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 De feu et de glace. [Solo]

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Dim 20 Nov 2016, 11:36

Tirée d’un sommeil tourmenté, la jeune femme se réveillait difficilement. Ses draps enroulés autour de son corps l’empêchèrent de s’étirer en toute tranquillité. Sans chercher à comprendre de quelle manière elle s’était retrouvée ficelée de la sorte, elle porta une main à l’une de ses tempes. La migraine naissait sitôt qu’elle ouvrait les yeux et ne la quittait pas avant que l’air chargé de douceur de la nuit ne parvienne à ses poumons. Et dès lors qu’elle posait le pied par terre, une effroyable torsion agitait son estomac, lui rappelant à grands renforts de nausées que nier son état ne suffirait pas à le faire disparaître. Depuis son retour de Caelum, elle n’était plus la même. Ses espoirs s’anéantissaient avec les premiers rayons du jour, et de ses rêves de petite fille, il ne restait que des cendres. Le souvenir des histoires qu’elle écoutait autrefois, le coeur frappé d’étoiles, ne servaient plus aujourd’hui qu’à assécher la poussière qui remplissait son propre vide. Cela ne rimait à rien. Le mensonge la cernait de toutes parts, et elle ne pouvait se défendre face à une si grande trahison. Une déchirure que la Rehla ne devait qu’à elle-même. Son imprudence lui coûtait un prix qu’elle n’était pas prête à payer. Son bras étendu rencontra un individu dont elle ne connaissait que trop bien le sourire. Jacob se tenait à ses côtés et savourait à pleines dents sa plus belle victoire. « Tu as une sale mine, ce soir. On ne peut pas dire que ta santé s’améliore. » Elle ne répondit pas.

Peu à peu, Callidora se redressa. Cela faisait plusieurs semaines qu’elle ne sortait plus de chez elle, et ses rares promenades au sein de son jardin représentaient son seul réconfortant. Le langage inaudible des fleurs et des fontaines possédait un pouvoir indicible qui apaisait quelquefois les détours de son âme. Comment pouvait-elle porter une vie, elle qui n’était qu’une moitié ? Le jeune homme lui tendit une assiette dont l’odeur lointaine la révulsait. D’un signe de tête, elle déclina sa proposition. « Il faut que tu manges si tu ne veux pas tomber malade. Nous sommes inquiets pour toi. Que tu passes tes journées à discuter avec Kamal lorsqu’il s’occupe de toi alors que tu plonges dans le sommeil aussitôt que j’arrive m’indiffère. Tout ce qui compte, c’est que tu finisses par aller mieux. » Avec une tendresse presque innocente, le Sorcier flattait sa joue, laissant ses doigts glisser sur la blancheur d’une peau qu’il chérissait et qu’il désespérait de voir dépérir. L’espoir qu’elle retrouve la raison, il l’avait depuis longtemps laissé de côté. Lui ne parvenait à comprendre ce qui détruisait cette femme qu’il aimait sans pouvoir imaginer qu’elle lui appartienne une seconde. Cela le blessait, et il tirait de cette blessure la rage qui le maintenait en vie. Une convulsion tordit le ventre de la brune. Habitué à ce désolant spectacle, Jacob tendit la bassine dans laquelle elle rendit ce qui restait de son dernier repas. Une moue contrariée prit place sur ses lèvres. La convaincre de manger allait être impossible.

Lui intimant de ne pas bouger de la chambre, la Rehla descendit de son lit. Qu’on la surveille comme une infirme incapable de tout l’agaçait, de temps à autre, et la solitude faisait entendre son appel. Avec calme, elle défit le peignoir de soie noire qu’elle portait, provoquant chez le Sorcier un rougissement éclatant, avant d’ouvrir la fenêtre qui menait à sa terrasse. Une fois à l’extérieur, elle s’arrêta. La lumière de la Lune soulignait son corps de fins traits d’argent, et nue face aux étoiles, elle paraissait libre. Ses pas la portèrent jusqu’au jardin sans qu’elle ne s’en aperçoive. Cela arrivait souvent. Ses membres se dotaient d’une volonté propre et refusaient d’attendre l’aval de son esprit. Comme un nuage qui flotte sur le monde, elle marchait sur l’herbe, insouciante, légère, l’oubli au bord des yeux. Seulement, sa conscience ne s’endormait jamais longtemps. Ses doigts se serrèrent autour d’une chose impalpable. Sa déambulation de fantôme ne la menait à rien, et les astres célestes se figeaient dans un invraisemblable mutisme. Une telle solitude déchirait ses entrailles plus sûrement qu’une lame. Arrivée devant l’une des fontaines de pierre, elle s’assit sur le rebord, laissant son regard dériver sur le miroir liquide. Une dague dont elle connaissait par coeur la forme apparut entre ses phalanges pour se loger vers son abdomen. Elle soupira. Chaque soir, elle venait là, et chaque soir, le métal appuyé contre son ventre, elle implorait les cieux. Toutes à ses prières, elle raffermit sa poigne et poussa de quelques millimètres sur sa chair fragile. Soudain, une main se referma autour de la sienne. « Il existe une autre solution, Callie. » La jeune femme releva la tête vers celui qui ne savait rien. Kamal, une fois de plus.


