[Q] - Délicieuse nuit de sang et de magie | Léandra Y. Silvanyr
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Lun 04 Mai 2020, 18:24
Partenaire : Léandra Y. Silvanyr Intrigue/Objectif : Apprentissage/Enseignement Après leur visite de Pabamiel, Orion et sa mère voyagent en carrosse sur les routes de l'Empire. Par une nuit claire, le jeune vampire en profite pour s'éloigner un peu de l'attelage afin de s'entraîner à chasser à la lisière d'une forêt. Intrigué par une étrange lueur provenant d'un trou dans un tronc d'arbre, Orion trouve une précieuse dague. Mais ce n'est pas n'importe quel objet : il s'agit d'un habitacle de génie...
Enfin je pouvais sortir un peu dehors pour me dégourdir les jambes et profiter de la douce atmosphère nocturne ! Ma mère prenait soin de mettre à profit les longues heures de route pour m'enseigner les coutumes vampires. Par conséquent j'avais parfois l'impression d'étouffer ou que ma tête allait exploser devant la quantité de choses à apprendre. Au moins je bénissais l'Empire qui avait l'air de bien entretenir leurs routes. Le voyage aurait été une torture si en plus de tout cela le carrosse bougeait dans tous les sens à cause d'ornières sur les routes. Je me faufilai dans les hautes herbes, seule ma chevelure blanche brillait dans le clair de lune. Mes sens devraient faire de moi un prédateur lorsque j'en aurai parfaitement le contrôle. Mes yeux voyaient beaucoup mieux dans l'obscurité maintenant que j'étais devenu un vampire. Mon odorat était à l'affut de la moindre proie animale que je pouvais sentir à la trace. Les arbres prenaient un aspect fantasmagorique et presque effrayants dans le voile nocturne déposé sur le monde par Cléophée, Æther de la Nuit. En marchant, je faisais de mon mieux pour faire le moins de bruit possible. Ma dague en obsidienne était attachée à ma ceinture, prête à être utilisée si je décidais de ne pas tuer ma proie directement avec mes crocs.
En parlant de mes crocs, ceux-ci étaient sortis sous l'effet de l'excitation et de la Soif. Je n'avais pas encore la complète maîtrise sur eux et ils avaient tendance à pousser dans ma mâchoire à la moindre pulsion carnassière. Quelques pas légers m'emmenèrent dans un buisson afin de me dissimuler et de scruter les alentours. Rien ne semblait bouger en cette nuit paisible si ce n'est les feuilles caressées doucement par le vent. Quelque part une proie n'attendait que de se faire prendre. La Soif me faisait haleter d'impatience et me procurait des poussées d'adrénaline. Je ne rêvais que de sang chaud, liquide porteur de vie à la couleur si belle, si délicieuse. J'en voulais. Tellement. Tout le temps ! Je ne savais plus qui j'étais vraiment. Devais-je ne faire qu'un avec toutes ces nouvelles sensations ?
Tout à coup je vis une infime lueur au loin. C'était un léger éclat, comme si quelque chose de brillant était magnifié par l'éclat de la lune. Intrigué et rendu curieux par cette petite lumière, je me rapprochai, les muscles toujours prêts à bondir si un animal venait à passe par là. Cette chose mystérieuse semblait se trouver dans un trou à l'intérieur d'un tronc d'arbre. C'était un peu en hauteur, un petit peu d'escalade ne me ferait pas de mal après tout... Prenant fermement appui sur mes bottes en cuir je commençai l'ascension... Je fus surpris de sentir plus de force dans mes bras pour me hisser, mes muscles me paraissaient plus vigoureux et endurants que lorsque j'étais humain. C'était encore faible, mais Mère me disait que je deviendrai encore plus fort avec le temps. Après quelques mètres en escalade, je parvenais enfin face au trou. L'objet mystérieux était là. Ma main agrippa quelque chose de dur et de métallique. Je le sortit de sa cachette...
« Quelle merveille ! » Je m'exclamai devant la beauté de ce que j'avais dans la main. Une ancienne dague de cérémonie, couverte d'or et d'émeraudes. C'était donc cela qui brillait dans la nuit. « Comment es-tu arrivée là toi ? » Je posai la question à l'objet, bien entendu sans attendre de réponse. Un bandit devait certainement l'avoir cachée là... Mais désormais elle était mienne ! Afin de conserver mes deux mains libres pour redescendre, je mis la dague rangée dans son fourreau entre mes dents.
