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 Soucis familiaux [Quête solo]

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Mer 10 Déc 2014, 12:01




La forêt des murmures paraissait lugubre, bien plus que d’habitude. Une ombre planait sur ces lieux, et la longue plainte lancinante du vent n’avait plus rien de cette douce musique que l’on pouvait parfois lui trouver. Les branches nues de certains arbres ressemblaient à s’y méprendre à autant de serres et de crochets prêts à fondre sur vous. Pas une fleur, pas un oiseau, pas un renard à l’horizon. Tout était calme, trop calme, tant qu’Abel en était presque mal à l’aise. Il aimait se savoir entouré des dons de Phoebe, autant par ce qu’il les appréciait que parce qu’il savait qu’ils feraient des alliés de choix s’il était en difficulté. Mais en cet instant, peut-être valait-il mieux que les autres enfants de la Lune ne le voient pas. Le béluas marchait d’un pas lourd, le regard baissé. Cela faisait des jours qu’il avançait sans ciller, s’aventurant toujours plus loin dans la forêt. Mais aujourd’hui, ce n’était pas de son plein gré qu’il arpentait sa nature adorée.
« Ralentis. »
L’ordre était sec, cassant. On pouvait sentir l’influence de la démone sur le bélua rien qu’à entendre sa voix.
« Comme tu voudras, maîtresse. »
Le dernier mot d’Abel était sorti de sa bouche avec défi, sur un ton presque moqueur. Il savait qu’Opalyne aimait ce nom, peut-être un peu trop à son goût. Elle ne manquait jamais de profiter de la position que lui donnait le pacte, et le bélua ne pouvait rien faire contre cela. Le fils de Phoebe ralentit le pas, comme le lui avait ordonné la créature des enfers. En regardant par-dessus son épaule, il constata que cette dernière semblait visiblement très fatiguée. Elle avançait fébrilement sur ses petites jambes, tout en battant furieusement l’air à intervalles réguliers avec ses ailes aux reflets multicolores. Elle avait revêtu son apparence humaine, celle qu’Abel préférait, et de très loin… Malheureusement, elle ne lui faisait pas toujours le plaisir de la revêtir quand ils voyageaient ensemble, lui préférant sa forme démoniaque et obligeant le bélua à se rendre à une évidence qu’il détestait : il était l’esclave d’une créature maléfique, emprisonné dans ce rôle par le sombre contrat qu’ils avaient signé.

Le bélua s’arrêta et laissa la démone remonter jusqu’à lui.
« Tu veux faire une pause ? »
Opalyne ne lui répondit pas, se contentant de se laisser tomber au pied d’un arbre, mais son regard exprimait toute sa gratitude bien malgré elle. Abel s’en contenterait. L’objet de leur voyage semblait inquiéter la démone. Malgré tout, elle n’avait rien confié au bélua concernant le motif de leur venue dans la forêt des murmures. Cela ne laissait présager rien de bon. Profitant de cette halte pour se reposer un petit peu lui aussi, Abel tendit à la démone une gourde qu’il venait de sortir de sa besace. Abel avait l’habitude de se déplacer en forêt. Le rocher au clair de Lune, Dhitys… ces lieux avaient su garder leur harmonie avec la nature environnante. Très tôt, le bélua avait dû apprendre à se déplacer ailleurs que sur des routes pavées, et aujourd’hui, il n’éprouvait aucune difficulté à évoluer dans les bois, là où d’autres étaient parfois trompés par une ronce un peu trop basse ou un talus traitre.
Abel guettait les environs, plissant les yeux pour tenter de voir au-delà de la rangée d’arbres qui leur masquait la vue à quelques mètres à peine. Ne sachant pas ce qu’ils venaient faire ici, il ne savait pas non plus s’il devait s’attendre à devoir se défendre, et cela le rendait nerveux. Observant son manège, Opalyne se releva et vint faire glisser une main le long de son dos.
« Ne sois pas si méfiant. Tu vas nous porter la poisse. »
« Très bien, maî… »
Cette fois ci, la démone ne le laissa pas finir sa phrase. Un crépitement retentit dans l’air et, s’embrasant en une fraction de seconde, Opalyne apparut sous son véritable jour. Sa peau était devenue rouge comme le sang, et elle avait abandonné ses vêtements de soie pour des chaines et des lanières lui donnant un aspect sinistre. Son visage angélique apparaissait maintenant sous des traits démoniaques tandis que ses cheveux s’étaient allongés et teintés d’une couleur rouge sombre. Deux cornes recourbées étaient apparues au sommet de son front. Ses ailes aux couleurs féériques étaient devenues noires, membraneuses et en partie décharnées, entourées d’une ombre maléfique pour le moins inquiétante qui semblait en émaner. Ses yeux semblèrent transpercer le bélua du regard, qui se garda bien de prononcer le mot maîtresse.

