La Nouvelle Frontière

Partenaire - Solo
Intrigue - Ayant réussi à obtenir un rendez-vous avec le Notaire en charge d'Orahza, qui doit lui remettre une parcelle en célébration de sa victoire à l'Épreuve des Alfars, Neah se rend à son bureau dans le but de refuser cet endroit dont il ne pourrait réellement s'occuper. Néanmoins, il y découvre une concession bien plus vaste ... et une offre qui l'engage à accepter.

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— Monsieur Katzuta ? Monsieur Arrens va vous recevoir.

Après avoir brièvement relevé les yeux vers la secrétaire, l'Ange se redressait de son siège, suivant cette dernière dans le long couloir, maintenant une allure vive et un maintien digne de son rang auquel il n'eut aucun mal à se caler. Cet endroit était aussi curieux qu'impressionnant, ayant rarement vu un Notaire avec une aussi vaste résidence, lui servant également de bureau, avec des décors aussi riches. Ses clients devaient avoir les moyens. Enfin, rarement ... Ce n'était pas comme s'il allait en voir tous les jours. Arrivés devant une large porte, la personne devant lui heurta trois fois le bois, avant de se permettre d'entrer, son invité à sa suite.

— Ah ! Bonjour !
— Bonjour, monsieur.
— Apportez-nous du thé, Caroline.
— Tout de suite, monsieur.

Le Notaire, dans un grand sourire, invitait son interlocuteur à s'asseoir sur le siège devant lui, tandis que lui-même prenait place dans le sien, uniquement séparés par un bureau ciré et des piles de documents, impeccablement rangés, y traînant.

— Merci de me recevoir malgré les délais relativement courts, mon emploi du temps étant assez serré.
— Bien sûr, ne vous inquiétez pas. Je comprends très bien.

S'il avait des clients aussi importants que Neah le présumait, alors oui, il devait comprendre à quel point le temps était une denrée précieuse, surtout dans le cas d'un Capitaine issu d'une armée en pleine restructuration. Son interlocuteur déposait un dossier devant lui, avant de mettre des lunettes, qui reposaient sur son nez et de l'ouvrir pour en parcourir sommairement les lignes qu'il connaissait d'avance.

— L'homme qui a recourt à nos services tenait à vous adresser ses félicitations quant à votre victoire. Et c'est donc en conséquence de celle-ci qu'il souhaite vous remettre un morceau de territoire d'une île en sa possession.
— Je ne comprends pas la raison, relâchait Neah, stoïque sur son siège. Ce n'était qu'une simple Épreuve de la Coupe des Nations, est-ce réellement nécessaire d'aller jusque là ?

Son interlocuteur toussota, embarrassé. Personne ne relevait la chose, en général.

— Certes ... mais c'est un cadeau aux méritants. Tenez.

Le Notaire tendait les documents à l'Ange, qui les saisit, avant de se laisser quelques minutes de silence, entrecoupées du retour de ka Secrétaire pour leur servir du thé chaud, ainsi que des biscuits, dans le silence et qu'il remercia au passage, pour prendre connaissance de la situation de manière plus concrète, tant cela ne l'avait pas déconcentré pour autant. Question d'habitude. C'était un titre de propriété concernant Orahza, une île voisine de Boraür. On l'avait informé dans une missive de sa taille approximative, de sa situation géographique et des possibilités du territoire.

— Il y a une erreur. On m'a précisé une parcelle de taille modeste, loin de ce qui est indiqué sur ce document. Que me vaut l'honneur de posséder visiblement une majeure partie de la pointe sud de l'île ?

Une sorte de sourire énigmatique apparu sur le faciès de son interlocuteur.

— Une personne a négocié les terrains environnants, puis vous en a fait cession.

L'Ange clignait des yeux, signe de sa surprise, essayant de mesurer l'impact de cette soudaine découverte.

— ... Une personne anonyme également ?
— Pas très exactement, en effet, mais elle vous a laissé une lettre, reprit-il en se mettant à chercher ladite missive. Où est ... ? Ah, la voilà !

Saisissant l'enveloppe au même instant que son exclamation, cette dernière terminait dans la main de celui qui ne reconnaissait absolument pas le sceau agrémenté d'une sorte de tour. Qui est-ce que cela pouvait bien être ? Une personne qui attendait certainement un retour à l'envoyeur quelques temps plus tard.

À mon cher Capitaine Katzuta,

Je souhaitais aider les Anges, qui ont tant réalisés pour les Humains. Je sais que des terres sont peu de choses, par égard aux grandes pertes subies par les vôtres, mais il s'agit également d'un moyen de vous reconstruire. Vous n'avez pas besoin de garder secrète mon identité. Je vous demande simplement d'en prendre soin et de veiller sur les Anges, comme vous voulez réellement vous en charger.

