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 L'heure du Thé [PV Lorelaï]

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Jeu 26 Mai 2016, 16:52

Lillian n’avait jamais rencontré de vampire de sa vie.
Oh, bon, il savait qu’ils existaient, connaissait quelques rumeurs, comme tout le monde. Mais six mois s'étaient passés entre le moment où il avait reçu le baiser, et celui où son géniteur avait finalement décidé de se présenter. Le personnage lui inspirait, plus que la défiance, un sentiment de rejet viscéral. Certes, il était venu le chercher sur un tapis volant pour éviter qu’il ne coule avec le continent du matin calme. Certes, il déclarait l’avoir surveillé de près tout ce temps, et on pouvait supposer qu’il se souciait de sa survie.
Pourtant, Lillian avait failli mourir un millier de fois avant cela. Il avait été perdu, faible. Il s’était laissé dépérir jusqu’au bord de la fin définitive à plusieurs reprises,et, à force de manquer absolument d’un discernement quelconque, s’était parfois mis à dos d’authentiques foules en colère. Surtout, alors qu’il arrivait auparavant à garder l’apparence de la normalité, il se sentait depuis plusieurs mois dans un état de misère, de solitude et d’impuissance inédit.

Bien sûr, il n'était pas du genre à s’appitoyer sur son sort, ou à rejeter la responsabilité sur autrui. Toute sa vie durant, il avait assumé, seul et silencieusement, toute l’horreur de sa petite existence. Mais, alors que ce responsable s'était présenté, odieux, drapé dans une supériorité surnaturelle, parfaitement désinvolte quant à la vie qu’il avait gratuitement et arbitrairement déviée de sa course première, il n’avait ressenti qu’une immense colère.
Oh, pas tout de suite. Au départ, il avait été obéissant, impressionné et désemparé qu’il était, et il avait accepté sans objection de massacrer ces gens du temple d’Edel avant de rejoindre les fjords par la voie des airs.
Et puis, à l’atterrissage, il avait explosé.  
Sa pitoyable rage ne l’avait pas mené bien loin. Il n'avait pas plus réussi à ébranler cette horrible créature blanche et maigre physiquement que moralement. Imperturbable, elle avait ignoré ses cris, ses injures et ses tentatives de le frapper sans ciller. Son maître (puisqu'on en était bien là) l'avait arrêté, las, d’un geste distrait, et laissé pieds et poings liés sur le sol par la magie du sang coagulé.

“Tu as du potentiel,” lui avait-il dit. “Ta vie en tant que magicien était une erreur. Si tu parviens à cesser les pleurnicheries, tu t’épanouiras sans doute en tant que vampire au lieu de crever dans une quelconque geôle. Et, si tu t’abstiens d’être idiot, tu pourrais peut-être même vivre quelques siècles au lieu de quelques années.
Je vais t'enseigner quelques bases. Par contre, je ne serai plus, si tu persistes à chercher la mort, disposé à t’épargner le sort des cretins qui nuisent à autrui sans prendre leur précautions.”

Tu parles.
Tu parles !

Il suffisait de regarder autour de soi pour se rendre compte que la situation était hors de contrôle ! Il y avait une sorte de damier tordu au sol. Des champignons de couleurs douteuses et d’une dimension alarmante bordaient les deux côtés de la route, toute en virages, que celui-ci traçait. En haut, un ciel de plomb, presque palpable, étouffant et mauve.
Et comment était-il arrivé ici, hein ? Je vous le donne en mille.

Saletés d’hallucinations.

Lillian secoua la tête plusieurs fois, un peu comme un petit chien. Il tenta d’y faire le vide, sans succès. Il ferma les yeux, essayant de faire disparaître le paysage imaginaire, de se concentrer sur le véritable bruit de sa respiration ; mais lorsqu’il ouvrit les yeux, en lieu et place de la réalité, une sorte de papillon monstrueux faillit lui percuter le visage, et il eut un cri de surprise.

Le paysage était aussi tangible que possible. Il se sentait plutôt lucide.

Ça y est Lilly, ça y est, tu es en train de convulser dans une ruelle quelconque et tu vas mourir ici, hahahaha. Ça devait se produire et ça se produit maintenant.
Un début d’angoisse lui enserra la poitrine.

