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 Vers un nouveau chemin| Event Juillet 2015 – Mission V [Scott]

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Miles Köerta
~ Orisha ~ Niveau III ~

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Miles Köerta
Jeu 09 Juil 2015, 06:48

Vers un nouveau chemin
« Et quand la mer nous transporte au-delà des frontières… »

• À Médigo •

Je gardais la tête baissée, observant d’un œil noir l’horizon de l’autre côté de ma fenêtre. Depuis plusieurs jours déjà que je n’avalais plus rien, que je n’avais glissé mot à qui que ce soit. Scott avait bien tenté, au tout début, d’entamer une conversation en ma compagnie, mais ce qui lui répondait toujours était semblable au néant: rempli de silence et d’indifférence. Me jugeant peut-être trop affligé pour parler ou bien par simple abandon, il décida, après deux jours, qu’il ne s’y risquerait plus. Pourtant, ce n’est pas comme si je ne tenais pas cas de sa présence. Je pouvais le voir lorsqu’il s’arrêtait, hésitant, à l’encadrement de ma porte; je pouvais l’entendre lorsque ses pas s’accéléraient, comme s’il voulait fuir cette ambiance de mort qui planait tout autour de mon être; je pouvais sentir son irritation lorsque je m’entêtais à ne pas manger ce qui nous restait de nourriture. De toute façon, je ne désirais plus rien. Tout m’avait été enlevé, comme ça, d’un claquement de doigt…

Je n’arrêtais pas de penser à cette seconde, cette seconde où j’avais compris, à l’expression de mon ami, que quelque chose n’allait pas. Malgré tout, à cet instant, je n’aurais jamais deviné l’ampleur de l’effondrement qui allait bientôt m’abattre et me peser sur la conscience. Encore aujourd’hui, j’essayais de ne pas m’écrouler sous ce poids gigantesque, mais je sentais, peu à peu, ma résistance s’effriter, ma force me quitter, comme si chaque minute rajoutait un poids de plus… Je n’avais plus de volonté à soutenir cette masse, trop lourde pour que je la dégage. Trop lourde pour que je puisse oublier qu’elle existe. Et par conséquent, je ne pouvais que me rappeler de cet instant où mon monde en entier s’était écroulé, faillant m’emporter avec lui dans sa chute inlassable.

Je n’avais pas cru cela possible, pour commencer, mais plus je tentais de me forcer à le nier, rigolant nerveusement suite à la nouvelle qu’il m’avait annoncé, plus le visage de Scott s’était décomposé, assombrissant ses traits pour ne devenir qu’une figure de gravité. Là, je m’étais arrêté, le dévisageant, écoutant les battements de mon cœur s’accentuer au fond de mes oreilles. L’Élémental ne disait rien, continuant simplement à m’observer. Il n’avait pas plus bougé lorsque je m’étais levé, malgré mes blessures, pour courir à toute vitesse dans la chambre de mon père. J’avais fracassé la porte, ma détresse me privant de mon contrôle de soi, et les émotions s’empilant pêle-mêle dans ma tête pour me bloquer tout raisonnement sain d’esprit. Je m’étais rapidement avancé jusqu’à lui, l’œil brillant, un maigre sourire sur le coin des lèvres, croyant encore – mince espoir – à une blague de très mauvais goût.

« Père, avais-je chuchoté, le rire dans la voix, espérant sincèrement qu’il ne faisait que dormir, comme il en avait l’habitude ces derniers temps. Père, avais-je continué, plaçant ma main sur son épaule frêle pour le secouer doucement. Qouria waliklsh oti Aark iski utrilrak kooslh djiratishi « Qouria, wäliklsh-öti. Aärk ïski ütrilräk, koöslh djïratishï. »
(Père, réveille-toi. Je suis rentré, comme promis.)

Mais il n’y avait rien à faire. Il n’avait rien dit, n’avait même pas remué les yeux. La panique, la colère, le désespoir m’avaient envahi soudainement et j’avais vivement empoigné ses deux épaules, à présent, pour le secouer comme un palmier.

« Père! Père! Père!! », avais-je inlassablement crié, les larmes débordant de mes yeux.

Je m’étais alors mis à hurler son nom, à lui frapper le visage, lui collant des gifles et des gifles et des gifles, dans la vaine tentative de le faire réagir. Mais il avait gardé les yeux fermés, la bouche entrouverte, le visage paisible, serein, d’un homme qui…


Brusquement, j’eus un haut-le-cœur, ma main allant à ma bouche alors que je sentais la bile me remonter dans la gorge. La pression, accentuée par les émotions vives qui se bousculaient en moi, était-elle que je ne pus combattre bien longtemps, et sans précédent, je vomis le peu de consistance qui se trouvait dans mon estomac. Je toussais avec force, à m’en faire exploser la gorge. Le bruit était tonitruant, guttural, terrifiant, et comme si ça n’allait pas déjà suffisamment mal, il fallait que la blessure infligée par cet Élémental de Glace ne vienne y mettre son grain de sel, mon dos me lançant violemment et me tirant une plainte de douleur. Mais cette souffrance n’était rien comparée à celle qui me poignardait l’âme et le cœur. J’avais l’impression qu’on m’avait brisé, déchiré, écrasé sous la semelle d’un Dieu tout-Puissant. Je ne pouvais le tolérer, mon corps en souffrait, mon esprit tout autant; il était sur le point de craquer, définitivement.

Au coin de ma porte, j’aperçus alors un mouvement, qui se glissa agilement dans ma chambre pour se poster à côté de moi. Je n’avais pas besoin de regarder, de jeter un coup d’œil, pour prendre connaissance de la silhouette qui s’était ainsi précipitée. C’était Scott, venu constater les dégâts du mal qui me rongeait, pire que le Kurbus, que les maladies: c’était le désespoir. Celui d’avoir tout perdu, de n’avoir pas vaincu.

« Pourquoi?, pleurais-je, oubliant presque que je venais de vomir sur les draps dans lesquels j’étais enveloppé. Pourquoi il est parti? »

C’était les premiers mots que je prononçais depuis des jours… Mais cette fois-ci, je me mis franchement à brailler, les pleurs sonnant sans répit, les larmes se déversant à torrent. Je n’avais plus le contrôle de mes émotions, ces dernières allant et venant dangereusement, montant et descendant sans trouver de point d’équilibre pour trouver la stabilité parfaite – quelle stabilité? Comment pourrais-je la trouver de nouveau? Je me mis à pleurer, carrément, devant mon meilleur ami, comme un enfant apeuré, terrorisé. De la colère, il y en avait dans ce déchainement, mais plus je pensais à ce moment, plus la peine et le désespoir m’envahissaient, prenant le dessus sur les élans sauvages qui m’agitaient férocement, comme une envie de tout casser sur son passage, de tout détruire de cet Univers alors que le mien venait d’éclater en mille éclats.

« C’est ma faute! Bordel! Tout est de ma faute! J’ai échoué! Je n’ai pas pu le sauver! », hurlais-je à m’en déchirer les cordes vocales.

Mon corps tremblait sous l’assaut de la détresse, de la panique explosive, tandis que mon regard s’embrouillait à cause des larmes, tandis que mon crâne me faisait mal à cause du déferlement.

« J’me sens malade… »

Et je vomis une seconde fois.

1 059 mots



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Sam 11 Juil 2015, 02:16

…Pourquoi? Lentement, je me dégageai de l’entrée de sa chambre pour y avancer à l’intérieur, le visage neutre, aussi impassible que la mer (quoiqu’aux vues des événements qui démolissaient le Continent, ça devenait une belle piètre comparaison) et pourtant, je n’arrivais pas à ressentir le calme que je désirais bien illustrer, la sérénité que je souhaitais dégager. En dépit de toutes les apparences que je revêtais, de toutes les facettes trompeuses qui se collaient à mes traits, mon sang n’avait jamais autant bouilli – pas depuis le jour de ma transformation et ce n’était pas que des absurdités. Mes veines étaient chauffées à bloc, prêtes à imploser à chaque seconde, mes dents si serrées que je m’étais déchirer la peau de mes lèvres, buvant le liquide au goût de métal sans réellement m’en soucier, mais les moindres détails qui trahissaient ma rage, tels des évidences, continuaient à passer inaperçus aux yeux noyés de larmes de Miles, préoccupé par ses lamentations, ses hurlements de désespoir avant de vomir une deuxième fois sur son lit. Pourquoi? Et il avait osé poser la question sérieusement. Mes doigts, qui me chatouillaient, se réunirent pour former un poing, poing que je songeai à lui coller en pleine figure s’il se répétait encore une fois. Pourquoi? Ce mot se cognait dans mon crâne comme une mauvaise plaisanterie, m’irritant plus que je ne l’étais à présent. L’odeur immonde du vomi me fit grimacer, mais avant de tourner le dos, d’abandonner à cause d’un arôme écœurant qui s’élevait, je me plantai à côté de lui, prenant dans la paume de ma main le verre d’eau déposé à son chevet et lui lançai au visage le liquide translucide pour qu’il se réveille sérieusement – et couvrir les mauvaises odeurs qui manquaient presque de me faire vomir à mon tour. Je fronçai les sourcils, dévisageant la mine qu’il abordait depuis plusieurs journées. Yeux cernés, le visage pâle enduit de larmes séchées et de quelques coulis de morve, il faisait davantage ressortir son côté pathétique, encore plus lorsque je l’observais de loin. Quelle dégradation pour un homme… Ça nourrissait, aussi étrange que ça puisse l’être, une colère plus grande encore au fond de mon esprit en ébullition. Peut-être aurais-je dû le frapper finalement plutôt que de lui jeter de l’eau. Ma satisfaction aurait été mieux étanchée.

