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 Sous le joug du destin et la lueur des étoiles, dansons. [PV Mitsuko]

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Mar 13 Aoû 2013, 15:36


Lueurs multiples et multicolores, dansant au-dessus du vide, jouant impunément avec l'eau se déversant avec fracas, dans un gouffre dont le fond n'était qu'un nuage blanc, brume de gouttelettes giclant en tous sens. Du haut des cascades cristallines, mon regard gris et songeur suivait ces minuscules aventurières se jouant avec grâce du danger, valsant dans les airs avec élégance, illuminant l'eau de leur lueur douce et malicieuse, que leurs ailes avaient empruntée à l'astre solaire le jour durant, qu'elles restituaient à présent sous le regard de l'astre sélène. Un instant, je détachai mon regard du spectacle en passe de débuter, et levai les yeux vers le ciel nocturne, saupoudré de multiples étoiles petites mais flamboyante, comme désireuses de river leurs yeux sur la danse qui s'apprêtait à être exécutée sous un ciel sans nuages, au-dessus d'une eau cristalline entourée de fleurs toutes aussi impatientes de voir les lueurs féeriques danser au-dessus de leurs pétales. Je ne pouvais m'empêcher de partager leur enthousiasme, mais demeurais à l'écart, assis sur la feuille d'un épilobe ayant poussé au bord du ravin et de la rivière se précipitant dans le vide. Depuis toujours, je m'étais senti des leurs, sans vraiment me sentir des leurs. Sentiment paradoxal, que j'expliquais toujours par mon enfance passée dans un manoir, plutôt qu'au sein d'un jardin comme toutes les autres représentantes de mon peuple. Et pourtant, je n'étais guère d'un naturel timide... Seulement, me joindre à ces lueurs dansantes était à la fois un désir et une crainte, si bien que j'étais parvenu à me convaincre qu'admirer de loin mes semblables restituer la lueur du soleil aux fleurs alentours était un compromis satisfaisant.

Et pourtant, si je l'avais demandé, nul doute que mes semblables auraient accepté à ce que je me joigne à leur danse nocturne, aussi rare un Fé de ma sorte soit-il. L'une d'entre elles avait été suffisamment aimable et généreuse pour m'aiguiller lors de mon rituel du soleil, et je sentais sans aucun mal cette lumière que j'avais moi-même puisée dans les rayons de l'astre solaire, qui s'évanouirait une fois le jour venu. Mon droit à participer aux spectacles féeriques était à présent légitime. Tout comme la crainte que certaines Fées ressentiraient à mon égard dès le moment où je me serai joint à elles, afin de participer pour la première fois à ce spectacle auquel j'avais déjà assisté plusieurs fois depuis que j'avais quitté le Manoir Taiji. A cette pensée, je ne pus m'empêcher de lâcher un soupir de dépit et de résignation, si bien que je sentis immédiatement la douce inquiétude de l'épilobe parler à mon oreille. Un mince sourire se dessina sur mes lèvres, et je posai une main apaisante sur la feuille de la fleur, pour laquelle je n'étais guère plus lourd qu'un papillon au vu de ma forme actuelle. Les jugements de valeur moraux n'avaient pas leur place dans le monde de la nature, et aussi péjoratif soit celui que je portais envers ma propre personne, il était toujours quelque peu apaisant de sentir ce lien affectif qui nous unissait, nous les Fées, aux fleurs et aux plantes du monde entier.

« Ne t'inquiète pas, murmurai-je à la fleur. »

Sous l'effet de ma voix, je sentis l'inquiétude de l'épilobe refluer, sans pour autant disparaître. Décidément, j'étais toujours aussi mauvais menteur... Voilà au moins une qualité que mes frères ne possédaient pas, et dont je pouvais passablement me vanter. Rivant de nouveau mon regard gris sur la valse lumineuse des Fées en contrebas, je songeai un instant à tous ces jeunes hommes que j'avais considérés comme mes demi-frères des années durant. Malgré le mépris ou l'indifférence que la plupart d'entre eux manifestaient à mon égard, il m'avait toujours tenu à cœur de les considérer comme des frères, pour une raison que j'avais bien du mal à expliquer. Mais à présent que mon regard était posé sur le miracle à venir des membres de  mon peuple, je ne pouvais m'empêcher de me poser la question : à quel milieu appartenais-je ? Si j'avais au final quitté le Manoir, c'était en vue de trouver une autre voie que celle de l'excellence des Taiji... Je l'avais trouvée, mais j'ignorais encore si cela avait définitivement eu pour effet de me séparer de cet environnement si particulier dans lequel j'avais été élevé. Ma récente rencontre avec Kosuke et le choc que m'avait causé la mort de Neros semblaient me dire le contraire, mais...

Mes pensées s'interrompirent lorsque je vis du coin de l'oeil une lueur céruléenne se détacher de la valse brillante dansant au-dessus des flots et voler vers le haut, dans ma direction. Coïncidence ? Je ne pus m'empêcher d'afficher un sourire mi-figue mi-raisin lorsque ce semblant d'espoir disparut, et que je reconnus la Fée qui s'était détachée du reste de mes semblables pour voler vers moi. Je ne pouvais décemment pas fuir ce visage aux traits fins illuminé par deux prunelles malicieuses, encadré par une chevelure blonde comme les blés. Non pas parce qu'elle m'avait tapé dans l'oeil – vous m'excuserez d'avoir d'autres priorités pour le moment – mais plutôt parce qu'il s'agissait là de celle qui était venue me chercher au fin fond de la forêt pour m'inviter à passer le rituel du soleil, dont je ne connaissais pas grand chose à ce moment-là sinon son nom et son importance. La demoiselle aux ailes aussi azurées que ses prunelles ne tarda pas à s'arrêter à quelques centimètres de moi, à ma hauteur, son regard scrutant le mien, que je détournai vers la voûte céleste.

« Tu ne danses pas, illuminae ? fit-elle d'une voix où se mêlaient curiosité et espièglerie. »

Toujours aussi directe. Enfin, à quoi devais-je m'attendre d'autre de la part d'une Fée qui était venue me déloger de ma fleur au cours d'une sieste amplement méritée afin de m'exhorter de voler droit vers le soleil, afin d'en accumuler la lumière ?

« Je danse très mal, répondis-je avec un sourire aussi maladroit que mon mensonge. »

Le sourire moqueur de la Fée ne fit que s'agrandir, et elle dissimula sans vraiment le dissimuler le petit rire espiègle qui s'échappa de ses lèvres. Il fallait vraiment que j'apprenne à mentir un jour. Vraiment. Peut-être que je devrais demander à l'un de mes demi-frères de m'apprendre. Quoiqu'il n'était même pas certain que j'y parvienne. J'étais trop honnête.

« Apprends à mentir, illuminae, fit-elle malicieusement, comme si elle avait lu dans mes pensées. Je suis certaine que tu danses très bien. »

Je demeurai silencieux. Si la Fée avait très bien pu déceler mon mensonge maladroit, il n'était pas pour autant indispensable que je lui livre le fond de ma pensée. Ce n'était guère dans mes habitudes. Quand bien même la demoiselle aux prunelles céruléennes avait déjà posé les yeux sur l'objet de ma gêne. Et quand bien même elle ne paraissait pas prête à me lâcher la grappe. Je ne savais pas vraiment si je devais en être flatté ou agacé, d'ailleurs.

« La nature se moque bien de la couleur de nos ailes, illuminae. Il en va de même pour le spectacle. Depuis quand as-tu peur du regard des autres ? »

Un frisson parcourut mon échine, et je jetai un regard de reproche à la demoiselle aux ailes azurées. Elle lisait vraiment dans mes pensées. Au sens propre. Et quelque part, je ne pouvais que mal le prendre. Mais en même temps, ç'aurait été un mensonge que de nier que ses propos n'avaient pas atteint le point sensible du problème, la raison pour laquelle je m'étais résigné à demeurer à l'écart. Son sourire espiègle toujours présent sur ses lèvres – comme si elle venait de remporter une victoire, ce qui n'était pas totalement faux – la demoiselle aux cheveux blonds me tendit sa petite main, sur laquelle je refermai la mienne, et nous nous envolâmes rejoindre l'assemblée de lueurs multicolores, nos corps baignés à leur tour par la lueur du soleil dont nous nous étions imprégnés ce jour même.

Et la danse ne tarda pas à débuter, chacun de nous virevoltant avec gaieté au-dessus des flots, avant de nous disperser en petits groupes afin d'illuminer les fleurs et les plantes des rivages des Cascades Cristallines, sans que rien d'autre n'importe que la nature et son bonheur.
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Mitsu
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Mitsu
Mer 14 Aoû 2013, 01:13

« C'est quand qu'on est arrivé? ». Faust suivait Mitsuko en rouspétant. Il savait que sa mère pouvait les téléporter aux cascades cristallines mais cette dernière lui avait dit que marcher serait préférable. En réalité, depuis qu'elle lui avait parlé d'aller assister à un spectacle où des fées danseraient en éclairant la nuit, il était impatient d'y assister, chaque pas qu'il faisait lui paraissant une éternité. « Bientôt. ». Cela faisait au moins cinq fois que le petit garçon posait la même question et qu'elle lui donnait la même réponse. Elle s'arrêta, s'accroupissant aux côtés de son fils : « Si nous nous téléportons, nous risquons de les surprendre et de leur faire peur. Il vaut mieux qu'elles nous voient et qu'elles décident si, oui ou non, nous méritons de voir leur spectacle. ». Elle sourit, lui ébouriffant les cheveux. « Et puis, si tu fais trop de bruit, elles partiront. ». Faust sembla comprendre puis demanda : « Et pourquoi monsieur Zéleph n'est pas venu avec nous? Il est encore occupé? ». La déesse se redressa, essayant de maintenir son sourire à flot. Peut-être n'était-ce guère une bonne chose de mentir à ses enfants mais le petit déchu était encore jeune et ne comprendrait pas la situation. Elle se voyait très mal lui expliquer que le seigneur des deux rives l'avait oublié. Déjà que l'enfant ne savait pas qu'elle n'était plus enceinte, attendant sa petite sœur avec impatience en demandant sans cesse pourquoi sa mère ne gonflait plus son ventre comme avant. Il y avait tellement de choses qu'elle devait lui dire. Elle espérait, bien entendu, que la situation avec le roi s'améliorerait mais Faust ne verrait jamais sa sœur naître et elle devait trouver le courage de lui en parler, de lui dire qu'elle vivait pourtant, en tant que grande personne. Pour dire la vérité, la fille de Mitsuko la dégoûtait, ayant déjà atteint la vingtaine. Elle s'était habituée au fait de devenir réellement mère, de façon biologique et voilà que sa propre fille, venant du futur, lui avait fait faire une fausse couche. La déesse la détestait, voyait en elle un véritable monstre. Jamais elle ne pourrait prendre son bébé dans ses bras, jamais elle n'aurait l'occasion d'essayer d'être une bonne mère. Bien sûr, elle avait d'autres enfants mais la plupart étaient partis et ce n'était pas la même chose. Eux étaient déjà adultes, du moins, pour la majorité. Elle prit donc une grande inspiration puis répondit : « Oui. Désolée mon chéri, il t'aime fort mais il n'a pas pu se libérer. ». « Mais Erza va bientôt naître... il faudrait qu'il soit là quand même...  c'est lui qui doit te tenir la main pour quand elle arrivera... ».

