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 Sang-gêne et Sang Haine [Yulenka & Wriir]

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Lun 08 Aoû 2016, 11:26

Je me remémorais les longues discussions que j'avais eues avec Ysoline, une fois sortis de la forteresse qui l'avait rendue captive avant que nous ne venions un peu par hasard la sauver Jingle et moi.

Nous avions été au départ invités, avant de nous rendre compte, après plusieurs épreuves aussi loufoques que dangereuses, que nous étions les acteurs malgré nous d'un jeu morbide faisant jubiler un nid de vampires dans le cadre d'un repas où le sang coulait à flots.

Ysoline était une jeune fille, vierge m'avait-elle précisé, qui servirait de repas assurément à l'issue des mondanités. Cela faisait presque qu'un mois qu'elle avait été emprisonnée et dont elle n'espérait plus rien qu'une morte rapide et douce. La chance aidant, nous lui avions laissé l'opportunité d'une nouvelle vie à l'extérieur de cette forteresse, mais quand je lui rendis visite plusieurs mois plus tard, l'air craintif qu'elle avait à l'intérieur de cette prison ne s'était pas tari bien au contraire. Ysoline me raconta que chaque nuit, elle craignait se faire enlever de nouveau, que sa famille subirait un sort affreux en signe de vengeance et qu'enfin, son propre destin de retour là bas serait bien pire en guise d'exemple contre tout nouvel acte de rébellion des prisonnières.

Je lui demandai alors de me décrire le plus précisément possible son ravisseur, ancrant dans ma mémoire le plus infime détail qu'elle me fournissait. Ses mains tremblaient alors qu'elle se les triturait en bredouillant, et je les saisis pour la rassurer, lui dire qu'elle ne craignait rien.

- Pourquoi me demandez-vous tout ça ?... finit-elle par m'interroger.

- Je ne vous ai pas libérée pour que vous ayez une non-vie derrière. Je vais essayer de résoudre votre problème définitivement.

Elle devina, mais n'en demanda pas plus. Ce n'était pas tant pour elle que j'allais le tuer, mais disons qu'une bonne action venant se superposer à la mienne allait encore moins me faire hésiter.
Pour m'être déjà rendu dans cette forteresse, m'y téléporter fut très aisé. Le bouclier magique existait toujours aussi m'étais-je arrêté par la force des choses à la périphérie de celui-ci. Cependant, passer par les ombres m'était toujours permis et j'errais dans les couloirs à la recherche des indices que m'avait laissés Ysoline. Son ravisseur, un dénommé Gyrnem, logeait souvent dans l'aile Est de la bâtisse, mais les sortilèges présents dans cette forteresse avaient tôt fait de me désorienter.

Je dus faire appel à mes souvenirs pour éviter la plupart des pièges savamment distillés ici et là, au cas où un intrus se serait amusé à déambuler dans les environs, et mon pouvoir à détecter les âmes me fut plus qu'utile pour éviter toute confrontation directe.

Je ne pensais pas mettre autant de temps, alors que selon mes calculs, le jour commençait à décliner pour laisser la place aux ténèbres nocturnes. L'avantage de l'astre solaire en cas de pépin s'amenuisait d'heure en heure, avant que je ne finisse par trouver enfin la porte de la chambre dans laquelle Ysoline avait dû rendre visite à plusieurs reprises son tortionnaire.

Une fois à l'intérieur de la pièce, au demeurant cossue et richement décorée, je m'aperçus que ma cible était bel et bien là, seule de surcroît. Toujours cachée dans les ombres, je jetais un regard circulaire au cas où il y aurait un danger impromptu, mais rien ne me frappa dans l'immédiat. Il fallait dire que pour arriver jusque là, il aurait fallu montrer patte blanche depuis un bon bout de temps. La sécurité y était donc moins optimale qu'aux entrées principales.

Je regardais cette engeance qui ne m'inspirait que haine et dégoût et voulut la tuer sans la moindre trace comme il m'était permis de le faire en tant qu'Ombre. Pourtant, je voulais laisser une trace, une marque de mon passage sans en révéler l'auteur, plongeant les survivants dans le doute et la crainte qu'ils n'étaient en sûreté nulle part.

