Catégorie de quête : XI.Mission temporaire
Partenaire : Mancinia
Intrigue/Objectif : Juste après l'attaque ayant eut lieu au campement, Miha est amené à l'infirmerie qui a été montée à la va-vite. Après être soignée, elle propose ses services pour aider à traiter les autres blessés et suivra les ordres de Mancinia.

"A trois, on le soulève, d'accord ?" Miha acquiesça. "Un, deux, trois !" Le duo tira fort sur la carcasse du monstre qui gisait sur le sol. Celui-ci avait été décapité par une arme, déversant du sang de partout dans le sable. Lentement mais surement, ils portèrent la dépouille de l'animal jusqu'au groupe qui avait été désigné pour retirer la peau des bestioles et récupérer la chaire qui semblait comestible. "On vous le dépose là ?" demanda l'homme aux travailleurs. L'un des concerné acquiesça et les humains lâchèrent leur prise. Miha soupira tout en secouant ses bras endoloris. Ce monstre là avait beau être l'un des petits gabarits qui avaient attaqué leur campement, il n'en restait pas moins bien trop lourd pour les petits muscles de la brune. "Tu veux te reposer ?" "Non." grogna-t-elle. Elle était agacée que son camarade lui pose la question sans cesse. Il avait consentit à ce qu'elle l'accompagne mais ne cessait de la regarder d'un air inquiet, comme s'il craignait qu'elle s'effondre d'une seconde à l'autre. "Ca va, ne t'en fais pas." "Ta blessure n'arrête pas de saigner et je te jure que tu es plus pâle que tout à l'heure. Tu devrais prendre un moment pour te reposer et faire soigner tout ça." conseilla le blonde. Miha soupira tout en portant la main à sa plaie. Dès que ses doigts touchèrent sa peau, une douleur vive la fit grimacer et elle vacilla. "Si tu laisses traîner ça sans qu'on la traite, ça va s'infecter et tu vas juste finir par crever." Les mots dures arrachèrent un regard noir à la demoiselle, qui fusilla son compagnon des yeux. "Ne me regarde pas comme ça." Miha fit claquer sa langue puis se remit en marche, passant devant l'homme sans le regarder. Elle était contrariée, parce qu'elle savait qu'il avait raison. Elle ferait mieux d'aller faire soigner tout cela. Sa chute n'avait pas été délicate et ses blessures étaient peut-être plus grave que ce qu'il ne paraissait. Mais elle détestait tellement l'idée d'être inutile... Jeffrah le rejoignit alors qu'elle l'attendait pour déplacer une autre bête. A nouveau, il commença le décompte. Au trois, Miha essaya de se relever mais fut bloquée par le poids de la charge. L'effort lui fit tourner la tête et elle sentit la nausée la barbouiller, ce qui n'échappa pas à son sauveur. "Bon, ça suffit maintenant. Je t’amène voir un guérisseur. Si tu protestes, je t'y traîne de force." Miha fit mine de protester et le blond esquissa un mouvement pour la porter. "Non d'accord ça va ! J'y vais !"

La brune traversa la plage jusqu'aux tentes qui avaient été aménagées pour soigner ceux qui avaient été blessées. C'était un campement de fortune mais c'était tout ce qu'ils pouvaient se permettre de faire, dans l'urgence. Une humaine s'arrêta pour observer la brune. "Vous allez bien ?" "Oui, je me suis simplement cogné la tête en tombant durant l'attaque." indiqua-t-elle. "Je viens ici par simple précaution." "Et je crois qu'elle a failli faire un malaise il y a quelques secondes." rajouta le blond. "Non, c'était un simple tournis. Une petite jute de tension, rien de grave." "D'accord." L'infirmière pris la brune par les épaules et la conduisit jusqu'à un tronc d'arbre couché. Elle lui donna un linge propre et l’appliqua sur sa blessure. "Tenez ça en place, s'il vous plait. Quelqu'un viendra s'occuper de vous dans quelques instant." Miha hocha la tête puis patienta, jusqu'à ce que quelqu'un vienne la prendre en charge. "Vraiment, ce n'est pas grand chose. Je suis juste sous le choc de ce qui vient de se passer. Je ne me suis pas encore remise de mes émotions, c'est tout." La brune cessa d'appliquer la pression sur sa plaie pour se laisser ausculter. "Il y a sans doute des patients plus urgents dont vous devriez vous occuper. Certains ont été beaucoup moins chanceux que moi." Son regard traîna au loin sur les dépouilles que l'on essayait de mettre à part, en attendant de décider quoi faire. L'humaine soupira. "Si vous voulez, je peux vous aider. Je suis en train d'être formée pour devenir sage-femme. Ce n'est pas exactement ce dont on a besoin, là tout de suite, mais j'ai quelques bases... Si vous me dites quoi faire, je peux vous aider avec les blessés."