Attends, non, ce n’était pas une ruelle. C'était la campagne, les fjords. Enfin il lui semblait…

MAIS OUVRE LES YEUX ENFIN ! Il se donna une claque. La douleur le fit sursauter.
Rien ne se produisit.

Ooh, rien ne se passait et cet environnement était déroutant. Le vampire y voyait clair, malgré l’obscurité, mais il n’y avait en fait pas grand chose à voir. Son esprit avait visiblement produit un damier et des champignons stupides à perte de vue.

Allez. Debout. Marche, il se produira peut-être quelque-chose.
La route en damier tortillait sans raison. Progressivement, des petits bruits indistincts se firent entendre. Des petits grattements, des murmures. Puis des glapissements, des cris de petits animaux non-référencés.

T’as pas peur des bruits, Lilly. Tu ES la créature inquiétante qui traîne dans les coins sombres. C’est pas des bruits - des bruits inventés par ton propre subconscient borné - qui vont faire peur à une grande personne comme toi, hein ? Hein, allez, décrispe les épaules, resp….

“VOUS VOULEZ MA PEAU, HEIN, C’EST CA ? MONTREZ-VOUS, QUE JE VOUS ARRACHE LA TÊTE !”
C’était sorti de sa propre bouche, et maintenant, il montrait les crocs. Une drôle d’image, qu’un petit blond clinquant et coloré qui rugit comme une bête féroce. Ses yeux avaient viré au rouge.
Mais la forêt ne répondit pas. Les petits bruits l’ignorèrent.
“Vous vous moquez de moi, hein ? APPROCHEZ JE VOUS DIS.”

Un coup de vent dans les champignons. Una aura de paranoïa qui fait des petits cercles autour d’un vampire en détresse.

Quelque part dans les fjords, un miroir traîne entre deux cailloux.

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Dim 24 Juil 2016, 22:16




L'heure du thé




Sous la pulpe de ses doigts, un mélange de poils et de plumes. Le long de ses joues rondes et écorchées, le souffle d'un vent dont l'odeur lui rappelle celle du sang le plus délicieux qu'elle ait jamais goûté – celui d'un cadavre encore frais, sans aucun doute. Elle se sent bien, elle vole, sans trop savoir si cette situation est aussi favorable qu'elle le paraît. Ses pieds savourent le répit, eux que le sol mou de ce monde n'a pas épargnés. Elle n'a pas oublié qu'elle se trouve dans une autre dimension, fourbe et secrète, mais elle a choisi de se laisser aller, de s'abandonner au plaisir de l'instant. « Ce n'est pas vous qui trouverez la sortie, c'est la sortie qui vous trouvera », ces mots résonnent en boucle dans son esprit – esprit vidé, par ailleurs, de tout ce qui lui reste de bon sens. Jathu, redevenu renard, se tait depuis qu'il a retrouvé son enveloppe corporelle, comme tenaillé par la peur de déclencher une nouvelle blague.

L'endroit est imprévisible et donne l'impression de s'étendre à l'infini, aussi dépourvu de frontières que l'obscurité qui comble ostensiblement ses orbites. L'animal volant ne paraissant pas vouloir interrompre sa course folle à travers les airs, Lorelaï choisit de briser le silence.

« Excusez-moi, mhm... Monsieur ? Madame ? Quand comptez-vous nous déposer à terre ? »

Elle n'avait pas la moindre idée de ce à quoi la chose ressemblait, elle sentait seulement se déployer son immensité sous ses ridicules mollets dégarnis.

« Vous déposer, dis-tu ? Je n'ai jamais eu l'intention de faire une telle chose, petite. »

« P-Pardon ? Mais il me semble que ça fait une éternité que nous voyageons avec vous. Où vous emmenez-vous ? »

« Nulle part, petite. Je me contente de voler, moi, c'est ma seule miraculeuse destinée. »

Les muscles de la jeune femme se crispèrent à mesure que son cœur accélérait la cadence.

« Vous ne comprenez pas, nous devons descendre. Ce n'est... pas discutable. » acheva-t-elle au prix d'un immense effort. Son instinct était forcé de combattre à mains nues son absence totale et absolue de charisme.

