La citadelle blanche...

Celle qui paraissait immense autrefois à Rubiel lui était désormais plus familière et beaucoup moins impressionnante. Elle avait su s'émanciper, évoluer parmi les siens pour s'élever à un nouveau stade... certes... aussi insignifiant que le précédent vis à vis d'autrui. Mais pour elle même, c'était une toute autre manière de voir la vie, de se l'imaginer et de la figurer. Elle voyait désormais plus ou moins un avenir à son existence, là où avant elle ne faisait que vivre le jour présent en priant pour qu'il soit meilleur que le précédent. Elle se laissait voguer au grès des turbulences du destin, au grès des envies du monde... Mais maintenant, elle avait envie de faire plus. Maintenant qu'elle s'était montrée capable de faire quelque chose de sa vie pendant diverses périodes, il lui était nécessaire de s'aventurer sur cette voie certes houleuse ne pouvant qu'être bénéfique pour elle si elle réussissait à ne pas tomber entre temps.

Alors, maintenant qu'elle pouvait mêler bonnes intentions et volonté, elle avait trouvé de quoi occuper ses prochains jours. A la citadelle se retrouvait depuis quelques temps un restaurant connu. Elle adorait y passer et déguster bien qu'avec modération les plats qui y étaient proposés. Alors, puisqu'elle n'avait rien à faire de ces jours et qu'elle avait envie de se parfaire dans un art qui lui tenait plus ou moins un cœur, elle avait fait la démarche de demander au cuisinier de l'embaucher pour lui apprendre les secrets du métier. A vrai dire, il était compliqué pour une personne n'ayant aucune base de se jeter directement dans un tel milieu. A la rigueur, elle avait déjà tenté de s'aventurer sur ce terrain une à deux fois pour elle même, mais elle n'avait jamais eu des résultats très convaincants. Il lui manquait la pratique et la théorie, deux choses sans lesquelles elle pouvait encore attendre longtemps avant d'arriver à une finalité prometteuse.

Le chef était aussi un ange, étonnamment, il arborait des traits plus ou moins bourrus et une maturité physique très particulière lorsque l'on savait que la race était éternel. Aucun doute qu'il transpirait l'expérience, il avait cet aura de baroudeur de celui qui avait déjà tout vu dans son domaine. Bien sur, il n'avait pas été très emballé à l'idée d'embaucher une "gamine" qui n'avait aucune expérience en la matière. Bien qu'elle était une fidèle cliente, il préférait de loin qu'elle reste à sa table de cliente plutôt que de venir dans sa cuisine pour le ralentir. Depuis longtemps, il avait voulu transmettre ses savoirs à un apprenti. Plusieurs c'étaient vus défiler un à un pour être l'héritier de cette expérience immense. Tous étaient à la base bien plus doué que Rubiel et avait reçu une formation préalable dans la gastronomie. Mais aucun n'avait su tenir le rythme de ce chef intransigeant. Plusieurs mauvaises langues racontaient que cela était la cause du caractère exécrable du chef.

Mais, Rubiel ne devait plus douter, quand bien même cela allait être dur, il fallait bien qu'elle fonce pour espérer un jour traverser ce mur qui lui faisait face. Bien entendu, si elle allait être embauchée, elle allait avoir un poste de seconde voir de troisième zone. Ce genre de poste que l'on donne à de la main d’œuvre à peine capable d'articuler quelques mots correctement. Mais, il y avait un commencement à tout, et si elle allait devoir laver la vaisselle tout en regardant le grand chef faire, alors, elle le ferait.

Elle fut acceptée, son ardeur et sa volonté à se faire accepter au sein de l'établissement avec finalement plus au chef qui était aussi le gérant de l'établissement. Quand bien même il n'arriverait pas à tirer une quelconque once de talent chez elle, il allait se retrouver avec une travailleuse lui coutant très peu d'argent et capable de faire les tâches les plus ingrates. Il était dans tout les cas gagnant, bien qu'il respectait son engagement à la former s'il s'avérait qu'elle en avait la force et la véritable envie. Pour le moment, ce n'était qu'un travail pour elle parmi tant d'autre, qui allait occuper certaine de ses journées sans pour autant lui garantir quoi que ce soit à l'arrivé...

