Le Deal du moment :
Cartes Pokémon 151 : où trouver le ...
Voir le deal

Partagez
 

 [CDN 2015] Force - Des moins que rien

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage
Mitsu
♚ Fondatrice ♔

◈ Parchemins usagés : 36409
◈ YinYanisé(e) le : 07/07/2005
Mitsu
Mer 30 Sep 2015, 22:41



Coupe des Nations
Force

Katelyn regardait ce qu'il se passait dans le jardin ombragé du Manoir. Elle n'avait rien organisé, les Ætheri se chargeant de cette tâche mais elle devait avouer que tout ceci lui plaisait bien. Les Champions de la Coupe des Nations avaient tous été enlevés dans leur sommeil et s'étaient retrouvés là, enchaînés par une magie bien plus puissante qu'eux, sans aucune explication. Les races qui, en temps normal, ne subissaient pas les affronts de la matérialité s'étaient vus offrir ce « privilège » à l'occasion de l'épreuve. Tous les Hommes avaient perdu leur magie et malgré le fait qu'ils soient en groupe, ils ne voyaient pas les autres, n'entendaient rien d'autre que le bruit du fouet des soldats qui les maintenaient là et des cris semblant venir de la pénombre. Ils devaient tirer des lourds chargements, encore et encore, sans savoir ce qu'ils faisaient là, ce que l'on attendaient d'eux, qui était derrière tout ça, quand est-ce que tout ceci finirait. L'incertitude détruisait les Mortels, petit à petit. Leur force mentale seule pourrait les aider à affronter l'épreuve. On leur balançait à manger parfois, un peu à boire dans des gamelles dans lesquelles ils devaient boire comme des chiens. Ils n'avaient pas le droit à l'intimité pour faire leurs besoins et dormaient sur place, dans la boue, quand on leur en donnait le droit. Le soleil ne se levait jamais dans la partie sud du Manoir. Une éternelle nuit brumeuse, humide et effrayante planait sur leurs corps et leur esprits. On les réveillait en abattant l'arme de cuir sur leur dos et, petit à petit, leurs habits tombaient en lambeau. C'était la première étape, plus ou moins longue selon la force des candidats. Tout ceci visait à les détruire, à leur faire perdre la tête, à les déstabiliser. Ils seraient libérés de leurs fardeaux physiques et psychologiques à la fin de l'épreuve, bien sûr, mais, en attendant, ils vivaient une véritable souffrance.

Au bout d'un moment, Katelyn venait et s'adressait à la personne à bout de force. Oh elle pouvait penser être tirée d'affaire mais ce n'était que le début de l'horreur absolue. Pour tous les candidats, le même scénario était répété.

« Je n'ai rien contre toi mais, malheureusement, tes ennemis ont décidé que ton heure était venue et ils sont assez influents pour faire en sorte que ta fin soit spectaculaire. ». Elle sourit, méchamment. Dire cela conduirait la victime à réfléchir sur ceux qui lui en voulaient, sur ceux qui auraient pu manigancer un tel coup. Il faut dire que le simple fait d'être choisi comme champion pour la Coupe des Nations pouvait attirer bien des convoitises. Elle fit une pause, avant d'expliquer la suite. « Ils sont magnanimes cependant puisqu'ils te laissent une chance de survivre. Je n'ai jamais vu quelqu'un ressortir vivant d'une telle épreuve mais peut-être nous étonneras-tu ? ». C'était dit d'une façon telle qu'on pouvait sentir à quel point la femme en doutait. Non, à ses yeux, l'individu n'était qu'un déchet qui finirait sa vie aujourd'hui. « Cinq individus vont être lancés à ta poursuite, un peu comme si on lançait des chiens sur une biche. Tu devras lutter dans la forêt pour leur échapper et réussir à les mettre hors d'état de nuire de préférence. Eux auront des vivres, toi non. Eux auront des armes, toi non. Tu devras trouver les ressources nécessaires dans la nature et lutter contre la fatigue et le manque d'énergie qui, peu à peu, deviendront tes pires ennemis. D'ici quelques jours, le soleil se lèvera sur la propriété. Si tu es encore en vie, alors tu seras libre. Sinon... je pense ne pas avoir besoin de préciser. ». Elle rit, tournant les talons. Puis, comme frappée par une révélation, elle murmura. « Les individus qui en veulent à ta vie seront vêtus de blanc. Il se peut que tu croises des innocents dans les bois... Il serait dommage de les tuer eux. ». Puis, elle disparut.

Car tous les candidats étaient relâchés quasiment en même temps. Cela pouvait prendre quelques jours de plus de détruire les plus résistants mais tous se croiseraient forcément, en haillon, boueux, amaigris, à bout de force et de nerf. En tout cas, William, l'Esprit du Temple et Æther des opportunités, était assez fier de son choix d'épreuve.

Explications

Yo o/

Sur l'épreuve au niveau du fond :
- Votre personnage a été kidnappé pendant qu'il dormait et il a atterri dans ce qui semble être un camp de travail. Le soleil n'est jamais présent, il doit tirer des lourdes charges, est battu, n'a plus de magie, bref, c'est le bordel xD
- Une fois qu'il est bien au fond du gouffre, Katelyn vient le voir pour lui apprendre la suite. Elle précise que ses ennemis sont les commanditaires de l'opération et que votre personnage a une chance de survie mais très mince.
- Cinq individus sont lancés à la poursuite de votre personnage qui va devoir lutter pour ne pas se faire tuer par eux, mais également pour faire face à son manque d'énergie etc. (votre personnage est vraiment au bord du gouffre voyez, mettez vous à sa place : Il a plus de nourriture depuis qu'il a été relâché, il a souffert des travaux, il est stressé etc).
- Il devra donc faire preuve de force physique (au début et aussi pour arriver à tuer ou à assommer, s'il est sympa, ses adversaires) mais également de force mentale pour résister à la situation sans craquer.
- Dans la deuxième partie vous pouvez dire que vous croisez un candidat si ça vous fait plaisir xD Mais vous n'avez pas le temps de taper la discut' hein ;)
- L'épreuve se termine dès que le soleil se lève (donc ça prend des jours parce que là, c'est un soleil "magique" en quelque sorte) que vous ayez tué/assommé ou non vos poursuivants. Si votre personnage est encore vivant, il a réussi.

Sur l'épreuve au niveau de la forme
- Chronologiquement, le rp pour tous se passe après les épreuves ^^ Vous pouvez être téléporté dedans à la fin de votre épreuve mais ce n'est pas une obligation =) - surtout pour vous parce que bon, même si votre personnage va être requinquer à la fin, il est pas sûr qu'il ait envie de faire la fête tout de suite (ou alors pour oublier XDDD /sbaf)
- Votre message doit être compris entre 900 et 1800 mots.
- Pour les critères de notation :
→ La qualité de votre rp (orthographe, conjugaison, syntaxe etc)
→ L'originalité de vos écrits (ça ce sera la touche subjective des juges ^^)
→ La capacité que vous avez à ajuster votre rp en fonction de vos points de spé
→ L'épreuve que traverse votre personnage. Celle ci est éprouvante, mentalement comme physiquement, et votre personnage n'en sortira pas facilement ^^

Vous avez jusqu'au 30 novembre pour poster dans le sujet. Un jury sera constitué ensuite pour désigner les vainqueurs.

Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité

avatar
Sam 17 Oct 2015, 16:25

HRP:

En sursautant, Andrzej se réveillait dans un endroit sombre et froid. Il voulait se relever mais ses mains étaient bloquées. Après quelques minutes nécessaires pour que ses yeux s’habituent à l’obscurité ambiante, il pouvait voir qu’il était dans une grande pièce métallique et que ses mains étaient attachées par de lourdes chaînes à une barre de fer fixée à une sorte de bite d’amarrage. Il était à genoux et pouvait, au mieux, se redresser en position accroupie. Un homme, crasseux et aux allures cadavériques, l’accueillait d’un sourire fou et l’incitait à reprendre le boulot. Sans autre forme d’explication, le fou se mit à avancer accroupi en poussant la barre pour faire pivoter le mécanisme central. Andrzej n’avait pas le choix, il devait suivre. Peu importe les questions, les discussions et tentatives de menace, le fou ne révélait rien sur les lieux ou le but de cet endroit. Il fallait pousser la barre de fer ou mourir.

Parfois, le Bélua tombait de fatigue et le fou le traînait en poussant plus fort la barre. Sans jamais s’arrêter, les deux galériens marchaient. Ils étaient de temps en temps nourri par des hommes tout de blanc vêtu. On leur donnait de l’eau avec quelques pelures de patates, rien de plus, et ils devaient manger en marchant, toujours marcher. Toujours. Ces mystérieux geôliers ne répondaient pas non plus aux questions et Andrzej ne savait toujours pas ce qu’il faisait là. Bien vite, il perdit toute notion de temps, de jour, de nuit ou même de repos car il ne pouvait pas s’arrêter. Son dos était douloureux, ses jambes le faisaient souffrir et ses bras, toujours fixés dans la même position, étaient endoloris. Il n’en pouvait plus, il allait craquer. Cette ignorance le fatiguait moralement et ce supplice le faisait physiquement. Il était à bout.

Un jour, le fou se mit à hurler que quelque chose était prêt. Il parlait d’Andrzej qui était inconscient depuis longtemps. Pour toute réponse, deux hommes blancs emmenèrent le Bélua hors de cette pièce de torture en jetant dédaigneusement un morceau de cuisse de poulet au collaborateur. Une fois dehors, l’air frais de la nuit réveillait le jeune garçon qui était encore dans les vapes. Une femme, accompagnées de cinq hommes, était là et le regardait avec un grand sourire. Cette maîtresse de cérémonie lui expliquait quelque chose, il le savait, mais il entendait à peine. Il comprit juste que les cinq personnes ici présentes tenteraient de le tuer et qu’il devait survivre jusqu’au jour. Au point de fatigue où il en était, son cerveau ne traitait plus les informations, il fonctionnait à l’instinct.

Totalement désemparé, livré à lui-même, exténué, le jeune garçon se mit à courir. Du moins, il essayait mais ses jambes, restées en position pliées durant tout ce temps, répondaient difficilement à leur maître. Il était resté si longtemps agenouillé, attaché à cette barre de fer. Sa course ressemblait plutôt à une tentative de marche rapide et il titubait en rythme alors qu’il se dirigeait vers le cœur de la forêt. Même si mourrait d’épuisement, il aurait pour lieu de dernier repos un endroit qu’il aimait. A peine il avait atteint l’orée de la forêt qu’il chutait lourdement dans la boue, face contre terre. C’était désormais un amas brun et fatigué qui rampait lentement sur le sol. Le décompte pouvait se faire entendre et la voix tonitruante du chasseur trahissait une certaine excitation. Les vingt dernières secondes étaient accompagnées par les ricanements croissants de ses acolytes et les claquements secs des arbalètes armant un trait mortel destiné au Bélua.

Ce dernier avait finalement réussi à se relever pour avancer à l’ombre des arbres immenses. Il repéra un énorme buisson de ronce lui arrivant jusqu’aux épaules. Sans vraiment réfléchir, il marchait péniblement vers cet abri de fortune. Il parviendrait sans doute à se concentrer suffisamment pour se faufiler à l’intérieur en écartant les épines aiguisées et s’y réfugier. Par une grande maîtrise, ou une insolente chance, il put s’immiscer dans ce havre de paix temporaire pour souffler un instant. Il savait que ses poursuivants hésiteraient à fouiller cet endroit de peur de s’écorcher et perdre un temps précieux. Andrzej profitait de cela pour tenter de trouver quelques plantes ou feuilles pour se nourrir. Son expérience de la forêt lui avait appris que les plantes avaient une meilleure croissance et propriétés nutritives à l’abri d’un mur de ronce, les protégeant des herbivores les moins aventureux. Malheureusement, cette forêt désolée ne comportait que ronces, arbres désolés et mort. Tout à coup, un bruit.

Il entendait quelque chose derrière lui. Il s’agissait d’un des chasseurs avançant à travers les ronces avec grande peine mais il avançait ! La cachette était compromise. Il se remettait à ramper lentement entre les pieds des plantes agressives quand il entendait la personne derrière lui pester et jurer. Il s’écorchait continuellement à chaque pas et l’odeur du sang emplissait déjà l’air. La raison pour laquelle il était envoyé en mission de reconnaissance dans cet endroit était difficile à deviner. La bleusaille qui a les tâches ingrates ? Le possédé qui se laissait guider par une soif de sang aveugle ? Peu importait la raison, il venait de commettre une grave erreur en tentant d’évoluer dans un milieu qui lui était hostile par nature. Suant comme un bœuf et essoufflé, le jeune homme traqué rassemblait toutes ses forces pour que les ronces lui enserrent les pieds, l’empêchent de bouger pour ensuite le submerger et le faire disparaitre dans cet amas de dagues végétales. Un cri étouffé parvint jusqu’à lui et bientôt seul un gargouillis horrible devint audible à mesure qu’une longue branche couverte de rasoirs effilés lui serre la gorge, libérant ce précieux liquide vital.

L’occasion était inespérée. Il se glissait vers le cadavre. Ce dernier avait les mains crispées autour de son cou et ses yeux écarquillés sortaient légèrement de ses orbites. Impressionné par cette vision d’horreur, il marquait un temps d’arrêt, aussi pour reprendre son souffle après cet appel de la Nature, avant de se saisir du couteau de chasse et de l’arbalète du traqueur. Bien que mieux équipé, il était toujours fatigué et pris en chasse par quatre hommes sans scrupules. D’ailleurs l’un avait sûrement remarqué l’absence de leur comparse car il avait alerté ses camarades et leur indiquait que quelque chose clochait. La course devait reprendre.

Il se précipitait entre les arbres aussi vite qu’il le pouvait, c’est-à-dire avec difficulté et à vitesse réduite, mais il ne pouvait pas rester immobile. Serrant fermement ses nouvelles armes, il allait se résigner à faire volte-face pour vendre sa peau chèrement mais une zone plus dégagée attirait son attention. Il continuait alors de courir à un rythme plus soutenu dans cette direction alors qu’il pouvait entendre les bruits et soupirs d’exaspération des chasseurs qui venaient apparemment de traverser le champ de ronces. La distance entre eux allait vite être réduite car ils étaient en bien meilleure forme.

Le jeune garçon vit avec étonnement qu’il s’agissait de sables mouvants. Il eut une idée et, en faisant appel aux branches autour de lui, se mit à former des escaliers de fortune pour atteindre le haut d’un des branchages touffus pour se cacher. Il avait besoin de se terrer là quelques instants pour reprendre ses forces. Bien vite, les traqueurs arrivèrent sur place et virent le piège mortel de la Nature. Ils regardèrent tout autour d’eux. L’un d’eux se mit à dire que la proie était sûrement tombée dedans et que c’était impossible qu’il soit dans un arbre car seul Paulo pourrait grimper aussi vite et sans trop de bruit car …

Un sifflement, une éclaboussure de sang.

Un trait venait de se carrer dans le haut de son crâne comme pour lui prouver que Paulo était pas le meilleur grimpeur et surtout pour le faire taire. Abasourdi par cette surprise, les trois chasseurs restants restèrent une seconde totalement immobiles. Cette latence permit à Andrzej de se balancer par un long lierre en leur direction pour précipiter le plus proche d’entre eux dans les sables mouvants. Ils eurent à peine le temps de le voir venir qu’il était trop tard.

L’élément de surprise commençait déjà à se dissiper. Le Bélua n’avait pas le choix, il devait absolument recommencer à fuir car il ne pouvait faire le poids. Cette petite victoire envers l’adversité fit office de soins psychiques, cela lui redonnait espoir et des ailes lui poussèrent quand il se remit à trotter aussi vite que possible à travers les arbres. L’énergie du désespoir le guidait et c’était en puisant dans ses dernières forces qu’il remettait de la distance entre eux et lui. Il entendait au loin les ordres beuglé par le chef.