Revenu sur la terre ferme, je pouvais l'admirer plus en détail. Cette dague devait valoir son pesant d'or sur le marché, ou bien j'en ferai simplement cadeau à ma mère même si l'or et le vert n'étaient pas vraiment ses couleurs favorites. Le travail d'orfèvre et de forgeron sur cette arme était tout simplement remarquable. Malheureusement un peu d'humus recouvrait les émeraudes, j'entrepris donc de les nettoyer un peu en les frottant avec ma manche... Après cette fabuleuse trouvaille, j'en oublierai presque mon but initial à savoir chasser... Hum quand même pas... La Soif me tiraillait toujours autant. « Merde... merde j'ai tellement soif... » Il s'agissait d'un murmure mêlé à un gémissement. Cette nouvelle dague allait faire couler le sang cette nuit...
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Dernière édition par Orion Nevrakis le Jeu 07 Mai 2020, 17:41, édité 1 fois
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Jeu 07 Mai 2020, 17:21
DELICIEUSE NUIT DE SANG
& DE MAGIE
La cité des merveilles n’était plus que l’ombre d’elle-même. Je déambulais aux milieux des vestiges du palais royal que des millénaires de sommeil avaient érodé. La nature fabuleuse et sauvage avait repris ses droits sur la fantasmagorie des lieux. Une mousse vert pomme tapissait les fissures du marbre qui paraissait craquer sous mes pas. Je levai les yeux vers des statues oubliées que d’épaisses ronces épineuses protégeaient jalousement. Çà et là, les fragments d’un passé lointain évoquaient des scènes d’autrefois, comme tant de réminiscences d’un tragique destin. Je me laissai bercer par une douce mélodie à présent oubliée. Ma tête dodelinait au rythme de ce son cotonneux provenant d’un autre temps. Je ne reconnaissais pas ces paysages qui me paraissaient pourtant si familiers. Mes doigts fantomatiques effleurèrent avec douceur les créations brisées de ceux qui m’avaient précédé. Au milieu de bassins taris, les fastueuses fontaines ne crachaient plus qu’un amas de poussières invisibles. Je me perdis dans ce dédale de couleurs, de parfums et de matières que mon essence peinait à capter. La magie bleue s’efforçait de maintenir la constance de cet univers dévasté par l’abandon. Elle pleurait sa cruelle destinée et ses sanglots faisaient échos aux larmes qui ruisselaient sur mon visage spectral. Le chagrin des habitants de l’acropole - depuis longtemps décimés - resplendissait à nouveau, comme éveillé par ma présence.
Les premiers rayons de la lune éclairèrent la capitale qui rayonna d’une effervescence retrouvée. Les souvenirs des esprits qui hantaient l’endroit s’animèrent pour consoler la ville meurtrie. Une myriade de fantômes parcourrait désormais les rues, s’évertuant à rejouer une comédie qu’ils connaissaient par coeur. Je pris pitié pour ces condamnés à qui la mort n’avait pu procurer la paix. Après de longues minutes de contemplation, mes larmes se muèrent en sourire. Le monde s’égayait du spectacle chimérique qui naissait sur ses terres. La vie reprit son cours. Les rires d’enfants parcoururent les années pour se répercuter sur des corridors illusoires. J’aperçus la malice sous leurs airs dociles tandis qu’ils fuyaient les convenances de leurs précepteurs. Plus loin, les adultes dansaient une valse endiablée, enivrant les jeunes demoiselles qui foulaient la piste pour la première fois. Leur danse m’étourdit autant qu’elle me fascina.
Une voix sonna dans ma tête comme l’appel d’une réalité différente. Je pris soudain conscience des tiraillements dans ma poitrine. Une chaîne glacée m’extirpa sans état d’âme de ma rêverie transcendantale. Le plan matériel accentua sa prise sur mon essence, m’intimant de le rejoindre sur le champ. Je maudis la tyrannie de ce maître que je ne connaissais pas encore. Je lâchai prise pour obéir à mes instincts primaires. Le décor onirique s’effaça au profit d’une atmosphère plus tangible.
Je m’évaporai en une imperceptible fumée obscure sous le voile de la nuit. Des fulgurations azurées parcourraient sporadiquement les particules de mon corps informe. Je profitai un instant des vibrations de l’éther telle un semblant de brise sur ma peau impalpable. Le décor se précisa sous la luminosité du clair de lune. L’équilibre de la jungle s’était rompu avec l’arrivée de ce nouveau prédateur. Les lueurs de l’astre de la nuit se reflétaient sur ses canines parfaitement blanches. Le vampire tenait entre ses mains exsangues la dague cérémonielle qui me liait à lui. Un nouvel éclair me parcourut tel un frisson le long de mon échine.