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Mancinia était encore dressée sur une des carcasses, voyant si son poids faisait réagir la créature. Il n'y eu aucun mouvement de résistance, elle ne respirait plus. Cet assaillant était bien mort, évitant de prendre par surprise ceux qui aidaient à déblayer les alentours. La viande semblait consommable, ce qui leur ferait une très bonne réserve de nourriture pour quelques temps. La conservation de cette denrée semblait ardue, mais il y avait du sel en abondance non loin et on pouvait sûrement en tirer quelque chose. La peau semblait résistante et on pouvait certainement leur arracher les dents, recycler leurs griffes et leurs os pour les revendre plus tard ou mieux, les convertir en quelque chose d'utile. Un inventaire serait vite dressé pour regarder où allait au mieux leur utilité. La guerrière relâchait un immense soupir. Il y avait tellement à faire et elle, eh bien, elle n'avait pas tant de patience que cela, surtout après un tel assaut qui avait électrisé son adrénaline. L'Humaine aimait l'ordre et que tout se passe sans accros et, même si l'imprévisible faisait autant partie de sa vie que de son esprit, elle aurait préféré quelque chose de moins sanglant.

— Il faut que nous réfléchissions à la création d'une large muraille, reprit-elle. Ces choses, quel que soit leur nom véritable, risque bien de revenir nous voir.
— Nous allons avoir du mal...
— Il faut délimiter un terrain suffisant et commencer ces travaux sans plus attendre.
— Matasif, nous...
— Je sais. Nous sommes tous épuisés de la traversée et de ces premières heures dans cet endroit que nous ne connaissons pas, nous avons perdus des frères et des soeurs dont nous devons préparer le dernier départ et nous avons ce travail supplémentaire, en plus du déblaiement, mais si nous voulons rester en vie, il faut que nous y réfléchissons au plus vite, que nous agissions vite.

Mancinia vacillait presque. L'homme fit un mouvement comme pour la retenir, mais elle demeurait sur ses deux jambes. Sans doute un coup de fatigue. Son adrénaline redescendait maintenant que la vérification était terminée. Zekrach était honteux de se plaindre, baissant les yeux, alors qu'elle avait autant subi qu'eux la traversée, l'abattage des troncs d'arbre pendant plusieurs heures et combattu bravement ces créatures, en abattant quelques-unes. La Matasif Leenhardt en portait encore les traces. Mieux encore : elle ne se reposait pas et essayait d'écarter le danger tout en réfléchissant à l'avenir. Quelle femme exemplaire.

— Allez-vous reposer. Nous nous occupons du reste.
— Non. Je vais aller voir où mes compétences seront utiles. Essaie de voir si des volontaires seraient prêts à faire une inspection dans la forêt pour s'assurer que ces derniers ne reviennent pas terminer ce qu'ils ont commencé, on partira dans trois heures.

Celui qui était venu la dévisageait, car elle n'avait pas encore prit le temps d'enlever le sang sur son visage et ses cheveux. Il y avait plus urgent que sa propreté dans l'immédiat.

— Je vais faire ça immédiatement.

Zekrach disparu prestement pour accomplir son devoir, tandis qu'elle faisait de même en se rendant dans une tente de soins improvisée en urgence. Mancinia pénétrait à l'intérieur, voyant des guérisseurs réfléchir à ce qu'il convenait de faire.

— Je suis venue vous aider. Vous avez des patients que je pourrais voir ?