« C’est pas comme si nous avons pas essayé de te prévenir. » C’était sans doute les dernières choses qu’il souhaitait entendre, particulièrement en encaissant un ton aussi froid et vénéneux. Cependant, je désirais qu’il ouvre enfin les yeux, qu’il s’aperçoive de l’arnaque sur laquelle il s’était raccroché comme un enfant stupide. « Même si tu croyais en cet espoir, tant qu’il ait existé un jour, il aurait mieux fallu pour toi de te préparer à frapper un mur. » Je marquai une courte pause, notant les larmes qui n’en finissaient plus. « Et solidement en plus ça. » Je me penchai, légèrement, vers lui, de telle sorte qu’il ne puisse pas se détourner de mes yeux au sein desquels une violente vague d’étincelle de Feu éclatait. « Il est parti, acceptes-le. Si tu te donnes la faute, tant pis pour toi, car tu as été le seul à croire à ces histoires débiles de remèdes sorties de la bouche d’un escroc qui t’a eu comme un stupide enfant de quatre ans. " Pourquoi? " Ne me fait pas rire. Tu étais tellement aveuglé que tu n’as même pas pensé une seule seconde qu’à part les imbéciles et manipulateurs, personne n’accepte de s’embarquer dans une cause perdue d’avance sans avoir les certitudes qu’ils puissent réussir. Parfois, l’audace permet d’accomplir des trucs géniaux, mais là, ça ressemblait plus à une mauvaise plaisanterie qu’à de l’espoir de quelqu’un qui veut aider. Le Kurbus ne peut pas être guéri. Si tu l’avais accepté plus tôt, tu aurais évité de souffrir inutilement comme tu le vis présentement. » Je lui hurlais presque dessus, furieux, indifférent à toutes les insultes qui viendraient ensuite.  Qu’il me déteste après ça, je m’en fichais. Qu’il me frappe et je le cognerais à mon tour pour m’avoir interrompu. « Tu n’as été qu’un sale égoïste de croire que personne ne se souciait de l’état de ton père, mais tu étais trop obsédé par ton Magicien de pacotille que tu as cru être le seul à souffrir, sans même te rendre compte que tu étais à deux kilomètres en arrière de tout l’monde. » Je reculai, croisant les bras pour empêcher qu’un coup incontrôlé envenime l’atmosphère des lieux. Déjà que je rencontrais quelques maladresses avec mes paroles… « Alors quoi, ta vie ne tournait pas simplement autour de lui non? Lèves-toi et sors de ton vomi. Quand je te vois comme ça, ça me rend aussi malade. »

Mon amertume avait adopté des dimensions trop personnelles : je m’égarais dans tous les sens, apercevant désormais Miles comme mon propre reflet, comme le jeune garçon du Continent du Matin Calme qui avait vécu une histoire différente, mais à la fois si proche de ce qu’il endure. J’avais l’impression  que je me contentais de me défouler sur lui, par colère qu’il me rappelle ce que je souhaitais si ardument oublier depuis deux ans. À vrai dire, j’étais tétanisé par les souvenirs de cette journée : la femme qui avait essayé de réanimer son père, de l’Orisha qui avait refusé d’ouvrir les yeux, qui avait cessé de respirer, mort. J’avais tout vu, j’avais vécu ces heures interminables, infernales alors qu’il dormait paisiblement dans cette même chambre. J’étais tendu, trop tendu. « La ville est entrain d’évacuer. » Malgré toutes les souffrances qui s’effondraient sur ses épaules, le monde, lui, n’avait jamais arrêté de tourner. Les tremblements de terre gagnaient en puissance et adoptaient une régularité effrayante, les côtes manquaient de se faire inonder, des bêtes marines sauvages attaquaient tout ce qui arrivait à porter de leurs crocs. C’était le chaos, partout où nous étions, partout où nous regardions sur le Continent Dévasté. Je ne pouvais plus retourner en Aeden, détruite par la fureur de la Terre et rester ici s’apparentait désormais à une folie meurtrière. Nous devions partir, c’était un fait. En deuil ou non. « Et ça compte aussi pour nous deux. Des navires vont bientôt quitter le port et je te préviens, c’est non négociable. » J’avais conscience des nombreux risques que prendraient un voyage pareil, sur la même immense étendue d’Eau métamorphosée en tombeau depuis plusieurs jours, mais c’était le seul choix que nous avions. Comme si ça pouvait me plaire de devoir me mouiller au risque de me tuer entre les dents d’un monstre ou me noyer dans les profondeurs de la mer, mais c’était pour notre survie. « J’suis pas venu ici pour que j'te vois crever aussi à ton tour. » , chuchotai-je. « Si tu refuses de venir, je te forcerai. » Le petit tabouret qui se tenait à ma droite serait parfait pour m’y aider, juste au cas où.

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Miles Köerta
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Miles Köerta
Dim 12 Juil 2015, 03:26

Vers un nouveau chemin
« Et quand la mer nous transporte au-delà des frontières… »

Sans comprendre, je me mis à observer mes vêtements complètement détrempés. L’eau s’étendait rapidement au travers de mes draps et de mes bandages, encore enserrés à ma taille et à ma poitrine depuis l’affrontement avec le duo des assassins de Glace. Lentement, je levais la tête vers Scott, lequel je gratifiais d’un regard rempli d’incompréhension.

« Qu’est-ce que tu…

- C’est pas comme si nous n’avions pas essayé de te prévenir », s’exprima brusquement l’Élemental, d’une voix qui me fit frissonner.

À présent que je le regardais bien en face, j’étais en mesure de voir le Feu brûlant qui s’animait fiévreusement au fond de ses pupilles sanguines. Ses dents grinçaient entre elles tellement la pression qu’il exerçait dessus était grande alors que les lignes, habituellement fines de son visage, se déformaient en une immonde grimace d’amertume. J’écarquillais les yeux, confus. Jamais auparavant, je n’avais eu l’occasion de le voir pris d’une colère si intense, et dans mon état actuel, perdu à travers les abysses de mon désespoir, je ne saisissais pas encore la portée de la rage qu’il contenait en lui, mais qu’il n’hésiterait pas à laisser exploser. Je pouvais le voir à sa manière de me toiser, à sa manière de serrer et de desserrer ses poings. Quelque chose l’irritait diablement, et son regard, tourné dans ma direction, inflexible, me donnait une bonne piste sur la cible de tout ce ressentiment. Arborait-il de tels traits de fureur à cause de… moi?

« Même si tu croyais en cet espoir, tant qu’il ait existé un jour, il aurait mieux fallu pour toi de te préparer à frapper un mur », continuait-il de sa voix venimeuse, comme un serpent qui rejetait son poison, continuant de me jeter un regard foudroyant, qui avaient tôt fait de me paralyser dans mon lit.

Contraint à sa fureur, prisonnier de ses iris de feu, je l’écoutais sans l’entendre, sans le comprendre nécessairement, n’apercevant là que le déchainement de la rage qu’il ressentait à mon égard, semblable à la fureur de la Terre qui nous secouait à ce jour. Mes yeux ne pouvaient plus se détacher de cette colère qui déferlait sur moi, que je voyais distinctement à travers ses yeux de fauve. Il poursuivait son discours, sans en démordre, crachant la Vérité avec un grand V sur mon visage noyé par les larmes. L’émotion jaillit alors, sans que je puisse en prendre contrôle, laissant couler à torrent l’eau salé de mes pupilles rougies. Le jeune Élemental ne mâchait pas ses mots, les exprimant de la manière dont il les percevait au plus profond de son esprit, car en cet instant, j’étais la victime d’un Feu violent qui n’avait pas l’air de se terminer prochainement et qui me hurlait, comme alimenté par la furie du Vent.

