Un préjugé rependu voulait que n'importe quel paysage, même les plus magnifiques, soit plus macabre, mélancolique, et gagnait parfois un petit côté romantique, une fois que l'obscurité avait recouvert les terres. Ainsi, tout la nuit paraissait si lugubre... Pourtant, alors que la matinée touchait à sa fin et que le soleil était des plus hauts dans le ciel, Lily-Lune se trouvait face à un paysage de désolation et de destruction tel que de nuit ou de jour, le même sentiment devait s'emparer des êtres osant s'aventurer sur ses terres mortes. Dans les terres arides, tout n'était que ravage et destruction. La vie semblait avoir totalement déserté les lieux. Plus aucun arbre, pas même les ruines d'une ancienne battisse, et les animaux devaient fuir un tel endroit. Comment arriveraient-ils à survivre alors qu'il y avait aucun point d'eau à l'horizon, pas l'ombre d'un brin d'herbe? La nature, dont Lily-Lune en tant qu'Orine était tout de même assez proche, qui pouvait créer des merveilles et accomplir les chefs-d'œuvre les plus splendides et les plus élégants, avait aussi en son pouvoir celui de massacrer ses créations, par le biais de catastrophes volcaniques, comme c'était le cas ici. Mais pourquoi? Aujourd'hui, on pouvait sentir l'omniprésence de la mort dans ses lieux désolants. Lentement, pensive, la jeune femme marchait sur la lave sèche qui recouvrait tout depuis un long moment déjà. Elle se trouvait en ces lugubres lieux pour une raison bien précise qu'elle ne devait pas perdre de vue, et ce n'était pour faire une complainte ou se lamenter sur le triste sort de ce qui devait être autrefois un coin tout à fait charmant et prospère.

Seule depuis bien trop longtemps; bien qu'entourée d'un tas d'amis plus ou moins proches et de connaissances, de son peuple, dont les muses du conseil qui la bichonnait parfois de façon excessive, et bien qu'ayant un maitre; elle avait décidé de se lier avec les animaux. Car en réalité, aucun de ses semblants ne lui inspirait totalement confiance. Peu importe les belles paroles qu'ils semaient au vent, les nobles gestes dont ils se vantaient et la fidélité qu'ils lui clamaient, Lily-Lune avait un mal fou à ne pas se montrer méfiante et suspicieuse envers les autres. Après tout, ils avaient des ambitions, une histoire personnelle, des buts ) atteindre, et si pour cela il fallait éliminer, tués, trahir, hésiteraient-ils vraiment à se débarrasser d'elle, notamment? Les relations humaines ne la satisfaisaient pas. Elle avait besoin de quelque chose de plus profond. Pendant un temps, elle avait vivement songé à devenir mère. Les joies de la maternité l'auraient certainement changé en une tout autre femme. Seulement, pour cela, il fallait bien procéder à l'acte charnel qui terrifiait autant Lily que la dégoutait. Certaines blessures, quelques traumatismes, restaient bien enfouis en elle, et à cause de cela, elle ne pouvait supporter qu'on la touche. Avoir des enfants paraissaient alors bien compliqué. A défaut, elle avait décidé de tisser un lien particulier avec les bêtes. Et c'était ici, sur les terres arides, qu'elle avait la possibilité de trouver des œufs d'animales ailés. Assez paradoxale de trouver un morceau de vie dans cette aire de mort. Mais peu importe, elle élèverait ses petites créatures avec amour et soin.

Soudainement, Lily-Lune s'arrêta et se laissa tomber sur un morceau de lave légèrement surélevé, comme un banc. Venir seule avait été pure folie. Comment allait-elle pouvoir trouver ces précieux œufs? Il fallait creuser, et cela paraissait bien compliquer... Long. Et une fois n'est pas coutume, elle n'avait pas exactement la tenue adaptée à des rechercheras intensives au sol, et de surcroit, sous un soleil de plomb. Elle abordait une courte jupe noire; et un haut des plus originaux, laissant la majeur partie de son petit corps blanc et fin à l'air libre, comme ses longues jambes à l'allure si frêle, avec au bout, des petites chaussures sombres simples. Elle dégageait une telle fragilité... Le moindre effort semblait pouvoir la briser. Aussi, elle dissimulait tout son être sous une épaisse cape bordeaux, fermé, qui ne laissait qu'à peine entrevoir ses vêtements. La capuche tombait sur son dos, ainsi, seul son visage était clairement visible, avec ses si longs cheveux d'ébène vaguement attachés par une élégante pince ayant appartenu à sa mère. La jeune Reine soupira, consciente qu'encore une fois, elle aurait peut-être du écouter les muses qui lui déconseillait cette petite expédition, surtout seule. Mais le tempérament de feu de Lily avait pris le dessus, et, pour ne pas changer, elle ne les avait pas écouter.

« Et voilà le résultat»

Murmura-t-elle dans un souffle sarcastique. Elle se releva tout aussi brusquement qu'elle s'était levé, quoique ces gestes ne soient pas emprunt d'une grâce mystique et féline. Sans vraiment savoir pourquoi ni comment, elle s'était subitement regonflé de courage et d'envie et s'apprêtait à débuter les recherches. Seulement, un bruit attira son intention. Tournant vivement la tête, elle aperçut au loin une fine silhouette qui se dessinait. Sans chercher à comprendre, préférant analyser son potentiel adversaire, elle bondit se cacher derrière ce qui semblait être une tour de roc.