Elle disait cela en retroussant ses manches avant de plonger ses mains dans l'eau glaciale, puisée dans l'océan et de veiller à la propreté de ses bras, essayant de passer outre l'effet de la morsure du sel sur ses écorchures. Un de hommes semblait réfléchir, perdu devant son lavement au visage et au bras pour se rendre un air humain.

— ...Une patiente avec un coup sur le crâne, peut-être une blessure. Je présume qu'une guerrière peut soigner un petit bobo.
— Je peux embrocher des Démons et mettre des bébés au monde, c'est certain.
— ...Pardon.

Décidément, sa réputation la suivait. Ça la déroutait toujours. Mancinia fût conduite à ses côtés. Elle avait eu quelques notions de médecine basiques, pas de quoi faire de grandes opérations, mais si elle voyait une situation désespérée, sans doute userait-elle du Don de Sympan. Hors de question de laisser mourir quelqu'un. La jeune femme baissait les yeux en massant sa main. Il faudrait qu'elle essaie sur un mort. Il fallait qu'elle sache si ce qu'avait dit Zandalor était vrai. La Matasif saluait la blessée respectueusement, avant d'inspecter sa plaie ouverte malgré ses protestations.

— Il ne faut pas laisser une telle blessure sans soins. C'est bien de penser aux patients urgents et de vouloir aider, mais il aurait suffi de faire pression et de ne pas exagérer, parce que vous auriez bien pu devenir une urgence et un poids mort.

Malgré la dureté de ses paroles, sa voix était douce. Elle sourit.

— Je vais nettoyer la plaie, vous recoudre et faire un bandage.

C'était plus rassurant d'annoncer ce qui serait fait, pour que la personne ne soit ni surprise, ni apeuré.

— Sage-femme ? J'ai eu l'opportunité de mettre un enfant au monde il y a quelques temps. Je n'ai jamais connu d'événement aussi stressant que d'assister une femme en couches. Je crois que cela m'a donné l'envie d'en apprendre plus en médecine. C'est d'une utilité non-négligeable pour une guerrière.

Si son premier amour était la Joaillerie et qu'elle aurait aimée ne faire que ça de son existence, elle avait aussi d'autres ambitions, d'autres devoirs.

— La médecin en moi vous dit qu'on vous soigne d'abord et qu'on avisera ensuite. Si vous vous videz de votre sang, ça ne va pas nous aider. Ça va vous faire un peu mal. Je vais essayer d'aller vite.

Mancinia saisi une aiguille qu'elle l'avait dans une eau propre, ainsi qu'un fil résistant. Elle n'était pas douée pour la couture sur vêtements, mais sur la chair, elle avait pratiquée plusieurs fois.

— Je m'appelle Mancinia et vous ?

Mancinia parlait pour lui changer les idées. Elle la laisserait la frapper après si besoin est.

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« Ça, c'est sûr. » répondit Miha en observant la guerrière en face d'elle. Il y avait dans son regard un mélange d'étonnement et d'admiration tandis qu'elle suivait des yeux celle dont elle avait tant entendu parlé. Malgré le long sommeil dans lequel elle avait été plongée, Mancinia Leenhart était une légende pour le peuple Humain. La plus jeune avait entendu parlé de ses exploits, contés par ses parents, bien que tout cela remonta à plusieurs décennies en arrière. Il y avait quelque chose de surréaliste de se retrouver en face d'une telle femme. De pouvoir lui parler, en chair et en os.  « Des connaissances en soin, lorsque l'on est sur le champ de bataille, ça ne peut être qu'un avantage. » Un sourire nerveux contracta ses joues tandis qu'elle écoutait les indications de sa soignante. Intimidée, elle se contenta de hocher la tête lorsqu'elle l'informa que la priorité était de refermer cette plaie. « Bien Madame. » dit-elle dans un murmure à peine audible. Nerveuse, elle se mordit les lèvres pendant que la blonde s'emparait de son matériel chirurgical. Elle inspira grandement avant de se laisser recoudre.