Une douleur vive vint le saisir à la cuisse gauche et le fit tomber lourdement. Il put voir, fiché dans la jambe, un projectile. Il ne pouvait plus fuir, et le tireur n’était pas loin. Il le voyait déjà approcher, sortant son long couteau de chasse. Une rage aveugle le prit, la folie, ou la peur. Il se relevait tant bien que mal et fit face, lui aussi armé du couteau volé. Une lutte acharnée s’ensuivit, le chasseur ayant un avantage clair sur sa proie. Cependant, rien n’est plus dangereux qu’un animal sauvage acculé. Après plusieurs minutes, tous deux furent désarmés et luttèrent. L’homme, puissant et en forme, prit littéralement le dessus et étranglait Andrzej. Celui-ci trouvait un gros caillou en palpant le sol de manière hasardeuse et fracassait le crâne de l’étouffeur.

Il se mit à ramper au pied d’un arbre pour prendre appui et se relever. Malheureusement, un trait vint figer son bras contre le tronc. C’était le chef qui revenait, couvert de boue, la colère sur le visage et il était seul. Il était empli de rage envers la proie qui luttait beaucoup trop. Andrzej avait le bras fixé au tronc, la jambe gauche en sang, totalement exténué par la lutte qu’il venait de gagner de justesse. Il restait là, assis, alors que le traqueur arrivait près de lui avec son arme à la main. Une fois à sa hauteur, il lui assénait des coups de pieds avec sa botte ferrée et un sourire mauvais apparut alors qu’il allait planter sa lame dans le cœur du Bélua. Toutefois, ce sourire disparut en un instant quand un rayon de soleil matinal vint se réfléchir sur le bord de la lame. Il se mit à hurler de ne pas avoir pu venger ses compagnons de chasse mais la règle était la règle. Le jeune garçon avait survécu à la nuit sans mourir. Intérieurement, le chasseur se promit de le traquer à nouveau pour achever son œuvre. Andrzej, quand à lui, ne pensait rien. Persuadé qu’il allait mourir, il s’était laissé aller et était inconscient.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité

avatar
Mer 04 Nov 2015, 22:22

Deux mots battaient dans son esprit, « Comment » et « pourquoi », deux questions qui résonnaient sous son crâne tandis qu'un sifflement se fit entendre dans l'air juste avant que le cuir du fouet ne vienne frapper les épaules de Raeden. Ses dents crissèrent sous la douleur pendant que toutes les autres plaies de son dos se réveillaient pour lui envoyer des décharges de souffrance. Il entendait des cris autour de lui, mais il était incapable d'en repérer les auteurs. A part ses tortionnaires, il avait l'impression d'être seul. Depuis combien de temps était-il là ? Son cerveau avait du mal à s'en souvenir, épuisé par la faim, la soif, la fatigue et les mauvais traitements. Du jour au lendemain, il s'était réveillé ici. Il savait que cette fois-ci tout été bien réel, bien physique, pas comme la fois où il s'était retrouvé au piège dans une sorte d'autre univers. Mais cela n'empêchait qu'il y avait des choses qu'il n'arrivait pas à comprendre. Et c'était cela qui n'arrêtait pas de tourner dans sa tête. En même temps, c'était un bouclier de son esprit qui lui permettait de ne pas craquer, de ne pas céder et devenir fou, ou d'abandonner tout simplement. Ce n'était pas dans son caractère, même si son corps n'en pouvait plus.

« Comment » et « pourquoi ». Comment avaient-ils fait pour le kidnapper chez lui, pendant son sommeil, au sommet de la Montagne de l'Edelweiss enneigée, avec Leaic, les autres habitants des lieux et surtout Orthos, pour veiller sur le domaine ? Les avaient-ils blessés ? Tués ? Il espérait que cette dernière option n'en était pas une. Il ne voulait plus perdre d'etres proches ou cher à lui. Et il y avait ce « pourquoi », pour quelle raison était-on venu l'enlever ? Il ne pensait pas avoir d'ennemi. Etait-ce des représailles de la part de gens qui n'appréciaient pas qu'il soit revenu s'installer dans les montagnes ? Des personnes ou amis de personnes qu'il avait conduit devant la justice ? Des jaloux de son choix comme champion ?A regarder et à essayer d'écouter ses tortionnaires, aucunes informations ne lui étaient parvenu. Tout ce qu'il pouvait dire, c'était qu'apparemment, on comptait l'exploiter et le faire travailler jusqu'à la mort. Déjà, par un procédé qui lui était inconnu, certainement une capacité magique beaucoup plus puissante que la sienne et que toutes celles qu'il avait rencontré jusque là, on  l'avait privé de ses pouvoirs. Il lui était même impossible de prendre sa forme d'ours et cela le rongeait, comme si une part de lui, à l'intérieur, était réellement une entité animale qui grattait, hurlait et griffait, emprisonnée ainsi.

Son pied nu ripa contre une pierre, le faisant trébucher et lourdement tomber au sol, son corps trop faible pour avoir la souplesse de retrouver l'équilibre. Presque en tenu d'Adam, avec juste un pantalon à moitié déchiré sur lui, chaque centimètre carré de peau était offert aux affres de la souffrance, de la torture et des mauvais traitements. Avant même qu'il n'ait eu le temps de se redresser, la lanière du fouet claqua dans l'air avant de venir découper une nouvelle fois sa chair.Un grognement s'échappa de ses lèvres tandis qu'il puisait dans ses maigres forces restantes pour se relever. Et même là, il y eut le temps que deux autres coups atteignent son corps avant qu'il ne se retrouve à la verticale. Ses jambes et son corps tremblaient sans que le Bélua ne puisse rien n'y faire. Son organisme était indéniablement en train de céder de plus en plus aux tourments qu'on lui faisait subir depuis il ne savait combien de temps. Ici, il n'y avait pas de soleil pour se repérer dans les temps et même le roulement entre les moments en cage et ceux à travailler n'étaient pas régulier, ne permettant pas de calculer de défilement du temps.

Ayant peut être décidé qu'il était temps de faire une pause pour les geôliers, ces derniers balancèrent Raeden dans une cage avec une gamelle d'eau. Juste de quoi passer une ou deux fois sa langue dessus pour lui donner l'impression de la rafraîchir et de la torturer encore plus, en fait. L'homme-ours ne savait pas combien de temps de répit on lui donnerait. Certainement très peu. S'échapper d'ici était impossible, en tout cas tant que rien ne changeait. Il ne pouvait donc faire qu'une seule chose : essayer de se reposer, de dormir, d'aider ainsi son corps à récupérer les faibles grains de force qu'il pouvait encore puiser. Mais à peine venait-il de fermer les yeux qu'il les rouvrit instantanément, sentant une présence l'observer. Une femme, une rousse aux yeux vert de gris le toisait de derrière les barreaux. Elle se mit à parler et le prisonnier put voir ses crocs. Une vampire. Le Bélua était incapable de dire si elle était puissante ou pas, mais quelque chose faisait pencher ce dernier pour la première option. Cela voulait donc dire qu'elle faisait exprès de montrer ses canines, peut être pour l'impressionner … mais plus vraisemblablement pour déclencher la peur en lui … elle était mal tombée !


A la façon dont elle parlait, on pouvait comprendre qu'elle ne faisait pas partit du groupe de ces tortionnaires. Cependant, elle semblait savoir beaucoup de choses. Et puis surtout, sa façon de s'exprimer et le fait qu'elle ne faisait rien pour aider les prisonniers la rendait clairement antipathique aux yeux de l'homme-ours. L'affamé, le battre, tout cela n'été apparemment pas suffisant. Voila que maintenant, ils voulaient se servir de lui comme d'un gibier de chasse. Pathétique … et probablement mortel pour lui. Combien de temps cela durerait ? Elle avait parlé de quelques jours, jusqu'à ce que le soleil se lève. Ce qui voulait dire qu'il ne pouvait pas vraiment s'y fiait, vu qu'apparemment, ici, c'était pas l'astre naturel qui gouvernait. De toute manière, on ne lui laissait pas vraiment le choix. Mais au moins, même si la vampire paraissait en douter, il y avait toujours une possibilité pour qu'il sorte vivant de toute cette histoire.

La cage fut ouverte et on le lâcha. Combien de temps avant qu'ils ne se lancent à sa poursuite ? Ca aussi, un mystère et il ne pouvait pas compter dessus. Il fallait qu'il mette le plus de distance entre eux et lui et le plus vite possible. Mais en même temps, s'il mettait ses dernières forces maintenant, comment ferait-il pour résister plusieurs jours ? Il fallait quand même qu'il avance, qu'il prenne appui d'un arbre à un autre. Chasser ? Impensable … il n'avait pas d'arme et y avait-il des animaux dans le coin ? Une racine le fit trébucher et il s'affala de tout son long dans l'humus. Ses pieds n'en pouvaient plus de le porter et de souffrir sous les épines, branches, cailloux et autres ennemis impassibles. Raeden n'en pouvait plus  il était à bout. Ses paupières s'étaient fermés malgré lui. Elles pesaient une tonne. Ce serait si bon de se laisser aller, de ne plus lutter, de ne plus résister. Simplement rester là …


... Alice …

Le mot magique, le sésame, le dernier rempart qui ne céderait jamais devant rien, qui le ferait toujours se redresser, et même ramper s'il ne pouvait faire autrement, pour avancer, la retrouver et la protéger. Un frôlement se fit sur sa joue comme si une main venait le caresser. Il crut entendre dans la brise son nom prononcé par une voix qu'il n'avait plus entendu depuis quelques années … celle de sa femme, Faline … Mais ce n'était pas possible. Elle ne pouvait pas être là, elle ne pourrait plus jamais être auprès de lui … C'était certainement un effet secondaire de sa sous-nutrition et de son état de faiblesse. Mais cela eut au moins le mérite de lui faire rouvrir les yeux. Et son regard tomba sur quelque chose qui se tortillait presque sous son nez … un ver de terre. Sans même réfléchir, sa main remonta le long de son corps et vint attraper le lombric … pour le fourrer dans sa bouche et mâcher,, avant de creuser le reste du sol pour en trouver d'autres, les enfournant sans cérémonie. Il ne put faire cependant cela qu'une seule fois, une branche craquant derrière lui tandis qu'un couteau venait se ficher dans son mollet.

Un grognement animal plus qu'humain fut émis par ses cordes vocales tandis qu'il se retournait brusquement Il y avait deux hommes en blancs qui se précipitaient vers lui. Le regard de Raeden avait foncé et une nouvelle rage battait en lui. Sa main tomba sur une branche morte et prenant appui contre le tronc d'arbre, il se redressa … avant de leur foncer dessus.

Il n'aurait su dire ce qui s'était vraiment passé ensuite. Un brouillard flou dans son esprit et l'impression que son corps brûlait. Des flashs d'instants lucides au dessus du corps des deux hommes morts, en train de gratter le sol, continuant d'avancer, mâchant des feuilles pour tenter d'en extraire un peu de liquide, la dissimulation plus ou moins réussis de ses pas, des cris, de la douleur …  Ne jamais s'arrêter, au point d'en prendre la raison et d'avoir l'impression de flotter, d'être en dehors de soit … de plus distinguer le chemin … et ne même pas se rendre compte que le jour s'était levé et que le soleil brillait haut dans le ciel.


1664 mots
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité

avatar
Dim 15 Nov 2015, 05:40

[CDN 2015] Force - Des moins que rien Lu0x

L’air lui semblait vicier, remplit par l’urine, les excréments, la sueur et le sang. Les chaînes qui la maintenaient en place marquaient sa chair, mordant de leur acier froid et usé le cou, les poignets et les chevilles. L’acier des maillons glissant sur son corps, elle sentait la rouille lui taquiner avec agressivité les narines. La position n’était pas des plus confortables et était celle de la soumission, de l’humiliation. À genoux sur le sol froid, les jambes écartées vers l’arrière pour l’empêcher de forcer sur les chaînes. Ses deux bras avant été ramené vers l’arrière et tourner dans son dos, de larges menottes la maintenaient jusqu’au coude et les chaînes la tenaient en suspend le haut du corps vers l’avant. Elle devait plier le haut également pour balancer vers l’avant pour boire et manger à même la gamelle qu’on lui apportait parfois, une bouillasse nauséabonde qui malgré tout faisait crier son estomac de faim.

Sa vue lui avait été retirée, caché par une bande de cuir solidement attachée qui lui mordait la tête. Sa chevelure avait été durement malmenée et elle était poisseuse de sang et de saleté. Son corps qui avait autrefois été recouvert de vêtements n’étaient plus couvert que par ses longues chevelures qui pendaient. On lui  avait également offert de nouvelles cicatrices, des marques striaient son corps, chacun des coups lui avaient retiré un bout de vêtements jusqu’à ce qu’elle soit nue, des traces de tortures étaient également visibles, mais tout ceci n’avait pas fait craquer l’ange. Sa volonté avait tenu bon, que ce soit devant les menaces, les attaques psychologiques sur sa famille ou même ses amis. Des lames avaient été placées tout autour d’elle, plantée dans le sol pour l’emprisonner dans une cage aiguisée. C’était pour l’empêcher de trop se débattre, à chaque fois qu’elle avait fait un faux mouvement, elle se lacérait la chair et ce même quand elle devait se pencher vers l’avant pour se nourrir, se lacérant les épaules et les clavicules, bien souvent la faim et la soif l’avait poussé à se mutiler.

Mais ce qui la brisa fut-ce qu’ils firent à ses ailes. Derrière elle, autre fois majestueuses, il ne restait plus que des restes. Des chaînes retenaient les deux longues carcasses de chairs et d’os. Chaque plume avait été retiré des membranes. En ce moment même, elle était dans un état psychologique brisé. Fixé sur un même endroit, le haut du corps pendant mollement dans le vide, sa tête était laissée à elle seule, ses joues étaient marquées de sillons rouges, signe qu’elle avait pleuré et quand elle respirait, sa voix sonnait creuse et roque, signe qu’elle avait crié jusqu’à en perdre la voix. Quand elle sentit et entendit des bruits de pas, son corps se mit immédiatement à trembler et ses yeux à lui piquer, elle aurait aimé pleurer, mais il n’y avait plus aucune larme qui coulait de ses yeux secs et aveugles. En ce moment même, elle n’était plus qu’une loque humaine, brisée et apeurée de se faire à nouveau torturer.

La peur la fit bouger, se relevant rapidement dans une position moins proche des lames. Sa respiration, c’était accélérer et elle avait entendu un claquement de doigts qui avait fait disparaitre la cage de lame. Le mur de lame fut retiré et une main ferme l’agrippa au niveau de sa mâchoire, la tirant vers elle. Une voix s’éleva, celle d’une femme qui semblait presque s’excuser, déclarant qu’il n’y avait rien de personnel dans tout ceci qu’elle avait été payée pour le tout, mais que maintenant son travail était fait et elle pouvait la relâcher. Mais le tout ne s’arrêtait pas maintenant. Elle devait survivre, reprendre sa vie en main et s’échapper d’ici, du moins survivre jusqu’à ce que le jour se lève. Elle ne serait pas relâchée seule. Elle lui souffla que cinq personnes seront à ses trousses, elles lui voudraient du mal. L’ange n’aurait rien d’autre que son corps, sa fatigue et sa peur pour survivre, les chasseurs seraient équipés et expérimentés.

