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 [Q] - Maintenant que j'y pense...

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Dim 10 Nov 2019, 23:41


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Intrigue/Objectif : Aurora vient juste de rentrer dans le Léviathan et tente de se faire à son nouvel univers. Et cela ne se fera pas sur la patience de ceux pour qui elle doit travailler. C'est le moment d'aller au devant de tâches ingrates et de ne pas rechigner.

° ° °

Combien de temps cela allait encore durer ? Cette sensation étrangère de faire partie d’un tout encore inconnu. Un certain temps sûrement… Aura ne pouvait s’en démêler, alors qu’elle vaquait à ses corvées. Depuis qu’ils avaient rejoints les Terres Oubliées, le capitaine avait fait mettre son navire en cale sèche pour pouvoir à quelques réparations et améliorations, dont de nouveaux canons d’après ce que la Fae avait pu observer de-ci de-là parmi l’agitation régnante, quoiqu’elle ne se trouvait que rarement sur le port. Depuis qu’ils avaient débarqué, elle n’avait dû s’y rendre que deux ou trois fois… Se déplacer en ville lui était encore parfaitement non-familier, et elle se devait de le faire en gardant sa forme la plus minuscule dans les artères les plus peuplées. Le temps restant avait-elle était confiné dans les quartiers réservés aux recrus de leur capitaine, patronnée par une certaine Kemyca, qui n’aimait guère plaisanter.

Mais aujourd’hui avait-il recruter une petite équipe parmi les nouvelles recrues afin de profiter de la mise à sec pour récurer de fond en comble l’intérieur du navire et s’occuper de désincruster un peu la coque. Assignée au pont, Aura retenait à grande peine sa respiration afin de travailler en économisant le plus longtemps ses forts pour briquer le bois solide mais usé par les si nombreux passages des marins. Jamais n’avait-elle croisé de navire auparavant. Ils avaient un certain charme, cet aspect rustique né de la forêt mais qui avait été arraché à son milieu naturel. Ses muscles commençaient à la faire souffrir, malgré ses pensées dérivant, à force de frotter dans ces mêmes mouvements de va et vient, encore et encore. L’aurore se levait à peine lorsqu’elle était montée à bord, et si les lueurs du soir n’étaient pas encore apparues, le temps semblait s’étirer encore et encore depuis ce matin. Et de façon relativement monotone. Même si… elle ne regrettait rien. Quelque fut les élans de douleurs qui longeait l’intérieur de ses bras osseux ou les articulations immobilisées dans l’effort de ses jambes. Les regards se sentaient dans son dos, lourds, si lourds, mais aucun ne s’était enfui, ou ne l’avait agressé. Qu’ils l’aient fait car ils ne pouvaient simplement pas n’avait pas plus de sens que les regards foisonnants qu’elle-même posait sur les estropiés, les handicapés ou les créatures malformées de race qu’elle n’aurait pu définir qu’elle avait croisés. Que tous ignoraient. Ici, la vie avait un standard différent.

« Hmf… » Retenant un énième soupir, alors que quelques rayons orangés venaient enfin de percer sa ligne d’horizon par dessus le bastingage, Aura se redressa enfin, prenant sous son aile le sceau rempli d’eau sale. Avisant la grille d’égout non loin, sa masse lourde s’appesantit contre le parapet du pont afin de d’y déverser son contenu comme elle l’avait déjà fait maints fois aujourd’hui. Elle n’avait cessé d’insister sur ce pont, il ne pourrait certainement pas être en meilleur état, mais le verdict tomberait certainement une fois qu’une inspection aura été faite. Le capitaine Evard ne semblait pas à cheval sur le fait de contrôler chaque seconde de chaque mouvement de son équipage, mais ça sous-entendait qu’un travail bien fait était nécessaire pour que cela continue. Kemyca avait insisté là-dessus, même en tant que nouvelles recrues, si ce n’est qu’elle semblait deux fois plus féroces que lui. Apercevant les quelques magnifiques rayons se posaient sur les reflets de la mer au loin, la Fae ne put s’empêcher de s’interroger sur ce dans quoi elle s’était embarqué. Un bien pour un mal ? Non, juste une vie. L’Océan était vraiment incroyablement magnifique…

La pensée était ingénue, mais c’était étrangement la première fois que cela la percutait à ce point. A cet instant. Peut-être à cause du soleil qui se couchait ? Bien qu’elle ait traversé l’Océan pour parvenir jusqu’aux Terres Oubliées, la Fae l’avait fait au fond d’une cale, prostrée entre les autres recrues qui avaient tenté tant bien que mal de garder ses distances avec elle, en vain au vu des ballottages causées par les premiers jours de mer mouvementée qu’ils avaient eus. Quel moment angoissant cela avait été… Ne pas savoir quand elle débarquerait, si elle débarquerait, comment elle débarquerait et ce qu’il adviendrait d’elle… Les choses avaient finalement été assez promptes et simples. Si simples qu’il lui avait semblé se faire enregistrer comme une marchandise avant qu’on ne dispose d’elle. Aura n’avait certainement pas eu l’idée de jeter un regard derrière elle et de contempler cette incroyable traversée qu’elle avait su faire. Peut-être aurait-elle dû… Cette étendue bleu royal ne tombait pas du ciel, mais de quelqu’autres trésors. « On ne s’égare pas. » Railla brusquement le timbre direct mais toujours très franc de Zen qui venait de surgir derrière elle.

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Lun 11 Nov 2019, 21:59


Ce n’était pas comme si elle n’était pas au courant. « Oui, oui. » Renchérit-elle, rattrapant par-dessus bord entre ses deux mains le sceau tout juste déversé. Ce n’était pas comme si elle avait besoin d’être rattrapé à l’ordre, leur quotidien laissait peu de place à la rêverie. Derrière elle, le Zik’i terminait de traverser le pont, plusieurs cercles de lourds cordages sur l’épaule, s’apprêtant à quitter le bord. Sa courte chevelure blanche prenait la couleur du crépuscule, si forte avec la proximité de l’Océan qui l’intensifiait. « Tu as fini ? » Reprit-il sans un regard vers elle, ses larges mains appuyées sur le bastingage, près à sauter de l’autre côté pour rejoindre le sol. Zen ne faisait pas partie des recrues avec lesquelles elle avait été amenée sur les Terres Oubliées, il était né au sein du Léviathan, mais travaillait encore la majorité du temps sur les terres, n’ayant pas encore rejoint l’équipage d’un navire. Sa liberté de mouvement était bien plus élevée que la leurs, enfin, comme tous ceux qui travaillaient désormais depuis longtemps pour le Capitaine. Mais, Zen se partageait certaines tâches des recrues de temps à autre. S’il lui avait apparu comme quelqu’un de relativement abrupt dans sa façon de s’exprimer et de se conduire, il n’en était pas moins dénué d’arrogance. « Oui. » Comme elle rejoignait le bord par lequel il venait de sauter, un coup d’oeil lui permit d’apercevoir qu’il l’attendait en contrebas. « Allons-y alors. » Contrairement à lui, la créature rejoignit l’espace permettant le déploiement d’une échelle et se laissa tomber vers le sol avec un peu plus d’agilité qu’il y a encore quelques semaines.