HRP:

Lily-Lune laissa un sourire vaguement amusé flotter sur ses lèvres. La situation commençait à l'exaspérer, et la jeune inconnue qui se trouvait devant elle avait beau avoir l'air d'être une gentille fille un peu trop téméraire, pour ne pas dire beaucoup trop bavarde, elle la ralentissait dans ses projets. Mais elle ne voulait pas paraître impolie, et écouta paisiblement les paroles de son interlocutrice qui avait manifestement quelques tics de langage. En quelques minutes, elle répéta deux fois la même expression « il est vrai », ce qui avait contribué à faire apparaître le petit sourire sur le doux visage de l'orine. Elle hésita aussi quelques instants à mettre en garde cette inconsciente demoiselle à faire un peu plus attention à ces paroles et à ces gestes, car en effet, elle ne se privait pas d'étaler des morceaux de sa vie, certes flous et de façon imagée, mais elle fournissait ainsi bien plus d'informations qu'elle le croyait, et quelqu'un de mal intentionné pourrait s'en servir contre elle. La jeune fille alla même jusqu'à montrer de façon bien peu subtile la cicatrice qu'elle avait sur le front, fière comme un pan, elle exhibait sa blessure sans gêne. Après une courte hésitation, Lily-Lune décida de laisser tomber et de ne faire la remarque à la jeune fille que si elle recommençait. De sa voix envoutante, la jeune orine répondit toujours aussi calmement:

« Dans vos propres paroles se trouvent le problème. Je cite: vous avez 'l'habitude de penser'. Ainsi, vous laissez vos préjugés et les clichés parler à la place de votre raison, et bloquer toutes vos capacités d'analyse simplement parce que je suis dissimulée sous une cape. Je suis navrée de l'affront que je vais vous dire, je ne le pense pas réellement, je tiens juste à vous faire faire comprendre deux ou trois choses, mais vous me paraissez bien naïve. La plume ne fait pas l'oiseau, et ceux qui commettent les plus grands vices et crimes ne sont pas nécessairement cachés par leur vêtements, bien au contraire. Ce sont juste des lieux communs, des stéréotypes.»

Elle laissa un très bref soupire s'échapper. La plupart des gens avaient l'esprit remplis de ces fausses idées et ne cherchaient même plus à réfléchir par eux même, considérant ces aberrations comme la simple et pure vérité.

« Et j'aurais beau juger sur l'honneur ne pas avoir de mauvais intentions, me croiriez-vous pour autant et me laisserait partir le cœur léger? J'en doute. Et si c'était le cas, là encore, vous seriez bien candide. Surtout après avoir montré autant d'hostilité à mon égard.»

Lily-Lune fit quelques lents pas en avant, de sa démarche aérienne et gracieuse, aussi fluide que le vent.

« Et votre dernière phrase incite à croire que malgré tout mes dires, vous êtes encore réticentes à croire en ma bonne foi. Mais je tiens à vous faire remarquer que vous êtes bien irrespectueuse et arrogante, et que vous devriez faire bien plus attention.»

Si elle tenait tant à voir le visage de Lily-Lune, elle n'allait pas être déçu. Lentement, la jeune femme leva les mains vers sa capuche pour effleurer le tissu pourpre et le pousser légèrement. La cape tomba sur les épaules de l'orine, dévoilant son visage d'ange, la blancheur immaculée de sa peau contrastant avec le noir d'encre de ses grands yeux de poupée et l'ébène de sa si longue chevelure qu'elle délivra de sa cape pour les laisser voler au gré des bourrasques. Un léger sourire aimable étira les lèvres naturellement rouge sang de la jeune orine, qui rayonnait comme un ange. De sa voix de velours, elle ajouta:

« Je suis Lily-Lune Araé, la Cheffe du Conseil ou Reine des Orines, si vous préférez.»

Maintenant, si la jeune fille n'avait pas compris pourquoi elle se dissimulait, elle était bien stupide. Il y avait bon nombre de contrats sur toutes les têtes royales, et Lily-Lune ne faisait pas exception à la règle. Et en tant qu'Orine, bien qu'elle est déjà un maitre, elle attirait les convoitises de ceux qui la réduirait bien en esclavage.

« Bien que parler avec vous soit très agréable, vous me faites perdre mon précieux temps. Ainsi, je vais devoir continuer ma route. Je dois rentrer au plus vite à Maëlith, et comme vous l'aurez compris, j'aimerai bien y retourner avec ce que je désire tant.»

Lily-Lune ne se retourna d'abord pas. Elle se contenta de continuer d'avancer, quoique lentement car il aurait été impolie de partir alors que la jeune fille lui répondait. Son pas ralentit jusqu'à ce qu'elle s'arrête complètement. Un petit soupire s'échappa de ses lèvres rouges sang. Encore une fois, elle aurait tellement de choses à souligner, à remarquer et à critiquer quant aux paroles de la jeune Ombre. Seulement, elle avait perdu assez de temps, et ne désirait pas s'attarder encore et toujours sur des futilités: la seule aspiration qui comptait était les œufs, ses si précieuses choses dont elle prendrait soin jusqu'à leur éclosion et qu'elle pourrait alors choyer. Elle ignorait ce qui sortirait de ces trouvailles, mais cela ne l'importait guère, quel que soit l'animal, elle en serait heureuse. Enfin... Pourvu que ce ne soit pas une insecte répugnant volant. Doucement, Lily-Lune se retourna pour poser ces yeux sur son interlocutrice. Elle lui adressa un petit sourire et lui demanda simplement:

« Comment vous appelez vous?»

