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 Coulé par les flots ! [Mission 2 Niveau IV Wriir]

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Mar 19 Avr 2016, 23:02

Gris. Morne. Étouffante. Anxiogène. Décharnée.

Un peu à l’image de mon état du moment. Je levais mon visage vers ce ciel sans astre solaire, caché par ce qui avait donné en partie le nom de l’endroit où je me trouvais non loin : les brumes.

Non content de nous empêcher de ressentir de réelles émotions positives, nous errions sur un terrain de jeu aussi déprimant que notre race. Je ne comprenais pas que nous ne nous étions pas soulevés plus rapidement. Le conflit entre Sympan et les Aetheri n’en était qu’à ses balbutiements, mais je percevais là une formidable opportunité de nous libérer de cette entrave qui se nourrissait de nos malheurs et de nos tourments.

A côté de cela, je continuais toujours, en vain il fallait le reconnaître, à consacrer mon temps libre – notion très abstraite quand notre espérance de mort est éternelle – à trouver un moyen de revoir Lhyaerae. Je devais m’entraîner, développer mes pouvoirs, la magie que je sentais couler en moi, pour parvenir à mes fins. Je ne connaissais rien d’elle, et pourtant, comment avait-elle réussi à hanter plus mes pensées que l’endroit où je me trouvais actuellement ?

Je tournais mon visage pour regarder une branche de l’arbre où je m’étais appuyé. Je me concentrais sur celle-ci, et après m’être assuré qu’aucun vent n’irait se jouer de mon esprit, je lui ordonnais de bouger. Il y a quelques semaines encore, je me contentais d’un léger bruissement de ce morceau de bois rabougri, mais je voulais plus, toujours plus, et toute mon attention était focalisée sur celle-ci, jusqu’à la faire ployer suffisamment pour obtenir un craquement des plus convaincants. C’était un début, mais ce n’était pas en brisant une brindille que je pourrai le battre lui, celui qui m’empêchait de la voir elle. De plus, les conditions pour que ce pouvoir soit efficient étaient quasi impossibles à réunir. Il pouvait enfin se téléporter, autant dire qu’une attaque hâtive et faible n’allait avoir pour résultat qu’un éclat de rire avant de disparaître à nouveau.

Satisfait de mon modeste exploit, je me rendis jusqu’au Temple où les ordres de missions ne tarderaient pas à nous parvenir. Je me demandais quels pauvres êtres allaient devoir subir mes assauts pour qu’ils se résignent à s’ôter la vie et grossir nos rangs. Nous méritions tellement mieux que cela.

Les Passeurs passèrent en priorité, comme à l’accoutumée. Ils étaient nos supérieurs hiérarchiquement parlant, et leurs missions étaient autrement plus variées que les nôtres. Pour autant, il n’était question que d’un volcan qui serait entré en éruption de manière aussi spectaculaire qu’imprévisible, et on comptait les morts par centaines. Le cycle de la vie et de la mort devait être respecté, et eu égard à ce surcroît de décès en un temps aussi court, la grande majorité, pour ainsi dire la totalité des Passeurs présents furent missionnés là-bas, afin de récolter les âmes et les recycler dans la Rivière Éternité. Je me demandais comment le reste des décès plus …. dans l’ordre des choses allaient être gérés. Soit les Passeurs en mission allaient pouvoir gérer l’endroit où ils se trouvaient, soit il y aurait vite un désordre d’âmes non récoltées sur les bras. Je les plaignais presque, mais ce n’était pas mon problème après tout. S’ils voulaient, j’échangeais ma place avec l’un d’eux quand ils le voulaient !

Avaient-ils lu dans mon esprit, ou était-ce pour une fois mon jour de chance, mais une voix gutturale me nomma avec d’autres Grands Faucheurs à rejoindre le coin normalement réservé aux Passeurs. Étonné, je me frayais un chemin parmi les autres Ombres pour recevoir mon ordre de mission – enfin, qu’on me lise mon ordre de mission, car il était désormais connu de presque tous que mes lacunes en lecture et écriture me pénalisaient lourdement.

Cependant, à chance, chance et demie car non content de me voir une nouvelle fois endosser le rôle de Passeur, et les pouvoirs qui y étaient attachés, j’allais me rendre dans l’Océan. Les autres Grands Faucheurs ne semblaient pas emballés du tout par l’idée, mais s’il m’était possible de ressentir cette émotion, je jubilerais d’excitation.