« Je m'appelle Miha. » répondit-elle en grimaçant. Sa voix était tendue. Tout autant que le reste de son corps. L'Humaine s'était crispée en sentant l'aiguille s'enfoncer dans la chair. Elle devait faire preuve de toute sa volonté pour ne pas céder et ne pas crier. D'autres patients étaient dans des états beaucoup plus critiques qu'elle, et on ne les entendait pas crier à l'agonie. Du moins, on ne les entendait plus. Déglutissant avec difficulté, elle fit un effort pour continuer à parler. Elle avait comprit sans trop de difficulté que cette conversation était avant tout pour lui faire oublier la douleur, ne serait-ce qu'un petit instant. « J'ai... J'ai entendu parlé de l'accouchement auquel vous avez participé. » dit-elle d'une voix toujours enrouée. En réalité, tout le corps médical des royaumes Humains en avaient sans doute entendu parlé. Dans son domaine tout particulièrement. Ca avait fait beaucoup de bruit. « C'était un cas... presque désespéré. Le médecin n'y croyait pas lui-même. Et pourtant... Vous, vous n'avez pas hésité. Vous avez aidé cette femme à donner naissance à son enfant... » Miha laissa un silence penseur dans son monologue avant de reprendre le fil de sa pensée à haute voix. « Une combattante, une survivante, et maintenant une sauveuse... Vous possédé bien des facettes, Matasif. On ne vous surnomme pas l'Imprévisible pour rien. » La brune laissa un petit rire lui échapper, aussitôt remplacer par un sifflement douloureux. Elle enfonça les doigts dans l'écorce de l'arbre. Timidement, elle rouvrit les yeux qu'elle avait fermé par réflexe sous les gestes de sa guérisseuse. La Muasis Alaitihad ne put s'empêcher de dévisager sa supérieure avec adoration. Elle se sentait ridiculement insignifiante face à cette femme dont la renommée avait traversé les âges et les royaumes. Cette femme avant tant accompli pour leur peuple, là où elle-même n'était qu'une anonyme n'ayant jamais rien fait de ses dix doigts. Et puis, elle était tellement belle... Difficile de croire que Mancinia avait passé dix année dans un coma : elle n'en gardait aucune trace. Il était même impossible d'imaginer qu'elle soit née dans l'ère précédente. Miha lui aurait à peine donné quelques années de plus qu'elle-même.

« Et... Comment avez-vous trouvé cela ? » demanda la demoiselle d'un air timide, quoique rongée par la curiosité. « D'aider une femme à donner naissance, je veux dire. » Elle inspirait profondément entre chaque phrase pour essayer d'atténuer la douleur. « C'était stressant mais... Un peu exaltant aussi, n'est ce pas ? » dit-elle, sur le ton des confidences. « Est ce que vous aussi vous avez ressentit ce frisson lorsque vous avez entendu les premiers pleurs de ce nourrisson qui se tenait dans vs bras ? » voulut-elle savoir. « C'est... Le plus merveilleux des moments. Assister aux premiers instants d'une vie, c'est le plus beau des spectacles, vous ne pensez pas ? » Son visage s'était légèrement adouci tandis qu'elle repensait aux naissances auxquelles elle avait assisté par le passé. « Moi, en tout cas, je ne connait rien de plus époustouflant. » confia-t-elle. « Enfin, vous avez certainement dû connaitre des choses beaucoup plus... extraordinaire. » se reprit-elle.

La suture terminée, Miha se remit sur ses pieds et fit face à la Matasif. « J'aimerais pouvoir vous accompagner, Madame. Je suis certaine que je pourrai me montrer utile. » insista-t-elle de peur de se voir refuser le privilège.