Une question bien innocente, banale et commune. Pourtant, elle signifiait beaucoup. Car Lily-Lune ne s'intéressait que très peu aux personnes sans intérêt, et si elle voulait savoir cette petite information, c'était simplement parce qu'il valait mieux mettre un nom sur un visage que l'on allait côtoyer quelques heures. Elle hésita quelques instants sur ses dires à venir. Elle murmura lentement tout de même :

« Si vous tâchez réellement de sortir des préjugés de votre race, éviter de mettre sur le dos de votre espèce tout ce que vous considérez comme des défauts.»

En plus d'être un comportement stupide, c'était d'une facilité affligeante. Se reposer sur les stéréotypes d'une race pour justifier son comportement et ses actes était plus une excuse qu'une réalité. Lily-Lune aurait presque pu en rire, songeant à ce qu'elle devrait faire si elle était une parfaite petite orine, naïve, crédule, peureuse et serviable, à fuir face aux moindres dangers et se donner corps et âme à son maitre sans réfléchir. Telle était la nature de sa race. Et pourtant, elle n'avait jamais été ainsi. Car malgré des prédispositions à certains traits, les hommes n'étaient seulement que ce qu'ils souhaitaient être, à leur naissance, ils n'étaient rien, qu'une enveloppe à remplir, dont chaque geste dessinait peu à peu son essence. La mauvaise foi n'était pas de mise.

« Et si nous parlions en marchant? J'aurai ainsi plus de chance de trouver ce que je convoite, et nos discussions ne me feront pas perdre de temps.»

Ses yeux sombres ornés de grands cils étaient vrillés sur l'Ombre et semblaient la transpercer. Lily-Lune a toujours eu un regard profond et envoutant, et ce, sans effort. Ses prunelles étaient comme deux poignards, des lames acérées mais si ensorcelantes. La jeune orine fit quelques pas sur le côté avant de se mettre en marche pour de bon.

Je n'eus point de réponse à ma proposition d'aide . En même temps ... Vu où elle en était et le titre qu'elle avait obtenu après -je suppose- de dures épreuves , elle devait pas avoir de mal à se débrouiller seule . Je pourrais jouer les boulets plutôt que les aides utiles en fait . Mais elle posa tout de même une ultime question , démontrant qu'elle n'en avait pas non plus rien à faire de moi :

- Comment vous appelez vous ?

Ah , en voilà une question aux multiples réponses ... Je réfléchissais à y répondre de manière encore subtile , ne voulait point perdre l'estime que tout le monde et personne avait en moi . J'avais une réputation de fille originale qui ne faisait jamais comme tout le monde à tenir , et je n'allais point faillir à ma mission ! Mais le temps que je réfléchisses à ma sentence , elle rajouta autre chose :

- Si vous tâchez réellement de sortir des préjugés de votre race, éviter de mettre sur le dos de votre espèce tout ce que vous considérez comme des défauts .

Il n'y avait pas photo ... C'était elle la Reine , pas moi . Elle avait réponse à toutes mes élucubrations sans faillir , avec un raisonnement plus logique tu meurs . Moi , si je devais être la reine de quelque chose ... J'espérais tant obtenir le rôle d'Esprit de la Mort ... Mais j'étais la Reine des défauts pour le moment je crois . Ou des bourdes ... Je n'eus encore point le temps de répondre , semblant pressée , elle se stoppa dans son élan pour lâcher d'une voix dure , alors que ses prunelles sombres me transperçaient comme des lames :

- Et si nous parlions en marchant ? J'aurai ainsi plus de chance de trouver ce que je convoite, et nos discussions ne me feront pas perdre de temps .

Je souriais d'un air ironique alors qu'elle démarrait déjà au pas de course , sûrement vraiment impatiente de trouver ce qu'elle cherchait . La chose sur laquelle nous nous étions fâchées , un oeuf d'animal ailé si j'avais bien compris . je lui emboîtais le pas en silence pour quelques minutes , avant de lancer le regard bas et rieur :

- Vous devez être une femme forte malgré l'allure frêle et délicate que vous laissez voir , surtout pour en être arrivée sur le trône des Orines ... J'ai l'impression d'être encore loin du trône de mon espèce en vous voyant si confiante , capable de parer la moindre de mes idioties ...

Je la suivais en regardant avec intérêt le paysage désolé que nous arpentions , désert et inhospitalier ... Une petite lueur de lassitude se lisait certainement au fond de mes prunelles . je ne laissais point voir ceci et reprenais mon regard dur et froid , empli d'une neutralité sans failles , la vitre teintée qui empêchait quiconque de savoir ce que je pensais en plongeant son regard dans le mien .

- Pour faire simple , mon nom est Sora .