Après avoir disposé des effets qui lui avaient servis au nettoyage, sceau et brosses, ils se remirent en route. Zen avait conservé les cordages autour de lui, dont le poids devait certainement lui peser. Mais il travaillait comme main d’oeuvre depuis si longtemps que sa musculature se trouvait aujourd’hui taillée pour y convenir. Sa tâche du jour avait dû consister à remplacer des cordages usés, qu’il rapportait désormais afin qu’ils soient renforcés. On ne pouvait pas dire que la demeure dans laquelle elle avait échoué manquait d’argent, mais on ne jetait et on ne faisait pas fi de ce qui pouvait être réutilisé. Le travail était précieux de l’aube au coucher du soleil, et les plaintes n’étaient tolérées de personne, mais tout le monde était logé à la même enseigne. Si tous n’avait pas les mêmes tâches, personne n’en bavait pas. A son arrivée, Zen avait été un des premiers à lui adresser la parole. Il semblait avoir été bien peu affecté par son apparence… Plus tard avait-elle appris qu’il n’était pas seulement né au sein du Léviathan, c’était également le fils d’adoptif du capitaine Evard. Après la mort de ses parents en mer, il l’avait recueilli. Le jeune homme semblait montrer une grande loyauté envers le Capitaine, et se fiait à ses choix sans apporter la discussion. C’est du moins ce qu’elle avait entendu dire… On ne pouvait pas dire que depuis qu’Aura était arrivée, elle s’était particulièrement liée avec qui que ce soit. Mais cette vie… était mieux que rien. Du moins, le pensait-elle à cet instant dans la tranquillité du soir naissant.


S’effondrant sur le hamac qui lui était réservé, la Fae réalisa qu’elle ne sentait plus le moindre de ses muscles. Et elle n’avait même pas la moindre idée de tous les membres dont elle était vraiment pourvue, avec cette apparence morphologique hors norme qui était la sienne. La lune devait désormais briller au sommet des étoiles à cette heure, et toutes les autres recrues présentes ne pensaient pas moins qu’elle à se coucher, et profiter des heures avant que l’aube ne vienne et que la journée ne recommence. La fatigue envahissante qui les drainait empêchait les uns de se préoccuper des autres, même si plaintes et grommellements envahissaient régulièrement le petit résidu où leurs lits de fortune étaient amassés. Apparemment, toutes les recrues ne restaient pas : certaines finissaient par renoncer d’elles-mêmes, d’autres étaient finalement renvoyés. Personne n’en parlait vraiment, ils avaient bien trop souvent Kemyca sur le dos pour qu’ils puissent penser à autre chose que l’accomplissement de leur corvée et leur intégration dans l’équipe du Capitaine. Kemyca ne laissait rien passer, elle était si dure et en même temps si dévouée… Peut-être le ressentaient-ils, et ils oubliaient alors d’où ils venaient et ce qu’ils faisaient pour se concentrer sur ce qu’on leur donnait.

Peut-être… Fourrée en une grotesque boule dont de multiples appendices pendaient de part et d’autre de son hamac, Aurora en avait oublié de penser et le sommeil n’avait eu qu’un pas à faire.

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Mar 12 Nov 2019, 23:26


Aaah… Jamais son corps ne lui avait autant continuellement brûlé que depuis qu’elle était arrivée ici. Se plaindre ne lui viendrait jamais à l’esprit mais c’était une nouveauté pour elle que de découvrir que ce n’était pas parce qu’on était pas traqué en plein milieu des bois que toutes les autres situations menaient la belle vie. Le labeur journalier faisait partie de la routine des pirates, et ce n’était probablement pas les seuls mais… Aura ne pouvait pas imaginer plus loin qu’eux pour l’instant. Que se passerait-il lorsqu’elle aurait le droit de prendre la mer ? Si un jour elle y aurait droit ? Hm… La Fae avait bien dû mal à penser que cette situation serait éternellement la sienne, probablement car jusqu’ici rien dans sa vie ne lui avait promis quelques stabilités… Et aujourd’hui ne semblait rien de plus qu’un essai de vie qu’une véritable promesse mais Aura n’en donnerait pas moins tout ce qu’elle avait.

Et cette huitième pomme de terre ne lui résisterait pas davantage. La créature était aujourd’hui de corvée de cuisine avec l’une des autres recrues. C’était à eux de préparer à manger pour toutes les autres personnes de la demeure. Et en ce moment il n’y avait pas le personnel terrestre qui travaillait pour le Capitaine, mais également tout l’équipage en mer vu que la Vengeance de la Reine était en cale sèche. Cela en faisait un petit monde… et jusqu’ici Aura n’avait jamais, jamais, pratiqué la cuisine, se contentant de se nourrir de baie récoltée de-ci de-là dans les bois. De quelques plantes. Elle n’avait même jamais goûté à la viande jusqu’ici. Et s’en serait bien passé. Le second jour après son arrivée, l’expérience avait été désastreuse… L’estomac de la Fae n’était probablement pas encore prêt pour cela. Les pommes de terre, ce n’était pas si mal, ces dernières ne semblaient que se manger cuites d’ailleurs. Mais les éplucher était une expérience plus bien traumatisante. Les longues phalanges fourchues d’Aura l’empêchaient d’utiliser avec suffisamment d’habilité le couteau qui servait à peler leur peau, aussi mettait-elle autant de temps à éplucher une seule pomme de terre que l’autre recru avec elle en avait déjà préparé trois. A force se disait-elle qu’elle irait presque plus vite en utilisant les petites griffes qui dépassaient du bout de ses doigts. Mais ça ne serait probablement pas extroardinaire… Du coin de son regard morfondu, l’autre recru - dont le nom lui échappait actuellement - l’observait avec défiance régulièrement. Rien de bien méchant, plutôt… misérable.

