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Cet endroit était comme un veille air de guitare exprimant un désir d'autre chose. Je regardai autour de moi, je voyais tous ces hommes, ces prédateurs affamées face à leur paradoxe sexuelle, des aimants contraires qui les attiraient et j'étais surpris, de voir comme on démocratisait la perversion au prix d'un peu d'excitation que l'on faisait suer pour un sou ou deux. Comment en étions-nous venu à de telles pratiques ? A accepter pareil spectacle ? Je n'étais pas de la veille école, enfin si, mais j'étais assez ouvert pour apprécier tout art qu'il soit. Seulement, j'avais toujours mis un point d'honneur à respecter la pudeur et l'intimité d'un corps qu'on ne partagerait qu'avec la personne qui aurait assez de valeur à nos yeux pour se confier à corps perdu, c'était si peu de le dire. Pourtant, oui, c'était beau. Oui, cette musique ne m'était pas inconnue et malgré la douceur du thème, elle s'accordait au mille feux qui brillaient sur scène, aux milles étoiles de la robe de Lady Satine; oui, son entrée était forte, cadrée avec technique et l'entrainement préalable était indubitable.

Mais derrière les paillètes et les fleurs de tissu, il y avait une femme qu'on ne regardait plus. Appâté par ce qu'elle donnait à voir, s'était-on intéressé à son histoire ? A ce qu'elle aimait réellement ? Je venais de finir mon troisième verre et je tenais fermement bien l'alcool donc j'en commandais un quatrième, tout en pensant que sous le masque de maquillage, je pouvais aisément voir toutes les larmes qui avaient coulé sur les joues de Lady Satine. Pourquoi de telles pensées dans une ambiance aussi joviale ? Parce que j'étais Naram-Sin. Je ne pouvais pas avoir la même réaction que tous ces hommes en chaleur. Je ne pouvais faire autrement, j'attendais peut-être qu'Aya entre en osmose avec son numéro. Ce n'avait été qu'un début pour faire taire les trop bruyants et capter les trop buveurs, une mise en scène pour nous préparer à la suite. Pourtant, je la devinais aisément.

Quel endroit particulier. Cette pensée me frappa lorsque je regardais sur ma droite, une poupée de chair bien jeune qui buvait... comme un trou. Non habituée à l'alcool, je savais déjà qu'il faudrait la ramener bientôt chez elle, elle qui ne pourrait plus mettre un pied devant l'autre alors que son équilibre serait noyée sous l'alcool de pays froids et nordiques dont beaucoup étaient friands. Moi je restai à ce que les hommes préféraient, le brun du liquide sommait aux fragiles de s'en éloigner. Puis, une lumière dans son mouvement vint éclaircir le visage de la petite poupée. Mon regard se figea, elle était plutôt belle. J'eus même un frisson. C'était bête. Je l'oubliais vite, baissant mon regard puis le détournant vers Lady Satine. Non je n'étais pas timide, ce n'est pas ce que vous pensez. Bon, d'accord, je suis rapidement mal à l'aise dans ce genre de situation. Et après ? Je n'étais là que pour voir le spectacle. Surtout que la petite demoiselle était obnubilée par ses ongles, elle avait évidemment une grave séquelle psychologique ! Et bien que j'en riais sur le moment, je m'éloignai un peu plus d'elle en virant quelqu'un à ma gauche sur le canapé pour laisser une petite distance de sécurité, des fois qu'elle veuille tester l'étanchéité de ma peau à l'épreuve de ses ongles qu'elle embrassait presque avec un amour étrangement ivre.

Mon regard se porta vers Lady Satine que les rubans enlaçaient. Tous les regards étaient sur elle et le mien était pour ceux qui la regardait. Je constatai avec un rire plutôt particulier comme il était finalement facile de rassembler plusieurs hommes sans qu'ils ne se tapent dessus. Enfin le temps de son numéro du moins. Et puis, j'attendais. J'attendais que Lady Satine danse. Nous fasse son petit numéro. Puisque le spectacle devait à présent commencer, et bien j'étais prêt. Prêt à voir ce qu'elle avait dans le ventre. Ou du moins, son agilité à l'épreuve de mon regard critique.