Lily-Lune avançait lentement sur la terre battue des Terres Arides. Tout n'était que mort, ici, chaos et désespoir, un lieu désolé que la vie semblait avoir quitté. Il était tellement ironique que ce soit celui choisis par les bêtes en tout genre pour y abandonner leurs œufs. Pauvres bêtes … La jeune femme leva les yeux vers le ciel, contemplant quelques instants l'horizon rougeoyante aux airs apocalyptiques. Des couleurs flamboyantes s'entremêlaient avec des nuages de cendre, menaçants et lugubres. Pourtant, quoique ce paysage était mort et désolée, il conservait une espèce de beauté sauvage que la Vénus savait apprécier. Elle observa distraitement les alentours, sans dire un mot, avant de tourner quelques instants la tête en direction de la Jeune Ombre qui venait de reprendre la parole. Lily lui jeta un regard bien étrange, mais bien à elle. Froid et distant, il pouvait paraître méprisant bien que ce ne soit pas le cas, la jeune femme ne faisait que réfléchir au cas de cette étrange demoiselle et à sa façon de se comporter. Ainsi, cette petite Sora convoitait le trône de sa race ? L'Orine en était presque surprise, au fond, car cette jeune fille était bien loin de l'idée qu'elle se faisait de l'Esprit de la Mort. La Grande Faucheuse n'était-elle pas censée être un être des plus froid, une créature vide et cruelle qui n'a que faire du monde des mortels, des vivants, et des balivernes qui faisaient la politique d'entre les races, quelqu'un de mystérieux et inconnu qui ne se présentait jamais sous son véritable jour? Si, bien sûr que si. Lily-Lune se souvint du grand congrès des Chefs de Race qui avait eu lieu pour l'affaire Dante de Mallet. A cette époque, un bien étrange personnage était venu, un être qui avait fait frissonner l'assemblée. Elle doutait que Sora soit capable de telles choses. Mais peut-être n'était-ce pas forcement une mauvaise chose, le peuple des Ombres s'ouvriraient surement plus au monde extérieur et lèverait quelques secrets qui l'entourent. Les relations pourraient être améliorer et très certainement plus agréable. L'Esprit actuel était aussi plutôt dans cette optique. Soit. Pourquoi pas. C'était au fond plutôt arrangeant que ceux qui convoitent cette place aussi importante soit ouvert d'esprit. Et cette jeune Sora devait simplement apprendre l'art de la parole et deux ou trois choses. Elle pourrait faire un bon chef.

« Bien. Sora. J'ignore votre véritable âge puisque votre condition d'Ombre m'empêche de faire une bonne estimation, vous pouvez tout aussi bien être aussi jeune que vous le paraissez que deux ou trois fois centenaires. Ainsi, je me permettrais de parler en vue de ce que je crois avoir compris de vous.»

Elle écarta délicatement du bout des doigts quelques mèches brunes de cheveux qui tombaient sur son visage si pâle.

«Vous êtes trop impulsive. Si parfois, c'est une bonne chose, je vous conseillerai de tempérer votre caractère pour tout les jeux politiques. Et peut-être de mieux dissimuler vos sentiments. Il est plutôt dur de faire confiance aux autres chefs, dans les temps qui courent. Laissez transparaître le moins de faiblesse possible, les autres se feront une joie de vous manipuler »

Lily-Lune était certaine qu'elle aurait pu faire faire ou faire dire à Sora ce que bon lui semblait, en s'y prenant bien. Mais ce n'était guère dans ces intentions. La Vénus préférait de loin la paix aux mésententes et aux guerres.

« Quant à vos petites idioties, si vous n'arrivez pas à les réfréner dans un premier temps, elles s'effaceront d'elles-mêmes. A force de vous faire mordre, vous prendrez garde. Je ne connais pas votre place dans la hiérarchie de votre peuple, mais vous n'êtes pas forcément si loin que ça du trône. Il n'y a aucun manuel, aucune école pour apprendre à gouverner, vous devrez comprendre toute les mécanismes au fur et à mesure que vous avancerez. Et j'ose espérer que vous ne vous êtes pas trop fait d'ennemis jusque là. C'est toujours mauvais pour les affaires.»

Mieux valait partir avec plus d'atouts en poche. Lily-Lune rit doucement, ajoutant plus légèrement :

« Quant à mon cas personnel, je vous dirais simplement de ne pas vous fier aux apparences.» Principe qu'elle appliquait aussi à son interlocutrice. Elle s'efforçait simplement de l'aiguiller comme elle le pouvait. « N'hésitez pas à m'écrire si vous parvenez à vos fins, je serais ravie de l'apprendre.» La différence entre les paroles que prononçaient l'Orine et sa voix, si claire et douce, mais au ton las était assez étrange. Mais c'était ainsi que fonctionnait Lily-Lune.

Dear Lily-Lune /O/:

« Bien. Sora. J'ignore votre véritable âge puisque votre condition d'Ombre m'empêche de faire une bonne estimation, vous pouvez tout aussi bien être aussi jeune que vous le paraissez que deux ou trois fois centenaires. Ainsi, je me permettrais de parler en vue de ce que je crois avoir compris de vous.»

400 ans ma chère , c'est pas tout jeune en fait . Et ça n'a pas amélioré mon caractère ... Non ça l'a pourri jusqu’à la moelle . Madame souhaitait donc en faire les frais ? Ça ne saurait guère tarder vu combien j'étais sous tension mais j'attendais qu'elle finisse : elle ne semblait pas aimer qu'on l'interrompe et je tenais à ce qu'elle prenne tout ce que j'avais à lui dire d'une traite , comme on étale une gifle sur la joue à quelqu'un .

«Vous êtes trop impulsive. Si parfois, c'est une bonne chose, je vous conseillerai de tempérer votre caractère pour tout les jeux politiques. Et peut-être de mieux dissimuler vos sentiments. Il est plutôt dur de faire confiance aux autres chefs, dans les temps qui courent. Laissez transparaître le moins de faiblesse possible, les autres se feront une joie de vous manipuler »

Me manipuler ? Pour prendre mon poing dans leur gueule ? Certes j'étais impulsive et m'en cachait pas d'ailleurs , exploitait même ce défaut avec assez d'attention . Contredire mes interlocuteurs et les exaspérer avec les défauts qu'il utilisait pour me qualifier , c'était bien là ma spécialité . Mes sentiments ... ? Je m'en contrefous , ses choses-là ne sont plus et si il est nécessaire , je ne cacherais point la haine grandissante que j'ai à l'égard de cette femme au fur et à mesure que se tienne ce discours interminable . Certes la politique ne m'intéresse pas pour ce côté parlementaire constant ... Constamment chiant .