Ma nébuleuse enfanta une silhouette humanoïde. Mes traits grossiers s’affinèrent pour sculpter la fine musculature d’un charmant jeune homme. La brume drapa ma création d’une tenue raffinée seyant à ses formes désormais parfaites. Des bijoux somptueux se modelèrent autour de mon cou et de mes poignets, révélant mon goût pour le luxe et la perfection. Tel un peintre qui colore son oeuvre, mes corpuscules inconsistants arborèrent des teintes et des textures complexes. Ma chevelure mordorée encadrait un visage jovial recelant deux petites d’or qui croisèrent le regard glacial de mon nouveau propriétaire.
« Je vous honore, Ô Maître de la Dague. Je me nomme Heian et c’est un véritable plaisir de faire votre rencontre. », déclarai-je d’une voix douce et solennelle
Je le saluai d’un geste solennel, mélange d’obséquiosité et de noblesse.
« Nos destins sont à présent étroitement liés. Vous m’avez invoqué et, en gage de ma gratitude, je m’engage à réaliser trois de vos souhaits. Prenez garde, vous n’aurez la possibilité que d’en formuler trois, pas un de plus. »
Je marquai une courte pause pour lui laisser le temps d’intégrer les termes de ce contrat.
« Lorsque vos désirs seront réalités, notre lien se brisera. Puissiez-vous faire bon usage de cette faveur que je vous accorde. »
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Lun 18 Mai 2020, 19:12
Qu'est-ce que j'en savais de tous les mystères du monde moi ? Ainsi que de toutes les créatures qui peuplent cet univers ? En réalité pas grand chose. Moi l'ancien voleur humain devenu vampire, je n'avais jamais eu de véritable éducation avant le Baiser. Bien entendu, l'éducation de la vie et les épreuves avaient forgé mon caractère et ma débrouillardise, sans pour autant me préparer à n'importe quelle rencontre. La précieuse dague que j'avais trouvé émit bientôt une lueur surnaturelle. Cet objet était magique ?? La pratique de la magie était également nouvelle pour moi et je ne faisais que l'effleurer pour le moment grâce à mes dons vampiriques qui se développaient lentement. Mais ce que j'avais devant moi était d'une tout autre nature que ce que j'avais l'habitude de voir... Une étrange nébuleuse qui s'éveilla dans la nuit et qui brillait légèrement dans le clair de lune. Ce tourbillon prit lentement une silhouette humanoïde, celle d'un jeune homme habillé avec grand luxe. Les bijoux qui l'ornaient feraient certainement pâlir d'envie ma mère, si tant est qu'elle puisse pâlir encore plus que son teint de vampire. Mais ce qui attira surtout mon regard ébahi n'était pas les habits raffinés ni les bijoux de l'inconnu, c'était sa peau. Cette peau qui visuellement avait l'air si douce et appétissante... Rien que par la vue j'imaginais le goût de cette étrange apparition... J'avais si soif... Cette chair si jeune et si tendre, gorgée du précieux nectar rouge rubis...
Mes doigts restaient crispés sur la garde de la dague, et la soif tiraillait tellement mon ventre que je n'écoutais sa présentation qu'à moitié. Mon esprit essayait de se concentrer et parvenait plus ou moins à comprendre le sens de tout ceci. Je voulais me contrôler, répondre avec des mots intelligibles à cet Heian comme il disait se nommer... Mais je n'y tenais plus. Déjà mes jambes se contractaient d'elles-même, prêtes à bondir. Et mes pupilles se dilataient, comme celles d'un chat prêt à fondre sur une proie. Bouche entrouverte, mes crocs brillants dans la lueur nocturne, je sautai sur Heian... Pour ne rien sentir du tout. L'espace d'un instant j'étais tout près de sa si belle peau et la seconde d'après j'étais déjà derrière lui. Je l'avais traversé de part en part. Une forme immatérielle... Tout comme Rigel, mon cher renard boréal... Le prédateur en moi siffla de frustration.
« Vous... Vous n'avez pas de corps physique ?? Mais dites moi... Cette dague... Tout ce discours sur les souhaits à réaliser... Vous êtes un Génie ? » La colère chez moi se mua très vite en tristesse, en désespoir devant ma soif si implacable. Mes humeurs étaient si changeantes, je souffrai terriblement de n'être plus qu'un animal sauvage dans ces moments-là, incapable de résister à ses pulsions. Je détestais ma faiblesse et je devais avoir l'air pitoyable face à lui...
« Ainsi je peux avoir trois voeux ? N'importe lesquels ? Même celui de devenir le vampire le plus puissant du monde si je le souhaite ? »
Un sourire carnassier se dessina sur mes lèvres violettes. Je n'avais jamais caché mon ambition. J'avais une sorte de revanche à prendre sur la vie, une nouvelle vie d'éternité où je ne serais plus la victime, l'orphelin rejetté par la société. J'avais une seconde chance de devenir quelqu'un d'autre. Encore fallait-il que j'arrive à comprendre ces boulversements en moi et contrôler mes nouvelles pulsions... Mais la principale urgence, c'était d'étancher un peu ma soif.