Parfois, la jeune femme sentait bien que ses conversations avec Faust prenait une tournure dangereuse. Erza, Zéleph, l'enfant voyait en eux son petit monde, son équilibre. Il avait déjà été abandonné par son père et il avait trouvé le réprouvé, celui qui l'avait consolé quand il faisait des cauchemars, celui qu'il l'avait aimé, même d'une façon parfois maladroite. Cependant, alors qu'elle allait répondre, Mitsuko se rendit compte qu'ils étaient arrivés à destination. Elle avait pris quelques petites choses à manger et à boire pour son fils puisque le spectacle durerait sans doute longtemps, jusqu'au levé du soleil peut-être. Sauvée des commentaires de l'enfant, elle lui dit doucement, mimant l'émerveillement. « Regarde! ». En réalité, elle avait toujours aimé ce genre de spectacles, même si y assister relevait plus du miracle qu'autre chose. Néanmoins, il y avait quelques avantages à être aether, avantages dont elle voulait profiter pour faire plaisir à son fils. Il voulait devenir aussi fort que Zéleph mais il aimait beaucoup l'art, la magie, les lumières. C'était un côté enfantin que la déesse aimait par dessus tout. L'innocence de l'enfance, une innocence dont elle n'avait que très peu profité.

Écartant les branchages, elle amena doucement Faust près de la berge, lui murmurant de s'accroupir là en attendant qu'elle sorte le tissu. Le spectacle continuait, le déchu semblant déjà avoir des étoiles dans les yeux. A ce moment précis, Mitsuko ne savait pas qu'elle rencontrerait un autre de ses fils cette nuit. Habillée d'une robe aussi sombre que la nuit, elle étala le tissu sur le sol, un tissu qui accueillit rapidement le postérieur du petit garçon qui ne voulait manquer aucune miette du spectacle. Chuchotant comme un secret, il dit à sa mère : « Moi aussi je veux faire de la lumière! ». Elle sourit, espérant qu'un tel spectacle lui changerait les idées. Faust était content, c'était déjà ça, mais elle voulait se vider la tête, oublier ce qui l'attristait, oublier le destin qui était le sien.
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Mer 14 Aoû 2013, 23:33


Je n'aurais su estimer le nombre d'entre nous qui participâmes au spectacle, tandis que d'autres Fées, Boutons ou Luciole, étaient posées sur les feuilles des arbres et des fleurs des rivages, contemplant inlassablement notre spectacle tel que j'avais prévu de le faire initialement. Toujours est-il que lorsque nous nous divisâmes, notre prélude dansant au-dessus des flots tumultueux achevés, je me retrouvai parmi une dizaine de Fées aux ailes toutes aussi colorées les unes que les autres se dirigeant en exécutant vrilles et pirouettes dansantes vers le rivage occidental de la Rivière, au pied des Cascades Cristallines. Transportés par cette étrange allégresse collective que ressentent les danseuses du spectacles, nous ne tardâmes pas à nous sentir invités par les plantes alentours, qui se réjouissaient d'avance de recevoir la lumière de l'astre solaire emmagasinée dans nos ailes. Si bien que, lorsque nous atteignîmes le rivage, nous nous dispersâmes de nouveau en tous sens, lueurs folles voletant entre fleurs et arbres, herbes et bosquets, illuminant petit à petit les pétales des fleurs dont le plaisir ne fit qu'accroître cette ivresse singulière, qui nous permettait de nous oublier comme individualités et ne plus faire partie que d'un tout, la Nature, dont nous étions les plus ferventes servantes. Au point d'en oublier tout ce qui était étranger, tant le matériel que l'immatériel. Les pensées sombres et hésitantes que j'avais eues avant le début du spectacle semblaient se dissiper d'elles-mêmes, comme absorbées par les fleurs que j'illuminais de mes ailes.

Des ailes noires de jais, qui, en dépit de leur couleur, avaient absorbé la lueur du soleil et la restituaient non pas sous la forme d'une lumière noire et inquiétante. Je savais qu'au cours du spectacle féerique, les Fées restituaient la lumière solaire en lui donnant la couleur de leurs ailes, mais dans mon cas, il semblait que la lumière demeurait telle que je l'avais absorbée, une lumière blanche dévoilant les fleurs sous leur vrai jour, leur couleur réelle. Et si, en temps normal, j'aurais trouvé ce constat rassurant, j'étais à ce moment-là tellement pris dans l'ivresse du spectacle que ce genre de détail ne m'importait plus. La Fée qui m'avait initié avait raison : la Nature ne se souciait guère de ce genre de choses. Nous faisions partie d'un tout, d'une spirale de sensations qui ne se limitaient plus à ce que nos yeux voyaient ; nous vibrions ensemble au rythme de la nature endormie que nous éveillions dans la plus grande joie et la plus grande douceur. Et dans cette danse mêlant à la perfection gaieté et sérénité, étaient venus se joindre plusieurs lucioles, frayant avec coquetterie en notre compagnie, au grand bonheur des plantes baignées de leur chaleureuse lumière.

Nos ailes se frôlant, touchant du doigt les pétales des fleurs endormis, nous progressions doucement le long du fleuve, illuminant ses berges, certaines d'entre nous s'aventurant un peu plus loin dans les terres, chacune d'entre nous se posant sur les feuilles qui n'avaient pas encore bénéficié du contact d'une autre, dans une synergie parfaite. Nous avions beau être des inconnues les unes par rapport aux autres, nous faisions à présent partie d'un ensemble parfaitement coordonné par le miracle du spectacle. Nous communiquions avec allégresse avec la nature, qui nous renvoyaient nos pensées et intentions mélangées, que nous interprétions naturellement, donnant naissance à un spectacle magnifique en dépit de nos différences. Et ce jusqu'à ce que plusieurs d'entre nous repérâmes enfin un élément qui nous était étranger, qui ne faisait ni partie du peuple féerique, ni de la nature avec laquelle nous étions en parfaite harmonie. Les plus jeunes d'entre nous continuèrent à danser, au mépris de ce regard étranger qui nous surprenait au milieu d'une tradition appartenant au peuple féerique. Et j'en aurais fait de même si la chevelure blonde de l'intruse ne m'avait pas tiré de ma fièvre dansante, faisant remonter brusquement à la surface des souvenirs qui n'appartenaient ni de près ni de loin au monde féerique dans lequel j'aurais dû demeurer. Plusieurs d'entre nous convergeâmes vers la jeune femme aux cheveux blonds comme les blés, qui était accompagné par ce qui semblait être un enfant du peuple déchu, dont les prunelles brillaient de curiosité et d'excitation mêlées.

Mon regard se leva vers le visage de cette femme, et je m'arrêtai brusquement en plein vol, alors que mes semblables s'approchaient de plus en plus, papillonnant autour des deux intrus tout en les dévorant de leur regards à la fois curieux et craintifs. Interdit, je serais probablement bien resté à l'écart un peu plus longtemps si je n'avais pas été projeté à bas de la fleur sur laquelle j'avais posé les pieds, violemment percuté par derrière par un objet vivant et volant non identifié.

« Waaah ! »

Avec ce cri aussi pathétique qu'inélégant, je chus et heurtai le sol herbeux quelques centimètres à peine plus bas, n'ayant guère assez de vivacité pour me rattraper de justesse. Ne prenant qu'un bref instant pour maugréer contre ma maladresse et remercier les brins d'herbe qui avaient amortis ma chute, je me redressai et me retournai vers celle qui était à l'origine de ma chute. Qui s'avérait être nulle autre que la Fée aux ailes azurées qui m'avait invité à me joindre au spectacle.

« Faut pas s'arrêter comme ça, illuminae, rouspéta la demoiselle aux prunelles céruléennes.
- Je t'avais dit que je dansais très mal, maugréai-je, de mauvaise foi. »

Je me retournai, levant les yeux sur celle que je m'attendais le moins à croiser en cette soirée de festivités naturelles. Les autres Fées s'étaient mises à tourner autour du duo étranger, semblant débattre entre elles de la présence de ces deux intrus assistant visiblement au spectacle réservé au peuple féerique sans autorisation. Je les entendais à peine murmurer à propos de danger et de respect devant les yeux et les oreilles des intrus, qui .pouvaient autant entendre et prendre part au débat qu'ils avaient pu remarquer mon atterrissage remarquablement raté – et je ne doutais pas que ces yeux émeraude n'avaient pas manqué de remarquer ma présence.

« Des connaissances ? me demanda de nouveau la Fée aux ailes azurées. »

Je demeurai silencieux. Et complètement désemparé. Comme je l'étais toujours lorsque je faisais face à ma mère adoptive.
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Mitsu
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◈ YinYanisé(e) le : 07/07/2005
Mitsu
Sam 17 Aoû 2013, 11:24


« Maman, regarde, elles viennent vers nous! ». Faust ne semblait plus en pouvoir, fasciné. Le petit garçon peinait à rester assis, gigotant, sa bouche s'ouvrant parfois devant la beauté, ses yeux brillant sous l'émotion tout comme ceux de sa mère. Mitsuko sourit, contemplant les fées qui avaient remarqué leur présence et venaient débattre de la légalité de cette dernière. Tendant la main, elle invita l'une d'elles à s'y poser, la dirigeant délicatement vers le petit déchu une fois que cette dernière eut accepté. « Tu vois? ». L'enfant était émerveillé devant ce petit corps et la fée semblait flattée de tant d'attention. Elle était coquette, les deux mains liées, regardant le déchu parfois, le reste du temps baissant la tête, légèrement gênée par son regard fasciné. « Trop belle!! ». Elle rit, d'un petit rire cristallin puis s'envola, laissant derrière elle une fine traînée de lumière. Ce fut à cet instant que le regard de la déesse se tourna vers une toute autre fée, l'entendant maugréer. C'était amusant mais le statut même d'aether faisait que le plus petit bruit était parfois le plus entendu et, le plus important passait de temps en temps complétement inaperçu. Oui, être aether signifiait être relié au monde, au monde dans son ensemble, aux plantes, aux animaux et aux créatures l'habitant. Elle sentait tout en elle, toutes ces connexions qu'il y avait, même les plus discrètes. Et, pour cette raison, parfois, elle perdait pieds, ne sachant plus décompter le temps, ne sachant plus où elle se trouvait. Mais, cette fée, celle qui était tombée, elle l'avait remarqué. Tournant son regard vers elle, elle s'aperçut que c'était un illuminae et, plus précisément, Enzel. Elle rougit, se rappelant de manière un peu trop fracassante la manière dont elle l'avait traité au temple des esprits. Cela ne lui ressemblait pas. Elle s'était jetée dans ses bras puis était partie sans lui donner la moindre chance de réaction. « Maman? Ça va? C'est à cause d'Erza? T'as chaud? ». Rien de tel qu'un enfant de dix ans pour souligner quelque chose que l'on souhaite faire passer inaperçu. Néanmoins, elle ne répondit rien, s'allongeant sur la couverture pour se retrouver au niveau de son deuxième fils sous les yeux de Faust qui ne comprenait pas la situation. Croisant ses bras doucement, elle posa son menton dessus, admirant ce fé dont elle n'avait jamais pris soin. Au final, peut-être que le déchu était le plus chanceux de tous ses fils. Pourtant, aujourd'hui, la situation était différente, elle n'avait plus de peuple à gérer, elle ne s'apprêtait pas à tenter l'élévation au risque de ne jamais plus revenir. Car les êtres qui veulent devenir Aether prennent un pari risqué, soit s'élever, soit disparaître pour toujours, sans nulle réincarnation possible. Oui, elle avait créé des enfants, égoïstement, se disant que si elle disparaissait, alors ils continueraient sa lignée, la lignée de ceux que l'on disait l'équilibre du monde. Le Taiji Tu ou le Yin et le Yang. Elle sourit, se rendant compte qu'elle aimait Enzel, qu'elle les aimait tous en réalité. Plus qu'une histoire de descendance, elle avait mis un temps considérable à les créer, à les regarder se développer. Peut-être cela n'avait-il rien de poétique de créer des enfants par magie, mais, au final, l'acte d'amour, tout comme le sentiment en lui-même, était magique. Tout était magique. Elle rit, soudainement heureuse. Elle était très instable au niveau de ses émotions. Erza l'avait préservé de ce genre de choses jusqu'ici mais, à présent, elle comprenait vraiment ce qu'être un aether aussi faible qu'elle signifiait. Elle finit par chuchoter simplement : « Bonsoir Enzel. ».