Quoique, c’était normal que les gens ne se sentent pas à l’aise autour d’elle, la Fae trouvait cela même plutôt sain. Même si cela n’empêchait pas de remuer tout ce fond de peine en elle. Le pauvre citoyen devait probablement avoir envie de prendre ses jambes à son coup et d’aller assurer une quelconque autre tâche que d’être confiné avec elle. Aura comprenait… mais ne pouvait rien y faire. Et même si elle le pouvait, lui dirait-elle qu’il devrait s’éloigner et la laissait ? Ce n’était pas exactement comme si elle en avait envie… Aussi cette proximité forcée - bien qu’aucun n’en avait envie - n’était pas plus mal. Etait-ce un peu égoïste de sa part de penser ainsi ? Peut-être… Sa main droite qui tenait le couteau dérapa brusquement mais étonnamment ses doigts réussirent à se refermer agilement sur la lame pour éviter qu’elle ne se coupe. Ses doigts, sa corpulence, rien en elle n’avait changé. Néanmoins, depuis qu’elle était arrivée au Léviathan, ses membres semblaient peu à peu se débrouiller un peu mieux, malgré leur grossièreté et maladresse. On ne lui faisait pas de cadeau, on ne l’aidait pas, on ne lui facilitait pas les choses parce que son apparence la désavantagerait, et ça la forçait, encore et encore, à faire et se débrouiller avec ce qu’elle était. « Je crois qu’on commence à en avoir assez, je vais commencer à les découper... » S’éleva soudainement la voix de l’autre recrue, sans oser croiser son regard. Mais, il avait eu le cran de lui adresser la parole. Ce n’était pas si mal… Aura ne sut pas même immédiatement quoi répondre, et se contenta simplement d’acquiescer, tentant de terminer au plus vite cette pomme de terre pour pouvoir s’occuper de les mettre à bouillir une fois découpée.

S’agenouillant du mieux qu’elle pouvait, la Fae attrapa la planche sur laquelle la recrue travaillait au fur et à mesure qu’elle se remplissait, la renversant dans la marmite par intervalle. Leur geste assez synchrone leur permettait de gagner un peu de temps. « Ça avance ? » S’enquit soudainement la voix de Zen qui venait de descendre voir où il en était, apportant par la même occasion quelques brins de thym qu’il fit tomber dans l’eau brouillante. Les petites branches d’épines vertes se mirent à flotter dans une danse inégale parmi les bulles éclatées. Personne n’eut besoin de lui répondre vu le coup d’oeil qu’il jeta à leur travail avant de brusquement remonter à l’étage en quelques longues enjambés. Ou plutôt, il leur avait à peine laissé le temps d'ouvrir la bouche. Cet homme avait vraiment un dynamisme sans fin…

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Mer 13 Nov 2019, 18:19


Les oignons étaient des petites boules bien plus pratiques à égratigner : ses griffes seules suffisaient à enlever leur peau instable, pourvue qu’elle y aille avec quelques délicatesses. Ce qui n’était pas non plus le spectacle le plus fin qui soit… Mais elle s’y débrouillait suffisamment, se concentrant sur cet aliment apparemment relativement bon marché vu qu’elle en avait croisé à presque chaque repas. Ce n’était pas mauvais mais… Pas incroyable non plus. S’appliquant désormais à trancher chaque rondelle du mieux qu’elle pouvait, Aura en oubliait presque le jeune homme - devrait-elle dire jeune garçon vu l’âge précoce dont il semblait issu - avec lequel elle cuisinait. Il se faisait discret, penché au-dessus de l’eau bouillonnante à suivre la cuisson des pommes de terre qui seraient ensuite écrasées pour être mélangées à l’oignon, puis servis avec quelques tranches de lard. Son coup d’oeil furtif ne dura pas plus d’une seconde avant que la Fae ne reporte son attention sur la lame qui coupait avec précision les rondelles, qui se disloquaient les unes à la suite des autres contre la planche de bois tendre.

Etait-ce… encore un adolescent ? Sa mine paraissait juvénile derrière ses courtes mèches brunes qui obstruaient presque complètement ses yeux dont Aura n’avait pu percevoir leur couleur d’un bleu profond que quelques rares fois. Peut-être était-il plus âgé que Syrianne néanmoins… Mais leur tranche d’âge devait être bien proche. Craignant quelque rejet, ou de le mettre mal à l’aise, la Fae garda le regard rivé sur les oignons qu’elle découpait alors que sa voix s’éleva finalement. « D’où viens-tu ? » La recrue manqua de sauter au plafond de leur petite cuisine à l’entente du son de sa voix, redirigeant immédiatement les orbites sincèrement surprises d’Aura sur lui. Mais, complètement immobile, le garçon sembla réaliser la disproportion de la réaction dont il venait de faire preuve. « D-Désolé… » Marmonna-t-il faiblement, pris dans son embarras au-dessus de l’eau bouillante qu’il surveillait à coups réguliers d’une grosse cuillère en bois usé. Malgré ses paupières tremblantes dont Aura n’était pas certaine d’être la cause, il sembla avoir à coeur de lui répondre. « Du territoire des Sorciers, je suis né esclave là-bas… » Esclave ? Ce mot ne lui était pas jusqu’ici connu mais elle en avait entendu parler à plusieurs reprises depuis qu’elle vivait sur les Terres Oubliées. Des frissons d’effrois lui remontèrent l’échine, comme le garçon continuait. « Mais j’étais trop chétif pour subvenir à un rendement suffisant alors mon propriétaire a trouvé que je lui rapporterai plus en me vendant… » Tout du long, il n’avait pas osé croiser une seule fois les petites orbites dorées qui l’avaient fixées. Les gestes d’Aura s’étaient stoppés, en même temps elle était déjà venue à bout du dernier oignon. « Je suis désolée pour toi. » Finit par réussir à sortir Aurora, dans un timbre presque dénué d’émotions. Non pas qu’elle n’en ressentait pas mais elle ignorait… complètement… comment y faire face. Quoique sa compassion fut sincère. « Ah, ah… Ce n’est rien. » Répliqua dans un rire forcé le garçon, sentant largement le malaise de la Fae. « Je suis mieux ici. » Termina-t-il en hâte, commençant à récupérer les tendres quartiers de pommes de terre.