Je me matérialisais dans son dos et avant même qu'il ne puisse réagir, lui trancher la gorge si profondément qu'il ne put émettre qu'un gargouillis de surprise et s'effondrer au sol. Je m'assis sur lui et plongeai ma lame dans son dos, lui transperçant le cœur par l'arrière, avant de lui porter un dernier coup purement gratuit dans ce qui devait lui servir de cervelle, faisant craquer sous l'impact sa boite osseuse.

Déjà l'âme tentait de quitter l'enveloppe charnelle et je m'en saisis pour l'insérer dans mon corps. Un dernier passage au Fleuve des Âmes et l'affaire serait réglée.

Au moment où je me relevais et allais me transformer en brume, la porte s'ouvrit brutalement et je commis l'erreur pourtant légitime d'en connaître la source. Je me trouvais face à une femme, vampire également, d'une beauté aussi mystérieuse que sa puissance n'était imposante. Fait assez singulier pour qu'il m'instille une peur au plus profond de mon être, je n'arrivais plus à bouger. Déjà les réminiscences de mon passé Orisha surgissaient dans un fracas chaotique, et je luttais aussi désespérément que vainement à me défaire de cette emprise.
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Lun 08 Aoû 2016, 20:10


Les jours semblaient s'écouler plus lentement à présent, comme si brusquement, le temps avait décidé de s'arrêter, pour aller prendre des vacances dans une autre dimension. Ainsi, elle avait l'impression de vivre un paradoxe, où le monde autour d'elle allait si vite, mais où elle avançait si lentement. Curieuse sensation que celle-ci. Dans un sens, cela était reposant pour elle, car à présent, elle avait le temps de réaliser qu'elle était éternelle. Mais d'un autre côté, ce monde qui fourmillait et grouillait d'activités et d'événements cycliques la fatiguait par son agitation constante. Elle esquissa un sourire en coin. Pour se perdre dans ce genre de considération, elle n'avait plus grand chose qui occupait son esprit. Ho bien sûr, il y avait les tentatives régulières d'assassinat à son encontre. Mais les commanditaires de sa perte ne semblaient pas parvenir à trouver des pigeons suffisamment compétents, pour servir d'autre destinée que celle de chair à canon condamnée. Elle sortit de sa chambre, après s'être coiffée devant ce miroir qui s'obstinait à bouder son reflet depuis des siècles et des siècles. Arpentant les couloirs de sa grande demeure comme un fantôme, elle devait avouer qu'elle lui semblait bien vide depuis la retraite de ses comparses. Il en restait heureusement quelques uns. Mais il s'avéra que cela était encore trop.

Yulenka s'arrêta dans son parcours. La forteresse était à son image mais pas seulement. La magie qui animait ce lieu était étroitement liée à elle, puisque issue de la vampiresse. Et pour la première fois, elle sentit que quelqu'un était parvenu à franchir les barrières habituelles. Elle se retourna dans la direction où se trouvait cet intrus. Un des assassins dévoués à sa mort ? En voilà un qui s'était donné bien du mal. Curieuse, elle se dit qu'il méritait bien qu'elle s'occupe de lui personnellement, histoire de récompenser ses prouesses. Elle rebroussa chemin vers la première porte qui se présenterait à elle. Alors qu'elle posait sa main sur la clenche, elle s'arrêta un sourire en coin. Elle allait surprendre ce tueur, et se dit qu'un "c'est moi que vous cherchez ?" serait du plus belle effet pour lui arracher un air ahuri absolument succulent. Elle ouvrit brusquement la porte, et la magie des lieux opérant, la forteresse l'avait amené directement là où elle l'avait souhaité. Mais elle ne trouva pas le spectacle escompté. Elle découvrit un homme à côté de la dépouille de l'un des siens. Et l'homme en question vit une éternelle jeune femme débouler dans la pièce. Une peau de lait, des yeux au diapason de ses cheveux bleus d'une longueur interminable, le tout dans un corset en coupe cœur de soie rouge, orné de dentelle noire fine tressée, et munie de petites fanfreluche de satin noir aux extrémités, ainsi qu'un flot noir au centre de sa poitrine. En bas du corset, de petits nœuds de satin noir surplombaient une jupe en queue de paon faite de tulles noires, qui constituait le bas de sa tenue, ainsi qu'une paire de cuissardes en daim noir.

