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 # Ordre et Chaos, l'on ne va pas l'un sans l'autre # ( Mission II Lvl 4 )

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Lun 02 Sep 2013, 18:23

Ordre et Chaos


L'on ne va pas l'un sans l'autre

Ayant repris ce qui ressemblerait en tout point à une vie des plus banales, Luka se voyait assouvit par les questionnements les plus étranges qui n'avaient par le passé jamais envahi son esprit aussi férocement qu'à ce jour. Il doutait de lui, un sentiment d'insécurité prenait le contrôle de son corps, ces traits reflétés qu'il avait eu le temps d'apprendre par cœur semblaient avoir changé plus en quelques heures que ces dernières décennies. Quel esprit malin avait bien pu le pousser à leur venir en aide, à venir à leur secours, à les aider, à leur enseigner des notions qu'il n'avait lui-même jamais réussi à intégrer ? Ignorant de de quoi lui avaient bien servi des années de conjurations maudites maintenant que tout était fini, il essaye de se replonger dans une existence éternelle mais pourtant sans aucun but. Une nouvelle vie commençait pour lui et pourtant toute ambition, tout projet, toute aspiration qu'il aurait autrefois convoité, ainsi que l'esprit tordu de son père, l'ayant lamentablement hanté toutes ces années, venaient tous deux de le quitter à l'unisson. Que pouvait-il faire d'autre que se trouver d'autres occupations et refouler ces pensées le plus profondément possible ?

Il était en proie au désespoir et à tout genre de détresse, ses yeux bouffis semblaient perdre leur couleur azur si puissante pendant que ses lèvres rosées ne laissaient plus un mot s'en échapper. Il craignait le changement mais celui-ci était fatidique, une chose qu'il ne pouvait éviter, ce serait de la folie pure que de demeurer ainsi emprisonné dans ses propres sanglots interminables et ces chaînes de fer qu'il s'était lui même fixé. Tous les jours, aux heures les plus matinales, faussant compagnie aux regards attentifs des aubergistes, il s'éclipsait hors du bâtiment pour ne refaire surface que très tard le soir après des heures d'absence mais bercé toujours par le regard attentif de l'animal. Il sautait les repas, ne dormait que très peu la nuit préférant observer des heures durant le trajet immuable de l'astre lunaire pendant que sa douce lumière le baignait dans son incandescence. Venom, qui savait l'importance de cette étape aux yeux du jeune homme pour lui permettre de retrouver cet élan de motivation et cette flamme incandescente dans ses yeux, ne put qu'essayer de rester de marbre, néanmoins constamment à ses côtés espérant revoir un jour à son réveil ce sourire chaleureux qui lui était propre.

Il cessa de rendre visite aux vieux marchant ambulant et continua de relire inconsciemment ces mêmes livres dont il s'était éprit. Faisant des allers retours dans sa chambre, la pluie martelait la fenêtre en verre, voyant au loin ce qui semblait être une tempête des plus violentes s'approcher à grand pas. La nuit encore lointaine se cachaient sous les rayons lumineux du soleil créant ainsi un spectacle aux milliers de couleurs que les enfants appréciaient malgré les gouttes glacées perlant le long de leurs boucles entrelacées. Luka lui-même laissait ses yeux meurtris se poser sur les gouttelettes sans fin que les nuages les plus chargés grondaient au dessus de ces terres laissant tomber sur les piètres humains ses larmes. Ouvrant grand les deux ouvertures de la chambre, il laissa entrer la cacophonie que jusque là les carreaux empêchaient de rentrer, laissant l'orage imbiber son corps d'idylle et atteindre sa peau de porcelaine. Baissant les yeux, bien plus rafraîchit qu'avant, il s'apprêtait à couper court le courant des bourrasques de vent jusqu'à ce qu'il aperçoive au loin un pigeon voltigeant dans sa direction et s'apprêtant à finir son vol sur le rebord de bois écorché.

Détachant une feuille de papier que le pauvre volatile gardait prisonnière au creux d'une de ses pattes et dont les lettre semblaient s'être effacé au contact de l'eau torrentielle, une expression inexplicable vint se dessiner sur sa frimousse. Celui-ci devenant totalement livide, plus immaculé qu'un linceul enveloppant les cadavres des morts, sembla cependant reprendre une vivacité sans précédents qu'on ne lui avait pas connu depuis bien des semaines, voire des mois entiers. Ses yeux pétillaient d'impatience, cette mauvaise habitude de mordiller sa lèvre inférieure sous le coup de la nervosité reprenait le dessus et lâchant une voix incommode mais sans en contrôler la puissance, il finit par brailler assez fort envers Venom qui restait là, béat. « Tu ne m'accompagnes pas ? Je te croyais plus résistant que cela mon bon compagnon ! Allez du nerf que diable, prépares moi ces pattes molles et rejoins moi au sous sol dans très exactement dix minutes ! Nous n'avons pas de temps à perdre ! »