Probablement… La notion de famille n’était pas évidente pour les Faes, car ces dernières naissaient au sein de fleurs. D’une certaine manière, leur espèce fonctionnait comme un écosystème pareil à ceux de la nature. Mais ce garçon avait certainement dû être arraché des siens, quoique son foyer devait être brisé… Cela n’arrangeait rien. Qu’est-ce qu’avait pu être sa vie… Aura commençait pratiquement à se sentir mal d’avoir abordé un tel sujet. Ceux qui se retrouvaient parmi le Léviathan, étaient-ils tous ainsi ? Oui, la créature réalisait que pas grand monde devait avoir été mieux loti qu’elle. « Je m’appelle Armin, et toi ? » Interrogea-t-il soudainement. Le sourire toujours forcé à ses lèvres, avec ses doigts empêtrés à écraser les pommes de terre, Aura sentit à quel point cet être débordait de douceurs et de gentillesse. C’était elle qui l’avait mis mal à l’aise mais, à cet instant, ce garçon qu’elle devait effrayer comme personne, tentait d’apaiser la tension en elle. A nouveau prise de court, figée, les oignons réunis entre ses doigts maladroits dont la finesse créait des espaces propices à ce qu’une rondelle ou deux ne s’échappent entre, la Fae ne sut que répondre jusque’à ce que son timbre confondu ne lui revienne. « Je m’appelle Aura. » Cette fois, un sourire un peu plus doux, un peu plus ingénu, traversa les lèvres d’admin pour briller aux coins de ses tendres yeux à peine visible. « Ah, ah... Enchanté Aura. » On ne pouvait pas dire que l’embarras l’avait quitté, cela empirait presque. Mais… c’était inattendu. Et engageant.

Mais on ne les payait clairement pas à discuter, et s’ils se mettaient en retard pour le déjeuner, cela ne plairait clairement pas à Kemyca. Quoiqu’Aura ne risquait plus sa vie, la Fae avait largement compris que ceux qui ne tenaient pas le rythme ou ne faisaient pas ses preuves ne dureraient pas longtemps. Que ce soit pour une simple affaire de cuisine importait peu : les corvées les plus élémentaires devaient être accomplies avec le même acharnement et sérieux qu’on leur demanderait plus tard pour des tâches plus importantes. C’était leur manière de tester la patience des recrues et ce qu’ils étaient prêts à faire pour se faire une véritable place au sein du Léviathan…

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Mer 13 Nov 2019, 18:29


La journée touchait à nouveau pratiquement à sa fin, quoique cette fois-ci Aura n’avait pas quitté la demeure de leur maître. L’après-midi avait été concentré à des tâches aussi basiques que nettoyer la cuisine, puis le garde-manger - faire un inventaire complet de ce qui leur restait pour préparer les courses qui seraient faites demain matin par d’autres recrues accompagnées par un matelot plus expérimenté - et enfin tous les couloirs des deux derniers étages y étaient passés. Si elle devait comptabiliser, soixante-cinq pourcents de son temps avait été employé à nettoyer, récupérer, polir depuis qu’elle était arrivée. Des corvées vraiment basiques… qui ne lui apprenaient rien… Mais auxquelles ils ne semblaient pas pouvoir couper. Evidemment, cela faisait encore si peu de temps qu’ils étaient là, et Kemyca semblait d’abord vouloir veiller à leur intégration dans le même temps qu’elle s’assurait leur volonté de travailler pour le Capitaine. De faire partie du Léviathan tout court. Sur les sept qu’ils étaient à son arrivée, cinq étaient avec elle sur le navire, et seuls deux s’étaient présentés de leur plein grès. Apparemment, ceux qui rejoignaient le Léviathan de leur plein grès avaient une marge de manoeuvre plus libre mais… s’ils n’avaient pas de quoi survivre, ils étaient aussi classiques qu’ils cherchent à se faire enrôler sous la tutelle d’un capitaine.

Alors que la Fae terminait d’allumer les dernières lampes à huile qui éclaireraient davantage la demeure maintenant que les lueurs du soleil couchant s’étaient complètement éteints derrière l’horizon, elle aperçut Zen qui s’apprêtait à sortir, une veste glissée négligemment sur l'épaule. Du coin de son regard vif bleuté, il la repéra sans mal le fixer. « Hm ? Tu veux venir ? » L’interrogea-t-il, inquisiteur, une main déjà placée sur la poignée de la porte principale du logis. Aura n’avait pas la moindre idée d’où conduisait cette proposition, ou seulement ce qu’il comptait faire mais… La créature avait passé la majorité de son temps enfermé aux seins de ses murs et dehors l’air de la nuit devait être si... nostalgique... « Je vais seulement regarder les étoiles. » Crut-il bon d’ajouter finalement, platement, ayant perçu l’expectation totale dans l’attitude un peu ébranlée de la Fae. « Oui, avec plaisir. » Dépourvue des quelques doutes précédents, le calme avait repris ses droits sur le coeur d’Aura qui n’espérait plus que profiter de l’air nocturne maintenant que Zen lui avait expliqué ce qu’il comptait faire. Jetant son regard en arrière alors qu’il écartait le lourd battant de la porte, la tonalité de sa voix s’éleva sans force. « Tu as entendu Kemyca, Aura m’accompagne. » Que la susnommée ait entendu ou non, les deux disparurent entre les ombres qui tapissaient les rues éclairées de la ville des pirates.

Aucun mot ne fut échangé en chemin, Zen poursuivant sa route dans le labyrinthe des rues jusqu’à ce qu’un chemin de terre ne les mène vers des hauteurs insoupçonnées de la Fae. Elle avait entendu dire qu’en dehors du port que le Léviathan entretenait, le reste de l’île était parcouru de terres inhospitalières. Alors elle douta qu’ils aillent bien plus loin mais être aussi près d’une nature sauvage après tant de temps avait quelque chose de grisant, quoique d’un peu effrayant aussi au vu du manque complet d’éclairage qui les entourait désormais. Aura ne pouvait pas même apercevoir les paysages. Zen ne sembla pas s’en préoccuper, se laissant littéralement tomber contre la terre à peine recouverte d’herbes, ses bras se croisant derrière sa nuque le regard soulevé vers les étoiles. C’est vrai que maintenant qu’ils s’étaient écartés de la ville, le ciel nocturne s’ouvrait à eux dans toute sa simplicité… et toute sa splendeur tachetée de ces minuscules foyers de lumière blanche.