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Dim 20 Nov 2016, 11:38

Des bourdonnements incertains s’entrechoquaient sous son crâne. La brune ne savait plus ce qu’elle devait faire. La découverte de sa petite distraction impliquait de fâcheuses conséquences, et la surveillance désespérante à laquelle ses compagnons la soumettaient s’en trouverait renforcée. En fin de compte, il fallait qu’elle reprenne les choses en main. Desserrant les phalanges avec une lenteur douloureuse, elle laissa tomber la dague. Le choc se répercuta à l’intérieur de sa poitrine en ondes illusoires. Délaisser la fontaine lui paraissait impossible. Elle ne comptait plus les confidences silencieuses faites au bassin de pierre. La main de Kamal se glissa dans la sienne. « Il est temps de rentrer à la maison. » Ce fut lui qui la mena vers sa chambre. Comme une poupée de porcelaine aux yeux éteints, elle suivait sans parler ni réagir, détachée de son propre corps, insensible à son propre esprit. De légers mouvements agitèrent son ventre lorsqu’elle franchit finalement la porte. Ses doigts se détachèrent de ceux du Chaman, et elle s’avança vers l’ombre pour retrouver sa décence. Jacob posait des questions qu’elle n’entendait pas. Ses poches se remplirent d’objets en tout genre à une allure frénétique, et elle attrapa les carnets auxquels elle n’avait pas touché depuis plusieurs semaines. Cesser de se comporter en cadavre lui insufflerait peut-être la divine brise de l’énergie. Au moins fallait-il essayer. « Nous partons. » Ses premiers mots donnèrent naissance à un silence absolu que personne n'osa briser.

L’attente aurait été intolérable. Sans se soucier davantage de ses camarades d’infortune, Callidora s’empara des feuillets qu’elle conservait précieusement. Ses recherches ne servaient plus à rien. Pour l’avoir trop ressentie, la tristesse ne la touchait plus. D’un air parfaitement calme, elle se dirigea vers la salle à manger. Sa magie s’éveilla dans l’âtre. Le papier grésilla longtemps. Une fois que ses écrits furent brûlés, elle retourna à son bureau, délogeant une bourse à la taille conséquente qu’elle tendit au Chaman. « Engage qui tu veux, et fais transporter tout ce qu’il y a ici à la maison de ma mère. Vends mes bijoux, s’il le faut, je m'en moque. À la prochaine pleine lune, je reviendrai, et tout devra être là-bas. Et ne proteste pas. » Le brun ne lui résista pas une seconde. L’allégresse de la voir reprendre vie faisait chanter son coeur, et il s’éloigna sans demander son reste. Quel qu’en soit le prix, elle possédait sa confiance et sa dévotion. La Rehla le regarda partir sans ciller avant de se tourner vers le Sorcier incrédule. « Prends tes affaires, et viens avec moi. » Qu’il refuse ne lui traversa même pas le crâne. Certains jours, mieux valait lui obéir. Avant de sortir, elle écrivit une lettre pour Syveth et la déposa où personne d’autre que lui ne saurait la trouver. Jetant un dernier regard sur les rayonnages de sa bibliothèque, prêts à céder sous le poids des manuscrits, elle esquissa un sourire inquiétant.

C’était au beau milieu de la nuit que se révélaient les véritables splendeurs de la Cité des Astres. Les incursions du brun au sein de la ville se résumaient aux rares promenades qu’il faisait autrefois en compagnie du Chaman, et même s’il ne savait rien du peuple qui l’entourait, il s’efforçait de ne pas se faire remarquer. Prétendre qu’il s’agissait d’un lieu de paix créé par les Magiciens où elle avait trouvé refuge avait évité bien des ennuis à Callidora, et la jeune femme n’avait pas eu à s’expliquer davantage pour que le brun boive ses paroles. C’était l’avantage, avec les imbéciles. Dissimulée par une large capuche, elle ne croisa aucune de ses connaissances et put se frayer un chemin à travers les passants sans difficulté. Jacob s’essayait à la discrétion. Que ses ennemis apprennent qu’il se cachait chez eux depuis des mois lui attirerait de sacrés problèmes. « Qu’est-ce que tu mijotes ? » La Rehla ne répondit pas. Sa mince silhouette frappait les pavés avec une détermination inattendue, et quiconque se serait mis en travers de sa route aurait sans doute subi quelques dommages. À pas vifs, ils laissèrent les rues enjouées derrière eux, et le murmure des mélodies qui s’y jouaient caressa à peine leurs oreilles. Un instant, elle resta immobile, s’offrant une ultime contemplation. Jamais les étoiles n’avaient brillé si fort sur la cité. Une larme perla aux cils de la brune alors qu’elle quittait Lua Eyael. « Amène-moi auprès de ta famille. »