« Je suis désolé je n'ai pas été très... courtois... Je me nomme Orion, fils de Mathilda, de la lignée de Vlad. Je souhaite que devant moi apparaisse un calice en or rempli de sang chaud de la meilleure qualité, un grand cru sanglant comme on en sert à la table des Seigneurs de la Nuit. »
J'espérais me désaltérer un petit peu histoire de pouvoir reprendre mon entrainement à la chasse en ayant un peu moins soif, mais aussi voir les pouvoirs de Heian à l'oeuvre... Quitte à gaspiller un souhait avant de passer aux choses sérieuses... J'étais peut-être un idiot d'utiliser un souhait pour quelques gorgées de sang mais au moins je pourrai garder le précieux calice en or...
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Sam 23 Mai 2020, 00:34
DELICIEUSE NUIT DE SANG
& DE MAGIE
Les muscles de la créature se contractèrent et, d’un bond, il fût sur moi. Les particules de fumée se dispersèrent et reprirent une teinte sombre pour laisser passer l’individu. L’opération fût fugace et - pourtant - longuement désagréable. Je ressentis les tissus magiques s’étendre lentement et se déchirer fibre par fibre. Je ne percevais aucune douleur. J’avais l’impression de perdre ma consistance, de me diluer au contact d’un liquide abrasif. Le vent s’infiltra par l’empreinte que la silhouette avait laissé sur mon corps dans un sifflement agaçant. Son passage chatouillait mes entrailles qui se tordaient pour éviter sa caresse. Finalement, après des secondes qui me parurent interminables, la brèche se referma et mon apparence se reconstitua. Une chose était sûre, je le détestais déjà.
« Sans blague ?! Sauf votre respect, Mon Maître, vous ne faites pas réellement preuve d’intelligence, ni de sagesse. Ça vous arrive souvent de sauter sur un phénomène magique que vous ne connaissez pas ? A quel moment vous êtes-vous dit qu’un être émanant d’une dague dans un nuage de fumée pouvait revêtir une forme physique ? Franchement… » rétorquai-je agacé, les réminiscences de cette horrible sensation participaient à entretenir ma mauvaise humeur.
Mon regard sévère se posa sur le vampire. Ses émotions m’avaient l’air complètement instables : sur son visage, la tristesse prit le pas sur la colère en une fraction de seconde. Il devait encore être jeune parmi les buveurs de sang - cela expliquait sans doute son accueil belliqueux.
« Oui, je suis un génie et, non, je ne suis pas en mesure de réaliser n’importe quoi »
Je levai les yeux au ciel sans m’en rendre compte. Techniquement, j’étais tenu d’exaucer n’importe quel voeu - si absurde soit-il - prononcé par mon maître. Si ma magie n’était pas en mesure de le satisfaire, alors j’étais contraint de l’accompagner jusqu’à ce que j’en sois capable. Pour ma part, il en était hors de question. Je voulais rapidement expédier cette affaire et m’en retourner auprès de la cité des merveilles. C’était en cela que le choix des mots était important pour se sortir de ce genre de situation. En l’occurrence, ne pas être en mesure de réaliser ne signifiait pas qu’il ne pouvait pas l’énoncer.
Je répondis à son sourire par un visage affable. D’une certaine manière, cela pourrait être amusant que ce minet prenne la tête de sa nation. J’imaginais bien un garçon aussi arrogant et impétueux remettre en cause le fragile équilibre entre les lignées du peuple de la nuit. Une guerre civile éclaterait peut-être ? Une aubaine pour nous : la vengeance, les regrets et la peine étaient d’excellentes motivations pour qu’un rêveur fasse appel à nos services.
« Je vous pardonne, Maître Orion de la lignée Vlad, fils de Mathilda. Pour votre gouverne, je suis un génie relativement jeune ; ma puissance est encore assez faible. Mais votre premier souhait est une bagatelle pour moi. »
Je claquai des doigts pour qu’une magnifique coupe en or apparût à un mètre du sol. C’était un calice dont le pourtour était enchâssé de gros rubis. Il débordait d’un liquide aussi précieux et coloré que les pierres qui l’entouraient. Pendu dans l’instabilité du vide, il chuta au sol dans un bruit sourd. Le sang chaud se déversa sur la terre, couvrant les hautes herbes d’un reflet vermeil. A cet instant, la fine brise qui caressa les feuilles de l’arbre poussa vers le rêveur les effluves métalliques et sucrées du fluide tant espéré. Je n’avais aucune vergogne à gaspiller ce cru millésimé : la jeune vierge ne devait sans doute même pas s’en être aperçue. D’une ponction indolore, j’avais puisé dans ses artères une quantité raisonnable de ce breuvage réputé auprès des Seigneurs de la Nuit. Sans doute, l’ange aurait-elle un peu plus d’appétit lors de son prochain repas. Mes pensées se tournèrent vers celle qui m’offrait ce présent sans le savoir. Je me demandais quelle tournure avait pris sa vie depuis notre rencontre autour de l’autel jonchée de ronces.