Désormais allongée non loin de lui, à quelques distances raisonnables, la Fae commençait à en oublier le temps d’où elle venait. Tout s’oubliait facilement face à un pareil spectacle de constellations… Tout le monde était mis à égal devant les étoiles, distantes et éternelles. « Merci de m’avoir accueillie… » Son murmure s’évapora presque dans l’air frisquet de la nuit. « Il n’y a pas de raisons de remercier. » Répliqua Zen, toujours aussi direct et blanc dans sa manière de répondre. Peut-être pas mais… « Le Capitaine semble porter de l’attention à ceux qui l’entourent… Est-ce que tout son équipage loge avec nous ? » « Hein ? » Cette fois, considérablement surpris, la réaction de Zen avait été loin d’être aussi posée que précédemment. Sa tête s'en était pratiquement redressée. « Bien sûr que non. Seuls une partie du personnel qui travaille à terre pour lui et les membres de ses équipages qui ne peuvent pas encore se loger par eux-mêmes logent à demeure. Les nouvelles recrues aussi, par extension. » Bien, la Fae s’était définitivement faite une mauvaise impression pour le coup. Le Capitaine n’était donc pas tant proche de son équipage. Cette vision d’une grande famille qui vivait ensemble semblait avoir été quelque peu biaisé mais… Le respect que lui portait les gens continuaient néanmoins de véhiculer cette impression qui la berçait. « Il a beaucoup d’équipages ? » S’enquit-elle finalement, engageant la discussion que Zen avait amenée. Le Zik'i ne semblait pas avoir quelque chose à y redire. « Le Capitaine Evard possède quatre autres navires en plus du Vengeance de la Reine, dont il a délégué le commandement à des officiers qui travaillent pour lui. » Aura n’aurait jamais pensé que la société des pirates puisse être autant organisée, ou même qu’il y ait tant derrière une seule personne. C’était un commerce… impressionnant ou pas qu’il entretenait alors ? « Le Mérou revient demain d’ailleurs. La journée sera probablement particulièrement longue. » Aura ne pouvait qu’imaginer… Ah que non, elle se le représentait même très bien.

Zen sauta soudainement sur ses pieds, le regard rivé vers l’horizon où ils pouvaient apercevoir d’une part l’océan rencontrer les quais du port et de l’autre côté se perdre vers la limite indéfinissable que posait le ciel nocturne. « Bon. Il est temps de rentrer… » L’humidité que les petites touffes d’herbe avaient transmis à ses vêtements avait rendu son souffle plus frais qu’à leur arrivée. Le temps se ferait de moins en moins clément. Mais, Aura lui était définitivement reconnaissante de cette sortie impromptue...

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Sam 16 Nov 2019, 00:46


La résonance des pas de courses descendant l’escalier de bois chétif qui menait à leur étage vint à ses oreilles avant même que la porte de leur dortoir improvisé ne claque sur l’apparition de Kemyca. « Debout la dedans ! Aura, Armin, Stan. Secouez-vous plus vite que ça et ramenez vos faces de chiens galeux dehors dans deux minutes. » Toujours tout en délicatesse… Mais il n’y avait pas à discuter, ni à se demander ce qu’il se passait, ni à se plaindre et certainement pas à prendre son temps. Encore bien endormis, les trois susnommés enfilèrent en quelques rapidités leur chausses, quoique cela ne concernait pas Aura. Le sursaut d’adrénaline avait fait son office mais leurs têtes débraillées n’en disaient pas moins long. Stan grommela quelques inepties, tandis qu’Armin retint quelques gémissements en se prenant les pieds dans ses affaires et manquant de se casser la figure. Quant à la Fae, « dehors » avait été synonyme de mise de quelques vêtements qu’on avait trouvé à sa taille. Bien que créant une étrange silhouette sur elle, Aura réalisa que les porter l’avait davantage humanisée… si bien que les regards s’attardaient bien moins sur sa monstruosité. Le Capitaine lui avait ordonné de les porter dès qu’il s’agissait qu’elle intervienne en extérieur. Le peuple du Léviathan admettait peut-être les laissés pour compte, s’habituant au spectacle qui indisposait la plupart des autres races parmi les estropiés et les malformations, mais cela ne signifiait pas qu’elle ne pouvait pas faire un effort pour s’intégrer. Aura n’y avait a priori jamais pensé jusqu’ici mais réalisait à quel point il n’avait pas tort.

Dehors, devant la large entrée de la demeure, semblable à toutes les autres accolées, une vraie petite agitation régnait. Le plus surprenant : le Capitaine lui-même se tenait debout - frais comme l’air du matin dont l’aube n’était pas encore apparu, ce qui était actuellement le cas. Aucune autre lumière que celles des dernières étoiles n’éclairaient encore les pavés sales de la ville. Parmi les corps s'agitant, Aura repéra Zen qui préparaient deux des barques à prendre le large sur le canal. C’était ainsi qu’on se déplaçait majoritairement dans la ville pirate. Quel moyen de transport bien adapté à la situation d’un port n’avait-elle pu s’empêcher de trouver, mais jusqu’ici il ne lui avait pas été possible d’en conduire une. Et elle n’avait pas l’impression que ça changerait aujourd’hui. « Le Mérou est arrivé bien plus tôt que prévu. C’est le genre d’imprévu qui peut survenir n’importe quand lorsqu’il s’agit des vents et de la mer ! Mieux vaut vous y faire si vous voulez avoir une chance de tenir le rythme dans le Léviathan. Soit vous domptez les caprices de l’Océan, soit vous n’aurez qu’à récurer la fange qu’il laissera derrière lui. Allez, montez ! » Difficile d’être plus expéditive que Kemyca, mais les trois obéirent avec obédience en se plaçant dans l’une des barques, avant d’être rejoint par deux autres matelots et Zen. Le Capitaine et d’autres personnes qui lui étaient inconnus montèrent dans l’autre barque, occupés à quelques discussions dont elle ne pouvaient entendre les propos.