Instinctivement, elle avait voulu ressusciter son fidèle, mais étrangement, l'âme n'était plus là, et il était donc trop tard pour que sa magie puisse le sauver. Une colère froide la saisit, mais elle parvint à se contenir, invectivant l'homme qui se tourna face à elle d'une voix glaciale.


-Qui ose semer la mort des miens, dans ma maison ?!

Elle foudroya du regard l'inconnu, ne perdant pas l'occasion d'user de son aliénation pour lui soustraire toute intention de fuite, et aussi dans le projet de pouvoir disposer de lui plus tard, pour un interrogatoire de rigueur. Mais si elle n'avait pas reconnu cet assassin de prime abord, son aura ne lui était pas inconnue elle. Étrange, cela ne lui ressemblait pas d'oublier un visage. Elle fronça les sourcils, creusant dans sa mémoire, tout en s'avançant doucement et silencieusement vers lui, laissant toutefois une distance de sécurité raisonnable entre eux. Et finalement les pièces du puzzle s'assemblèrent. Le conseil des chefs, le souverain des ombres, et à côté de ce dernier.... Lui. Elle arqua un sourcil, et croisant les bras, elle l'interpella de manière relativement froide.


-Vous.... Pour une seconde rencontre, vous avez pris soin de la rendre particulièrement fâcheuse. Donnez-moi votre nom, vous appeler "ombre" à longueur de temps va vite devenir lassant.

Elle savait son secret, tout en prenant le soin de lui signifier, et donc plus ou moins son identité. Mais la nature de son geste en revanche.... Ses opposants préfèreraient mourir que de se "rabaisser" à recourir aux services d'une autre race. Ce n'était donc pas pour elle qu'il était venu, et de toute manière cela ne collait pas aux mœurs des ombres. Que faisait-il là ? Et pourquoi avoir fait disparaître avec autant de précautions l'un des siens ? Beaucoup de questions, mais une certitude qui la contrariait beaucoup. Elle ne pouvait pas le tuer ! Pour avoir eu un père qui avait été ombre pendant longtemps, elle en savait quelque chose. Fallait-il vraiment être maudite au-delà des mots pour vivre pareille frustration.... Elle se consola en se disant qu'il y avait tellement pire que la mort.... Et que finalement tuer une ombre revenait à lui rendre service, autant dire qu'il en était d'autant plus hors de question. Elle allait devoir s'y prendre autrement.... Reprenant davantage son calme, et le fixait de ses prunelles perçantes, lui demandant sur un ton à présent calme.

-Donnez-moi une bonne raison de ne pas rendre votre éternité encore plus insoutenable qu'elle ne l'est déjà....
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Mar 09 Aoû 2016, 09:01

Je connaissais les méthodes de cette sous-race pour ramener à la vie leurs semblables, et je ne voulais surtout pas laisser la possibilité à son géniteur s'il était dans les parages de m'enlever ce butin. Aussi je m'étais dépêché à dépecer son âme une fois m'être occupé de son corps d'une façon similaire. Je n'étais pas partisan de la violence gratuite, la Mort restait après tout sa seule finalité, mais j'avais dû me laisser guider par une pulsion meurtrière, un trop plein de rancœur et de haine qui s'était déchargé sur cet inconnu que je ne connaissais pourtant que trop bien. Son sang formait une flaque grandissante autour de sa lugubre silhouette et maintenant que ma mission était terminée, j'allais annoncer la bonne nouvelle à Ysoline, histoire qu'elle puisse enfin retrouver une vraie existence. Pas comme celle que je venais d'occire, ni comme la mienne. Une vraie vie.

Mon manque de professionnalisme dans la rapidité de mon exécution se retourna contre moi à ma grande surprise. La mort que je lui avais accordé avait à peine pris plus d'une minute, mais quand la porte s'ouvrit en prenant sur le fait, je m'attendais dans un premier temps à une servante, ce genre de rencontre malheureuse du mauvais moment au mauvais endroit.