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Nettoyer la plaie. Recoudre. Faire un bandage. Ça pouvait encore aller, c'était dans les compétences de n'importe quel guerrier du coin. Encore que les aléas des champs de bataille ne laissaient pas l'opportunité de correctement prendre soin des instruments. En y repensant, ce serait peut-être bien de ... trouver une alternative intéressante à cela. Ses gestes étaient également plus maîtrisés, question d'habitude et surtout, plus propres. Elle se souvenait des recommandations à ce propos. Un petit microbe, une plaie infectée et de potentielles séquelles. Voire la Mort. Autant dire que ça lui collait le bourdon et qu'elle préférait éviter que les cadavres ne s'accumulent. Mancinia essayait de rester concentrer et d'aller aussi vite que lui permettait ses talents de couturière. Elle n'avait pas de produits pour anesthésier la plaie à disposition et sa patiente, qui se prénommait Miha, ne pouvait que serrer les dents en lui racontant son exploit accompli sur Simin plusieurs semaines auparavant. Pourquoi aurait-elle hésité à sauver cette femme ? Sans doute aurait-elle abandonnée en temps normal. La médecine n'était pas la main des Aetheri, mais dans ce cas particulier ... Elle avait trichée. On la prenait pour une savante incroyable malgré ses faibles connaissances et après s'être avérée être sans aucun diplôme dans le domaine. Un génie. On la regardait faire. Évidemment, pour ne pas paraître totalement ignare, l'Humaine s'instruisait à l'aide d'ouvrages. Et sa chance était grande. En tant que Marquise, elle avait accès à une large bibliothèque.

Ce n'était pas le cas de tout son peuple. Peut-être devrait-elle introduire tout cela en territoire Humain ? C'était une idée. Alors ... Était-elle réellement une sauveuse extraordinaire ? Elle aimerait s'en convaincre. Un besoin d'association, la recherche d'utilité, la nécessité d'aider ... et le besoin d'aventures. Croire que sa race avait besoin d'elle et se rendre utile étaient le seul moyen pour la guerrière de ne pas dépérir. Un véritable besoin d'être rassurée plus que pour obtenir des titres et de l'argent. C'était pitoyable, non ? L'Imprévisible. C'était un surnom tout choisi. Merci, Shapûr. Maintenant, ils étaient quelques-uns à lui en attribuer un autre, plus prestigieux. Trop arrogant à ses oreilles. Elle préférait encore celui de Fille du Soleil, conséquence de sa marque, en hommage à ses mains qui sauvaient des vies. Ou les prenaient. Comment avait-elle trouvé ça ? Comment trouvait-on les accouchements, en général, de toute façon ? A part une dose de stress et de douleurs affreuses...

— Ça m'a saoulé, admit-elle sans ambages. Longtemps, on a conseillé aux Humaines d'accoucher allongées plutôt que debout, mais les médecins ne voulaient rien savoir. Avant mon ... sommeil, cela se pratiquait encore. J'ai moins de connaissances que des femmes dont c'est le métier, mais ... Il faut aussi écouter les techniques étrangères qui ont faits leurs preuves pour améliorer notre cadre de vie. C'est grâce à ses expériences et à l'écoute accordée à ces médecins venus d'ailleurs que j'ai pu sauver ma patiente.

Elle eut un sourire.

— J'étais en panique totale durant l'accouchement. Je me suis rendue compte que si nous restions là à attendre un effort de l'enfant ou d'elle, qui était à bout de force, on allait les perdre tous les deux. J'ai fait quelque chose d'extrêmement dangereux. Je ne dirais même pas qu'il faut suivre cet exemple radical, mais qui s'est fort heureusement bien déroulé dans ce cas-ci. Nous pouvons remercier Edel de sa bienveillance.

Et surtout Sympan, celui qui lui avait fait donc, volontairement ou non, d'une partie de sa magie divine. S'il avait été contre, il lui aurait repris après tout.

— Je n'ai pas vraiment tenu ce bébé. Je ne sais même pas son nom. Ça m'avait totalement vidé de mes forces. Pourtant, j'ai aidé à en mettre au monde, des bébés ! Mais celui-là, pfiou, ce n'était pas évident.

Mancinia se souvenait de l'avoir soignée, refermant sa plaie béante sur le ventre. Elle n'avait donc pas rédigé un rapport où elle mentionnait cette ouverture barbare de la poche ventrale.

— C'était grave flippant. J'espère que si j'ai des enfants un jour, ce sera moins...Comme ça.

Mais au moins, elle y était mentalement préparée.

— Mais après ... J'ai vu surtout plus pire que ça.

La Guerre des Dieux l'avait immunisée au sang. Et bien avant cela, dans cette cave esclavagiste, avec Raphaël. Où était son ami maintenant ? Les Lyrienns étaient enlisés dans un conflit interne, de ce qu'elle savait. Tant qu'il se portait bien...

