Alexis le chat, fidèle compagnon de Noa, galopait à travers les ruelles dans un battement sourd et régulier. Ses pattes nues semblaient glisser sur le pavé, tant elles étaient souples et habiles. Sa tête était basse, elle fendait l'air. Sa queue était droite, garantissant ainsi un parfait équilibre au félin qu'il était.
Il courrait aussi vite qu'il pouvait, comme pour mettre le plus rapidement possible la plus grande distance entre lui et ce maudit jardin dans lequel Noa avait été faite prisonnière.

Noa la fée, qui pour l'heure restait solidement accrochée au dos de son compagnon. Elle était encore troublée par cette rencontre. A vrai dire, c'était la première fois qu'elle voyait un humain d'aussi près. La première fois aussi qu'on l'emprisonnait dans un bocal à confiture. La fée n'avait connu, jusqu'à présent, que le calme plat du premier jardin dans lequel elle s'était posée, après celui de sa naissance. Son univers entier se résumait à un carré d'herbe et quelques fleurs. Les autres, à des silhouette vagues au loin.
Alors imaginez que l'on vous capture, que l'on vous enferme et que vous vous trouvez contrainte de fuir... Cela faisait beaucoup de bouleversements pour une si petite personne. Encore, ceci n'était rien comparé à ce qu'elle vivait à présent. Accrochée au dos de son ami félin, elle traversait à présent ruelles et jardins, découvrant de force l'étendue du monde qui l'entourait. Les boutons de fée sont trop jeunes pour envisager une telle étendue. A mesure des enjambées, elle découvrait une multitude de visages, de formes, de couleurs, de parfums. Rien qu'elle ne connaissait, rien qui ne lui était familier.
Noa ne comprenait pas.

Finalement, Alexis rompit sa course. Le chat avait trop couru: lui aussi était sous le coup de l'émotion. Il avait du se battre pour sauver sa maitresse. Essoufflé, on le voyait tirer la langue, haletant. Il finit par s'assoir sur un pavé.
Noa, constatant l'effort fournit par son ami, oublia temporairement le monde qui l'entourait. Elle descendit du dos de son compagnon et fit quelques pas autour de lui, jusqu'à pouvoir atteindre son museau de sa main.

-Quelle course ! Lâcha t'elle avec un sourire un peu forcé. Quoi qu'il en soit, tu m'as sauvée !

Cette fois ci, son sourire était sincère. Cependant, la jeune fée dû bientôt reconsidérer ses priorités. Elle fut rapidement forcée de constater que le monde qui l'entourait n'avait plus rien à voir avec le jardin auquel elle était habituée. Plus le moindre brin d'herbe à l'horizon, ni arbres, ni fleurs... Le sol était couvert de pierres, des silhouettes gigantesques faisaient sans cesse des aller et venues. Noa l'ignorait, mais elle se trouvait dans la rue commerçante de la cité, sur le palier d'une des maisons qui la bordait.
La fée était perdue. Son regard se promena un peu partout, cherchant désespérément un élément qui pourrait l'orienter. Une fois de plus, elle se tourna vers son ami à quatre pattes.

-Tu ne sais pas non plus où on est, n'est ce pas? Questionna t'elle timidement. Elle continua ensuite, après que son chat lui ait fait comprendre qu'il était aussi égaré qu'elle, par un mouvement de tête. Bon... C'est pas grave... On va... On va trouver une solution !

Noa avait au moins le mérite de ne pas se laisser impressionner. Son seul objectif était de retrouver son carré d'herbe et elle était bien décidée à l'avoir. Continuant de regarder autour, elle finit par se dire que la tâche serait plus simple si elle était plus grande. En effet, quinze centimètres, c'était peu pour voir l'horizon. Elle se mit donc en tête de grandir. Malheureusement pour elle, l'expérience lui manquait cruellement... Après cinq minutes de concentration, elle ne parvint qu'à faire pousser ses cheveux d'un demi mètre. Tant pis : Noa continuerait sa route sur le dos de Alexis. Ce dernier avait eu le temps de reprendre son souffle et ce n'était pas le poids plume de sa maîtresse qui allait le fatiguer.