Lorsqu’elle décidait de cesser d’utiliser son apparence humaine, Abel avait tout de suite beaucoup plus de mal à se sentir empathique, et elle le savait. Venant tourner autour de lui d’une démarche lente, elle caressa sa mâchoire avec un regard taquin.
« Quoi, tu n’aimes pas voir ta maîtresse sans artifice ? Me voici pourtant telle que je suis, petit chaton, et tu devras t’y faire pour le reste du voyage. Oh, rassure toi, nous y sommes presque. »
Abel eut envie de lui demander à quoi rimait ce périple, mais elle se serait certainement montrée aussi évasive que toutes les autres fois où il avait abordé le sujet. Le pacte lui ordonnait de la suivre, c’est tout ce qu’il devait savoir, selon elle. Mais après tout, il saurait bien assez tôt à quels desseins elle allait se servir de lui. Il ne pouvait qu’espérer que ses objectifs ne le mettraient pas dans une situation trop difficile à supporter. Mais jusqu’alors, elle avait bien respecté les termes de leur accord. Elle ne manquait pas de l’utiliser pour gravir les échelons parmi le peuple des enfers, et la plupart de leurs escapades imposées avaient consisté à faire du tort à un démon plus puissant, dont la chute permettrait à Opalyne d’accroître son influence. Pour tuer ou saboter les plans d’une autre créature maléfique, Abel n’aurait presque pas eu besoin de pacte, tant il détestait leur race. Mais il restait conscient qu’un jour ou l’autre, de manière volontaire ou non, Opalyne lui demanderait de faire quelque chose qui déchirerait son âme.
Le bélua savait pertinemment qu’il se trompait sur elle, qu’elle utilisait ses charmes pour arriver à ses fins et ne faisait que se servir de lui. Il en était convaincu, mais en même temps, il avait envie du contraire. Il voulait qu’à force de côtoyer la démone, elle ne se mette à tendre de plus en plus vers ce qu’il appréciait chez elle. Elle avait déjà montré en sa présence ce qu’elle aurait certainement appelé des signes de faiblesse. La compassion, l’empathie, l’affection qu’elle semblait parfois avoir pour lui… Abel ne pouvait se résoudre à croire qu’il ne s’agisse d’autant de pièges destinés à le duper.

Les deux compagnons ne tardèrent pas à arriver à proximité d’un étang étrange, qui semblait dégager quelque chose de malsain. En bordure de ses eaux croupies, une cabane de fortune avait été érigée, et une épaisse fumée verdâtre émanait de ce qui lui servait de cheminée. Abel se demanda bien qui pouvait être assez fou pour installer son domicile au milieu d’un territoire lugubre et nauséabond, mais alors qu’ils approchaient de la demeure, il se sentit bête de s’être posé la question. La porte s’ouvrit pour laisser apparaître un démon imposant devant lequel Opalyne vint s’immobiliser. Il la dominait de plusieurs têtes, et ses cornes acérées ne laissaient présager rien de bon. Sentant sa maîtresse en danger, Abel glissa discrètement sa main sous sa cape pour venir effleurer la crosse de son arbalète, prêt à s’en servir si le besoin s’en faisait sentir. Le démon sembla remarquer son mouvement malgré sa discrétion et son regard attira celui d’Opalyne, qui laissa échapper un petit rire moqueur.
« Du calme, chaton. C’est pour lui que je suis ici. »
Sans bien savoir pourquoi, Abel avait l’impression que de toute manière, son arme n’aurait pas été très efficace s’il avait voulu s’en servir. Le démon avait l’air puissant, et il n’était pas seul. Lorsqu’il les invita à entrer dans ce qui lui servait de refuge, Abel aperçut une démone qui lui lança un regard noir à la seconde où il franchit la porte. Opalyne leva légèrement la main en sa direction, semblant indiquer que le bélua était soumis à un pacte, mais cela ne sembla pas calmer l’hostilité de la créature à son égard. Les démons restèrent là un instant à s’observer, comme s’ils hésitaient à parler en sa présence, mais Opalyne finit par se décider à rompre le silence.
« Balefer, Neberal, c’est moi qui ait été envoyée pour m’occuper de votre… "problème". Je suis navrée que cela ait du vous arriver. Ce ne sont jamais des choses faciles… »
La voix de la démone ne laissait paraître aucune émotion. Elle ? Navrée ? Les démons ne pouvaient pas être navrés de quoi que ce soit, ce n’étaient là que des politesses, et ses interlocuteurs le savaient. Néanmoins, ils n’en firent rien remarquer, laissant Opalyne reprendre en désignant Abel.
« Voici l’exécutant. Il pourra se frayer un chemin facilement, et il me servira de point d’entrée. »
Celle qui répondait au nom de Neberal semblait bouillonner, prête à exploser de colère. Le bélua ne comprenait pas ce dont ils parlaient. Balefer fit apparaître une illusion étrange, à travers laquelle on pouvait voir deux amoureux papillonner à l’orée de la forêt des murmures. Opalyne baissa les yeux.
« La trahison requiert le prix du sang, nous sommes bien d’accords ? »
« Qu’il meure pour son manque de loyauté ! Qu’ils meurent tous les deux, lui et sa magicienne ! Qu’ils brûlent dans les flammes de leur arrogance. Comment a-t-il pu faire ça ? Traître à son sang. J’ai honte d’être sa mère. »
Neberal n’avait pas réussi à contenir sa fureur. Sa colère était terrifiante, si bien qu’Abel avait du mal à croire qu’elle puisse parler de son fils. Une magicienne ? Les pièces commençaient à se lier dans son esprit, mais en même temps qu’il prenait conscience de la situation, il réalisa la funeste place qui lui était réservée. Le prix du sang. Un démon qui avait renoncé au mal pour se donner à une magicienne, et voilà qu’il allait devoir les tuer. Dans d’autres circonstances, cette histoire aurait pu lui paraître belle et romantique. Mais celle-ci allait se terminer dans le sang, et c’était à lui d’y veiller.

