Partenaire : Solo
Intrigue : Lancinia étudie et admire la Cité de Qaixopia, elle se remémore son arrivée au sein du Royaume, où comment Mancinia a découvert une personne lui ressemblant trait pour trait au sein de sa demeure. Les deux Alternantes se découvrent, tandis qu'elle se cherche un semblant d'avenir.

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Les nuits sont devenues courtes et les crépuscules lents, surtout en l'absence du rouge teintant le ciel lors du coucher de Soleil, celui venant cogner les maisons du Désert. Dans les sous-sols de cette Cité secrète, cette chaleur astrale était l'une des grandes absentes de cette annonce. Lancinia se releva doucement de son siège. Perdue dans un flot d'ouvrages qui tapissaient cette bibliothèque, dont elle avait le luxe de disposer, elle se rendait vers la fenêtre, presque sur la pointe des pieds. Elle ne voulait pas montrer sa nuit blanche, le sommeil ayant eu du mal à gagner son corps. Elle étudiait, mais une pause s'imposait. Elle sourit. C'était si beau. La Cité s'étendait presque à sa vue. Mancinia, chez qui elle résidait, avait sans doute l'une des meilleures demeures de l'endroit. Si Utopia demeurait, officiellement aux oreilles des autres races, la Capitale des Humains, c'était bien cette ville fascinante et merveilleuse qui l'avait remplacée. Qaixopia. Son nom résonnait, telle une métropole mouvante et animée. C'était ainsi que devait la voir les étrangers, comme les Anges, voire même les Humains, habitués à la vie en surface. Ses souvenirs, partagés entre tout le territoire étaient ... C'était étrange. Elle était née ici, mais son esprit avait encore en mémoire l'ascension de l'Imprévisible ailleurs. Mancinia avait vécu à Utopia, elle y avait passé l'âge adulte et l'avait parfois quitté durant de longs mois. Comme elle, les ruelles n'avait aucun secret, les moindres venelles, les plus bas quartiers ... Le pâle soleil qui émergeait derrière les dunes, le Temple de la Justice qui se dressait majestueusement vers l'horizon.

C'était ... comme si elle y était. Sans y être. Cette sensation étrange ne la quittait pas. Seulement, c'était bien ici que l'avenir ce déterminait, tant l'endroit regorgeait de richesses, notamment sur le plan culturel, commercial, artistique et d'autres choses encore. Chaque jour, des négociants emplissent de marchandises diverses les quartiers commerçants. Les bâtiments modestes, la place forte et le Palais ne gâchaient en rien la beauté du paysage. Une ville qui par ailleurs était très bien protégée par son système de défense et les garnisons de la Garde, patrouillant sans relâche pour faire régner l'ordre. Qui plus est, les vendeurs savaient faire durer leur commerce malgré l'absence d'étrangers, notamment avec la mise en chantier des projets de son Alternante. Lancinia relâchait un soupir, presque envieux. Cette histoire de route continentale allait apporter un flot continuel de voyageurs vers Utopia, relançant probablement l'activité économique de la Cité. Avec l'avantage non négligeable d'une clientèle perpétuellement renouvelée, intéressée, bravant leur Ma'Ahid. Bien évidemment il est inutile de préciser que dans un tel environnement le brassage de produits des commerces étaient tout simplement exceptionnel. Il n'était guère étonnant que Mancinia lui eut proposé l'idée de prendre part à cet essor économique. Après tout, elle aussi, elle maîtrisait l'art du sertissage, mais à un degré bien inférieur à son Originale. Pourrait-elle rattraper ce qu'on lui avait enlever ?