L'étrange cavalière et son fidèle destrier se mirent donc à déambuler les rues. Ils marchaient sur le coté, ou sous les étals, afin de ne pas se faire piétiner. Lorsqu'un passant les frôlait d'un peu trop près, Noa poussait un hurlement et généralement, ça suffisait à éviter le drame.
A vrai dire, ils s'en sortaient plutôt bien. La jeune fée en venait presque à oublier son obsession pour les jardins : toutes ces odeurs de nourriture, ces objets brillants, ces gens différents... Le monde extérieur était finalement plus captivant qu'elle ne l'imaginait.

Mais un évènement totalement imprévu vint tirer la demoiselle de sa rêverie : une grosse buche de bois s'écrasa à quelques centimètres de la truffe de Alexis. Surprit, il sursauta à presque un mètre du sol. Inutile de préciser que Noa fut projetée en l'air comme un vulgaire ballotin de paille...
Heureusement que la fée avait des ailes, autrement la chute aurait été fatale. Elle se rétablit donc en plein vol, pendant qu'Alexis courrait se réfugier sous un étal à coté.

La fée regarda devant elle : une jeune femme vêtue d'une cape et un homme en tablier. Tout deux discutaient, semble t'il. Apparemment, la demoiselle était désolée de quelque chose qui avait contrarié l'homme. Celui ci lui ordonna de tout remettre en ordre. Lorsque cette dernière commença à ramasser les buches de bois, Noa comprit que l'incident qu'elle venait de vivre était de sa faute. Curieuse et un peu contrariée d'avoir manqué de se faire aplatir, elle se mit à voleter autour de la tête de la jeune femme. Une fois en face de son visage, elle questionna d'une voix vive.

-Pardon mademoiselle, mais qu'est ce qui vous a prit de balancer ces buches de bois en l'air? Vous savez que vous avez failli m’aplatir?

[c'est un premier message donc il est un peu long, je fais plus concis d'habitude =) ]

Noa fut satisfaite de constater que la jeune femme s'excusa immédiatement. Elle avait eu de la chance de tomber sur quelqu'un d'aimable car, chose qu'elle ignorait par son manque d'expérience, il était malhabile de réprimander quelqu'un qui pourrait vous écraser de la main. Pour Noa, il était naturel qu'on s'excuse et les différences de tailles était une notion bien lointaine. Sans doute apprendrait elle cette leçon une autre fois. Pour l'heure, elle était surtout fascinée par l'explication que venait de lui fournir son interlocutrice: ainsi elle avait envoyé voler un tas de bois pas un simple éternuement. Noa étant petite, elle n'avait pas vraiment de notion de proportion. Pour elle, une personne de la taille de Lysis avait forcément un souffle puissant, donc était ce illogique qu'elle projette des buches en éternuant? Pour Noa, cela semblait plausible, même si elle demeurait perplexe.
Malheureusement pour Noa, la jeune femme ne lui laissa guère le temps de réfléchir à la question. En effet, cette dernière avait remarqué un éclat de bois dans sa chevelure rose et entreprit généreusement de l'en débarrasser. Hélas, elle lui pinça une mèche au passage. Noa cru bien voir la fin de sa chevelure chérie venir. Surprise autant par le geste que par la douleur, elle poussa un hurlement.

-Aah ! Mes cheveux ! Attention à mes cheveux !

Décidément, ce n'était pas son jour de chance. Noa était le genre de personne qui voue un culte à son apparence, il était primordial pour elle d'apparaitre toujours belle et bien coiffée. Alors manquer de devenir chauve, imaginez le cauchemar. Heureusement, un troisième invité vint à son secours. C'était un oiseau coloré. Il devait mesurer approximativement la taille de Noa et s'avérait être beaucoup plus habile que sa maitresse. En un rien de temps, il l'a débarrassa des excédents de bois. Cela eu au moins le mérite de calmer Noa. En effet, lorsque la jeune femme expliqua sa relation avec l'oiseau, la fée se radouci. Elle comprit que cette dernière était plus maladroite qu'autre chose et que cette série d'incidents n'étaient en rien calculés. Bien sur, cela ne faisait pas disparaitre les douleurs crâniennes, mais bon, elle relativisait.
Hélas, elle n'aurait pas le temps de lui en faire part. L'homme, que Noa avait presque oublié avec tout ça, s'imposa brutalement dans la conversation. Il intimait à la jeune femme de finit ce qu'elle avait commencé. Noa ouvrit des yeux ronds : cet homme était d'une impolitesse révoltante.