Malheureusement pour mon maître, la coupe s’était vidée de ce délicieux nectar. Était-ce la colère ou le désespoir qui teinterait ses yeux céruléens ? Je me retins de rire devant ce spectacle pitoyable. Peut-être se rabaisserait-il à laper les restes d’hémoglobine comme un chien galeux ?
C’était la première fois que j’arrivais vraiment à piéger un rêveur. Cette pensée me procura une sorte de satisfaction. Ce sentiment était d’autant plus jouissif que je me félicitai d’avoir trouvé deux failles dans son énonciation. Car oui, il y en avait bien deux. Il découvrirait bientôt que si la coupe était bel et bien apparue face à lui, elle resterait à jamais hors de sa portée.
« Peut-être est-ce un peu tard pour vous mettre en garde quant à la formulation de vos souhaits ? » lançai-je sur un ton amusé.
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Jeu 09 Juil 2020, 19:32
J'avais été naïf de penser que tout se déroulerait sans accroc. Que ce petit Génie arrogant et mieilleux ferait ce que je l'ordonne sans broncher. Sans tenter de me piéger. Je savais que ce premier voeu était une broutille, une demande dérisoire pour une créature de ce type. Ca ne l'a pas empêché de se jouer de moi. Pourtant, tout avait plutôt bien débuté. Je vis le calice apparaître devant mes yeux. Lévitant à un mètre du sol, il était comme je l'avais imaginé : en or serti de gros rubis. Un gobelet de grand seigneur. Puis je vis le sang apparaître par magie. Ce précieux nectar... Si délicieux... Rien que la vision de l'hémoglobine me faisait trembler de hâte et gémir d'impatience. Mes crocs sortirent d'eux même, bouche carnassière, dents dont l'éclat blanc semblait luire dans la pénombre nocturne. La senteur métalique emplit l'air... Mais avant que je puisse avancer la main pour l'attraper, le calice tomba à terre, souillant la terre et l'humus d'un manteau rouge sombre. Un glapissement de surprise et d'intense déception s'imprima sur mon visage.
« NOOOONN ! Qu'est-ce que t'as fait ?? » J'étais en train d'haleter. Je venais de me prendre un putain d'ascenseur émotionel. D'ailleurs la colère me monta très vite au nez. La Soif me rendait encore plus hargneux, paranoïaque et cruel. Mais ce petit salopard l'avait fait exprès. Je pouvais le voir, le lire sur sa petite moue suffisante. Mon visage se crispa, et les traits harmonieux que m'avaient donné ma transformation se changèrent en un masque de colère. Mes yeux bleus, au regard doux avant que je deviennent vampire, étaient maintenant perçants et corrompus d'un éclat malfaisant. « J'en suis certain tu l'as fait exprès sale Génie de merde ! » J'étais dépité... Et le pire dans tout ça était que l'odeur du sang chatouillait encore mes narines... Je ne pourrais.. pas... résister... J'avais vraiment du mal à me concentrer sur autre chose. Sans même vraiment m'en rendre compte, j'étais déjà à genoux. La flaque était là. Tout près... Je devais me dépêcher. La terre commençait déjà à boire le sang et bientôt tout ce breuvage servirait de nourriture aux vers. Je devais... Le faire... C'était plus fort que moi. Je commençai à lécher la terre et l'herbe avec frénésie, essayant de déposer sur ma langue la moindre micro goutte que je pouvais trouver. Je ne sentais aucun autre goût, ni de terre ni d'herbe. Ma condition de vampire faisait que j'avais perdu cette perception. par contre je sentais toute la texture si désagréable, de l'humus plein la bouche et sur le museau. C'était horriblement infect. En moi je sentais quelques sensations de plaisir grâce aux quelques gouttes de sang que j'avais pu collecter. Mais tout ceci était gâché par l'envie de vomir causée par la terre dans ma bouche. Et puis surtout j'avais cette rage qui montait en moi de me faire humilier ainsi. Le temps d'une seconde j'ai cru que je pourrai au moins me consoler avec le calice en or... Mais avec horreur je vis que ma main passait au travers depuis un moment déjà. Le calice était immatériel tout comme son putain de respect. Après quelques temps je pus enfin reprendre mes esprits et me relever, crachant de la terre et des bouts d'herbe. C'était la pire nuit de ma vie.