Deux choses dissipèrent rapidement cette hypothèse qui m'aurait cependant bien arrangée : La puissance que dégageait cette femme était tout bonnement impressionnante. Elle exsudait la magie, trop même, et même l'être fait de ce pouvoir là ne pouvait décemment pas rivaliser avec celle qui se trouvait en face de moi. L'autre point était sa tenue, bien trop sophistiquée pour laisser planer le moindre doute sur son rang ici. La tenue sur bien des femmes aurait été jugée indécente, dans le décolleté plongeant à la longueur minimaliste de sa jupe dont les froufrous arrivaient à concilier le suggestif au démonstratif. Impossible que ce soit une servante, sa beauté froide et son aura faisait d'elle la maîtresse des lieux sans le moindre doute. S'il existait plus puissante qu'elle ici, je ne donnais pas cher de ma brume.

Je me fichais pas mal quand elle m'invectiva à décliner l'identité de celui qui tuait les siens. Les ombres étaient si proches au gré du soleil déclinant, que j'allais lui faire faux bond et la laissait hurler sa rage à qui bon lui semblait. Au lieu de cela, je fus comme paralysé, incapable de mouvoir le moindre muscle comme si ma volonté était déconnecté des actions que mon corps était censé faire ...

Je fixais celle qui en était responsable, et ma rage mêlée de haine n'en fut que décuplée. Aussi impuissant qu'un prédateur en cage, l'asservissement était le pire châtiment qu'elle pouvait m'infliger. Je ne faisais pas le  poids certes, mais je ne comptais pas me laisser faire, non, jamais .... Elle ne savait pas qui j'étais, ce que j'étais, et ce dont j'étais capable...

Ma rage s'effaça comme la délicate flammèche d'une bougie après un souffle sec. Elle venait de m'appeler Ombre, venant annihiler par une improbable coïncidence la colère qui bouillonnait dans mes entrailles. Pris par surprise, la proie acculée que j'étais voyait-elle ses dernières chances s'évanouir ?

Alors je la regardais de plus près, ce monstre qui se dressait de tout son dédain devant moi, encore agenouillé à côté du cadavre d'un des siens. Il me fallait gagner du temps si je voulais trouver une faille dans sa carapace à l'apparence indestructible. En terme de puissance pure, je serai balayé comme un fétu de paille, mais il y avait des armes plus sournoises, plus insidieuses et son passé était la seule arme dont je disposais dans la position où je me trouvais.

- Wriir. Je m'appelle Wriir. fut tout ce que je pus lui cracher au visage, d'un ton qui ne laissait place à aucune émotion positive.

Gagner du temps. Je ne la quittais pas des yeux, alors que les grandes lignes de sa vie défilaient dans mon esprit. Elle était vieille, très vieille, bien plus que les apparences ne pouvaient décemment l'admettre. Les vampires avaient certes la vie éternelle, mais je pensais que les affres du temps se seraient au moins attardées un minimum sur eux. Non, elle était au zénith - si l'on pouvait utiliser pareil terme pour pareille race - de sa beauté.

C'est à ce moment là que je trouvais. Les détails étaient si éloquents que je pouvais presque visualiser la scène, empli de fascination et de dégoût. Comment avait-elle pu ?... Un sourire naquit sur mon visage et si j'étais toujours sous l'emprise de son écrasant pouvoir, elle me donna l'opportunité de contre attaquer à présent. Difficilement, lentement, je me relevais pour parvenir à me dresser à moitié debout, à moitié courbé face à elle. Sans être son égal, je ressentais moins ce sentiment aussi humiliant qu'avilissant d'être son chien à qui l'on allait donner une sévère punition.

- Une bonne raison, je dois vous donner une bonne raison ?... Je laissais échapper un rire mauvais suivi aussitôt d'une toux imprévisible. Je vais vous en donner deux par pure générosité. La première est que vous avez face à vous un Gardien du Sceau, et si vous en connaissez suffisamment sur les Ombres, vous savez ce qu'il en coûte de traiter de la sorte une Ombre de ce rang. Si vous ne le savez pas, je vous conseille de me témoigner un peu plus de respect et ce même si vous paraissez bien plus puissante que moi en cet instant.