Difficile de profiter d’une quelconque vue. Non seulement étaient-ils tassés les uns sur les autres, mais l’obscurité ambiante était bien plus forte à l’approche de l’aube… A cela s’ajoutant le fait que rêvasser n’était pas à l’ordre du jour car Kemyca comptait bien leur faire rentrer leur tâche au plus profond du crâne et ce avant qu’ils arrivent. « A notre arrivée, le Mérou aura normalement déjà déchargé une partie de sa cargaison. Vous devrez la comptabiliser et selon les ordres en mener soit au Vengeance de la Reine, soit au SpitRæmon, soit les charger dans les barques. C’est bien compris ? » Ce n’était pas comme si elle attendait une quelconque réponse de leur part, au contraire, mais au bord de sa vision Aura observa Zen lui faire un discret clin d’oeil, un léger sourire flirtant sur ses lèvres claires. Cette journée s’annonçait définitivement longue. Les quais étaient particulièrement imposants de ce qu’elle avait découvert jusqu’ici et devoir faire des allées-retours entre plusieurs bateaux pouvaient s’avérer particulièrement épuisants Qu’il fasse bon ou froid, ils finiraient probablement par ne plus sentir leurs extrémités.

Peu importait qu’il soit tôt, les quais - partie essentielle du port - regorgeaient d’agitation. Et à l’approche du Mérou, ça n’en était que pire. Le petit groupe avait dû abandonner les barques pour s’éloigner plus au fond des quais car le Mérou s’y était directement amarré. Des navires de cette taille nécessitaient une profondeur suffisante et donc pour eux de rejoindre le bout des quais. Les premières ombres qui se dessinèrent furent probablement le tas des caisses déjà déchargées qui commençaient à s’accumuler autour des matelots qui les descendaient, râlant - ou piaillant ? - d’enfin toucher terre. L’ombre d’un navire - probablement d’une taille presque similaire à celui du Vengeance de la Reine - occupait pratiquement tout le paysage avoisinant. Ses voiles, déjà repliées, permettaient aux derniers pigments de lumière sélénite de former une magnifique fresque entre ses mats et ses cordages. Mais la première chose qui attirait l’attention était l’imposante figure de proue dont l'ombre se découpait sur les quais. Un… énorme poisson ? Un poisson certes, mais la sculpture l’avait fait d’une telle ampleur qu’on l’aurait dit jaillir des eaux pour s’emparer du ciel. C’était tout bonnement… incroyable. Aura eut bien du mal à en détacher le regard jusqu’à ce qu’un coup de coude dans les côtes ne la ramènent à la réalité et… à leur travail. Ce n’était pas comme si quiconque comptait les tenir au courant plus que ça, le Capitaine, Kemyca et d’autres s’étaient déjà éloignés, prenant la rampe pour rejoindre le bord du navire, laissant Aura, les recrues et deux autres matelots avec les pirates du Mérou à terre.

L’un de leurs matelots sortit brusquement une feuille de parchemin et une plume qu’il déposa sur une caisse vide qui avait été retournée afin que son revers puisse servir de table. « Notez ce que vous comptabilisez là-dessus. Je l’apporterai au Capitaine ensuite. » Et c’était parti. Avisant la caisse la plus proche d’elle, Aura respira un bon coup avant de se permettre de jeter un coup d’oeil à son contenu et que le rythme infernal de la journée ne débute définitivement.

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Dim 17 Nov 2019, 21:24


Quels étranges objets… Qu’est-ce que cela pouvait bien être ? Scrupuleusement, craignant d’endommager ce qui n’était pas à elle, la Fae fit doucement glisser ses longues phalanges sur ces étranges choses d’une grande finesse, mais aussi d’une forte valeur si on se fiait aux dorures qui les recouvraient. Malheureusement, elle n’était absolument pas là pour rêver à ce à quoi ces objets pouvaient servir. Laissant de côté ses questions, Aura se baissa au niveau de la caisse, prenant soin de déplacer précautionneusement son contenu afin de le compter. Les planches sur lesquelles ses genoux s'étaient posés présentaient une humidité désagréable qui commençaient déjà à amollir sa peau, l'eau salé exacerbant les égratignures déjà présentes. « Ce sont des compas. Ils sont utiles pour défini les trajets maritimes, on les utilise pour calculer les distances et les reporter sur une carte. » Expliqua distraitement Zen qui s’occupait d’une caisse non loin de là, et qui avait certainement dû sentir sa perplexité. Ou alors il avait réalisé qu’elle aurait bien du mal à reporter le contenu sur le parchemin si elle ignorait le nom de ce qu’elle comptait. Tous ces objets qui avaient été créés... c’était tout bonnement inimaginable pour Aura. « Le Mérou devait faire affaire avec Les Enfants de Yanna, des voyageurs. Les compas sont parmi l’une de leurs spécialités. Ces caisses doivent venir de ce commerce. » Alors, les pirates ne créaient pas uniquement leur fortune en attaquant d’autres navires ? ils échangeaient également ? Peut-être cela dépendait-il des personnes concernées… « Mais, pourquoi en faire l’acquisition d’autant ? » Un ou deux compas par navire devait être suffisant, non ? Au premier instant, Zen ne comprit pas là où la Fae voulait en venir, s’arrêtant une brève seconde au-dessus de l’un des barils de poudre à canon qu’il vérifiait. « Ce n’est pas pour nous. Certains capitaines ont des accords avec les commerçants de Tek’ilala pour leur approvisionnement. Ces caisses iront à des marchands. » Impressionnant… Est-ce que la vie des pirates était à ce point diverse ? Face à sa monotonie quotidienne, Aura aurait eu bien du mal à le croire.

Ayant terminé la première caisse, et s’apprêtant à reporter sur le parchemin le fruit de sa vérification, ses orbes en profitèrent pour discrètement se porter sur les matelots du Mérou qui les aidaient à inventorier les caisses. Leur peau était couverte de crasse et leurs vêtements semblaient avoir connu plus de jours sous terre que n’importe qui d’autres alors qu’ils n’avaient fait que naviguer en mer. Leurs barbes étaient défraichies et leurs cheveux en piteux états. Certains semblaient présenter quelques blessures, si ce n’est au moins de nombreuses éraflures tapissant leurs articulations, sans parler des nombreuses callosités qui apparaissaient sous leur paume à chacun des mouvements qu’elle attrapait. La vie en mer… ne semblait pas réserver autant de cadeau que l’Océan semblait d’une beauté incomparable. « Dis-moi… Comment ça se passe entre le Mérou et le Capitaine ? Je veux dire… Avec les quatre autres navires qui lui appartiennent ? » Questionna-t-elle finalement, définitivement décidé en en apprendre plus sur le monde auquel elle avait décidé d’appartenir, tout en se remettant à sa tâche sans traîner. Tant que cela ne les mettait pas en retard, Zen consentit à continuer de lui répondre. « Le Capitaine Evard confie un navire à un subalterne qui devient ainsi lui-même capitaine. En échange, ce dernier doit un pourcentage de son butin à Evard. Parfois, il les charge aussi de missions particulières, comme le Mérou qui devait commercer avec les Enfants de Yanna cette fois-ci. En échange, le Capitaine s’assure également que le navire qu’il a confié ne manque de rien. » « Ca a l’air… d’un échange de bons procédés… » Le Zik’i ne fit qu’acquiescer, trop occupé à soulever le caisse qu’il venait de finir d’inventorier pour s’intéresser à celle qui se trouvait en dessous.