« C'est bon tu t'es bien amusé Heian ? C'est comme ça que tu montres du respect à ton maître ? Tant que je porte cette dague et que je n'ai pas fait mes voeux tu m'appartiens ! Mais je devrais peut-être m'abstenir de souhaiter quoi que ce soit et la balancer au plus profond de l'océan ? Ou bien la faire fondre pour la transformer en le calice que tu me dois ? »
J'avais encore envie de traiter ce connard de tout les noms, de le menacer de tant de choses. Je détestais me sentir si faible, si incapable de me venger contre des bouffons dans son genre. J'aurais aimé vaporiser son arrogance et sa face de petit péteux d'un claquement de doigts... « Pourquoi ça m'arrive toujours ces plans pourris... Je voulais juste m'entraîner à la chasse moi à la base... » Je soupirai longuement. « Bon Heian on deviendra pas amis ce soir mais on pourrait pas faire un petit effort tout les deux ? » J'allais faire mon second voeu, résolu à mieux le formuler pour éviter les coups de poignard dans le dos.
« Je souhaite devenir un chasseur plus compétent et efficace. Pour ce faire, cette nuit tu seras mon instructeur. Tu m'apprendras à me déplacer avec discrétion, à me projeter sur une proie et à la tuer en un instant pour me nourrir de son sang. Cette leçon se terminera au premier gibier tué ou une heure avant le lever du jour. »
J'espérais avoir tout bien verouillé pour éviter les mauvaises surprises. Ce type pourrait essayer de me tuer au passage après tout. Je devais rester sur mes gardes...
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Mar 08 Sep 2020, 22:46
DELICIEUSE NUIT DE SANG
& DE MAGIE
La scène était encore plus pitoyable que ce que je m’étais imaginé. La rage s’empara de chaque parcelle du corps décharné du vampire. Un raz de marée troublait la quiétude de son regard céruléen qui me fixait avec ire. Les cris se mêlèrent aux jurons tandis qu’il réalisait la situation. J’accueillis ses paroles avec un désarroi feint : je reculai la tête, écarquillai les yeux et posai la main sur mes lèvres interdites. Je retins avec difficulté mes véritables émotions, usant de tous mes talents d’acteur. Finalement, les yeux d’Orion changèrent de cible. Il fixait avec avidité le liquide carmin qui s’infiltrait dans la terre humide. La commissure de mes lèvres s’inclina en un léger rictus. Le jeune homme sauta au sol pour se sustenter comme une bête. Ses gestes étaient vifs et maladroits. Il avalait autant de terre qu’il ne récoltait de sang. Il me faisait tellement pitié que j’eus presque envie de lui pardonner ses offenses. Mais la Vengeance était trop délectable.
La créature de la nuit fit mine de se relever. En un battement de cils, je repris mon masque d’innocence. J’aurai pu lui révéler la vérité ; de toute façon, il ne pouvait m’atteindre. Cependant, je me plaisais à entraîner mon art.
« M’amuser ? Je crains que vous vous fourvoyiez, Maître Orion. Si vous m’aviez simplement laissé le temps de vous expliquer toutes les subtilités du Lien qui nous unit, j’aurai pu vous mettre en garde à temps… La formulation est absolument cruciale pour que la magie ait l’effet escompté. »
C’était une rodomontade. L’une de celles qui reléguait le Rêveur à l’état de plus gros nigaud du monde. Pourtant, je ne doutais pas une seconde que cette affabulation put suffire à cet idiot. Après tout, ne venait-il pas de tenter de m’intimider avec des menaces frivoles ?
« Par ailleurs, j’en profite pour vous préciser que vos admonestations n’ont aucun effet sur ma personne. Je suis un Génie. Pensez-vous réellement qu’un Océan, pis qu’une altération de mon habitacle, puisse venir à bout de moi ? C’est très mal connaître les miens. Peut-être avez-vous lu trop de légendes à notre sujet ? Quant à la nature de l’obligation qui nous lie, il n’est en aucun cas prévu que je vous appartienne. Je conserve mon libre arbitre mais - par mon extrême générosité - je vous gratifie de trois souhaits. »
A nouveau, tout n’était pas véridique mais il n’avait aucune manière de le savoir - et je doutais qu’il prît la peine de s’attarder sur la question. D’ailleurs, il se contenta de quelques jérémiades - espérant davantage de bienveillance de ma part. Je lui accordai que notre rencontre n’avait pas démarré de la meilleure des manières. Mais je n’avais pas suffisamment jouer avec lui. Il regretterait son assaut sur ma personne ; j’étais résolu à éduquer ce malotru.
« Très bien », mentis-je.