Faust, entre temps, avait imité sa mère, s'allongeant à côté d'elle pour observer celui qu'il ignorait totalement être son frère. Alors, Mitsuko lui dit doucement. « Faust, voici Enzel, c'est l'un de tes frères. ». « Waahou! Mais il est tout petit! ». La déesse sourit, pour une fois que l'un des frères de l'enfant était plus petit que lui, il était évident qu'il l'avait remarqué. Il faut dire que les autres étaient tous très grands. « Lui aussi il s'est fait abandonné par son papa? ». L'on ne pouvait pas arrêter les enfants. Ils ne se rendaient pas compte que certains sujets ne devaient pas être abordés en public. Pourtant, la jeune femme lui répondit doucement, patiente : « Non mon chéri, les fées naissent dans les fleurs. ». « Oh! ». La nouvelle l'avait estomaqué, si bien qu'il se leva pour courir vers la première fleur venue, celle-ci illuminée par les danseuses. Il s'accroupit et fixa son intérieur intensément comme s'il s'attendait à voir surgir un être semblable à son frère à tout moment. Les autres fées avaient cessé leur débat, le regardant étrangement avant de rire de la naïveté de l'enfant.

Pendant ce temps, le corps de Mitsuko s'était mis à briller doucement et son enveloppe charnelle disparue pour n'être qu'un regroupement de magie scintillante qui se réduit pour donner naissance à un nouveau corps, le corps d'une fée. Souriante, elle ouvrit de grandes ailes scintillantes et fit un essai de vol qu'elle jugea fructueux. Plantant ses yeux dans ceux d'Enzel, elle lui suggéra alors : « Dansons... ». Ce n'était pas un ordre, presque une question ou sans doute une espérance. Elle lui tendit la main, comme pour l'inciter à la guider.
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Sam 17 Aoû 2013, 23:59

Parler de mère à une Fée aurait été des plus incongrus. Tout simplement parce que les Fées naissaient dans des fleurs, et qu'elles n'avaient par conséquent aucune notion de parent ou quoi que ce soit qui s'en rapproche. Communier avec la nature et l'aimer de tout son cœur était amplement suffisant pour celles qui voyaient le jour entre les pétales de celles dont elles prenaient soin le reste de leur vie. Les fleurs étaient censées être nos parents et nos sœurs, sans qu'il n'y ait rien besoin d'ajouter d'autre, à part peut-être une âme sœur. Ainsi, malgré le regard insistant de la Fée aux ailes azurées, je demeurai silencieux, peu désireux de me lancer dans une explication de généalogies, de concepts d'adoption, et surtout, de l'abandon de mon jardin de naissance. Déjà que je passais pour quelqu'un de singulier au sein du peuple féerique, nul besoin d'en rajouter... Autant par gêne qu'indécision, j'évitai également le regard de ma mère adoptive, et posai donc par défaut mon regard sur l'enfant qui accompagnait la dame, un enfant aux cheveux blonds et aux prunelles émeraude, dont l'innocence et la gaieté semblait ravir les Fées qui s'étaient mises à lui tourner autour. Un enfant aux ailes noires de jais, dont je devinais sans trop de mal le statut d'enfant adopté, semblable au mien – de toute façon, je voyais mal ma mère adoptive promener les enfants lambda du village voisin juste pour le plaisir. Les questions enfantines du blondinet ne tardèrent toutefois pas à me forcer à river de nouveau mon regard sur le visage de ma mère, dont je surpris le regard – ce n'était pas comme si j'avais eu un espoir de ne pas me faire remarquer – et dont les joues avaient rosi, l'espace d'un instant. Me rappelant nettement de cet instant où cette dame que j'avais pensé inatteignable m'avait pris dans ses bras sans la moindre explication, je ne pus m'empêcher de détourner une nouvelle fois le regard, gêné, sentant le rouge me monter également aux joues. Elle avait l'air bien fine, la famille Taiji, à s'embarrasser d'une chose qui aurait été commune dans bien d'autres familles... De quoi me faire oublier l'espace d'un instant mes questions à propos de l'individu nommé Erza, qui semblait préoccuper mon demi-frère.

Je retins un soupir d'exaspération devant mon propre comportement, qui ne cessait d'aiguiser la curiosité de la Fée se trouvant à mon côté, dont le regard commençait à se faire insistant. Un enfant gêné de voir sa mère, qui ne pouvait la fixer plus de trois secondes sans que tout ne fiche le camp dans son esprit, voilà ce que j'étais. Et ça n'avait rien de très glorieux – pas que j'ai un jour été glorieux, en fait. Mon malaise laissa toutefois place à la surprise lorsque retentit le rire joyeux de la dame aux yeux émeraude. Depuis quand avais-je un effet hilarant ? Si jamais j'échouais dans ma vocation de médecin, peut-être pourrais-je me réorienter vers une carrière de gigolo... Pensée aussi inutile que ridicule qui eut toutefois le mérite de chasser mon exaspérante passivité face à une mère probablement aussi humaine que moi, au sens psychologique du terme. Si bien que je parvins à esquisser un sourire en voyant les deux intrus s'allonger pour se mettre à ma hauteur, et ma mère me souhaiter le bonsoir. Un sourire que je m'efforçai de conserver lorsque l'innocent Faust mit les pieds dans le plat en évoquant un père que je n'avais eu – et que je ne désirais pas forcément avoir. La réalité était peut-être différente d'un abandon par mes parents, mais toute aussi déprimante, aussi m'efforçai-je de chasser de mon esprit les rares souvenirs d'un jardin mort peu après ma naissance. Des souvenirs suffisamment imprécis pour que je n'ai pas à en souffrir constamment, semblait-il. Et si mes ailes étaient teintées d'un noir de jais profond, je savais pertinemment que la cause ne se trouvait pas dans cette enfance dont je me souvenais presque plus.

Entendant le rire de mes semblables résonner autour de moi, je me morigénai intérieurement à nouveau pour ces pensées glauques et peu amènes, inappropriées pour un soir de spectacle féerique. Et posai mon regard surpris sur la Fée qui avait pris la place d'une mère dont je ne me souvenais pourtant pas être membre de ma race. Même si, en soi, j'avais toujours ignoré à quelle race ma mère était affiliée, tant il y avait d'histoires se racontant sur Mitsuko Taiji – chose des plus étranges pour un fils adoptif, mais bon, cela faisait longtemps que je ne suivais plus les actualités familiales. Mais dès lors que celle-ci me tendit la main, je réalisai que cela n'avait pas la moindre importance. Au moins pour les heures qui allaient suivre. Car ces heures appartenaient au spectacle féerique, à la nature, et à rien d'autre. Peu importaient les conventions. Peu importaient les statuts. Peu importaient les filiations. De tout mon être, je sentais grandir l'impatience des fleurs, et par leur intermédiaire, celle de mes semblables, qui avaient fini par accepter la présence d'un enfant innocent et d'une mère se prêtant au jeu des Fées. Oubliant même le souvenir perturbant de cette mère qui m'avait pris dans ses bras avant de s'enfuir sans plus d'explications dans un temple lointain, je pris doucement cette main tendue, mon seul sourire franc et honnête répondant à tout ce qui venait d'être dit. Tout du moins jusqu'à ce que ma semblable ne mette son grain de sel :

« Ne me disais-tu pas que tu dansais très mal, illuminae ? me lança-t-elle malicieusement. »

Je rivai mon regard gris sur celui céruléen de la demoiselle, lui adressant un sourire tout aussi malicieux que sa propre question.

« Nous verrons bien, répliquai-je d'un ton espiègle. »

Rien de mieux que la contre-attaque pour se défendre d'une pique que je m'étais envoyée dans ma propre poire. D'accord, ça n'avait rien de rassurant, mais j'avais bon espoir que ma mère adoptive ne prenne pas ce petit jeu au pied de la lettre. D'ailleurs, je ne lui laissai guère le temps de se raviser, l'entraînant dans les airs avec douceur, alors que quelques Fées reprenaient d'ores et déjà la danse, virevoltant de nouveau dans les airs et illuminant la nature de leur douce présence. Je ne tardai d'ailleurs pas à entraîner ma mère dans la danse, ne me fiant qu'à l'appel des fleurs et à l'ivresse du spectacle, qui nous portait de nouveau vers l'avant, vers cette nature ne demandant qu'à être baignée de lumière. Et, au détour d'une vrille au cours de laquelle j'illuminai une paire de fleur de lys, je communiquai à la nature tout mon sentiment de joie et d'allégresse, qui fut renvoyé à toutes les danseuses par le biais de cette étrange symbiose qui nous unissait, sans même penser une seule fois que la main que je tenais était celle de cette mère adoptive que j'avais toujours trouvée distante et indifférente, envers laquelle je n'avais jamais rien osé exprimer, sinon mon refus implicite d'emprunter la voie de l'excellence en fuguant du manoir Taiji.
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Mitsu
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Mer 21 Aoû 2013, 22:47

Danser était un art, quelque chose qui devait, bien entendu, illustrer ses propres sentiments mais également en faire ressentir aux autres. Mitsuko avait suivi quelques cours de danse, comme le voulait l'éducation stricte qu'elle avait reçu, cependant, elle n'était pas des plus douées pour cela. Elle savait feinter, créer les sentiments de toute pièce. Du moins, c'était avant. Maintenant, elle était elle-même sous le joug de ces sensations qu'elle avait fuis des années et des années, même des siècles. La jeune femme n'avait jamais voulu ressentir, jamais voulu se mettre en danger et, de ce fait, elle était une artiste déplorable si l'on cherchait en profondeur. Pourtant, l'art l'émouvait, elle ne pouvait le nier. Quand elle savait qu'elle pouvait se cacher des regards indiscrets, alors elle se laissait aller à ses émotions. La musique, la danse, la peinture, toutes ces choses la touchaient quand elle abaissait sa garde. Et, maintenant qu'elle pouvait difficilement faire autrement, elle ne pouvait rester de marbre face à la beauté du spectacle féerique, face à l'appel des fleurs qu'elle ressentait avec autant de force que les artistes de la soirée. La nature, elle avait toujours voulu la préserver, même lorsqu'elle tuait des individus. A n'importe quelle période de sa vie, qu'elle soit maléfique, bénéfique ou neutre, elle avait toujours considérée la nature comme une sorte de mère, une source de création dont le monde ne pourrait se passer. Œuvre des aetheri ou non, cette œuvre était sans doute celle qu'elle souhaitait le plus protéger. Déesse de la nature, elle aurait pu l'être, c'était vrai, elle y avait songé, mais cela aurait été trop simple pour elle, dénué de la complexité qui avait toujours bercée sa vie. Elle aimait être insaisissable et quel plus beau domaine que la justice? Elle finit par sourire, n'ayant guère envi de parler de justice ce soir. Non, ce soir, elle ne serait qu'une fée parmi d'autres, aimant la nature comme elle avait un jour aimé sa mère, aimant la nature et le lui montrant dans la danse.

Si, au début, elle s'appliquait, n'ayant en aucun cas le désir de faire un mauvais pas, elle finit par se laisser bercer, porter, par ses sensations. Elle détestait ça mais elle ne pouvait faire autrement. Cela lui rappelait lorsqu'elle s'était retrouvée face à Zéleph, à ce sentiment qui brillait dans ses yeux, à son attirance contre laquelle elle ne pouvait lutter, malgré ses nombreux efforts. Elle entendait l'appel des fleurs, l'appel de la lumière et au final, comme chaque fée, elle ne pensa à rien d'autre qu'à ses propres émotions, à l'émotion générale. Et puis, elle était avec Enzel et, quelque part, elle aimait cette compagnie. Elle n'avait jamais pris soin de lui et peut-être que, ce soir, elle pourrait rattraper le temps perdu. Peut-être pas beaucoup, mais un peu. Elle l'espérait. Mais qu'importe, elle voulait juste profiter du moment, lui jetant quelques petits coups d’œil parfois, la danse magnifiant les traits de son fils. Elle n'aimait la beauté que lorsque celle-ci était en action, était révélé dans un geste, dans un mouvement. La sienne lui était particulière. Peut-être le trouvait-elle beau parce qu'elle était sa mère? Elle finit par rire, lâchant sa main pour voler de ses propres ailes un instant, tournoyant dans les airs, aimant cette sensation de liberté. Elle profitait, profitait du fait qu'elle arrive à s'infiltrer dans la réalité, que sa sensation du temps et celle des distances ne se modifient pas pour le moment. Être Aether était difficile et elle savait que lorsqu'elle deviendrait Sympan, elle ferait le vœu de tout recommencer, de devenir humaine, peu importe qu'elle perde toute sa puissance, peu importe les conséquences. La vie était un éternel recommencement et atteindre de nouveau les sommets après les avoir quitté était une chose qui lui apparaissait comme des plus plaisantes. Elle aimait la difficulté, elle aimait se donner les moyens, se mettre en danger. C'était ce qu'elle faisait à présent, voletant parmi les fées.

