Une flamme s'était allumé chez l'Alfar. Oh, il la possédait déjà depuis longtemps, avivé régulièrement par Alaster de façon à ce qu'il ne la perde jamais, et réciproquement lui même faisait en sorte de garder intact la volonté de son frère. Mais depuis quelques temps elle s'était faite plus intense, plus vivace. Elle allait au-delà de ce que ses parents lui offrait actuellement. Ces dernières semaines il avait passé chacune de ses soirées à travailler plus en profondeur chaque sujet qui leur avait été donné en devoir, chaque chapitre qu'ils avaient étudiés la journée. L'année prochaine il entrerait dans sa dernière phase de formation et il comptait faire parti des meilleurs et avoir la possibilité d'aller dans l'une des prestigieuses Ecoles des Plateaux supérieurs. Son frère n'avait pas réussi à cet exercice. Il avait l'espoir d'obtenir la victoire sur ce terrain-ci. Il posa sa plume et poussa une profonde expiration. La luminosité avait déjà bien diminuée. Aussi allait-il chercher un briquet afin d'allumer un chandelier qu'il posa sur le bureau avant d'ouvrir la porte de sa chambre. L'obscurité de la nuit allait prendre sa place dans peu de temps, et en même temps la musique de la harpe l'accompagnerai. Il joua un instant avec la flamme de la bougie. Un instrument qui ne résonne que sous le voile de Cléophée... Ce ne pouvait être un être fondamentalement bon qui était à l'origine d'un tel objet. Ces derniers sont comme de fraîches tulipes, fragiles et ne pouvant s'épanouir que sous les rayons éclatants de Jeriel, savourant uniquement les douces notes revigorantes et enchantées joué par le barde. Il y avait encore du travail à fournir pour atteindre la perfection mais, par rapport à ses débuts, le jeu d'Èibhlin s'était amélioré cela ne faisait aucun doute. Égalait-il celui de Bellone ? Un sourire étira ses lèvres tandis qu'il goûtait chacun des accords rendus par les cordes pincées par la Sarethi dans la pièce adjacente, offrant une mélopée grave et mélancolique. Les Orines représentaient la beauté parfaite et Bellone avait de particulier qu'elle incarnait celle que le peuple des ronces tendaient à atteindre. Et elle était sienne. Il ferma les yeux quelques secondes, le temps d'écouter les premières notes avant de se replonger dans son étude.

L'année se terminait, clôturant sa dernière période d'étude. Un soulagement pour une partie des étudiants. Le début d'un affrontement pour la plupart d'entre eux, car c'était maintenant que les jeunes Alfars pourraient se donner corps et âme dans la préparation de le prochain examen de sélection. C'était une véritable guerre par procuration que chacun des Sarethi se menaient. Inconsciemment la volonté de leurs parents se répercutait sur la leur. La rivalité qu'ils entretenaient avec leur proche enflammait leur envie de se surpasser. Et cette dernière marche avant l'obtention de leur diplôme accentuait ce besoin insatiable de se montrer parmi l'élite de la nouvelle génération. Officiellement il n'avait ni devoirs à rendre, ni leçons à apprendre. Jämiel ne réchappait pas à cette constante. Aussi il avait passé les jours suivant à préparer les révisions pour l'examen à venir. Un emploi du temps minutieux, calculé au jour près, en partie en fonction de la faune et de la flore de la forêt. Mais pas seulement. Il s'était parfaitement souvenu de ces mots. La parole entraîne, l’exemple enseigne. Il comptait bien les mettre à exécution. Toutefois, il était évident qu'il n'était pas le seul à s'en être souvenu. C'est pour cela qu'il avait prit un temps considérable à son organisation au risque de paraître bien trop psycho-rigide aux yeux des autres. Mais ainsi il savait qu'il gagnerait également un temps considérable jusqu'aux sélections pour les entrées au Second Cycle.

La fin d'une année d'étude se situait à mi-Llodien. Il savait que ce n'était pas une période propice aux excursions. Néanmoins, c'était le meilleur moment pour observer le comportement des créatures de la forêt. Il n'était pas fou. Il était bien hors de question qu'il mette un pied dehors. Il s'était seulement contenté d'interroger quelques comportementalistes et biologistes zoologue. L'expérience est bien plus instructive que la théorie. Il avait réalisé la même opération sur de nombreuses discipline. Astronomie. Linguistique. Ethnologie. Histoire contemporaine. Et bien d'autres encore. Il avait profité de la présence d'Owen et de Bellone pour les interroger sur leur peuple respectif. Èibhlin n'avait pas échappé à cet interrogatoire. Le sang du peuple des ronces avait beau couler dans ses veines, s'était les souvenirs de l'Elfe qu'elle possédait. Il exploitait tout ce qu'il pouvait, tout ce qu'il jugeait utile. Tout, était utile.