L’Océan ! La seule fois où je m’y étais hasardé, j’avais fait la connaissance de sirènes particulièrement retorses et avides de tuer tout ce qui était vivant dans le bateau. Mon échappée sauvage s’était conclue par un plongeon dans les profondeurs après être tombé d’une corde, louant mon pouvoir de téléportation alors qu’un Kraken n’était ni plus ni point qu’en dessous de moi. Il aurait bien fini par me recracher, mais passer un temps certain dans l’estomac d’un monstre aussi mythique ne m’enchantait guère.

En l’espèce, il s’agissait d’un naufrage d’un navire contenant un nombre important de passagers en plus de l’équipage. Selon les derniers rapports, si le nombre de survivants pourraient tout au plus se compter en une bonne dizaine, le nombre de morts eux serait bien supérieur, à hauteur d’une bonne cinquantaine. Dix Grands Faucheurs dont je faisais partie furent investis du pouvoir des Passeurs donc, et il ne faisait aucun doute qu’une pareille épreuve conduirait forcément à une évaluation dans la hiérarchie des Ombres, et de la concurrence qui allait en découler pour bien se faire voir. Sauf que côté motivation, j’étais tout bonnement imbattable. Certes, devenir Passeur m’ouvrirait des portes jusque-là fermées, notamment celle de la Rivière, mais je voulais apprivoiser cet endroit aussi inapprivoisable que l’Océan et ses mystères. A la peur de me plonger dans pareille étendue, se mêlait l’excitation d’arpenter l’inconnu qui était son monde. Je ne pouvais rêver meilleure initiation quant à mieux connaître celle qui hantait mes pensées.

En attendant, si l’endroit précis du naufrage put être localisé, les courants marins et le temps de nous y rendre allait rendre la collecte des âmes bien plus difficile. Je comprenais un peu mieux que dix d’entre nous furent missionnés car sonder l’Océan pourrait prendre une éternité sans que l’on ait pu y découvrir un dixième de ses mystères. Je regardais l’endroit désigné par une croix sur une carte – ça, j’étais encore capable de le comprendre – et nous eûmes une dernière recommandation d’un superviseur.

- L’Océan est bien différent de ce que vous pouvez connaître des terres fermes. Certes, vous ne ressentirez pas le besoin de respirer, et bien évidemment vous ne mourrez pas noyés. Mais vous serez en proie à des ombres bien différentes dans les profondeurs maritimes, et la folie peut guetter chacun d’entre vous si vous ne faites pas attention. Peu d’Ombres apprécient les missions de récolte dans les tréfonds d’une telle étendue, et vous comprendrez vite pourquoi.

Nous voyageâmes par les ombres pour gagner le plus rapidement possible les débris flottants d’un navire qui effectivement devait bien contenir plusieurs dizaines de passagers. Au loin, très loin, un autre navire se dirigeait dans notre direction, pour aider les survivants fourbus de fatigue qui s’accrochaient à la vie comme ils s’accrochaient à ce morceau de bois, cherchant le salut dans la prière, dans un proche ou dans la simple volonté farouche de vivre. Si leur courage était louable, ils ne m’intéressaient pas actuellement. Je me laissais engloutir par les flots, ma vue se brouillant aussitôt par les remous et l’obscurité de l’eau qui absorbait et anéantissait les efforts inutiles du soleil à percer ses mystères. Je comprenais les conseils sur notre présence dans l’Océan : nous n’étions assurément pas la bienvenue. Nous autres bipèdes ou assimilés, devions rester à notre place, et elle n’était pas ici. C’était un peu comme si l’eau montrait que la terre n’était rien d’autre qu’un caillou qu’elle s’amusait à éroder au gré de ses envies, mais qu’elle pourrait engloutir du jour au lendemain si bon lui chantait.

Les autres Ombres semblaient toutes aussi désorientées que moi, alors que nous devions nous focaliser sur les boules lumineuses des âmes défuntes. Plus facile à dire qu’à faire avec pareille visibilité. Un vrai brouillard aquatique, nous malmenant aléatoirement sans que nous puissions avoir à en redire, se dressait entre nous et nos objectifs.

La plupart des Ombres proches de moi prirent le parti de s’éloigner chacune dans une direction, fonçant tête baissée pour trouver le plus rapidement les âmes et prouver ainsi leur valeur. Même si je n’avais aucune autre idée sur le moment, je ne pensais pas que la leur était la bonne. Notre « butin » était minuscule et notre terrain de jeu immensément vaste. A moins de compter sur une chance inouïe, cela revenait à chercher une aiguille dans une botte de foin. Si une race ne pouvait pas se targuer d’être chanceuse de surcroît, c’était bien les Ombres.