Je marquais un temps de silence. Je ne savais pas ce qu'elle connaissait à propos des Ombres, ni ce que Gardien du Sceau évoquerait pour elle. Au mieux elle penserait que je faisais partie du cercle le plus restreint aux côtés de l'Esprit de la Mort, et il n'était jamais bon de se mettre à dos ce dernier. Je doutais qu'elle sache que je n'étais pas ce que je prétendais être. Je n'étais que Passeur après tout. Si elle ne connaissait pas ce rang, le doute pouvait tout aussi bien fonctionner quand un interlocuteur en position de faiblesse parlait avec assurance. Mais cette première raison n'était que le préambule sur ma véritable attaque, mon coup d'estoc dans cette affrontement mental.

- La deuxième bonne raison remonte à bien plus loin Yulenka. Enfin, devrais-je plutôt vous appeler Alice ? Me faire la morale quand je tue l'un des vôtres, alors que vous vous êtes repue de la gorge de votre propre frère, ne soyez pas prompte à me faire la morale sur mes agissements, quand vos mains sont encore souillés du sang de votre propre famille.

Je jouais gros sur ce coup-là. Soit elle tenterait de me détruire, sans y parvenir, mais en pouvant facilement me faire endurer des souffrances infinies, à l'image de ce que cette engeance contre nature était capable de faire endurer. Soit le coup de massue que je venais de lui asséner la déstabiliserait un court instant, suffisamment pour que je reprenne l'ascendant sur elle. J'avais toujours mon couteau encore dégoulinant entre les doigts, et seuls quelques mètres me séparaient elle. Aurais-je assez de temps pour la tenir en joue. Il n'était plus question de fuite, la forteresse semblait lui obéir.

Il était juste question de survie.
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Mar 09 Aoû 2016, 19:41


Wriir.... Elle grava ce nom dans sa mémoire, bien décidée à ne pas lui lâcher la grappe de si tôt. Statique comme un fauve qui attendait avant de bondir sur sa proie, Yulenka avait ancré ses prunelles dans celle de l'ombre, comme pour verrouiller la cible mentale qu'elle avait imaginé sur son objectif. Elle s'attendait à tout et à rien à la fois. Supplications ? Silence ? Démonstration d'orgueil ? Après tout, que pouvait-il bien faire dans la posture si délicate dans laquelle il se trouvait ? Néanmoins, il ne perdit pas ses moyens, commençant un début de réponse. Il prétendait même lui donner deux arguments, ce qui avait eu le mérite d'éveiller sa curiosité. A voir à présent s'ils étaient bons. Le premier lui fit à peine arquer un sourcil, mais également masser sa tempe très fugacement. Yulenka avait acquis le don de déceler le mensonge, très pratique si cela ne lui donnait pas mal à la tête à chaque fois qu'on lui sortait une énormité. Plus le mensonge était gros plus la réaction était violente. Et celui-là était tout à fait honorable dans sa catégorie. Elle lui rétorqua alors le visage oscillant entre le fermé et le las.

-Sachez que je n'accorde aucun crédit aux rangs. Je ne respecte les gens que pour ce qu'ils sont, peu m'importe leur statut. Donc non seulement je me contre-fiche du rôle de Gardien des Sceaux, n'en déplaise à Seth, mais en plus vous êtes un fieffé menteur. Si vous vous êtes un Gardien du Sceau, alors moi je suis fille d'Aether. J'espère que vous avez mieux en réserve que cette tentative misérable de vous faire mousser.