Vethres. Il pouvait difficilement cacher qu'il était épuisé. Sa plume était usé par les nombreuses notes qu'il avait accumulé durant la saison précédente et une masse de parchemin qu'il avait fait relier en un livret trônait à ses côté. La tête posé sur le bureau, il l'observait d'un œil fixe. L'observait-il réellement ? Il conclut finalement qu'il devait réellement s'accorder une pause ou tout ses efforts ne lui aurait strictement servi à rien. Il se leva de sa chaise et alla se poser lourdement sur son lit. Il ne lui fallu pas plus de trente secondes pour sombrer dans les ténèbres du sommeil. En avait-il finalement trop fait ? Non, il n'y avait jamais trop. Il se serait voulu de ne pas en avoir fait assez justement et d'aujourd'hui avoir suffisamment de forme pour lever encore la tête. Son souffle était régulier. Il ne nageait pas dans des rêves agités. Il était confiant. Fatigué, mais confiant. Bientôt aurait lieu l'examen. Il sentait au fond de lui qu'il avait toute ses chances. Plus que ça. Qu'il pourrait aller plus loin que les établissements de Mornhîngardh. Un sourire se dessina sur ses lèvres en même temps qu'il rouvrait les yeux. Phoebe éclairait la nuit, d'un faible éclat sous sa forme de faucheuse. A côté, la harpe d'Èibhlin résonnait comme un écho à sa présence.

Le Sarethi était parti tôt ce matin-là afin d'arriver dans les premiers. Il n'était pas le seul à avoir eu cette idée là, chacun se regardant d'un regard méfiant si ce n'était méprisant pour certains. Mais tous s'oublièrent dès lors que l'examen débuta. N'existait plus que celui-ci et le besoin terrifiant de le réussir et de finir major de la sélection car ce dernier avait sa place à coup sûr à Belurith ou Calundra. Aussi, Jämiel accordait une attention particulière aux instructions afin de ne pas aller à l'encontre du sujet ou de manquer une information lui accordant un point en moins. Le point qui le recalerait possiblement d'une place de trop. Il était confiant. Du moins, avant de commencer cet examen. A présent, la pression lui pesait sur les épaules et il n'était plus sûr de rien. Ils étaient nombreux. Combien avaient travaillé ardemment pour obtenir une place sur les Plateaux supérieurs ? Non, la question était mauvaise. Combien avaient travaillé plus ardemment que lui ? Un instant il s'arrêta et ferma les yeux. Ce n'était pas bon. Il s'élançait sur un mauvais chemin et courrait droit à la catastrophe. Il prit alors une profonde inspiration et chercha à oublier les autres. C'était la meilleure chose à faire. Il se concentra sur un son, un sentiment. Il chercha au fond de lui et trouva. Alors un sourire satisfait se dessina sur son visage.

A présent c'était l'impatience qui le rongeait. L'impatience de connaître les résultats. Il ne pouvait nier avoir une pointe d'inquiétude qui s'était niché au fil des jours au fond de sa poitrine. Ce vent de panique qui l'avait envahit durant l'épreuve lui avait fait perdre du temps. Du temps qui lui avait sûrement coûté cher. Il espérait sincèrement avoir su se rattraper. Néanmoins il était réaliste. Il savait qu'il devait faire une croix sur le Haut Plateau et au fond ça le faisait rager. Il s'était installé sur un banc à l'extérieur, à proximité de Tawaradan. Les coudes sur les genoux, les mains croisés devant son visage, son front reposant sur ses dernières, il attendait l'heure fatidique des révélations. Comme nombre de Sarethi comme lui. Le monde Alfar avait cela de cruel car il était évident que certains feraient jouer de leurs relations pour être sélectionné, prenant ainsi la place d'autres peut-être plus méritant. C'était également ce qui effrayait Jämiel. Chaque place potentiellement volée faisait reculer les autres dans le classement. Il était dans le flou le plus total, incertain du sien. Peut-être aurait-il pu demander à un membre de sa famille plus élevé dans la hiérarchie de l'aider lui aussi ? Il fronça des sourcils. Peut-être pas. S'il n'était même pas capable de rejoindre le Second Cycle de lui-même, pouvait-il seulement imaginer un jour quitter Mornhîngardh ?

L'heure était venue. Un courrier l'attendait sur la table du salon. Sa mère l'observait fixement. Il n'aurait su dire quel sentiment animait son regard cependant. Son frère se tenait dans l’entrebâillement de la porte, attendant le verdict d'un air désintéressé. C'était faux. Jämiel se saisit de la missive et, d'un geste vif, l'ouvrit avec un coupe-papier. Alors qu'il commençait à retirer la lettre, il marqua un temps. Le doute l'assaillait. Mais sous les regards insistants des Arcesi, il finit son geste et déplia le papier qu'il commença à lire silencieusement. Un soupir de soulagement lui échappa finalement. « Tu as été prit. C'est bien. ». Il sourit d'abord. Oui, c'était bien. Pourtant son visage se terni rapidement. Il avait été prit, en effet. Mais ses efforts n'avait en rien payé. Il entrerai à Isil-Gadien et continuerai tranquillement ses études, parfait. Mais ce serai donc sur le Premier Plateau, pas comme il l'avait espéré. Pas comme il l'avait désiré.