Je n’eus pas réellement à faire d’effort pour détourner son second voeu.
« Vos désirs sont des ordres » pouffai-je à moitié en claquant des doigts.
Le fou rire était incontrôlable. Je m’en voulais de ne pas avoir réussi à garder mon sérieux face à cette demande ubuesque. Mon dos tressautait au rythme des ricanements. Je mis quelques longues secondes avant de pouvoir reprendre mes esprits et formuler une quelconque phrase.
« Désolé, lâchai-je dans un moment d’accalmie. C’est juste que, me gaussai-je, c’est la pire demande qu’on m’ai jamais faite. »
A cette pensée, je faillis recommencer à m’esclaffer. Je me retins de justesse. Je fermai les yeux, chassai cet événement de mon esprit, et me reconcentrai sur le vampire.
« Bon, ça va mieux. Désolé pour cet épisode, j’aurai dû garder mon calme. Mais vous venez de gâcher un deuxième voeu. Je peux comprendre votre désir mais… Vous pensiez réellement que - moi - un Génie sans aucune prise sur le monde réel - qui n’a pas besoin de se restaurer - qui vit quasi-excluvisement dans le Monde des Rêves et qui, de surcroît ne reste que quelques heures par jour hors de son habitacle, pouvait vous apprendre quoi que ce soit sur la chasse ? Franchement, Maître Orion, si les règles n’étaient pas aussi strictes je n’aurai pas tenu compte de votre désir…»
Je ne savais pas réellement quoi décider à son propos. Quelque part au fond de moi, j’avais envie de lui faire cadeau d’un réel souhait. J’ignorai pourquoi mais j’avais envie de l’aider un peu. Je songeai un instant que c’était parce qu’il me paraissait affligeant. Sans guide, sans doute ne resterait-il pas en vie bien longtemps.
« Bon… Si vous désirez apprendre à chasser, je vous conseille d’exprimer les choses ainsi : ‘Je souhaite posséder les connaissances théoriques et pratiques, la discrétion ainsi les réflexes me permettant de chasser une proie’. Je resterai ensuite avec vous jusqu’à ce que votre entreprise soit menée avec succès - puisque c’était votre desiderata… »
Le vampire sembla hésiter quelque peu. Sans doute sa confiance en moi avait-elle était ébranlée à la suite de mon petit jeu. Pourtant, mon regard se voulait dénué de toute malice. Ce n’était pas dans mes habitudes d’aider les pauvres bougres à obtenir ce qu’ils voulaient mais - dans le cas présent - je souhaitais simplement m’évader de cette emprise.
« Alors ? le pressai-je. Je peux comprendre que vous ne me fassiez pas confiance mais - ayez un peu de jugeote. En quoi la formulation que je vous propose pourrait-elle être détournée de son sens premier ? Il ne s’agit que d’un enchaînement de mots simples et explicites qui ne laisse nulle place à l’interprétation. »
J’ignorai si ce fût mon ton, mes mots ou sa propre intelligence qui l’avait convaincu, mais l’homme de la nuit céda à ma requête. Il s’éclaircit la gorge avant de formuler le souhait que je lui avais conseillé. Un sourire se dessina sur mon visage en réponse à sa demande : je n’allais plus tarder à être libre.
« Vos désirs sont des ordres, Mon Maître. »
Un claquement de doigt suffit à répondre à son Appel. Un tentacule de Magie Bleue s’élança vers lui et l’entoura d’une aura nouvelle. L’effort était pénible et épuisant. Je me sentais vidé de mon énergie et avait l’atroce sensation de flotter entre les Songes et la Réalité. Je voulais me reposer. Il me fallait récupérer des forces. Mais pour cela, je devais repartir dans mon habitacle - et il était hors de question de le laisser entre les mains de cet énergumène.
« Je ne sens rien de différent, indiqua-t-il d’une voix de reproche.
— Pourtant, lâchai-je avec difficulté, luttant contre l’étourderie, je vous assure que vous êtes meilleurs que vous ne l’étiez quelques secondes auparavant. »
Pas de beaucoup, certes. Je n’étais pas assez puissant pour que ma magie ait un impact conséquent sur la Réalité. J’étais bien plus doué dans les Songes - et je regrettai qu’il m’ait extirpé de mon milieu de prédilection. Il me faudrait améliorer mes cachettes pour éviter de me retrouver dans des situations similaires ; je haïssais cette condition d’esclave et je maudissais cette dague qui m’ôtait tout libre arbitre. Je me promis de devenir plus fort ; je ne voulais plus être acculée par ma destinée. Un jour, je serais parfaitement maître de mon destin, j’en étais profondément convaincu.