Je restais à quelques mètres sous l’eau, réfléchissant à la façon d’un Passeur qui serait dans le même cas de figure que moi. Je n’avais pas leur expérience, aussi mettrais-je plus de temps que lui pour parvenir à mon objectif, mais j’étais loin d’être stupide, et si un Passeur pouvait le faire, j’en étais tout autant capable.
Je compris. Nous nous dressions contre un élément que nous ne pouvions battre. Nous utilisions une technique terrestre dans un environnement aqueux. Nous voulions affronter un état neutre qui ne nous révélait que nos propres faiblesses.

J’échappais à ma forme d’Ombre pour prendre une contenance, une forme, un poids humanoïde, et mon esprit eut aussitôt les réminiscences de ce qu’un vivant ressentait quand il ne pouvait plus respirer. Toutes ces sensations innées d’asphyxie, mon corps brûlant de ne pouvoir respirer normalement entravait mon jugement et brouillait mes sens, mais je tins bon en me laissant sombrer comme un cadavre le ferait. Je me laissais guider d’une certaine manière dans mon tombeau aquatique, où j’allais probablement rejoindre ces marins quelques heures plus tôt. Je savais pertinemment que je n’allais pas tomber pile à côté d’eux, mais j’avais l’intime conviction que mon plan à défaut d’être excellent, était « moins pire » que ceux qui fonçaient tête baissée, privilégiant rapidité à jugeote. La belle affaire s’il y avait moins de concurrents.

Un énorme poisson tenta de me happer, et ses dents se refermèrent brusquement sur du vide, mon corps brumeux ayant repris ses droits le temps d’échapper à son prédateur bien déçu.

Dans pareilles profondeurs, la notion du temps était abstraite, insipide, presque gênante à évoquer car il s’agissait bien d’un autre univers, avec ses règles, ses droits et ses obligations. Mon corps transmettait à mon esprit douleur et complainte, et ce fut presque avec surprise que je finis par toucher le fond, laissant flotter une onde de poussière et de petits cailloux. Concentrant mon esprit sur mon immortalité, afin de soulager un peu cette douleur permanente, je tentais – bien difficilement – de discerner quelque chose de là où j’étais. J’avançais à tâtons de quelques pas, sans trop savoir où, ni sur quelle distance, et commençait déjà à regretter mon idée tant elle me paraissait à présent stupide. J’allais me décider à monter, après plusieurs minutes de petits sauts au fond de l’Océan, quand j’aperçus une lueur, qui si elle était rendue trouble par les eaux, dégageait une lueur et une aura que je ne connaissais que trop. Souriant à moi-même, je me dirigeais vers ce trésor, alors que j’aperçus l’esprit paniqué et désemparé du marin bleuie et mort dans les abysses.

Je n’avais pas la moindre idée s’il était possible de parler dans l’eau, et de se faire comprendre par un esprit, aussi ne tentais-je pas de discuter avec ce qui de toute façon serait inéluctable. Je pointais juste du doigt le haut, vers la surface, à charge pour lui d’y aller ou pas.

Je me concentrais sur l’âme, et vit que bon nombre d’autres n’étaient pas loin non plus. Ils avaient tous suivi le même courant en coulant, aussi je n’étais pas si illogique en soi ! C’était bon à savoir si un jour je voulais chercher ma bien vivante sirène. Je ne paraîtrais pas ridicule, enfin moins ridicule en ayant assimilé ce concept-là.

De la même manière qu’à l’Asile, je redécouvris dans cet espace silencieux et oppressant, la délicatesse qu’il fallait pour emmener l’âme et l’intégrer en soi, à la façon d’une chrysalide qui éclorait plus tard dans une rivière magique. Je me rendais compte que je partageais pendant un moment une once dont j’aurai seul le souvenir d’intimité avec cet inconnu, qui renaîtrait de ses cendres dans le corps d’une mère que je lui souhaitais aimante et présente. Ce lien ténu, ce fil directeur, personne ne pouvait me l’enlever, et personne ne pourrait se targuer de l’avoir vécu.

Je me dirigeais ainsi vers les autres âmes, constatant que ceux qui avaient pensé à la même technique que moi étaient eux aussi présents, nous nous mîmes à l’œuvre pour collecter les âmes de ces malheureux dont la Nature ne leur avait laissé aucune chance. Ils ne deviendraient pas Ombres eux, devaient-ils se sentir chanceux d’une certaine manière ?

Bah… l’heure n’était pas à l’introspection, tandis que je collectais le plus d’âmes possibles avant de retourner vers notre antre. Rien qu’à l’idée de retrouver cette rivière aux mille joyaux, je voulais savourer cet instant comme il se devait. Le fossé entre Grand Faucheur et Passeur était bien plus important que je ne me l’imaginais. Et je comptais bien le franchir le plus rapidement possible.
2 204 mots, pfiou !
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