Mitsuko finit par reprendre la main de son fils, l'entrainant vers une fleur, n'importe laquelle, une tulipe, illuminée. Elle se posa là, le regardant un instant. La dernière fois qu'ils s'étaient vu avait été quelque peu étrange mais elle voulait s'assurer de ses connaissances concernant son frère. « Je voulais te demander, Enzel, as-tu eu des nouvelles de Neros? ». Peut-être ne savait-il pas que son frère s'était réincarné en ange? Elle préférait le lui dire, elle préférait que ses enfants soient soudés, intéressés les uns par les autres. Cela dit, elle n'était pas naïve, elle savait que ses espoirs étaient encore loin d'être effectifs. Comment pourrait-il en être autrement? Ils étaient tous faits pour atteindre les sommets, tous fils de rois, et cela n'arrangeait sans doute pas les choses. Certains se laissaient même affaiblir par leur ego. Seulement, elle était fautive elle-aussi pour ne pas les avoir accompagné, pour ne pas les avoir aimé alors qu'ils en avaient besoin. Elle n'était pas très douée dans les relations humaines, même si elle avait vu Zéleph à l’œuvre. Peut-être devrait-elle copier sur ce mari qui l'avait oublié? Après tout, ses fils étaient sans doute tout ce qu'elle avait. Alors, doucement, elle attira Enzel à elle, l'enlaçant avec délicatesse, de façon à ce qu'il puisse se dégager si il le souhaitait. « Tu sais, je t'aime. ». Était-ce comme cela qu'il fallait faire? N'allait-il pas la rejeter? Que ferait-elle si c'était le cas?

Pendant ce temps là, Faust n'avait pas bougé de sa fleur, s'asseyant à même le sol pour regarder le spectacle. Il était tiraillé entre le désir de ne pas en manquer une miette et celui de voir une fée naître. Bien sûr, sa seconde volonté ne pourrait pas se réaliser mais il n'était qu'un enfant et peut-être était-ce bon, parfois, de rêver?
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Jeu 22 Aoû 2013, 23:21

Pris dans cette allégresse incomparable, jouissant de la symbiose si particulière dans laquelle nous étions plongés, pour et par la nature, ne nous mouvant plus que par nos sens et nos sensations, oubliant toute pensée cartésienne, je ne pus que constater avec un sourire que la main de Mitsuko avait quitté la mienne, la dame devenue Fée se lançant à son tour dans cette danse enchanteresse, non seulement en chorégraphiant avec brio, mais se laissant également entraîner par cette nature qui nous faisait vibrer, qui nous portait et nous enchantait comme nous l'enchantions. Pour la première fois de ma vie, j'étais heureux, heureux d'avoir ma mère à mes côtés, et de pouvoir exécuter cette danse avec elle, une danse qui était également une première pour moi, mais qui, une fois porté par l'ivresse du spectacle, n'avait plus rien d'un rituel éreintant. Au contraire, je sus cette nuit-là que, malgré la couleur de mes ailes, malgré mon inaptitude à danser en temps normal – j'étais une véritable quiche dès qu'il s'agissait d'exécuter deux pas de valse ou de tango – je n'hésiterai plus jamais à me joindre au spectacle. Pour moi qui vivait constamment à travers mes sensations et mes émotions – quoi qu'en disent mes frères – l'euphorie procurée par cette danse féerique était presque sans égale. Et j'espérais, dans un coin de mon esprit, qui parvenait encore à héberger quelques-unes de mes pensées 'sobres' que notre invitée du soir appréciait également cette expérience peut-être nouvelle pour elle. Dans cette symphonie de sentiments d'allégresse et de joie mêlés, j'étais incapable de discerner les sentiments de ma mère adoptive, et je ne le désirais pas. La danse n'était pas un outil de perquisition des esprits, mais une réunion festives de cœurs liés par la nature, rien d'autre.

Oublieux du temps et des distances, je ne sus combien de temps je dansai aux côtés de mes semblables et de ma mère, et il me sembla remettre un pied dans la réalité lorsque la main de la dame aux cheveux blonds reprit la mienne sans brusquerie, et m'attira auprès d'une tulipe baignée de la lumière que l'une de mes semblables avait accumulée dans ses ailes fines et délicates. Ce qui me fit prendre conscience d'une certaine lassitude, celle d'un corps peu endurant et surtout peu habitué au spectacle féerique. Je retins un soupir de soulagement en me posant avec douceur sur les pétales de la tulipe, avant de lancer un regard perplexe à la dame aux prunelles émeraude. Néors, disait-elle ? J'affichai un sourire mi-figue mi-raisin, m'efforçant de chasser de mon esprit la vision d'un corps disloqué, terrassé par plusieurs tonnes de pierre.

« Je n'savais pas que les morts donnaient des nouvelles, répondis-je doucement, sans parvenir à être totalement détaché. »

Mais si ma mère posait la question, c'était probablement parce qu'il y avait une suite à cette affaire. A moins qu'elle ne parle d'un enterrement, d'une incinération ou autre, mais si c'était le cas, alors elle avait un sens de l'humour bien pire que je ne le pensais – même si je ne pensais pas grand chose de son sens de l'humour, en fait. Au final, je n'en avais pas appris davantage sur la mort de Néros, sur la manière dont il avait perdu la vie. Une perte qui m'avait affecté bien plus que je ne l'aurais suspecté avant que le drame n'arrive. Mais il était possible que sa mort ne soit qu'une étape. Qu'une nouvelle existence lui soit accordée. Mais quelque part, si je n'avais pas douté d'une réincarnation de mon demi-frère, c'est parce que je ne l'avais pas imaginé un instant voler au secours de qui que ce soit au prix de sa propre vie. Pas plus que je ne l'avais imaginé menant une vie vouée au mal, qui l'aurait mené droit vers l'Enfer. En réalité, j'avais su à la fois tant et peu sur ce demi-frère que j'avais un jour secrètement admiré.

De nouveau, la dame aux prunelles émeraude m'attira vers elle, et m'enlaça avec délicatesse, comme si la dernière tentative du genre, au Temple des Esprits, n'avait pas suffisamment grillé de neurones dans mon cerveau complètement perturbé. Mais après avoir dansé avec cette mère qui se disait aimante, pouvais-je encore la prendre pour une femme insensible et distante, peu soucieuse de ceux qu'elle avait accueillis sous son toit ? Une nouvelle fois, je ne bougeai pas, laissant cette mère me témoigner son affection alors que se disputaient en moi des sentiments contradictoires. Ma mère m'aimait. Mais devais-je réellement m'en réjouir ? Me réjouir qu'elle aime un être de mon acabit, un être insignifiant que j'estimais incapable de répondre aux exigences des Taiji ? Je ne savais pas. Je ne savais pas, et pourtant, je refermai avec une certaine maladresse mes propres bras sur cette mère aimante, si inhabituelle.

« Mère, je... »

Je m'interrompis, ravalant mes doutes, mes confessions. Il m'était si étrange de retrouver cette figure maternelle, dont je n'avais qu'un vague souvenir, me recueillant dans un jardin dévasté. Comment étais-je censé m'y prendre, moi qui ne devait, par définition, ne pas connaître de lien de parenté avec qui que ce soit, sinon la fleur qui m'avait donné naissance, et que j'avais d'ores et déjà oubliée ? Alors, mes habitudes reprenant le dessus, je gardai pour moi cette hésitation, préférant mettre les pieds dans le plat d'une manière bien différente :

« Mère, il s'est passé quelque chose ? »

Ma voix était encore légèrement hésitante, car je ne savais toujours pas où se situaient mes prérogatives. Mais toujours est-il que j'avais le sentiment, peut-être erroné, que quelque chose soit arrivé pour que ma mère adoptive se décide à me témoigner aussi soudainement son affection.
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Mitsu
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Mar 27 Aoû 2013, 16:43

Faust avait quitté sa fleur des yeux, s'installant pourtant non loin d'elle, sur le bord de l'eau. Dans l'esprit du petit déchu, peut-être que lui aussi pourrait participer au spectacle féerique. Après tout, il avait des ailes et puis, même s'il ne faisait pas de la lumière, il pouvait créer des fleurs. Seulement, il ne savait pas s'il avait le droit. Il n'était pas une fée. Sa maman non plus mais comme elle était une déesse, elle avait sans doute l'autorisation. Il fit une petite moue avant de s'approcher un peu plus du bord, enlevant ses chaussures pour y tremper ses pieds. L'eau était fraiche mais cela lui fit du bien. Des fées s'amusaient à former des ronds dans l'eau, se posant délicatement sur le liquide de vie, la lumière illuminant l'eau au plus grand bonheur du spectateur. Mais Faust ne voulait pas rester simple spectateur, non, il voulait participer, créer de belles choses qu'il pourrait montrer à Zéleph quand le réprouvé ne serait pas autant occupé. Alors, il se concentra. Il était encore petit dans sa tête et il avait du mal à utiliser ses pouvoirs. Néanmoins, de rien, à côté de lui, des fleurs commencèrent à pousser doucement, des toutes petites fleurs, bien plus petites que la moyenne mais proportionnées à la taille du créateur. Il sourit, heureux, au comble du bonheur lorsque des fées vinrent éclairer ses créations. Lui aussi voulait être un fé, comme son frère. L'enfant chercha sa mère des yeux sans la voir. Cela dit, il ne s'inquiétait pas. Lui, il avait toujours sa maman, Enzel ne devait pas la voir souvent. Il ne l'avait même jamais vu. Avait-il vécu au manoir? Lui-même n'y avait vécu que tardivement. Il pensa à son père, à Dante. Il ne savait pas ce qu'il était devenu et, malgré l'abandon de ce dernier, il l'aimait quand même. Alors il se le promettait, il deviendrait un grand déchu, un homme sur lequel l'on pourrait compter et qui pourrait faire de grandes choses comme son père. Plus que cela, il voulait que sa maman et Zéleph soient fiers de lui, qu'Enzel le soit aussi, ainsi que tous ses frères. Là, il fit un vœu, éclairé par la lumière de celles qui dansaient pour lui, promettant qu'il ferait tout pour être quelqu'un de bien.