J’encaissais difficilement les paroles qu’il me portait, chaque phrase rajoutant du poids sur ma conscience, déjà ébranlée par les événements, épuisée par la charge qu’elle tentait de tenir à bout de bras. Je me mettais indéniablement à pleurer comme un enfant, repensant aux histoires qu’Ardwick m’avait contées, à l’espoir qu’il n’avait cessé d’attiser au plus profond de moi tandis que les pires commentaires, les pires doutes, s’insinuaient malicieusement au cœur de mes convictions que je croyais inébranlables. « Ne t’en fais pas, disait-il toujours avec un grand sourire en déposant sa main sur mon épaule, plantant ses yeux dans les miens avec intensité. Nous trouverons une solution. Ton père pourra vivre, fais-moi confiance. » Dans de telle condition, comment je ne pouvais pas le croire? J’observais les lueurs de son regard à toutes les fois où ce dernier croisait le mien et tout ce qu’il me renvoyait en retour, c’était une assurance que je n’aurais jamais pu mettre en doute, une certitude que je ne possédais même pas moi-même en toute franchise. S’il était si convaincu de cette chose, alors pourquoi lui aurais-je tourné le dos? Pourquoi ne lui aurais-je pas fait confiance? D’accord, les traitements ne portaient pas fruit et ni les recherches qu’il avait entreprises, ni les expériences qu’il avait pratiquées n’avaient changé quoi que ce soit au destin tragique de mon père, mais au fond de moi, je me disais qu’il essayait, qu’il se battait, et que pour son acharnement, je ne pouvais faire autrement que lui offrir toute ma reconnaissance.

Dans un sens, Ardwick avait été mon pilier. Au même titre que Père était celui qui avait soutenu mon Univers durant tant d’années.

Et savez-vous ce qui faisait le plus mal? Ce qui faisait saigner mon cœur au point de ne pouvoir cicatriser la blessure? C’est qu’en cette journée funeste où ma vie pris un tournant radical, je venais de perdre les deux soutiens qui gardait cette dernière en équilibre. Père, par sa mort, avait fait effondré l’un de ces piliers; Ardwick, par sa trahison, ses vils mensonges, avait tout simplement fait écrasé mon monde et avec lui, je me laissais chuter à mon tour. Car sur ce point, Scott avait bien raison. J’aurais dû accepter, depuis le début, le fait que le Kurbus ne pouvait être guéri: l’effondrement de mon monde s’en serait vu amoindri. Lentement, je levais mes mains pour les poser à la hauteur de mes yeux. De plus, je n’aurais pas été obligé de me couper de la réalité, perdu dans cet Univers que je m’étais érigé, croyant à tort et à travers que j’étais le seul dans ce monde à pleurer la disparition de mon père. J’ai été naïf, songeais-je. Certes, c’était vrai, mais…

Mais si j’affirmais tous ces arguments, si je lui donnais raison, une pensée impardonnable s’insinuerait dans mon esprit. Et c’est ce qui me troublait depuis le début de cette histoire, depuis le début de cette maladie vorace. C’était ma plus grande peur.

Parce que pour moi, m’accorder au fait que le Kurbus était incurable relevait de la pensée que j’abandonnais Père. Que je le lâchais au bord du gouffre et que je le regardais tomber, dégringoler, dans sa chute vers la mort. Sans avoir eu la force de tenir sa main plus longtemps dans la mienne et d’avoir tout déployé comme puissance pour l’aider à remonter du précipice. Je ne voulais pas qu’il tombe. Je ne voulais pas le lâcher.

Mon corps se mit à trembler avec violence, la tristesse combattant férocement la colère que je sentais monter en moi, de la même manière que les sentiments de Scott faisaient surface dans cette histoire. Il explosait littéralement à présent, vociférant sans répit, sur mon être devenu misérable, pathétique, selon ses propres dires. Je baissais alors les yeux sur le vomi qui tâchait mes draps, mélangé à l’eau que l’Élemental m’avait renversé à la figure, découvrant une comparaison adéquate à ce qu’était mon esprit actuellement: si un dessinateur aurait eu la tâche de tracer au crayon les tourments de mon âme, il l’aurait esquissé exactement comme cette flaque de vomi: flasque, puante, dégoûtante, misérable…

« […] Tu as cru être le seul à souffrir, sans même te rendre compte que tu étais à deux kilomètres en arrière de tout l’monde. »

Je reportais mon regard dans ses yeux, ma mâchoire s’étant contractée entretemps. Si son Feu paraissait indomptable, furieux, les ténèbres qui envahissaient mon regard possédait la même fureur intense qui le faisait vibrer. Mais face à ses arguments, à sa perspicacité, je ne trouvais rien d’autre à dire que ceci:

« Scott, ferme-la. Tu ne comprends pas », murmurais-je dans un chuchotement sinistre, lugubre, sans autre sentiment que l’amertume.

Un silence s’abattit soudainement entre nous. La tension n’en était que plus palpable, sombre, désagréable. La suite, je vous laisse l’imaginer, mais l’ambiance n’en était que plus sinistre entre mon meilleur ami et moi.

••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••

Nous marchions l’un derrière l’autre à travers les routes de Médigo, qui se vidait peu à peu de sa population effrayée. Alors qu’il y a quelques jours, Scott et moi aurions traversé ces chemins côte à côte, il se retrouvait désormais devant et moi, je le suivais comme un cabot des villes. L’air terne, l’expression figée dans une implacable colère froide et une tristesse incommensurable, je ne lâchais pas le dos de l’Élemental du regard, jouant avec agitation sur la lanière en cuir de ma bandoulière magique. Nous étions partis précipitamment, chacun de notre bord préparant les derniers effectifs de notre évacuation immédiate. J'avais rechigné intérieurement, voulant rester dans ma maison, dans mon chez-moi, auprès de Draug, n’ayant que faire des malheurs extérieurs auxquels j’avais pu assisté et qui, à présent, ne me faisaient ni chaud ni froid, mais je ne pouvais jouer le gamin capricieux en ces temps troublés. Ce fut donc, à contrecœur, que j’avais cédé à l’ordre de Scott.

« Essaie un peu pour voir », l’avais-je menacé d’une voix glaciale lorsqu’il m’avait avoué ne pas hésiter à utiliser les grands moyens pour m’embarquer de force dans l’un des navires qui quittaient le continent.

Mais finalement, je n’avais opposé aucune autre résistance que celle-ci, rejetant mes draps, salis par le vomi et l’eau, avant de me frayer un chemin jusqu’à mon garde-robe, vacillant légèrement sur mes jambes. De-là, je m’étais préparé sans lui accorder la moindre attention.

Et encore maintenant, à traverser d’un pas rapide les ruelles de la cité des Orishas, je ne lui en accordais pas, ayant conscience de la puérilité de mon comportement, mais ne pouvant empêcher la colère que je lui nourrissais d’entraver ma raison. Histoire de changer mon mal en patience, je préférais songer à la traversée qui nous attendait. Aux dernières nouvelles, les eaux des mers semblaient être le théâtre de divers agitations et bouleversements. Entre le déchainement de la Terre et des Eaux, il fallait compter dans les dangers qui nous guettaient au cœur de l’Océan, la multitude de monstres qui venaient d’apparaître sur les côtes. Noyées par le soulèvement des mers et la progression toujours plus rapide des monstres marins, ces dernières étaient en proie à de nombreuses tragédies et combats, qui ne s’en finissaient plus. Rester en vie serait un défi de taille pour quelqu’un qui désire, plus que tout, survivre à ces désastres… Pourquoi me regardez ainsi? Mon désir de vivre n’existait plus.

Après plusieurs minutes de marche au sein de la population, nous arrivâmes enfin à destination du port. Je regardais les navires accostés aux quais, les différents capitaines hurlant les ordres à leur équipage. Par groupe de cinquante, les édifices flottants quittaient le port en direction des autres continents, tous nourrissant l’espoir d’arriver à terre. Mais l’espoir, l’espoir, à quoi servait-elle vraiment, excepté détruire le cœur et les convictions des gens?