Les forces me manquaient. J’allais m’éteindre, me disperser, m’évaporer. Je n’avais d’autres choix que de me retirer de ce monde. Tant pis, il me faudrait lui faire confiance. Ma seule consolation était qu’il était peu probable qui croisât un autre individu, à cet endroit, sous le couvert de la nuit ; d’autant plus qu’il semblait vouloir tester ses nouvelles capacités. Après tout, sa langue n’avait lapé que quelques gouttelettes du sang dont il avait tellement envie.
« Je suis désolé mais je vais devoir me retirer quelques temps. Je… j’ai dépensé beaucoup trop d’énergie pour vous accorder ce don. Je reviendrais dès que je pourrais. » avais-je rapidement avoué avant de disparaître dans les tréfonds de ma demeure.J’ignorais combien de temps s’était écoulé avant qu’une sensation me sortît de mon sommeil. Ce n’était pas le tiraillement habituel, qui me rongeait les entrailles et m’imposait d’émerger de ma cachette. Non. C’était une impression plus subtile, presque une intuition ; une invitation à me rendre sur le plan matériel. Je n’étais pas entièrement reposé, mais je l’étais suffisamment pour faire une brève apparition auprès de mon maître. Je cédai à l’Appel, curieux de ce que j’allais y découvrir.
Le vampire était assis contre le tronc d’un arbre. Ses deux mains squelettiques tenaient fermement les oreilles d’une créature qui se débattait sous son emprise : un lapin. L’animal glapissait, conscient du triste sort qui l’attendait. L’enfant de Lubuska ne prit pas la peine de le tuer avant d’enfoncer ses deux canines acérées dans son petit corps touffu. Sa proie gigota de moins en moins et - lorsqu’elle fut vidée de son contenant - l’homme s’en débarrassa sans aucune considération pour elle. Je fronçai les sourcils devant ce spectacle dépourvu de compassion.
« Eh bien, j’imagine que ma part du marché a été remplie. » indiquai-je en détournant le regard de cette scène macabre.
Le prénommé Orion leva les yeux vers moi. Sa bouche était encore imprégnée du liquide poisseux qui constituait sa seule alimentation. Il se lècha les babines pour n’en perdre aucune goutte. Comme pour conforter mon affirmation, la dague d’or et d’émeraude, accrochée sa ceinture, se retrouva dans ma propre main. J’étais libre. Et je ne comptais pas traîner par ici trop longtemps - d’autant plus que la fatigue commençait à me rattraper.
« Eh bien, je vous laisse profiter de vos nouveaux dons - et de votre repas. »
Et, sans un regard en arrière, je m’enfonçai dans la forêt alentour, à la recherche d’un nouvel abri où me dissimuler.
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[Q] - Délicieuse nuit de sang et de magie | Léandra Y. Silvanyr
La cité des merveilles n’était plus que l’ombre d’elle-même. Je déambulais aux milieux des vestiges du palais royal que des millénaires de sommeil avaient érodé. La nature fabuleuse et sauvage avait repris ses droits sur la fantasmagorie des lieux. Une mousse vert pomme tapissait les fissures du marbre qui paraissait craquer sous mes pas. Je levai les yeux vers des statues oubliées que d’épaisses ronces épineuses protégeaient jalousement. Çà et là, les fragments d’un passé lointain évoquaient des scènes d’autrefois, comme tant de réminiscences d’un tragique destin. Je me laissai bercer par une douce mélodie à présent oubliée. Ma tête dodelinait au rythme de ce son cotonneux provenant d’un autre temps. Je ne reconnaissais pas ces paysages qui me paraissaient pourtant si familiers. Mes doigts fantomatiques effleurèrent avec douceur les créations brisées de ceux qui m’avaient précédé. Au milieu de bassins taris, les fastueuses fontaines ne crachaient plus qu’un amas de poussières invisibles. Je me perdis dans ce dédale de couleurs, de parfums et de matières que mon essence peinait à capter. La magie bleue s’efforçait de maintenir la constance de cet univers dévasté par l’abandon. Elle pleurait sa cruelle destinée et ses sanglots faisaient échos aux larmes qui ruisselaient sur mon visage spectral. Le chagrin des habitants de l’acropole - depuis longtemps décimés - resplendissait à nouveau, comme éveillé par ma présence. 
J’ignorais combien de temps s’était écoulé avant qu’une sensation me sortît de mon sommeil. Ce n’était pas le tiraillement habituel, qui me rongeait les entrailles et m’imposait d’émerger de ma cachette. Non. C’était une impression plus subtile, presque une intuition ; une invitation à me rendre sur le plan matériel. Je n’étais pas entièrement reposé, mais je l’étais suffisamment pour faire une brève apparition auprès de mon maître. Je cédai à l’Appel, curieux de ce que j’allais y découvrir. 