Mots : 745

Il ne fallait rien espérer de sa première journée, si tôt avait-elle débarqué dans l’établissement qu’elle avait été accueilli par un balais et un sceau. Elle n’avait pas postulé pour le poste d’agent d’entretien mais celui-ci lui avait été donné assez aisément. A son plus grand damne, le chef cherchait à travers cela à tester sa réelle volonté plus qu’avec des simples mots. Puis, elle fallait bien qu’elle s’adapte à sa future maison pour les prochains mois à venir. Bien qu’elle avait aussi un devoir d’ange qui ne lui permettait pas de rester éternellement et continuellement en apprentissage gastronomique.

Le chef étant un ange mais ayant rangé plus ou moins cette partie de sa vie d’un côté, il pouvait néanmoins comprendre les dispositions précaires de la jeune femme. Mais tant pis, cela indiquait juste que quand elle serait présente à ses côtés, elle allait devoirs travailler deux fois plus dur pour rattraper son retard. Histoire de rééquilibrer la balance.

Bien sûr, lorsqu’elle n’avait pas les yeux braqués sur sa zone de lavage qui ne se situait jamais loin de la cuisine, elle avait l’opportunité de contempler la dextérité et le savoir-faire du chef. Bien qu’elle n’y connaissait rien et que celui-ci n’expliquait pas grand-chose, elle arrivait plus ou moins à se graver dans sa mémoire chacun de ses gestes. Enfin… Cela était une sensation qui dépassait la simple mémoire comme l’on pourrait se l’envisager. Elle ne retenait pas avec son esprit mais plutôt avec son corps, souvent elle se surprenait à reproduire les mêmes gestes dans l’air. Si la cuisinait avait pu se résumer par des simples mouvements, alors elle aurait été un génie sans conteste. Malheureusement, c’était un art aussi profond que la magie elle-même. Il y avait de nombreuses branches, tous plus opposées les unes aux autres et pourtant qui tiraient profit de la même origine.

-Rubiel ? Tu as assez nettoyé comme ça. Viens, je vais t’apprendre quelques petits trucs.

Elle hochait la tête tout en écoutant ses indications. Celui-ci paraissait bien complaisant avec elle, peut-être c’était-il prit d’affection pour la jeune femme. Bien que vu la surface récurée, elle avait des sérieux doutes quant à cette supposition. Néanmoins, il se savait sévère et autoritaire, déjà qu’il avait fuir ses précédents apprentis, il ne voulait pas recommencer l’expérience trop durement avec Rubiel qui n’avait même pas les bases. Elle allait devoir apprendre dans le tas mais d’abord, il fallait attiser sa passion et revoir ses connaissances théoriques en la matière.

Alors, il lui montra quelques choses. Elle devait tenter de les reproduire mais elle n’avait pas sa faculté à le faire aussi aisément. Déjà qu’en temps normal, elle n’était pas la plus dégourdie avec ses mains, alors devoir suivre la rapidité d’exécution d’un chef était une épreuve des plus éprouvantes pour elle. Elle acceptait les remarques et réparait ses erreurs quand on le lui indiquait. Ses mouvements étaient incertains alors qu’elle les avait répétés mentalement de nombreuses fois. Mais la réalité était souvent moins agréable que l’imaginaire apparemment et cela ne manqua pas de se faire rappeler à l’esprit de Rubiel.

Par la suite, une fois les premiers « tests » passés, le chef du nom de Grinbiel lui donna une montagne de livre tous plus gros les uns par rapport aux autres. Ils étaient immenses comme jamais Rubiel n’en avait vu auparavant. Et malgré son jeune âge pour une Ange, elle n’en restait pas moins assez âgée pour une race plus « classique ». Ces livres parlaient tous de la cuisine forcément, elle ne fut que plus surprise lorsqu’elle apprit qu’ils ne traitaient que des simples bases de la cuisine. Pas la peine d’envisager une quelconque tentative de faire une recette d’un niveau à peine plus élever.

Pour le moment, comme si elle était sur un terrain d’entrainement, elle allait devoir s’exercer à la tâche. Et si évidement elle n’était pas capable d’assimiler tout ce savoir ancrés dans ces ouvrages, elle allait devoir s’envisager une autre voie professionnel. Pour la première fois, son chef montrait ses premières marques d’intransigeance envers elle. Mais, cela voulait aussi dire qu’il la considérait comme une sérieuse candidate à son rôle d’apprenti. Sans le savoir elle avait déjà fait une partie de ses preuves.Il ne lui restait donc plus que la seconde partie à fournir pour compléter le tout. Elle avait de nombreuses choses à apprendre de lui, cela aurait été dommage de ne pas profiter de cette chance inestimable.

Mots : 744