« Pourquoi fuir des désastres pour d’autres encore plus terribles? Murmurais-je, froid. Je préfère encore mourir dans ma cité, aux côtés de Père, des Orishas, plutôt que de crever dans le ventre de l’une de ces bêtes. »

Je poursuivis, élevant suffisamment la voix, cependant, pour que Scott l’entende cette fois:

« C’est dérisoire. Je ne comprends même pas pourquoi on se donne la peine de faire tout ça. On va tous mourir de toute façon… »


1 829 mots



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Mar 14 Juil 2015, 00:33


Je m’arrêtai soudainement, pivotant lentement la tête vers l’albinos. Malgré la colère qui grimpait abruptement dans mes veines, malgré mes désirs de le frapper – réellement cette fois – mon expression gardait un air neutre et détaché. « Si c’est comme ça que tu vois les choses… » Sans nourrir une seule hésitation, je fis apparaître un couteau contenu dans ma besace magique au creux de la paume de ma droite. Je serrai son manche avec force, jusqu’à en faire blanchir mes doigts crispés contre sa surface solide. Animé par la rage folle, surdimensionnée qui bouillait mon sang par les mots acerbes et lamentables de l’Orisha, j’avais tant de difficulté à ne pas perdre mon sang-froid et accomplir ce que je souhaitais faire depuis trop longtemps, lui offrir ce poing dans la figure qu’il méritait amplement. Aveugle, capricieux, égoïste, Miles agissait comme un sale enfant gâté, mais, contrairement à l’image que je renvoie, couteau à la main et visage tressaillant entre le dégoût et la sérénité, je n’avais pas envie de lui planter moi-même cette lame dans la chair et lui enlever cette vie « dérisoire » selon ses propres termes – du moins, pas encore pour le moment. Un sourire sombre s’esquissa sur les pans de mes lèvres, tandis que je pointais, lentement, l’arme vers lui – vers la position exacte de son cœur derrière ses vêtements sales. Au loin, j’entendais les hurlements des capitaines, tonnant leurs derniers ordres aux matelots qui affluaient sur le pont des navires, prononçant également les  consignes finales pour les embarcations, n’étant plus qu’une question de minute avant le départ de ceux qui souhaitaient quitter l’Enfer  du Continent Dévasté. Je les ignorai entièrement en dépit du temps qui s’écoulait rapidement devant nous, qu’il n’était plus l’heure de traîner ici sur les quais agités par les vagues meurtrières. Cependant, ce que je comptais faire, l’idée qui me trottait dans la tête… ne devrait pas être si long. Ça dépendrait de ses choix, de sa décision. À lui et à lui seul. Uniquement.

« Tu ne devrais pas avoir peur de prendre mon couteau et te suicider. » Je progressais en terrain miné, jouant dangereusement avec ses émotions pour le troubler, pour lui faire douter de ces paroles. Après tout, je lui offrais volontairement un moyen de taire définitivement ses douleurs, les souffrances qui l’égorgeaient, mais avant qu’il n’essaie de tendre la main pour prendre le manche de l’arme que je lui présentais, avant qu’il ne puisse choisir de passer à l’acte, j’avais encore quelques mots à placer et cette fois, je n’emploierais pas la colère – ou, tout au plus, j’essayerais comme je le pourrais. Pourtant, des résidus de mon amertume demeurèrent coincer au fond de ma voix, comme le venin d’un serpent irrité. « Si ta vie t’importe peu, vas-y et tente ta chance, je te la donne. Tu crèveras exactement comme tu auras vécu : en homme lâche qui a toujours pensé à lui seul en prétendant comme un vrai imbécile qu’il le faisait pour son père. » Je marquai une légère pause, le temps que ces mots atteignent son cerveau ramolli. « Alors qu’il n’a jamais voulu ça pour toi, tu t’es contenté de l’ignorer pendant je-ne-sais combien d’années. » Je lâchai un ricanement sans joie. « Tu veux abandonner? En laissant tous ceux qui tiennent à toi, tout ce que tu as accompli seul pour quelque chose qui allait arriver un jour ou l’autre? Si c’est ça que tu veux, vas-y, enlèves-toi la vie pour que tes amis se souviennent de toi comme d’un sale hypocrite. » Brusquement, le couteau que je tenais disparu de ma paume, retourné confortablement à l’intérieur de la besace. S’il voulait à ce point crevé, arracher son existence des Terres du Yin et du Yang, qu’il le fasse de ses propres moyens : je ne l’y aiderais certainement pas. « Si tu crois que tu es le seul à souffrir, que grand bien te fasse. À ce que je sache, tu n’étais pas là quand il est mort devant mes yeux. Arrête de te croire seul dans ton petit monde de misère. »

D’un mouvement fluide des jambes, je me retournai vers le navire qui se dressait sur le quai, agrippant solidement mes doigts au bras de l’Orisha aux yeux unis, le traînant sans ménagement jusqu’à la grande embarcation. « Au moins, tu ressens quelque chose quand tu sais qu’il ne reviendra pas… », murmurais-je à voix basse, sans réellement me soucier s’il m’avait entendu ou non. « Mais je ne peux pas en dire autant pour moi. » Ça imposa un terme direct à notre discussion, plongeant l’atmosphère qui régnait entre nous deux dans un silence de plomb, aussi froid et désagréable que le vent qui gonflait les voiles du bateau dont l’ancre se levait, lentement, pour aller affronter les pires intempéries – le déchaînement de l’Océan – qui s’abattrait bientôt au-dessus de nos têtes, à commencer par la pluie torrentielle qui tombait à flots sur le pont, l’inondant presque comme un souhait de le faire couler dans les profondeurs des mers. Je frissonnai violemment, serrant mes bras autour de mon corps, telle une vaine tentative de me protéger de l’Eau, insufflant peu à peu un vent de panique qui tordit mon estomac, manquant de faire libérer mes flammes et créer une barrière protectrice – inutile certes – autour de ma silhouette tremblante  pour m’isoler de la tempête et de la rage de mon ennemi naturel.

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Miles Köerta
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Miles Köerta
Mar 14 Juil 2015, 20:18

Vers un nouveau chemin
« Et quand la mer nous transporte au-delà des frontières… »

« Au moins, tu ressens quelque chose quand tu sais qu’il ne reviendra pas… Mais je ne peux pas en dire autant pour moi », finit-il par dire d’une voix faible, à peine audible à travers les cris des capitaines et du chahut qui régnait au port.

Mais je fus en mesure de l’entendre malgré tout, alors qu’il me forçait à le suivre pour monter dans l’édifice flottant. S’il avait connu une certaine réticence de ma part dans les premières secondes, cette fois, je me laissais traîner comme un gamin, observant la courbe de son dos devant moi, intrigué, mettant brièvement de côté la colère qui me chauffait le ventre depuis un moment.

Lorsqu’il m’avait présenté la lame de son couteau, effectivement, je n’avais ressentis aucune peur. Seulement une attraction inexplicable à l’empoigner et à la planter là où résidait la concentration de toute ma souffrance. J’avais examiné l’arme d’un œil vide, désespéré, avant de lever la tête pour plonger mon regard dans celui de Scott. Les Flammes ne s’étaient pas calmées au fond de ses pupilles rougeoyantes et persistaient, à ce moment-là, à me nourrir une colère qu’on ne pouvait mesurer à l’aide de mots, à l’aide d’une simple description. Mais elle était bien là, palpable, brûlant la surface de sa rétine, toute dirigée contre moi. J’avais donc laissé sa colère couler sur mes épaules, la laissant me brûler la peau, manger ma chair jusqu’à mon cœur. Je l’avais laissé me crier dessus, me cracher toute sa rancune au visage, sans protester, mais au fond de moi, la rage que j’étais parvenue à faire taire plus tôt revenait au galop. J’avais commencé à avoir chaud à force d’écouter toutes ces infamies sortir de sa bouche. J’avais tenté de me contrôler, de ne pas céder à la fureur que je sentais bouillir en moi, en serrant et desserrant mes poings, qui étaient crispés. Cependant, plus je l’écoutais, plus mon poing me démangeait de lui en coller une à la figure. J’étais impulsif, réagissant plus souvent avant de réfléchir dans certains cas, mes émotions prenant le dessus sur ma raison. Mais lorsque j’entendis ces mots, ces deux phrases chuchotées avec un calme évident, sortir de sa bouche, la colère que je ressentais à son égard retomba brutalement.

