muette.
Cependant, loin d’être complètement idiot, il comprit et prit congés, mes trésors libertins sur les bras.

« Tu es d’une humeur massacrante. Dois-je y voir un lien avec le fait que l’on ne t’attendait pas avant le souper ?» Je m’approchais moi aussi pour faire face aux fenêtres. Cependant ce n’était pas l’extérieur que je regardais mais le reflet que me renvoyait la vitre. Je sentais le regard froid de mon père courir sur mon visage. Il n’était pas d’humeur à plaisanter. Un moment de silence s’installa avant que l’homme ne daigne ouvrir de nouveau la bouche pour dévoiler la raison de sa colère. « C’est Yolanæ. » Je m’autorisais un regard furtif sur son visage crispé. Il n’appréciait jamais de parler de sa sœur, celle qui, de par la force de son sexe, nous avait promulgué comme la branche secondaire de la famille. Il se pinça l’arête du nez. Je regardais cet homme avec pitié. D’une certaine façon, je le comprenais. J’avais moi aussi vécu dans l’ombre de ma sœur jusqu’à ce qu’un « tragique » incident lui ôte la vie. Cependant, je ne pouvais le rassurer. Tel était son destin d’homme. Les femmes étaient faites pour diriger, et non l’inverse.

Profitant du reflet que me renvoyait la vitre, je passais mes cheveux détachés du côté gauche de mon cou. « De quoi voulais-tu me parler ? Je t’écoute. » Il arrêtait de faire face à la fenêtre pour me regarder entièrement. « Tu reprends du service. » Je fronçais des sourcils, incertaine d’avoir compris. « L’algue et les cosmétiques défectueux que tu poursuivais ont fait une nouvelle victime. Nælida söel Dalæn, une de nos plus fidèles clientes, et une de nos plus riches, a fait une réaction ce matin. Elle nous somme de venir au plus vite. » J’arrêtais d’admirer mon reflet pour regarder mon père. « Et ? Ne peux-tu pas y aller ? Ou mère ? Notre médecin m’a demandé de me reposer. » Son regard se fit sévère. « Tu sais que ta mère n’est plus en état de quoique ce soit depuis l’évènement. Et… Nælida ne veut pas traiter « affaire » avec un homme. » Il planta son regard dans le mien. « Il ne reste que toi. Et ne te moque pas de moi en te cachant derrière l’avis du médecin. Ton corps se régénère bien plus vite que la normale. Tes blessures sont guéries et tu t’es assez reposée pour aujourd’hui. » Son regard était non équivoque. « Il est tant que tu réussisse la mission que l’on t’a donné. » Un léger frisson parcourait ma peau. « Ne déçois pas ta famille, cette fois. » Le repos était terminé.

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Dim 30 Sep 2018, 19:18


Le frisson ne m’avait pas lâché durant tout le trajet. « Si vous voulez bien me suivre, Aerchise Song. » Je regardais le domestique, élégamment habillé, avant d’hocher silencieusement la tête et de marcher à sa suite. Il me guidait à travers de nombreuses pièces, toutes plus richement décorées les unes que les autres. La réputation de notre cliente quant à sa richesse n’était pas un mythe. Elle avait fait fortune dans la vente de bijoux. Créature vaniteuse, elle aimait briller, habillée de ses apparats, au cœur de la société. Égérie même de ses produits, des rumeurs disaient que sa beauté était aussi impressionnante que sa richesse. Pour l’avoir un jour croisée, je donnais raison à ses rumeurs. Sa beauté était rayonnante, tout comme l’éclat de ses bijoux. Faisant partie de l’Ot'Phylès Daevinra, elle était une Næphina qui pouvait à tout moment couper le souffle de ses stupides Gælyan.

« Nous y sommes. Ma dame vous attend. » Je regardais la porte en bois massif qui me faisait face. Alors que le domestique actionna la poignée pour l’ouvrir, une légère angoisse me noua les tripes. J’essayai de la faire taire tout en entrant dans la pièce : une chambre aussi blanche et éclatante que le reflet du soleil sur l’eau. La porte se referma derrière moi. Aviez-vous déjà eu la sensation de vous être jeté dans la gueule du Kraken ?