« Quant à vos petites idioties, si vous n'arrivez pas à les réfréner dans un premier temps, elles s'effaceront d'elles-mêmes. A force de vous faire mordre, vous prendrez garde. Je ne connais pas votre place dans la hiérarchie de votre peuple, mais vous n'êtes pas forcément si loin que ça du trône. Il n'y a aucun manuel, aucune école pour apprendre à gouverner, vous devrez comprendre toute les mécanismes au fur et à mesure que vous avancerez. Et j'ose espérer que vous ne vous êtes pas trop fait d'ennemis jusque là. C'est toujours mauvais pour les affaires.»

Mes affaires ? J'en ai peu bien entendu , dans un milieu comme le mien , et les boss sont souvent passés outre la trappe , six pieds sous terre , sous leur pierre tombale bien souvent ... Quoique ses mafieux et bandits n'ont jamais vraiment eu de monument pour les envoyer au paradis pensez-vous et je savais que chacun de mes pas et de mes mots pouvait augmenter les années de mon éternité une fois à l'état d'âme errante sur le cadavre où l'on aurait plus craché que jeter de la terre en due sépulture .

« Quant à mon cas personnel, je vous dirais simplement de ne pas vous fier aux apparences ... N'hésitez pas à m'écrire si vous parvenez à vos fins, je serais ravie de l'apprendre.»

Voilà qu'elle en avait finie , et je dût me retenir pour ne pas passer pour de simples vulgarités dignes des paysans qu'on croise dans les marchés ou même les abominations de ceux qui vendent de l'humain par exemple . Je joignais mes mains dans mon dos , les retenant l'une l'autre , les pieds à plat sur le sol sans me balancer du talon aux orteils , silencieuse , toussotant pour me faire entendre , droite , les jambes fixes et collées . Je fixais l'horizon , souriant doucement , étouffant un petit rire .

« Je n'ai pas osé vous interrompre ... Mais je vous avoue qu'après 400 ans ... Surtout sans véritable éducation parentale , une auto-éducation ... Je me suis forgée un monde dont la carapace a été dure à forgée mais qui est bien là . Et qui se fout de toute morale surtout venant d'une inconnue . Je suis impulsive ? Vous êtes arrogante ma chère , et encore je suis polie , chacun ses défauts . »

Je fis quelques pas , légers , sans grand but , ne me rapprochant nullement d'elle sans pour autant m'éloigner . Poursuivant calmement bien que je bouillonnais intérieurement .

« Bien je crois que j'ai plus rien à faire ici . Je n'ai habituellement pas autant de patience et il m'étonne de ne pas avoir perdu mon calme pour étaler ma paume de main sur votre joue avant la fin de notre discussion mais je ne tenterais pas le diable . C'est ici que nos chemins se séparent mais laissez moi vous dire une chose . »

Je haussais les épaules , la fixant désormais dans les yeux .

« Et retenez-vous bien de vous jeter sur moi pour m'étrangler car ça ternirait tout ce beau discours digne de ces bourgeois qui m'ont tant méprisé par le passé et qui ne sont aujourd'hui plus là pour en parler , allez donc savoir pourquoi ... Ainsi , je voulais en venir aux faits suivants . Vous êtes la créature la plus méprisable que j'ai eu la farouche poisse de rencontrer de par ce monde , la plus ennuyeuse et moraliste . Je n'ai jamais eu autant de foutre une paire de claques à quelqu'un et ne me suis jamais autant contenue non plus d'ailleurs . Alors ne vous avisez plus de croiser ma route ma chère , nous ne vivons pas dans le même monde . Retournez donc chez les emmerdants aristocrates qui nous prennent tous de si haut , je me contenterais des joyeux citoyens de notre bas monde . »

Je terminais , quelques pas en arrière indiquait le fait que mon départ soit imminent .

« Sur ce adieu . »

Puis reprenais ma route , une mine froide fichée sur le visage , mes traits étirés en ce qui n'était qu'un bouche fine et lasse d'une conversation qui n'avait que trop durer .

