Avec application, je pressai la serpillère contre le seau pour en extraire le plus gros de l'humidité. Une agréable odeur citronnée se détachait des bulles de savon, appréciable contrepoint à celle moins séduisante qui provenait des cuvettes des toilettes. Peu habitué à ce travail manuel, la peau de mes mains avait rougi rapidement et le tiraillement sur mes paumes présageait de l'obtention de quelques ampoules. J'étais blond et ma peau en faisait les frais, sa fragilité était souvent un handicap, j'évitais la plupart du temps de m'exposer au soleil. Néanmoins, je ne me plaignais pas et frottais le sol avec un sérieux exemplaire. La logique derrière l'opération m'était apparue après avoir médité dessus. Basphel formait l'élite, mais cela ne dispensait pas les étudiants de se frotter à des tâches plus rudimentaires afin de se familiariser avec ce à quoi la plupart échapperait dans leurs fonctions plus tard. L'humilité était certainement la meilleure vertu que l'école pouvait offrir à ceux qui paveraient la route du monde de demain et j'en voyais moi-même l'utilité. À Maëlith, nous utilisions plutôt la magie pour nous débarrasser des corvées. C'était peut-être une erreur. Peut-être serions-nous plus attentif à devenir davantage précautionneux et ordonnés en sachant les conséquences derrière.
En réalité, ce n'était pas à mon tour de nettoyer les parties communes, mais les concernés visitaient actuellement Seaghdha. Je levai les yeux sur mon partenaire de corvées. Son visage m'était étranger, comme la plupart des étudiants. « Alors, toi non plus tu ne vas pas au bal de Seaghdha ? » Lançai-je, m'appuyant sur mon balai. « Pendant que les uns dansent, nous nettoyons à leur place. »Plaisantai-je. Je ne leur en voulais pas, j'étais bien incapable d'éprouver la moindre rancœur envers quiconque, mais la vision avait de quoi m'amuser. J'espérais qu'ils en profitaient et qu'ils ne se feraient pas mordre. Tout le monde savait ce que valait le consentement face à un Vampire. Ils étaient capables de convaincre une pierre de se laisser mordre s'ils le voulaient.
« Je m'appelle Andrea Lim, enchanté. Et toi ? » Un bandeau retenait mes cheveux en arrière et j'avais remonté les manches de mon kimono pour ne pas les salir. Je devançai ses questions, habitué à la curiosité des Basphéliens quand ils me voyaient déambuler sans l'uniforme. « Comme tu le vois, je ne suis pas élève ici, du moins pas de façon permanente. Maëlith a passé un accord avec Basphel pour que je puisse suivre quelques classes ici. C'est pour me perfectionner, notamment en culture générale. C'est plutôt utile aussi pour me familiariser avec toutes les cultures, Basphel est le seul endroit au monde où presque toutes les races cohabitent. Ça en fait selon moi un lieu incontournable pour toute jeune Orine, c'est dans notre intérêt de nous intéresser aux autres, pour plus tard. » J'avais eu l'écho d'une homologue prenant ses cours ici-même, en tant qu'étudiante mais j'ignorais tout d'elle. Récemment arrivé, je n'avais finalement parlé qu'à peu d'élèves. « D'ailleurs, si ce n'est pas indiscret, qu'est-ce que tu es ? Tu es dans quel département ? »
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Lazare enfonça ses mains dans le seau, avant d’essorer le linge humide. Le bout de ses doigts était fripé comme s’il sortait d’un bain et, par moment, il le regardait avec consternation. Il n’avait pas l’habitude de faire le ménage. Ses parents gagnaient suffisamment bien leur vie pour embaucher des domestiques. Ils se chargeaient de l’entretien de la maison et du jardin. Gamin, il aimait bien les suivre un peu partout et se cacher dans les haies, les placards ou sous les tables pour leur faire des frayeurs, parsemant l’air d’un rire espiègle lorsque ses yeux rencontraient leurs figures faussement apeurées. Il les saluait toujours et s’entendait bien avec la plupart d’entre eux. Cela dit, il ne s’était jamais intéressé à leurs métiers. Il préférait les presser de jouer avec lui lorsqu’aucun de ses frères et sœurs ne voulaient bien prendre trois heures de son temps pour participer à une partie de cartes endiablée. L’adolescent frotta le fond du lavabo. De toute façon, chez les Magiciens, on faisait le ménage plus souvent avec la magie qu’avec ses bras. Se renseigner sur les activités des domestiques ne lui aurait sans doute rien apporté. Il fronça le nez. Ses parents comptaient-ils le transformer en récureur de fond de chiottes privé de magie ?
