Rp lié : Le Chef d'Orchestre
Intrigue : À force de chercher le contact de l'eau et d'y être exposé, Kaahl va développer un contrôle sur celle-ci.

The Phantom of the Opera - Prague Cello Quartet

« Vous… » J’avais levé l’index, en espérant qu’il cessât ce qu’il était en train de faire. Le fait est qu’il alignait les longueurs sans s’arrêter. Je soupirai. Je détestais l’eau. Debout, au bord de la piscine, je n’osais pas m’avancer. Comme un chat, je me tenais loin de l’étendue aqueuse. La musique qui vivait en moi n’avait pas envie de s’éteindre. « Peut-être que… » Encore raté. Dès qu’il s’approchait, sa tête replongeait sous l’eau et ses pieds entraient en contact avec le bord du bassin. Il poussait et repartait, avec un élan puissant, vers l’autre extrémité. Ses bras battaient alors l’eau et il respirait par intermittence. « On pourrait… » Mon menton fit un léger mouvement vers l’arrière lorsqu’il se hissa hors de la cavité à la force de ses bras. Ses cheveux longs se collèrent à sa peau lorsqu’il se redressa. Il n’avait pas l’apparence d’Elias. Ça aurait d’ailleurs sans doute été illogique d’admirer la silhouette rachitique du Roi, qui paraissait plus maladive que sportive, faire des longueurs si vite. Il passa l’un de ses bras derrière sa tête et l’étira en posant sa main opposée sur son coude. Il fit de même avec l’autre et craqua deux fois son cou, à droite puis à gauche. Comme il avait remarqué que je l’observais, il me sourit avec insolence. « Je ne comprends pas comment ça se fait que vous ne soyez pas fripé. » dis-je, en remontant le regard. Il rit. « En tout cas, je suis déçu que vous ne soyez pas venu avec moi. » Je grimaçai. « Non merci. L’eau et moi, nous ne nous entendons pas, en dehors de quelques cas spécifiques. » « Hum. » La lueur fugace qui passa dans son regard m’effraya soudainement. « Non ! » criai-je. Trop tard.

Lorsque ma tête émergea du bassin, son rire résonna. Ce qui aurait pu n’être qu’une plaisanterie dans d’autres circonstances se transforma en quelque chose de beaucoup plus sérieux. La panique me gagna, celle de perdre mes repères musicaux. Je détestais l’eau et comme je n’avais jamais, dans ma vie, voulu m’en approcher, je ne savais pas nager. Ma magie s’affola autant que moi et, autour de mon corps, le liquide commença à se noircir. Lux in Tenebris, mélangée à d’autres sorts, transforma ce qui était clair et limpide en une marre boueuse, puante et, surtout, polluée. Je serrai les dents, sentant soudainement mon corps me brûler. Mon inspiration de stupeur fut calquée sur celle d’Elias qui, d’un geste rapide, sauta dans la piscine pour me récupérer. J’entendis vaguement un son de douleur émaner d'entre ses lèvres. Mes bras furent arrêtés dans leur essai infructueux de me maintenir hors de l’eau et je fus tiré jusqu’au rebord. Il me hissa jusqu’au sol, avant de me suivre. Là, il se laissa tomber sur le dos. Mon cœur battait si fort que je l’entendais jusque dans mes tempes. La peur s’estompa mais pas la douleur. En amenant mes mains devant mes yeux, je me rendis compte que ma peau était rouge de partout. Plusieurs brûlures s’y trouvaient, à des stades plus ou moins avancés. Des cloques s’y étaient formées, par endroit. Ça faisait mal.

Quelques heures plus tard, nous étions tous les deux en peignoirs, assis face à face, à nous observer mutuellement. « Pourquoi vous ne m’avez pas dit que vous ne saviez pas nager ? » finit-il par me demander. Il avait réussi à nous soigner tous les deux en utilisant Umbra in Lucem mais l’eau de la piscine avait été irrécupérable. Sur nos deux corps, il restait quelques séquelles, des zones où les brûlures avaient été les plus intenses. Elles disparaîtraient après quelques soins supplémentaires. Au moins, nos visages n’étaient plus ni cramoisis ni gonflés. « Je ne pensais pas me retrouver dans l’eau. » dis-je, avec un agacement presque enfantin qui le fit rire. Il porta son verre en face de lui, pour que nous trinquions à distance. Je répondis au geste. « Je n’aime pas l’eau non plus. » « Ça ne se voit pas. » Il sourit, tout en faisant courir son index sur l’arrondi de son verre. « J’essaye de palier mes faiblesses. J’ai connu la guerre entre les Sorciers et les Sirènes lorsque j’étais adolescent. Mon père est mort en mission au cœur de la Cité Engloutie. Depuis ce jour, je ne me suis jamais senti à l’aise face aux grandes étendues aqueuses. Je me suis mis à la natation pour une raison différente mais depuis que je sais que je peux nager longtemps, j’ai moins peur de tomber à l’eau ou de prendre le bateau. » Il but. Je souris et l’imitai. La musique résonnait toujours en moi et, plus que cela, recevoir ses confidences me fit plaisir. Je savais, cependant, que celui qu’il disait être son père n’était pas son véritable père. « Je comprends. » dis-je. J’expirai, bus de nouveau et décidai de lui demander de rester encore un peu à Amestris. Il déclina.

« Je vous assure. Ma tante travaille à la piscine. Il y avait le Chancelier Merlfide et un inconnu. Le bassin est devenu inutilisable et ils sont encore en train d’essayer d’arranger les choses. » Ceux à qui elle parlait étaient sceptiques quant à sa version de l’histoire. Pourtant, personne ne pouvait plus entrer dans la zone depuis deux jours. « Et l’inconnu était très particulier. » « Comment ça ? » « Ma tante a eu des frissons rien qu’en le regardant. Pourtant, elle n’a aucune idée de qui il s’agit. Il ne s’est pas présenté. Cyrius Windsor n’a pas décliné son identité non plus. Elle a juste dit qu’ils ont les mêmes yeux. » « Tu penses qu’il s’agissait d’un scientifique ? Je me dis que c’est possible… » « Quand même, dans la piscine, alors que n’importe qui peut s’y rendre. » « Justement, l’homme qui s’occupe de l’accueil ne se rappelle pas avoir vu le Merlfide et l’inconnu… C'était au beau milieu de la nuit en plus. » « Étrange. » « C’est peut-être son frère, s’ils ont les mêmes yeux. » « Le Duc Windsor a été adopté et ses frères sont connus. Ou alors... un membre de sa véritable famille ? Ce serait incroyable mais ça n’expliquerait pas l’état de la piscine. »

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