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Dim 20 Nov 2016, 11:41

Le Sorcier écarquilla les yeux. Avait-elle perdu la raison pour exiger une pareille visite ? Depuis deux ans, il sillonnait les routes sans savoir où il allait, cherchant seulement à effacer la honte de ses origines. Appartenir à une lignée de Magiciens était indubitablement le plus lourd fardeau qu’il portait, et chaque acte plein de noirceur qu’il commettait était une excuse adressée aux Aetheri. Croiser sa mère partie à sa recherche lors de la guerre avait suffi à remettre son existence entière en question, et une terreur sourde effleurait ses entrailles dès qu’il se remémorait la puissance de la doyenne. Sans répondre, il se contentait de marcher vers une direction hasardeuse, conscient que la brune parviendrait à ses fins d’une manière ou d’une autre. Et il détestait être un moyen, lui qui aurait voulu être sa raison de vivre. « Ludmilla n'est pas arrivée à la tête de votre famille sans détenir de nombreux pouvoirs. Elle pourra me débarrasser de cette chose. Je suis sûre que je saurais me montrer suffisamment convaincante pour qu’elle accepte de m’aider. » Jacob serra les dents. Qu’attendait-elle de lui ? Dégoter un Magicien en mesure de lui indiquer le chemin du manoir était largement dans ses capacités. « Non, je ne peux pas. » De toutes ses forces, il résistait. Les souvenirs des humiliations que son frère lui administrait autrefois rongeaient son crâne pour le protéger de toute sorcellerie qu’elle aurait pu employer pour le faire céder. « Ne sois pas ridicule. Tu n’auras même pas besoin d’entrer. » La certitude que la doyenne réglerait son problème dans les plus brefs délais gonflait le coeur de la Rehla d’enthousiasme, et elle ne tolérerait aucun refus.

L’obscurité ne permettait pas au Sorcier de distinguer les traits de son visage. À bien des égards, Callidora avait parfois le caractère d’une véritable Démone. Sans doute était-ce un caprice qu’elle abandonnerait en cours de route. Une Magicienne ne tuait pas un fœtus, et même s’il doutait de l’essence de Ludmilla, elle ne voudrait jamais accomplir un tel acte. Et surtout, sa lâcheté naturelle lui interdisait de retourner auprès d’elle. Savait-elle la profondeur de sa demande ? L’espace d’un instant, il s’enfonça davantage dans son manteau, saisi par le froid. « En échange de ce service, je suis prête à t’accorder ce que tu voudras. » Une idée fusa de ses méninges paralysés. Obtenir ce qu’il désirait depuis des années sans être en mesure de l’avoir était une proposition alléchante. Sa tête se secoua doucement. Anéantir sa lignée était un acte qu’il devait accomplir seul, même s’il lui fallait patienter encore. Plus qu’un massacre, ce serait un engagement définitif envers sa véritable nature. La Rehla lui laissait tout le temps de réfléchir. La contrepartie était à la hauteur de ce qu’elle voulait, et elle savait déjà qu’il ne pourrait refuser. Quant au risque qu’elle prenait, cela n’avait aucune importance. Que l’enfant disparaisse à jamais primait sur tout. Les mots qui s’échappèrent des lèvres de son acolyte formulèrent une demande imprévue. « Marions-nous. » La jeune femme s’arrêta, le coeur serré. Se débrouiller par elle-même lui apparut soudain comme la seule solution possible. Accepter impliquait des conséquences tout à fait indésirables. Et pour son insolence, elle l'aurait volontiers gratifié d'une gifle. Seulement, la magie faisait toujours effet. Sa réponse se formula sans qu’elle n’y prenne garde. « Marché conclu. »

Le voyage se déroula sans encombre. Résister aux avances du brun présentait de plus en plus de difficultés, et maintenant qu’il se savait bientôt lié à elle, il manifestait un empressement téméraire. La jeune femme trouverait un moyen de lui échapper, en temps voulu. Et s’il se montrait réticent, elle saurait employer sa magie à bon escient. Lorsqu’elle aperçut la silhouette brumeuse du manoir, elle frissonna. Cet endroit ne lui inspirait guère confiance pour un repaire de Magiciens. Il fallait avouer que l’heure matinale à laquelle ils arrivaient n’arrangeait rien. Le jour se dévoilait à peine, et la lumière réconfortante du Soleil ne se faisait pas encore sentir. Le paysage perdait son obscurité peu à peu, comme si un artiste revenait à la raison après avoir noirci ses dessins. « Je ne sais pas s’ils vont accepter de nous recevoir. La doyenne n’est peut-être même pas là. » Callidora balaya ses doutes d’un revers de la main. Le corps tout entier de Jacob se tendit. Sa main tremblante se leva pour signifier sa présence. Si les membres de sa famille se levaient toujours à la même heure, ils devaient déjà savoir que d’indésirables invités allaient frapper à la porte. Le Sorcier rabattit sa capuche sur sa tête. Hors de question que celui qui ouvrirait reconnaisse le chagrin et le trouble qui luttaient dans ses yeux. Le battant de bois grinça. Les formalités n’étaient pas nécessaires. « Je viens voir Ludmilla. » La main de Nicholas se crispa sur la poignée. Sa chevelure rouge flottait dans l’embrasure.