Une fois sur le pont du navire qui allait nous porter au-delà de l’Océan, Scott se détacha de moi. Je le regardais partir de son côté, tandis que le capitaine donnait ses dernières instructions. Quelques minutes après, l’ancre était levée et nous partions vers l’horizon, le vent gonflant les voiles du navire à très grande vitesse, tant il soufflait fort. Il ne fallut pas beaucoup de temps avant que nous rejoignions la tempête, mais pour l’instant, seuls le vent et la pluie étaient nos ennemis. Tentant de contrôler son navire contre les vents et les intempéries, nous pouvions apercevoir le capitaine à la barre s’époumoner pour donner les directives à son équipage par le biais de son second. Dans l’agitation du vaisseau, je me frayais un chemin entre les silhouettes des passagers et des employés, cherchant du regard la tête noiraude de mon ami. Cela ne prit que quelques instants avant que je ne le trouve, isolé de tout, loin des rambardes qui s’approchaient dangereusement de la mer à chaque mauvaise secousse. Je pouvais le voir trembler à travers la pluie torrentielle qui s’abattait sur nos têtes et sans ménagement, bousculant des individus à mon passage, je me dirigeais dans sa direction. Une fois à sa hauteur, je m’arrêtais devant lui, les dents serrées.

« Tu sais qu’est-ce que ça fait quand on t’arrache la chose qui t’est la plus précieuse? Est-ce que tu connais simplement ce sentiment, lorsque tu as l’impression que l’on t’arrache la moitié de ton être? »

Je marquais une pause, mes poings si fermement contractés que mes jointures en devenaient blanches.

« La douleur qui te poignarde le cœur est… indescriptible, tant elle te fait mal. Tu préfères encore dormir pour l’éternité que de devoir la supporter. Tu as envie de hurler, de frapper tout ce qui t’entoure pour te défouler. »

Je baissais les yeux, observant mon poing.

« Mais est-ce que tu as déjà connu pareille souffrance, Scott? Toi qui me traite de lâche et d’égoïste, t’es-tu déjà battu pour l’être que tu aimais le plus au monde? As-tu déjà consacré ta vie pour lui ou pour elle, au point que ta vie passe en second plan? »

Brusquement, je lui pris le collet, la fureur foudroyant sur place mon compagnon. Comment pouvait-il dire ce genre de choses? Comment pouvait-il comprendre ce que je pouvais ressentir, alors qu’il n’avait JAMAIS ressenti cette douleur qui t’étouffe, qui te noie dans le plus profond désespoir.

« Tu ne peux pas comprendre tant et aussi longtemps que tu n’auras jamais ressenti quelque chose d’aussi puissant pour quelqu’un… Draug était tout pour moi. Mon modèle, mon mentor, en plus d’être un père fantastique. Mon père… Je l’admirais pour tout ce qu’il avait traversé et pour lui, je me serais damné, j’aurais volontiers pris sa place pour le sauver. »

Des larmes recommençaient à couler sur mes joues, se mêlant aux gouttes de pluie qui me mouillaient le visage.

« As-tu seulement déjà voué autant d’amour à quelqu’un, Scott? »

Sans plus de cérémonie, je relâchais son col. Mais avant que je puisse contrôler mon geste, je le frappais brutalement au visage, criant sur mon ami tout ce que j’avais de tristesse et de colère contenu en moi et qu’il me fallait libérer au risque qu’elle n’explose jamais et qu’elle me tue de l’intérieur.

« NE VIENS PLUS JAMAIS ME TRAITER D’ÉGOÏSTE, CAR LA SEULE CHOSE QUE JE DÉSIRAIS, C’ÉTAIT QU’IL PUISSE VIVRE CENT ANS DE BONHEUR! PARCE QUE LA VIE, PARCE QUE LA VIE NE LUI AVAIT DONNÉ QUE DES ANNÉES DE MALHEUR! Je… Je ne voulais que son bonheur. Je voulais enfin qu’il puisse vivre pleinement… follement… »

Je poussais un hurlement désespéré avant de m’effondrer au sol, attaquant le pont du navire à l’aide de mes poings que je fracassais violemment contre le bois. Les autres passagers me regardaient d’un œil terne, vide, croyant avoir à faire à un jeune homme dépassé par les événements qui chamboulaient les Terres et qui avait besoin d’extérioriser sa peine. Dans ces conditions, ils nous laissèrent dans un silence presque religieux, silence, certes, illusoire, car en vérité, les cris de la tempête hurlaient férocement. Le navire tanguait dangereusement d’un bord et de l’autre de ses flancs, pris dans les assauts des vagues qui se fracassaient contre la coque. La pluie redoublait en intensité et soudainement, un cri, en haut d’un mât, résonna à travers tout le vaisseau.

« Capitaine! Il y a des monstres en approche sur bâbord!! »

À ce cri, une atmosphère glaciale tomba sur l’équipage. Mais le capitaine était vif d’esprit et sans plus tarder, donna ses ordres à la volée, avec l’aide du second, bien décidé à contourner cette vague de monstres qui déferlait dans leur direction. Il espérait avoir la collaboration de tout le monde, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, pour se sortir de ce mauvais pas.

« Vous hisserez les cacatois lorsque j’aurais effectué le changement de cap à soixante degrés à tribord! Dépêchez-vous! Cannoniers! Préparez-vous à une canonnade immédiate contre ces monstres! Il faut mettre le plus de distance entre eux et nous! »

Essuyant rapidement les larmes qui me barbouillaient le visage je plantais mon regard dans celui de Scott, esquissant un rictus sombre.

« J’ai conscience de ma puérilité, Scott… Je me dis que je ne suis plus un enfant, cependant, je dois être le plus immature entre nous deux. »

Je me détournais de lui, observant l’horizon. Effectivement, des ombres peu engageantes perçaient les vagues de la mer. En plus, elles se rapprochaient dangereusement de notre position. Je frissonnais.

« Désolé de t’avoir frappé… Mais ne dis plus jamais ça, tu m’as compris? »

Je posais brièvement mon regard dans ses yeux, l’électricité palpitant au fond de mes pupilles.

« Ne dis plus jamais que tout ce que j’ai fait, ce n’était pas pour Draug…

- Capitaine! ILS ARRIVENT! Une vingtaine de monstres!

- ACCROCHEZ-VOUS! »

Brusquement, le bateau fut secoué de toute part, alors que les canons se mirent à tirer simultanément sur l’ennemi en mouvement. Déséquilibré, je tombais par terre, m’agrippant à l’un des mâts du navire, le cœur battant, l’esprit en ébullition.

« CAPITAINE! Nous en avons touché seulement cinq sur une vingtaine!

- Qu’est-ce que vous attendez pour recharger vos canons, triple buse?!

- Bien, capitaine! »

Dans un élan, je sautais sur mes jambes pour me diriger vers un canonnier pour lui donner un coup de main. Ils avaient besoin de notre aide. Sinon, nous nous n’en sortirons jamais vivant.


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Mer 15 Juil 2015, 21:03

«… Pourquoi tu me traites comme si j’étais une sorte de Démon? » Ma main gauche, fermement resserrée contre les parois du bastingage peinait à garder mon corps dans un équilibre stable, taguant au gré des mouvements dangereux du navire secoué par les flots violents et la pluie qui s’abattait sur le pont, portée par un vent puissant semblable à celle d’un ouragan. Un frisson me parcourut de la tête jusqu’aux pieds, tandis que je commençais à trembler, effrayé par l’Océan qui se dressait sur la voie de ceux qui voulaient survivre et échapper à l’Enfer qui levait le sol du Continent Dévasté. Je me sentais malade – et ce n’était pas seulement à cause du goût amer laissé derrière le  coup de poing que m’avait envoyé l’Orisha aux yeux unis – et un haut-le-cœur me traversa avant même que je puisse enchaîner deux mots. Je vomis par-dessus la solide rambarde de bois, mitigé entre la colère de me sentir aussi faible et impuissant au milieu d’un Élément que je craignais, la rage qui m’avait envahi dès que l’attaque avait été porté et la douleur que ces paroles froides firent ressurgir à la vitesse de la lave qui saute du volcan en pleine éruption. En toute sincérité, pendant quelques brèves secondes, j’eus envie de rire aux grands éclats et continuer, encore et encore, à envenimer les tensions qui s’étaient incrustées et répondre à l’acide qu’il m’avait jeté au visage, par orgueil, par vengeance soudaine et subite. Cependant, je savais que ça ne rimerait à rien : je n’étais pas en état de continuer à rouspéter – la mer étant devenue la principale source de mes inquiétudes, me tordant le ventre avec la peur démentielle qui s’accrochait à moi comme une deuxième peau.  