Fermant la porte derrière lui presque au porte de briser la construction en deux, il dévala les escaliers dans une hâte incompréhensible pour s'entretenir visiblement avec l'aubergiste auquel il n'avait pas adressé la parole depuis bien des jours. Sûrement de manière inconsciente, le jeune homme laissa glisser de sa main moite le papier qui l'avait mis dans tous ces états et qui visiblement provenait d'un vieil homme qu'il avait l'habitude de côtoyer mais dont le nom lui échappait encore complètement. Le prenant avec lui pour le lire en chemin, le fauve ne prit que quelques secondes avant de s’exécuter préparant quelques affaires de son maître que celui-ci ne prenait jamais la peine d'emmener mais qui pouvaient se rendre utiles, quelques bandages, quelques médicaments, quelques boissons, un peu de nourriture le tout à l'intérieur d'un sac qu'il tenait dans ses babines. Les directives étant clairement données dans la petite carte qu'on avait délivré par le moyen le plus ancien qu'il n'avait été donné à Luka de tester, les deux protagonistes n'eurent à fournir aucun effort considérable pour retrouver le chemin exacte qui les mènerait à leur destination première dont l'état risquerait fort de les surprendre, dans le mauvais côté de la chose.

Bien qu'ayant aperçu au loin des volutes de fumée les plus carbonisés et à la couleur la plus douteuse, un profond noir granulé aux nuances grisâtres et aux odeurs de brûlé, il leur était impossible de se préparer mentalement au préalable à ce qu'ils devaient se confronter. L'entrée du village formée par quelques poutres de bois, s'écroulèrent derrière eux alors qu'ils venaient de se franchir, à leur droite une rangée de maisons des coloris les plus irréguliers semblaient dévastées par les flammes bien que l’extrémité gauche n'eut subit aucun dégât considérable. Continuant leur chemin, ils remarquèrent assez vite le manque de population dans le village, aucune âme qui vive n'arpentait les axes les plus animés d'ordinaire et nulle voix ne surgissait des échoppes d'habitudes les plus occupées. Le brouillard s'immisçait à l'intérieur et s'épaississait au fur et à mesure que la nuit approchait.

Un village plongé dans la terreur, dont les cicatrices ne seraient que très difficiles à guérir voire impossibles à effacer de la mémoire de ceux qui eurent à les voir infligées, des rivières de sang aux pavés de pierres sombre qu'autrefois l'on traversait gaiement et sur lesquelles Luka faisait claquer ses talons le moins bruyamment possible. Des maisons abandonnées par leurs défunts propriétaires, d'autres bien remplies pour échapper la catastrophe qui se déroulait à l'extérieur, ils essayaient de fuir tous autant qu'ils sont une réalité qu'ils ne voulaient pas affronter, s'attachant à un passé qu'ils auraient voulu garder intact éternellement, des visions qu'ils pensaient voir disparaître sous leurs yeux s'ils leur laissaient le temps de s'évaporer de leurs souvenirs mais qui malheureusement ne le feraient jamais. Le temps semblait s'écouler plus rapidement qu'ailleurs, la nuit tombée et l'astre lunaire ayant fait son apparition, le mystère ne fit que s'épaissir à son tour avec une brume intense qui camouflait leurs pas et étouffait leur présence.

Les réverbères n’éclairaient que bien mal, voire aucunement, les ruelles désertes aux effluves argentés et aux volutes de fumée polluée emplissant l'air et dans lesquelles il était impossible de se retrouver, un mélange dégoûtant entre putréfaction et des restes nauséabonds sur les cotes des habitations semblait s'être installé. Quelques rectangles éclairés donnaient à eux seuls l'impression d'une ville fantôme. Des pas se faisaient entendre au loin mais se dissipaient bien vite, la moindre présence humaine dans les environs se fondait bien assez tôt dans les mirages environnants, les ivrognes semblaient avoir soigné leur ivresse tandis que les plus vivantes échoppes fermaient leurs portes au public indéfiniment. Comment une telle tragédie peut elle détruire ainsi de l'intérieur un village tout entier et dévaster d'une telle manière le moral de ses habitant ayant déjà baissé les bras bien avant le combat ? Interrogeant un pauvre homme n'ayant aucun endroit où se réfugier, il put en tirer quelques informations des plus utiles, comme la provenance de l'incendie à l'entrée du village entre autres, lui donnant à la fin de son discours quelques pièces pour lui permettre un plat chaud ou même un lit douillet.

La nuit étant indéniablement le meilleur moment pour agir, Luka ne se fit pas prier pour déplacer des cadavres, renifler des charognes, retracer le plus soigneusement possible les traces que les agresseurs,  qu'il identifia bien comme des vampires, avaient laissé derrière eux et qu'il s'apprêtait à effacer. Justice leur était due à ce peuple ayant perdu bien plus que la volonté de vivre, ils auraient certainement du mal à s'en remettre mais Luka ne pouvait se permettre de laisser un tel scandale éclater au grand jour. Leurs crimes devaient être expédiés, ils se devaient de payer pour ce qu'ils avaient commit ici, la souffrance dans laquelle ils avaient plongé tout une communauté pour des envies irrépressibles sans respecter les règles qui leur ont été fixées. Ses piètres enseignements n'étaient certes pas appliqués par un grand nombre de vampires mais des mesures s’exigeaient. N'ayant d'autre choix pour tirer les vampires de la liste principale des sujets, il avait besoin de duper tous les témoins ayant possiblement assisté au massacre ce qui était loin d'une partie de plaisir pour Luka qui détestait par dessus tout les mensonges.