Maudissant le pacte et ce qu’il allait être forcé à faire, il n’écouta que d’une oreille la démone régler les derniers détails avec les parents de leur cible. Le paiement de leur acte semblait être lié à une prise d’influence d’un autre seigneur dans les sphères démoniaques. Abel n’était pas sûr de bien saisir tous les aboutissants de leurs sombres machinations, et à vrai dire cela ne l’intéressait pas. Les seules choses sur lesquelles il parvenait à se concentrer étaient les visages pleins de joie de ses deux cibles. Neberal fit disparaître l’illusion d’un revers de la main et posa sur le bélua un regard sombre.
« Fais les souffrir. »


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Mer 10 Déc 2014, 12:05




Opalyne et Abel ressortirent de l’antre des créatures infernales en se dirigeant vers la bordure de la forêt des murmures. Cette fois-ci, le bélua n’avait plus besoin des injonctions de la démone pour trainer le pas. C’était même elle qui le devançait d’une courte tête, visiblement bien plus résolue que lui à accomplir leur sombre besogne. Bien qu’elle ait repris son apparence humaine, sans doute autant pour le conforter que pour passer inaperçue, Abel n’aimait pas ce qu’il voyait dans son regard, et elle le savait. Qu’un démon puisse trahir ainsi leur sang était à ses yeux un crime grave, qu’elle rejetait avec violence, sans doute un peu trop pour être honnête. Elle ne voulait pas imaginer que ce soit acceptable, car cela voudrait dire qu’elle aussi pourrait peut-être se laisser aller à une autre vie…
Sans prévenir, un crépitement retentit soudain dans l’air et le cœur du bélua rata un battement lorsqu’il vit la démone s’embraser littéralement. Cela ne dura qu’un instant, mais des flammes violettes étaient venues lécher l’ensemble de son corps dans une spirale effrayante, avant de s’évanouir comme elles étaient venues. Opalyne se tourna vers lui, avec cette lueur si particulière dans le regard. C’était cette lueur qu’il cherchait à chaque instant lorsqu’il l’accompagnait. Il savait qu’elle était devant lui en ce moment, la démone qu’il appréciait.
« Ça ne m’enchante pas plus que toi, tu sais ? Je n’ai pas que ça à faire de courir après des magiciens. Je n’aurais pas accepté de venir jusqu’ici et de nous entrainer là-dedans si je n’avais pas vraiment besoin de profiter de l’influence de Balefer. Crois-moi, s’il tient parole, tu pourrais bien apprécier la suite des évènements. »
Abel resta muet. Les plans sournois de la démone lui importaient peu à cet instant, et quelle que puisse être cette fameuse suite des évènements, tuer de sang-froid deux innocents, dont l’un avait renoncé au mal pour partager un petit peu de bonheur avec celle qu’il aimait, elle ne pourrait jamais justifier ce qu’il allait être obligé de faire. Contrairement à la démone, le bélua n’était même pas inquiet de savoir comment il allait procéder. Ils semblaient si insouciants qu’ils se méfieraient certainement de rien. Ce serait un jeu d’enfant pour lui de parvenir à eux. Opalyne pourrait ainsi apparaître au cœur de la cité dans laquelle ils auraient trouvé refuge, et en quelques coups de griffes c’en serait fini de leur belle romance. Le démon avait l’air faible, influençable, et c’était sans doute ce qui l’avait poussé à se détourner des siens, car jamais un seigneur démon n’aurait pu imaginer vivre auprès d’une magicienne. Quand à cette dernière, l’effet de surprise aurait sans doute raison de ses tours avant qu’elle ne se rende compte de la menace qui pesait sur elle.
« Tu ne dis rien ? »
Opalyne était toujours plantée devant le bélua, l’observant de ses petits yeux noirs. Sous sa forme humaine, Abel l’aurait presque trouvée gentille, mais c’était sans compter sur la sombre nature qu’elle cachait derrière son apparence angélique.
« Je ferais ce que tu attends de moi, mais n’espère pas que je m’en réjouisse. Tu finiras par détruire une partie de mon être. »
La démone s’approcha de lui et lui pris la main pour l’entraîner à sa suite. Etait-ce pour le rassurer ou pour qu’il avance plus vite ? Abel préférait se raccrocher à la première option, se gardant de prononcer le moindre mot jusqu’à ce qu’ils aperçoivent enfin la cité où les magiciens avaient trouvé refuge.