Mitsuko se recula légèrement, regardant Enzel un instant sans rien dire. Des choses, il s'en était passé, c'était une certitude mais devait-elle lui faire le récit de tout ce qui avait changé dans sa vie, de tout ce qui la tourmentait? Après tout, elle n'avait jamais pris soin de lui. Cela ne se faisait pas de se lamenter sur son sort auprès de quelqu'un qui avait sans doute connu bien pire. Elle finit par s'asseoir sur le pétale de la tulipe, ses jambes se balançant doucement dans le vide. « Eh bien... ». La déesse ne souhaitait pas lui parler de Zéleph ou même d'Erza. L'illuminae ne devait pas savoir grand chose de sa vie. Elle ne savait pas, elle ne pensait pas. Cela dit, elle pouvait lui dire des choses, des choses qui lui sauveraient peut-être la vie ou apaiseraient son esprit. Elle n'avait nul endroit où vivre mais peu importait, un dieu va où il veut, n'a pas besoin d'un toit. Violette et Faust étaient confiés à Seth lorsqu'elle ne pouvait pas s'en occuper et, de toute façon, où qu'elle aille, les gens aimaient toujours s'occuper des deux enfants. Cependant, la perte de sa demeure impliquait une conséquence, une de celles qui ne devaient guère être ignorées de ses enfants. « … le manoir Taiji n'est plus à moi. ». Elle l'avait dit doucement, le regard perdu sur le spectacle qui continuait. « Notre lignée a commencé avec deux femmes, deux grandes reines qui sont souvent mentionnées dans les livres d'histoire pour avoir régné pendant l'ère du Yin et du Yang, l'une sur le mal, l'autre sur le bien. Dans notre famille, toutes les femmes portent le prénom de Mitsuko. C'est une tradition. Disons que la première Mitsuko est revenue d'entre les morts par une technique que je crains fort douteuse. Néanmoins, elle est celle qui a construit le manoir Taiji, la demeure lui obéissant au doigt et à l'oeil. De ce fait, elle y est retournée vivre. ». Elle fit une pause, tournant son regard vers Enzel avant de dire plus sèchement, comme si c'était bien plus un ordre qu'une recommandation. « N'y retourne jamais! ». Elle soupira, se rendant compte qu'elle avait sans doute été trop autoritaire. Son fils était grand et quoi qu'elle en pense, elle ne l'avait jamais élevé. Ses paroles ne devaient pas avoir un grand poids sur sa conscience. Elle expliqua. « Cette femme est cruelle, manipulatrice. Elle aime s'adonner à des plaisirs que même les déchus trouveraient vulgaires. Elle aime faire le mal et sait parfaitement comment s'y prendre. Deux de mes fils adoptifs se sont déjà faits piégés par elle en se rendant au manoir et je n'ai pas envi qu'un autre connaisse le même sort. Si elle pouvait t'arracher les ailes, abuser de ton corps pour ensuite te torturer jusqu'à ce que tu meurs, elle le ferait, crois moi. Ce lieu est devenu maudit. ». Elle ne pensait pas qu'il y retournerait, après tout, il avait fui en quelque sorte. Cela dit, elle préférait que cela soit clair. Tenir de tels propos était un peu étrange au milieu d'un spectacle qui mêlait élégance et pureté mais elle ne savait pas quand est-ce qu'elle pourrait le revoir. Elle plaça sa main sur son ventre par habitude avant de se rappeler qu'il était vide, la retirant. Elle sourit doucement, comme si elle était désolée pour elle-même de se croire encore enceinte. « Cependant, Neros n'est pas mort. Il s'est sacrifié pour sauver quelqu'un et a été réincarné en ange. Je pensais que cette nouvelle te plairait. ». Elle regarda Faust un peu plus bas. Elle ne voulait pas perdre d'autres enfants. Ils n'étaient pas naturels mais elle les aimait tous. Bien sûr, certains plus que d'autres, c'était un fait, mais c'était surtout parce qu'elle n'avait pas eu l'occasion de parler avec tous. Sans doute que si cela se produisait, elle partagerait son amour équitablement. Elle qui avait toujours pensé être incapable d'aimer se retrouvait dans une drôle de situation. Elle n'était pas faite pour être mère, jamais elle ne l'avait été. Tout ce qui l'avait toujours intéressé c'était le pouvoir mais, à présent, du haut de sa divinité, elle voyait les choses autrement. La matérialité n'avait plus aucune importance. Mais ses enfants en prenait une véritable. Elle les observait s'épanouir, grandir. Ses fils, malgré leurs gènes, étaient tous différents, certains totalement fous, d'autres ayant un sérieux complexe d'infériorité. Beaucoup se pensaient parfaits même. Seulement, quoi qu'ils pensent, ils avançaient tous sur le chemin de la vie, devenant de plus en plus puissants, de plus en plus importants. Elle ne voulait plus qu'ils deviennent rois, elle voulait simplement qu'ils soient heureux, où que le fameux chemin les conduise. « Et toi? ». La question était libre, il pouvait l'interpréter comme bon lui semblait.
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Ven 30 Aoû 2013, 00:23


Mettre mon nez dans les affaires des autres et les garder écartés des miennes. Voilà qui faisait partie de mes vilaines habitudes, mais lorsque l'on parlait des affaires de famille, pouvais-je vraiment dire que cela ne me concernait pas, de près ou de loin ? Au fond de moi, j'avais deviné que je ne saurais qu'une infime partie des tracas hantant ma mère, et que la discussion reviendrait plus ou moins naturellement vers moi. Mais n'était-il pas normal pour cette mère que je n'avais quasiment jamais côtoyée de garder pour elle les soucis qui ne la concernaient qu'elle, ou tout du moins qui n'avaient rien à voir avec ma personne ? Notre hésitation à nous faire confiance me peinait comme elle me soulageait, car au plus profond de moi, je n'avais toujours pas réussi à déterminer si me rapprocher de ma mère adoptive était une bonne chose ou non. Elle, elle devait déjà être accablée par bien des tourments pour ne pas avoir à prendre en compte les miens. Quant à moi, j'étais toujours aussi réticent à confier quoi que ce soit à qui que ce soit, n'ayant guère l'envie de me faire plaindre par quelqu'un, même s'il s'agissait de ma mère. Surtout s'il s'agissait de ma mère, en fait. Quelque part, je craignais encore le jugement d'une femme que je ne connaissais qu'à peine vis-à-vis des crimes que j'avais commis. Comme un enfant craint d'avouer une bêtise qu'il a faite à ses parents, en somme. Même si, en soi, la couleur de mes ailes parlait pour moi, et que la seule raison pour laquelle j'avais osé les arborer en la présence de ma mère était le spectacle féerique, qui avait tenu loin de moi toutes ces considérations morales et éthiques pour ne laisser que la joie et l'exaltation de la danse. Mais à présent, celles-ci se dissipaient, et si mes semblables continuaient de danser, j'avais pour ma part déjà refermé l'accès mon cœur et à mes sentiments.

Mon regard gris posé sur les Fées dansantes, ne les observant toutefois que distraitement, je m'efforçai de contrôler la rancoeur qui était venue m'assaillir dès le moment où la voix de la dame aux prunelles émeraude s'était faite autoritaire. Même si, au fond, je savais que l'ordre partait d'une bonne intention de la part de Mitsuko, je pouvais empêcher la révolte de gronder en moi, cette même révolte qui m'avait fait quitter le Manoir Taiji. Même maintenant, après un temps passé à l'écart de l'environnement exigeant des Taiji, j'avais encore du mal avec les figures d'autorité, quelles qu'elles soient, et jamais je ne m'étais empêché d'exprimer honnêtement ma pensée envers ces dernières. Ma mère n'était pas censée faire exception, mais je n'étais pas assez idiot pour faire abstraction du fond pour me concentrer uniquement sur la forme. Aussi m'étais-je efforcé de demeurer immobile et silencieux, debout derrière la dame aux cheveux blonds, une partie de mon esprit occupée à chercher dans mes souvenirs les cours d'histoire du monde et de la famille Taiji que j'avais suivis au Manoir. Après tout, notre ancêtre maléfique n'était pas réputée pour être des plus tendres, aussi pouvais-je comprendre dans une certaine mesure le discours plutôt extrême de ma mère à ce sujet. De même que sa peine devant la perte de son foyer, tombé aux mains d'une telle personnalité. Quoique je n'avais jamais vraiment eu vent d'un parti pris pour le bénéfique chez ma mère, en fait. Cela me désolait tout autant que me révoltait. Je connaissais si peu de choses de celle que j'appelais pourtant 'Mère'...

Je détournai un instant le regard de la chevelure blonde de ma mère et du spectacle féerique pour le poser sur le pétale sur lequel nous nous étions posés. Tous ces sentiments contradictoires que j'éprouvais à l'égard de ma mère me paraissaient si risibles à côté du sérieux de ce qu'elle m'annonçait. J'avais bien fait de ne pas retourner au Manoir, au final... Pendant une fraction de seconde, j'avais hésité à y emmener Feyd pour l'aider à se remettre du Vaakum qui l'avait frappé, mais j'avais bien vite écarté la possibilité, préférant le Sanctuaire accueillant des Protecteurs du Bonheur plutôt que ce Manoir apparemment devenu l'antre d'un monstre à éviter. A présent, je devais juste prévenir mon compagnon Steel de ne plus y pointer le bout de ses plumes... Ces pensées rationnelles eurent le mérite d'apaiser quelque peu mon sentiment de révolte, qui laissa par ailleurs place à un certain soulagement mêlé de perplexité lorsque le nom de Neros franchit de nouveau les lèvres de la dame aux prunelles émeraude. Neros, réincarné en Ange ? Moi qui me faisais une vision assez sérieuse et carrée des êtres célestes, voilà qui avait de quoi bouleverser certaines de mes conceptions...

Mon regard gris acier se porta de nouveau au loin, sur ce spectacle féerique dont je m'étais coupé plus ou moins volontairement, que le jeune Faust observait avec intérêt et émerveillement. Ainsi, il persistait de l'innocence chez mes demi-frères... Ou tout du moins, au moins chez l'un d'entre eux. Et j'ignorais la manière dont cette réalité m'atteignait, tout comme je ne savais pas vraiment comment réagir aux nouvelles de la réincarnation de Neros. Mes sentiments envers mes demi-frères étaient tout aussi mitigés que ceux que je portais à ma mère adoptive. Mais je pouvais au moins dire avec certitude que la nouvelle ne me laissait pas de marbre, ni m'affligeait.

« Je n'sais pas. »

Une réponse donnée à la fois pour les nouvelles de Neros et pour la question ouverte que venait de m'adresser Mitsuko. Peut-être que la réincarnation de Neros me faisait plaisir. Peut-être. Et cette incertitude même me dégoûtait. Neros était mon demi-frère, et pourtant, je pensais n'éprouver rien de plus qu'un simple soulagement, comme lorsque n'importe quel péquenot lambda échappait à un sort qu'il n'avait pas mérité.

Et je ne savais pas non plus quoi répondre à la dame aux prunelles émeraude. A quel point connaissait-elle les sentiments qui m'habitaient ? A quel point s'intéressait-elle à ce fils banal qui avait eu un jour l'envie de voir autre chose que la rigueur et l'exigence du Manoir Taiji, et en était parti comme un voleur ? Cette pensée laissa derrière elle un arrière-goût amer.

« J'ai trouvé un autre choix de vie, finis-je tout de même par ajouter. Qu'en est-il de vous, Mère ? Je n'ai jamais rien su de vous. Où vivez-vous à présent, maintenant que nous n'avons plus de foyer ? »

Je n'avais pu empêcher mes propos se teinter légèrement d'amertume. Pas plus que je n'avais pu m'empêcher de dire la vérité, d'avouer mon ignorance totale sur qui était celle que j'osais appeler 'Mère'. Et, plus ou moins consciemment, je m'étais de nouveau dérobé, ne trouvant pas en moi la force ou le courage d'avouer quoi que ce soit d'autre. Je n'avais jamais été très loquace sur ce qui concernait ma propre personne.
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Ven 30 Aoû 2013, 15:57

Mitsuko tourna la tête vers Enzel, le contemplant un instant avant de sourire. Elle n'était pas aveugle, elle n'était pas sourde. Peut-être ses questions dérangeaient-elles l'illuminae? Il faut dire qu'elle ne lui en avait jamais posé autant, qu'elle ne lui avait jamais parlé réellement. Le ton de sa voix prouvait que quelque chose n'allait pas et comment cela pourrait-il être? Elle était sa mère mais, quelque part, elle n'était qu'une étrangère. Comme un enfant retrouve son parent des années après en avoir été séparé, il ne pouvait pas lui montrer de l'affection. Ils conversaient comme l'auraient fait deux étrangers. Pourtant, elle souhaitait vraiment venir à bout de la barrière qui s'était érigée entre eux, gravir le mur qu'il avait placé devant lui. Peut-être avait-elle également cherché à en construire un pour la protéger elle? C'était même certain, elle avait toujours vécu ainsi. La solution était sans doute de lui parler d'elle, sans rien attendre en retour, lui parler de ce qu'elle était, de ce qu'elle pensait. A force, peut-être que le mur s'écroulerait?