Lorsqu'elle n'était qu'une jeune vampire parmi d'autres, elle avait cette espèce de respect et de fascination pour les personnalités des hautes sociétés. Mais après son passage sur le trône, elle avait très vite déchanté. Un statut n'était qu'une fonction, un titre, et un concourt de circonstance pouvait tout à fait propulser le premier péon du coin à ce niveau. Elle avait vu des souverains affligeants d'incompétence, des hauts dignitaires qui en dehors de mépriser ceux qui les servaient, n'étaient même pas capable de nouer leurs lacets. Au fils des siècles, elle n'avait plus accordé le moindre crédit à ce genre d'étiquette, car elle n'était pas la garantie d'une quelconque qualité. Wriir informé du peu d'estime qu'elle attachait à la position sociale, en plus d'avoir percé à jour son mensonge, elle croisa les bras attendant la suite. Elle n'allait pas être déçue du voyage.... Lorsqu'il l'appela Alice, elle eut l'impression que son cœur avait loupé un battement, et s'était mis à battre de travers. Instinctivement, ses muscles s'étaient contractés, comme pour encaisser un vilain coup ou une attaque violente. C'était stupide, car ce qui allait suivre ne pouvait être que verbale, et certainement pas physique.

Mais ce n'était pas la première fois qu'on s'amusait à la torturer avec ce passé dont elle ne parvenait pas à se défaire. Et ce qui devait arriver arriva... Elrik.... Il avait mit Elrik sur la table. Comment avait-il osé.... Sa magie échappant, comme souvent, à son contrôle, les murs ainsi que le mobilier et le sol se recouvrirent de givre, la glace se formant par endroit. Elle allait le tuer.... Elle voulait le tuer. Mais elle ne pouvait pas.... La mâchoire serrée de même que ses poings, si elle n'avait pas les moyens de l'occire, ses yeux suffisaient à trahir son envie poignante. Elle s'avança néanmoins vers lui, la glace étendant son invasion au fur et à mesure qu'elle progressait vers Wriir. Elle lui lâcha une réponse acerbe, comme si chacun de ses mots était un coup de fouet.


-Vous croyez pouvoir me juger sur mon passé ? Comment le pourriez-vous, vous qui n'avez même pas idée des tourments de la soif ?! Vous, qui ne savez pas ce que j'ai pu ressentir ce soir là.... De ce qui s'est réellement passé ! Car si vous aviez eu ne serait-ce qu'une once d'esprit, vous n'auriez pas eu l'indécence de me comparer à vous. Votre assassinat est l’œuvre d'un acte prémédité et froid, avec toutefois une pointe de ressenti vu la manière dont vous l'avez massacré. Ce soir là, je n'étais qu'un nouveau né qui connaissait sa première crise de soif, et qui ne comprenant même pas ce qui lui arrivait, s'est retrouvé avec le sang de son frère sur les mains. Contrairement à vous, si j'avais pu éviter cela, je l'aurais fait, mais je n'ai rien pu faire, et je ne peux changer le passé. Je suis condamnée aux regrets et aux remords éternels pour avoir subit la malédiction liée à ma nature, là où vous n'aurez pas la moindre peine à passer à autre chose dans les minutes qui suivent. Et vous osez invoquer la morale, quelle sinistre farce. Si votre unique argument avéré repose sur cet événement, vous auriez tout aussi pu vous couper la langue, vous auriez eu l'air moins bête.

Elle était à présent juste devant lui, se demandant quelle sort affreux elle allait lui infliger.... Lorsqu'elle sentit la pointe d'une lame contre son corset. Son couteau... Comment avait-elle pu l'ignorer ? Tout simplement en se faisant distraire comme une pauvre nouille ! Yulenka était furieuse, mais contre elle-même. Se faire émouvoir par son propre passé des siècles et des siècles après le drame, quelle faiblesse ! Elle savait qu'elle n'avait pas le droit à ce genre de talon d'Achille. Preuve en était, cela la mettait en position délicate. Mais cette fois, ce fut elle qui eu un sourire en coin. Alors que Wriir pouvait plus ou moins la tenir en joue, même si elle pouvait aisément le désarmer, elle préféra une option plus originale. Elle s'avança brusquement tout contre lui, dans une proximité rare chez elle, et son visage à quelques millimètres de celui de Wriir souriait, dans une expression à la fois amusée et malsaine. Elle lui dit doucement, presque en susurrant.

-C'est ce que vous espériez ? Enfoncer cette lame en travers ce corps qui a déjà éprouvé la mort ? Me déposséder de ma non-vie ? Il va falloir faire mieux que ça mon cher....