La nuit portant conseil à n'importe qui, le vampire l'utilisa à son insu et profita du temps qu'il avait à sa disposition pour mettre en place un discours dans le seul but de s'adresser le lendemain aux citoyens dans une tentative insensée pour leur redonner cette envie de vivre qu'ils croyaient probablement perdue. Cachant au mieux son identité de vampire en commençant par ses canines, dans le cas contraire il perdrait toute crédibilité et certainement l'appui qu'il pourrait recevoir de la part des habitants, il commença à débiter des paroles le plus calmement possible laissant hommes et femmes se rassembler en spectateurs autour de lui, de plus en plus nombreux, de plus en plus attentifs, la motivation montant en flèche. Le fauve pendant ce temps continuait de parcourir les rues à la recherche des victimes pour les rassembler et masquer les morsures vampiriques par de simples entailles au niveau de celles-ci ainsi que de l'abdomen, laissant croire à une attaque de brigands étant probablement l'option la plus plausible à laquelle ils pouvaient recourir dans une situation pareille.

« Qu'est-ce que la douleur d'un condamné à mort face à celle d'un condamné à vivre ? C'est un moment des plus capital pour vous, se serrer les coudes est essentiel et vivre, une chose inévitable ! Ne vous cachez pas derrière des murs de pierre et ne vous laissez pas abattre aussi facilement ! Cessez de geindre sur votre propre misère et essayez plutôt de récupérer votre prestige ! Contrairement à ce que beaucoup peuvent penser, cette attaque ne vient pas des vampires ! Cessez d'inculper les premiers individus qui sciaient vos expectations et cherchez plutôt les preuves de l'évidence même ! Ces cadavres qui étaient autrefois vos frères, vos sœurs, vos amis, vos proches portent les marques les plus claires des détraqués qui ont volé leur dernier souffle ! Ces bandits sans pitié, sans scrupules, sans la moindre conscience cherchant à incriminer les vampires sous une rancune certaine, ont attaqué votre village et s'attendent à vous voir vous écrouler et ne ressentiront qu'une gloire plus grande de voir que leurs plans ont été de l'avant ! N'avez-vous pas envie de vivre ? De leur montrer qu'ils ont tort de vous sous estimer de la sorte ? » Sollicitant une quelconque réaction de la part de son audience, Luka marqua une pause très brève mais ne voyant que des airs disjonctés sur leur frimousses dénués de tout espoir, il crut bon continuer dans sa lancée et voir plus tard les résultats.

« Réclamez ce qui vous appartient ! Rebâtissez des cendres et des gravas cette ville qui vous est chère et vous pourriez enfin avec honneur clamer que vous avez survécu ! n'oubliez pas ces êtres chers que vous avez laissé derrière vous mais pensez à la peine qu'ils ressentent de vous voir subir le même sort. Faites le pour vous, faites le pour eux ! Lavez-vous les rues pour essuyer leur sang mais gardez en mémoire le sacrifice qui s'est conduit ici à ce jour ! Effacez leur trace mais n'oubliez jamais leur présence ! Vous êtes les seuls à pouvoir témoigner de leur existence alors ne laissez pas celle-ci s'effacer aussi facilement ! Ceux qui sont aptes à travailler doivent aider dans les travaux de reconstruction du village pendant que femmes et enfants s'occupent des nombreux blessés ! Les plus âgés s'occupent de gérer les stocks de nourriture et de boisson que vous auriez à partager jusqu'à reprendre votre rythme quotidien ! Faites les efforts qui sont à votre disposition et n'hésitez pas à aider autrui ! Reconstruisez vos maisons ! Éduquez vos enfants ! Chassez toute pensée morbide de votre esprit et reprenez depuis le début ! Ayez le courage d'accepter la réalité et la combattre plutôt que la laisser vous démener comme il lui plaît ! »

Contre toute attente, ces paroles finirent par atteindre les cœurs émus de plusieurs membres du village qui mettant les mains à la patte commencèrent la reconstruction du village sans plus tarder. Sous les conseils avisés de Luka, ils reprirent un rythme régulier de vie et bientôt toute aide extérieur s'avérerait complètement inutile. Ils pouvaient très bien se tenir sur les deux jambes, il leur suffisait d'un petit coup de pouce pour trouver le courage de braver l'inconnu et d'accepter les changements tels qu'ils sont. Ces gens apprirent une leçon de la plus grande valeur au petit être qui au premier abord n'était venu ici que par curiosité d'esprit mais qui voyait là une bonne action de laquelle il était profondément fière. Il put se ressaisir et redevenir le personnage insouciant qu'il avait toujours été mais pendant combien de temps le pourrait-il ?
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