Il se retourna et regarda son partenaire. Plus tôt, il avait remarqué qu’il ne portait pas l’uniforme de Basphel, mais ne l’avait pas relevé. Il n’avait pas franchement envie de parler. La plupart des élèves étaient partis pour Seaghdha. Ça le déprimait. Il aurait voulu en être. « Non. » soupira-t-il, en quittant des yeux le visage délicat de son interlocuteur. Le sol n’était pas franchement plus réjouissant. « Ouais. Super. Crois-moi qu’ils vont en entendre parler, quand ils vont revenir. Ils ont intérêt à prendre mon prochain tour de corvées. » Il croisa les bras sur son torse et releva la tête, plein d’aplomb. Quand il comprit que le blond venait de faire de l’humour, ses épaules s’affaissèrent un peu. « Je rigole. » grinça-t-il en détournant le regard. Il scruta brièvement le paysage par la fenêtre. Ses dents grignotaient ses lèvres. Il n’aimait pas cet endroit. Il aurait voulu pouvoir fuir, loin. S’il était allé à Seaghdha, il aurait pu essayer. Ses parents le savaient, et c’était pour cela qu’il n’avait pas eu l’autorisation d’y aller. Pas pour le protéger, comme ils l’avaient prétendu.
À nouveau, son attention fut attirée par son compagnon d’infortune. « Lazare Halloy. Ravi de faire ta connaissance. » répondit-il poliment. Il se détestait d’être poli. C’était comme si, à chaque fois qu’il essayait de s’absoudre des carcans familiaux, son éducation bien réglée reprenait le dessus et le soumettait. Il pinça les lèvres, les humecta, puis les repinça. Son index droit triturait son coude gauche. Bien que décidé à écourter la conversation pour finir au plus vite leurs corvées et s’échapper au grand air, le bleu se surprit à tendre l’oreille. Il connaissait peu de choses de Maëlith et des Orines. Il en avait entendu parler vaguement, parce que certaines personnes dans l’entourage de ses parents étaient parfois accompagnées de l’une d’entre elles. « Un Magicien. Et je suis au Charbon. » Il marqua une pause. « Il paraît que c’est pas très commun comme affiliation pour un Magicien, mais bon, je suis probablement pas très commun non plus. » C’était, du moins, l’avis de ses parents, qui auraient pour sûr préféré un fils moins abracadabrantesque. Il haussa les épaules, avant de pivoter pour frotter à nouveau le fond du lavabo. « Je savais pas que Basphel accueillait des gens de l’extérieur. Vous êtes nombreux ? » s’enquit-il. Et s’il parvenait à se glisser dans la valise de l’un d’entre eux ? Il pourrait disparaître. « Tu étudies quoi, ici ? Et tu restes combien de temps ? » Son index et son majeur enveloppés dans le chiffon, il nettoya la base du robinet. « C’est loin euh… Maëlith ? À quoi ça ressemble ? » De là-bas, pourrait-il rallier Avalon ? Ou même Sceptelinôst ? N’importe où tant que c’était une ville où l’on savait s’amuser.