-Dis donc gros lard...

Commença la fée, mais elle n’eut pas le temps de finir sa phrase. L'oiseau de Lysis avait fondu sur l'homme, visiblement décidé à sauver l'honneur de sa maitresse. Celle ci le retint, lui expliquant qu'elle était en tort. A ces paroles, Noa prit le parti de se taire également.
La jeune femme en profita également pour se présenter et lui demander de l'attendre. Apparemment, elle souhaitait se racheter pour le petit "incident". Le visage de Noa sembla s'illuminer. Flattée dans son égo, elle laissa un grand sourire se dessiner sur son visage et répondit, après avoir balancé sa lourde chevelure derrière son épaule:

-Bien sur. Moi je m'appelle Noa.

La fée avait retrouvé son assurance distinguée. Elle était doublement satisfaite, puisque maintenant elle était sure de retrouver son chemin avec un guide de cette taille. C'est alors qu'un détail lui revint à l'esprit : Alexis! Ou était passé son compagnon? Noa posa son regard alentour. Horreur : pendant que le poissonnier était occupé à réprimander Lysis, le fourbe s'était glissé entre les poissons. Il était maintenant en train de dévorer une sole. Noa jeta un œil sur le poissonnier : il était trop occupé à surveiller Lysis pour s'inquiéter de son étal. Cependant, il pouvait se retourner à tout instants. Noa rejoignit donc son chat discrètement et entreprit de le faire descendre en lui tirant la queue.

-Lâche ça ! Espèce de goinfre ! Tu veux qu'on finisse rôti tous les deux?

Murmurait elle d'un ton énervé.

Noa tirait de toutes ses forces sur la queue de Alexis, mais il était trop gros pour elle. Cela revenait à essayer de tirer un cheval par la queue, au regard de ses proportions : ridicule, vous en conviendrez. Bien qu'il soit généralement obéissant, Alexis avait aussi ses propres priorités et manger en faisait parti. Il estimait qu'après tous ses efforts, il méritait bien son repas. Inutile d'expliquer le concept d'interdit à un chat : il a de la nourriture devant lui, il a donc le droit de la manger. Noa quant à elle n'avait guère plus de notions de commerce que lui, mais elle avait la certitude supplémentaire que si ils se faisaient prendre, ils passeraient un sale quart d'heure. Bref, elle donnait donc tout ce qu'elle avait dans cette bataille éperdue, jusqu'à ce que ses yeux tombent sur Lysis.
Cette dernière avait comprit le drame qui se jouait à l'insu du poissonnier. Elle s'était donc mise à improviser un stratagème pour tirer le duo d'affaire. D'abord, elle attira l'attention de l'homme. Noa n'avait pas beaucoup d'expérience de la vie, certes, mais il était inutile de lui expliquer le numéro de charme qu'elle était en train de lui faire. Toujours est il que cette stratégie fut efficace. L'instant suivant, l'homme se retrouvait empêtré dans la cape de la jeune femme, ce qui lui laissa juste le temps d'expulser Alexis de la table. Quant à Noa, elle était toujours attachée à la queue du chat, alors quand celui ci sauta au bas de la table, elle fut entrainée avec. Ce n'était pas son jour de chance, décidément.

Cette petite mascarade terminée, Lysis attrapa Alexis et par la même occasion Noa, puisqu'elle tenait encore ce dernier fermement, et se hâta de mettre de la distance entre elle et ce maudit marchand de poisson. Pour ce sauvetage, la jeune femme avait sacrifié son repas.
Noa remonta le long du dos de son chat et grimpa encore jusqu'à l'épaule de la jeune femme. Une fois qu'elle y fut assise, elle pu constater la vue qu'une telle taille offrait. Vivement que je maitrise mon pouvoir de changement d'apparence, se dit elle. Ainsi, elle aurait tout le loisir de grandir jusqu'à taille humaine et se promener au milieu de ces gens.
Mais passons. Pour le moment, Noa était concentrée sur ce sauvetage fortuit et cette nouvelle connaissance.

-Navrée pour le repas. Fit elle en passant les doigts dans ses cheveux, à la manière d'un peigne. Mais je crois qu'il reste un peu de poisson à Alexis.

En effet, ce dernier tenait encore le reste de la sole dans sa bouche.