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Dim 20 Nov 2016, 11:44

À travers la porte entrebâillée, la jeune femme percevait la colère de celui qui se tenait encore dans l’ombre. Les conflits familiaux creusaient en elle une indifférence affichée, et en voyant Jacob pénétrer dans le manoir, elle sut instantanément quelle serait la réaction de son frère. D’un geste brusque, il attrapa le Sorcier par le col pour le plaquer au mur. Nul besoin de connaître leur histoire pour deviner lequel des deux avait hérité de la puissance de leur lignée. « Tu ferais mieux d’avoir une bonne raison de revenir ici et de vite me l’exposer avant que je ne tranche la gorge. » Sans prêter attention à leurs électriques retrouvailles, elle ferma en douceur le battant de bois, chassant la fraîcheur matinale. Un délicat parfum flottait dans les airs. Occupée à identifier son propriétaire, elle ne se soucia guère des enfantillages fraternels. Un ricanement moqueur s’éleva. « Tu es très agréable, pour un Magicien. Toute cette agressivité te rendrait presque attirant. » La seule réponse que reçut le brun fut une gifle conséquente qui fit trembler le lustre au dessus de lui. La situation ne tarderait pas à dégénérer. Callidora percevait aisément l’aura de ténèbres qui entourait son compagnon de voyage, et elle savait que seule la faiblesse de sa magie l’empêchait d’anéantir son agresseur sur le champ. « Ça suffit. » Implacable, la voix semblait sortie du vide. La Rehla apprécia tout de suite ce timbre autoritaire. Les deux jeunes hommes ne bougeaient plus d’un poil, comme si le temps avait suspendu sa course.

Une silhouette à la haute stature se forma devant la brune. Celle-ci ne recula pas. La renommée de la lignée de Jacob avait beau être minime, un clan de Magiciens ne survivait pas à ses ennemis sans disposer de grands pouvoirs. Il lui fallait se résoudre à la prudence. « Lorsque l’on reçoit la Chrysalide, il est de bon ton de faire preuve d’éducation. » La jeune femme sourit. Les gens qui la reconnaissaient se faisaient rares. Rester discrète allait être compliqué. Cependant, qu’il connaisse son identité ne changeait rien. Nicholas laissa son frère de côté et s’approcha de l’homme à la chevelure grise. Le ton acerbe de sa voix ne trompait personne. Une œillade assassine en direction de Jacob, il fronça les sourcils. « Vous devriez revoir vos fréquentations. » « Nicholas. » Le grondement qui sortit de sa gorge fit office d’avertissement. L’aîné regarda son père d’un air courroucé avant de tourner les talons, ne jetant plus un regard vers le Sorcier. La Rehla balaya l’incident d’un geste de la tête. « Ce n’est rien. La jeunesse est impétueuse. » Le patriarche la regarda d’un air las. « Et dire que vous avez le même âge... » L’espace d’un instant, ses yeux se perdirent dans le vague. Sans s’encombrer de davantage de politesses, il les mena vers le salon. Le retour de son fils semblait ne pas le toucher. En parfait hôte, il s’éclipsa une seconde pour aller chercher des boissons. Toujours dissimulé par sa capuche, le Sorcier se tourna vers Callidora. « Je n’aurais jamais dû revenir. » Elle haussa les épaules.

La brune eut tout le loisir d’observer la décoration avant que le maître de maison ne revienne, accompagné de quelques victuailles qui se déposèrent d’elles-mêmes sur la table. Après quelques formules d’usage, un léger silence s’installa. Manifestement, il ne voulait pas la mettre mal à l’aise, mais sa présence le troublait. Sans doute se demandait-il ce qu’elle faisait là, et elle ne pouvait blâmer sa curiosité. Seulement, Jacob ouvrit la bouche le premier. « Comment se porte cette charmante famille ? » Les doigts de Tommen se crispèrent autour du biscuit qu’il tenait et le réduisirent en miette. L’éclat tendre de ses yeux verts s’estompa pour prendre la dureté de la glace. « Ta mère est à l’Asile. Elle n’a pas supporté ton départ. » Il fallait admettre qu’il se maîtrisait mieux qu’elle ne l’aurait pensé. Les dents du Sorcier se serrèrent alors qu’il s’immobilisait. Déambuler à travers la pièce pour se détendre ne servait à rien. Ces gens-là ne méritaient pas de vivre. Dès qu’il partirait, il irait délivrer sa mère de la folie familiale. Elle seule avait compris ce qu’était la vie, et elle ne méritait pas de finir ses jours au milieu d’insensés. « Bien entendu. Je vois que les habitudes n’ont pas changé. Enfermer un indésirable au lieu de lui venir en aide reste la meilleure solution, n’est-ce pas ? » La petite joute verbale n’avait rien de déplaisant, et en d’autres circonstances, la brune aurait sans douté apprécié un tel spectacle. « Puis-je voir Ludmilla ? » L’heure n’était pas aux disputes.