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J'eus un sourire. « À mon avis, le commun n'a pas sa place ici. Vous avez été sélectionnés car vous avez des prédispositions à un futur exceptionnel. Le Charbon, c'est... » Je réfléchis avant de terminer ma phrase, au cas où je vexerai mon partenaire de corvée avec des préjugés. « Ce sont les marginaux, non ? Excuse-moi, je ne suis pas sûr de comprendre les subtilités de chaque département. Je sais juste qu'on m'a conseillé d'éviter les étudiants provenant de l'Obsidienne. Et de me méfier d'Adriæn aussi. Tu le connais ? » Je l'avais aperçu quelques fois. L'Ondin ne passait pas inaperçu et son air aimable ne m'avait pas inquiété. Ce constat m'avait donné à réfléchir. Sympan m'avait-il menti ? Devais-je croire l'étrange garçon qui fourrait ses poches de culottes en dentelle pour les épingler sur un tableau, ou suivre mon instinct pour me forger moi-même une opinion de chaque étudiant ? J'étais une Orine, j'ignorais encore tout de mon futur Aisuru, il pouvait être maléfique aussi bien que bénéfique et il ne m'avait jamais été conseillé d'éviter les premiers, bien au contraire.
« Je ne crois pas, non. » Partout où mon regard se portait, je ne voyais que des uniformes la plupart du temps. Il n'y avait qu'en se rendant à Basphel ville que je retrouvais des tenues hétéroclites. « Seulement quelques mois. J'étudies l'histoire des arts, je prends aussi des cours particuliers de dessin, de peinture et de gravure. J'en profite également pour me joindre à plusieurs classes sur la géopolitique et l'histoire des continents, pour ma culture personnelle. J'ai aussi demandé à prendre quelques cours de botanique avec la professeure Jil. » ajoutai-je, les yeux brillants d'enthousiasme. On m'avait raconté beaucoup d'histoires sur l'originalité de la rouquine et j'avais hâte de la rencontrer, surtout sur un sujet qui me passionnait.
Je pris un chiffon humide et commençai à frotter un miroir. « Un peu, oui. Mais j'ai profité d'être au Fessetival pour rejoindre la montgolfière qui ramenait les Basphéliens à l'école à la fin des fessetivités, c'était plus simple comme ça. Et Maëlith... » Comment décrire ma cité natale ? Ce qui m'apparaissait comme la normalité ne l'était probablement pas pour les étrangers, je l'avais compris en découvrant d'autres villes. « C'est très beau. » résumai-je simplement car les mots n'auraient jamais réussi à lui rendre justice. « Il y a souvent de la musique car nous avons beaucoup de musiciennes et chacun s'exerce à son Art où il le souhaite. La Nature y est très présente également, sans doute de façon similaire à ce que l'on peut trouver chez les Ygdraë ? J'ai hâte de me rendre sur les terres de Melohorë pour en juger par moi-même. Et toi, il y a des endroits où tu aimerais aller ? L'école organise régulièrement des voyages. Comme à Seaghdha. Je peux comprendre que tu n'y sois pas allé. J'ai appris qu'il fallait une autorisation parentale pour y aller. Tu penses que ceux qui y sont vont se faire mordre ? Il paraît que la situation est très instable chez les Enfants de la Nuit depuis que la rumeur court sur la disparition d'une de leurs Lignées. Ça fait froid dans le dos de penser que tant de personnes aient pu se faire tuer, comme ça, dans l'ignorance la plus complète. Mais je présume qu'on ne sait pas tout. C'est un peuple assez discret, on ne connaît pas grand chose d'eux. » Je regardai Lazare dans le miroir. « Il n'empêche que ce doit être intéressant de pouvoir visiter Seaghdha. Il y a une grande université je crois là-bas. J'imagine qu'ils font cours la nuit... » J'étais curieux de savoir comment s'organisait la vie en société pour un peuple qui ne sortait presque jamais en journée. Leur système devait être entièrement pensé autour de cette contrainte, et de la nourriture. J'essayais de visualiser une cantine à l'instar de Basphel, mais où chacun aurait un bol empli de sang face à lui. Lugubre vision qui me fit frissonner autant qu'elle me fascinait.