Les menottes qui retenaient le haut de son corps furent retirées et elle bascula vers le sol. Elle laissa un soupir s’étirer quand les bouts de métal ne furent plus en contact, et ce, malgré le fait qu’elle se retrouva à patauger dans ses propres fluides personnels. À leurs tours ses chevilles furent délestées par l’acier et elle put se recroqueviller sur elle-même, massant presque intensivement ses poignets endoloris, mais déjà deux paire de puissant bras vinrent l’attraper pour la soulever, lui tirant une plainte de douleur. Elle entendit un claquement de doigts qui sembla faire disparaitre ses ailes, mais sembla augmenter quelque peu la douleur lui tirant une nouvelle plainte de douleur. Elle ressentait un élancement permanent au niveau de ses omoplates, lui rappelant qu’elle était toujours vivante. Ils la traînèrent jusqu’à l’extérieur. Quand ils la jetèrent enfin au sol, elle sentit autre chose contre son corps, c’était plus doux et moelleux, de l’herbe. L’air frais la frappa de pleins fouets, lui tirant des frissons d’inconfort. Elle entendit les pas s’éloigner, mais son inconfort augmenta quand elle reconnut le bruit d’un fouet qui était claqué, mais la fatigue et l’épuisement la clouaient sur place. Mais quand elle sentit le cuir mordre sa chair, elle trouva la force de se soulever, la peur mélangée à l’instinct l’aida grandement à soulever sa carcasse et à détaler tel un lapin qui sentait le regard du prédateur non loin.

Malgré la bande de cuir qui cachait ses yeux, elle avait beaucoup trop peur pour abandonner la liberté qu’on lui offrait, trop peur de souffrir encore, elle aurait préféré la mort à subir tout ceci une seconde fois. Elle ignore ou sa course la guidait, elle ignorait dans quelle direction elle allait et qu’elle genre d’obstacles qui pouvaient y avoir devant elle, mais elle sentait l’herbe haute frapper contre ses cuisses nues et tout ceci lui suffisait. Elle ignorait également combien de temps elle put se battra avec la languette de cuir collé contre sa peau, lui tirant une douleur autour de ses yeux, quand enfin, elle réussit à soulever l’un des coins, elle eut tout juste le temps de voir le tronc d’arbre contre lequel elle se fracassa et perdit connaissance. C’est en sursaut qu’elle se réveilla plus tard, la douleur au corps et la faim au ventre.

Le corps tremblant, la faim lui fit grignoter l’herbe qui se trouvait autour d’elle, ainsi que les insectes qui avaient eu le malheur de croiser sa route. À peine rassasiée avec ce ‘’festin’’, elle finit par tomber sur une flaque d’eau. Elle s’y jeta tel un animal assoiffé, buvant l’eau tiède, sale et stagnante. Mais rapidement, elle sentit son estomac se révulser contre ce repas peu recommandable, mais elle garda la bouche et les dents toujours serrées, se refusant de gaspiller son maigre repas. Le peu qu’elle avait mangé fut régurgiter à plusieurs reprises et ce seul exercice lui tira les larmes. Quand enfin son estomac accepta avec dédain se liquide, elle essaya de se soulever, mais s’écrasa plus d’une fois au sol. Pendant de longues minutes, elle marcha à quatre pattes, trouvant refuge au creux d’un arbre et si blottit.

Puis par mégarde, l’épuisement prit le dessus et elle s’endormit. Le réveil fut brutal, quelque chose avait planté les dents dans son épaule. La douleur vibrante de la mâchoire du molosse se resserra contre sa chair fit que le poing un peu plus vigoureux vient frapper les côtes de la bête et elle était sure d’avoir entendu des côtes brisées, mais se fut l’ombre qui bougea agilement derrière le monstre qui rendit l’ange nerveux. Suivant son instinct, elle souleva juste à temps le chien. Le bruit caractéristique d’une lame qui pénètre la chair résonna et le chien poussa un hurlement en relâchant sa prise. Elle-même relâcha la prise et le corps sans vie de la bête tomba au sol, laissant l’odeur du sang s’étirer dans l’air. Étrangement, l’odeur excita la guerrière, laissant l’adrénaline se glisser dans ses veines et l’aider un peu. Elle chercha un endroit ou fuit, mais la silhouette lui bloquait le passage. Malheureusement pour elle, l’homme avait décidé de l’empêcher de bouger en lui plantant sa lance dans la cuisse en continuant sa route vers le sol pour l’y planter.

Mais le cri de Nithael ne vient jamais, ce qui surprit l’homme un instant. L’ange réalisa que cette maigre douleur n’était rien à comparer de ce qu’elle avait déjà ressenti. Elle avait mal, il était vrai, mais pas au point de lui tirer un cri. Elle essayant de s’agripper à la lance pour la retirer, mais le chasseur l’attrapa à la gorge, la frappant contre l’écorce. Au début Nithael s’attaqua à son avant-bras, mais se rabattit bien rapidement sur le visage de l’homme et réussit même à lui crever un œil, le faisant reculer de douleur. Grognant en se tenant le visage, la guerrière effrayée, c’était jeter au sol, reprenant son souffle et prête à prendre la fuite, mais la faim semblait attisée par la viande bien chaude du canidé et ce fut l’instinct primaire qui prit le dessus. Elle ne pensa même pas à user de la lance, attrapant plutôt une grosse roche avec laquelle elle frappa l’homme une première fois puis une deuxième fois. Une fois au sol, elle frappa à nouveau, laissant la peur et toutes ses émotions négatives se déverser sur cet être de malheur et une fois qu’il ne bougea plus, elle se jeta sur le corps encore chaud du chien, déchirant la chair à main nu et la dévora. Elle en but le sang, se délectant avant d’en vomir une partie et de recommencer à manger sans se soucier de vomir à nouveau.

C’est tandis qu’elle se rassasiait qu’un autre se présenta, fessant fuir Nithael qui eut à peine le temps de prendre la lance. Prendre la fuite était surement la meilleure solution pour le moment, mais maintenant qu’elle était libre, ils avaient créé autre chose, ils avaient repoussé l’ange dans l’abysse de ses instincts et elle voulait survivre à tout prix, elle savait qu’elle tuerait, elle ne s’empêcherait pas de tuer. Elle savait qu’elle serait encore blessée, que la faim et la fatigue la pousseraient à faire des erreurs, mais elle survivrait quel que soit le prix à payer. Elle avait des gens qui l’attendaient, elle ne pouvait les abandonner, elle ne voulait en aucune cas les décevoir, surtout que si elle ne pouvait point passer au travers cette épreuve, jamais elle ne pourrait revoir qui que ce soit et elle ne pourrait plus protéger ceux qui lui étaient chers et cette seule idée la révulsaient.

Maintenant, la chasse était ouverte et elle ne serait certainement pas l’unique proie.


1796 mots
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité

avatar
Mer 18 Nov 2015, 13:57

Le fouet claque dans l'air et me réveil en m'arrachant un gémissement étrangler. J'ouvre péniblement les yeux quand un second coups viens déchirer la chair de mon dos, me forçant à serrer les dents. Je regarde autour de moi, sans comprendre où je suis. Le fait de ne pouvoir parler est un fardeau et je ne vois nul part mes compagnons. En revanche, je comprends parfaitement ce qu'on attends de moi et je rejoins en silence d'autres personnes qui tirent une lourde pierre. Dans ma tête, tout n'est qu'un trouble obscure et douloureux, à l'image de mon dos qui me brûle et du triste décors de ce cauchemars bien trop réel à mon goût. Je n'ai qui plus est aucune idée d'où se trouve ma jumelle or sans elle, impossible de fusionner. De toute façon, en écoutant les autres gémir, je finis par comprendre que plus personne ne peut user de magie. En un sens, ça ne me trouble pas, j'étais humain il y a encore peu de temps de cela et je pense pouvoir me faire à cette absence de pouvoir.

La journée à passer, affreuse, j'ai le corps en compote, je mange dans des gamelles sales et pis, je n'ai pas eu droit à une seule seconde d'intimité. C'est peut-être le plus dur à accepter. Je suis prisonnier de bourreau sans avoir la moindre possibilité de comprendre ce que je fais là. Ni comment j'y suis arriver. ce que je comprends parfaitement en revanche, c'est que je vais devoir tenir bon et ça, c'est le pire. Je suis d'or et déjà éreinter, mon dos est en sang et je ne peut même pas hurler pour tenter de me défaire de la douleur. On nous autorise quelques temps de repos et je sombre dans un sommeil rapide sans demander mon reste, qu'importe la boue froide et poisseuse. C'est le fouet qui m'éveille de nouveau, cinglant mon dos, claquant dans l'air et me faisant me crisper sous la douleur fulgurante. Je rejoins mon poste sans demander mon reste mais en moins d'une heure de temps, je me sens à bout, prêt à implorer la mort de venir me cueillir. Je ne me suis senti qu'une seule fois aussi mal. Quand j'ai enterrer ma jumelle et mes parents. Or j'avais retrouvée ma sœur, esprit errant. Je ferme les yeux, tombant à genoux, presque insensible au fouet qui me frappe alors. Je ne pourrai faire un pas de plus, s'en est déjà trop et les larmes qui roulent sur mes joues sont la seule trace visible de mon abandon dans cette lutte insensé pour simplement survivre.

C'est la voix d'une femme qui me fait réagir. Mes ennemis ? Je n'ai nul ennemis en ce monde, du moins, pas à ma connaissance ! Je ne peut toutefois pas répondre et je maudit un peu plus mes cordes vocales, lesquels sont juste assez forte pour me faire pousser des sons proches de gémissements. En somme, elles ne me servent à rien. Pas plus que ne me sers à l'heure actuel les pensées qui traverse mon esprit. Je suis fatigué, j'ai juste envie d'en finir mais j'écoute malgré moi la femme qui parle, souhaitant presque pouvoir la décapiter pour la faire taire. Elle s'en va et je saisi l'opportunité offerte, courant vers la forêt comme une biche effarouchée. Rapidement, je croise un autre prisonnier qui fuis comme moi, mais il s'écrase dans le sol boueux et son hurlement me pousse à me jeter au sol moi aussi. Je me glisse sous des ronces, heureux de ne pas pouvoir émettre de sons en cet instant. Ce que je vois me terrifie. Un homme vêtu de blanc avance vers le malheureux, a sa main, un arc. La flèche part, la seconde et j'observe avec horreur la mort de l'homme. je vais finir comme ça moi aussi ?

Un éclair me frappe alors, imagement parlant. Je dois survivre, retrouver ma sœur et Léto ! Je n'ai pas le droit de mourir sans lui dire adieux ! L'homme en blanc passe devant moi sans me voir, coucher dans la boue. Je me relève dans son dos, il se tourne en entendant le bruit de succion de la boue qui macule mes vêtements et on visage. Mais je suis plus rapide, poussé par la frayeur surtout et mon poing frappe son nez. Un craquement sinistre se fait entendre, c'est l'un de mes doigts qui c'est brisé, avivant un feu de douleur en moi. Mais j'ai réussi a détourner l'attention du chasseur et d'un geste maladroit, j'attrape la dague à sa ceinture, le poignardant. Puis, je cours, comme pourchasser par la grande faucheuse elle-même. Avant que tout ne devienne noir, subitement.

Je me réveil dans la boue, sans comprendre où je suis. Ma main me fait mal et je vois qu'un de mes doigts a doublé de volume. Je me suis également entaillé la paume avec la dague que j'ai chaparder. J'ai faim, j'ai soif et j'ai froid, pis, j'ai à peine la force de me redresser et je me retrouve a ramper au milieu des bois. Chaque mouvement provoque le tremblements de mes muscles ankylosés. Je me force pourtant à garder les yeux ouvert, me glissant contre une souche de bois pourrit et humide. J'ai si faim que lorsqu'un insecte rampe sur le bois, je ne réfléchit pas, le mangeant en retenant un haut le cœur. J'en viens même à lécher la mousse humide sur le tronc pour effacer le mal froid de ma gorge. Mes yeux se ferment presque tout seul.

Combien de temps est passé ? Je n'en ai nul idée, des heures, des jours peut-être ? Je suis rester contre la souche, buvant l'humidité qui se dépose constamment sur la mousse. J'ai froid, de plus en plus et je ne sens même plus ma main. Par deux fois j'ai entendu des bruits de pas, je me suis alors recouverts d'un peu plus de boue, avant de me figer. Je suis encore en vie mais je n'ai plus la force de bouger. Un rayon de lumière signe la fin de mon calvaire alors que je ferme les yeux, persuadé que je suis en train de mourir.
1 088 mots
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité

avatar
Mar 24 Nov 2015, 02:35



LA COUPE DES NATIONS
Epreuve de Force

Un œil s’ouvrit dans la pénombre. Léthargique, l’être peine à s’extirper de l’onirisme de ses rêves, tandis que ses prunelles trouvent le chemin de la clarté. Un ineffable endroit, lugubre et humide, se dessine à la nitescence de l’astre lunaire. Léger encadré grossier taillé dans la pierre et ceint de barreaux imposants, le trou qui laisse filtrer les quelques éclats de lumière est l’unique source de clarté. L’exilé tente de se lever, avec peine, il est finalement retenu par une lourde chaîne aux épais maillons qui le condamne à la soumission. Son cou est étreint dans le carcan métallique, l’obligeant à goûter la poussière et la paille qui jonchent le sol dans sa geôle. Ses souvenirs sont flous, fugaces, embrumés et inaccessibles. Etreint par une incoercible panique, le proscrit se débat, tire de toutes les forces de son être sur l’étau de sa liberté. En vain. « Eh ! Il y a quelqu’un ? » La tessiture rauque et chevrotante, il tente de prendre corps avec la réalité. Un visage se dessine aux barreaux de sa mansarde. Fluet et taillé à la serpe, un sourire sardonique s’étirant sur ses lèvres charnues. « Tu es réveillé ? C’est parfait. » Il y eut un bruit de serrure grinçante. Puis, plus rien.
Et le calvaire débuta.

Une lanière de cuir mordit le dos du réprouvé, lui tirant le cri latent qui était resté coincé au fond de sa gorge. Ses apparats en lambeaux, nimbés d’écarlate, dévoilaient de longues balafres ruisselantes qui peinaient à se résorber. Les chaires, malmenées, se mélangeaient à la boue et à la sueur, qui perlait de tous les pores de sa peau. La mine torve, le tortionnaire fit de nouveau claquer son fouet sur l’être décharné, qui soulevait avec difficulté un gargantuesque tonneau. Aviné et fébrile, son rôle lui plaisait au-delà du rationnel. Depuis maintenant une décade, le bourreau avait pour mission de briser les hères qu’on lui envoyait. Une tâche qu’il exécutait avec soin et parcimonie. Ses lippes s’étirèrent et il happa de son implacable instrument, la jambe de son martyr. Le proscrit s’effondra, enfouissant son visage dans le limon pour étouffer sa plainte. Ses forces l’abandonnaient, ses barrières mentales cédaient peu à peu. Sur son visage, entre les cinabres estafilades, se lisait son effarement, sa crainte. L’inénarrable peur de ne jamais sortir de sa geôle. De mourir enchaîné, privé de sa liberté. Une voix en lui était née, clamant sa volonté farouche d’en finir. De lâcher prise. D’abandonner. Le sifflet du tourmenteur perça la brume de son être. L’heure de la pause. Une infime accalmie dans son labeur. Un instant que la clepsydre du temps lui accordait dans ses imbuvables journées. Le pied de l’acrimonieux le cueillit au ventre. Lentement, à son oreille, il persifla. « Tiens, mange. Comme l’animal que tu es. » Brutalement, il jeta une gamelle à terre, qui s’enfonça légèrement dans la boue. Il n’y avait plus aucune trace de civilité, d’intimité. Plus la moindre humanité. L’abdomen douloureux, l’exilé rampa jusqu’à son menu fretin. Il n’était plus que l’ombre du réprouvé. Un ersatz de martyr qui geignait, attendant l’heure de son trépas.