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Dim 20 Nov 2016, 11:46

D’une humeur fiévreuse, Jacob entama l’ascension des escaliers. Refusant toujours de montrer son visage à ces êtres qui ne comprenaient pas qui il était, il ne restait que ses doigts tremblants et sa démarche hésitante pour savoir que la peur lui vrillait les entrailles. Son corps tout entier lui hurlait de s’enfuir et de ne jamais remettre les pieds dans ce manoir maudit. Et pourtant, il continuait à grimper, le ventre noué à l’idée de rencontre la doyenne une deuxième fois. Heureusement, la récompense serait à la hauteur, et Callidora saurait le mener vers les rivages inespérés de la puissance. Seul, il ne parviendrait pas à devenir cette créature de malheur que son coeur espérait de toutes ses forces, et sa vengeance s’effacerait, annihilée par sa médiocrité. Ses prunelles azur furetaient en tous sens par crainte de découvrir l’ombre de Nicholas raser les murs. La main sur son sabre, il tressaillait au moindre son. L’impression d’être traqué par des souvenirs le tenaillait, et il n’était plus en mesure de discerner le vrai du faux. Le parfum de roses qui embaumait les airs lui arracha un frisson. Sans le vouloir, il se remémorait ses après-midis à jouer avec les enfants de la famille, et ses séances d’entraînement acharnées. La déception dans le regard de son père lorsqu’il échouait là où Nicholas brillait. Ses poings se serrèrent. Il posa un pied sur la dernière marche. Personne n’avait jugé bon de venir lui souhaiter la bienvenue. Au moins avaient-ils suffisamment de jugeote pour ne pas se montrer à lui.

La porte du bureau à demi ouverte se tenait face à lui. Massive, imposante, elle lui coupa le souffle un instant. Que penserait son ancêtre du chemin parcouru depuis leur dernière rencontre ? Cette fois-là, elle n’avait pas même posé les yeux sur lui, si ce n’était pour lui donner un ordre, et il doutait que sa présence lui procure le moindre plaisir. C’était sans doute son affection envers Olympia et ses faiblesses qui lui avait sauvé la vie. Oui, il admettait : cette femme l’effrayait. Une vision vint danser devant ses pupilles dilatées par l’appréhension. Son mariage serait celui d’un prince, il se le promettait. Et un jour, lorsque sa puissance s’épanouirait, il irait faire payer à cet odieux Démon les outrages que sa bien-aimée avait subis. Le sortilège resserrait son emprise. Cela insuffla en lui un vent de courage. « Pardonnez-moi de vous déranger, Doyenne. » La silhouette menue ne bougea pas d’un millimètre, indifférente à ses excuses. Un sourire qu’il ne pouvait voir arquait ses lèvres. Saisir les occasions pour en tirer les plus beaux fruits était un art dans lequel elle excellait. « J’ai besoin de vos services. Pour la femme que j’aime. » La blonde se redressa sans crier gare, se détachant du fauteuil de cuir où elle reposait. Un rire amusé précéda sa réponse. « Ne te fatigue pas. Je sais déjà ce que tu veux, Jacob. Je peux l’aider, mais à une condition. Ta place n’est pas avec les chiens qui courent le monde. Un simple échange, et tu pourras la débarrasser de son fardeau. » Le timbre impérieux de sa voix l’envoûtait. Comment aurait-il pu refuser ? Sa raison flancha. Il s’oubliait.

Dans une certaine mesure, la compagnie de Tommen se révélait plus agréable qu’elle ne l’avait escompté. En dehors de ses aspirations dégoulinantes de gentillesse et de sacrifice, le père de Jacob possédait un certain charme, et le ton enjoué qu’il prenait pour lui raconter les bêtises de ses fils la mettait de bonne humeur. Cela ne représentait qu’une distraction destinée à faire gagner du temps à la doyenne, et même si elle en ignorait la cause, elle profitait simplement de cet instant de gaieté. Depuis des semaines, elle ne souriait plus, et les muscles de ses joues avaient fini par s’engourdir. « Vous n’êtes pas amoureuse de lui. » Un sujet qui la contraria. Les plaisanteries cessaient toujours, à un moment ou à un autre. Se redressant légèrement, elle se mordit la lèvre inférieure. Le mensonge ne lui serait d’aucune utilité. « Non. C’est la magie qui me lie à lui, rien de plus. Un sortilège dont je ne comprends pas l’origine et dont je ne peux me défaire. » Haussant les épaules comme si cela ne présentait pas la moindre importance, elle se servit une tasse de thé qu’elle tint quelques secondes. La porcelaine brûlante lui réchauffa les doigts. « Lorsque je l’ai rencontré, il pourchassait une Démone pour ses beaux yeux. Je lui ai offert un toit et une relative sécurité. Je ne peux pas lui donner davantage. » L’homme hocha la tête d’un air tranquille, rassuré par les propos de la jeune femme. Que son fils suive un chemin différent des membres de sa lignée entretenait ses inquiétudes, mais le savoir entre de bonnes mains suffisait à le rassurer. Tout ce qu’il espérait, c’était que Ludmilla se montrerait clémente à l’égard de leurs invités.