Enlever ... Ce mot n'était pas correct. Elle n'avait rien eu. Seule Mancinia avait réussi, elle, elle n'était là que depuis quelques semaines. Lancinia observait, songeuse, ces personnes grouillant dans les rues devant le marché, lors d'une matinée qui semblait banale et sans attrait, pourtant, on aurait dit qu'une fête battait son plein. Tout était si coloré, si riche ... Toute cette activité, entre les cris des enfants, la gouailles des commerçants, la cacophonie des passants, mêlés à un tapis sonore de bruits provoqués par l'Haras dépeignaient un climat d'effervescence. Vraiment ... Les Humains ont développés une architecture originale et sobre par apport à la tradition dont elle a subi l'influence. Les peuples se sont inventés un monde d'une grande personnalité qui englobait toute les dimensions de la vie. Dans le style dominant, les monuments ont une certaine rudesse de la composition, qui est le souvenir d'une origine barbare, ce mélange de beauté et d'austérité un peu frustre rendait les monuments agréables à regarder. Elle se perdait dedans ... Que pourrait-elle accomplir dans cette Cité qui ne dormait jamais ? Elle a toujours aimée l'ancienne Capitale, avec ses grands remparts immaculés, ses rues débordantes d'activités, ses tours qui s'élevaient et transperçaient les cieux, une vitalité qui ne voulait pas s'éteindre. Jamais. Qaixopia en était l'exact reflet. Grande, belle, grouillante, vivante et, certainement, fière d'être une création nouvelle, à l'image de l'évolution des Humains.

Cette dernière occupait désormais une place particulière dans le coeur du Clone, qui n'oublie pas ces souvenirs révolus de son adolescente passé à rêver d'un avenir meilleur. Ce destin qui serait loin des armes et des batailles, à s'imaginer passer les portes d'une Académie réputée pour y enseigner, ou exposer ses travaux de recherches dans un domaine qui la touchait particulièrement. Au final ... Mancinia était devenue autre chose. Par nécessité, par urgence, mais cette voie lui convenait. Seulement, elle ne lui destinait en aucun cas le même sort. Elle laissait à celle qui avait le même visage qu'elle l'opportunité d'évoluer à sa manière, lui offrant quelques chances à saisir, sans l'y contraindre. Elle était ... Libre ? Peut-être, un peu, elle ne savait pas vraiment. Maintenant, elle s'imaginait passé les portes de la Cité sur une monture redoutable, portant sur elle les couleurs du Royaume, dans une armure qui mettrait en avant sa bravoure, son arme au clair pour célébrer la victoire. Sans doute cherchait-elle à se raccrocher à son Alternante, d'une certaine manière. Sans doute désirait-elle devenir aussi éblouissante, loin d'être seule et désoeuvrée, perdue dans les bas-fonds d'une ville. Pourtant, cela, l'Humaine connaissait. Elle ... Elle n'était rien. Mancinia essayait de lui donner de l'allure, de la remettre en condition. C'était dans leur contrat, après tout. Légèrement endormie, Lancinia se souvenait en fermant les yeux, cette rencontre qui allait changer sa vie. Leur vie.

Dans un mouvement, elle se retourne sur le côté. C'était son lit, elle en était consciente, mais cette chambre lui paraissait tellement étrangère que son esprit doutait. C'était brumeux, vaste, des bribes de souvenirs lui revenaient par vagues. Elle s'appelait Mancinia, mais ce nom ... ne semblait pas lui convenir. Elle fronçait les sourcils, vaseuse. Elle se retourne pour observer le plafond, ce devait être le milieu de l'après-midi. Le bruit de la porte qui s'ouvre avec délicatesse lui donnait l'impression que celle-ci était enfoncée, elle se redresse à moitié sur le lit, bien plus surprise que gênée de sa nudité. Ses longs cheveux bruns serpentaient sur sa peau blanche et lisse, dissimulant sa poitrine. Presque implorante, elle regardait Mancinia, qui maintenait sa main sur la poignée de la porte de sa chambre. Elles se dévisagèrent, l'une craintive et l'autre avec dureté. Elle n'eu pas le loisir d'esquisser le moindre geste que l'Humaine avait comblée la distance entre elles, la pointe de Jugement se trouvait sous sa gorge en un battement de coeur.

— Je te donne une minute pour me dire qui tu es.
— Je ... Je ne sais pas.

Sa voix était craintive, tremblante. Elle ne mentait pas. Visiblement, l'instinct de l'Humaine le lui disait. Suspicieuse, mais muette, elle abaissait la pointe de son arme vers le ventre de celle qui reposait dans son lit, une menace clair et silencieuse. Elle devait expliquer, mais que pouvait-elle dire ? Elle ne savait ... pas grand-chose. Elle ravalait difficilement sa salive, ses lèvres tremblaient, elle regardait son Originale, mais elle ne savait pas conserver le regard visuel, elle abaissait les yeux vers ses cuisses.

