Catégorie de quête : XXII. Escorte
Partenaire(s) : Aliénor & Ignatius
Intrigue/Objectif : Aliénor, Ignatius et Nim accompagnent un groupe de jeunes enfants en sortie scolaire pendant deux jours dans les alentours de Valazur.

« Pourquoi ?! » - « Pour la même raison qui fait que je me retiens de te gifler : pour ton bien. ». S’il est une chose qu’on ne pouvait pas reprocher à Sylvana, c’était de ne pas être concise. Elle avait tout l’art de résumer de longs discours en quelques mots, et les adjectifs et superlatifs se faisaient aussi rares que son tact lorsqu’elle se sentait d’humeur maussade. Tandis qu’elle secouait vigoureusement les draps du grand lit, Nim l’observait, outré, bouche bée et les bras ballants. Ils ne s’étaient pas vus depuis bientôt trois saisons, pourtant c’était à peine si elle avait esquivé un sourire en le voyant, et voilà maintenant qu’il allait devoir passer ses vacances à faire du volontariat : « pour son bien ». « Mais c’est complètement injuste, tout le monde va profiter de ses congés, et moi je dois aller me tartiner des gamins ?! » - « Langage ! Ça sera très formateur, et ça te fera peut-être prendre conscience des réalités. À force de passer la tête dans les étoiles et dans les livres, tu vas t’abimer le cerveau. » - « C’est complètement stupide. » - « Pardon ? » - « Ce n’est franchement pas sympa. ». Elle ricana d’un rire sans joie, et ramassa les vêtements qui trainaient dans la pièce. « Pauvre jeune homme contraint à vivre au palais, à étudier à Basphel, à être nourri et logé aux frais de l’Ultimage, pauvre de toi, en effet. » - « Tu sais que je n’ai rien demandé de tout ça, et… » - « Un peu de respect pour ce qui t’es offert, jeune crétin ! Tout le monde se fiche de ce que tu demande ou non, ça ne te donne pas le droit de cracher sur la chance qui t’es offerte ! ». Il alla pour entamer une réponse, mais se rendit compte trop tard qu’il en avait trop dit ; Sylvana continua, poings sur les hanches, furibonde : « Si j’avais eu ta chance, j’en aurais été reconnaissante toute ma vie, et je n’aurais certainement, certainement jamais, ronchonné alors qu’on me demandait de passer deux jours, deux jours ! à accompagner quelques jeunots lors d’une sortie en pleine nature ! ». Le jeune Magicien commença à objecter en levant le doigt, mais la nourrice était lancée, et rien ne pouvait l’arrêter : « Et qu’est-ce que tu comptais faire à la place, hein ? Passer ton temps dans l’atelier, nous accorder le plaisir de ta présence lors des repas, le temps de pouvoir apprécier l’odeur de sueur et les doigts crasseux ? Non merci ! Alors tu vas me faire le plaisir d’afficher ton plus beau sourire et de garder cette langue raisonnée, car tu n’inspire de compassion à personne ! ». Elle termina de plier une couverture, darda sur lui un dernier regard enflammé, et quitta la pièce à grand pas, le menton levé. Nim grogna et donna un coup de pied sans conviction dans une chaise, craignant d’y déranger le tas de tuniques pliées qui s’y trouvait.

Quelques heures plus tard, il se tenait devant le temple de Valazur, jouant du pied avec un caillou qui avait eu la malchance de se trouver sur son chemin. Il était vêtu de son habituel tablier de cuir, dont rien ne dépassait cette fois-ci, après qu’on lui ait interdit d’approcher le moindre instrument tranchant ou perforant des enfants. Du bout de ses bottes, il traçait des débuts de pentacles dans la poussière, les effaçant du talon l’instant d’après, relevant de temps à autres ses yeux azurés vers la porte, toujours fermée. D’un regard circulaire, il balaya le reste de la place : on l’avait informé qu’il ne serait pas le seul accompagnateur, mais pour l’instant, personne en vue. Il doutait fortement de croiser d’autres jeunes de son âge, ce qui rendait la perspective des deux jours à venir de moins en moins plaisante. Il soupira et passa une main dans ses cheveux clairs, avant d’aller s’asseoir sur un petit banc adossé à la façade du temple. À défaut d’enfants et de bénévoles, le beau temps, lui, était au rendez-vous. Un soleil doux surlignait l’ensemble de la campagne alentour, et les rares nuages qui ponctuaient le ciel semblaient éviter d’éclipser le moindre rayon. Le lac, au loin, scintillait comme à son habitude, sa teinte pure s’harmonisant à la perfection avec les berges émeraudes qui en traçaient le contour. Malgré lui et sa mauvaise humeur, Nim ne pu s’empêcher de laisser un sourire se dessiner sur son visage. Il était trop tard pour s’esquiver à présent, alors autant profiter des bons côtés qu’avait cette promenade forcée.