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Dim 20 Nov 2016, 11:48

Une brume étrange pesait sur son esprit. Le Sorcier observait la blonde s’approcher de lui. Sa langue de vipère sifflait à ses oreilles pour le transformer en une créature docile. Lui céder aurait été facile, et par les Aetheri, comme il en avait envie ! Cela devenait presque intolérable. Il fallait plaire à cette femme, et laisser l’autre. Que lui importait le sort d’une inconnue à laquelle il ne devait pas sa naissance ? Ludmilla tournait autour du jeune homme, ravie de pouvoir modeler ses méninges aux capacités très modestes. Cela faisait plusieurs décennies que manipuler les esprits ne l’amusait plus. Seulement, régner sur son petit monde d’une main de fer restait une consolation distrayante, et elle n’appréciait pas que l’un de ses pantins tente de lui échapper. Maintenir la lignée ne présentait pas d’autre intérêt que l’empêcher de sombrer dans l’ennui, et sa fierté grandissait à mesure que la famille s’élargissait. Quiconque la quittait ne méritait pas de la revoir. Mais il s’agissait de Jacob. Des derniers rejetons, il avait toujours été son préféré, et les minauderies de Nicholas n’y changeaient rien. Un élan de conscience s’empara néanmoins du brun. « Je… Ce n’est pas ce que vous croyez. Callidora est peut-être enceinte d’un monstre, mais je ne veux pas qu’elle perde son enfant. Assurez-vous qu’il ne puisse être tué avant de voir le jour, et je ferais tout pour vous satisfaire. » La doyenne haussa les sourcils. Une chose était sûre. À la différence des autres, il possédait un certain talent pour la surprendre.

À la manière d’un rapace, Ludmilla se balançait autour de sa proie, attentive au moment où il baisserait sa garde pour frapper. Il fallait avouer que la proposition ne tenait pas debout. Les motivations de son descendant lui restaient mystérieuses, et elle se demanda s’il n’avait pas simplement perdu l’esprit. Sa magie exerçait parfois une telle emprise sur les gens qu’elle faisait involontairement éclater leurs neurones. L’éclat froid et déterminé de son regard dissipa ses doutes. Quel curieux individu. « Ta stupidité n’était donc pas une légende. » Ce n’était guère une provocation, mais un constat d’une affligeante sincérité. Que pouvait-elle faire d’un homme qui se laissait piéger par une autre ? « Je sais que je ne suis pas un génie. Pas encore. Je veux juste qu’elle souffre, et qu’elle se rappelle qu’on ne me jette pas impunément. » La colère fit trembler ses cordes vocales. L’encre sombre qui tâchait son coeur ne lui autorisait pas de pardonner, et il haïssait la Rehla pour l’avoir banni de sa maison quelques mois. Qu’elle s’éprenne d’un monstre alors même que la magie les unissait le rendait fou, et il comptait bien lui faire payer son affront. C’était à son tour de subir l’injustice, et à ce jeu-là, il était bien meilleur qu’elle. La doyenne fit mine de réfléchir, ses doigts laqués de noir tapotant sur le bureau lustré. « Bien. En échange, tu resteras au manoir pour suivre un entraînement digne de ce nom. Ce n’est pas négociable. Je vais m’occuper de ta promise. Débrouille-toi pour attirer ton père ailleurs. » Jacob acquiesça doucement avant de disparaître. La sensation de gagner la guerre était divine, et le prix importait peu. Un serpent ne craignait pas son propre poison.

La jeune femme ne comprenait pas ce que le Sorcier reprochait à son père. Rien en lui n’était repoussant, et l’autorité indiscutable qu’il possédait était parfaitement justifiée. S’apprêtant à poser la question pour éclaircir l’idée qu’elle se faisait de la famille, elle s’interrompit. Une capuche noire dépassait de la porte sans pénétrer dans la pièce. « Elle va venir dans un instant. Père, j’aimerais vous parler. » Une lueur d’espoir fit briller les yeux vert d’eau de Tommen. Avait-il finalement décidé de revenir à la maison ? La brune frissonna. Ses espérances seraient réduites à néant dès qu’il passerait le seuil pour s’entretenir avec son fils. Les paroles de Jacob empestaient le mensonge. D’un air très calme, l’homme se leva et lui proposa de se diriger vers une autre pièce, s’excusant auprès de son invitée. Sans plus attendre, elle délaissa le canapé pour s’approcher de la bibliothèque. Un nombre incalculables d’ouvrages s’étendait sur les rayonnages, la majorité écrite dans la langue des Magiciens. Peut-être trouverait-elle là un manuscrit qui éveillerait sa curiosité. Pour atténuer son impatience, elle s’amusa à déchiffrer les titres les uns après les autres, mettant en pratique son récent apprentissage. Soudain, l’atmosphère de la pièce se chargea de magie. Une présence derrière elle la fit sursauter. « Savez-vous qu’il est dangereux de faire appel à moi ? » Callidora laissa un sourire fleurir sur ses lèvres et se retourna. « Pourquoi croyez-vous que je sois là ? » Ludmilla croisa les bras sur sa poitrine. Jacob ne lui avait pas menti à propos de cette femme. La mener en bateau ne serait que plus délicieux.