Un charmant sourire étira lentement les lèvres ensanglantés de Lily-Lune. Une expression sans le moindre artifice et d'une sincérité touchante. Mais dans le contexte épineux d'une situation pour le moins complexe, ce simple sourire pouvait sembler bien cynique et moqueur, et en tout point déplacé. Et pourtant, elle souriait. Elle devait même se retenir de rire. C'était bien la première fois qu'elle tombait sur une Ombre aussi sotte et éperdument raccrochée à ses bêtises, et qui, au lieu de vouloir démontrer qu'elle n'était pas comme la Vénus la peignait, s'enfonçait toute seule et avait même l'air de vouloir creuser sa tombe, quitte à gratter avec ses ongles si on ne daignait pas lui fournir le matériel adéquate. C'était risible et assez pitoyable. Mais au moins, cela avait le mérite d'être vraiment amusant. « Quatre cents ans.» murmura-t-elle doucement. Elle n'avait aucun mal à croire qu'elle n'avait pas reçu la moindre éducation, elle aurait même pu le deviner seule tant l'Ombre était mal élevée, mais ce n'était peut-être pas le moment de relever ce détail. « Navrée de vous dire cela, Sora, cela ne risque pas de me faire monter dans votre estime, mais si vous ne l'avez pas compris, sachez que je n'en ai que faire, mais vous êtes une petite idiote qui malgré son grand âge se comporte comme une enfant. Et vous n'êtes strictement pas faites pour monter sur le trône. C'est tout ce que je voulais chercher à savoir, et à vous montrer.» La Vénus haussa distraitement les épaules. « Je vous paraît arrogante ? Je ne le suis pourtant pas. Du moins, je ne l'ai pas été avec vous. Je n'ai juste pas épancher de faux sentiments de joie ou de je ne sais quoi.» Encore quelque chose qu'elle se garderait bien de dire, mais elle n'avait pas besoin de se montrer présomptueuse avec des personnes comme elle. Mais seulement avec ceux qui représentaient une menace et qu'il valait mieux remettre à leur place. « Je me comporte juste comme un souverain lambda. Alors autant vous dire que si vous ne pouvez pas me supporter, vous ne tiendrez pas longtemps dans une salle remplie de politiciens avant de vouloir les fracasser au sol, et donc, de commettre l'irréparable et de faire éclater des guerres dans des terres assez troublées comme ça. Enfin, si vous dites avoir été inhabituellement patiente avec moi, je peux entrevoir pour vous un futur dans les grandes hiérarchies.» Elle écarta une mèche de sa longue chevelure sombre. « Quand à me jeter sur vous pour en finir définitivement, cela n'a pas traversé mon esprit. Non seulement je sais me tenir, mais contrairement à vous, je ne vous ai pas en horreur simplement parce que nos avis divergent.» C'était tout le principe d'une discussion.

Les bras croisés, Lily-Lune fit quelques pas sur le sol désolé des Terres Arides. « Il est clair que nous ne vivons pas dans le même monde.» Elle n'allait certainement pas dire le contraire. « Cependant, vous vous méprenez sur pas mal de points. Vous me traitez de bourgeoise méprisable et snobe, d’aristocrates et autres joyeux mots. Soit. Je n'ai jamais empêcher quelqu'un de se faire un avis sur moi, ni même de m'insulter. Mais puis-je vous faire remarquer qu'il ne doit exister qu'une seule et unique race sans hiérarchie, sans caste noble ou religieuse ?» Elle sourit. « Les Orines, mon peuple, vous l'aurez compris.» Du moins elle espérait sincèrement. « J'ai beaucoup changé en prenant la tête de mon peuple. Il y a quelques années, vous auriez vraiment pu me reprocher d'être arrogante.» Elle rit. « Mais diriger implique des sacrifices et des changements. Si vous tenez à rester vous même, je vous conseille vivement de passer votre chemin, ou de laisser quelqu'un, ne serait-ce qu'une seule personne, plus haut que vous.» Dans un petit soupire, elle ajouta. « Moi je n'ai pas eu le choix, et je ne sais pas ce que je ferais si on me proposait de revenir en arrière, au jour où tout a basculé.» Ce serait un choix bien compliqué. « En tout cas, je suis navrée que vous ayez pris mes paroles comme une accusation. Cela ne l'était en rien. Plutôt une … démonstration ? Une constatation ? Vous avez votre caractère, j'ai le mien. Les gens ne changent pas du tout au tout en un claquement de doigt, à supposer qu'ils le veulent. Personnellement, je ne tiens plus à changer, et je n'en ai strictement rien à faire qu'on me reproche d'être froide comme un iceberg ou arrogante. Au moins, les gens, dont vous faisez certainement partie, s'en retourneront bougeonnant, en me détestant et criant haut et fort leur indignation, mais tout s'arrêtera là. Et d'ailleurs, moi, je ne me souviens rarement d'eux. C'est un moyen comme un autre d'écarter les gens.» Il n'était pas dur de comprendre qu'elle n'aimait pas le contact. « Quant à vous, je voulais simplement vous faire comprendre, du moins une fois que je l'ai moi même compris, qu'être dirigeante ne vous scierait guère pour l'instant. Et vous l'avez vous même dit.» Elle sourit. « Je vous cite : je me contenterai des joyeux citoyens de notre bas monde.» Une brise légère se mit à souffler. Agréable sous la chaleur ardente de ce désert aride. « Jamais je ne demanderais à quelqu'un de changer. D'autant plus une inconnue. Et par dessus le marché, je ne comprends pas que vous ayez autant pris la mouche à cause d'un simple mot. Oui, vous êtes impulsive. Et c'est autant un défaut qu'une qualité.»

Lily-Lune soupira. Les heures défilaient et elle n'avait pas de temps à perdre, encore et toujours, avec cette Ombre caractérielle. « Maintenant, j'aimerais finir par trouver mon œuf, si vous le voulez bien. J'ai toute une bande de Muses en furie qui perdent patience à chaque fois que je m'absentes plus d'une heure.» Qui avait dit qu'être souveraine était de tout repos, et que l'on pouvait agir à sa guise ? « Et il commence à se faire tard. Chercher seule risque d'être long et fastidieux … Avez-vous encore quelques instants à m'accorder ou est-ce abuser ?»

