Mission couscous
Taj & Perséphone

☙ Pomme - Un million

« ... » Face à l'absence de réaction de Perséphone, le membre de l'AAAP noua ses mains dans son dos. « Ne t'inquiètes pas, je n'ai pas trop serré. » « ... » Mal à l'aise, l'adolescent se gratta la nuque. « Ce n'est que pour quelques minutes, après on viendra te détacher. » « ... » « Bon euh tu peux aller t'asseoir là-bas, ton prochain rendez-vous ne va pas tarder à arriver. C'est le dernier, alors je croise les doigts pour toi ! » Le regard de Perséphone glissa sur lui sans s'arrêter, comme s'il faisait partie de la tapisserie, puis elle fixa ses yeux sur un point invisible. Elle regrettait un peu d'avoir les mains attachées, il lui semblait qu'il restait du caramel accroché à ses lèvres. Elle s'humecta rapidement les lèvres, se demandant si le prochain serait un foutriquet comme le fiancé de Muscarine. Elle n'était pas sûre d'en reconnaître un en le voyant et son nez se fronça. Elle aurait dû lui poser la question.

Enfin, un garçon au teint basané pénétra dans l'isoloir. Elle le salua d'un mouvement de tête, paraissant avoir mangé sa langue. En silence, elle s'accorda exactement cinq secondes pour le regarder mais, comme prédit, ne sut s'il était un foutriquet. Ennuyée, elle fixa la table en essayant de se souvenir ce que la fille de l'association lui avait conseillé à son arrivée. Heureusement, ce fut lui qui se chargea de briser la glace. Reconnaissante, elle ouvrit la bouche pour répondre, puis la referma, analysant ses propos. Les Humains étaient ceux qui annihilaient la magie. Celui-ci ne devait pas être très fort car elle n'avait pas ressenti grand chose à son arrivée. « Perséphone. Non. Je suis une Sorcière. » Elle réfléchit un peu. « Je ne suis pas normale. » Ajouta-t-elle. Muscarine avait eu l'air de trouver que c'était une bonne chose.

Une nouvelle vague de soulagement l'envahit. L'AAAP était vraiment très forte. « Moi non plus, je ne cherche pas de petit ami. En fait, je ne cherche rien. Mais il faudrait que je me penche sur la question. Je crois que c'est important de savoir ce que je veux. » Tout le monde ici avait l'air de le savoir. Elle poserait la question à Persée, il saurait peut-être. « Je suis aussi arrivée récemment, après que la Lune Noire soit tombée sur Amestris. Je suis du Charbon. » À nouveau, Perséphone sentait une humidité désagréable imprégner ses aisselles et son dos sous l'assaut de questions de Taj. Elle répondait par automatisme, sans réfléchir, comme lorsqu'elle avait passé l'entretien pour intégrer la colocation à Juvaniel.

« Ah, ça. » Fit-elle d'un ton dégagé en remuant ses doigts. « J'ai l'habitude d'être attachée. » Elle avait parfois plusieurs jours attachée. Ses rares rébellions n'étaient jamais restées impunies, son père n'aimait pas qu'on lui résiste. « Je ne crois pas être dangereuse. » La vision du garçon à la bataille de boule de neige lui revint en mémoire. Elle avait voulu le brûler, mais n'avait pas réussi. Cela faisait-il d'elle quelqu'un de dangereux ? Perdue dans ses pensées, elle battit des paupières avant de regarder Taj. « Est-ce que tu es un foutriquet ? »

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Mission couscous
Taj & Perséphone

☙ Aeseaes - Megalomaniac

Perséphone haussa les épaules. « C'est difficile à dire de mon point de vue. » Eluda-t-elle pour laisser glisser la conversation ailleurs que sur la vie qu'elle menait avant Basphel. Elle n'en faisait pas un secret, mais n'aimait pas que ce soit ce que l'on retienne d'elle. À choisir, l'étiquette de l'orpheline à la suite de la chute de la Lune Noire était préférable à celle de prisonnière car elle suscitait moins de questions, et moins de malaise des deux partis.