— Je préfère ceci dit le sang de la vie au sang de la mort.

Mancinia coupa le fil et mit un bandage par-dessus pour éviter qu'un microbe ambiant de s'infiltre dans la plaie.

— C'est terminé. Vous avez été courageuse !

Miha semblait lui être reconnaissante de son implication. Cela se voyait. Elle lui demandait ensuite si elle pouvait l'accompagner.

— M'accompagner dans ma tournée des malades ? dit-elle. Évidemment que vous pouvez, maintenant. Mais ensuite, on ira se reposer, parce que je vous avoue que je suis épuisée.

C'était faux. Elle avait prévu de faire un tour de garde avec d'autres personnes. Elle se reposerait plus tard. C'est qu'il y avait pas mal de petites plaies à soigner dans les environs, ce qui laisserait aux médecins le loisir de travailler sur les cas les plus graves.

— Bon, bon. Voyons voir ça de plus près...

Post II | 875 mots

« Oui, c'est normal d'être épuisée, après ce que nous venons tous de vivre... » accorda la brune en suivant de près la Matasif, une lueur d'adoration brillant toujours au fond de son regard. Pourtant, à l'évocation des événements de la veille, ses yeux s'assombrirent quelque peu. « Vous disiez préférer le sang de la vie à celui de la mort... Je crains qu'hier, il n'y ait eut plus de vies volées avec ce sang que de vies épargnées. » Sa gorge se noua à la pensée des corps qui avaient donné à la mer d'une teinte carmine. Son regard se perdit en direction de la forêt, là où avaient surgit les monstres qui les avaient ravagés. Depuis l'attaque, l'Humaine ne pouvait s'empêcher d'y jeter des coups d’œils inquiets, comme si elle s'attendait à ce qu'une nouvelle horde de créatures revienne à l'assaut. « Je pensais être habituée au sang mais... Je n'étais de toute évidence pas préparée à tout ça. Il me reste beaucoup de chemin à faire avant de devenir capable d'y faire face sans en être effrayée ou au moins ne pas paniquer. » avoua-t-elle. Miha serra les poings et releva la tête en direction de la haute gradée. « C'est donc une raison supplémentaire pour vous épauler, n'est ce pas ? Si je suis là pour vous donner un coup de main, vous terminerez plus rapidement et vous pourrez retourner vous reposer plus vite. » Se sentant l'âme d'une sainte, Miha esquissa un sourire et commença à remonter ses manches jusqu'à ses coudes tout en se postant devant le premier patient de Mancinia. Elle l'observa quelques secondes avant de réaliser qu'elle était, elle aussi, supposée porter secours aux blessés légers. « Oh, dans ce cas je... Je ferais mieux d'aller voir le patient suivant, je crois... » laissa-t-elle échapper d'une petite voix.