Les abysses l'étreignirent avec vigueur. Le berçant loin des affres du monde extérieur. Il avait lâché prise. Abdiquant, clamant son forfait, le corps ancré dans le bourbier. Les paupières scellées, la respiration ralentie. La chimère de plénitude s'étend sur lui. Le monde est sombre. Si sombre. Ses pensées sont meurtries. Ses chaires sont à vif. Une main glacée happe son menton, relevant son visage marqué par les vicissitudes de sa piètre existence. Ses prunelles céruléennes s'ouvrent, s'extirpant des limbes tant convoitées. Il aurait tout le temps pour mourir. Mais pas aujourd'hui. Un ineffable sourire s'étend sur les lèvres de la salvatrice, qui touche sa peau. Un indicible espoir semble se dessiner. Pour repartir telle une chape de vent. Les souvenirs affluent dans la mémoire tortueuse du proscrit. Il a été choisi. La coupe des nations. Les images s'imbriquent entre elles, fugaces et hiératiques. Celle qu'il prenait pour sa libératrice, lui avait ravi son salut. Un chaste, mais irrépressible engouement se dépeint en elle. Elle jubile. Se gausse du désespoir qui imprègne les traits de l'exilé. Sans affadir ses propos, elle annonce la sentence. Véritable juge. Bourreau de son existence lascive. Il crut succomber d'apoplexie. Crut qu'elle se jouait de lui, afin de briser les derniers reliquats de son humanité. Il se trompait.

Il courait à présent, libéré de ses carcans, le cou affublé d'une brûlure causée par le frottement du métal. Sans que le moindre tocsin n'ait résonné, on l'avait jeté dans une épaisse futaie qui exhalait des fragrances de pins et de mousses fraîches. Le bois était parsemé d'arbres hauts, qui hasardaient entre saules et conifères aux épais rameaux. De manière sporadique, des invectives surgissaient dans son dos, suffisamment éloignées pour qu'il ne succombe pas à la panique latente qui gisait au fond de lui. Dépossédé de ses armes, couvert de plaies encore ouvertes et d'une boue qui craquelait sur son corps, il avançait maladroitement, mu par la douleur lancinante de son dos et l'engourdissement de ses muscles trop longuement sollicités. Son pied se prit dans une racine et il s'effondra à terre dans un bruit mât. Un carreau fusa, se plantant non loin de lui. Le trait était noir, orné de trois plumes cobalt. L'insidieuse mélopée de sa fin semblait approcher à grands pas. Il ne la laisserait pas le cueillir. Son instinct de survie fut plus fort que son envie d'attendre la mort. L'exilé se leva et reprit son cheminement, au travers du dédale tortueux et sylvestre. Les minutes s'étiolèrent. Il ignorait depuis combien de temps il s'était élancé de l'infâme bosquet. Une éternité dans son esprit.

Un mince cours d’eau se dessina, séparant la forêt en deux parties distinctes. Sur la rive affluente, les arbres étaient plus rapprochés, plus denses. Obombrant le reste du monde, une opacité incertaine caractérisait cette nouvelle jungle. Le damné s’approcha de la nappe, tombant à genoux devant elle, avant d’y plonger goulûment son visage. A grandes lampées, il reprenait corps avec la réalité. Ses muscles se détendirent petit à petit et un incoercible sentiment de renaissance s’ancra en lui. Son reflet, à la surface lisse et limpide, attira son attention. La chevelure crasseuse aux couleurs du lisier, les traits maculés d’estafilades sinueuses et les joues mangées par une épaisse barbe ébène, le réprouvé était méconnaissable. Loin d’un parangon vertueux, il avait l’allure impudique d’un mendiant, sa tunique totalement déchirée par les à-coups virulents du fouet de son tortionnaire. Il l’ôta d’un geste vif. Son torse avait été épargné, malgré quelques ecchymoses violines, il demeurait en totale antinomie avec son dos balafré. Il n’avait pour autant, aucun répit supplémentaire à s’accorder et il traversa la source pour rejoindre l’ineffable pénombre de la rive voisine. De nouveau, une flèche se ficha dans un arbre, tout proche du proscrit. Ses poursuivants étaient plus près qu’il ne le pensait. Réprimant le cri de désespoir qui sembla naître dans sa gorge, le réprouvé reprit sa course effrénée. Son cauchemar ne souffrait aucune fin.

Dissimulé au sein d'un buisson, le front baignant dans sa sudation, il observait, les membres tremblants, les sens en émoi. L'un des quidams s'était écarté du reste du groupe. Vêtu d'atours immaculés et tenant fermement un arc entre ses longs doigts. Le damné était étreint par la panique et une irrépressible faim s'était emparée de lui. Jamais il n'avait éprouvé autant d'effroi devant pareille situation. Inextricable, il se savait pris au piège et bientôt, il serait à la merci de son bourreau. Il se déplaça imperceptiblement. Une branche craqua. Le rabatteur banda son arc et tira avec précision. La flèche transperça la jambe du proscrit qui lâcha un hurlement de douleur. C'en était fini. Bien loin d'un exutoire, il mourrait en captif, de la main d'un illustre inconnu au regard avide. Les larmes naquirent de ses prunelles, battant contre ses cils et emperlant son visage buriné. Il allait mourir. Et le fait déversait en lui un flot incongru d'images fugitives. L'hère s'était approché, les lippes déformées par un sourire carnassier. Il s'agenouilla aux côtés de sa proie, exhalant son souffle putride dans les narines du condamné. Dans les méandres de son être, une voix murmura. Une litanie sauvage et trop longtemps écartée. Celle de l'incube qui gisait malgré lui au fond de son âme. Les pupilles dilatées, la mâchoire serrée, un grondement sourd naquit du prostré. Le tourmenteur s'écarta, mais déjà, il fondit sur lui. Happé par la sauvagerie, relégué à ses plus bas instincts, le réprouvé plaqua sa victime au sol et abattit le poing de sa revanche sur le visage de l'hébété. Sans discontinuité, il martela l'être jusqu'à ce que son faciès ne dispose plus d'aucune trace d'humanité. Les phalanges à vif et endolories, le proscrit se laissa tomber sur le côté. Une ardente douleur irradiait de sa jambe blessée. Il ne pourrait plus courir. Dépourvu de sa seule échappatoire, il n'avait plus aucune chance de rester en vie. Aucune.

Il avait ôté la flèche, les dents serrées sur un pan de la tunique du défunt, masquant le cri qu'il avait poussé. Un piètre garrot empêchait sa blessure de le vider de son sang. Le réprouvé avait ramassé l'arc de son poursuivant et avait entrepris de se nourrir. Plus que la nourriture, ce fut la morsure du froid qu'il dut combattre. Privé de haut, blessé et l'estomac vide, il n'était qu'une silhouette décharnée contre un tronc d'arbre. Ses paupières étaient lourdes. Les jours se suivirent, immenses et glacials. Les lippes rendues diaphanes et le teint blafard, le réprouvé savait qu'il n'y avait plus d'issue. Il était parvenu à happer un daim d'une flèche maladroite et avait plongé ses dents dans la chaire du cervidé sans demander son reste. Malgré l'éclat cinabre et sec qui craquelait autour de sa bouche, il n'était plus qu'une ombre dans la nuit.  Il n'avait pas revu les autres hères à ses trousses. Sans doute ne les reverrait-il jamais.

Il fait froid. Si froid.

Ses paupières se scellent lentement. Il exulte une respiration lascive. Les bras des abysses se referment sur lui. Envoûtants. Distillant en lui une fragrance capiteuse et exaltante.

Il a froid. Si froid.

Un rayon ambré caresse sa joue. Une nitescence nouvelle qui perce au travers des branches ancestrales de la futaie. Un œil s'ouvre sur ce monde mordoré empreint de l'onirisme qu'il n'avait que trop longtemps égaré. Le céruléen apprivoise cette clarté renaissante. Ses lippes s'esquissent en un incoercible et ineffable sourire. Ses yeux se closent.

Il n'a plus froid. Il est libre.
Nombre de Mots | 1760.

© Codage by Savile

Revenir en haut Aller en bas
Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~

~ Orisha ~ Niveau I ~
◈ Parchemins usagés : 2293
◈ YinYanisé(e) le : 24/05/2014
◈ Activité : Horticultrice
Latone
Jeu 26 Nov 2015, 21:40



Des moins que rien


Avoir le goût du risque ne signifie pas forcément être capable d'y faire face. Sa situation était déjà des plus pitoyables, cela ne l'avait pas empêchée de chuter davantage dans les abîmes insoupçonnés de la liberté. Pourchassée par des tribus hostiles, traquée par des cousins de l'ombre, possédée par un esprit détraqué, Léto endurait tous les dangers possibles. Et pourtant, tête brûlée comme elle était, elle enfonça le clou jusqu'à s'affaiblir, s'enchaîner, s'aveugler, impuissante, aux mains du pire ennemi imaginable : l'inconnu. Tu n'es qu'une moins que rien.

On lui avait bandé les yeux, son haillon peinait à couvrir son corps imposant, des chaînes excessivement lourdes la rattachaient aux bourreaux. Ces derniers la manipulaient avec une efficacité remarquable : sa première réaction fut de lutter, mais cette tentative se révéla vaine avec l'altération de sa force physique et l'absence de sa magie. On la traînait de droite à gauche et on lui dictait des consignes – simples dans l'énoncé, néanmoins exténuantes dans leur accomplissement – comme déplacer des charges de plus en plus lourdes. Les réussites avaient beau être accessibles au départ, on ne la récompensait qu'avec des coups. Se rebeller contre cette injustice lui traversa une fois l'esprit et l'échec l'accueillit à bras ouverts en retour. C'est ça d'être une esclave. A force d'hurler, sous la tyrannie du fouet, couverte par la violence des mots, Léto ne parvenait plus qu'à prononcer quelques murmures confus et inaudibles. La chamane n'avait plus que le temps pour souffrir, elle mit des jours à supporter la douleur afin de permettre à ses nerfs de surchauffer à leur tour. Qui sont-ils ? Tes ennemis. Comment est-ce arrivé ? A cause de ta faiblesse. Le rire caractéristique de Latone fit écho dans le moindre recoin de son crâne.

Alors que sa lucidité lui faisait défaut, adossée et attachée à ce poteau qu'elle connaissait si bien, de nouveau la voix se fit entendre, mais cette fois c'était celle d'une autre femme. Léto parvenait à écouter l'intonation mais les mots lui étaient impossible à distinguer, elle dut compter sur Latone pour retransmettre. Contrairement à cette dernière, cette apparition sortie de nulle part fut moins chiche en informations, ce qui permit au flot des questions d'affluer de nouveau en son esprit. La blonde releva la tête, une promesse de liberté, une chance qu'elle n'allait absolument pas rater. Cours.

Au même moment où l'étrange femme se tut, les chaînes se défirent et elle tomba en avant. La chamane faillit s'étouffer dans la boue, dont elle s'extirpa tout juste en obligeant ses bras à fournir des efforts incroyables. Elle toussa, cracha, le sol semblait s'être imprégné de l'odeur âpre du sang ; le sien ou celui des autres ? Son bras trembla alors qu'elle ramenait sa main sur son visage, pour tirer sur le bandeau et permettre à ses yeux d'enfin découvrir dans quel enfer on l'avait jetée. Malgré la volonté, sa vue demeurait floue et l'obscurité régnait en maîtresse. Elle ne voyait ni les asservisseurs ni les asservis ; elle décelait tout juste les arbres face à elle. L'altruisme n'avait pas sa place en ce lieu, la pauvre guerrière se résignait à jouer le jeu des monstres. Elle se releva péniblement, traîna des pieds avec un équilibre lamentable, pour finir par courir tant bien que mal en laissant une traînée de larmes et de sang sur son passage.

Au sein de cette forêt lugubre, ses pupilles vaironnes commençaient tout juste à distinguer le contour des formes, ainsi que quelques couleurs ternes. Ses tympans, quant à eux, se confrontèrent au silence singulier de la chasse. Elle était la proie de cinq rapaces dont elle ignorait l'identité, tout comme leurs motivations précises. Mais Léto devra malgré tout se battre sur tous les fronts, seule. Son corps était déshydraté, privé de nourriture consistante depuis bien trop longtemps. Ses chaînes, bien que détachées, étreignaient encore ses poignets et ses chevilles ; les maillons traînaient derrière elle dans un fracas insupportable. Ce détail n'était pas non plus en sa faveur : la cacophonie métallique attirerait irrémédiablement les prédateurs. Léto ne savait plus quoi faire à part rester le plus immobile possible et… réfléchir. Mais réfléchir à quoi ? Aux moyens de s'en sortir ? À la possibilité de sauver les autres prisonniers ? À démasquer les traqueurs ? Les idées s'entremêlaient en une boule de laine, qui grossissait petit à petit dans son crâne avant d'en cogner sans cesse les parois. Et alors que sa tête allait exploser, une flèche fila dans le vent pour se loger dans sa jambe. Un cri de douleur lui fut arraché. Le premier homme en blanc était là, il s'approchait à grands pas en bandant son arc. La chamane roula par terre sur le côté pour échapper au second projectile. Tout allait beaucoup trop vite, l'agresseur était déjà à sa hauteur. Prise de panique, ses bras se jetèrent sur la jambe de l'ennemi pour le faire tomber à la renverse, avec tout le poids de son corps sur lui. Encore sous l'influence du stress, Léto ne contrôlait plus ses mouvements, elle ne put qu'assister à la pluie de ses propres poings s'abattre sur l'homme. Ses mains lui faisaient mal à force de frapper, elle continua toutefois jusqu'à qu'il sombre dans l'inconscience. Et dans un ultime réflexe désespéré, elle lui arracha une flèche de son carquois et la planta dans sa gorge.

La chamane pantela enfin, s'écarta du cadavre qui pissait le sang indéfiniment. Elle se mordit vigoureusement la lèvre inférieure et tira d'un coup sec la flèche. Ce n'était pas allé bien profond mais elle n'arrivait plus à tenir debout correctement avec cette blessure. Elle n'en pouvait plus, c'étaient ses dernières forces qui venaient de partir en fumée durant cette confrontation. Mange. Elle braqua son regard sur le macchabée. Soudain, elle plongea sur celui-ci et le fouilla de fond en comble pour grappiller ne serait-ce qu'une miette de nourriture… en vain. Dans son état, il lui était impossible de chasser, et quand bien même, elle ne savait ni se servir d'un arc ni pister un animal, à supposer qu'il y en ait par ici. Mange. Ses yeux retournèrent sur le mort… La personne la plus proche de son cœur s'adonnait au cannibalisme. Ce ne devait pas être si grave de s'y abandonner alors que le cadavre en question était un ennemi… Non. Elle secoua la tête. Non, elle ne pouvait pas faire ça, elle devait lutter ou alors elle ne sera pas mieux que ces sadiques. Elle se résolut finalement à mâchouiller les feuilles par-ci par-là ; ce n'était nullement copieux, cependant cela avait le mérite d'occuper son estomac pour un temps.

Légèrement requinquée, Léto se servit des vêtements de sa victime pour contrer le froid et bander sa blessure. La suite du plan improvisé par instinct fut d'attendre que la douleur parte, mais l'atmosphère se refroidit de plus belle. Elle repensa aux conseils de sa mère… Cette nostalgie lui chuchota d'amasser des brindilles pour y concevoir un feu. La chaleur lui baisa la peau, seulement son manque de jugeote ne lui fit pas comprendre de suite qu'elle s'exposait grandement au danger. Le second chasseur fut attiré tel le papillon amoureux de la bougie. La chamane était, fort heureusement, suffisamment aux aguets pour fuir au moindre bruit suspect. Camouflée dans les fourrés, elle fixa, tremblotante, le nouveau traqueur examiner le cadavre de son collègue et fouiller son campement de fortune. Léto retint son souffle. L'idée était de laisser cet homme partir. Toutefois, lorsqu'elle remarqua son arme, cette épée de bonne facture à vue d'œil… elle en avait besoin. La chamane se sentait nue sans arme digne de ce nom, ce n'était pas juste un désir mais surtout une nécessité. Tu es folle. Animée par cette soudaine envie, elle poussa sur sa jambe valide et passa les chaînes autour du cou du tortionnaire. Ils tombèrent à l'unisson mais elle continua de tirer, quitte à s'en briser les phalanges. La pression s'éternisa assez pour étouffer le cynégète. Après coup, elle resta par terre à reprendre sa respiration et s'empara de l'épée convoitée. La blonde se releva, la jambe encore affaiblie, il n'était plus question de traîner ici. Son regard s'imbiba une dernière fois de la lueur des flammes avant de s'éloigner.