Mots :

Le jeune comte dévala les marches de l'escalier principal et déboucha dans le hall du manoir, le bruit de ses souliers résonnant dans toute la galerie. Sous les regards hautains des ancêtres Worth qui jugeait les passants depuis leurs cadres, l'héritier adopté traversa avec hâte le long couloir, réajustant le ceinturon qui tenait son épée et enfilant soigneusement ses gants noirs. Il était sans surprise en retard pour le départ et pouvait encore entendre les jérémiades acerbes de sa mère résonner contre les murs. Pourtant lorsqu'il croisait des invités, il prenait encore le temps de saluer chacun hypocritement, mettant un soin particulier à enjoliver la raison de son départ. "Le fils Worth part en bénévolat", "Je vous avais dit qu'il avait le cœur sur la main", "Sa générosité nous étonnera toujours..." Le magicien esquissa un sourire en entendant les murmures dans son dos. En réalité la démarche ne venait pas de lui, c'était la comtesse qui avait accepté l'offre pour le compte de son fils, en lui expliquant qu'au lieu de ternir la réputation de la famille avec ses bals sulfureux, il ferait bien de mener quelques bonnes actions en public. Ignatius n'était pas du même avis et regrettait déjà d'avoir dû annuler la réception du lendemain pour une simple affaire de bénévolat scolaire... Enfin, contrarier la maîtresse de maison n'étant pas une solution vivable, il avait capitulé.

En soupirant, il se dirigea vers les écuries, enfourcha un cheval à la robe grise et partit au trot le long du ponton qui reliait le manoir aux rives du lac. Vêtu d'un pantalon en toile pourpre et d'une chemise rouge aux broderies dorées, il était discernable de loin depuis les fenêtres du manoir, jusqu'à ne devenir qu'un point dans l'horizon verdoyant. Chevaucher en pleine journée sous un soleil ardent n'était pas une de ses passions et il s'arrêta deux fois dans les bourgades traversées pour se rincer le visage et les mains dans une fontaine et se rafraîchir à l'auberge. Il aimait particulièrement -même lorsqu'il eut traversé les frontières de son conté- entrer dans un lieu public en portant les armatures de la noblesse, provoquant ainsi des œillades diverses et variées. Résister à la tentation de se faire remarquer était si difficile, qu'il aggrava encore son retard avec ses pauses. Par ailleurs, c'était l'occasion pour lui de faire un peu de publicité pour ses prochaines réceptions, ou pour donner des renseignements sur la vente des Hortensias du manoir.

Plusieurs heures plus tard, il arriva enfin devant le Temple de Valazur et contempla la place du regard. S'y trouvait une classe d'enfants regroupés sur la gauche, ainsi que trois adultes, qu'il pensa être les enseignants responsables de la sortie, ou peut-être les autres bénévoles ? Comment savoir... Il avait à peine écouté les instructions et le descriptif de la mission... Il savait seulement que cela durait deux jours et qu'ils étaient censés aider faute d'enseignants disponibles. Ignatius ne s'était pas imaginé quelque chose d'épuisant et espérait profiter de l'occasion pour faire des rencontres. Mais aucun adulte présent ne semblait correspondre au type de personnes avec lesquelles il pouvait s'entendre rapidement, sauf peut-être la jeune femme qu'il avait entre-aperçu. Quant aux enfants... Autant dire qu'il ne se sentait pas complétement à l'aise en leur présence et n'était vraiment pas habitué à en avoir dans son entourage proche. Souvent, les familles des serviteurs ne logeaient pas dans la même partie du domaine que lui et même dans le cas inverse, les enfants étaient à l'école, ou dans la basse-cour et les jardins. Étouffant un soupir quelque peu flemmard, le magicien descendit de selle et laissa sa monture à l'ombre du bâtiment avant de s'approcher pour se présenter et s'excuser du retard. Maintenant qu'il était là, autant commencer d'un bon pied, avoir l'air aimable et se montrer agréable. Il avait tout de même eu la présence d'esprit d'acheter des beignets à la confiture pendant l'une de ses pauses, et de ne pas tous les manger pendant le voyage. Le magicien présenta la corbeille aux enfants et profita de la diversion pour s'intéresser aux accompagnateurs.

Mots : 727 et j'ai envie de beignets