« Vous voilà enfin. » La voix était rauque, désagréable. Elle appartenait à une malade. Assise devant le miroir de sa coiffeuse, une silhouette féminine me faisait dos. Par le biais du miroir, je regardais Nælida söel Dalæn. Je retenais de mon mieux mon air surpris et dégouté. Son visage était gonflé, ses pores dilatés. La finesse de ses traits avait entièrement disparu et sa peau diaphane, qui faisait des envieuses, était aussi écarlate que la robe d’un poisson rouge. « Je me suis mise en chemin dès que j’ai appris la nouvelle. » Pendant quelques instants, elle se contentait de me regarder par le même biais. Son regard était tranchant. Sa laideur actuelle le rendait encore plus horrifiant. Comment allais-je faire pour la convaincre de se fournir toujours chez nous et de ne pas aller voir ailleurs ? Alors que je me torturais en essayant de trouver une solution, la Næphina s’enduisit le visage d’une horrible pâte jaunâtre. Je la regardai faire son masque, en luttant encore plus contre le dégoût qui m’enserrait les tripes. « Hideux, pas vrai ? » Je ne disais rien, cherchant la solution miracle. « Approchez, je vous prie. » Je m’avançais vers la créature défigurée. Elle reposa le pot de pâte sur sa commode et s’essuya les doigts sur une serviette. « Je suis vraiment surprise par votre famille, Aerchise. » Elle se retournait pour me faire face. « Jusque-là, je n’avais jamais été déçue par l’un de vos produits. J’affectionnais grandement la qualité de vos algues. » Elle se leva pour arriver à ma hauteur. « Je suis donc sincèrement navrée de la crise que vous subissez. Cependant, ce n’est pas la pitié qui m’a fait vous demander aujourd’hui. » Elle commença à tourner autour de moi, comme un vautour cernant sa proie. « Les Song n’ont guère besoin de pitié. Nous assumons entièrement la défaillance de notre surveillance. » Elle arrêta sa ronde. « C’est à nous d’être désolés pour nos clients qui ont payé nos erreurs. » Je pivotais ma tête dans sa direction. « Bien sûr, nous ne sommes pas seulement désolés. Nous sommes aussi prêts à rembourser, jusqu’à la plus petite pièce, le produit néfaste. » Elle me regardait avec grand intérêt. « Si cela était si simple… » Elle soupira lascivement, laissant peser un silence dramatique. « J’ai bien peur qu’il ne faut pas rembourser seulement l’achat du produit, mais aussi le préjudice qu’il a causé. » Ses yeux bleus, cachés sous ses pommettes gonflées, était rivés sur moi. « Tenez par exemple… » Elle passa devant moi pour se précipiter sur la coiffeuse afin de me montrer la pommade qu’elle s’était appliquée sur le visage et qui commençait à durcir. « Premièrement, il y a les frais du médecin et des remèdes prescrits. Voyez, ce masque coûte une fortune. Deuxièmement, il y a aussi le préjudice moral. Je suis certaine que les rumeurs sur ma laideur parcourent les mers à l’instant même où nous parlons. De plus, mon médecin – la reconnue Esmyel  Viviæn – m’a annoncé qu’un gonflement pareil aurait pu provoquer ma mort ! » Autrement dit, cette Næphina nous demandait une fortune. Je lui adressais un sourire de façade. « Cela va de soi ! » Je m’avançais d’un pas. « Il va s’en dire que vous serez remboursée pour le produit défectueux ainsi que dédommagée grassement. » En écho à mon sourire, la Næphina m’offrit le sien. « Je m’engage, au nom de toute ma famille, de vous alléger de vingt pour cent sur l’entièreté de chaque commande que vous passerez chez nous. » Son sourire commençait à diminuer. « Et ceux jusqu’au jour où vous rendrez votre dernier souffle. » Pendant quelques secondes, elle eut un air perplexe. Elle était surement en train de compter ce que cette réduction allait lui apporter. Je l’en empêchais. « Croyez-moi, vous en tirerez un large bénéfice car votre vie est loin de s’achever avec cette allergie. De plus, une femme de votre prestance n’a guère à rougir de quelques commérages sur votre état. Etat qui ne durera pas plus de deux nuits, soyez en assurée. » Progressivement, elle retrouva son sourire. «  Et puis, ne vous inquiétez pas, ces commérages ne dureront pas. Bientôt, vous époustouflerez les raconteurs de votre beauté, retrouvée grâce à nos algues qui produisent de merveilleux cosmétiques. Comme vous l’avez dit plus tôt : nos produits ne vous ont jamais déçus – hormis aujourd’hui. » Elle hochait sa tête gonflée comme un diodon, buvant mes paroles. « Et si des craintes subsistent encore concernant une algue défectueuse, soyez certaine que nous serons plus que jamais vigilants à présent. » Mon sourire s’agrandit. « Alors, qu’en dites-vous ? »