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Un futur exceptionnel, ouais. Ça, il y comptait bien. Il n’avait juste pas envie qu’on lui dît comment il devait y parvenir et lequel ce devait être. Il voulait voler de ses propres ailes. Visiblement, ce concept était trop difficile à appréhender pour ses parents. « Adriæn ? Non. Pourquoi faudrait s’en méfier ? » s’enquit-il, en frottant le coin d’une fenêtre. « Et ouais, euh, le Charbon, c’est à peu près ça, je crois. » Il ne s’y était pas intéressé plus que ça, puisqu’il ne comptait pas rester. Quand il avait affirmé devant l’un de ses frères qu’il allait tout faire pour s’évader, celui-ci lui avait rétorqué qu’il n’était qu’un petit ingrat, que leurs parents l’avaient tant pourri gâté qu’il était incapable de se rendre compte de la chance qui s’offrait à lui. Lazare avait crié quelque chose sur cette famille naze qui ne faisait aucun effort pour le comprendre et qui, de toute façon, le détestait, puis avait tourné les talons. Andrea, qui semblait apprécier sa présence et ses études à Basphel, lui tiendrait-il ce genre de discours ? Il dégageait quelque chose de doux, de sympathique, qui donnait envie de lui confier des secrets. Néanmoins, il se retint, et se contenta de l’écouter. « Ah, ouais, la professeure Jil… J’en ai entendu parler aussi. » Elle avait l’air d’être sacrément excentrique. Il était curieux de savoir à quoi elle ressemblait.
« T’étais au Fessetival ? Trop bien. » Il avait tanné ses parents pour y aller. Ils avaient refusé, sous prétexte que ses notes frisaient l’indécence. Il avait tempêté, mais rien n’y avait fait. Sa fin de semaine s’était donc résumée à la lecture de textes philosophiques et à la résolution de problèmes de mathématiques, sous les conseils avisés de l’une de ses grandes sœurs. Comme le blond commençait à parler de Maëlith, le bleu abandonna sa tâche pour s’appuyer au rebord de la fenêtre. À mesure qu’il poursuivait, le visage de Lazare se décomposait et se renfrognait à la fois. Il se tourna à moitié et jeta un coup d’œil à l’extérieur. Le ciel bleu dominait la vue. Il laissa le silence s’étendre quelques instants, avant de répondre : « Pour tout te dire, j’aurais bien aimé aller à Seaghdha, mais mes parents n’ont pas voulu signer l’autorisation. J’aurais voulu aller au Fessetival aussi, mais bon, pareil. Ils sont pas très marrants. » Il se gratta la tempe et fit claquer sa langue contre son palais, les sourcils arqués dans une expression blasée. Il soupira. « C’est même pas parce qu’ils avaient peur qu’il m’arrive quelque chose, c’est juste qu’ils préfèrent passer leur temps à me pourrir la vie. Enfin bon. » Il haussa les épaules. « Quand je serai sorti d’ici, je pourrai aller où je veux. J’aime bien la musique, alors j’irai peut-être voir Maëlith. J’aimerais bien aller à Avalon, aussi, et à Sceptelinôst. Les gens là-bas savent faire la fête. » L’ombre d’un sourire traversa ses lèvres. « Et pour les autres… » D’un côté, il avait hâte qu’ils rentrassent pour savoir ce qu’il s’était passé ; de l’autre, il savait qu’il crèverait de jalousie à les entendre parler. « Y’en a pas un ou deux que tu aimerais voir se faire mordre ? » demanda-t-il, un peu taquin, un peu sérieux. On détestait tous quelqu’un, même les petits blondinets affables.