« Bonjour, je m'appelle Miha. » déclara-t-elle face un homme qui grimaçait en se tenant le bras. Sentant le regard brûlant de son patient, la soigneuse se mordit la lèvre inférieure en observant sommairement les blessures de l'Humain. Il avait quelques égratignures mais rien qui ne nécessita sa présence ici. « Vous... vous n'avez pas de plaie... ? » Son affirmation avait presque prit une intonation interrogative. Elle s'était attendue à devoir suturer quelques bobos mais être face à un patient qui, justement, n'avait pas besoin de tels soins la laissa pantoise. Même si elle n'avait jamais eut à recoudre quelqu'un d'autre que son mannequin d'apprentissage ou des cadavres, elle se sentait à la hauteur et pensais être apte à aider ici... Mais si elle devait faire quelque chose de plus poussé... Elle se sentit soudain fébrile. « Je suis là... Pour mon épaule. » grogna l'homme. Dès que les yeux de la guérisseuse se posèrent dessus, son sang quitta sa tête. L'épaule avait un angle anormalement bas. « Votre épaule est démise. » déclara Miha d'une voix sourde. « Et vous allez faire quoi, pour arranger ça ? » Miha fronça les sourcils une seconde. Elle devait faire quelque chose, et vite, si elle ne voulait pas avoir l'air ridicule aux yeux de la Matasif. « Bien, d'abord... » murmura la sage-femme. Retrouvant peu à peu contenance, la brune s'empara du bras désaxé sans le bouger. Avec soulagement, elle constata que les doigts n'avaient pas de coloration bleutée et que les extrémités étaient encore chaudes. « Bien... Très bien. Les vaisseaux sanguins n'ont pas été touchés. » dit-elle à voix-basse pour elle-même, se remémorant les cours qu'elle avait suivi à Qaixopia avant de se spécialiser. C'était un signe encourageant. La fille à la peau basanée ferma les yeux pour se souvenir du reste de la procédure. « Bien... Dans ce cas, allongez-vous sur le dos, s'il vous plait. » demanda-t-elle. Une fois fait, la jeune femme s'empara d'une branche qu'elle enroula dans un pan de tissu propre. « Bien, je vais remettre votre épaule en place. Mais ça va être douloureux... Vraiment très douloureux. » « Encore plus que maintenant ? » Miha acquiesça sous le regard inquiet du blessé. Il semblait se demander s'il serait capable de supporter la douleur. « Vous auriez quelque chose pour me soulager, avant de commencer ? » Avec une mine désolée, la femme tendit le bout de bois. « Mordez la-dedans. » dit-elle. Avec des gestes précautionneux pour éviter de faire souffrir son patient plus que nécessaire, la jeune femme plaça son bras à un angle de quatre-vingt-dix degrés de son corps. Lui tenant fermement la main, la soigneuse inspira profondément. « C'est parti. » dit-elle en commençant à tirer lentement mais de façon ferme sur le bras de l'homme, qui se mit à crier malgré son bâillon. Finalement, le hurlement cessa, remplacé par un soupir soulagé. « Ca... Ca va mieux ? » demanda Miha, ayant du mal à croire elle-même qu'elle avait réussi. Le patient acquiesça. Avant de le laisser repartir, la brune lui mit le bras en écharpe et l'obligea à ne pas forcer sur son bras blessé.

Enhardi par sa réussite, l'Humaine passa au patient suivant. Son sourire s'évapora dès qu'elle le vit. L'homme avait prit un teint livide. Sa respiration soulevait son thorax mais se faisait de plus en plus faible. Sentant son pouls s’accélérer, Miha s'approcha doucement de l'homme, le secouant doucement par le bras pour le réveiller. « M-Monsieur ? Vous allez-bien ? » Aucune réaction. Le cœur battant la chamade, la jeune femme souleva le maillot du malade. La plaie avait été recousue à la va-vite et recouverte d'un tissu sale. Une fois encore, Miha sentit son sang gagner ses pieds plutôt que d'affluer à sa tête. « M-Mancinia... ? Je... J'ai besoin d'aide ici. »

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Les épaules démises.

Mancinia prenait la situation en main. Elle allait tout arranger, c'était certain : cette femme était prodigieuse, on lui prêtait milles et uns exploits ainsi que quelques miracles. Si quelqu'un était capable de résoudre ce souci épineux, c'était bien elle et personne d’autre, n'est-ce pas ? Peu importait qu'elle ne soit pas encore reconnue comme médecin et qu'elle soit davantage une guerrière qu'une guérisseuse. Sa notoriété lui conférait, aux yeux de la plus jeune, une aura de déesse. A l'image des Ætheri, elle se la figurait capable de résoudre toutes les misères du monde... Une illusion trompeuse, bien évidemment. Si elle avait pris le temps d'y penser, d'y réfléchir un minimum, Miha se serait rendue compte de sa bêtise : le fâcheux événement qui avait engendré tant de blessé en était la preuve. Si la Matasif était réellement douée de dons capables d'empêcher les maux de heurter leur peuple, alors ces monstres ne leur seraient pas tombés dessus. Pourtant, l'Humaine n'avait pas plus été capable qu'un autre de stopper le massacre. Roi, Matasif, simple badaud : finalement, tous les humains ne pouvaient que subir les épreuves que le destin leur envoyait à la figure. Certains mieux que d'autres, en fonction de leurs habilités et de leur chance. La dame Leenhardt n'était finalement qu'une mortelle parmi tant d'autres. Mais peu importait : l'apprentie sage-femme se sentait tout simplement soulagée de ne plus être responsable de cette vie-là. Le blessé était bien trop atteint pour ses maigres connaissances. L'idée qu'il puisse mourir sous sa garde était insupportable à la demoiselle et elle se retrouvait heureuse de léguer son fardeau à quelqu'un avec de plus larges épaules qu'elle.