Crispant ses mains autour des lattes terreuses de la caisse qu'elle avait fini de compter pour la déplacer, la Fae se retrouva nez à nez avec la suivante, légèrement suspicieuse. Ne serait-ce pas la quatrième caisse de patates douces qu’elle était en train de compter ? Pourquoi acheter autant de ces choses ? Non pas ce que ce n’était pas bon mais enfin… Face à son désarroi croissant, Armin qui s’occupait également d’une caisse de patates douces, eut un sourire discret, quoique toujours claqué de timidité. « Les aliments qui ne périment pas facilement sont particulièrement appréciés en mer. Les patates douces changent des pommes de terre alors ils en ont profité. Ah, ah. » Terminant sur son petit rire embarrassé habituel, comme s’il fut gêné d’en savoir autant, Armin replongea immédiatement la tête dans son travail. A sa manière, ce dernier aussi en apprenait de plus en plus. Elle était chanceuse… que de telles personnes l’entourent. Enfin. Ce n’était pas le moment de traîner. Des caisses dans lesquelles avaient été entassées de multiples bouteilles dont les liquides ne lui disaient absolument rien n’attendaient qu’elle. « Ne serait-ce pas plus simple si l’équipage du Mérou effectuait cet inventaire lui-même ? » Son murmure s’était à peine élevé plus haut que le vent, inquiète que sa remarque puisse être mal perçue par les membres de l’équipage en question. Et ce n’était pas faux. Bien que concentré dans sa tâche, Zen ne manqua pas de l’entendre, lui répondant sans redresser la tête, d’un timbre équivoque au sien. « Ils le font déjà. Le Capitaine ne peut cependant pas se permettre de ne pas le faire, afin d'assurer sa position. » Hmm… L’explication mit un peu de temps à tourner dans l’esprit de la Fae tandis que ses mains déplacés du mieux qu’elle pouvait chaque bouteille d’une façon qu’il lui permettait d’éviter d’en compter une deux fois. Et d’éviter de les briser. Et la compréhension se produit. Il le faisait… pour ne pas se faire doubler ? Jusqu’ici cela n’avait pas paru apparent, car parmi leur petite troupe de recrues tout le monde devait se plier aux règles et personne n’oserait ne pas le faire, mais…

Si dans le cocon dans lequel Kemyca leur donnait des ordres tout semblait filer droit, Aura ressentait de plus en plus ce qu’elle avait pressenti au fond de cette cale qui l’avait mené sur les Terres Oubliées. Nulle part sur cette terre il n’y avait d’endroits où le fort ne faisait pas sa loi. Ce monde du Léviathan était aussi incertain que le calme planant sur l’Océan, et si un vent de stabilité semble obéir aux lois tacites de Tek’ilala, les inconscients et les imprudents se seraient-ils pas emportés par une bourrasque imprévue ?

Les discussions se turent, uniquement ponctuées de noms d'alcool lâchés par-ci par-là par Zen, lui rappelant sans cesse à quel point il lui en restait bien trop à savoir. Plus que pour les autres.

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Dim 17 Nov 2019, 22:59


Finalement, d’autres caisses avaient continué d’affluer mais les inventorier avait été relativement rapide. Ce qui l’était bien moins… était la seconde partie du la manoeuvre : acheminer les cargaisons là où elles devaient l’être. Ce qu’Aura et Armin faisaient tant bien que mal depuis plusieurs heures… Ces derniers avaient été affectés à l’approvisionnement du SpitRæmon qui repartirait bientôt en mer. La cargaison qu’il déplaçait depuis lors était principalement des caisses alimentaires mais également des barils de poudre à canon. Apparemment, la poudre à canon produite par les Enfants de Yanna étaient d’une qualité supérieure à celle que le Léviathan pouvait lui-même faire. Ainsi, les échanges avec ce groupe représentaient une importante valeur pour les pirates. Le Capitaine Evard semblait s’être assuré d’acquérir suffisamment de barils pour ces cinq navires, et ce pour quelques temps. Cela ne devait-il pas coûter une fortune ? Probablement, mais chacun devait être à la recherche de quelque chose… Tout ce qu’il suffisait était de savoir marchander. Ni Aura ni Armin n'étaient proches de savoir faire une telle chose. À vrai dire, la Fae avait presque ressenti son inutilité aujourd’hui face à la quantité de noms qu’elle ignorait. Zen ne lui avait fait aucune remarque, se contentant de l’aiguiller calmement à chaque ignorance de sa part mais… même Armin en savait bien plus qu’elle, malgré son jeune âge et le fait qu’en tant qu’esclave il n’ait eu qu’une brève éducation. Evidemment, son monde avant de rentrer dans le Léviathan n’était… rien, mais… quand même…