« Quatre cents ans.» murmura la jeune femme aux cheveux noirs . Je me stoppais d'un soupir de lassitude extrême . Oui et alors ? « Navrée de vous dire cela, Sora, cela ne risque pas de me faire monter dans votre estime, mais si vous ne l'avez pas compris, sachez que je n'en ai que faire, mais vous êtes une petite idiote qui malgré son grand âge se comporte comme une enfant. Et vous n'êtes strictement pas faites pour monter sur le trône. C'est tout ce que je voulais chercher à savoir, et à vous montrer.» . Oh quelle surprise ! Moi qui avait bien dans l'idée que je me comportais toujours comme une capricieuse enfant du fait que je ne savais que récemment le fait que j'existais depuis 4 foutus siècles et qu'elle ne me disait quelque chose que je savais déjà par cœur . Je n'avais nullement besoin qu'on me fasse la leçon . Car finalement ce trône n'était rien de plus qu'un passage dans ma vie pour aider ma race qui m'avait si longtemps apitoyer . Je ne profitais que de ma vie et de ma liberté provisoire car si changements pour règne il devait y avoir , il y aurait , mais seulement dans la mesure où ma personnalité resterait condensée mais toujours la même . Le pouvoir change les gens et je ne voulais jamais me mettre à dos mes proches pour une simple histoire d'aider son peuple . Plutôt être égoïste que superficielle .

Elle se mit alors ... À ''vendre'' sa race comme une des meilleures de ses terres . L'envie d'éclater de rire fut tellement grande que je pouffais un instant sans me retourner . Je m'en foutais bien maintenant d'être impolie devant elle . Mais son discours ne me tenait pas en joug de quelque chose de tout à fait sérieux . Je trouvais ça purement ridicule peut-être parce que selon moi ... Je me demandais si je deviendrais ce genre de terrible personne à l'avenir en tenant un pareil discours pour les Ombres , et à vanter ce peuple-là croyez moi , ç'aurait pu être un spectacle terriblement comique ! « Je vous cite : je me contenterai des joyeux citoyens de notre bas monde.»

Un fin sourire se traça sur mon visage tandis qu'un air tout à fait sérieux le cachait un instant en faisant volte-face écoutant encore ce qu'elle avait de si intéressant à me faire comme morale . « Et il commence à se faire tard. Chercher seule risque d'être long et fastidieux … Avez-vous encore quelques instants à m'accorder ou est-ce abuser ? »

Je secouais comme pour remettre mes idées en place . Avant de répondre à tout ce discours futile qui me semblait ... Bien qu'ordonné , complètement bordélique . « À vous entendre ... On dirait que devenir roi et reine d'un peuple se résumé à monter dans la noblesse . J'ai dis que je voulais rester avec mes citoyens , avec ce peuple . Vos insinuations me font penser que vous creusez un énorme fossé entre les gens du peuple et cette noblesse aristocratique superficielle qui lèchent les pieds de leurs supérieurs en l'espoir d'un peu plus de pouvoir , comme toujours . Révolutionnerais-je donc l'idée qu'un souverain ne vit pas avec ses citoyens ? Mais uniquement avec sa noblesse ? Je comprends un peu mieux d'où viennent les dérèglements de ce monde dans lequel je piétine . » Je m'étirais un instant .

« Hum je suppose que ce serait vous faire insulte de vous abandonner à votre sort après avoir autant gaspiller votre salive pour des mots et une morale que j'oublierais sans doute dans quelques heures ... Puisqu'elle me paraît tout à fait illogique . Non ? » . Je soupirais à nouveau , ce discours m'épuisait moralement , cette guerre d'idéaux à coups de grands mots et de politesse tout autant . « Je dois vous avouer qu'après telle avalanche de préjugés j'aurais plutôt envie de prendre mes jambes à mon cou et de retrouver les simples discours de mes compagnons faits de mots simples , les seuls qu'ils savent utiliser eux , qui n'ont pas été enfant autonome et condamné à une éducation qui l'est tout autant et donc qui ont appris , malgré eux des choses que le bougre d'aristocrate ne saurait qu'à force de vie de famille , d'apprentissages longs et pénibles . »

Je me résignais , m'obligeant à aider cette contrariante jeune femme . « Et bien allons-y mais en vitesse . Je crains d'avoir un self-contrôle qui a tout de même ses propres limites . »

La jeune femme entrouvrit les lèvres dans l'espoir de répondre à Sora, mais elle n'en eut guère le loisir. Au loin résonnait le tambour infernal des sabots qui frappaient à vive allure la terre sèche et aride des environs. Et elle savait ce que cela signifiait. Rien de bon pour elle, en somme. Muette, elle contempla, avec une pointe d'appréhension dans le regard, le cheval blanc que l'on distinguait à l'horizon. Lui et sa cavalière vêtue d'une cape claire semblaient se diriger dans leur direction. La bête se détourna de son chemin au dernier moment, juste avant de rentrer dans l'Orine, qui ne bougeait pas, comme pétrifiée. Les Terres Arides n'avaient pas volé leur nom. Les parages étaient stériles et dénués du moindre brin d'herbe, de la plus petite étincelle de vie. Un soleil de plomb agressait les rares voyageurs. Le temps n'était guère clément, et les températures extrêmes paraissaient parfois dures à supporter. Mais l'atmosphère s'était affranchis depuis l'arrivée de la mystérieuse ombre blanche dont la colère bouillonnante irradiait malgré qu'on ne puisse distinguer ne serait-ce qu'un bout nez et que ces gestes soient tous emprunts d'une élégance d'un naturel déconcertant. D'un gracieux bond, elle descendit de sa monture et s'approcha en quelques pas lents et aériens de celle qui prétendait se nommer Lily-Lune. Quelques longues secondes s'écoulèrent. L'étrangère ne disait rien et ne faisait rien. La jeune femme qui avait tenu compagnie à Sora jusqu'alors semblait avoir changé. Le masque qu'elle arborait depuis le début de la rencontre avec l'Ombre était tombé, pour révéler le caractère d'une personne timide et gênée, comme une enfant pris la main dans le sac. Elle affichait une petite moue suffisante.