Bien que la lame était plongée jusqu'à sa garde dans le plexus de Yulenka, celle-ci ne perdait pas une goutte de sang. Loin de là l'idée d'une quelconque avarice vampirique, mais l'éternelle demoiselle avait simplement usé de sa magie de passe muraille. La vampiresse rendait ainsi intangibles les zones autour de la lame, évitant toute blessure. Doucement, elle ôtait l'aliénation de l'esprit de son interlocuteur. La forteresse était déjà dans un état d'alerte silencieux, l'ombre ne pourrait pas lui échapper si facilement. Confiante, elle se dit qu'au besoin, elle pourrait toujours lui infliger de nouveau. Elle restait là, son regard toujours plongé dans celui de Wriir, ne percutant alors pas qu'en cet instant, et dans une proximité si rapprochée, l'ombre allait avoir tout loisir de constater à quel point la plastique des vampiresses demeurait fraîche et irrésistible. Elle qui voulait voir comment l'ombre allait réagir là où quelqu'un aurait pu se sentir bête, elle n'allait peut-être pas avoir l'effet escompté....
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Mar 09 Aoû 2016, 22:46

J'étais dans une posture des plus délicates, et c'était un euphémisme. Ysoline s'était bien gardée de me dire qu'il résidait dans cette forteresse un être aussi puissant, qui plus est dans un corps qui donnait l'impression de pouvoir le briser comme une brindille.

Pourtant de corps c'était bien le mien qui se soumettait à mon adversaire. Elle avait su d'un simple regard me maîtriser, cumulant par la même les deux pires choses qui puissent m'arriver : être asservi, et être asservi par un vampire. Mon seul moyen de m'en sortir était ce qui restait plus ou moins fonctionnel : la parole.

Je grimaçais quand elle éventa d'un revers de la main le mensonge que j'avais improvisé. Ce n'était pas tant le fait qu'elle puisse par un extraordinaire hasard connaître tous les Gardiens des Sceaux, mais qu'elle avait ce pouvoir de détecter les mensonges. Si à court terme cela ne plaidait pas en ma faveur, je venais de découvrir l'un de ses talents qui me rendrait plus que vigilant sur la façon que j'aurai de formuler mes phrases.

- Si je voulais certes vous faire réfléchir sur la délicate situation qui est la vôtre, je comptais aussi jauger vos connaissances sur une race dite secrète. Je prends note indépendamment de mon mensonge que vous ne savez finalement rien. Certes vous m'avez à votre botte, mais ne vous croyez pas à l'abri de tous dangers.

Je n'en dis pas plus, finalement mon allié contre son pouvoir était d'être suffisamment vague pour que la moindre hypothèse puisse en soi se révéler exacte. Il était plutôt temps de dévoiler ma seconde raison, bien plus personnelle.

J'avais visé juste, enfin à moitié... Le moins que je puisse dire, fut que côté réaction, elle réagit. Je la voulais interloquée, choquée, troublée, et à ma merci. Elle paraissait effectivement interloquée, choquée, troublée, mais d'une colère aussi volcanique que glaciale. En écho au déferlement de magie qu'elle déversait autour d'elle, les murs se mirent à trembler, la glace qui devait lui servir de cœur s'étendit dans toute la pièce, transformant mon souffle en buée cristallisée. Je plissais les yeux devant cette chute de température, n'en menant pas large devant cette glaciale impétuosité. Je ne voyais pas comment j'allais pouvoir me défaire de cette prédatrice aux dents longues.

Le monologue qu'elle me cracha presque à la figure témoignait à quel point sa colère était profonde, autant que son trouble j'en étais sûr. J'encaissais en silence, il m'était aussi impossible que déconseillé de lui couper la parole, à peine de subir bien plus violemment mon impudence. J'écoutais chacun de mes mots, finalement "heureux" que son discours soit si long. Il me permettait d'ordonner un tant soit peu ma future réponse si elle m'en laissait l'opportunité. On ne savait jamais à quoi s'attendre avec cette race : un discours moralisateur et élitiste pour mieux nous tuer ensuite.