Léto ne sut combien de temps elle boita de la sorte, à se nourrir de la flore et de l'eau de pluie. Elle accepta le déluge aqueux comme un cadeau des Ætheri. Posée près d'une souche, son corps était éreinté et son esprit encore plus. Maintenant que les lésions étaient tolérables, ses pensées se focalisaient de nouveau sur la raison de tout ceci. Elle ne reconnaissait tout simplement pas ces hommes, ils ne ressemblaient même pas aux esclavagistes qu'elle avait l'habitude d'affronter. Tu les as quand même tué. Elle n'avait pas eu le choix, il était plus facile de tuer que de neutraliser avec la force qu'elle possédait en ce moment… Tu es une meurtrière. C'en était trop, la chamane ne comprenait pas pourquoi la Descente était contre elle, après tout ce qu'elles avaient vécu ensemble : Pourquoi ?! Pour te rappeler qui tu es… Elle se tut, la question sonnait étrangement fondamentale. Je… Elle fronça des sourcils, son front se plissa en parallèle, un travail sur elle-même s'opéra : ce corps, cet esprit, cette personnalité avaient un nom, un nom qui faisait frémir les ennemis de ses convictions. Je suis Latone.

Un éclat de détermination dans les pupilles disparates, Léto secoua sans cesse les maillons entre ses doigts. Le fracas du fer produisit une mélodie présageant la bataille à venir. Forcément, les trois assaillants immaculés suivirent la fanfare pour la rejoindre. Là était le but : faire front une bonne fois pour toute. Latone – Léto, qu'importe son nom, cette femme quoiqu'il en soit – risquerait tout pour tenir ses promesses, à l'éternel combat dans lequel elle s'était engagée. La chamane se releva à leur arrivée, elle tenait à peine sur ses jambes mais maintenait sa garde, la main droite soulevait l'épée tandis que la gauche jouait avec les anneaux ferreux. Elle serrait les dents, autant pour lutter contre la douleur et la fatigue que menacer ses adversaires. Quitte à mourir ici, autant insuffler une ultime fois le sentiment provoqué par Latone : le frisson. Pourtant, ce fut elle-même qui sentit ce dernier lui traverser l'échine lorsqu'elle aperçut, postérieurement aux attaquants, les premiers rayons solaires poindre en sa direction. Les traqueurs s'éclipsèrent au même instant, tout simplement, sans demander leur reste. La blonde les fixa partir, l'air ahuri et le cœur moins lourd. Le sang avait beau couler le long de ses plaies, ses larmes avaient beau sécher sur ses joues, Léto demeurait debout, libre, et, une fois de plus, plus forte que jamais.



1782 mots ~
Lou' © Epicode



By Jil ♪
Revenir en haut Aller en bas
http://yinandyangpower.forumactif.com/t34266-latone#672534
Invité
Invité

avatar
Sam 28 Nov 2015, 17:09

Younes ferma les yeux, un instant de trop sans doute car il sentit la brûlure du fouet s'abattre sur son dos. L'homme essayait de relativiser mais malgré toute la bonne volonté du monde, il était incapable de calmer ses doutes et ses peurs. Certains auraient pu lui dire que chaque Orine devait s'attendre à un tel sort si le destin la faisait tomber sur un maître violent, et ils auraient raison, mais le lien absent, les épreuves qu'il vivait actuellement étaient totalement insupportables. La question qui revenait le plus à son esprit était pourquoi. Pourquoi lui ? Pourquoi ici ? Pourquoi des individus faisaient ça ? Il ne savait rien et la situation le rongeait de l'intérieur. Combien de temps la torture durerait ? Il ne savait même pas pour quelle raison il travaillait. S'il avait su, s'il y avait eu un but déclaré, sans doute y aurait-il mis du sien pour que la douleur cesse rapidement. Younes avait l'habitude de travailler les champs, il aimait se surpasser mais ce n'était pas une question physique ici, c'était une question psychologique. Son esprit était troublé au plus haut point et il sentait, petit à petit, la folie s'emparer de lui. Il essayait de voir le visage de ses bourreaux mais il semblait perdu dans un monde brumeux, comme s'il s'agissait d'un terrible cauchemar un peu trop réel. Il ne savait pas, il ne savait plus. Toutes les théories qu'il élaborait semblaient tomber à l'eau. Plongé dans l'incertitude, il finit par essayer de se dissocier des autres, comme si ce n'était pas vraiment lui qui était là, dans la boue, meurtri, mais une représentation de lui, un clone. Il essayait de refouler ses sentiments et parfois y arrivait, en pensant à autre chose. Peut-être était-ce simplement parce que son corps comportait tellement de plaies qu'il avait produit un peu d'endorphine ? Un second souffle, il le voyait comme ça, comme lorsqu'il allait courir et que, à bout de souffle, il y avait ce fameux déclic, ce déclic qui permettait de continuer malgré tout. Seulement, dans le cas présent, ça ne durait jamais bien longtemps. Il n'arrivait presque plus à pleurer, son corps totalement déshydraté. Il buvait parfois dans les flaques ou dans les gamelles qu'on leur amenait mais, même s'il ne vit jamais les autres, Younes savait qu'ils étaient là. La nourriture était immonde mais il ne pouvait cracher dessus. Elle lui paraissait être une bénédiction et il se fichait de savoir ce qu'il mangeait, même si, à un moment, il lui sembla apercevoir un bout d’œil humain. Peu importait, c'était simplement la survie qui comptait. A ce moment précis, Younes se fichait de la moralité, il se fichait de ses principes. Tout ce qui comptait, c'était de ressortir d'ici vivant, même si le désespoir le gagnait souvent. Il pensa mettre fin à ses jours mais ne passa jamais à l'acte. Pas ça, tout mais pas ça. Il se raccrochait à un espoir, un seul, celui d'avoir des réponses et quand enfin on lui en apporta, il se sentit un instant revivre, avant de se rendre compte qu'il mourrait sans doute bientôt.

Younes n'avait jamais été éduqué pour être un combattant. Son monde était celui des arts, bien qu'il ait décidé de s'écarter un peu des traditions de sa race pour cultiver les champs. Il ne voulait pas se battre. Il était pacifique. Et voilà que des ennemis... quels ennemis ? Avait-il seulement un jour eu des ennemis ? Il ne s'en rappelait pas. Peut-être qu'il s'agissait de Sorciers le prenant pour un Réprouvé ? Il en doutait vraiment. La vérité c'est qu'il ne savait pas, il ne savait rien et ce n'était pas le moment de réfléchir. Il devait courir et trouver une solution. Il avait un espoir de survie mais ce dernier lui paraissait bien lointain, voire impossible à atteindre. A chaque pas qu'il faisait, son corps lui rappelait les tortures de la veille, et de l'avant veille. Les croûtes qui s'étaient formées se rouvraient sous l'effort qu'il faisait pour fuir le plus loin possible. Sa respiration était excessivement bruyante et il avait peur. Des hommes en blanc... Il regarda derrière lui, ne voyant rien. Le néant l'effraya d'autant plus. Comment savoir où est-ce qu'ils se trouvaient ? Ils pouvaient surgir de nulle part. L'Orine devait réfléchir, se mettre dans la peau de ceux qui le poursuivaient. Que ferait-il s'il était à leur place ? Il inspira difficilement, crachant par terre la seconde d'après pour libérer sa gorge de la terre qu'il avait pu avaler en même temps que l'eau ces derniers jours. Il puait, il ne ressemblait plus à rien, qu'à un animal égaré et fragile, une proie de choix. Il lui semblait pourtant que ses sens étaient plus à l'affût qu'en temps normal, ses muscles étaient bandés comme pour lui permettre de fuir ou de se battre plus facilement. Seulement, se réflexion s'en trouvait amoindri, sa vue semblait se focaliser sur des points en particulier. Le temps passa et rien ne vint.

Couché dans un buisson, l'homme avait réussi à prendre un peu de repos, sans dormir véritablement. Il avait décidé de se cacher parce qu'il ne voyait rien d'autre à faire. Dans le feuillage, il ne pouvait rien voir du monde extérieur mais le monde extérieur ne pouvait pas non plus le voir. Du moins, c'est ce qu'il crut car un bruit métallique fendit l'air et vint se ficher dans son bras. Younes ne prit pas le temps de regarder de quoi il s'agissait. Peu importe, la douleur le terrassa et la peur revint. Il devait fuir, tout son corps était de cet avis. L'anonymat des hommes en blanc l'effrayait sans doute plus que s'il les avait vu auparavant. Le doute le tuait, l'ignorance l'achevait. Il courait, courait encore mais ses membres commençaient à être en manque d'énergie. Il vit passer quelqu'un, quelqu'un comme lui, et ce fut cette personne qui mourut à sa place, terrassée par une flèche devant les yeux de l'Orine qui se mit à courir encore plus vite. C'était donc ça qu'il avait dans le bras, une flèche ? Par les Ætheri, quelqu'un était mort et lui ne pensait qu'à sa propre survie ? Il n'eut pas le temps de culpabiliser mais se fit tout de même la réflexion, se trouvant étonnement calme par rapport à ça. C'était comme s'il était soulagé que ce ne soit pas lui, que ce soit l'autre.

Dos contre un arbre, il arracha la flèche qui se trouvait dans son bras. Il savait que, sans soin, sa blessure allait vite s'infecter. Le sang coulait et il le regardait comme si c'était le sang de quelqu'un d'autre. La douleur était grande mais il avait mal à tellement d'endroits... L'arme dans la main, il se dit que ça pourrait lui servir et se fut le cas. Un homme en blanc débarqua, plantant son poignard dans le ventre de Younes qui, par réflexe, lui asséna la flèche entre les deux yeux avec toute la force dont il était encore capable. Un point faible, heureusement, et la flèche entra dans le crâne de l'ennemi comme dans du beurre. L'Orine respira, regardant son ventre, puis l'homme, puis le poignard. Il devait faire quelque chose. Comme avec la flèche, il retira le poignard. La douleur mit un certain temps à se faire ressentir. Jusqu'ici, il n'avait sentit que du froid, qu'un léger picotement, mais le message porté au cerveau, il se plia en deux, tombant à genoux. C'était tellement injuste...

Ce fut à ce moment là qu'il pensa vraiment à ses connaissances, aux gens qui l'avaient entouré, aidé, à sa maîtresse. Ce n'était pas dans l'ordre des choses que l'Orine meurt avant son maître. Il ne pouvait pas la laisser. Il devait survivre, il n'avait pas le choix. Alors, il tenta de déshabiller l'homme en blanc, prenant les vêtements avec lui. Il rampa jusqu'à un énième buisson, où, lentement, il se déshabilla, se servant de ses propres affaires pour empêcher son sang de se répandre. Il ne sut jamais combien de temps cela dura, sans doute plusieurs heures. Il était tellement affaibli qu'il agissait mécaniquement, gardant seulement en tête l'idée selon laquelle il devait, lui aussi, s'habiller en blanc et resté cacher là. Il finit par s'évanouir, à moitié nu. Ce fut le soleil qui le réveilla, un rayon perçant le feuillage pour venir réchauffer une petite parcelle de sa joue. Jamais avant il n'avait aimé le soleil autant. Jamais il n'avait ressenti un chaleur si douce. On lui avait donné l'obscurité, il appréciait d'autant plus la lumière.

1424 mots
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité

avatar
Sam 28 Nov 2015, 21:26


Accroupie dans la boue et les friches près d’un tronc couché et dévoré par les fougères et les lianes, Nausicaa contemplait ses mains blanches sans réellement les voir. Doucement, elle remuait ses doigts, ses morceaux de porcelaine glacée dont elle était si fière lorsqu’ils glissaient sur les cordes d’une harpe ou les touches d’un vieux piano. Les jolis brins n’étaient qu’un souvenir. Ils étaient sales, couverts de sang et gonflés à force d’agripper des cordes à tirer, de creuser la terre pour dénicher la moindre herbe à manger, quelques racines des miettes de pain. La Sirène tremblait. Elle avait si froid. D’un geste maladroit, elle ajustait les lambeaux de ce qu’il restait de sa robe, pour couvrir ses épaules. La blancheur immaculée du tissu n’était plus qu’une évocation lointaine aux allures de mythe ; la pauvre chemine de nuit n’avait guère résisté aux assauts des lanières de cuir et chutes à répétition. Quelqu’un cria, un hurlement lointain mais qui trahissait l’agonie d’une souffrance interminable. Dans un hoquet plaintif, Nausicaa attrapa ses cheveux blonds et emmêlés d’une poigne nerveuse. Elle ne pouvait plus supporter tout cela. Elle en venait presque à regretter ce qui devait être un geste de bonté. La jeune femme participait à la Coupe des Nations pour le compte de la race des Humains, volonté de faire honneur au peuple dont elle s’était entichée du Roi. Elle n’avait pas imaginé endurer tant de douleur. Nausicaa n’avait jamais été très forte ou musclée. Petite créature terriblement féminine à l’image de parfaite petite princesse impuissante qu’il fallait protéger et secourir, elle s’était toujours contentée de soulever le strict minimum, privilégiant l’esprit et la magie à la puissance brute. A mieux y réfléchir, ce n’était pas forcément une idée très judicieuse. Le fouet claqua, encore, déchirant la soie et la peau. Elle s’effondra dans le sol marécageux dans un énième cri étouffé. Elle n’arrivait même plus à hurler. Elle n’avait plus de voix pour ça. Les jambes chancelantes, comme prêtes à céder, la Sirène se releva pour se traîner jusqu’à son fardeau. Elle ne comprenait pas ce qu’elle faisait ici, pourquoi, quel était le but, l’objectif. A mesure que le temps passait et que la fatigue s’emparait du moindre recoin de son corps et de son esprit, des théories plus extravagantes les unes que les autres naissaient. Cette façon de faire, si brute et tellement cruelle, ressemblait étrangement aux méthodes que pouvaient employer sa mère, s’il lui prenait la fantaisie de briser quelqu’un. Etait-ce possible ? Avait-elle quelque chose à voir avec cette grotesque mascarade ? Quelques jours plus tôt, lorsqu’elle arrivait encore à réfléchir de façon posée, elle s’était convaincue de sa paranoïa. A présent, cela lui paraissait tout à fait plausible.  D’un mouvement las, Nausicaa prit la corde qu’elle devait tirer, pour trainer un chargement obscur sans savoir de quoi il s’agissait. Depuis son arrivée dans ses contrées monstrueuses, elle n’avait pas fait bouger beaucoup de marchandises. Ses pieds nus s’enfonçaient dans la terre gorgée d’eau. Elle tomba. Un coup de fouet. Elle n’en pouvait plus. Une femme arriva.