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Dim 30 Sep 2018, 19:33


« Vingt pour cent ? » Mon père me regardait confectionner un panier cadeau pour Nælida söel Dalæn. Voilà quelques minutes que j’étais rentrée. L’accord que j’avais passé avec la Næphina avait été fructueux. Je souriais tout en hochant la tête. « Une petite réduction de vingt pour cent sur une commande entière ? » Je mettais le dernier produit dans le panier avant de me tourner à la recherche d’un domestique qui passait dans la pièce. « Une telle réduction ne changera rien à nos profits, même si elle dure toute une vie. » Après quelques secondes d’attente, un domestique passa. D’un mouvement de tête, je lui sommais de venir. « Nous vendons nos produits plus cher que nos concurrents, alors que nous avons la même qualité. » Je posais sur les bras du domestique le panier cadeau, grassement rempli. « Nous ne vendons pas simplement la qualité, mais aussi notre nom et notre renommée. » Je me retournais vers mon père alors que le domestique partait faire sa livraison. « Une renommée qui va s’étendre quand la nouvelle va être lâchée : « Victime de l’algue néfaste, la riche et belle Dalæn décide de continuer à utiliser des algues Song. » De plus, maintenant qu'elle est fidélisée à cent pour cent, elle se pavanera continuellement avec nos cosmétiques. Elle n'a même pas conscience qu'elle nous fait de la publicité. « Une beauté sublimée par les algues Song » entendra-t-on bientôt. » Mon sourire était carnassier. « Cependant, ce n’est qu’une victoire dans la bataille. » Je croisais le bras sur ma poitrine. « La guerre reste encore à gagner. J’ai demandé à Karsath de vérifier si l’algue ALV200, soit l’algue qui s’est montrée néfaste, n’était plus vendue aux particuliers comme aux professionnels. Je lui ai aussi demandé d’envoyer un échantillon de l'algue pour que des scientifiques l’examinent. S’il a été contaminé par une maladie, il ne serait pas étonnant que les autres algues de la même parcelle le soit aussi.
« De mon côté, je me suis chargée de mettre en quarantaine – pour le moment – ces dernières afin d’éviter une épidémie d’algues toxiques. En attendant, nous profitons du rendement supérieur de l’année dernière sur les autres parcelles. Il faut croire que rien n’arrive par hasard. »
Un autre domestique arriva à cet instant, un livre en main. «  Notre carnet de commande ? » « Il faut que je note les noms de toutes personnes ayant acheté l’algue ALV200. Du côté des particuliers, ce sera vite réglé. Je vais leur écrire une lettre durant la journée pour les informer que le produit est potentiellement néfaste et qu’il peut provoquer des réactions chez certaines personnes. Je leur prierais de bien vouloir nous le renvoyer contre remboursement et deux produits offerts. Quant à ceux qui ont déjà subi l’allergie, nous leur offriront, en plus, une réduction de dix pour cent sur l’ensemble de nos produits pendant trois ans. Enfin je terminerais en leur présentant nos excuses pour le désagrément ainsi qu’en les remerciant pour leur confiance. » J’hochais la tête pour approuver mes propres paroles. Je voyais déjà la centaine de lettres identiques que j’allais devoir écrire. « Pour les professionnels, qui vendent nos produits en boutique… Ce sera plus compliqué. Nous ne savons pas encore à qui ils ont vendu nos produits. Je vais donc leur écrire des missives urgentes pour leur demander de retirer nos produits de leurs rayons et de nous les renvoyer contre de nouveaux. Bien entendu, nous ne leur feront pas payer les nouveaux. Aussi, je leur demanderais de me livrer le nom de leurs clients ayant potentiellement acheté nos produits. » Je me mordais la lèvre inférieure, en proie à une réflexion intense. « Hum… Il risque d’avoir un problème avec le principe de confidentialité. Cependant la raison est due à un problème sanitaire majeur et s’ils refusent de nous fournir des noms alors cela pourra être possiblement considéré comme étant de la non-assistance à personne en danger... Nous n’avons plus qu’à croiser les doigts pour que tout ce passe pour le mieux. » Je ne me rendais même plus compte que je réfléchissais à haute voix. La main de mon père se posa lourdement sur mon épaule. Il semblait s’être détendu depuis mon retour. Il avait aussi retrouvé son rictus légendaire. « Je vois que tu as la situation en main. » Sans en dire plus, il fit volte-face pour sortir de la pièce.