— Je suis ... toi. Je crois. Je ne sais pas vraiment.

Mancinia devait être relativement perplexe devant son annonce, mais sans doute n'avait-elle pas beaucoup de choix à sa disposition entre la croire et la tuer. Sa naissance remontait à moins d'une heure que sa vie aurait pu lui être arrachée assez rapidement. Sans bouger, respirant à peine, elle vit la lame rouge disparaître de sa vision, sans oser relever son regard, elle sentit ensuite quelque chose de doux lui atterrir sur le côté droit, elle osait relever son regard pour voir le bras tendu de la Matasif, tenant au bout de sa main une robe légère.

— Tiens, sourit-elle, avec une voix plus douce. Habille-toi.

Sans doute voulait-elle la mettre en garde, ce n'était pas une femme sans ressources, mais cela, elle le savait mieux que quiconque. Elle prit dans ses doigts la tenue dont la douceur semblait presque lui brûler la peau. Mancinia ressortit quelques instants, ordonnant à l'une de ses domestiques de préparer du thé et de quoi grignoter. Elle s'habillait rapidement, enfilant la tenue par-dessus pour ne pas contrarier l'Humaine. Elle se connaissait et mieux valait éviter de partir sur un mauvais pied. Elle s'était ensuite relevée, ses jambes avaient du mal à la porter et elle était retombée, assisse, sur le lit. Elle fronçait les sourcils, avec une moue contrariée, avant de réessayer et d'avancer à petits pas vers une des chaises, qu'elle glissait au sol avant de se laisser tomber. Son Alternante reposant un plateau sur la table, contenant des choses savoureuses. Elle prit conscience d'avoir une faim dévorante, mais la peur lui nouais l'estomac. Elle n'osait pas la regarder, ni même toucher à la boisson ou à la nourriture.

— Ainsi, reprit l'Humaine sur un ton de négociante. Tu serais un reflet de moi-même ?
— Je ... Oui. C'est cela. Je ne sais pas pourquoi ... Je me suis réveillée ici. Je sais ... Je sais que c'est ce que je suis. Je suis là pour t'aider. Je pense ... Que je serais ... Utile.

Elle n'en était absolument pas convaincue. Comment pouvaient-elles autant se ressembler et être aussi dissemblables ? Mancinia était renversante. Elle l'aurait écrasée sans le moindre souci, mais elle prenait tout de même de son temps pour l'écouter, pensive, son menton reposant contre la paume de sa main. Recluse dans la chambre de celle-ci, son double portait ses anciens vêtements. C'était saisissant, mais en même temps, extrêmement étrange.

— Qu'allons-nous faire ?
— Nous ? demanda Mancinia en arquant un sourcil.
— Je ...

Elle semblait déconcertée. La Matasif se demandait s'il elle réagissait ainsi autrefois, inutile de dire qu'elle en avait fait du chemin. Elle l'observait. Elle semblait sincère, seulement apeurée, affaiblie, comme un nourrisson. Les Aetheri devaient vraiment s'ennuyer ... A moins qu'ils n'essaient de l'aider dans sa réussite ? Autant prendre toutes les chances qu'on lui tendait, même si son interlocutrice n'avait pas fière allure avec ses cheveux en bataille, son visage amoindri, presque malade. Elle avait été surprise, elle avait eu peur de ce visage qui lui ressemblait tant, comme si on essayait de l'assassiner pour la remplacer ... Mais ce n'était pas le cas.

— C'est à toi de décider.

Celle-ci relevait, enfin, son visage dans sa direction.

— Je peux te permettre de saisir des opportunités, poursuit-elle. Je te donnerais une éducation, tu te spécialiseras dans ce que tu aimes, dans ce quoi tu es le plus douée. Je t'entretiendrais le temps que tu trouves ta voie et te donnerais de quoi réussir au sein du Royaume. Tout ce dont tu as besoin pour t'illustrer, parce que c'est ce que tu feras, tu es comme moi. Seulement ... S'il advienne que tu me trahisses, tu devines que je serais sans pitié, pas vrai ?