« En réalité, je n'ai nullement besoin d'un endroit pour vivre. Je ne vis pas. ». Ce qui était loin d'être faux. « Je suis morte trois fois dans mon existence. La première fut lorsqu'un vampire planta ses crocs dans ma chair. La deuxième fut lorsque je me suis jetée du haut du rocher au clair de lune. La troisième fut lorsque j'ai décidé de quitter les mortels. ». Elle sourit. « Mes deux premières morts m'ont conduit à devenir reine, la dernière à être au dessus de tout. Et pourtant, je n'ai jamais été aussi proche de ce monde, de la nature, des êtres l'habitant. C'est comme si je ressentais le lien qui unit chaque chose, le tout. Peut-être cette notion est-elle complexe à cerner mais c'est comme si j'étais ce tout. ». Elle n'avait cas fermer les yeux pour ressentir chaque chose, chaque plante, chaque être. Les fées, leurs sentiments, leurs pensées. Elle pouvait lire en son fils, en son cœur, en son esprit, même si elle ne le faisait pas par respect pour lui. Cela aurait sans doute contribué à arranger les choses entre eux mais elle voulait essayer de le faire sans employer la magie. Il n'avait jamais rien su d'elle mais beaucoup d'individus n'avaient jamais rien su. Elle s'était toujours débrouillée pour garder les personnes loin d'elle, pour faire de sa vie une énigme aux yeux des autres. Elle détourna le regard, le plantant sur le spectacle, sur le monde, sur la vie. « Un autre choix de vie? J'aimerai bien en savoir plus. ». Elle sourit puis finit par murmurer : « De toute façon, tu seras amené à changer bien des choses, à faire d'autres choix, à choisir d'autres chemins. Ta vie est la tienne et peu importe ce que tu en feras, si tu le fais pour toi, de par ta seule volonté. Certains n'ont pas la possibilité de choisir. ». Peut-être parlait-elle pour elle? C'était que son existence était bien complexe. Elle n'était pas maîtresse que de sa propre vie. Il y avait tellement d'individus qui avaient tourné autour d'elle dès son plus jeune âge. Naram avait fait d'elle un être maléfique, Jun l'avait protégé en essayant de compenser ce mal, son ancêtre avait élu domicile dans son esprit, influençant ses choix. Seulement, elle était plus forte qu'elle, Jun était passé de bénéfique à maléfique et Naram... Naram était Naram. Cet homme avait pleuré sa mort dans ce futur sans réalité, lui avait érigé un tombeau incroyable et s'y était battu pour elle mais il semblait bien incapable de tels actes dans le présent. « Hum... Que puis-je te dire sur moi? Je suis née dans un petit village de magiciens, puis suis devenue sorcière. A cette époque, je dois avouer avoir commis plusieurs meurtres pour la science. ». Elle sourit. « J'ai toujours eu un esprit scientifique, cette volonté de savoir, d'aller encore et toujours plus loin. Néanmoins, je ne me suis jamais sentie l'âme d'une tortionnaire. Certains tuent sans raison, ce ne fut pas mon cas. Et puis, un vampire m'a transformé un jour. Je suis devenue reine. Mais je voulais connaître les mystères de la vie et de la mort. J'ai sauté de ce fameux rocher après avoir invoqué l'esprit de la mort. Nous nous sommes battus, j'ai gagné. ». Elle rit. « Peut-être que tout ceci te semble ennuyeux mais je ne saurai résumer plus de trois siècles d'existence... trois ou quatre, je dois avouer avoir arrêté de compter. Enfin, peu importe. Pour moi, à présent, bénéfique, maléfique, neutre, ne sont plus que de vagues notions. Je suis au dessus de celles-ci. ». Elle le regarda un instant, semblant réfléchir. « Disons que lorsque j'étais enfant, j'ai quitté mes parents. Ils ne me semblaient plus correspondre avec le mode de vie que je voulais. Ils ne me comprenaient pas et je ne voulais pas leur briser le cœur. Le mal est un fardeau bien étrange à porter. Une libération aussi. Alors, quand je vous ai connu, tes frères et toi, j'ai voulu vous donner une éducation qui vous permettrait d'aller où vous voulez. Peut-être un peu stricte, il est vrai. Cela dit, tous les enfants qui furent les miens ne sont pas restés au manoir. Je pense que chacun est libre d'aller là où son destin l'appel. ». Elle sourit puis reporta son attention sur le paysage. « Je ne sais pas quoi te dire d'autres sur moi. J'aime beaucoup les gâteaux. ». A peine avait-elle dit cela qu'un petit biscuit au chocolat était apparu devant elle, un autre devant Enzel. Elle le prit et croqua dedans. Vidant sa bouche avant de parler, visiblement ravie du goût, elle lui fit remarquer. « Mais, à présent que je suis avec toi, je suppose que tu pourras obtenir les réponses aux questions que tu souhaites me poser. ». Une façon de lui dire qu'il pouvait la questionner s'il en éprouvait le besoin.

Pendant ce temps, Faust s'était mis à chantonner doucement, créant des fleurs comme s'il avait l'intention de ne laisser aucun endroit sans couleur.
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Ven 30 Aoû 2013, 23:20

Ainsi, les Aetheri ne vivaient pas ? J'aurais vraiment déshonoré le nom de Taiji si je n'avais pas deviné ce qui se cachait derrière les propos à peine énigmatiques de ma mère. Ainsi, cette dernière faisait à présent partie de ceux qui regardaient le monde évoluer de leurs prunelles divines et toutes puissantes, sans n'avoir plus rien en commun avec nous autres mortels. Je demeurai muet, mon regard rivé au loin sur le spectacle féerique sans vraiment le voir. Etrangement, je n'étais pas surpris. Enfin, presque pas. Mais que cette mère lointaine et inaccessible soit une déesse différente du commun des mortels n'était à vrai dire pas si difficile à concevoir. Les seules choses que j'avais senties émanant d'elle étaient son désir de me protéger lorsqu'elle m'avait recueilli, et son vœu d'une vie de perfection par le biais des exigences qui nous avaient été imposées durant notre éducation au Manoir. Ce qui allait plutôt dans le sens de ma conception d'un être supérieur, d'un être à part, d'un être lointain et inaccessible. Je ne comprenais néanmoins toujours pas quelle était la raison qui avait poussé une telle femme à nous recueillir, nous autres qui n'étions pas liés à elle par le sang... Qu'attendait-elle de nous, cette femme qui avait vécu bien des expériences, qui était allée au-delà de la vie et de la mort ? Bien au-delà de considérations occupant l'esprit des mortels, bien loin de ce conflit manichéen entre le Mal et le Bien... Les Aetheri possédaient-ils des sentiments ? Cet amour que cette dame aux prunelles émeraude affirmait avoir pour moi, était-il réel, ou n'était-ce qu'un mensonge d'Aether ? Dans quelle mesure ces êtres tout puissants pouvaient-ils se sentir affectés par nous autres, simples mortels ?

Une vie faite de gloire, de triomphe, de morts et très probablement de souffrances. Ainsi aurais-je résumé cette vie que la dame me racontait, une vie qui semblait être pour elle très lointaine, et d'une complexité que je pouvais difficilement appréhender. Mais je pouvais au moins affirmer que Mitsuko n'avait jamais manqué d'ambition, et que peut-être cette ambition avait-elle influencé notre éducation, et son vœu pour nos vies, à nous qui partagions son nom. J'avais toujours entendu mes frères parler de pouvoir et de perfection, de but à atteindre, de peuples à mener et à sauver, de stratagèmes à échafauder, de fondations à détruire, tandis que moi et ma banalité ne tentions que de trouver un moyen d'exister dans cet univers qui était devenu plus ou moins malgré lui d'un élitisme impitoyable. Désirait-elle que nos vies soient semblables à la sienne, que nous allions au-delà des frontières de la mort et de la vie, que nous nous élevions comme elle l'avait fait, que nous connaissions les joies d'une existence qu'elle avait elle-même connues ? Si telle était la vérité, j'aurais été peiné d'admettre qu'il s'agissait là d'un vœu égoïste auquel je ne pouvais me conformer. Mais au lieu d'écarter ce choix de vie simple que j'avais fait, la dame aux prunelles de jade s'était enquise de ce qu'elle devait déjà connaître. Les Aetheri n'étaient-ils pas omniscients ? Elle semblait connaître une voie à laquelle j'étais voué, alors que je ne faisais qu'entrevoir le peu de choses que j'étais capable de changer.

Le destin dont elle parlait me semblait si abstrait. Et si j'étais à peu près certain que la plupart de mes frères savaient où devaient mener leurs pas, je n'avais, en ce qui me concernait, pas vraiment l'impression d'être voué à faire quoi que ce soit sinon poursuivre humblement ma route sur ce chemin que j'avais choisi en âme et conscience, ne doutant pas un instant que je n'y trouverai ni la gloire ni le pouvoir. Mon destin, si il devait y en avoir un, semblait être bien médiocre par rapport à ceux de mes frères, mais j'avais décidé de m'en contenter. S'en contenterait-elle également ? Elle était Aether à présent, alors peut-être que tout cela, au fond, l'indifférait. Et pourtant, je ne pouvais me sortir de l'esprit ces mots simples et que je voulais honnêtes qu'elle m'avait adressés en m'enlaçant avec tendresse sur ce pétale de tulipe. Aether... Que voulait donc vraiment dire ce mot ?

C'est avec surprise que je rattrapai le gâteau qui venait d'apparaître devant moi, mettant par la même occasion fin à mes questions existentielles. Posant mon regard gris acier sur la chevelure blonde et légèrement ondulée de la mère, j'esquissai un sourire mi-figue mi-raisin, et mon naturel reprenant le dessus, je ne pus m'empêcher de commencer à répondre de la manière la plus inutile qui soit :

« Et ben j'ai le regret de vous annoncer que votre fils ici présent est un bien piètre cuisinier. »

Dégustant le gâteau qui venait de m'être offert par la déesse – dit comme ça, j'aurais tout aussi bien pu l'encadrer et en faire un objet de culte, en fait – je m'assis à mon tour sur le pétale de la fleur, mais ramenai mes jambes vers moi, et croisai mes bras sur mes genoux après avoir fini de savourer la sucrerie. La dernière fois que j'avais tenté de cuisiner, Feyd avait dû voler à la rescousse de mes petits pois avant qu'ils ne connaissent un sort funeste. Alors qu'il souffrait encore de son Vaakum, oui oui.

« En revanche, poursuivis-je plus sérieusement, je me suis dit que vivre pour l'humanité devait pas être si mal. Mais ça doit vous paraître dérisoire. Moi aussi, je suis un sale gosse qui a préféré quitter le toit familial par inadéquation. »

Et qu'étais-je devenu ? Une Fée sans jardin employant sa magie à aider autant les hommes que les plantes. Pour quelqu'un qui s'était élevé au-dessus des notions de Bien et de Mal, cela devait probablement être d'un ennui mortel. Mon regard se perdit de nouveau dans le lointain, avant de se poser sur le jeune Faust. Et je ne pus m'empêcher d'esquisser un sourire amusé en voyant l'enfant fleurir les alentours, pour le plus grand bonheur de mes semblables.