Message II – 559 mots
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« Oui, il y a du bon à gagner en indépendance. Je te souhaite de visiter tous ces lieux quand tu le pourras. » J'appréciais moi-même d'en bénéficier alors que je n'avais jamais été limitée, que ce soit du côté de ma mère, ou de toutes celles et ceux qui avaient contribué à mon éducation. Cela étant, j'avais été d'un naturel si sage toute ma vie, il était difficile d'interdire quoi que ce soit à un enfant qui ne réclame rien et ne prend pas d'initiative. Je ne pouvais pas comprendre ce que Lazare vivait, mais j'avais assez d'empathie et de compassion pour me sentir désolé qu'il vive si mal son adolescence. « Peut-être que les choses s'arrangeront bientôt, avec le temps ? Je te le souhaite, je prierai pour toi. Ce ne sera qu'une maigre consolation, mais sans la volonté de tes parents, je n'aurais peut-être jamais eu l'occasion de te rencontrer et de te parler. » Je repris mon carré de tissu pour frotter la céramique des lavabo pour éradiquer les dernières marques de calcaire laissées par les gouttelettes. « Si je suis à Maëlith quand tu iras, viens me rendre visite, ça me fera plaisir. Peut-être même que tu te laisseras tenter à te faire un tatouage ? C'est mon Art Divin. » précisai-je. Je cessai de nettoyer et remontai la manche de mon kimono. Mon bras apparut, constellé de multiples motifs. Il y avait un soleil, une belette en plein bond, deux tournesols orientés l'un vers l'autre, et quelques vagues tracés que j'avais fait paresseusement, laissant ma main s'animer sans réellement réfléchir à ce que je dessinais. « Je me sers d'encre effaçable pour pouvoir m'entraîner sur moi-même. »
Je rabattis ma manche et examinai les toilettes, à la recherche d'une dernière tâche à faire quand sa question tomba. Je me tournai vers le bleu. « Pas vraiment, non, sauf s'ils sont consentants. Je connais une personne qui y prend du plaisir. Mais sinon, non. » Pas même ce mystérieux Adriæn dont on m'avait dit de me méfier, ni même personne. Je retirai le bandeau retenant mes cheveux et y passai ma main dedans pour leur redonner leur forme naturelle. « Tout le monde est plutôt sympathique avec moi, certainement parce que je suis une Orine. Mais je crois que même si ce n'était pas le cas, je n'aurais pas envie de leur souhaiter du mal. » fis-je très sérieusement. Bien sûr, j'avais lu ces récits fictionnels où les personnages vivaient de tels supplices par la faute d'autrui qu'ils ne vivaient plus que pour la vengeance, mais ce n'était pour moi que de l'encre sur du papier. Je ne m'y identifiais pas, convaincu que la violence ne résolvait rien et ne faisait qu'alimenter un cercle vicieux. Cette philosophie là aussi, je l'avais lue, mais elle avait résonné en moi avec force. Avec un air grave, je posai une main sur son épaule. « Sache que la meilleure réponse que l'on puisse donner à ceux qui nous troublent et réveillent en nous de sombres pensées, c'est l'amour. » Je souris subitement. « Ça aura au moins l'avantage de les surprendre ! »
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Lazare enfonça ses mains dans le seau, avant d’essorer le linge humide. Le bout de ses doigts était fripé comme s’il sortait d’un bain et, par moment, il le regardait avec consternation. Il n’avait pas l’habitude de faire le ménage. Ses parents gagnaient suffisamment bien leur vie pour embaucher des domestiques. Ils se chargeaient de l’entretien de la maison et du jardin. Gamin, il aimait bien les suivre un peu partout et se cacher dans les haies, les placards ou sous les tables pour leur faire des frayeurs, parsemant l’air d’un rire espiègle lorsque ses yeux rencontraient leurs figures faussement apeurées. Il les saluait toujours et s’entendait bien avec la plupart d’entre eux. Cela dit, il ne s’était jamais intéressé à leurs métiers. Il préférait les presser de jouer avec lui lorsqu’aucun de ses frères et sœurs ne voulaient bien prendre trois heures de son temps pour participer à une partie de cartes endiablée. L’adolescent frotta le fond du lavabo. De toute façon, chez les Magiciens, on faisait le ménage plus souvent avec la magie qu’avec ses bras. Se renseigner sur les activités des domestiques ne lui aurait sans doute rien apporté. Il fronça le nez. Ses parents comptaient-ils le transformer en récureur de fond de chiottes privé de magie ?