J’entendais les hurlements des gens qui s’affaissaient à aider les matelots dans les tâches qui les encombraient, couverts par les bruits du souffle de l’Air et de l’Eau qui tombait du ciel, sans compter les chutes qui se répétaient, inlassablement, par les tremblements du navire qui grimpait difficilement sur les vagues gigantesques. C’était à peine si je m’en préoccupais. Mon esprit était pris entre deux étaux, aussi puissants l’un que l’autre, tandis que les secousses de mon corps redoublaient, que des flammes apparaissaient brusquement sur ma peau pour s’éteindre ensuite, étouffées par l’Eau ou par ma conscience qui les contraignaient à se replier, les yeux écarquillés par le sentiment d’une peur incontrôlable. J’aurais pu essayer de me calmer, j’aurais pu lâcher – maintenant – Miles  ici et remettre à plus tard les divergences qui nous poussaient dans ce genre de retranchement et pourtant, mes jambes refusaient s’en aller, mon rictus, de s’effacer. Il n’avait pas le droit de dire ça. J’estimais qu’il n’en possédait pas les connaissances, il ne savait rien de la vérité. Comment pouvait-il croire que je n’avais jamais aimé? Que je n’avais jamais eu une seule attache, aucun soutien sur lequel me raccrocher lorsque j’en avais plus besoin? Que je ne savais même pas me battre pour protéger mes convictions et nourrir mes espoirs? La colère me montait par-dessus la tête, la rage me rendait aveugle et imprévisible, mais, tel un poids pour venir rééquilibrer la balance qui s’était dangereusement déstabilisée, la peur m’empêchait d’articuler un mot, coincé au fond de ma gorge asséchée par la terreur qui s’infiltrait dans mes veines à tel point que j’en avais presque les larmes aux yeux. Je voulais partir d’ici le plus rapidement possible, quitter le territoire de mon ennemi naturel.

Cependant, il y avait des choses qui devaient être mises aux claires. Si cette dispute m’avait fait comprendre un truc important, c’était que, malgré notre amitié, nos points de vue n’étaient jamais pareils, divergents, creusant un fossé qui voilait le sens de nos paroles. Je n’avais jamais voulu prétendre que tout ce qu’il avait accompli, tout ce qu’il fait pour son père n’avait été qu’un reflet de son égoïsme, mais plutôt qu’il n’avait jamais pris le temps de passer plus de temps avec lui, de lui faire esquisser un large sourire avant qu’il ne relâche son dernier souffle dans la Nature au lieu d’avoir continué à alimenter ses inquiétudes en trainant avec le « Magicien » tandis qu’il ne pouvait rien faire. Mais visiblement, je n’étais pas celui qui était taillé pour évaporer ces airs de dépressif de son visage et qu’il reprenne le goût à la vie. Une secousse faillit m’envoyer par-dessus bord, mais je tins bon, retirant les doigts de ma main droite qui tâtaient le point d’impact de son coup pour qu’ils me servent d’un soutien supplémentaire.  Étrangement, ce ne fut qu’à ce moment particulier où je trouvais la force et les mots au sein de ce qui me restait d’énergie à l’intérieur de mon esprit déchiré, m’effondrant péniblement sur le sol avant de me relever en tremblant. « Tu crois… que je sais pas ce qu’est " aimer quelqu’un? " » Le ricanement qui franchit mes lèvres se muta en haut-le-cœur qui me contraignit à vomir une nouvelle fois. Mon visage était pâle, j’avais de la misère à ne serait-ce que tenir sur mes jambes qui s’étaient transformés en coton. La pluie camouflait les larmes de colère qui me coulaient sur les joues, comme si les Aether ne souhaitaient pas que l’Orisha me voie pleurer, exprimer une émotion qui était autre qu’une amertume sauvage et bestiale. « Tu sais même pas ce que j’ai vécu avant de te rencontrer, alors laisse-moi éclairer rapidement ta lanterne. »  

Mes mains glissaient sur le bastingage alors que les tremblements redoublaient en puissance et en dangerosité. Comme si ça pouvait même être possible, le vent parvint à siffler plus fort dans mes oreilles, semblant presque posséder une puissance capable de déchirer les voiles du navire. Le temps n’était – j’en avais entièrement conscience – aux petites discussions, mais il était trop tard pour m’empêcher de le faire. « Il y a eu un moment où une personne a eu autant d’importance pour moi que ton père l’a eu pour toi. Alors que mon propre père m’a toujours détesté, elle m’a soutenu jusqu’à devoir se disputer contre lui pour me protéger et je l’admirais pour ça. J’aurais tout sacrifié pour que nous puissions vivre heureux sans lui.  Mais dès qu’il est mort, tu sais ce qu’elle a fait? » Le Capitaine criait que l’on recharge rapidement les canons pour contrer les assauts des bêtes qui avaient échappé aux boulets qu’ils avaient lâché contre elles. Le navire fut violement secoué, m’entrainant par terre au même titre que l’Orisha aux yeux unis qui s’écroula sur les planches mouillées. Je me relevai en tremblant, les yeux inondés par des flammes orangées. « Elle m’a abandonné, rejetant de ce fait tout " l’amour " que je lui ai porté, allant même jusqu’à me détester. Si tu crois que je n’ai pas souffert… » Je m’interrompis brusquement lorsque je vis une femme un peu plus loin passer par-dessus la rambarde en criant et en faisant de grands de gestes de bras. Je détournai les yeux.

« Que je sache, tu sais pas ce que c’est la souffrance quand toute ta famille, du jour au lendemain, veut plus de toi. La vie a aussi donné que des années de malheur à ma mère et je souhaitais que ça change à un point dément. Mais contrairement à toi, elles se sont éteintes dès que je suis sorti de sa vie : j’ai toujours été son problème et, concrètement, sa souffrance. L’avoir su plus tôt, je serais sans doute mort maintenant, mais avec la cruauté de la vie, je l’ai compris que trop tard, enfermé dans mon aveuglément, mon désespoir et mon innocence pendant deux ans de trop avant que je finisse par comprendre que ça servait plus à rien de lutter. » Je m’approchai de l’Orisha, le toisant d’un regard qui s’était soudain éteint : le feu qui y brûlait avait entièrement disparu. « Encore aujourd’hui, je sais plus qui j’haïs le plus : elle ou moi-même. » Je ne lui avais exposé que les grandes lignes de mon histoire, voilant le reste des éléments qui la composaient, sans chercher à m’y aventurer plus que nécessaire. « Tu as dit tout à l’heure que je comprenais pas : t’as peut-être raison. … Excuse-moi. » Soudainement, mon poing alla se fracasser sur son visage tandis que l’éclat de mes iris se rallumaient. Je ne pus empêcher mon sourire de satisfaction de se coller sur mes traits, ressentant à quel point ça me procurait un grand bien. « Ça, c’est pour le coup que tu m’as flanqué. Ne t’avise plus de me frapper encore une fois. » C’était une conséquence pour avoir mis en rogne un Elémental de Feu : j’espérais sincèrement que le message était passé par l’intermédiaire de ce coup – étrangement, j’eus également le sentiment que ça scellait notre dispute – tandis que je le regardais, après c’être remis de son choc, se précipiter vers un canonnier pour l’aider dans sa tâche.

Une bonne chose de faite. Un frisson descendit brusquement la courbe de mon dos, comme si mon esprit, après qu’il se soit un peu égaré, était retourné dans la réalité, alimentant une nouvelle fois la peur instinctive que je possédais envers l’Eau. Les coups de canon pleuvaient autour de nous, parvenant provisoirement à masquer le bruit de la pluie et du vent, accompagné par les hurlements – humains comme bestiaux – qui retentissaient de toutes parts du navire. Un monstre, semblable à une sorte de requin gigantesque, bondit de l’Océan, happant deux personnes entre ses crocs affutés, avant de retomber de l’autre côté, frappant de sa queue puissante le mât, qui émit un grincement inquiétant. Je voyais les horreurs se succédées l’une après l’autre devant mes yeux, mais j’étais toujours incapable de bouger, paralysé sur place par une terreur que peu d’entre eux pouvaient réellement comprendre. Je crûs voir Miles me crier de le rejoindre, mais parmi le raffut de la mer et des gens qui courraient partout sur le pont, je n’avais aucun moyen d’en être sûr à cent pourcent. Je savais que je ne pouvais pas rester planté là, à rien faire d’autre que de regarder devant moi, mais j’avais peur d’avancer, au même titre que je craignais de ne pas bouger. Je me sentais en sécurité nulle part, tenaillé par les cris de détresse du Feu qui reprenaient ses séquences de crises folles, apparaissant subitement sur moi pour mieux disparaître dans le vent violent mélangé à l’eau salée. C’était… insupportable. Je n’arrivais simplement pas à calmer le rythme effréné de mon cœur ou l’agitation de mon esprit craintif et pourtant, je voulais faire quelque chose, je le devais. Je fermai les yeux, avançant pas à pas vers un canon qui avait été abandonné par un matelot qui avait tombé par-dessus bord à côté de l’albinos, tenant solidement mes mains au bastingage pour empêcher que mon corps tombe sous les secousses. Les dents serrées, je me rendais, peu à peu, compte que ma méthode ne m’aidait pas à surmonter ma peur, mais paraissait l’augmenter, comme de la nourriture que je lui offrais sur un généreux plateau.