« Mère... continuai-je, hésitant, alors que mon sourire s'effaçait de mes lèvres. Avez-vous des regrets ? Ou en avez-vous déjà eus ? »
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Mitsu
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Mitsu
Mar 10 Sep 2013, 14:23

Mitsuko sourit lorsqu'il lui dit qu'il n'était qu'un piètre cuisinier. « Moi aussi. ». Il faut dire que vivre dans un manoir, entourée de serviteurs, n'était sans doute pas la meilleure façon d'apprendre à confectionner des gâteaux. Le seul individu qui avait voulu lui apprendre était Zéleph. Zéleph. Elle baissa les yeux, songeuse, avant de les fermer en expirant calmement. Elle n'avait nul besoin de respirer mais son enveloppe charnelle appelait à cela et elle s'était promis d'essayer de rester sur le même plan que les mortels. C'était difficile mais elle le devait. Repensant à la confection de ce gâteau au fruit qui lui avait demandé bien plus de concentration que celle qui lui avait été nécessaire pour prendre le trône des vampires jadis, elle sourit, nostalgique. Elle se revoyait éplucher les pommes d'une étrange façon, ces dernières ne ressemblant d'ailleurs plus réellement à des pommes à la fin de l'opération. Et puis le réprouvé avait sans doute dû avoir pitié d'elle et s'était glissé dans son dos, l'aidant à mener le couteau d'une main de maître. A l'époque, ils n'étaient pas mariés. Ce gâteau, elle l'avait offert à Neros. « Cependant, si tu le désires, je peux t'en faire un. Réellement... ». A présent, elle pouvait simplement les créer, mais, au final, l'effort de la confection était sans doute bien plus appréciable. Et puis, peut-être que Faust en voudrait un lui-aussi ?

Elle rit, l'écoutant lui conter sa vie, ses choix. Il n'y avait rien de dérisoire là dedans. « Au moins, nous avons trouvé deux points communs. ». Le manque de savoir faire en cuisine et le fait de quitter le nid familial. Mais peu importait le passé, le principal était ce qu'ils étaient en train de vivre en ce moment même. « C'est, cela dit, un choix de vie comme un autre. Si cela peut t'apporter ce que tu recherches, alors n'hésites pas. ». Elle tourna son regard vers lui, ses yeux dans les siens. Elle sourit, son expression se voulant encourageante autant que bienveillante. Elle se fichait éperdument, aujourd'hui, que ses enfants soient rois ou conseillers des rois. Ce qu'elle souhaitait, c'est qu'ils trouvent leur voie et qu'ils la suivent sans se perdre pour toujours. Elle voulait les protéger comme elle n'avait su le faire avec Erza, elle voulait les laisser faire leurs choix, n'intervenir qu'en cas de nécessité et, surtout, discuter avec chacun d'entre eux comme elle était actuellement en train de le faire avec Enzel. Cela serait difficile mais peu importait finalement, elle avait le temps.

Ce qu'elle regrettait ? Ses regrets ? Bien sûr, elle en avait. Des actes qu'elle avait accompli et qui avait plongé l'humanité dans un véritable bain de sang. Mais lui expliquer serait sans doute trop long. La déesse amena alors la paume de sa main à sa bouche, cette dernière vers le haut. Elle souffla dedans et de la poussière dorée en sortit, créant devant leurs yeux la scène d'un théâtre où commença à se jouer des actes de sa vie. Sa rencontre avec Orion, le fait qu'elle l'ait rendu fou, le fait qu'elle lui ait posé la couronne des sorciers sur la tête. L'ignorance qui avait poussé Jun a vouloir la tuer, le fait qu'elle ne soit pas intervenue lorsque son ancêtre avait commencé à le manipuler. Et puis, il y avait bien des choses comme celle de laisser Zéleph s'en aller du temple des esprits, le fait qu'elle l'avait laissé l'oublier. Et, finalement, la perte d'Erza, le fait qu'elle soit restée distante avec ses enfants. C'était ici des choses qu'elle regrettait. Il y en avait d'autres, bien plus confidentielles mais lui montrer celles-ci était déjà un effort, c'était comme lui avouer qu'elle était presque directement responsable des événements néfastes des deux dernières ères. Orion était devenu fou en la côtoyant, maléfique, et elle lui avait donné le trône, leurs cœurs battant à l'unisson dans cette folie destructrice. Elle l'avait provoqué et avait cherché par la suite à sauver l'humanité. Quant à Jun, elle savait qu'il avait fait cela pour elle au début, jusqu'à ce que son projet prenne une tournure bien plus néfaste. Et lorsque les réprouvés s'étaient faits attaqués par les sorciers, elle avait laissé les choses se faire, ne pouvant intervenir. Mais, elle regrettait tout de même. Elle regrettait d'avoir passé son temps auprès de Zéleph au lieu de devenir bien plus puissante. Elle sourit avant de rajouter. « Et pour finir, je regrette d'être devenue une Aether. ». C'était le drame de sa vie. Naram l'avait prévenu, elle ne l'avait pas écouté. Elle était bien plus puissante avant de devenir immortelle, la femme la plus puissante de ces terres. L'esprit de la mort tout en étant un génie bien plus puissant que le Mârid lorsqu'elle apposait la couronne de la race sur sa tête. Cette existence hors de l'humanité la rongeait, lui déplaisait et c'était pour cela qu'elle devrait franchir les paliers petit à petit pour redevenir humaine, humaine et totalement faible. Elle ne le vivrait sans doute pas mieux mais son rôle sur les terres du Yin et du Yang serait différent. « Je préférai être impliquée. Bien sûr, je le suis encore mais c'est tellement dur pour un dieu d'être dans la réalité des mortels. Parfois, lorsque je ferme les yeux ce qui paraît pour moi n'être que quelques minutes, je m'aperçois que le ciel a déjà été recouvert par la nuit. Parfois je marche des heures pour ne faire qu'un pas. C'est réellement étrange. Et toutes ces voix dans ma tête qui appellent la justice sans cesse... ». Et puis, elle avait pris connaissance de certaines choses qu'elle aurait préféré ne point savoir. Doucement, elle retourna la question à Enzel, son théâtre de souvenir tombant dans l'eau. « Et toi, as-tu des regrets ? ».

Pendant ce temps, Faust avait décidé de s'envoler parmi les fées, avec ses ailes noires de déchu. Il n'était pas aussi élégant qu'elles mais cela se voyait qu'il faisait des efforts pour reproduire leurs mouvements. Et, comme le petit garçon ne contrôlait pas réellement ses pouvoirs, les fleurs qu'il avait créé se mirent à le suivre, se multipliant de plus en plus sur les berges des cascades cristallines.
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Sam 14 Sep 2013, 23:08

J'aurais presque eu la débilité de croire que les prédispositions culinaires étaient héréditaires. Mais de un, Mitsuko et moi n'étions pas liés par le sang, et de deux, j'étais persuadé qu'au moins la moitié de mes frères savait se débrouiller devant les fourneaux, la perfection des Taiji n'ayant guère de limites – ce qui, pour une fois, était loin de me complexer. Je ne pus cependant m'empêcher d'esquisser un sourire en entendant la proposition de ma mère adoptive, qui soudainement me proposait de confectionner de manière artisanal un gâteau rien que pour mes beaux yeux – dit comme ça, c'en était presque gênant. Ainsi, c'était aussi cela, que d'être Aether... Voir les plaisirs les plus simples de la vie vous filer entre les doigts simplement parce que vous aviez rêvé de puissance, et d'être l'incarnation d'une des valeurs de ce monde. Je n'avais jamais vraiment considéré la question, n'ayant jamais vraiment pensé que l'ascension des êtres mortels était réalisable, mon pragmatisme étant accompagné d'un certain scepticisme envers certaines légendes de ce monde. Pas que je ne croyais pas aux Aetheri – ç'aurait été un comble pour un disciple du Temple des Esprits – mais j'avais jusqu'à présent eu un peu de mal à concevoir le passage du statut de mortel à celui de divin. Quand bien même je n'avais pas tant connu que cela ma mère en tant que mortelle. J'avais juste le vague souvenir d'avoir été recueilli peu de temps après ma naissance, suite à la destruction de mon premier jardin. Un souvenir de douceur et de gentillesse que je n'avais plus jamais revues chez une mère distante et absente. L'ironie de l'histoire était que je retrouvais un peu de cette affection maternelle chez cette dame mystérieuse qu'une fois son 'humanité' perdue. Etait-ce parce qu'elle avait accédé au divin qu'elle trouvait à présent sa conduite erronée ? Elle ne semblait plus tellement vouloir la perfection pour ses enfants, mais simplement le bonheur, alors que j'avais passé une enfance entière à me reprocher mon affligeante normalité.

Elle ne me reprochait même pas ma fugue du manoir. Alors qu'au fond, j'avais toujours craint de faire de nouveau face à ma mère, en tant que vilain enfant mal éduqué qui avait pris la tangente sans prévenir et sans explications. Quelque part, je doutais que personne ne m'ait vu sortir du manoir la nuit où j'avais décidé de chercher une autre voie, mais toujours est-il que nul n'avait tenté de me stopper – quoique si cela était arrivé, j'aurais probablement été incapable de m'enfuir. Je sentis la moitié du poids qui m'accablait se dissiper, sans pour autant entraîner avec elle l'autre part de ce fardeau que je m'étais décidé à porter jusqu'à la fin de mes jours, et que je craignais pourtant révéler à ma mère adoptive. Car celle-ci avait beau avoir été distante et quasiment inexistante, elle demeurait pour moi un être dont le jugement était à part. Aussi étrange cela puisse paraître. Peut-être avait-elle senti que je ne disais pas tout, mais je ne pouvais me défaire de toutes mes réticences en l'espace de quelques heures de danse, aussi joyeuses et enivrantes avaient-elles été. D'autant plus que, quelque part, la dernière question que j'avais posé à la dame aux cheveux d'or était née de ce tiraillement intérieur, de cette envie de se confier refrénée par la crainte du jugement.

Cependant, je ne m'étais guère attendu à ce que Mitsuko réponde de manière aussi honnête à mes interrogations. Je ne m'étais guère attendu à ce qu'elle m'expose ainsi un pan entier de sa vie qui m'avait toujours été étrangère. Cette soirée était décidément riche en informations... A côté de tout ce que ma mère me confiait, ce que je lui avouais de moi était bien peu. Mais cette considération se fit accessoire au moment où la poudre d'or magique soufflée par l'Aether se fit le théâtre des moments de sa vie qu'elle regrettait, et au vu de son âge, il n'était guère surprenant d'en voir autant... Enfin, c'était là ce que me soufflait ma raison, mais celle-ci était en passe d'être larguée en cours de route, pour tout vous dire... Je m'efforçai néanmoins de demeurer silencieux alors que se rejouait devant moi une partie de la vie de Mitsuko et de contenir mes réactions premières et déraisonnées. Ma mère avait fait le mal et le regrettait. Ma mère avait aimé et le regrettait. Ma mère avait ignoré et le regrettait. Ma mère avait perdu et le regrettait. Et alors que je restais obstinément silencieux une fois le théâtre disparu, les dernières pensées de la dame étant exprimées par sa voix même, je sentais un étrange mélange de révolte et de tristesse émerger en moi. Elle regrettait tant de choses. Mais à travers ces souvenirs, j'avais pu deviner que sa vie ne s'était pas résumée à cette tristesse, et qu'elle avait également connu et côtoyé le bonheur. Pour le perdre à plusieurs reprises. Je n'avais eu droit qu'aux regrets, mais en filigrane transparaissait tout le reste. Ou au moins une bonne partie du reste.

Mon regard rivé sur les fleurs créées par mon demi-frère sans vraiment les voir, je ne répondis pas à la question de Mitsuko. J'en étais incapable. Comment l'aurais-je pu alors que les images d'une vie qui n'était pas la mienne étaient gravées à jamais dans ma mémoire, et avec elles, tous les non-dits qu'elles m'avaient laissé deviner ? J'avais beau le vouloir, je n'avais pas la force d'intégrer l'information avec une complète objectivité pour ensuite passer à autre chose. Au fond, j'étais du genre à fonctionner autant avec ma raison qu'avec mes sentiments. Ce qui n'était pas l'idéal lorsqu'on se prenait une telle dose d'information à haut potentiel sensibilogène dans la tronche. Posant mon menton sur mes bras croisés, je finis par briser le silence que j'avais instauré, sans toutefois oser croiser le regard de ma mère.