Ses pensées se désarçonnaient les unes derrière les autres, tant l’effort l’empêchait actuellement d’aligner suffisamment de cohérence. Leurs bras ne pouvaient porter qu’une caisse à la fois, et chacune d’entre elle était aussi large que lourde, leurs bords en bois faisant pénétrer de multiples échardes sous la pression, sans qu’aucun d’eux ne se plaignent. Quoique leur visage en disait long sur leur état mais aucune personne présente n’était épargnée par l’effort. Maintenant que la journée était bien entamée, le soleil ayant dépassé son zénith depuis peu, les quais étaient encore davantage animés et personne ne tirait au flanc. Jamais elle n’aurait cru qu’un endroit puisse être aussi animé. Ce n’était pas comme si elle avait le temps de profiter du paysage mais le labeur semblait vraiment appartenir à la culture de la piraterie. « Ah ah aah… » Un souffle d’épuisement franchit la barrière de sa bouche lorsqu’une énième caisse fut déposée au pied du ponton où les marins du SpitRæmon les récupéraient pour les monter à bord. Aucun échange particulier n’avait été fait avec eux. La fatigue qui engourdissait ses muscles se faisait de plus en plus intense à chaque relâchement et pourtant, la journée était encore loin d’être terminée, mais Armin devait trinquer beaucoup plus qu’elle. Bâti d’une silhouette bien plus frêle, ses bras tiendraient à peine la place de quelques brindilles ayant chuté à terre sur le sol tendre de la forêt. L’effort qu’il devait déployer pour parvenir à encore bouger toutes ces caisses devait être inimaginable. « Est-ce que ça va ? » S’enquit-elle finalement, apercevant les couleurs de son visage tirant vers un carmin un peu inquiétant. « O-Oui, merci. » Répliqua-t-il en forçant un nouveau sourire sur ses traits juvéniles, sa voix pourtant dégorgée par dans un souffle incertain, ses doigts creusant la peau de ses cuisses sur lesquels il tentait de prendre appui pour reprendre quelques forces. Quel âge pouvait-il bien avoir ? Trop peu… sûrement. « On repart ? » « C’est parti. »

Finalement, le plus dur fut sans contester l’acheminement des barils de poudre à canon dont la taille présentait un large désavantage pour les bras humanoïdes qu’ils possédaient. Jamais Aura n’aurait cru que ses membres pouvaient maintenir si longtemps une telle torsion. Quoique, après deux allés-retours, ils se retrouvèrent sous le regard complètement déconfit de Zen qui finit par leur faire remarquer… « Vous pouvez les faire rouler aussi vous savez… » Effectivement, ce n’était pas vraiment bête. A moitié soulagés, la fin du transfert de la cargaison se fit en un peu plus de douceur qu’elle n’avait commencé et lorsqu’ils se représentèrent, le dernier baril mené, pratiquement toutes les caisses avaient été désormais évacuées. Zen ne se chargeait plus que d’en installer certaines l’une des barques dans lesquelles ils étaient venus. Peut-être étaient-elles dédiées à la demeure du Capitaine ? Ce dernier n’était définitivement plus visible, néanmoins Kemyca semblait, elle, ne pas les avoir oublier. « Vous pouvez désormais disposer. Rentrez et attendez les ordres suivants. » Hé bien… Ce n’était pas exactement comme s’ils s’attendaient à un quelconque merci mais enfin. Aura n’en pouvait définitivement plu. Alors qu’elle s’apprêtait à rejoindre la barque dans laquelle les matelots qui rentraient s’entassés, Zen lui fit signe d’approcher sur l’autre embarcation. « Tu veux te joindre au dépôt de la dernière cargaison ? » Hm… C’était… inhabituel de sa part de faire une telle proposition ? Zen avait été chargé de mener les approvisionnements destinés à certains commerces de Tek’ilala. Le Zik’i présentait un caractère posé et même peu chaleureux lorsqu’il s’agissait de travailler alors qu’à cet instant des lueurs dansaient dans ses iris bleutées, réconfortantes. Ou juste avenantes ? « Oui. » S’empressa-t-elle finalement de répondre, incapable de résister à cette occasion particulière, avant de le rejoindre sans plus attendre afin de ne pas le retarder davantage.

Les ballotements produits par les remous du canal étaient dès plus agréables en cette heure déclinante de la journée. Cela faisait un moment qu’Aura n’avait pas apprécié quoique ce soit, se laissant simplement guider jusqu’à leur destination, se permettant - une fois n’était pas commune - d’apprécier l’air chargé d’odeurs peu agréables mais qui avait pourtant un étrange pouvoir vivifiant. Les bâtiments se ressemblaient tous les uns les autres, on ne pouvait donc guère dire qu’il y avait quelque chose de plaisant dans l’observation de cette ville. Si différente des merveilles de la nature mais… l’urbanisation avait un certain charme pour elle qui n’avait connu que la proximité des plantes. Cela… lui manquait néanmoins. Une partie d’elle s’en languissait, son âme semblait commencé à le réaliser, drainant significativement sa salive à cet instant. Y penser maintenant ne serait probablement pas une bonne idée. Heureusement, le refus du bord de la barque contre le muret du canal la ramena subitement à la réalité, alors que Zen rentrait prestement les rames abords avant de s’emparer de l’une des caisses. « On est arrivé, attends moi ici. » La consigne claire n’admettait pas d’échanges, la Fae se contentant d’observer son dos musculeux se bander à chaque caisse soulevée avant d’habilement mettre pieds à terre pour rentrer dans une boutique à quelques pas de là. C’était l’un de ses endroits où du matériel de navigation de qualité était vendu. La devanture n’était pas particulièrement parlante mais l’enseigne qui pendait présentait quelques objets complexes dont Aura n’avait connaissance. Bien qu’on sentait qu’un effort de propreté semblait être maintenu, les aléas de la ville s’incrustaient un peu partout par l’usure et la poussière.

En l’espace de cinq ou six voyages, Zen finit de livrer la cargaison, en revenant chargé d’une bourse apparemment bien lourde qu’il rangea néanmoins sous l’imposante veste brune qui recouvrait son torse. S’installant à nouveau dans leur barque, il commença à dénouer les liens qui la retenaient à un piquet planté dans la pierre du canal, avant de finalement lui rendre une rame. « Tu essayes ? » Ebranlée, face à le demande plus qu’explicite, la Fae se demanda un instant s’il serait judicieux de refuser mais… Probablement pas. Saisissant avec presque retenu la rame, une étrange timidité offusquant ses membres, la Fae suivit de bon coeur les calmes explications que lui fournit le Zik’i. « Certains utilisent la magie comme Kemyca, mais dans le cas contraire il faut savoir faire avec ses bras. Ce ne sera jamais inutile de toute façon. » Finit-il par commenter, à moitié allongé dans la partie avant de l’embarcation, paraissant profiter de ce bref instant d’accalmie, corrigeant par instant la position et les gestes de la Fae de courtes remarques. Autour d’Aura, les ombres débutaient leur lente progression pour recouvrir la ville des pirates pendant qu’elle tentait de s’appliquer. Tout cela… n’était pas si mal ?

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[Q] - Maintenant que j'y pense...

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