« Mes ennemis ? » répéta-t-elle dans un souffle à peine audible et brisé. Nausicaa blêmit. A l’instar de son cœur qui eut un soubresaut, elle se redressa d’un bond, avant de manquer de s’effondrer sur les caisses qu’elle était censée tirer un peu plus tôt. Réaction primitive face à une mauvaise nouvelle, ses membres avaient immédiatement protesté à cet effort inconsidéré. Doucement, Nausicaa se mit à souffler sur ses doigts, toujours aussi gelés. A toute allure, elle cherchait à démêler la situation, à comprendre, sans parvenir à trouver la plus petite trace de logique à ce jeu macabre. Sa mère avait-elle changé d’avis et décidé qu’il était temps de signer sa fin ? Cela lui ressemblerait bien. Ce serait une façon d’en finir spectaculaire et marquante. Des larmes silencieuses roulaient sur les joues pâles de la Sirène. Elle était épuisée, fatiguée de devoir se battre pour vivre, de craindre l’ombre de la Khæleesi et de redouter ses lubies à son égard. Dans un frisson, elle se mit à courir ou plutôt, à trotter gauchement à travers la jungle épaisse, pour échapper aux cinq individus qui s’étaient lancés à sa poursuite. La charmante Vanille ferait-elle partie du peloton ? Nausicaa ne tenait pas à le savoir. Elle n’avait plus de force ni de magie, plus même une once d’estime de soi. Si cette Vipère en avait après sa vie, elle était perdue. Pourtant, elle espérait vivre. Elle voulait vivre. Son existence lui avait paru débuter le jour où elle fut chassée de la Cité Engloutie. Elle ne pouvait pas se faire abattre comme un chien. Pas ici. Pas maintenant. Pas comme ça. Les bras croisés, le souffle court et la respiration bruyante, elle détalait à travers les petits bois avec ce qu’il lui restait d’énergie et de détermination. Elle devait tenir, simplement tenir, jusqu’au lever du soleil, dans cette interminable nuit qui durait depuis plusieurs jours. Ses jambes oscillaient. La jeune femme avait l’impression qu’elles ne lui appartenaient plus. Elle ne les sentait plus, mais continuait à courir, trébuchant plus d’une fois contre des obstacles ridicules que son état ne lui permettait pas d’appréhender normalement. Du sang coulait de son front écorché et sa vision se brouillait. Elle pleurait un peu plus à chaque fois. Ce n’était pas le mal qui l’enfonçait un peu plus à chaque fois, mais les tourments, cette désolation proche de la résignation. Son corps avait capitulé depuis bien longtemps, c’était ressentir son âme fléchir et s’incliner qui la consumait. Alors que Nausicaa ralentissait l’allure pour reprendre contenance, une flèche frôla son bras et elle glapit, reprenant de plus belle la fuite. Ils étaient là, à la poursuivre. Ils étaient en position dominante et elle n’était rien. Un lapin boiteux et aveugle aurait été plus combattif.

L’écorce massive d’un vieil arbre formait un abri de fortune. D’un geste brusque que l’espoir ravivait, Nausicaa sauta pour casser une branche aux grosses feuilles couvertes de sève, qui lui serviraient à la couvrir le temps qu’elle se repose un peu. Blotti dans ce petit coin aux airs paradisiaque à ses yeux endormis et bouffis, elle se força même à avaler quelques végétaux pour reprendre quelques forces. Malgré sa gorge nouée, elle était affamée. Dans une grimace, elle frotta ses pieds lacérés, ses hanches meurtris. C’était sûrement la première fois qu’elle était dans un aussi piètre état, du moins dans son apparence. Pouvait-elle rester cachée ici jusqu’à ce que le jour se lève ? Peut-être que ses ennemis ne la trouveraient pas. L’idée lui paraissait absurde. Si Vanille était réellement derrière cette chasse, de vulgaires branchages ne l’empêcheraient pas de la débusquer. Alors qu’elle s’apprêtait à sortir dans un soupir, des bruits de pas résonnèrent et Nausicaa se figea dans une expression de chouette effrayée. Elle ne vit rien, rien si ce n’est la tunique blanche. La Sirène, partagée entre mille et une émotions contraires, ne se perdit pas en longs débats intérieurs quant à la marche à suivre. Elle ne comptait que sur l’effet de surprise. Les lèvres pincées, elle se jeta en avant pour attraper la cheville de cet étranger qui voulait la tuer. Il protesta mais elle lui sauta dessus pour l’immobiliser au possible. Il était bien plus fort qu’elle, avec des bras musclés et un torse que l’on sentait dessiné et prononcé sous la chemise. Dans quelques secondes, il la renverserait et la tuerait et Nausicaa le savait. Encore une fois, elle ne s’attarda pas à réfléchir et s’empara d’une pierre de taille moyenne, qu’elle empoigna à deux mains. Elle frappa le visage de l’homme avec. Encore. Encore et encore. Toujours plus. Plus que de raison. Plus que nécessaire. Il avait arrêté de bouger après le quatrième ou cinquième coup. Pourtant, Nausicaa continuait à le frapper, quoique de manière moins précipitée à mesure qu’elle se reprenait. Elle lâcha son arme improvisée, qui retomba lourdement sur le bras de l’individu dont elle avait fracassé le crâne. Lèvres tremblantes, regard effrayé, elle contemplait son œuvre avec effroi. Comment avait-elle pu faire ça ? Elle se laissa basculer en arrière, rampant pour s’éloigner de la dépouille. Les yeux humides de ce qu’elle avait été capable de faire, elle s’enfuit à toute allure, pour s’arrêter aussi vite. Elle n’arrivait plus à courir, le souffle lui manquait. Dans un grognement sourd, elle se laissa glisser le long d’un arbre, tête entre les mains. Elle avait tellement maigrie. Elle n’était plus qu’une brindille, que le prochain coup casserait en deux.

Nausicaa resta cachée plusieurs heures, recroquevillée dans un terrier où elle se faisait petite et muette pour survivre. Ceux qui étaient ici avaient sûrement abandonné toute espérance. La Sirène songeait à ce qu’elle avait traversé au cours de sa longue vie. Vanille lui avait fait tant de mal. Pendant des siècles, elle avait été prisonnière des glaces, à patienter pour qu’on vienne la délivrer, ressentant l’ennui, le froid. Elle était sortie faible et démente de cette expérience. Aujourd’hui, elle s’était relevée. Elle n’accepterait de mourir que des mains de cette femme, dans un combat où seule l’une pourrait s’en sortir. Déterminée bien que la silhouette entière frémissante, Nausicaa s’extirpa de son refuge. Elle ferait tout pour sortir en vie de cette épreuve. Tout. Elle était prête à devenir chasseuse, à devenir meurtrière, pourvue de racheter ses fautes. Une femme lui bondit dessus avec rage. L’Ondine ne l’avait même pas vu. Poignard à la main, elle planta sa lame dans l’épaule de sa proie, qui se sentait partir, prête à sombrer dans l’inconscience. Dans un dernier élan de combativité, elle lui prit la tête pour l’envoyer contre du bois, avant d’agripper ses vêtements et l’étrangler. Elle desserra rapidement son emprise. Elle ne voulait pas la tuer, pas comme l’autre. De toute manière, elle n’y arriverait plus. Doucement, ses paupières se fermèrent. La femme se réveillerai avant elle, et la tuerai. Ce n’était pas comme ça qu’elle voulait en finir. Seulement, son destin ne lui appartenait plus.

Surprise, Nausicaa rouvrit les yeux lorsqu’elle sentit une vague de chaleur sur son visage. Le soleil. Il était magnifique, plus que jamais.

1684 mots
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Invité

avatar
Dim 29 Nov 2015, 22:55


Du bout des doigts, j’émiettai les restes informes d’un pain à la mie rassie que l’on m’avait jeté aux pieds plus tôt dans la journée. Les bouches affamées trouvaient de la saveur dans les morceaux les plus ignobles des repas, même couverts de boue et à la fraîcheur douteuse. Malgré la faim, je me forçais à la mesure, conscient que l’on ne m’accorderait que peu de nourriture et que la moindre bouchée était précieuse. Je glissai le crouton dans l’unique poche viable de mon pantalon à la toile ensanglantée et déchirée. Dans un soupir, je fis tomber ma tête entre mes genoux, laissant mon corps, qui me paraissait être un vaste champ de ruine, se reposer pendant ces quelques secondes de répit. L’obscurité éternelle de ce camp de travail signait l’apogée des tortures, même pour un oiseau de nuit comme moi. Les lueurs de l’astre roi me manquaient et j’en venais à rêver de m’endormir sous un saule en pleine après-midi. Le fouet claqua sur mes bras croisés et le bout de la lanière griffa ma joue. Le temps des rêveries mourrait, sa place cédée aux longues heures de bagne où je tirai des chargements pour le bon plaisir d’un dément à l’identité brumeuse. Torse et pieds nus, je ne possédais plus que des lambeaux en guise de vêtements. Les cordes écorchaient un peu plus mes épaules à chaque pas, et les lames continuaient à me lacérer le dos à un rythme aussi régulier qu’enragé. Je sentais mes jambes ployer et fléchir sous les assauts du cuir et du fer, frémissantes de fatigue et prêtes à capituler au premier signe d’abandon. Je savais que j’avais une sale mine. J’imaginais sans mal mes yeux cernés, mon visage déformé par les plaies et mes cheveux sales. Les apparences m’importaient peu mais je me surprenais à penser que même en un siècle de vagabondage, je n’avais jamais fini dans un état aussi lamentable. Si mon enveloppe charnelle peinait à supporter les affronts, mon âme titubante tâchait de rester forte. Les doutes et les incertitudes annihilaient les psychés les plus fragiles, voraces de réponses, et venaient même à bout des plus forts qui voulaient comprendre. J’étais le Sin Luxinreïs. Mon quotidien était de savoir et les surprises étaient rares tant je devais déployer mes forces pour m’empêcher de voir ce que je ne désirais pas connaître. L’ignorance ne m’anéantissait pas. Au contraire, elle suscitait ma détermination et ma combattivité. Sans magie, sans étoile, je n’étais plus un Rehla, plus un Roi frôlant l’omniscience. J’étais juste un homme normal et un peu détraqué qui se mettait à rire sans raison apparente entre deux coups de fouet.

Allongé dans la boue, les yeux rivés sur le ciel noir, j’admirai le néant. En réalité, je ne me sentais pas le cœur de faire quoique ce soit d’autre. Mon esprit avait beau se parer de pugnacité, de résistance et d’entêtement, mon corps ne pouvait guère suivre ce mordant. J’avais chuté sous le coup de trop, pour ne pas me relever. J’avais simplement envie de dormir. Malheureusement, une femme était venue m’informer de la suite des évènements. Si je peinais à croire en la totalité de son discours, des vérités se glissaient malgré tout dans ses mots. On allait me traquer. Dans un long souffle et une moue amère, je me relevais pour courir.

Artiste jusqu’au bout des ongles et membre d’un peuple éminemment pacifiste, le moins que je pouvais avouer était bien que je n’étais pas un grand sportif. Je me débrouillais assez bien avec une épée mais personne, si ce n’est les poursuivants, n’aurait le privilège d’être armé. Ma carrure était trompeuse. Grand et musclé, plutôt imposant, on m’imaginait grand guerrier. Seulement, ce n’était que de la poudre aux yeux. Si je n’avais pas à pâlir de ma puissance, j’étais loin d’être d’une force impressionnante. Surtout, je détestais courir. D’un pas maladroit, je me faufilais avec plus ou moins d’aisance à travers la jungle étouffante et ses friches. J’avançais autant que possible, sans me préoccuper des ronces qui entaillaient ma peau. Comment allais-je m’en sortir ? A vrai dire, je n’en avais pas la moindre idée. J’improvisais au fur et à mesure. Une espèce de boomerang en métal frôla mes cheveux – de toute manière ils étaient trop longs, autant relativiser – pour aller se planter dans un tronc devant moi. « Il est là. » J’accélérais le pas, même si mes pieds protestaient ardemment contre l’effort. Au moins l’un de mes cinq chasseurs était à mes trousses. Je n’avais pas vraiment envie de faire sa connaissance. Non pas que je remette en cause sa sympathie, mais j’étais partisan de l’égalité dans les rencontres et n’accepterai un face à face que si, moi aussi, j’avais la possibilité de le décapiter en cas de conflit. L’équilibre des menaces, en somme. A cette fin, j’arrachais le boomerang de l’écorce. En réalité, je ne comptais pas m’en servir mais posséder cette lame avait quelque chose de rassurant. A force de sarcasme interne, j’en venais à oublier de scruter le terrain et je glissai lamentablement sur une fougère couchée. Un homme se jeta sur moi. Sans le moindre scrupule, je le repoussais d’un coup de pieds dans le ventre, avant de me redresser pour lui sauter à la gorge. Je n’étais pas du genre bagarreur et ne savais pas vraiment comment réagir. L’instinct prit le dessus et je glissais mon bras à son cou avant de serrer, serrer et serrer, jusqu’à ce qu’il ne bouge plus. En toussotant – l’autre s’était débattu et m’avait assené son coude dans les côtes – je m’écartais de l’inconscient en rampant. Je n’aimais pas ce comportement que je devais adopter pour survivre. Seulement, je n’étais pas décidé à mourir. Je ne l’étais plus.

Mes blessures pansées grâce aux morceaux de tissu blanc que j’avais emprunté à l’homme que j’avais étouffé, je me sentais comme repeint d’une nouvelle jeunesse et prêt à courir toujours plus loin, toujours plus vite, toujours plus malhabilement. Certains de mes pansements de fortune avaient été mal faits, dans la précipitation, et m’empêchaient une liberté de mouvement optimal que mes contusions et meurtrissures réduisaient déjà considérablement. Le temps étant une ressource au moins aussi importante que le sang, je faisais en sorte de ne pas le gaspiller ; d’autant que des frémissements dans les herbes grasses m’incitaient à croire que je n’étais pas seul. Ils n’étaient pas très loin. Furtivement et sans ralentir, je m’autorisais un coup d’œil derrière moi. Grossière erreur. Je fus pris à revers. Une femme particulièrement hargneuse et à la poigne étonnement ferme m’agrippa pour me plaquer contre un tronc, un couteau sous le menton. Je partais du principe que toutes les femmes étaient belles mais celle-ci avait un faciès pour le moins intéressant. Néanmoins, je n’avais pas envie de lui faire du mal, pour des raisons totalement banales d’éducation stricte. Le fait était qu’elle comptait me faire la peau et que je préférais mon épiderme sur ma chair. Avec une pointe de remord dans les yeux, je lui enfonçais le boomerang dans les hanches, assez pour la faire reculer mais en prenant garde de ne pas lui infliger de coup mortel. Dans un cri, elle s’écarta dans de petits bonds. Après avoir craché un peu de sang dans mes mains, j’attrapai la tête de la femme pour l’assommer contre un arbre. Je dus m’y prendre à deux reprises – tenace la petite – mais elle finit par s’effondrer. Je m’accroupis près d’elle, le temps d’essuyer la sueur de mon front et de reprendre un peu mon souffle. Ma vision se troublait. Garder mes yeux ouverts n’était pas une mince affaire. Perdu dans mes marmonnements, je calmais mon corps tremblant qui hurlait au répit, sans que je puisse lui accorder. Puis une flèche se planta entre mes omoplates. Sans chercher à comprendre, je me jetais en avant pour fuir l’éventuelle suite des attaques. Dommage que mon échappatoire soit une pente glissante et boueuse que je dévalais dans un charmant roulé-boulé qui enfonça davantage le carreau dans ma peau avant que le bâton se brise, et que j’achève ma course entre plusieurs roches. Toujours dans l’optique de tempérer mes maux, je m’apaisais dans l’idée que j’avais connu pire. Un craquement insoutenable à mes tendres oreilles vient me soutenir le contraire.

