Une ombre glissa jusqu’à la porte d’une Taverne près de l’embouchure du fleuve Varenda dans le réseau d’eau alimentant ce grand village. La forme noire pénétra la bâtisse. Il y avait dans la pièce des reflux de bières blondes d’Aeden. Ophalee se contenta d’arrêter de respirer pendant un laps de temps très court, jusqu’à ce qu’elle puisse changer de pièce. Elle alla à l’arrière de la boutique et salua gaiement le tenancier « Bonsoir Owald, tes oiseaux ne sont pas encore partis j’espère ? Je viens tard te donner une lettre comme convenu. » Ophalee sortit d’une des poches de sa cape sombre une enveloppe lourde. Sachant la condition d’exilée de la bélua, il attendit avant de prendre la petite pochette. La femme sortit d’une autre de ses poches une bourse d’où elle tira quelques pièces usées par le temps. « Cela suffit ? » Il tendit la main et il attendit d’entendre le bruit sonore de la monnaie pour lui demander « Que veux-tu ? » - « Livre cette lettre scellée à Abel Erond. Il est signé de ma plume. Je sais qu’ils ne sont pas à me recherche particulièrement mais je ne veux pas piquer la bête qui sommeille. » Avant de partir, elle ajouta « Ce courrier est précieux Owald. » - « A bientôt, Noire. » Ophalee quitta la Taverne, rejoignant un autre village plus isolé qui longeait la Varenda.
 
La femme prenait des précautions depuis le jour où son corps s’était embrasé. Elle ne souhaitait en aucun cas que cet événement se reproduise en public au risque d’y laisser sa vie. Toutefois, n’ayant pas d’autres contraintes particulières si ce n’est être exilé de Dhitys, la bélua se réservait le droit de contacter des personnes qui dans le passé l’avait soutenu. Bien que son couronnement fut bref et signer dans l’échec, la bélua n’oubliait pas les personnes qui ne lui avait témoigné aucune animosité quand l’Assemblée des Totems avait révélé publiquement la réelle motivation de sa montée sur le trône. L’histoire avait été en partie embellie pour donner au peuple une certitude qui n’en était pas une au final. Ophalee Sombrois avait trahi Phoebe, dans un sens, pour garantir la sécurité précaire d’un peuple en voie de perdition. Kitsune disparue, il avait fallu quelqu’un autre que son cousin pour la remplacer, car celui-ci tyrannique, n’aurait laissé aucune paix même brève au peuple béluaque. Néanmoins, les intentions des coutumes d’antan n’avaient pas été respectées et les anciens partenaires d’Ophalee lui avaient ensuite tourné allégrement le dos pour des raisons qu’ils jugeaient justes. A tort ou à raison, elle en avait payé le prix par le feu.

« A l’attention d’Abel Erond,

Là est sans savoir qu’un fantôme des temps désormais oubliés vous écrit. Ne jetez pas tout de suite la lettre au feu en pensant au canular, loin de moi l’idée de vous offenser puisque je vous écris pour vous demander de l’aide. J’ai besoin de vous en tant que bélua à part entière et non en tant que Fils de Phoebe. Aujourd’hui, je souhaiterai connaître les personnes qui ne m’ont pas lapidé lorsque mon Jugement a été prononcé par l’Ensemble des Totems. Je souhaiterai vous connaître Abel Erond dans la mesure où votre sympathie à mon égard m’a fortement touché et que je n’ai pas eu le temps de vous témoigner mon amitié. Les évènements se sont vite succédés après l’Incendie du Palais Minegys, si vite que la plupart des noms qui m’ont soutenu ne sont plus à l’heure actuelle. Ne craignez pas la mort cher Abel Erond, je sous-entends par-là que mes contacts ont été réduits à cause de mon apostasie. Par-delà cet affront que l’on m’a fait pour décourager quiconque de m’aider, je suis tentée de dire que tout cela fut faux : j’ai prié et aimé Phoebe et ma foi a autant égalé la raison qui m’a poussé à prendre le trône. Je ne tente pas d’excuser les fautes que j’ai pu commettre dans le passé, j’essaie de vous convaincre de m’aider dans l’entreprise que j’entreprends. Une aventure dans la forêt des Murmures, je suis à la recherche d’une Pierre précieuse du nom d’Ambre. Je n’ai cure pour le moment des effets qu’elle a, mais m’a-t-on dit qu’elle me rapprocherait de notre Déesse et m’aiderait à pardonner les Totems des marques corporelles qu’ils m’ont légué avec facilité. Je vous demande dans la mesure où je crois que vos prières sont plus fortes que les miennes, plus fortes qu’aucun autre. Je pense que vous saurez m’aider à voir plus clair dans l’avenir qui m’attend auprès des nôtres.

Bien à vous,

Ophalee Sombrois

P.S ; Si d’aventure vous acceptez et recevez cette lettre avant la demi-lune, je vous donne rendez-vous à l’orée de Drosera.  »

La carriole de la bélua était déjà partie pour les monts d’Edelweiss. Dans une semaine environ, si la monture du véhicule tenait bon jusqu’au passage de l'une des montagne de la chaîne d’Edelweiss, Ophalee arriverait au point de rendez-vous avec un léger avance.


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