Se mettant naturellement en retrait, Miha de remit à respirer normalement, comme si une pression avait écrasé sa cage thoracique durant tout ce temps. Elle n'alla cependant pas voir un autre patient. Peut-être se sentait-elle encore responsable, d'une certaine manière, de la vie de cet homme, même si son destin n'était plus entre ses mains. Une sorte de devoir du soignant qui la pousserait à s'enquérir de la santé de son patient. Même si elle n'avait été concernée que quelques secondes - le temps de constater les dégâts - cela avait suffi. Après tout, ne devient pas guérisseur qui le veut. Il s'agissait non pas d'un simple attrait pour les soins mais d'une véritable vocation, d’un désir intrinsèque de sauver autrui. La fille au teint basané écouta donc attentivement la discussion entre le médecin et la guerrière, la mine soucieuse. Son expression devint carrément horrifiée lorsqu'elle comprit ce que signifiait l'inaction du docteur. Sa gorge se noua, son ventre se tordit et bien malgré elle, elle sentit les larmes lui piquer les yeux. Elle se mordit farouchement la lèvre afin de s'interdire de craquer. Elle était ici pour soigner des vies, pas pour se lamenter sur le sort de ces malheureux. Elle devait se montrer compatissante sans laisser ses émotions prendre totalement le dessus. Elle ne pouvait pas se laisser aller aux larmes devant ces personnes. Pas quand certains d'entre eux luttaient pour rester en vie. Se raclant la gorge, la jeune fille s'approcha de la Matasif. « Je vais essayer de trouver du pavot. Pour l'aider à s'en aller sans souffrir le martyre. » La demoiselle aux cheveux d'ébène tourna les talons pour partir en quête.

Miha passa les heures suivantes à raccommoder, remboîter et recoudre. Chaque blessure soignée était comme une revanche sur l'échec qu'elle avait dû essuyer en abandonnant ce pauvre homme à Ezechyel. Parfois, elle se sentait grondante de colère en pensant au sagouin qui avait osé provoquer de tels domages, conduisant à la mort de l'humain. Elle se sentait trembler, désireuse de retrouver le coupable pour pouvoir le punir. Elle devait rapidement se ressaisir néanmoins : se mettre dans un tel état risquait d'impacter la qualité de son travail. Même si elle ne s'occupait que des cas mineurs, elle ne voulait pas que ses actions dégénèrent autant que pour la victime précédente. Et puis de toute manière, réfléchir à tout cela ne mènerait à rien de bon : chercher un coupable ne ferait que semer la discorde dans leurs rangs. Or, pour bâtir la merveilleuse cité dont ils rêvaient tous, ils devraient se serrer les coudes. Montrer un front uni.

Miha rejoignit la Matasif, deux verres en ferraille entre les mains. Ils contenaient du jus de fruits - apparemment, trouvés sur l'île et inoffensif d'après ce que lui avait assuré le médecin le lui ayant servi. Une fois aux côtés de Mancinia, la demoiselle attendit qu'elle eût terminé avec son patient avant de l'aborder. « Tenez, buvez ça, ça vous redonnera des forces. » Elle esquissa un sourire, malgré sa mine fatiguée. Il lui semblait que son corps entier la tiraillait, lui hurlait d'aller se coucher. Elle allait finalement céder. « Vous devriez vous ménager. Vous avez petite mine, vous aussi. Il vaut mieux se reposer plutôt que de se surmener. Surtout vous. Nous aurons besoin de votre aide pour avancer. » C’était ironique venant d’elle qui avait repoussé au maximum sa venue jusqu’à l’air d’infirmerie. Timide à l'idée d'avoir parlé à une si grande dame, Miha se retira après lui avoir adressé un petit geste d'au revoir.

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