Je devais me rendre à l’évidence : l’épaule était déboitée et le poignet du même bras, cassé. Le plus lentement possible, je respirai pour calmer les tremblements de mes membres. Il ne me restait plus qu’une main pour me défendre et ce n’était pas celle avec laquelle j’étais le plus à l’aise. Le plus précautionneux possible, je me redressai pour m’appuyer contre une grosse pierre. Je tenais à peine en place. C’était trop douloureux. Mon corps n’en pouvait plus, et mon âme commençait à se fatiguer, lasse de ces tortures. J’étais incapable de bouger ou de me défendre. Des éclats de voix me parvenaient, de façon encore lointaine mais de plus en plus proche. Ils étaient toujours à ma recherche. Après avoir brièvement réfléchi, je choisis de m’allonger pour me couvrir péniblement de feuilles mortes et d’herbes. C’était une vulgaire cachette, rustique et élémentaire, mais je n’arriverai plus à faire un pas. J’avais besoin de repos. Dans un petit bâillement, je fermais mes paupières. Un pas. Ils approchaient. Une voix. Ils avaient trouvé mes traces. Un rire. Ils avaient compris. Un rayon de soleil. J’avais gagné.  

1600 mots
Revenir en haut Aller en bas
Eerah
Æther des Bergers et des Wëltpuffs

Æther des Bergers et des Wëltpuffs
◈ Parchemins usagés : 3537
◈ YinYanisé(e) le : 20/07/2013
Eerah
Dim 29 Nov 2015, 23:05

« Sans rire, je vais vous taper. ». Il avait la bouche pâteuse et les yeux fatigués, mais Eerah se sentait encore assez de force pour dérouiller ceux qui le maintenaient enfermé dans une cage d’habitude réservée à un quelconque canidé, si l’on en croyait les déjections qui tapissaient le tapis de paille au sol. Personne pour lui répondre ou relever la provocation. Il insulta plus copieusement les deux gardes devant sa prison, puisant dans son lexique Réprouvé, le plus fleuri lorsqu’il s’agissait d’adresser ses sentiments respectueux à la génitrice de quelqu’un. Le Déchu n’avait aucune idée de ce qu’il faisait là ; la dernière chose dont il se souvenait était d’avoir bu un peu trop en compagnie d’Erza. Mais plus que ça ; il se sentait sens dessus-dessous, sans parvenir à mettre le doigt sur ce qui lui posait problème – en dehors du fait d’avoir été kidnappé, bien sûr. Rapidement, il comprit : il voyait sans problème, sa cécité avait disparu. Certes, ce n’était pas la première fois, mais c’était toujours un choc. Il essaya de contrôler lui-même le lien magique qui liait ses pupilles à son esprit, mais s’arrêta bien vite, en constatant qu’il avait également été dépossédé de sa magie. Il jura une fois de plus, et s’étrangla. Sa voix. Il n’avait pas la même voix. Il baissa les yeux, et se retrouva soudainement face à un décolleté plongeant qui le fit tiquer quelques secondes. Lentement, Eerah monta la main à cette nouvelle poitrine, et la pétrit d’une main inquiète et curieuse. Non, c’était bien à lui. Pire que ça, il reconnaissait la forme et la texture de cette poitrine. Elle appartenait à une Réprouvée qu’il connaissait bien, et qui, aux dernières nouvelles, se trouvait à Bouton d’Or, surement à récupérer d’une murge monumentale. « Eh. ». C’était sa voix aussi. Sans autre forme de procès, le Déchu désincarné commença à se palper çà et là, vérifiant par la même occasion qu’il n’avait pas… Que le corps d’Erza n’avait pas été blessé. Puisque personne ne semblait vouloir lui parler et qu’il ne savait pas encore combien de temps il allait rester prostré dans cette cage, il se dégagea un coin de plancher propre, et alla s’y asseoir. Il portait les mêmes vêtements que la Réprouvée la dernière fois qu’il l’avait vu, c’est donc qu’il avait bel et bien été enlevé à ce moment-là. Et puisqu’il n’avait pas l’impression de partager le corps avec une quelconque entité, c’était qu’Erza, elle, devait se trouver dans un corps disponible… Un corps abandonné par son propriétaire, à proximité. Il ne mit pas longtemps à faire le rapprochement. Après une courte pensée pour la jeune femme qui allait bientôt comprendre la vie d’un aveugle, il croisa les bras, et commença à réfléchir. Pourtant peu importe la position qu’il adoptait, il ne parvenait pas à méditer ; quelque chose le faisait se sentir tendu, inconfortable. En grimaçant, il localisa la source de son trouble. Après un coup d’œil et un haussement de sourcil, il se redressa et s’apprêta à se déshabiller. C’était surement culturel, mais les culottes comme celle que portait la Réprouvée, avec une sorte de ficelle, n’étaient vraiment pas confortables. Il s’assura que les gardes n’avaient pas envie de tourner la tête, et l’ôta rapidement, pour remettre son pantalon. Lorsqu’il eut la pièce de lingerie en main, de nombreuses idées moins avouables les unes que les autres lui vinrent à l’esprit, et le fait de posséder un corps féminin pour la première fois n’aidait en rien. Il se promit de mettre à l’essai plusieurs de ses théories une fois qu’il disposerait d’un endroit plus propre. En outre, après un coup d’œil lancé à la culotte, il songea à un plan qu’il n’aurait probablement jamais pu envisager autrement.

« Hum hum ! ». Toujours aucun mouvement de la part des gardes. Il fronça les sourcils, et après un instant, vocalisa le gémissement le plus excitant qu’il puisse produire avec sa nouvelle voix. Cette fois, il distingua nettement les épaules des deux hommes tressauter. L’un des deux se retourna, pour découvrir la Réprouvée penchée contre les barreaux, sa chemise ouverte sur une poitrine plus qu’honorable, jouant négligemment avec ses sous-vêtements fraichement arrachés. « Puisque vous ne voulez pas me laisser sortir, et qu’on risque d’être ici un moment, vous ne voulez pas vous amuser un peu ? ». L’intéressé ouvrit de grands yeux, et murmura quelque chose à son compère, qui jeta également un œil, en lâchant un hoquet mal contenu. Ils se disputèrent ensuite à voix basse, pendant quelques secondes, mais furent interrompus par Eerah qui, profitant encore une fois de ses charmes récemment acquis, poussa un soupir doucereux, en faisant glisser l’une de ses mains le long de la cuisse de la Réprouvée. La discussion à voix basse reprit quelques instants, mais ils semblaient désormais tombés d’accords. Après avoir jeté un œil à l’extérieur, ils s’approchèrent tous deux de la cage avec un sourire équivoque. Eerah recula en souriant également, avec un petit geste de la main les invitant à entrer, ce qu’ils firent sans plus attendre. Le premier avança pour embrasser la bouche d’Erza, et Eerah fit mine de se pencher en avant. L’instant d’après, l’un des gardes gisait au sol, le nez en sang, et d’un revers puissant, le Déchu assomma l’autre garde. Il resta un instant figé, fasciné par la force qui habitait le corps de la Réprouvée. Les deux hommes n’étaient pas prêts de se relever, et lui n’était pas essoufflé, c’était à peine si le dos de sa main le chatouillait après avoir brisé plusieurs molaires. Sans attendre, il attrapa la hache de l’un des gardes, sentant d’instinct que le corps de la jeune femme était habitué à ce genre d’instrument. Bon sang, qu’il commençait à aimer ce corps, d’avantage encore que lorsqu’Erza l’habitait. En quelques foulées, il fut à la sortie du bâtiment, et fracassa la porte d’un coup de pied.

La lumière extérieure l’aveugla un instant, et il porta son bras devant ses yeux. La lueur ne provenait pas du soleil ; le ciel était noir, lourd et chargé d’éclairs. Mais au centre de ce qui semblait être un camp, un immense feu magique, bleu électrique, projetait des ombres acérées contre les murs. Une vingtaine de soldats en armures sombre le toisèrent un instant, avant de se jeter sur lui dans un mugissement assourdissant. Comme s’il ne parvenait pas à se contrôler, il répondit en jurant en Zul’Dov, et se prépara à en cueillir avec le fil de sa hache. Le Dædalus n’aurait jamais agi de la sorte. Il aurait pu observer, et trouver un moyen de se débarrasser de ses assaillants sans verser une goutte de sueur. Mais le corps rompu à l’exercice militaire de la Réprouvée s’y refusait. Son enveloppe charnelle de combattante voulait en découdre, et il ne pouvait rien contre ça. Il n’eut même pas le temps d’en saisir un. Une onde de choc le balaya et l’envoya s’écraser contre un mur. Les lumières dansèrent, et il n’eut que le temps de sentir de larges mains le saisir avant que son nouveau corps ne s’évanouisse.

Les jours qui suivirent furent brouillés et embrumés par la douleur, le bruit et la fatigue. Le lendemain, on vint le chercher dans sa cage pour lui mettre devant une charrue à bœufs. Il essaya à de nombreuses reprises de mordre ses kidnappeurs, sans succès. Chaque nouvelle tentative lui valait une nouvelle volée de coups, et il finit par arrêter, plus par respect pour le corps d’Erza que par vraie lassitude. On le força à servir de bête d’attelage, à tracter des chariots remplis de pierres d’un endroit à un autre, sans raison apparente. Là où son ancien corps aurait succombé de fatigue dès la première semaine, celui de la Réprouvée tenait le coup sans frémir. Mais chaque nouveau jour le laissait un peu plus faible que le précédent. Passé quelques semaines, ses muscles continuaient de trembler même dans son sommeil. Il n’arrivait plus à se lever sans crier de frustration, et s’était même contraint à arrêter ses séances nocturnes de découverte du corps féminin pour profiter de chaque seconde de sommeil qui lui était offerte. Après deux mois, il ne se passait plus un jour sans qu’il ne s’effondre dans la boue, et qu’on ne l’en extraie à coup de fouets. Tout ce qui franchissait la barrière de sa conscience était comme passé au filtre. Le matin, on le trainait jusqu’à son chariot, et dès lors, il se focalisait sur les rails, ne pensait plus à rien d’autre. Une occasion finirait par se présenter. Il était prêt à tout ; mais une semaine de plus dans le camp, et il ne donnait pas cher ni de son nouveau corps, ni de son esprit.

Un matin, alors qu’il dormait, recroquevillé dans un coin de sa cage, quelqu’un vint frapper les barreaux avec une matraque. Il se réveilla en sursaut, et se tassa un peu plus, prêt à bondir et frapper. Il approchait de la fin, et hors de question de se rendre. Son état mental avait atteint un tel seuil de fatigue qu’il s’était synchronisé avec les envies d’en découdre de son corps d’emprunt. Ce n’était pas un garde qui l’observait, goguenard, mais une femme de haute stature. Il eut envie de saisir son cou et de le briser d’une pression de la paume. Eerah la considéra un instant, grava son visage dans sa mémoire. Il avait d’ores et déjà que cette personne allait mourir, il se sentit presque désolé pour elle. Elle lui exposa sa proposition, et de temps en temps, le Déchu ponctuait ses phrases d’une insulte. Cela pouvait concerner son apparence générale, la façon qu’il aurait de s’occuper de chaque membre de sa famille, ou le panel de choses contendantes qu’il envisageait de lui insérer de diverses façons dans le corps ; d’une manière ou d’une autre, user d’autant de synonymes le requinqua, lui rappelant que si son corps le faisait souffrir le martyr, il était toujours capable de penser. Quand elle eut terminé son laïus, il accepta, et lui cracha au visage, répliquant le sourire carnassier qui ne semblait pas vouloir quitter son visage de porcelaine. Un visage qu’il envisageait de détruire de plus en plus férocement. Le jour suivant, on le conduisit à la lisière de la forêt. Comme promis, on lui donna un peu d’avance, et il s’élança sans attendre. Pas un seul instant il ne se considéra comme une proie. Il était le chasseur, et on venait de lui donner cinq belles prises qu’il entendait bien réduire au silence. Après une centaine de mètres, il s’assura que personne ne pouvais encore l’apercevoir, et creusa un trou à la base d’un grand feuillu. C’était exigu, c’était sale, mais pas autant que la cage dans laquelle il avait vécu pendant plus de deux mois. Le Déchu attendit, patiemment, en mâchonnant une racine. Bientôt, il entendit un bruit de pas s’approcher, et le dépasser. Leste, il sortit de sa tanière et sauta sur sa cible. Le corps d’Erza possédait des réflexes meurtriers qui ne demandaient qu’à être utilisés. Il tira sur l’épaule du garde, et frappa d’un coup sec son menton. La nuque se brisa dans un claquement sec. Loin devant, un cri se fit entendre. Eerah attrapa la lance que l’infortuné avait laissé tomber, et patienta. Quand enfin il eut un visuel, il banda son bras et s’apprêta à lancer. Mais le camp avait fait son œuvre, et la douleur éclata au niveau de son biceps. Il jura à voix basse en laissant tomber l’arme à nouveau. Devant, deux soldats approchaient, ne semblant pas l’avoir encore vu. Ses pieds nus ne firent pas de bruit dans la terre humide, et il alla se poster derrière un tronc d’arbre. Lorsque les deux hommes furent proches, il sortit brusquement, se servant de son poing comme d’une massue, et assomma le premier. Le second fut prompt à réagir, et fendit en avant, traçant une longue estafilade le long du bras de la Réprouvée. Le Roi désincarné lui sauta dessus, et s’assit sur son torse, avant de frapper sa gorge à plusieurs reprises, jusqu’à ce qu’il ne reste plus de sa trachée qu’une masse sanglante. Il tua le premier encore évanoui en lui passant la lame à travers le cœur. Puis il chercha une souche et s’assit. Il en restait deux, et il comptait bien leur donner un aperçu de ce qui les attendait. Les corps meurtris de leurs camarades étendus au sol à ses pieds, il avait l’aura et l’apparence d’une reine sauvage attendant sa prochaine proie. Celles-ci ne tardèrent pas à venir. Après un regard aux cadavres de leurs compères, ils s’accordèrent bien vite pour lui bondir dessus à deux.

Bien plus tard, le Déchu dans le corps de la Réprouvée observait le soleil se lever. Pendant deux jours, il avait vaincu le froid en superposant les vêtements de ses victimes, et triomphé de la faim en se nourrissant de champignons divers, et en chassant les charognards qui s’intéressaient de trop près aux cadavres de ses poursuivants. Le pire dans tout ça, c’est qu’Erza allait surement trouver le moyen de se plaindre de l’état de son corps. Jamais contente, de toute façon.

1800 mots


[CDN 2015] Force - Des moins que rien GqzDWY

Revenir en haut Aller en bas
http://yinandyangpower.forumactif.com/t34621-eerah-von-dreth
Adam Pendragon
~ Déchu ~ Niveau V ~

~ Déchu ~ Niveau V ~
◈ Parchemins usagés : 1017
◈ YinYanisé(e) le : 13/01/2015
Adam Pendragon
Lun 30 Nov 2015, 23:39

    Je hurlais à la mort parce qu'il n'y avait que cela à faire. Meurtri dans ma chair, je ne comprenais toujours rien. Je m'étais réveillé dans un camp de travail, le corps dans la boue, une corde dans les mains. Tout me semblait être flou et demain me semblait incertain. Que faisais-je ici ? Était-ce un cauchemar ? Depuis quand étais-je là ? Le fouet acheva de me réveiller et de me rappeler ma terrible condition. La veille, j'étais déjà là, à tirer ces énormes charges jusqu'à épuisement. Je ne voyais rien, je ne faisais que ressentir la présence des autres. Ma gorge souffrait affreusement et ma voix n'était qu'un lointain souvenir. Si je hurlais, le son produit était très loin de ressembler à celui d'un homme fort et vaillant. J'étais tellement épuisé. J'avais tout essayé, me débattre, parler calmement, crier, tenter la persuasion, mais rien n'avait fonctionné.

    Adam : « Je suis professeur à Basphel ! Si vous pensez vous en sortir comme ça, vous vous trompez largement. ».