-Enfin, autrement, j'imagine que l'on peut dire qu'on est quitte !

Noa avait manqué de se faire écraser, puis arracher les cheveux... Contre un repas, au final c'était assez équitable. Du moins, d'après elle. Le regard de la jeune fée dévia bientôt sur l'espace alentour. La rue commerçante grouillait de monde, mais depuis son perchoir, elle se sentait plus en sécurité. Cela raviva chez elle une curiosité que toutes ces émotions avait temporairement enfouie.

-Dis moi Lysis, d'où viens tu? Tu connais le jardin de l'homme qui fait pousser des rosiers? C'est moi qui m'en occupait jusqu'à il y a peu.

Dans l'esprit de Noa, il était naturel que tout le monde connaisse le jardin dans lequel elle avait grandit. Les fées inexpérimentées, comme elle, n'avaient qu'une notion très restreinte du monde. Elles n'envisagent pas qu'il existe un univers immense en dehors des quelques fleurs dont elles avaient la charge. Noa découvrait à peine l'inverse, mais c'était encore bien difficile pour elle d'en prendre pleinement conscience.

Lorsque Lysis déclara qu’elle laisserait son poisson à Alexis, celui-ci poussa un soupir de soulagement. Il avait beau être protecteur et doux, il valait mieux éviter de lui demander de partager son repas. Alexis restait un chat et un chat avec un poisson dans la gueule ne jure plus de rien.
Le petit cortège continuait de fendre la foule. Les passants, des anonymes que Noa ne reverrait sans doute jamais, étaient remarquables par leur diversité. Leur peau, leur chevelure, leur vêtements : tant d’allures extraordinaires aux yeux de la jeune fée.
Lysis, de son coté, semblait indifférente a ce spectacle : sans doute était elle habituée. Elle se déplaçait avec aise dans le tissu dense que formaient ces gens et parvenait même à discuter. Elle lui raconta comment son village natal avait été détruit et qu’elle en était la seule survivante. Noa lui lança un regard en biais : elle concevait mal la tristesse que cela pouvait générer. Pour sa part, elle vivait seule. C’était la meilleure façon de vivre, pensait elle. Quoique… L’image de son jardin lui revint en mémoire. Avec toutes ces émotions, elle n’avait même pas eu le temps d’y penser. Une pointe de tristesse lui traversa le cœur, elle senti ses entrailles se nouer. Une sensation qui ne dura qu’un bref instant, mais qu’elle n’avait encore jamais ressentie. Ainsi, son jardin lui manquait.
Heureusement, Lysis était la pour la sortir de sa rêverie. Elle s’était installée sur un carré d’herbe avec une brioche. Noa n’avait jamais vu ce genre de nourriture. Curieuse, elle prit le morceau qu’on lui donna et alla s’installer dans l’herbe, adossée à Alexis qui, entre temps, s’était libéré de Lysis pour retrouver sa liberté. Ce dernier avait l’habitude de porter, pas d’être porté. Donc il fut bien content lorsqu’il pu à nouveau se coucher dans l’herbe.
Noa observa un instant la fameuse nourriture, elle la senti et finalement se résolu à en prendre une bouchée.

-C’est fameux ton truc dis donc. C’est très différent de la soupe de pissenlit.

Commenta t’elle. La fée profita à nouveau de ce goût inédit, puis se rappela que Lysis lui avait demandé de parler de son jardin. Tant d’intérêt flattait la jeune fée, elle savoura donc cet instant de suspense autant que sa brioche.

-Hé bien, c’est un endroit merveilleux où il y a toute sorte de fleur. L’herbe est bien haute, pas comme ici : on l’a laisse pousser jusqu’à monter en grain. Il y a des pensées violettes et jaunes, des tulipes de toutes les couleurs et même de la lavande… Mais le plus beau reste le rosier. Il forme un joli buisson d’un beau vert profond. Des dizaines de fleurs s’y développent. Elles sont d’un rose pâle nacré à tomber par terre. Tu verrais la découpe des pétales : on dirait de la porcelaine, de la porcelaine aussi fine et douce que la soie… et leur parfum ! Leur parfum supplante même celui de la lavande tant il est subtil et délicat.

Les yeux de Noa s’étaient mit à briller. Parler de son jardin l’émerveillait, comme une douce mélancolie.