J’ouvris brusquement les yeux, remarquant immédiatement que je tremblais encore plus que tout à l’heure et que j’avais déjà cessé d’esquisser tout mouvement. Je tournai à la tête vers l’arrière. J’avais à peine parcouru quelques pas. C’était lamentable, surtout en sachant que j’étais celui qui avait voulu partir du Continent Dévasté et voilà que j’en étais réduis à trembler comme une feuille sur le pont, à regarder les gens se faire massacrer sans pitié et tomber dans l’Océan pour mieux mourir de la main des créatures marines. À chaque fois que l’une d’entre elles tombaient, trois personnes devaient en mourir également, comme une mauvaise plaisanterie. Soudainement, je sentis une texture visqueuse s’enrouler autour de mon corps, alors que j’entendis au loin : « Ne restez pas trop proche du bastingage, il y a un monstre avec des tentacules qui pourrait vous prendre! » Et il ne pouvait pas le dire avant? , pensais-je en grande panique. Mon corps s’enflamma, avant qu’il ne s’éteigne par la pluie. Le monstre continuait de tirer, m’approchant inexorablement du bord alors que j’essayais de m’en éloigner rapidement.  Je retentai, à plusieurs reprises, ce manège pour me défaire de l’emprise, bien qu’en sachant que ça ne me servirait à rien, mais la peur qui m’envahissait m’empêchait de la moindre réflexion. « Et m*rde! »

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Miles Köerta
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Miles Köerta
Sam 18 Juil 2015, 05:31

Vers un nouveau chemin
« Et quand la mer nous transporte au-delà des frontières… »

S’il fallait un tableau à l’Enfer, une illustration pour lancer à la charge votre imagination, j’en voyais une juste devant mes yeux, formée par les désastres qui s’enchaînaient tout autour de ce navire. Il ne pouvait y avoir plus authentique que la terreur qui se reflétait dans chacun des regards, ces corps volant d’un bord et de l’autre de l’édifice flottant, emportés par la tempête qui s’acharnait à nous déséquilibrer sur la mer. Des silhouettes passaient par-dessus bord, emmenant leurs cris à les suivre jusque dans leur tombe, jusqu’à ce que le hurlement de l’Océan couvre leur dernier souffle ou que la gueule d’une créature se referme sur eux. À chaque claquement que produisait leur immense mâchoire, ces monstres marins envoyaient des giclées de sang dans les airs, teintant la mer d’une écœurante couleur rosée, qui ne cessait de s’étendre au fur et à mesure que les corps à travers leurs dents irrégulières, jaunies, brisées, coulaient sous leurs assauts de bête affamée. Je n’avais pas à m’imaginer la bestialité de ces monstres de l’Océan qui pourfendaient les vagues pour se jeter sur notre pont, leurs yeux globuleux, excessivement gros et ronds, tournés dans notre direction. Ils happaient des innocents, sans que l’on puisse réagir, leur opposer une quelconque résistance, avant de partir comme ils étaient venus: disparaissant dans le déchainement de la nature, entraînant la mort dans leur sillage. La pluie, le vent, les vagues et l’Océan: c’était comme si Phoebe elle-même, la grande Aether de la Nature, avait choisis d’abattre tous ces cataclysmes sur nos têtes pour nous punir, dans une colère divine que nous étions incapables d’expliquer. C’était un véritable cauchemar, un vrai carnage, digne des tableaux les plus macabres de notre Histoire.

En voyant toutes ces horreurs défiler devant mes yeux, je fus, un instant, paralysé par l’effroi, la confusion, la peur comme on pouvait rarement la décrire avec de vulgaires mots. C’était un sentiment qui vous glaçait le sang. Dans une secousse violente, je fus soudainement entraîné au sol, mon corps glissant brusquement jusqu’au bastingage du navire. Je poussais un cri, tentant d’arrêter la glissade qui ne semblait vouloir se terminer. Le capitaine – nous pouvions tous l’entendre – essayait de toutes ses forces de redresser son navire, tournant la barre à son maximum, jusqu’à ce qu’il y ait résistance. Cependant, les vagues étaient trop monstrueuses; le courant, trop puissant; les monstres, trop avides et violents. Il désespérait à le redresser et hurlait à gorge déployée des consignes strictes et sévères à son équipage, qui s’évertuait d’accomplir chacun de ses ordres dans le chahut qui animait le vaisseau et la peur qui leur nouait l’estomac. Des canons crachaient des boulets, s’enfonçant dans l’Océan sans rencontrer âme qui vive. Je m’accrochais aux planches du navire, sans succès, l’eau qui s’infiltrait à cause des vagues et de la pluie rendant le pont dangereux par sa perte d’adhérence. J’allais tomber, chuter, me noyer, suffoquer… Mourir. À ce constat, ma respiration s’accéléra.

J’aurais dû me réjouir, n’est-ce pas? Car c’était exactement ce que j’avais souhaité juste avant de m’embarquer dans cette traversée. J’aurais dû me réjouir, profiter de l’occasion pour me jeter à l’eau et laisser mon corps s’enfoncer dans les profondeurs de l’Océan. Si quelques personnes auraient pleuré ma perte, tout le monde se serait mis d’accord sur une chose: je n’avais simplement pas été capable de survivre, de protéger ma peau des catastrophes qui s’abattaient sur nous. Tout le monde aurait compris, pas vrai? Tout le monde aurait pleuré un jeune homme n’ayant pas eu de chance, au lieu de celui qui mourrait s’en s’être battu jusqu’au bout. L’image de Scott, tenant un couteau tourné sur mon cœur, s’imposa soudainement à mon esprit et je serrais furieusement les dents, cherchant à m’agripper à quelque chose qui ne risquerait pas, au contraire de me permettre de me redresser, de m’entraîner dans les profondeurs agitées de l’Océan. Mourir… Mourir en lâche. Mourir en lâche… Je ne voulais pas mourir en lâche. Je… Je ne voulais pas mourir. Pas maintenant. Mais surtout pas comme ça, alors que, voyant mon corps chuter, une créature marine se positionnait déjà pour m’avaler et m’entraîner dans sa grande gueule. Je fermais les yeux, promenant mes mains dans les environs, dans l’espoir d’attraper un objet solide qui me maintiendrait sur le navire, qui m’aiderait à m’accrocher… Parce que je venais d’en prendre conscience. Je ne voulais pas crever aussi facilement.

Cependant, je ne pouvais empêcher cette chute de se produire. Je fermais brusquement les yeux, laissant la pluie me barbouiller le visage, les coups de canon explosé dans mes oreilles, les hurlements des autres passagers griffer mon esprit. Je paniquais, ma respiration allant en crescendo. Je pouvais entendre la gorge du monstre sous moi produire un étrange son, pour le moins très inquiétant. Je fermais les yeux. C’était la fin. La fin… Pas comme celle que j’avais cru voir dans la Coupe des Nations. Désolé, Père… Je suis tellement désolé…

« C’est bon! Je te tiens! Aller! Lève-toi! »

J’ouvris brusquement les yeux, apercevant une main accrocher fermement mes vêtements. Je longeais le bras de mon sauveur du regard, plantant quelques secondes après, mes yeux dans les siens. Il était paniqué, nerveux, et me pressais de me lever.

« T’as failli te faire bouffer, mon gars! Pas de temps à perdre! Faut qu’on leur montre qu’on ne va pas crever aussi facilement! »

Après m’être redressé, il s’éloigna en courant, et je le regardais partir, ébahi. Mais je n’eus pas le temps de méditer plus longtemps sur la situation que j’entendis, non loin de ma position, la voix de Scott jurer. Vivement, je me retournais pour apercevoir un énorme tentacule lui prendre la taille et le tirer violemment vers les crocs affamés de la mer. Écarquillant les yeux, je me mis à courir dans sa direction, songeant à mon épée qui se trouvait à l’intérieur de ma besace magique et qui apparut la seconde suivante.

« Scott!! »

Me précipitant sur le bras visqueux qui le maintenait fermement, j’abattis férocement ma lame sur ce dernier, mais mon épée, au lieu de performer, de trancher, glissa à cause de la viscosité du membre.