« Peu m'importe. » Lâcha-t-elle, désabusée. « Je ne crois pas que tu profiteras que j'ai les mains attachées pour tenter quoi que ce soit, je me trompe ? Alors, ça ne me dérange pas de continuer à l'être. Je n'ai pas besoin de mes mains pour te parler. » Et de fait, elle se détendait graduellement. Le garçon avait l'air inoffensif, un peu curieux certes, mais Perséphone était venue à ces rendez-vous en connaissance de cause et s'était préparée mentalement pour faire un effort social. L'intérêt de l'expérimentation lui apparaissait peu à peu. Echanger avec une congénère Sorcière avait été éducatif et l'avait laissée désireuse d'en connaître davantage sur les siens, tant que ça n'incluait pas de manger des caramels collants à chaque fois. Quant à l'Humain, ça restait à déterminer, mais au moins, il ne lui donnait pas envie de fuir en courant, ce qui était plus qu'elle n'aurait pu en dire pour beaucoup.

« En fait, je ne sais pas trop... Le fiancé de Muscarine en est un et comme elle ne le porte pas dans son coeur, je crois que c'est une mauvaise chose d'en être un. » Souffla-t-elle, réfléchissant en même temps qu'elle parlait. « Ça te va si on conclut que nous ne sommes ni l'un ni l'autre des foutriquets ? » Satisfaite d'avoir résolu ce mystère, la violette se réadossa à son siège avant de s'en arracher comme si un ressort était collé au dossier. En une fraction de seconde, son visage se métamorphosa et elle s'assit tout au bord de sa chaise au risque d'en tomber. Ses yeux brillaient d'intérêt comme de surprise et son buste fit de l'ombre sur la table tandis qu'elle se penchait. « Faust ? Vraiment ? » Souffla-t-elle d'une voix aigue où l'avidité perçait. « Je le connais. Il était au Fessetival aussi. » Lui apprit-elle. « C'est une bonne personne. » Confirma-t-elle, solennelle et d'un ton qui suggérait que rien au monde ne pourrait la faire changer d'avis, et qu'elle se chargerait de détromper ceux qui ne seraient pas d'accord avec son opinion. « Tu as de la chance d'être dans son dortoir, je t'envie. » Les dortoirs n'étaient pas mixtes, et Perséphone voyait bien où était l'avantage, mais elle aurait bien aimé naître homme afin de partager la chambre de Faust, juste pour être davantage présente à ses côtés. Les quelques fois où ils avaient pu se revoir étaient trop brèves, la vie scolaire ne leur offrant pas le loisir d'en profiter autant qu'elle l'aurait voulu. « Je ne sais pas, j'évite d'être en groupe, je n'aime pas être entourée. Est-ce que c'est important ? Si tu préfères que je sois méchante, je peux essayer. » Elle ignorait comment s'y prendre. Devait-elle menacer de s'en prendre à sa vie ? L'agresser physiquement ? L'insulter ? Comment savoir ce qu'être méchant signifiait quand elle n'était même pas sûre de pouvoir qualifier comme tel son père. Il lui avait souvent répété que tout ce qu'il faisait, c'était par amour et même si elle lui en voulait et que penser à lui suffisait à la terroriser, elle n'était pas sûre qu'il soit méchant. Réalisant qu'elle s'était tue, songeuse, elle releva les yeux sur Taj. « Je pense que je peux l'être pour les bonnes raisons. » Avança-t-elle d'un ton lent, en détachant ses mots comme elle parvenait à une conclusion. « Par exemple, si pour une raison ou pour une autre, tu devenais une gêne pour Faust. Je pense qu'alors, tu changerais d'avis à mon sujet. Heureusement, tu as l'air fiable. J'espère que tu continueras à bien t'entendre avec Faust, je passerai vous voir à l'occasion. À plus tard, Taj. » Et sur ces mots, Perséphone se leva et quitta l'isoloir sans un regard en arrière.

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