-Enfin, c’est tout un travail de s’en occuper, tu sais ? Je me lève aux aurores… Lorsque les premiers rayons du soleil pointent à l’horizon, je vais récolter de la rosée. Ensuite, j’aide les fleurs à s’ouvrir avec de la lumière. Je m’occupe aussi de chasser les escargots et les limaces : ce sont des horreurs ces bêtes là ! Elles broutent les feuilles de mes fleurs à une vitesse !

Le ton de la fée montrait clairement son implication. En parlant des escargots, on aurait dit qu’elle racontait le pire scandale du moment. Son récit achevé, elle ajusta sa coiffure et leva les yeux vers Lysis.

-Mais dis moi Lysis, si tu n’as plus de chez toi, comment fais tu ?

Noa regarda Lysis lui expliquer l’histoire de cette petite pâtisserie et la manière dont elle en déterminait la qualité grâce à l’odeur. Voila bien quelque chose qui lui parlait : déterminer la qualité de quelque chose en
fonction de sa senteur, c’était un peu comme avec les fleurs. La jeune fée acquiesça et acheva sa portion.
Elle décrivit ensuite avec application son cher jardin. Pendant toute la durée du monologue, elle vit la jeune femme écouter, immobile. Peut être même pouvait on lire un peu de mélancolie dans son regard azur. Mais
c’est au moment où la fée lui retourna la question qu’on pu réellement déceler ce sentiment avec exactitude.
Son récit lui provoqua un terrible frisson : des morts, la destruction. Noa ne comprenait pas tout ceci. La violence lui était encore étrangère : elle n’était qu’une fée. Une petite fée chétive, à peine sortie de la fleur qui l’avait engendrée. Son univers se résumait à quelques fleurs et une herbe tendre. Alors lui parler de tant d’horreur, c’était bien trop pour elle.
Cependant, lorsque son interlocutrice lui retourna la question, elle se ressaisit rapidement et répondit aussitôt.

-Il y avait un humain dans mon jardin ! s’exclama t’elle, comme s’il s’agissait là du pire des scandales. Ce rustre m’a enfermée dans un bocal ! Il a dit qu’il voulait m’y garder prisonnière jusqu’à ce que je tombe amoureuse de lui. Apparemment, il s’était mit en tête de m’épouser. Elle leva les yeux vers le ciel. Non mais, tu te rends compte ? Heureusement Alexis m’a sauvée, j’ai été obligée de m’enfuir. Il aurait fini par me capturer à nouveau sinon.

Noa se leva afin d’épousseter sa robe de tulle rose. Elle regarda ensuite rapidement en arrière, vers Alexis et sauta juste assez pour se retrouver assise sur le ventre de ce dernier.

-Tu sais Lysis, je crois que nous sommes toutes les deux livrées à nous même. Toi, tu n’as plus de village et plus de famille. Moi, je n’ai plus de jardin et je me retrouve à errer dans un monde dont j’ignore toutes les règles. On n’a pas eu de chance, mais je suis certaine que ça ira tout de même. Elle afficha son plus beau sourire. Il suffit de retrouver un bel endroit où vivre !

[HRP : milles excuses pour le retard, j'étais malade ! >< ]

La jeune femme à la chevelure bleue s’était penchée sur la fée, afin de lui faire une proposition pour le moins incongrue. Faire un bout de chemin ensemble, vivre sous le même toit ? Noa sentie son souffle s’en couper. A vrai dire, elle n’avait jamais envisagé les choses de cette manière… L’avenir était un point sur lequel elle n’avait pas réfléchi. Tout était encore trop frais, elle n’avait même pas eu à passer une nuit hors de son jardin.
Silencieuse, on l’a vit se mordiller la lèvre en réfléchissant pendant un instant, avant qu’elle ne finisse par dire :

-C’est une proposition très généreuse.

Son regard quitta celui de Lysis et vint se poser sur les habitations alentour. Elle s’imagina un instant vivre dans l’une d’entres elle.

-Mais je crois que je ne pourrais pas m’habituer à vivre là dedans. Il n’y a pas de lumière, pas d’arbres ni de fleurs. Moi, je suis une fée. J’ai besoin de tout ça pour survivre. Autrement, je risque de dépérir, comme une jeune pousse que l’on laisserait dans le noir.