Cette dernière remarque bouleversait la jeune femme. Ses émotions étaient instables et des larmes coulèrent sur ses joues sans qu'elle ne les contrôlent, ses mains vinrent à la rencontre de ses yeux pour essayer d'essayer ce qui pouvait l'être. Elle ne voulait pas être dans une situation aussi fâcheuse, elle voulait une vie ... Elle ne savait pas quel genre de vie elle voulait, juste ... le vivre.

— Non ... Je ... Je veux aider ! Je travaillerais dur, c'est promis !
— Dans ce cas, nous te trouverons une ... identité plausible. Comme une cousine éloignée.

Celle-ci acquiesçait. Elle se reprenait doucement, une fois le choc passé. Mancinia sourit, se promettant d'en faire quelqu'un.

— Et quel sera mon nom ? ... Je doute de pouvoir encore porter celui de Mancinia.
— Cela ne me dérange pas que tu te nommes comme moi.
— On pourrait ... Changer un peu ? Ancya ? Eansinia ? ... Lancinia ?
— Lancinia ? l'interrompit-elle, songeuse. ... C'est parfait. J'aime beaucoup.

Souriante, celle-ci essayait ensuite de se redresser, titubant encore. Curieuse, la jeune femme se rapprochait de la fenêtre. Du bout des doigts, elle écarta les petites mèches brunes qui tombaient près de son nez, observant l'extérieur, animé.

— Je vais devoir rester ici ?
— Non.

Mancinia décroisa doucement les jambes, dévisageant avec sévérité sa désormais cousine.

— Je ne vais pas te restreindre à rester dans un seul endroit. Je me connais ... Je chercherais un moyen de m'échapper.

Les demoiselles, comme des soeurs, s'échangèrent un regard amusé. Si Mancinia n'était pas certaine de l'apprécier, Lancinia lui rendait une forme de respect. En un sens, elles collaboraient. Chacune y trouvait son compte et avait des avantages à tirer de l'autre.

— C'est ... gentil.

Lancinia revint s'asseoir, soufflée de son effort. Elle osait ensuite prendre un biscuit pour le grignoter, Mancinia lui servi du thé, car elle n'aurait pas été capable de le préparer.

— Je serais ... très attentive, Mancinia.
— Dans ce cas, c'est entendu, Lancinia. Tu seras ma doublure en cas de nécessité absolue, mais tu es libre de faire ce que tu veux de ta vie, en prétendant être une de mes proches, mais c'est à une unique condition ...

Elles se regardaient droit dans les yeux.

— Tu dois servir les Humains.

Lancinia la regardait, d'abord surprise de sa demande, avant d'acquiescer, résolue.

C'était son voeu, à elle aussi. Sans doute les Aetheri l'avait-il envoyer auprès de Mancinia pour l'y aider. Cette rencontre, dans un sens, avait été déterminante. Elle se sentait comme la Kaaezi, mais également ... totalement indépendante. Elles seraient comme des Jumelles ayant vécus la même vie, mais dont les chemins se seraient séparés, à un moment. Lancinia regardait encore cette vie depuis sa chambre à-titrée. Selon les occasions, elle disait être une amie ou une parente éloignée de la Kaaezi pour éviter les questions les plus dérangeantes. La chaleur était relativement ... elle ne saurait le dire. Contrairement à son Alternante, qui se prélassait avec habitude, celle-ci l'incommodait. Qu'est-ce qu'elle aurait voulu courir dans des plaines enneigées. Un jour, sûrement, elle irait vivre en montagne ! Dans un léger rire, elle tourna les talons, retournant dans le cocon réconfortant des livres qu'elle dévorait, avide de connaissances. Un Clone. Voilà ce qu'elle était. La pâle copie d'une autre. Pourtant, cette situation ne la dérangeait pas. Déjà dévouée, elle se sentait liée à Mancinia. Aux Humains. Lancinia serait sans doute une des pointes de leur avenir. C'était ce qu'elle voulait.

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