La vérité était que la démone était consciente qu’elle lui en demandait beaucoup. Elle se moquait bien de l’histoire d’amour qui allait bientôt prendre fin, car elle n’éprouvait aucun sentiment pour ces pantins qui allaient bien lui servir. Mais concernant le bélua, c’était différent. Elle avait besoin de lui. Sans Abel, elle n’était qu’une démone mineure qui aurait été bien incapable de faire le moindre mal à qui que ce soit, quand bien même elle l’aurait souhaité ardemment. Au jour de leur rencontre, la ruse lui avait permis de surpasser un bélua ne soupçonnant pas encore ce que son totem pouvait lui apporter. Mais aujourd’hui, elle comprenait tout le potentiel du fils de Phoebe. Il pouvait tuer pour elle, il pouvait la protéger, et dans son ombre elle grandissait et accroissait son influence à l’abri de ses pairs. Elle voyait en lui une myriade de possibilités, toutes plus intéressantes les unes que les autres. Un jour, si elle manœuvrait habilement, Abel pourrait lui aussi acquérir de l’influence parmi son peuple, et elle aurait alors à sa botte l’un des totems béluas. Que pouvait-elle rêver de mieux pour son protégé ? En y réfléchissant bien, il y avait mieux, mais elle n’osait y penser. Tout ce qu’elle avait à faire était de le conforter dans son sentiment de puissance, lui montrer qu’il était fort et qu’il pouvait réclamer plus que ce qu’il avait actuellement. Cette envie, ce désir perfide qu’elle lui insufflerait pourrait certainement le porter plus haut encore… C’était pour cela qu’elle était sur ce monde, et alors que le bélua gravirait les échelons de son peuple, la démone accroîtrait son importance parmi les siens. Loin était le temps où elle n’était qu’une pauvre créature, prête à venir en aide à toutes les âmes perdues en échange de quelques jours de leur vie…