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Dim 20 Nov 2016, 11:49

La jeune femme se débarrassa de ses vêtements et s’allongea sur la table. Suivre les instructions d’une inconnue à la réputation ombrageuse ne l’enchantait guère, mais elle ne pouvait se permettre d’établir d’autres exigences. Après tout, elle ne connaissait aucun des membres de cette famille en dehors de celui qui n’en faisait plus partie, et elle s’estimait chanceuse que sa requête soit acceptée. Sillonner le monde à la recherche d’individus en mesure de régler son problème ne la tentait absolument pas. Même s’il fallait qu’elle supporte l’ignorance quelques minutes, elle savait que le petit contretemps qui envahissait son ventre retournerait au vide avant la fin de la journée. Néanmoins, que la doyenne n’ait demandé aucune compensation l’étonnait. Accéder à une pareille puissance n’était possible qu’en servant toujours ses intérêts. Peut-être cette femme était-elle une véritable Magicienne. S’interroger sur ses motivations ne lui était pas d’une grande utilité. Ludmilla lui avait recommandé de se détendre, et pour cela, elle devait faire taire ses pensées. La certitude d’être délivrée de son fardeau lui octroya le calme nécessaire. Elle ferma les yeux. La doyenne esquissa un sourire. Cela faisait longtemps que personne ne s’était abandonné à ses bons soins de la sorte. Sans se presser, elle s’approcha de la caisse qu’elle avait amené et en tira un bocal à la contenance surprenante. Imaginer la tête des membres de sa lignée s’ils découvraient le rituel auquel elle s’adonnait la fit rire.

La blonde retourna le récipient de verre qu’elle tenait au-dessus du corps de la brune. Celle-ci sentit quelque chose de froid chuter sur son ventre et sursauta. Ludmilla entama une psalmodie incompréhensible. Les mots insaisissables s’évadaient de ses lèvres en un torrent chaud et profond, la promesse d’une magie que tous semblaient avoir oublié. La jeune femme immobile eut l’impression que son esprit vacillait face à la litanie, et elle sentait cette chose inconnue courir sur sa peau nue sans oser comprendre. La peur ouvrit ses prunelles dorées. La carapace se teintait d’éclats noirs. La doyenne coupa la chair fragile de Callidora d’un geste de la main. Quelques gouttes d’un rouge ancien s’accumulèrent à la surface de la blessure. L’animal cessa sa promenade et répondit à l’appel. Sa petite tête brune s’agita en direction de la plaie. Au moment où il parvenait à l’entaille, son corps fut secoué d’un unique soubresaut avant qu’il ne s’immobilise. L’instigatrice du rituel attrapa la carcasse et écrasa son dard pour en extraire avec soin le poison et remplir une fiole. Le sang s’éleva dans les airs pour rejoindre le mortel liquide. Le flacon se consuma à la chaleur des flammes avant de trouver les lèvres de la brune. Une appréhension sourde malmenait ses entrailles, mais la Rehla en avala le contenu d’une gorgée. L’âpreté de la mixture irrita son œsophage, et elle se retint de vomir. Les mâchoires de Ludmilla déchiquetaient le scorpion avec une satisfaction non feinte. La mise en scène fonctionnait à merveille.

Toute cette cérémonie ne servait qu’à masquer une charmante illusion que personne en dehors de la doyenne ne saurait faire disparaître. La force du mensonge s’amplifiait grâce à la naïveté de sa victime, et elle ne perdrait pas en puissance. Nauséeuse, cette dernière se releva doucement. Des points blancs dansèrent devant ses pupilles. À l’affût de la moindre sensation, elle poussa un soupir de soulagement. Rien ne provenait de son ventre. L’étonnante impression qu’une créature s’y logeait pour se nourrir d’elle s’était évaporée, soufflée par la magie comme le vent soufflait les chandelles. « Vous avez réussi. » Son regard doré pétillait de gratitude. La délivrance, enfin. Se laissant aller à une impulsion inhabituelle, Callidora se jeta sur Ludmilla pour la serrer entre ses bras. La blonde venait de la délivrer d’un enfer auquel elle n’aurait pas survécu. La joie envahissait chacun de ses membres, et une seconde, elle eut l’impression d’avoir effleuré les astres nocturnes. Remettre la main sur le responsable de ce léger imprévu ne serait plus un problème, et elle pourrait se tenir face à lui sans honte. Tout était possible. Les nuages s’effaçaient du ciel, et leur voile de chagrin levé promettait des étoiles plus lumineuses que jamais. Une mélodie douce résonna sous son crâne alors qu’elle desserrait son étreinte. Et puis, elle s’immobilisa. Quelque chose en elle avait bougé. Cela revenait. La brune se figea. Il était toujours là. « Qu’avez-vous fait ? » La colère fit trembler sa voix. La doyenne se tourna vers elle. Berner ceux qui espéraient encore ressemblait à l'audace des premières amours.


