Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~
◈ Parchemins usagés : 2293
◈ YinYanisé(e) le : 24/05/2014
◈ Activité : Horticultrice
 | | Mar 17 Juin 2014, 00:19 | |
| " Mur, je suis surprise que tu ne te sois pas effondré sous le poids des bêtises de tous ceux qui ont écrit sur toi. "
Le fameux empilement de brique auquel elle faisait face avait perdu depuis longtemps de sa teinte d'origine. On y voyait encore les quelques traces de divers messages, la plupart indéchiffrables à présent car effacés, du moins en partie, depuis belle lurette. Léto fit glisser sa main sur la surface, elle sentait le poids des mots qui ont été apposé ici, certainement pendant des siècles. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, tous ces graffitis n'étaient pas que l'œuvre clandestine de jeunes orphelins de rue. Il y avait divers manières de faire passer un message en public : les écrits, les discours, les bardes, les lettres, et aussi les graffitis.
Les mentalités ont tout de même assez changé à cette époque et peu d'entre eux acceptent cet art barbare. Il n'en reste pas moins que certaines personnes souhaitent se faire entendre de la manière la plus spectaculaire qui soit. Et si ces derniers n'en ont pas les moyens, ils font appel aux graffeurs : sous leur apparence de peintres, possédant des talents prononcés dans la maîtrise des couleurs, ces "voyous" se laissent payer par les plus offrants pour faire parler leur employeur.
Un rappel important doit se faire passer à la populace ? Du genre mariage, visite célèbre et autres gâteries ? Un graffeur se fait payer et appose le message bien en vue sur un mur abandonné, inutilisé. Quelqu'un souhaite porter des accusations en public ? Inceste, adultère, meurtre ? Le nom sera peint en gros, voire même son portrait représenté, dans le cas d'une tête mise à prix par exemple. Louer les exploits d'une certaine personne, des supporters souhaitent montrer leur soutien, une faction veut marquer son symbole en gros sur les murs ? Pour un grand héros, une nouvelle tête dans la politique ou un nouveau né dont la naissance était attendu ? Les messages seront transmis. Et tout cela dans le plus grand secret : le payeur demeurant souvent anonyme, moins pour le graffeur qui doit bien nourrir sa réputation.
Le graffiti reste toutefois un art qui possède comme valeur le respect. Rares sont les graffeurs qui acceptent d'être à la solde des criminels. Ils se considèrent à l'égal des crieurs public, sauf qu'ils écrivent au lieu de parler. De même, jamais les graffitis seront peints sur une demeure habitée, sauf cas exceptionnel où les habitants-mêmes sont accusés – du genre "ici repose le traître" – ou souhaitent passer un sublime message à leurs voisins – "ne t'approche plus de ma fille, Gregor !". Le support sera alors majoritairement un pan de mur dont personne ne se soucie du sort. Enfin, les graffitis ne sont pas des vulgaires phrases que n'importe quel demeuré pourra reproduire : le client se doit d'être satisfait par le travail accompli. Ainsi l'utilisation des couleurs restera judicieuse, les mots importants seront signalés de diverses méthodes, bref ce sont des dessins ! Le travail ne doit en aucun cas être bâclé. Ceci doit être répété maintes fois : c'est un art. Évidemment, qui sème le vent récolte la tempête, ainsi le graffeur aura pour devoir d'effacer lui-même ses œuvres quand ils n'auront plus aucune utilité.
Ce métier reste tout de même assez peu endossé depuis que les cas de vandalisme se sont empilés. Les graffeurs actuels se tournant surtout vers la peinture murale ou le design des armoiries et autres pour se payer leur miche de pain et par crainte de ternir leur réputation. Mais on ne louera jamais assez leur efficacité.
Léto a toujours eu un faible pour la peinture, bien qu'elle n'ait jamais peint une toile comme le ferait les peintres lambdas. Non, son corps lui-même lui servait de support, lui permettant d'améliorer son talent en toute circonstance. Elle avait bien besoin d'engrosser sa bourse depuis son arrivée à Mégido. L'Orisha s'était alors livrée à l'art du tatouage sur quelques clients, elle aida également à repeindre le mur d'une grande maison pour une famille fortuné, elle participa même à la confection du nouveau logo d'une entreprise. Mais tout ceci était trop futile à ses yeux, cela n'avait rien de grandiose et surtout ce n'était pas à temps plein : elle ne possédait pas une boutique à elle pour accueillir tout le monde pour des tatouages, tous les murs n'avaient pas à être repeint et ce n'était pas tous les jours qu'on l'appellera pour réaliser des blasons. Il lui fallut quelque chose à temps plein, une occupation plus stable. Ainsi Léto se désigna pour devenir graffeuse, depuis qu'elle avait posé ses yeux sur ce fameux mur qui ne ressemblait plus à rien.
Elle proposa alors ses services auprès de l'Eorishaze. Bien qu'ils restèrent septiques, ils acceptèrent de l'engager quand ils purent admirer ses capacités, à l'unique condition qu'elle repeint comme il faut ce mur qui leur servira comme support pour les messages importants de la Haute. Ainsi Léto travailla comme graffeuse pour les Eshus, mais ses services restaient disponibles à qui voulaient faire passer un message n'importe où, n'importe quand et à n'importe qui, tant qu'il sera fait avec classe.
La nuit tombant, le mur recouvra de sa couleur d'antan. Elle remballa ses pinceaux usés et signa dans un coin son premier message publique : "J'ai repeint ce mur pour vous."  
By Jil ♪ |
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