Barrette, barrette, ce  n'est pas encore au point!

Rosée du Matin n’avait pas très bien compris le concept d’identité secrète et la peluche araignée soupira en reprenant le dialogue. A peine le monstre terrassé, la petite fée avait disparu de l’horizon pour ne laisser aucune trace. Son sceptre et son corps métamorphosé lui manquait un peu. Cela l’avait beaucoup amusé, mais il n’avait pour le moment plus aucun monstre à abattre. L’heure était à l’apprentissage et ça, c’était tout de même nettement moins amusant. La fée soupira à son tour en remettant une mèche de ses cheveux en place et reposa ses yeux dans ceux de l’araignée… Un peu trop nombreux pour parvenir à la fixer correctement d’ailleurs ! Rosée pencha la tête, pensive.

« Pourquoi Aveline et pas Noisette ? demanda-t-elle soudainement en coupant l’araignée dans son discours. Celle-ci fut surprise d’être ainsi coupée et de la capacité de la fée à perdre sa concentration.
— Tu aurais préférée Pauetet, peut-être ? Répondit l’araignée, exaspérée d’être systématiquement interrompue pour de telles bêtises.
— Non, non, Aveline, c’est très joli. Fit la fée qui appréciait cette seconde identité. Mais Noisette, c’était tout aussi bien. Ça a un côté croquant et…
— Et tu ne m’écoute pas. Ronchonna l’araignée
— J’ai faim, se défendit la fée
— Le rapport ?
— Aucun, j’ai faim, j’ai l’estomac qui gargouille, parler aveline et pauetet, ça me donne envie de manger des noisettes. Pas toi ?
— Non pas vraiment, mais je suppose que je ne récupérerais pas ta concentration tant que ton estomac commandera ton esprit ! »

L’arachnide aux pattes pelucheuses se frotta la tête, dépitée. Elle savait qu’elle n’avait guère le choix que de répondre à cette nécessité pour la fée de se sustenter. Rosée ne saurait pas se concentrer et l’entrainement à venir pour maitriser son pouvoir ne pourrait se faire le ventre vide. Aussi, l’araignée fit signe à Rosée de la suivre pour une quête de noisetier. Les arbres étaient forts présent autour d’eux, aussi espérait-elle leur quête rapide pour pouvoir revenir au principal. D’autant plus que la fée adorait la transporter dans ses bras, ce qui la gênait grandement, mais au moins cela lui permettait de se déplacer au même rythme et de ne pas voir ses pattes s’enchevêtré dans les hautes herbes. Ce qui, elle devait bien se l’avouer, n’était pas très glorieux, surtout si elle devait pas après faire appel à la fée pour retirer graines et semences qui restaient collés à son duvet. L’araignée fut donc tour à tour secouer, serrer, étouffé, câliner et balloter dans tous les sens. Le mal du transport dans les bras de Rosée devenait son quotidien, mais elle ne parvenait toujours pas à s’y habituer malgré tout. Son pelage brun prit une étrange couleur verdâtre et ce n’était pas uniquement de la faute aux herbes l’entourant.

« Par pitié, vole droite ! la supplia l’araignée. Et prévient moi quand tu changes de direction.
— Ce n’est pas de ma faute, je dois bien éviter les branches et les arbres ne poussent pas en ligne droite
— Ce n’est pas une raison, je suis une araignée, pas une prune
— Le rapport ?
— Secouer comme un prunier… C’est une expression, laisse tomber ! »

A peine avait-elle fini sa phrase que l’araignée tomba sur le sol, lâchée subitement. Elle roula sur l’herbe fraiche et tomba dans un massif de fleur qui éparpillèrent du pollen sur son pelage. L’araignée pesta. Elle était bonne pour un bain et prendre du poids ! L’eau la faisait enflée et elle détestait cela.

« Laisse tomber, c’était la conversation, pas moi ! râla l’araignée avant de lever la tête et de comprendre la raison de son délestage imprévu….

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Barrette, barrette, ce  n'est pas encore au point!

La fée l’avait aperçu directement. Pour une fois, son regard s’était fixé sans lâcher prise sur l’objet de sa convoitise. Jamais encore elle en avait vu d’aussi beau et bien fourni. D’un coup, elle avait porté ses mains à ses joues pour exprimer un WHAOU admirative. En un instant, elle avait oublié tout ce qu’il l’entourait et surtout, ce qu’elle portait dans le creux de ses bras. Ses oreilles restaient sourdes aux réprimandes de son amie l’araignée. Son attention était entièrement dédiée à l’arbre qu’il lui faisait majestueusement face. Le noisetier était élégant et surtout ses branches chargées de fruits aux reflets pourprés. Elle salivait d’avance en faisant battre frénétiquement ses ailes d’excitation. La faim la tenaillait plus qu’elle ne le pensait. Rosée fonça sur une branche pour respirer le doux parfum de la noisette. La rouquine posa les mains sur les fruits pour les récolter un à un avant de se souvenir qu’elle n’était pas censée être seule dans cette quête.

« Theraphosa ? l’appela-t-elle, étonnée par son absence soudaine
— Au moins, tu te souviens de mon prénom, tout n’est pas perdu…
— Que fais-tu là dans les fleurs ? Les noisettes c’est ici, dans un noisetier
— Je… commença l’araignée à court de mots. Elle aurait encore une fois bien utiliser les mots « laisse tomber », mais elle débutait une hantise à les prononcer en présence de la jeune Rosée. Aussi, elle secoua la tête avant de reprendre. Si tu pouvais me ramasser, ce serait bien, histoire d’être à la même hauteur que toi… »

La fée s’exécuta en déposant sa récolte à terre, près de l’araignée avant de la transporter à son tour. Elle la mit sur une branche afin qu’elle puisse cueillir des noisettes en sa compagnie, oubliant un instant que sa patte veloutée avait bien du mal avec certaines tâches pourtant aisée. L’araignée fit quelques tentatives qui se soldèrent toutes par un échec. Elle soupira, pestant contre son corps si mou et inutile.