Un bruit sourd résonna. L'Orine se frotta la joue en grimaçant. La gifle n'était pas une grande surprise. Mais il y avait toujours un petit côté humiliant. Sans rien dire, la demoiselle grimpa sur le cheval, sans regarder Sora, et commença à retirer de ses cheveux tout les accessoires qu'elle n'aimait pas pour libérer ses longs cheveux, et enlever tout les éléments du costume qu'elle avait revêtue. Dans un soupire, l'étrangère lui dit. « Plus jamais tu n'agiras ainsi, Lilas. Tu mériterais que je te laisse te faire tourmenter jusqu'au suicide. » La voix était douce et suave, et ressemblait de façon assez frappante à celle de la dénommée Lilas, à ceci près que les intonations étaient d'autant plus claires et mélodieuses. « Ce n'est pas une blague, je suis loin de rigoler. Je suis terriblement déçue de ton comportement inacceptable. Nous parlons de cela à notre retour.» Elle se tourna vers Sora. Elle ne retira pas son manteau, mais il n'était guère difficile de voir les traits de la jeune femme. Elle était belle. Sa peau était pâle comme le lait et rougissait déjà sous les affronts de l'Astre du Jour malgré les maigres protections de la capuche. Elle avait de grands yeux noirs, envoûtants, où brillait un éclat de sagesse. Ses lèvres étaient rouge comme le sang. Quelques longues mèches sombres dépassaient de son accoutrement, et on devinait une coiffure élaborée. Durant quelques brefs instants, elle scruta la petite Ombre. « Je ne sais pas quoi dire, mademoiselle. Je suis navrée de l'attitude de cette jeune fille à votre égard. Malgré les apparences, elle est très jeune et ...C'est plus une enfant capricieuse qui imite ce qu'elle croit voir.» Elle tourna d'ailleurs la tête vers Lilas, du feu dans le regard. « Excuse-toi. Et explique-toi.» Son ton était sans appel. Lilas fit une petite moue, mais murmura tout de même du bout des lèvres. « Je suis désolée.» Elle ajouta en voyant qu'elle risquait sa vie. « Je … j'ai usé de l'apparence de la Reine pour … m'amuser … Et obtenir ce que je voulais. Plus facile ainsi. C'était mal. »  Et elle demanda finalement. « Comment as-tu su? » - « Je vois l'avenir, tu te souviens ? Le tien était chaotique. Quoiqu'il en soit, je tiens encore à m'excuser, mademoiselle. Car je sais ce qu'elle vous a dit. Mais je peux vous affirmer qu'elle ne s'en tirera pas à bon compte. Je suis Lily-Lune Araé. La vraie s'entend.»

Délicatement, elle retira une bague qui ornait l'un de ses doigts. « Je me doute que ce n'est qu'une maigre contre-partie, une petite compensation pour les horreurs entendus et la journée désagréable, cela ne signifie pas grand chose. Mais ..» Elle déposa le bijou dans les mains de l'ombre. L'anneau était fin, d'un or sans impureté. Magnifique solitaire, il était orné d'une étrange pierre en forme de fleurs et aux reflets violets. Les pétales étaient délicates et se terminaient en pointe. C'était un très belle ouvrage. « On appelle ce joyau une Nyseira. On ne peut la trouver qu'à Maëlith, et lorsqu'elle est extraite, elle aborde déjà les traits d'une fleur. C'est pour vous. J'espère qu'elle vous plaît. Si ce n'est pas le cas, vous pourrez toujours en tirer un bon prix ou l'offrir … C'est à votre discrétion.» Elle sourit, avant de tourner les talons. « Si tu voulais un œuf, Lilas, tu n'avais qu'à me demander.» Sa puissance était sans appel, et avec un tantinet de concentration, elle parvenait à ressentir les flux magique qui circulait. Elle ne fit que quelques pas avant de s'accroupir pour dégager quelque chose de terre. Loin de l'image de Reine fragile et coquette qu'elle dégageait, elle n'hésita pas à plonger ses longs ongles parfaitement manucurés dans le sable et se salir les mains. C'est avec un œuf dans les bras qu'elle se releva. Elle le confia à Lilas sans rien ajouter de plus, et sans qu'une expression douce n'illumine ces traits sévères. Elle était réellement déçue de son clone, qui avait dépassé les bornes. « Pardonnez-moi de ne pas rester, mais j'étais de passage dans la région, et je suis attendue à Médigo. J'espère que nous aurons l'occasion de nous revoir, un jour. Et ainsi, nous pourrions réellement faire connaissance.» Elle sourit. Un dragon surgit. C'était Galatée, qui arrivait pour servir de monture puisque Lilas était sur le cheval. Elle s'enroula autour de sa maîtresse. « Et surtout, n'écoutez pas cette petite idiote. Vous irez loin. Je le vois, je pressens votre immense potentiel. Seulement, votre futur n'est pas là où vous le croyez. Bonne chance, Sora. Que votre route soit longue et belle.»  

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