L'étrange oiseau rit si fort que la jeune femme crut, pendant un instant, qu'elle venait de perdre définitivement son ouïe.

« Allons, allons, tu n'es qu'un misérable microbe mon enfant, ne me dis pas ce que je dois faire ou ne pas faire. » Sa voix grinçait comme les cordes d'un vieil instrument dont le ventre serait incrusté de poussière. Lorelaï prit une inspiration discrète.

« Pourquoi avoir pris la peine de nous prendre sur votre dos alors ? Nous ne vous serviront à rien, dans les airs. Nous sommes plus... utiles sur la terre. » Elle-même n'était pas sûre de la logique de ces arguments vaseux, mais quelque chose dans ce monde lui imposait d'abandonner une partie de la raison.

« Tu es bien insolente. C'est vous qui êtes venus à moi, pas l'inverse. Je n'ai que faire des créatures insignifiantes que vous êtes. » gronda l'animal qui perdait patience. Agacé, il plongea violemment et Lorelaï roula sur elle-même, vacillante, avant de se rattraper péniblement à ses poils.

« Tu l'as énervé, espèce d'idiote. »


La rousse aussi se sentait bouillonner. Ses souvenirs étaient encore intacts et elle n'était pas prête d'oublier la sensation de terreur mêlée d'adrénaline qu'elle avait ressentie quand cette grande chose s'était ruée sur eux pour les pêcher. C'était particulièrement vexant de voir ses affirmations remises en question de façon permanente. Mais il ne valait mieux pas l'énerver outre-mesure. Elle se mordit la langue et en aspira le sang.

« Bien, je suis d'humeur humour. » annonça finalement l'oiseau lorsque le calme fut revenu. « Jouons à un jeu. Une devinette – oh, trois fois rien –, et si tu parviens à répondre, je te laisse retrouver cette terre qui a l'air de tant te manquer. Si tu ne réponds pas, eh bien... Je te garde à jamais sur mon dos ! Facile ! Hu hu hu ! Allez, marché conclu ? Oui ? Parfait ! Oh, c'est si désespérément banal comme jeu, vite vite, commençons avant que je ne m'ennuie. Il parle sans langue et entend sans oreille, qui est-ce ? »

Sa salive se coinça un instant dans sa gorge tandis que, par réflexe, elle se redressait comme si cette nouvelle position pouvait l'aider à mieux réfléchir. Il fallait qu'elle gagne, à tout prix, ne tenant surtout pas à mourir sur cette colonne vertébrale velue. Allez Lorelaï réfléchis, réfléchis. Et pourtant... rien, rien ne lui venait, elle avait beau se creuser les méninges à s'en éclater les vaisseaux sanguins, elle n'arrivait pas à trouver ne serait-ce qu'une once de réponse.

Quand soudain, au loin, un éclat de voix... Quelqu'un a crié au sol, un cri puissant qui...

« L'écho. » lance-t-elle, la voix presque affirmée et le cœur pris d'extase. Oui. Oui. Ce devait être la bonne réponse, il n'y avait pas de doute – elle avait gagné ! L'oiseau laissa un silence, lui ordonna de répéter, s'assura ensuite qu'elle était sûre de sa réponse et lorsque Lorelaï confirma, il soupira longuement et ne prononça plus un mot.

La gigantesque créature dessina une pirouette dans le ciel avant de tourner plusieurs fois sur elle-même. Les lois de la gravité semblèrent faire leur effet cette fois, puisque Jathu et la jeune femme ne firent pas long feu et finirent par être éjectés avec violence par une aile aussi monumentale qu'antipathique.

Ils atterrirent dans le feuillage de ce qui lui sembla être un arbre et sous la douleur, la jeune femme poussa un cri strident. A moitié assommée, elle sentit à peine l'effet secondaire de la chute : une branche pointue lui avait transpercé la cuisse. La jeune femme réalisa l'ampleur des dégâts quand elle sentit son sang chaud dévaler sa jambe et goutter au sommet de ses pieds.

« L'écho... » répèta-t-elle alors sans raison, comme pour se consoler.

Jathu, en pensées, la somma de se lever et d'essayer de s'en sortir, griffant vainement le tronc de son arbre.

« L'écho... »



1060 mots.

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