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Dim 20 Nov 2016, 11:52

Avant de répondre à la furie qui s’annonçait, la blonde se détourna d’elle pour se servir un verre de vin. Le cristal entre les doigts, elle porta le breuvage à sa bouche pour effacer le goût de son dernier repas. Prendre davantage de temps pour parfaire son stratagème lui aurait immensément plu, mais d’autres affaires attendaient qu’elle daigne s’en occuper. D’un geste de la main, elle balaya sa question comme si celle-ci ne présentait aucune importance. « J’ai accédé à la requête de l’un de mes descendants, rien de plus. Personne ne sera en mesure de vous enlever cet enfant, et vous n’en aurez même plus envie. Si vous voulez malgré tout vous en débarrasser, il suffira de l’étouffer de vos mains lorsqu’il sera né. Rien de bien sorcier. » Prenant une dernière gorgée de vin, elle se releva pour quitter la pièce. Les enfantillages ne l’intéressaient pas, et que la jeune femme en face se comporte à la manière d’une adolescente folle de rage la décevait profondément. Il fallait croire qu’elle s’était trompée sur son compte. Geindre sans agir était l’apanage des faibles. Au moins avait-elle récupéré une créature promise à un avenir semé de cadavres et de ténèbres. Callidora s’interposa entre elle et la porte. « Vous ne sortirez pas d’ici avant d’avoir défait votre sortilège. » Ludmilla haussa un sourcil. S’imaginait-elle vraiment pouvoir faire quoi que ce soit allant à son encontre ? La maison regorgeait de gens prêts à mourir pour la défendre, et elle n’avait pas besoin pour réduire la brune à néant.

Toute cette histoire lui donna une désagréable impression de déjà-vu. La Rehla n’était pas la première femme victime de ses innombrables manigances, et elle ne serait pas la dernière. En faire un drame était une attitude de parfaite idiote. « Je ne peux pas reprendre ma magie, et vous ne pouvez pas me tuer sans y laisser la vie. J’ai bien peur que nous soyons dans une impasse. » Seule la satisfaction de savoir Jacob à ses côtés l’empêchait de la faire tomber en poussière. La patience de la doyenne se comptait en secondes, et elle avait déjà accordé un temps précieux à l’interlocutrice qui dénigrait son cadeau. Cela aurait mérité qu’elle finisse la tête clouée à la porte de son bureau. Callidora lui sourit. « Vous menez bien votre jeu, mais je ne suis pas aveugle. » Ludmilla fronça les sourcils. L’inconnue ne pouvait voir clair dans ses multiples stratégies. Personne autour d’elle ne s’en apercevait, et les quelques indices qu’elle laissait par amour du risque ne les aidaient pas. L’insolence dont la brune faisait preuve eut le mérite de la faire s’arrêter. « Que votre lignée soit assez stupide pour ne pas se rendre compte du monstre que vous êtes justifie amplement l’avenir que vous leur réservez. J’espère que cet idiot qui se croit Sorcier vous décevra, et que vous ferez un collier avec ses intestins. » L’envie de retourner le manoir pour mettre la main sur ce traître pulsait au fond de ses veines sans qu’elle ne puisse y céder.

La blonde éclata de rire. Comment pouvait-on allier intelligence et naïveté avec une telle innocence ? Cela la déconcertait. « Qu’il soit amoureux de vous n’efface pas la noirceur qui baigne son coeur. Sachez qu’il dépasse toutes mes espérances. Voulez-vous lui annoncer que votre mariage n’aura pas lieu ? » Callidora secoua la tête. Un visage dansait devant ses yeux pour y allumer la fièvre de la vengeance. Il ne fallait pas qu’elle s’y attache, ou ses désirs tomberaient dans l’oubli à jamais. Le chagrin ne caressait pas encore sa poitrine. Un sourire triste se dessina sur ses lèvres. « Soyez sûre qu’il ne restera pas avec vous, et que lorsqu’il reviendra vers moi, je me ferais un plaisir de lui donner les moyens d’éliminer sa famille. À moins que je ne m’en charge moi-même. » Ludmilla s’approcha de la brune pour la plaquer contre le mur. Le choc résonna à travers toute la maison. Les ongles de la doyenne s’enfoncèrent dans les joues de son invitée. Personne ne menaçait ses descendants impunément. La voix de Tommen s’éleva derrière la porte. Il lui faudrait patienter avant de détruire cette impertinente créature. La glace de son regard aurait pu faire trembler n’importe qui. « Mon cher Jacob a consenti à rester au manoir pour suivre un entraînement digne de ce nom. Oseriez-vous insulter son sacrifice ? » Elle ricana. La jeune femme ne répondit pas. Avant de la relâcher, la blonde lui adressa un dernier avertissement. « Que les choses soient bien claires. L’un de vous ne survivra pas à l’accouchement. » Soudain, une odeur de brûlé parvint à ses narines. Le mur s’embrasait sous les mains de la brune, et une large tâche noire se formait sous ses doigts. La brune disparut sans crier gare. Des cris à l’extérieur sonnèrent la panique générale. Tommen ouvrit la porte d’un geste brusque. « La maison brûle, Nävasha ! » La blonde n’attendit pas davantage et se précipita hors de la pièce. Quelques minutes plus tard, l’incendie prenait fin. Postée à sa fenêtre, Ludmilla observait une silhouette blanche s’évanouir dans la nuit, un parfum âcre dans la bouche. Qu’elle survive et gagne en puissance, et le futur promettait un affrontement des plus réjouissants.


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De feu et de glace. [Solo]

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