Je le regardais partir, silencieusement. J’étais légèrement contrarié par son départ. Il ne m’avait même pas proposé son aide. J’allais sans doute lire une tonne de noms pendant deux bonnes heures et écrire des lettres durant le reste de la journée. Sans doute allais-je faire ce que l’on appelait communément une nuit blanche. Je soupirais. Où était passé ma matinée reposante ?

Mot : 778
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Dim 30 Sep 2018, 20:08


Mes paupières étaient lourdes. « Je suis exténuée. Te l’avais-je déjà dit ? » Je braquais mes yeux sur la peau livide et dénuée de vie de Karsath. Éclairés seulement pas la lueur d’une bougie, ses traits auraient fait frémir n’importe qui. J’étais cependant habituée à son apparence cadavérique qui n’était pas vraiment la sienne. A vrai dire, j’affectionnais le masque qu’il s’était approprié. La beauté n’était pas dans sa physionomie mais dans son illusion. Sentant mon regard sur lui, ses yeux gris pivotèrent dans ma direction. « Ce doit être la trente deuxième fois, Aerchise. » Je souris devant son expression inexistante. J’aimais imaginer ce qui se cachait dans son crâne. Etait-il atteint de ce que l’on pouvait l’alexithymie ? Je ne connaissais pas grand-chose à cette maladie mais de ce que j’en savais, il s’agissait d’une difficulté à exprimer ses émotions ou même à les identifier. Je cessais d’écrire pour poser mon menton au creux de ma main et contempler mon Mur, le sourire aux lèvres. Nous échangions un long regard. Pour une tiers personne, il aurait pu être considérer comme romantique. Il n’en était rien. Karsath avait-il seulement des sentiments ? Je me mordais la lèvre inférieure pour retenir le sourire qui allait en grandissant. « Il y a un problème ? » Cette fois, un faible rire cristallin s’échappa de ma bouche alors que je rompais notre contact visuel pour me concentrer sur la lettre à moitié écrite. « Non, non. Rien. Simplement une réflexion stupide. » Je reprenais tranquillement mon écrit. « Oh. » Le ton morne et monotone m’arracha un deuxième rire. Je levais les yeux vers mon serviteur qui s’était lui aussi remis au travail. « Tu ne veux pas l’entendre ? » Imperturbable, il ne daigna même pas lever les yeux de sa tâche. On ne le surnommait pas Le Diligent pour rien. Il avait déjà écrit dix lettres de plus que moi. Il fallait dire que j’étais assez déconcentrée par la fatigue cette nuit. « Ai-je le choix ? » Je levais les yeux au ciel. J’avais beau fixer les règles, je n’étais pas le pire des bourreaux. « Je me disais que c’était drôle que tu te sois donné le nom « Arashur ». Je veux dire… Pour un Mur, c’est plutôt comique. » Il levait de nouveau les yeux vers moi. « Monsieur Arashur ! Seriez-vous doté d’un sens de l’humour jusque-là caché ? » Alors que je prenais une voix faussement scandalisée, je lui souriais de toutes mes dents. Il me regarda fixement pendant de longues secondes avant de tourner la tête vers son bout de papier. Cependant, éclairé par la lumière de la bougie, qui nous séparaient sur la table de la salle à manger, je crus, l’espace d’une seconde, discerner un sourire en coin. L’avais-je imaginé ou était-ce une illusion provoquée par la flamme ardente ? Je soupirais pour me remettre au travail.