Interloqué, ses yeux s'étaient écarquillés devant la personne à l'origine de la signature. Reine ? Pourquoi ? Au moins, il la connaissait, mais ... N'était-elle pas simplement un être composé de songes, comme les légendes l'accordaient aux Génies ? Une barre songeuse marquait ses traits. L'Ange savait qu'elle n'était pas ordinaire, alors la voir disposer de tant de moyens ne le surprenait guère, seulement ... Pourquoi s'intéressait-elle aux Ailes Blanches, maintenant ? Comme tous ceux qui, soudainement, revoyait sa race renaître et saisissait leurs intérêts, Reine voyait-elle le sien ? Il doutait. De toute manière, qu'allait-il accomplir avec cet endroit ? Ce n'était qu'un modeste Capitaine, Mancinia aurait certainement usé de ce lieu avec tellement plus d'entrain et de convictions, établissant des richesses inégalées à la gloire des siens ... Ce n'était pas comme si les Anges avaient les moyens de se consacrer à un nouvel endroit. Pas maintenant, du moins.

— Monsieur Katzuta, reprit le Notaire Arrens en voyant les doutes se distiller en lui. N'oubliez pas qu'il s'agit d'un territoire au sein d'un plus vaste, que vous n'êtes pas l'unique détenteur d'un de ses terrains. Pour travailler sur la diplomatie, ou les échanges économiques ... il est assez bien placé. Qui plus est, si tout est à construire, vous pouvez le faire selon votre convenance.

Neah était venu avec l'intention de refuser, pour ne pas s'encombrer de détails inutiles, mais maintenant ... les opportunités étaient trop belles pour qu'il les ignorent.

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Marchant dans les couloirs de sa Caserne d'un pas rapide, l'Ange avait recouru à quelques téléportations, entrecoupées de légères pauses, avant de revenir. Ça avait toujours été limpide dans son esprit de ne pas accepter ce leg, mais désormais, les choses étaient différentes. Reine, malgré toute la méfiance qu'il avait à son encontre, avait été d'une générosité étonnante et d'une transparence qui lui assurait le total soutien du gestionnaire principal de l'île. Son âme entrepreneurial ne pouvait nier l'aspect économique de la chose, sachant intérieurement qu'un aussi vaste terrain recelait des trésors en mesure d'aider les siens. Ils en avaient besoin, ce n'était pas le moment de cracher dessus ... Le Capitaine était entré dans le bureau de son supérieur lui ayant donné son approbation pour entrer, il était assez sonné de ses déplacements, mais il n'avait pas le choix. Tout cela, il ne pouvait l'accomplir seul.

— Ah ... Capitaine, vous êtes de retour. Est-ce que les choses se sont déroulées comme vous l'espériez ?

Près de son mur, regroupant deux bibliothèques sur la stratégie militaire, se tenait l'Imperator Feldhart. Honnêtement, cela lui causait encore quelques troubles d'avoir eu un changement après avoir si longtemps servi l'Imperator Tarveras, avant sa mobilisation sur Orhmior, mais Neah savait aussi qu'il s'en acclimaterait.

— Imperator, Préfet.

Le Préfet Niflem était également présent, mais après tout, ils se secondaient l'un et l'autre.

— Malheureusement, l'on vient de me donner une opportunité sur laquelle je ne peux pas revenir ... Est-ce que nous pouvons en discuter ?
— Oui, bien sûr.

D'un claquement sec, l'Imperator rabattit la couverture de l'ouvrage qu'il tenait dans sa main, avant de prendre place à son bureau, le Préfet positionner dans un autre coin de la salle, tandis qu'il se tenait debout, droit.

— Je crois ... Qu'une nouvelle négociation concernant du temps libre va s'imposer, monsieur.
— Bien, dites-nous ce qu'il s'est passé. Ne comptiez-vous pas refuser cette parcelle ?
— Comme vous le savez ... J'ai hérité de la portion d'un territoire suite à ma victoire à la Coupe des Nations, mais il s'avère qu'une autre personne m'ait octroyée plus de terres encore.

Cette soudaine annonce surprit ses deux interlocuteurs. Personne ne s'y attendait vraiment, d'ailleurs, sa volonté de conserver cet endroit risquait de causer de nouveaux troubles au sein de la race, aussi, il devait absolument soigner ses paroles et être rassurant. L'Imperator se penchait plus en avant, intrigué.

— Et cette personne ... La connaissez-vous ?
— Non, mais elle se fait appeler Reine.

Il n'y voyait qu'un patronyme douteux. Normalement, le Capitaine n'était pas tenu de leur dissimuler des informations, mais la situation entre les deux individus était trop vague. Une femme apparaissant dans ses rêves, qui plus est, avec le visage de Mancinia ? Aurait-il seulement été crédible vu sa situation amoureuse ?

— ... Et au vue la taille du l'endroit, sa situation géographique et ses possibilités, j'ai choisi d'accepté.
— Comme vous le savez certainement, Capitaine, la Couronne ne s'engagera pas dans de nouvelles explorations, dans l'immédiat.