« Eh m*rde! »

Aussitôt, je tentais une nouvelle approche, ouvrant ma paume pour y libérer une importante charge d’électricité. Mais presque immédiatement, je sentis mon corps s’épuiser. Moi et la magie, ça faisait bien deux. Mais je ne pouvais pas laisser tomber Scott. Pas mon meilleur ami. Me tournant dans sa direction quelques secondes, je le gratifiais d’un maigre sourire, qui se trouvait, néanmoins, rempli d’une certaine reconnaissance à son égard.

« J’ai… Je n’ai pas l’intention de mourir. Je vais me battre Scott. »

Et sans plus attendre, j’abattis ma main sur le tentacule, laissant la Foudre glisser à travers mon corps pour rejoindre celui du monstre. Je serrais des dents, espérant que cela soit suffisamment fort… Mais je perdais tant d’énergie…

« Libère ta Foudre! »

On allait l’avoir, ce fichu monstre. À nous deux, j’en étais certain, nous parviendrons à nous sortir de ce désastre.


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Jeu 30 Juil 2015, 19:14

Tous les tremblements qui avaient traversé mon corps avaient cessé de me secouer. La terreur qui immobilisait mes jambes, troublaient le courant électrique qui voyageait au cœur de mon esprit, ayant le rôle de construire mes pensées, mes idées ou mes stratégies, ne semblait plus avoir d’existence réelle, transporté par le monstrueux souffle du vent des mers. J’avais eu peur, si peur de l’ennemi naturel qui m’entourait, tétanisé par la succession inimaginable d’éclats de sang rebondissant sur les voiles, sur le pont, sur les gens, dilués par la pluie jusqu’à les rendre invisibles, le son des corps broyé entre les mâchoires affamées des créatures que désormais, alors que j’étais serré par les ventouses visqueux d’un monstre qui me poussait vers l’étendue d’eau déchaînée, je ne ressentais plus rien, comme absent de ce monde qui se plongeait dans le chaos. Rapidement, j’avais dépassé le seuil maximum que la peur pouvait imposer dans ma tête, au point d’en arrêter de me débattre – qui me paraissait soudainement devenir un geste sans intérêts – conservant un calme qui m’avait rarement été gratifié. J’aurais pu profiter de mon abrupte élan de lucidité pour établir un plan et déjouer la mort qui me tendait les bras sous la forme de crocs aiguisés, mais je demeurais pétrifier comme une statue de pierre, l’esprit noyé au sein de ténèbres qui me détachaient de « maintenant » –  le présent et le réel – comme si j’avais déjà accepté la fin qui m’ouvrait si chaleureusement les bras. Pourtant, mes pieds n’avaient jamais cessé de glisser contre les planches de bois du navire, en totale opposition à la puissance exercée par le tentacule – quoique insuffisante devant la force de la bête aquatique – tentant désespérément d’échapper à son emprise qui me comprimait les os. Car je le savais, je savais qu’au fond de moi, je ne voulais pas crever.

Après toutes les choses que j’avais pu accomplir, après le venin que j’avais volontairement craché en plein dans la figure de mon meilleur ami pour qu’il reprenne le goût de la vie, mourir maintenant, prisonnier entre les dents de l’Océan, me semblait débile, incongru. Carrément hors place parmi le déroulement de ces événements. Je ricanai sans que la joie ne transparaisse dans le timbre de ce court rire. C’était pitoyable puisque je savais que j’étais capable de faire mieux que de me laisser traîner par un membre gluant vers le bastingage, beaucoup mieux et qu’également,  je possédais les habiletés requises et nécessaires pour m’extirper de sa poigne visqueuse et répugnante. Alors pourquoi? Pourquoi restais-je incapable de bouger en observant la barrière de bois se rapprocher inexorablement comme un total imbécile? La situation devenait rapidement ridicule, si idiote que j’aurais pu en rigoler, mais mes lèvres étaient complètement scellées l’une à l’autre, rendant la tâche impossible malgré les efforts que je déployais pour les ouvrir à nouveau. Je refusais que la mer, l’Eau elle-même, ne me serve de tombeau, rejetant si férocement, avec une force bestiale, cette pensée dérisoire qui me faisait presque vomir, tordant vivement les traits de mon visage en une grimace dégoûtée. Je devais pouvoir faire quelque chose non? Avant que mon corps ne bascule par-dessus le bastingage et que ma vie s’éteigne, empalée sur les crocs d’un monstre grotesque… Je fermai les yeux, rien que quelques secondes pour réfléchir à une idée qui parerait cette éventualité. À ce stade, tout fonctionnerait, tout serait à prendre. Cependant, mon esprit demeurait uniquement bloqué sur la survie, envoyant balader le reste dans les airs, encouragé par le Feu qui reprenait le poil de la bête, explosant en flammes sauvages sur l’ensemble de mon corps, noyées parmi l’eau de pluie qui s’acharnait à tomber de plus belle, électrisant ma peau glacée, me donnant des frissons que je peinais à contrôler. … Électrisant?

Sortant brusquement de la tempête qui sévissait sur le navire, j’entendis l’Orisha albinos crier à tue-tête mon nom, engloutissant les bruits de l’Air qui faisaient claquer les voiles et les hurlements qui résonnaient de partout à la fois. « Miles!? », hurlais-je à mon tour, voulant avoir les certitudes que je n’avais pas rêvé. Lentement, ma tête pivota vers la source du cri. Épée double à la main, le jeune homme s’élançait à une vitesse folle, bondissant comme un dérangé sur le tentacule. Il  le frappa avec sa lame, avant que celle-ci ne  glisse abruptement sur le long du membre visqueux, sans le perforer. Lançant un juron, ses mains commencèrent à crépiter d’étincelles électriques. Sa figure palissait peu à peu, son corps semblait se relâcher sous les effluves de la fatigue et pourtant, il trouva la force d’esquisser un faible sourire, gorgé d’un sentiment que je n’aurais cru y voir s’y lire – tout au plus, pas dans l’état dans lequel il avait été plongé. Malgré l’urgence, le temps qui manquait au problème mortel, ses mots réussirent à arracher un sourire sur mes lèvres. « Alors qu’est-ce qu’on attend? » L’Orisha aux yeux unis réagit instinctivement : de sa main parcourue par la Foudre, il l’abattit sauvagement sur le membre du monstre qui poussa un cri strident, avant de me hurler de relâcher, à mon tour, de l’électricité. Tu n’as pas besoin de me le dire deux fois… Avec une sauvagerie insoupçonnée, j’invoquai la Foudre en y libérant une grande quantité de magie qui se matérialisa sous forme d’une puissante décharge électrique que je laissai volontiers parcourir le tentacule de la bête aquatique.

Le monstre lâcha rapidement sa prise autour de ma taille, hurlant avec une telle force qu’il parvint, quelques secondes, à couvrir les bruits du chaos sur le navire. Une odeur de brûlé gravit sur le pont tandis que la créature s’engouffra une nouvelle fois dans les profondeurs de l’Océan, avec une nage maladroite causée par le choc électrique, pour y disparaître sans essayer de réclamer son reste. Soudainement, je ressentis une grande bouffée d’air traversé mes poumons, respirant à nouveau comme je le devais. Mes yeux demeurèrent figés sur la mer en furie, quelques instants, avant que je reporte mon regard vers l’Orisha, marmonnant un « Merci » où toute ma sincérité transparaissait avant de croiser les bras, tiquant en particulier sur son visage palissant. « Tu te sens d’attaque à recommencer un truc pareil? » D’habitude, je n’étais pas très porté sur les actes héroïques, mais parfois, quand les événements le demandaient, quand une certaine coopération pour survivre était lancée, ça ne pouvait pas me causer tant de mal. J’en avais marre d’entendre tous ces cris et tous ces pleurs fuser à travers le navire, de la proue jusqu’à la poupe, tandis que nous restions là, à proximité du bastingage en nous tournant les pouces sous la pluie. Puis, soudainement, avant que nous puissions faire un seul geste, une voix s’éleva au-dessus de toutes les autres, paralysant ceux qui se mouvaient, tel  un message d’espoir que l’on plaça sur le dos d’une colombe au plumage immaculé. « Terre en vue! » Nous aurions presque pu entendre le soupir de soulagement collectif silencieux envahir l’ensemble du navire, mais le visage des personnes qui s’étaient amassées sur le pont en disait long.

Car, pour une première fois au cours de ce périple tumultueux, l’Espoir renaissait dans le cœur de ces hommes désespérés.

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