Avoua t’elle. Quelque part, cela la contrariait de refuser cette généreuse invitation, mais son propos était sincère. Une fée comme elle ne pouvait pas vivre hors de la nature, c’était impossible. Mais le visage de cette dernière ne resta pas fermé bien longtemps.

-Je serais donc ravie de trouver une jolie prairie ! Elle leva son index vers Lysis et continua. Mais par contre, il faudra venir me voir de temps en temps ! Autrement, je serais très déçue.

Malgré l’incident qui avait poussé leur rencontre, c’était un peu grâce à Lysis que Noa s’en était sortie dans cette grande ville. Elle lui était donc reconnaissante.
C’est alors qu’un garçonnet s’approcha du groupe. Noa ne l’avait pas remarqué avant qu’il ne se fasse arrêter par Phoebus. Visiblement, c’était la première fois qu’il voyait une fée, et c’était réciproque. Noa n’avait jamais rencontré d’enfant d’humain. A vrai dire, il lui sembla moins impressionnant que ses homologues adultes : la taille sans doute. Cela la fit sourire doucement : chez les fées, on naît déjà adulte, alors que chez les autres espèces, il faut grandir. Voila encore quelque chose que Noa ne pouvait pas vraiment comprendre : la famille. Quoique : sa famille à elle avait des pétales et une tige, mais elle ne connaissait pas sa fleur mère. Disons qu’elle pouvait vaguement s’imaginer l’effet que cela pouvait faire. Curieuse, elle tourna son regard vers Lysis et lui posa directement la question.

-Lysis, tu as un petit ? Celui là a l’air de te plaire, alors je me demandais si tu en avais un. Comme tu m’as dis que tu étais toute seule depuis l’incident de ton village, j’imaginais qu’il te manquerait, si c’était le cas.

Noa observa Lysis apposer la main sur sa poitrine et jurer de venir la voir, une fois qu’elle aurait trouvé un endroit où vivre. Son geste avait quelque chose de théâtral qui amusa beaucoup la fée, cette dernière n’en comprenant pas la signification, du moins jusqu’à ce que Lysis lui explique. En réponse, elle se contenta de laisser échapper un petit rire, semblable à une perle de rosée tombant sur une coupe de cristal.

-Je prendrais la peine de bâtir un sentier, afin que tu n’abîmes pas les plantations.

Ajouta t’elle d’un ton professoral, l’index relevé et le visage toujours illuminé d’un sourire. Quoique, Noa n’avait jusque là jamais envisagé de se lier d’amitié avec une géante. Enfin, une personne d’une autre espèce que la sienne… Car au fond la taille n’était pas grand-chose quant on savait que les fées avaient la capacité d’en changer. Pour sa part, Noa ne cultivait pas vraiment l’envie d’entraîner ce pouvoir : elle ne voyait pas l’intérêt de devenir si grande, mais qu’importe, la question n’était pas la.
Ce qui intéressait davantage notre fée était de connaître l’avis de Lysis à propos des enfants. D’ailleurs, quel ne fut pas son étonnement lorsqu’elle entendit ses explications ! Ainsi, les humains ne naissaient pas dans les fleurs : Noa avait décidément beaucoup de choses à apprendre. Elle écouta attentivement son amie et ce, jusqu’au bout, avant de légèrement hocher la tête en signe d’acquiescement.

-J’espère que tu en trouveras un vite alors ! Dit elle, pour manifester quelque encouragement, avant d’ajouter rapidement : et que tu régleras tous tes ennuis !

Puis, l’enfant égaré retrouva sa mère et les deux jeunes femmes semblèrent se perdre momentanément dans une douce rêverie. Noa imaginait une vie qui ne serait peut être jamais la sienne, faite de paix et de douceur dans un jardin légendaire. Lysis, quant à elle, cultivait d’autres pensées dont elle seule avait le secret. C’est finalement cette dernière qui rompit le silence, ramenant ainsi son interlocutrice à la réalité.

-Oh ? Bien sur ! Malheureusement, je n’ai aucune idée d’où aller…

Noa fit un petit bond avant de battre des ailes et de voleter jusqu’à l’épaule de Lysis, où elle se posa. Alexis quant à lui se releva, s’étira, et attendit qu’on ne parte pour suivre la marche.

-Remarque, je pourrais peut être voler jusqu’au ciel afin de voir à l’horizon ! Qu’en dis tu ?