Voire plus du tout avant de nombreuses années, le temps de conclure certaines choses, comme rembourser leurs emprunts, ou permettre aux travailleurs de ne pas se noyer sous la masse de travail. Et il y en avait. Si leurs alliés étaient compréhensifs sur les retards éventuels, voir les Anges prendre de nouveaux risques sans honorer le reste allait les rendre amers. Ce serait un véritable casse-tête et cela ... Il y était préparé.

— J'en ai bien conscience, mais nous ne pouvons pas simplement mettre de côté cette opportunité. Contrairement aux Terres d'Iyora ou l'Île d'Orhmior, Orahza reste un endroit qui demeure accessible à d'autres, nous laissant tout loisir d'établir des partenariats économiques avantageux et d'entretenir nos alliances.
— Et que proposez-vous, concrètement ?
— Dans un premier temps, de simplement cartographier l'endroit et d'en découvrir la richesse des sols, s'il y en a. Si ce lieu est pauvre et n'a aucun intérêt, cela ne vaudrait pas le coût d'une nouvelle conquête, mais dans le cas inverse, nous pourrions y réfléchir plus posément, avec toutes les cartes en mains, contrairement à auparavant, rien ne nous presse.
— C'est une idée, Capitaine, mais même si vous prenez en charge ces équipes et surtout, en sera-t-il de même pour leur financement ?

L'Ange eu un sourire, mêlant amusement et embarras, qui ne manquait pas de faire sourire ses supérieurs.

— Comment vous dire ?
— N'en dites pas plus ... La Marquise Leenhardt vous a proposé quelque chose dans ce sens, n'est-ce pas ?
— Oui, admit-il, presque soulagé de ne pas devoir s'étendre sur le sujet. Elle n'aurait aucun problème à financer une telle campagne, à présent.

Contrairement à celles d'il y a près de quatre ans, où elle n'avait que sommairement, l'Humaine avait de quoi conquérir tout en territoire sans qu'elle n'en souffrit. Toute cette richesse lui donnait le tournis.

— Je pense que nous devrions tenter la chose et soutenir ce projet, déclara le Préfet après un bref moment de réflexion. Bien entendu, cela n'engage à rien si nous transmettons le projet à d'autres, mais seriez-vous prêt à passé la main ?
— Préfet, sourit la Canine Blanche. Ce territoire est à moi.

Cette déclaration avait de quoi les surprendre encore plus que depuis le début de l'entretien, mais elle dépeignait d'une certaine vérité juridique.

— Quoi que soit entreprit à son encontre doit obtenir mon aval.

Il prit une inspiration.

— J'ai l'intention de m'en servir pour le bien commun, nous en avons besoin, mais je ne souhaite pas que la Couronne s'en mêle directement. Je vous en parle uniquement parce que vous êtes mes supérieurs, mais les coûts, les recherches ... Laissez-moi m'en charger.
— Vous êtes sûr ?

Il acquiesçait, résolu.

— Avec la Marquise Leenhardt, je serais en mesure de réaliser les choses correctement. Cela demandera plus de temps, évidemment, mais n'aura ainsi aucun impact immédiat sur notre économie.

Elle était instable, ce n'était pas le moment de détruire ce que d'autres avaient si chèrement accomplis.

— Je ne peux néanmoins pas prendre cette décision seul, répondit-il simplement. C'est pourquoi je vous demande de m'accorder votre appuis, pour le bien des Anges. Je ne nie pas que cet investissement aura un impact sur mon travail, mais c'est un pari que je veux risquer.

Même si l'Armée Céleste était, désormais, tout pour lui.

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— Alors ?

Mancinia s'était redressée, avec l'impatience des amoureuses qui attendaient une nouvelle des plus importantes, puisque Neah avait obtenu son affectation définitive.

— Je reste stationné aux Jardins de Jhēn.

Un immense soulagement se peignait sur le visage de sa compagne. Son fiancé sourit, non sans partagé ce sentiment. Sa vie, désormais, était au plus proche d'elle et cela, ses supérieurs savaient qu'il serait délicat de séparer les Écuyers de l'Aurore, surtout avec leur réputation actuelle. Ils étaient un trait d'union entre les Humains et les Anges, on avait besoin d'eux ici. Décidément, les Aetheri, le Destin, ou même la Vie elle-même voulaient que son chemin s'entrecroise à celui de Mancinia ...

— Et ça ? demanda-t-elle en voyant le parchemin dans sa main.
— Ce sont les documents que tu m'as demandée.
— Donc, vous avez une nouvelle frontière, sourit-elle, victorieuse.
— Pas encore, répondit-il en venant dans sa direction. Je vais suivre ton conseil et travailler sur la cartographie et l'étude des sols. Quand tous les documents seront en ma possession, nous aviserons.

Prenant sa compagne dans ses bras, il se ressourçait à son contact et à son odeur boisé.

— Embrasse-moi, s'amusa-t-elle en venant prendre ses lèvres, impatiente.

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