« Chère Vivian Dæl, C'est avec regret que nous vous annonçons un récent évènement. L'un de nos produits s'est révél… » J’interrompis ma relecture à voix haute pour bailler. « Vous pouvez allez-vous reposer, Aerchise. » Cette fois, en levant les yeux, je rencontrais le regard inquiet de Karsath. « Je n’ai guère besoin de repos. A votre réveil, j’aurais terminé l’écriture et la relecture de toutes les missives. Il vous suffira simplement de les envoyer le lendemain et le problème sera réglé. » Il posa sa main sur la mienne dans l’unique but de retirer la plume qui s’y trouvait. « Allez donc vous reposer avant que le soleil ne se lève. » La proposition était tentante. Cependant, je resserrais ma prise sur la plume et posa ma main libre sur celle de mon Mur dans le but de capter entièrement son attention. « Ne me donne pas d’ordres, Karsath. » Je retirais sa main de la mienne avant de relire ma lettre, dans ma tête cette fois-ci. Durant ma relecture, je m’autorisais un regard furtif vers mon serviteur. Je n’avais que faire de son inquiétude. Je ne voulais pas aller me coucher et l’abandonner à sa tâche. J’avais beau affirmer avoir le cœur aussi froid que la glace. Je n’en pensais pas un mot. Oui, il m’arrivait de penser et de faire des choses affreuses, tout en n'en retirant de la satisfaction. Oui, je jugeais toujours avant de connaître. Oui, je n’avais que faire des sentiments des petits gens. Pourtant, avec Karsath, alors que je savais que jamais il ne m’abandonnerait, je me sentais… vraie. Sans filtre.

***

Le gazouillis des oiseaux me tira de mon songe chaleureux. Lorsque j’ouvris mes mires, je découvrais que je me trouvais dans ma chambre. J’essayais de me redresser mais réalisa très vite que j’étais aussi bordée dans mes couvertures qu’un fou dans sa camisole. La tête alourdie par le manque de sommeil, je grognai sous mes draps. La porte s’ouvra dans la foulée. Karsath fit son entrée, aussi rayonnant qu’une larve de mouche. « Avez-vous bien dormi ? » Il se précipita sur les rideaux clos. « Vous vous êtes écroulée sur la table durant la nuit. » Il les ouvrit sans un remord, m’arrachant un grognement. « En vous cognant la tête aussi fort, j’aurais pensé que vous vous seriez transformée en licorne durant la nuit. » « Ha. Ha. Ha. » Mon ton n’était pas du tout rieur. « Je rêve où tu es d’humeur joviale, ce matin ? » « Cet après-midi. » Il me corrigea. « Toutes les lettres ont été envoyées et reçues. Certains produits nous ont même déjà été renvoyés. Certains clients nous remercient de notre réactivité, d’autres de notre honnêté et d’autres encore de notre engagement. Et pour ce qui est de l'analyse de l'échantillon, nous avons reçu les résultats tôt dans la matinée : l'algue avait trop muri avant sa récolte » Je me redressais du mieux que je pouvais. « Vraiment ? » Il hocha la tête. Sa voix était toujours monotone et son expression inexistante. « Nælida söel Dalæn vous remercie aussi pour votre panier cadeau. » Un sourire murit à mes lèvres. « Il semblerait que vous ayez réussi à endiguer la crise. Ah. Et tenez. » Karsath me tendait un clé sertie de diamants. « C'est arrivée pour vous. Juste avant votre réveil. »


Mot : 990
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[XXXII] - Oups

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