« Tu n’as pas faim ? demanda la fée en grignotant des noisettes
— Je n’ai pas un corps fait pour la cueillette des noisettes et encore mois pour caser leur coquille
— Ah !
— Oui, ah, comme tu dis, fit l’araignée en tournoyant les yeux dans le vide avant de voir la fée l’approcher dangereusement avec un noisette décortiqué qu’elle lui enfourna presque dans les mandibules. Non mais oh ! Doucement ! Je ne cueille pas, je ne décortique pas, je ne mange pas, j’suis une peluche !! pesta-t-elle
— Ah bon, je croyais que tu n’étais pas une peluche ?
— Oui, non, enfin si… Là, je suis une peluche, mais je ne suis pas vraiment une peluche, expliqua-t-elle en insistant sur le mot « vraiment ». C’est clair, non ?
— Non, pas vraiment. T’es pas une araignée alors ?
— Han, ce n’est pas possible cette ingénue ! Mange, je t’expliquerai après. »

La rouquine la regarda un instant avant d’hocher la tête et de lui demande une dernière fois si elle ne voulait vraiment pas essayer de manger. Face à son refus très autoritaire, la fée mangea donc la noisette avant de reprendre sa cueillette. Elle en dévora encore quelques-unes avant de faire un petit tas de sa fraiche cueillette. Pour pouvoir emporter son repas futur, elle l’enveloppa dans de larges feuilles avant de s’en faire un petit baluchon qu’elle piqua sur un bâton. Ainsi, elle était prête pour explorer d’autre horizon.

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Barrette, barrette, ce  n'est pas encore au point!

Rosée du Matin avait fait l’effort d’avertir l’araignée à chaque changement de direction, expliquant les raisons de sa déviation. Ici, un arbre, là une abeille, par-là un écureuil endormi qu’il ne fallait pas dérange, par-ici une pie un peu trop bavarde qui les aurait retardés… L’araignée regretta doucement sa demande d’être averti. Finalement, être secoué en silence n’était pas si mal. Pour mettre fin à son voyage un peu trop mouvementé, elle tendit une patte duveteuse pour montrer un endroit paisible, à la fois spacieux pour s’entrainer, mais assez intimiste pour les cacher de regard indiscret. L’avantage de voyager au cœur d’une forêt. Rosée hocha la tête et posa les pieds sur le sol en admirant les alentours, l’endroit était propice au retour et à l’inspiration. Un fin filet d’eau serpentait entre les herbes, lui permettant de s’hydrater. Aussi la fée s’agenouilla sur un rocher afin de récolter de l’eau dans le creux de ses mains avant de porter le liquide à sa bouche. L’eau était rafraichissante. Par habitude, la fée en proposa à son amie l’araignée. Celle-ci refusa, non sans lui rappeler sa condition.

« Mais donc, tu n’as pas toujours été une peluche ?
— Enfin une question censée ! désespérait l’araignée. C’est ma forme première, mais ce n’est pas l’unique
— Pourquoi tu ne prends pas une autre forme alors ?
— Si je le pouvais, je le ferais. Mais pour l’instant, je n’y parviens pas
— Pourquoi ?
— Il me faut évoluer et pour évoluer, il me faut des pouvoirs et pour cela il faut que toi, tu te bouges pour devenir plus forte. Si t’évolue, j’évolue. Est-ce que j’ai répondu à toutes les questions qui s’empilent dans ton esprit ? Pourquoi toi, je n’en sais rien, c’est ainsi. Donc je te forme, tu deviens forte et je pourrais enfin faire quelque chose de mes huit pattes.
— Euh… je crois… je ne m’en posais pas autant, fit la fée en essayant d’assimiler le flot de parole de l’araignée. »

Theraphosa lui proposa de se parer de sa barrette magique afin de vérifier si elle maitrisait bien sa transformation. Il ne faudrait pas qu’au prochain monstre, elle perte inutilement du temps à prononcer et effectuer son rituel de transformation. Ravie d’arborer son nouveau bijou, la fée s’exécuta. Elle accrocha la barrette à ses cheveux et la tapota à plusieurs reprises. Elle se souvenait de la phrase magique, mais la tonalité manquait à l’appel et s’emmêla dans la gestuelle sous le regard courroucé de l’araignée. Rosée la rassura, elle avait une bonne mémoire… Theraphosa en douta, aussi elle s’installa confortablement en attendant de voir dans combien de temps la fée aurait remis de l’ordre dans le rituel de transformation. Au moins, elle avait retenu la phrase !

« Barrette, barrette, révèle ta magie. Transforme-moi ! »

Rosée du Matin usa de différentes tonalités à différents moments pour retrouver celles exactes. Elle se souvenait d’une tonalité qui se devait être convaincante, démolissant et amicale. Restait l’ordre. Et les gestes. Tournoiement, bras en l’air, bras devant…  Cela allait revenir. Cela devait revenir. A chaque fois, elle tendait les bras vers l’araignée en la suppliant de ne pas intervenir, qu’elle allait retrouver seul le bon rituel, la bonne tonalité. Theraphosa arqua un sourcil inexistant, elle n’avait pas l’attention d’intervenir pour l’instant. La danse étrange de la fée avait quelque chose d’amusant à observer. Un spectacle à ciel ouvert. L’araignée aurait presque rit si elle n’avait pas été désignée comme son acolyte et que l’avenir de son évolution dépendait de cette fée bien maladroite…

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