« Comment tu comptes entrer ? »
Abel observait fixement la cité. Il y avait quelques gardes qui semblaient questionner les arrivants aléatoirement devant l’accès principal, mais, comme c’était souvent le cas, ils ne semblaient pas bien zélés à la tâche… Le plus dur serait certainement de trouver leurs cibles, car si la cité n’était pas bien grande, il y avait quand même quelques dizaines d’habitations. Mais dès lors, ce ne serait plus qu’une formalité…
« Je pourrais passer juste sous le nez des gardes qu’ils ne me verraient même pas. Je ne suis personne. Je n’ai ni l’air d’un brigand ni d’un démon. Qui se méfierait de moi ? »
Le bélua n’eut pas besoin de répéter la scène dans son esprit bien longtemps. Laissant glisser sa main dans le dos de la démone, il se dirigea vers la route et s’avança nonchalamment vers les portes de la cité. Il se mêla à un petit groupe qui s’y dirigeait lui aussi et, comme prévu, les gardes le regardèrent à peine. Se contentant de baisser les yeux, feignant la crainte et la soumission, il pénétra dans la ville sans encombre. Les ruelles étaient parcourues de badauds qui furetaient ici et là, vacant chacun à leurs occupations. Abel remonta l’allée sur laquelle il se trouvait, observant discrètement chaque visage, épiant chaque conversation. Des banalités, des figures renfrognées, d’autres enjouées. La traque qui commençait réveilla en lui un instinct qu’il connaissait bien. Voilà que son totem se réveillait, semblant désireux de prendre part à la chasse qui se menait sans lui. Mais il était trop tôt pour le laisser se manifester. Le bélua réprima son esprit animal, tâchant de rester lucide, et se glissa entre deux maisons pour changer d’allée.
Le manège dura assez longtemps, comme il s’en était douté, mais alors qu’il continuait de passer machinalement ses yeux sur tout ce qui l’entourait, faisant tout son possible pour avoir l’air de se promener passivement, son esprit animal franchit sans crier gare une partie des barrières qu’il lui imposait. Ses yeux s’étirèrent et ses deux longues fentes noires se posèrent sur une jeune femme qui venait d’apparaître dans son champ de vision, un panier bien garni à la main. Abel poussa un long soupir. Il aurait préféré ne jamais la trouver, qu’elle soit en réalité déjà loin d’ici avec son démon d’amant. Mais non, elle s’avançait vers lui, et le dépassa sans le remarquer. Feignant d’avoir oublié quelque chose, le bélua fit volteface et commença à la filer, espérant qu’elle le mène directement à sa demeure, ce qu’elle ne manqua pas de faire.

Elle habitait une petite maison de bois, ni luxueuse ni délabrée. Elle semblait parfaite pour accueillir un couple. Sans doute avait-elle appartenu à la famille de la magicienne. Faisant un tour rapide, Abel aperçut furtivement un homme par la fenêtre qui, bien qu’il n’ait pas eu beaucoup de temps pour observer ses traits, ne pouvait être que sa cible principale. Il y était. Il n’était plus question de reculer à présent… Peut-être aurait-il mieux fait d’attendre la nuit pour se faufiler chez eux et les tuer dans leur sommeil, mais quelque chose poussa le bélua à agir sans tarder. Peut-être espérait-il que le jour fasse échouer sa tentative, que la garde l’arrête à temps. Peut-être son totem le poussait-il à fondre sur sa proie maintenant qu’il l’avait à sa portée. Quoi qu’il puisse en être, le bélua s’approcha frontalement de la maison, frappant à la porte en improvisant totalement son entrée.
Le magicien ne tarda pas à ouvrir et, sans lui laisser le temps de tirer totalement l’épaisse pièce de bois, il la poussa violemment, projetant le pauvre homme en arrière, sonné, et lui laissant le champ libre pour pénétrer dans la maison en refermant soigneusement la porte derrière lui.
La femme qu’il avait suivie lui lança un regard furieux, s’approchant d’un air menaçant alors que son amant se relevait péniblement.
« Mais qu’est-ce que c’est que ces manières ? Sortez d’ici ! »
Abel posa sur elle un regard triste que le magicien décela immédiatement. Son expression changea de la colère à une peur bleue, et son visage devint blafard en un instant à peine.
« Qu’est-ce qui se passe, tu le connais ? Je n’hésiterais pas à appeler la garde. »
La pauvre femme ne comprenait pas le mutisme de son mari. Quelques instants de silence passèrent, avant que le pauvre homme ne parvienne à articuler quelques mots.
« C’est… c’est ma mère qui vous envoie ? »
Abel sentit une partie de ses forces l’abandonner. C’aurait pu être l’œuvre du dilemme terrible qu’il avait à affronter, mais en réalité ce n’était pas le cas. Il savait très bien où partait son énergie. Bien qu’absente de la pièce, il pouvait sentir une aura familière, déjà bien présente.
« Je suis tellement désolé… »
Opalyne se matérialisa derrière la jeune femme qui ne put que sentir qu’elle était là avant qu’un poignard ne traverse son cœur. Les yeux du magicien se chargèrent de larmes, mais aucun son ne put sortir de sa bouche jusqu’à ce qu’une patte puissante ornée de griffes acérées ne vienne lui trancher la gorge. Les deux corps tombèrent l’un contre l’autre et leurs regards eurent tout juste le temps de se croiser avant que la flamme qui les animaient ne s’éteignent à jamais.
La démone resta bien cachée dans la maison, tandis qu’Abel en sortit discrètement. Il remonta la rue principale jusqu’aux portes, quittant la ville jusqu’à l’orée de la forêt, où la démone réapparut près de lui. Malgré le regard bienveillant et la caresse que la démone déposa sur sa joue, son cœur semblait peser plus lourd que jamais. Tel était le prix à payer lorsque l’on pactisait avec le démon.


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