    J'avais commencé par l'indignation, prétextant être quelqu'un d'important. Je parlais tantôt de ma profession, tantôt de ma famille, tantôt des services que j'avais déjà rendu aux Déchus et qui me procureraient les faveurs de mon roi ! Je trouvais que j'avais l'air convainquant mais mon interlocuteur supposé, lui, ne répondis jamais à mes délires. Des hommes tout en noir tournaient parfois autour de moi, abattant leur cravache sans un mot, comme pour me pousser à continuer le travail.

    Adam : « Relâchez moi ! Vous n'avez pas le droit ! Pourritures ! Je vais vous faire la peau ! Venez là si vous l'osez ! Bande de chacals ! Je vais vous arracher la peau, vous écorcher vifs vous m'entendez ! ».

    La rage avait finis par me gagner et je devenais fou. Je les aurai tué s'ils m'avaient laissé les approcher. Mon cœur menaçait d'exploser dans ma poitrine et j'aurai sans doute finis par leur arracher les yeux s'ils n'étaient pas bien plus puissants que moi. Je serai mort pour en détruire un ou deux tellement je trouvais la situation injuste et incompréhensible. Les larme de rage s'étaient mêlées à mes paroles et j'aurai refait le monde à mon image sans aucune hésitation. La révolte qui grouillait dans mes veines étaient destructrices, punitives et elle me donna la force de traîner mes lourdes charges plusieurs jours, mon esprit cherchant la moindre occasion pour sauter à la gorge de mes bourreaux.

    Puis vint le désespoir le plus total et je me mis à supplier mes tortionnaires comme un petit garçon qui aurait fait une bêtise et qui voudrait se racheter.

    Adam : « S'il vous plaît... Je ferai tout ce que vous voudrez mais laissez moi partir... Venez au moins me dire ce que je fais là... Je ne suis peut-être pas celui que vous cherchez... Je vous donnerai ce que vous voudrez... je vous en prie. ».

    Je n'avais plus aucun amour propre. Au début, je n'avais pas souhaité boire ou manger mais, à présent, je sautais sur toute sorte de nourriture comme un chien affamé. Je me fichais de ce qu'il y avait dedans et j'aurai pu boire de la pisse sans m'en apercevoir. Ils auraient pu m'empoisonner des dizaine de fois. J'étais tel un animal à l'article de la mort et comme je n'avais eu aucune réponse, je finis par me dire que si je faisais tout ce qu'ils voulaient, alors ils me relâcheraient. Je m'épuisais totalement à la tâche et le pire de tout, c'était le manque. Mon péché ne voulait pas me laisser et les envies diverses et variées venaient toujours me hanter. J'en étais presque à supplier mes bourreaux de se servir de moi comme prostitué au lieu de me faire travailler jour et nuit. Il n'y avait d'ailleurs pas de journée, il faisait tout le temps noir mais j'essayais de garder une notion du temps, fusse-t-elle infime. Au début j'arrivais à trouver le temps de me faire plaisir mais après quelques jours, je ne pouvais plus. Je ne faisais que tomber inconscient, délirer, travailler. L'épuisement était bel et bien là et je ne savais pas quand tout ceci s'arrêterait.

    Quand une silhouette féminine apparut, je ne pensais qu'à ça, la culbuter dans un coin de manière si violente qu'elle s'en rappellerait toute sa vie. L'on m'avait poussé à bout, j'avais tenu sans rien faire durant des jours : aucune caresse, aucun acte, rien... Je l'aurai violé dans l'état où je me trouvais, rien que pour assouvir cette pulsion malsaine qui me rongeait de l'intérieur. Mais j'étais trop faible et trop abruti par la situation. Son discours me troubla encore plus que ça simple présence et quand elle se mit à me parler de mes ennemis, je me mis à faire le tour de toutes mes conquêtes passées que j'aurai pu potentiellement faire souffrir. Je n'avais pas la moindre idée de qui pouvait me vouloir autant de mal, surtout que la plupart des femmes avec qui je prenais du bon temps étaient des prostituées. Peut-être cette étudiante... Caelys ? On l'a disait lié à la reine des Ondins. Le baiser que je lui avais donné l'avait peut-être outré ?

    J'arrêtai de penser à la seconde même où je compris que j'avais une chance de m'en sortir mais que, pour ça, il allait falloir que je cours et que je me défende. Je n'étais pas un guerrier. Je ne m'étais jamais battu de ma vie. Tout ce que je faisais c'était m'adonner aux plaisirs de la chair, essayer d'être un bon professeur et penser de temps en temps à mon Ange. Je me demandais si j'aimais encore cette femme dont je ne me rappelais même plus du visage.

    Clopin-clopant, je me dirigeai vers la forêt, ne sachant comment j'allais m'en sortir. J'avais un peu d'avance mais elle serait vite rattrapée par ceux qui me courraient après. Je devais trouver un plan et une fois à l'abri des feuillages, je me mis à creuser dans la terre. J'allais m'enterrer vivant. Je laisserai un espace pour respirer tout en m'assurant qu'il soit suffisamment petit pour ne pas me faire voir. Je ne pouvais pas lutter, pas dans l'état où j'étais. J'étais trop faible, rien que marcher me demandait un effort considérable. Je commençai à creuser et au fur et à mesure de mon avancée, mes ongles ne furent bientôt plus que de l'histoire ancienne, retournés les uns après les autres par le terrain dur. Mais je parvins à réaliser ce que je voulais, me couchant dans le trou, me recouvrant de terre. Finalement, je ne laissai qu'un interstice pour mon nez, le cachant entre deux grosses pierres.

    J'attendis, de longues minutes, des jours, une éternité. Plus le temps passait, plus il me semblait que je périssais et que les vers avaient déjà commencé à ronger mon corps. Parfois j'avais des absences, parfois je me réveillais douloureusement. J'étais totalement déshydraté et affamé et quand je finis par sentir quelque chose caresser mon nez, j'eus peur que l'on m'ait retrouvé, avant de me rendre compte, après avoir redressé la tête, qu'il s'agissait du soleil. Mes yeux mirent longtemps à s'acclimater mais quand je fus certain de ce qu'il en était, la joie que je ressentis fut immense, si bien que je finis par m'évanouir.

    1216 mots


[CDN 2015] Force - Des moins que rien Ezpg
[CDN 2015] Force - Des moins que rien 1844408732 :
Revenir en haut Aller en bas
http://yinandyangpower.forumactif.com/t34469-adam-pendragon
Invité
Invité

avatar
Mar 01 Déc 2015, 04:14

Il méritait tout ce qui arrivait. Cocain n'était pas dupe, il ne pouvait se battre contre la fatalité. La Justice elle-même semblait l'avoir abandonné en même temps que sa puissance d'antan. Il avait été un Magicien sarcastique et, peu de temps avant d'affronter l'Archimage Sirigon en duel, sa prestance et sa mage étaient telles qu'il aurait pu devenir Ultimage. Il avait fuis une première fois son poste de conseiller de la Reine devant la corruption du conseil, se comportant comme un lâche. Lorsqu'il avait souhaité revenir, il avait aidé Edwina à venir à bout du mal qui avait empoisonné les têtes pensantes de son gouvernement mais, après le meurtre de Sirigon, il n'avait osé revenir. Il était venu à bout de l'homme mais avait perdu sa puissance et son estime de lui. Le fait qu'il soit aujourd'hui ici lui paraissait donc normal, une punition qu'il méritait. Il avait assuré à sa Reine qu'il se tiendrait à ses côtés et, encore une fois, il avait faillis à toutes ses promesses. Il n'était pas un être digne de confiance et il s'était trop souvent dérobé pour que le Destin ne décide de le punir à un moment ou à un autre. Sa Déesse semblait s'être détournée de lui quand il avait tourné le dos à la Reine Blanche et, à présent, il n'était qu'un moins que rien, qu'un déchet qui serait sans doute condamné pour l'éternité à servir des forces sans doute obscure. Il avait trahis ses principes, il était donc normal qu'il récolte ce qu'il avait semé. Conrad Caïn n'avait plus la force qu'il avait eu dans le passé. Il avait abandonné au moment même où il s'était réveillé dans ce camp. Il s'était simplement mis à travailler, acceptant la fatalité comme il acceptait les coups de fouet. Il souffrait, bien entendu, mais il était déjà brisé de l'intérieur depuis tellement longtemps qu'il voyait cela comme le fond du gouffre. Jamais il ne protesta, jamais il ne chercha à se battre contre ses tortionnaires. Il avait cru que se présenter à la Coupe des Nations le rapprocherait de sa Reine, mais il était certain qu'elle avait refusé quoi que ce soit venant de lui. Un homme bien plus méritant que lui devait à l'heure actuelle représenté les couleurs des Magiciens. Il ne méritait pas la moindre considération. Il méritait ce qu'il lui arrivait maintenant. Le peu de muscles qui lui restait de sa force passée disparut comme neige au soleil et, bientôt, il n'eut plus que la peau sur les os. Parfois, il lui arrivait de pleurer, parce que son psychisme craquait ou parce que sa chair meurtrie lui rappelait qu'il était bel et bien vivant. Il n'était plus qu'une faible larve, à peine capable de pousser un chariot rempli de bûches de bois ou autres matériaux. Chaque fois qu'il s'éveillait, pourtant, il retournait travailler, comme si occuper son corps lui procurait la satisfaction du désespoir, celle de pouvoir cesser de penser à son état. Il s'était engagé auprès des Corvus Aeris mais ceux-ci devaient actuellement bien rire de lui, s'ils avaient au moins remarqué son absence. Quelques jours de plus et Cocain commença à être sujet à des hallucinations. Il voyait sa Reine parfois, son regard gris se poser sur lui comme si elle lui reprochait mille forfaits. Il voyait sa Déesse sourire avec malice, comme un moyen de lui faire remarquer ô combien elle s'était trompée en lui confiant l'Okae de la Justice et ô combien elle était heureuse de s'être enfin débarrassée de lui.

Au bord d'un gouffre encore plus profond qu'il ne l'aurait cru, un gouffre dans un gouffre, ce fut la venue d'une femme qui sauva l'esprit de Cocain. Dès qu'elle prononça les premiers mots, le sourcils du Mage Blanc se froncèrent. Elle venait, sans le savoir, de lui redonner un espoir, une chose à laquelle s'accrocher. Ses ennemis l'avaient envoyé dans ce trou ? Il n'avait d'ennemis que les Sorciers et ces derniers en voulaient également à son peuple et à sa Reine. Il sentit une forme de colère lui agripper les tripes. Il pensa un instant qu'Edwina était peut-être ici... Il n'avait aucune idée de ce qu'il s'était passé depuis son départ et cette perspective le mit hors de lui. Il le promettait, si les Sorciers osaient s'en prendre aux siens, toucher un seul cheveux de sa Souveraine, il reviendrait d'entre les morts s'il le fallait pour tous les décimer. Cette pensée n'avait sans doute rien de bénéfique mais elle représentait le vœu d'un homme à qui il ne restait presque plus rien. Il avait été lâche mais il était temps de se racheter. Il sortirait d'ici vivant et il tuerait s'il le fallait.

Il partit donc vers la forêt, en courant. Jusqu'ici il avait sauvegardé ses forces, pas de façon physique parce qu'il avait travaillé, mais son absence de rébellion générale l'avait maintenu dans un état stable. Il n'avait eu aucun espoir en entrant dans le camp. L'étincelle venait juste de s'allumer dans son regard, celle de la détermination. Il ne se cacherait pas, il se battrait, peu importe le prix. Il se remémora ce jour où il avait rencontré l'Ultimage pour la première fois, jeune femme semblant perdue, Reine de rien du tout, paysanne peut-être. C'est ce qu'il avait cru en l'apercevant et, pourtant, elle avait réussi à le sortir de la grotte dans laquelle il vivait en ermite depuis un temps indéfinissable, là où nul autre n'avait réussi. Il ne pouvait pas s'absenter de son côté. Il était fait pour la seconder, l'aider et la protéger. Il avait si lamentablement échoué avec la précédente Reine. Les yeux de Conrad se posèrent sur le sol et il y trouva quelques pierres. Il enleva son haut en charpie et les mit dedans de façon à ce qu'elles ne puissent tomber sur le sol. Il n'aurait jamais la force physique de résister à ceux qui le traquaient et c'était pour cette raison qu'il devait user d'ingéniosité. Curieusement, malgré les moments de pure torture qu'il avait vécu, la pire de toute étant celle qu'il s'infligeait à lui-même, son esprit voyait clair. Peut-être était-ce à cause de la situation, de sa détermination à vaincre ? Il ne se posait aucune question, se contentant de faire. Il acceptait la douleur de son corps mais son instinct de survie la diminuait. Il semblait que son mental se concentrait sur son unique objectif : éliminer ceux qui se mettraient sur son chemin. Conrad s'adossa à un arbre, restant là, silencieux, jusqu'à ce qu'il entende un bruit. Deux hommes en blanc se trouvaient là. L'un avait un arc et l'autre une épée. Cocain s'en fichait, il avait décidé de tenter le tout pour le tout. Il se mit à courir vers eux en hurlant de rage, abattant les pierres sur l'homme à l'arc d'un mouvement de moulinet. Il recommença la même chose avec l'autre alors que le premier gisait sur le sol. Ce fut plus dur et son corps connut de nouvelles marques, de nouvelles blessures. Finalement, le tissu réussit à s'enrouler autour de la lame qu'il récupéra et qu'il abattit aussi fort qu'il le pouvait sur son adversaire.

Les jours passèrent sans qu'il n'en croise de nouveau. L'homme était de plus en plus faible, se nourrissant de plantes et de racines. La zone était particulièrement peu fertile mais il arrivait à trouver des vers de terre et autres insectes qui le substituèrent assez pour qu'il ne tombe pas d'inanition. Le plus important, c'était l'eau et il mit un temps certain à en trouver une source. La marre était crasseuse et un cadavre flottait en son milieu. Il était désolé mais il ne pouvait pas passer à côté d'une telle source de nourriture. Il but comme il put, vomissant plusieurs fois par jour à cause du goût affreux de l'eau et sans doute aussi des aliments que son estomac rejetait par manque d'habitude. Il ne savait qui était la femme qui lui servait de repas mais il était certain qu'elle aurait fait la même chose dans le cas contraire. Cocain trempa ses doigts dans son corps, se recouvrant la peau avec son sang. Il avait côtoyé quelques Chamans pendant un temps et il reproduit les peintures de guerre dont ils lui avaient parlé. Car oui, il était en guerre contre ses tortionnaires. Il avait peur, bien sûr, mais le rituel lui redonna courage. Avec quelques brindilles, il confectionna une petite statuette à l'effigie d'Edwina à laquelle il parlait parfois. Il se passait rien, si bien que le Magicien en devenait presque fou. A force d'être sur la défensive, d'être à l’affût du moindre bruit, à force de ne dormir que d'un œil, il sentait peu à peu s'éveiller en lui des forces qu'il avait cru avoir battu depuis longtemps : celles du mal. Il était si facile de se laisser bercer par de viles pensées, de se laisser convaincre par l'appel de la Magie Noire... Pourtant, le soleil sauva l'esprit de Conrad qui prit conscience qu'il avait mangé une femme presque entièrement, qu'il puait le sang et les organes en putréfaction. Il serra les dents, se répétant pour lui-même qu'il n'avait pas eu le choix.

1525 mots
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas
 

[CDN 2015] Force - Des moins que rien

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

 Sujets similaires

-
» Rien qu'un mentor ... ? [PV]
» [RD - Artefact] Rien ne va
» [Q] La force calme
» Une reine ?! Rien que ça.... (PV Mitsuko)
» [Drejtësi forcë - Zgjodh]
Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Le pouvoir du Yin et du Yang :: Zone RP - Océan :: Continent Devasté - Ouest :: Antre des damnés-