« Pardon. Je n'aurais p'tetre pas dû poser la question. »

Je me sentais suffisamment bouleversé pour ne pas oser imaginer ce qu'avait engendré le rappel de ces souvenirs pour celle qu'ils concernaient. A moins que les Aetheri soient également dépourvus de cœur ? J'avais envie de croire que non. J'avais envie de croire que ceux qui veillaient sur nous gardaient au moins un souvenir de ce qui faisait de nous des 'humains'. Et j'avais davantage envie de croire à la réalité des sentiments que semblait exprimer ma mère en venant pour la première fois parler à un fils qu'elle n'avait guère côtoyé jusque-là.

« Mais je suppose que ce n'est que justice que je vous réponde... soupirai-je. Je regrette d'avoir tué celle qui m'a montré une nouvelle voie à suivre. »

L'aveu était fait. Le jugement pouvait tomber. Mais au milieu de tous ces sentiments que je ne parvenais guère à calmer, voire même à dissocier les uns des autres, cela me paraissait tout d'un coup beaucoup plus dérisoire. Et malgré les piètres excuses que je venais d'offrir à ma mère, je ne pouvais m'empêcher de songer davantage à ses sentiments, aux miens, et ces questions indélicates que je devais pas poser, mais que je poserai quand même, fidèle à ma franchise.

« Est-ce... commençais-je, hésitant. Est-ce irréversible ? »

Non pas la mort d'Erys – cela, je l'avais accepté depuis un moment, et cela ne concernait que moi. Mais ce statut de divin qui semblait tant accabler ma mère, au point qu'elle en regrettait l'accession, était-il éternel ? N'était-il pas possible pour ceux qui avaient fait l'erreur de quitter les plaisirs de la vie de mortel de revenir sur leur décision ? Probablement était-ce là la question la moins indélicate qui m'était venue à l'esprit en entendant le récit de ma mère adoptive.
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Mitsu
Mer 30 Oct 2013, 15:09

Mitsuko resta silencieuse un temps certain, écoutant son fils parler sans pour autant répondre. Elle était plongée dans la contemplation de la danse féerique, perdant de nouveau la notion du temps comme une personne totalement sénile. Elle restait là, figée, ses paupières ne battant pas à la manière des papillons. Elle semblait n'être qu'une statue de glace, une œuvre d'art appartenant à un autre monde. Tuer, son fils avait tué une personne qu'il appréciait. Cela ne l'étonnait pas plus que cela à vrai dire. Combien d'individus avait-elle massacré pour les besoins de la science ? Combien d'individus avaient péri pour les caprices insensés des rois dont elle avait, jadis, fait partie ? Elle aurait même été prête à s'insurger contre le système si elle avait été encore Humaine. Les souverains se fichaient de leurs sujets et depuis des siècles et des siècles, le peuple était le seul à payer, à ramasser les morceaux des pots que les rois brisaient au sol sans ménagement. Elle en avait à présent conscience. Les Aetheri étaient différents des souverains au final et elle préférait cette essence que celle qu'elle avait possédé jadis, bien qu'en esprit de la mort, elle n'avait en aucun cas abuser du peuple. Seulement, à choisir entre individu lambda, souverain et Aether, elle avait le regret de penser qu'il valait mieux n'être qu'une personne sans importance, qu'il valait mieux avancer dans la vie en ne s'occupant que de soi, en fondant un foyer et en se battant pour le protéger au péril de son existence. Elle avait trop vécu, elle avait vu trop de choses, son nom était trop ancien pour qu'elle puisse s'adonner à ce genre de pratiques. Bientôt, Jun deviendrait un dieu et il la dépasserait en puissance. Elle le savait, elle le sentait. L'esclave deviendrait le maître. Elle devait avancer dans son culte, elle devait acquérir de la puissance mais elle en avait assez. Assez de cette course au pouvoir et lui, son âme sœur du chaos, n'en aurait jamais marre. Il serait un excellent dieu, bien meilleur qu'elle.

Mitsuko finit par sourire, doucement, tendrement, ne regardant pourtant toujours pas son fils. « Il existe un moyen de redevenir mortel mais, pour le moment, je ne peux y accéder. L'élévation est un engagement dangereux duquel on ne peut pas reculer. On ne peut qu'avancer jusqu'à atteindre le titre de Sympan. De là, du sommet de la puissance, l'on a le droit à plusieurs choix de vie. L'un d'eux est de devenir demi-dieu, un statut intermédiaire. Mais il n'est pas total car la divinité est toujours présente. Un autre, et celui qui est le plus intéressant et le plus terrible, et de se réincarner. Dans ce cas, la personne renaît, vierge de tous souvenirs, atteignant le stade d'évolution préalablement décidé lors de la cérémonie de déchéance du statut de divin. Aucun souvenir, une nouvelle vie... ». Sa voix était songeuse. C'était la solution qui la tentait le plus à vrai dire, avec celle de devenir esprit du temple. Mais cette dernière, elle ne voulait pas en parler pour le moment. Quant à la réincarnation, elle supposait tout oublier, elle supposait recommencer sans attache, en ayant perdu toute trace de son existence passée. Si elle faisait ça, alors peut-être serait-elle totalement différente ? Alors oui, quelque part, elle regrettait d'avoir emprunter ce chemin qui l'exposait à des choix de vie qu'elle ne souhaitait pas prendre. Si son sang ne l'avait pas poussé vers les sommets de la puissance, si elle avait écouté Naram, alors peut-être qu'elle ne serait pas ici, aujourd'hui, à s'interroger sur son futur. Au final, elle était toujours cette femme, si entourée et pourtant si seule, d'autant plus depuis que Zéleph n'était plus à ses côtés. Elle soupira, levant les yeux vers le ciel. Elle allait se retirer à présent.

Mitsuko tourna son regard vers Enzel. « J'ai été heureuse de te voir cette nuit. J'espère que nous nous reverrons bientôt. ». Elle n'avait pas réellement envie de le quitter ainsi mais elle avait aperçu dans le ciel quelque chose de non anodin. Elle devait aller voir. Sans doute un Aether qui souhaitait qu'elle arrête de discuter des choix de vie des divins avec un mortel. Cela aurait pu la faire rire si l'heure n'était pas aux au revoir, si ce n'était aux adieux. Elle ne le savait pas, elle ne savait pas de quoi serait fait demain. Elle sourit, faisant un clin d’œil au fé avant de disparaître en poussière d'étoiles, Faust, qui essayait de danser avec les créatures ailées, subissant le même sort.
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Mer 27 Nov 2013, 00:26

Aucun jugement. Aucun reproche. Il m'était étrange de constater qu'au final, j'avais redouté quelque chose qui n'existait pas. Les Aetheri devaient être bien trop éloignés de nous autres mortels pour daigner poser un œil autre que celui distant qui leur était propre sur nos actions. Peut-être était-ce pour cela que les dieux de ce monde n'avaient pas agi lorsque la main d'un 'simple' mortel les avait anéantis, forçant les Maîtres du Temps à prendre les choses en main afin qu'un futur sombre ne voit guère le jour sur ces terres. Ces dieux qui étaient censés être à la fois tout et rien en ce monde, qui, selon certaines croyances, régissaient nos vies par la Fatalité, le Destin, la Chance et bien autre encore s'avéraient être des étrangers, des êtres dont on pouvait douter de la capacité à guider les mortels par cet éloignement autant physique que spirituel. Après tout, un être supérieur qui ne peut appréhender les souffrances et les craintes les plus simples de ceux qu'il a pris sous son aile peut-il réellement aspirer à être un guide légitime ? Pour gouverner un peuple, il fallait être capable de le comprendre, autant dans sa globalité que dans son individualité. N'en était-il pas de même pour le monde lui-même ? N'étions-nous que d'insignifiantes particules par rapport à tout ce dont avaient conscience les Aetheri ? Je gardai ces pensées pour moi, même si je ne doutais guère que celles-ci pouvaient être lues le plus naturellement du monde par la divinité qui avait pris la peine de s'asseoir à mon côté.

Une divinité. Mais une mère également. Une mère qui n'avait jamais montré d'attachement réel à ses enfants – tout du moins, pas directement – de son vivant. Et à présent qu'elle avait atteint ce statut d'immortel, il semblait que ses considérations avaient changé, autant à l'égard du monde que de ses fils adoptifs. Et je me devais bien avouer que le paradoxe était on ne pouvait plus déstabilisant. Mais puisque Mitsuko semblait au moins en partie regretter son ascension, peut-être était-il seulement naturel pour elle qu'elle s'efforce de garder une part d'humanité, de s'accrocher à ce monde qu'elle avait connu en tant que mortelle. Peut-être était-ce pour cela qu'elle ne jugeait point. A moins que je ne me sois trompé sur toute la ligne. Mais à présent, peu importait. Car ce jugement que j'avais redouté et que je n'avais point eu me semblait finalement si dérisoire. Après tout, je n'avais jamais été homme à redouter le jugement de qui que ce soit, alors pourquoi aurais-je craint celui de ma mère ? J'acceptais les crimes que j'avais commis, j'acceptais le fardeau qu'ils impliquaient, quoi que le monde en pense. C'était tout ce qu'il y avait à voir et à comprendre. Vraiment, les relations familiales avaient de quoi me torturer l'esprit pour pas grand chose.

Et si je demeurai songeur suite aux propos de la déesse, c'était bien plus à cause de ce qu'elle venait de me révéler. Probablement que cela serait la seule fois où j'entendrais parler du devenir de ceux qui avaient choisi la voie de la divinité, ces secrets là relevant d'un savoir qui n'était pas censé se retrouver dans les mains des mortels. Pour nous autres, les Aetheri étaient des dieux, peut-être inégaux entre eux de par leur puissance, mais les considérations s'en arrêtaient là pour le commun des mortels. D'aucun n'aurait parié que la 'vie' des dieux était un parcours, une existence d'évolution et de changements jusqu'à ce qu'un but soit atteint. Peut-être que j'avais déjà rencontré, au cours de mon existence, un Aether ayant atteint le stade de demi-dieu qu'évoquait Mitsuko. Et peut-être même que d'autres existences qui avaient influencé la miennes avaient été antérieurement divine, avant que n'ait été fait le choix d'une réincarnation complète.

Et si, en soi, la réincarnation semblait être une bonne alternative pour une Aether qui regrettait de l'être devenue, je ne pouvais m'empêcher de sentir un pincement au cœur en pensant à cette vie millénaire, faite d'autant de regrets que d'espoirs, être effacée d'une simple volonté, d'un simple souhait d'abandonner le domaine des dieux. Si, à l'avenir, Mitsuko décidait d'abandonner tout ce qu'elle avait été pour se réincarner, nous autres qui portions le nom de Taiji serions à la fois libres et abandonnés, perpétuant l'oeuvre d'un être qui aurait choisi de nous effacer de son existence. Une pensée qui pouvait paraître bien égoïste, mais que je ne pouvais m'empêcher d'avoir. Des plus ironiques, pour quelqu'un qui n'avait jamais eu, jusqu'à présent, les preuves d'un amour maternel. Et je demeurai de ce fait une fois de plus silencieux. J'étais loin d'être en droit de juger et de critiquer les choix et la vie de ma mère adoptive.

La voix douce de la déesse me tira de mes pensées, sur des propos d'adieux que je n'avais pas vraiment sentis venir. Mais je retins ma protestation. Et offris un sourire teinté de douceur mais également de tristesse à cette mère dont l'existence complexe me dépassait, à mon grand damne.

« Moi aussi, j'ai été content de vous revoir. De vous parler. Pour c'que ça vaut, je vous souhaite bon courage. »

J'ignorais si la dame avait entendu mes propos, et s'ils portaient une quelconque signification pour l'être supérieur qu'elle était, alors qu'elle disparaissait dans une poussière d'étoiles, emmenant avec elle le jeune Faust, qui avait attisé la curiosité de plusieurs de mes semblables. Mais j'espérais, au moins, que la dame divine avait apprécié, ne serait-ce qu'un peu, la danse que nous avions effectuée sous la lueur des étoiles.
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Sous le joug du destin et la lueur des étoiles, dansons. [PV Mitsuko]

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