Elle termina sa diatribe par une insulte sur ma stupidité. Stupide, je l'étais assurément, de m'être jeté dans la gueule du loup sans les précautions d'usage, mais je pouvais apercevoir à travers ses paroles un aveu de culpabilité qui ne demandait qu'à être pardonné.

- Joli discours, assurément. En espérant que vous n'attendiez pas de moi que je m'en émeuve. Vous juger ? Vous avez raison, je ne suis personne pour pouvoir vous juger. Que je vive ou meure, que je sois mon passé ou mon présent d'Ombre, je ne suis qu'un grain de poussière tout comme vous. Je ne vous juge pas non, je constate. Peu m'importe que vous ayez subi tout cela, peu m'importe vos prétendus regrets ou remords, vous-avez-tué-votre-frère. Vous-avez-tué-votre-mère. J'appuyais ces deux dernières phrases en les articulant plus lentement. Il n'y a aucune morale dans mes propos, mais plutôt votre hypocrisie à jouer l'outrée de voir l'un des vôtres mourir, quand vous n'avez même pas su réprimer vos propres pulsions. Soudain, l'occasion se présenta d'elle-même, elle me l'offrait même sur un plateau. Quant à vouloir me couper la langue, j'avoue que je préférerai bien plus trancher votre cœur de pierre.

Je levais le couteau alors que mon corps se trouvait libéré de l'emprise de ma tortionnaire. Je la mettais en joue, sans terminer mon mouvement, voulant probablement me délecter de ce mini retournement de situation. Certes elle avait bien plus de puissance que moi, mais elle avait mésestimé celle des émotions. Pourtant ce fut un sourire qui accueillit ma menace. Je pensais qu'elle allait pouvoir s'échapper en arrière sans la moindre difficulté car rien ne la retenait, ou saisir ma main après m'avoir de nouveau soumis, au lieu de cela elle me prit au dépourvu en s'avançant vers moi, son visage à tel point collé au mien que je sentais la fraîcheur de sa peau comme son souffle qui se posait sur mes lèvres. Ma lame l'avait assurément transpercé car je n'avais pas bougé la main. Elle avait beau eu s'empaler, je n'avais senti aucune résistance au niveau de la lame. Je baissais alors mon regard pour tenter de comprendre visuellement ce que je ne saisissais pas tactilement, et tomba nez à nez avec le décolleté plongeant de mon adversaire. Troublé je le fus assurément, bien plus que je ne devais l'être. Elle connaissait bien plus ses forces que moi mes faiblesses, et en abusait outrageusement pour me déstabiliser. Le pire dans tout ça c'est qu'elle y parvenait. Je me détestais de me retrouver à penser à ce qui se trouvait sous cette dentelle, alors que rien, absolument rien ne pouvait m'attirer chez elle. Elle était mon ennemie, la cible à abattre pour que je puisse quitter cet endroit.

Mes joues rougissaient sans que je ne puisse les contrôler, et j'aurai donné un Empire en cet instant pour me transformer en brume et quitter cet endroit.

- Cessez de vous approcher de moi de la sorte, vous .... vous .... me répugnez, réussis-je à articuler sans la conviction qu'un tel verbiage supposait. C'était la stricte vérité pourtant, terriblement ébranlée par la prestance de la demoiselle. Nul désir, mais ce foutu trouble incontrôlable. Il me fallait reprendre mes esprits, comprenant qu'un peu comme les Ombres, elle arrivait à rendre éthéré tout ou partie de son corps pour éviter une attaque physique. Je finis par la regarder un instant, avant de remonter ma lame toujours enfoncée en elle vers sa gorge. Si comme je le croyais elle devait garder son pouvoir actif pour que la lame ne transperce pas ses chairs, elle allait vite devoir prendre une décision. S'écarter pour se retirer de ma lame ou vivre pour l'éternité avec moi, une lame plantée dans sa gorge éthérée. Avec un peu de chance, ça la rendrait muette par la même occasion.

- Que faisons-nous à présent, vous me torturez, je vous tue, en tout cas, chacun tente de le faire sur l'autre ? Ce que les vôtres m'ont déjà fait subir vont me rendre bien plus résistant que vous ne l'escomptez. L'avantage comme l'inconvénient que nous avons vous et moi, c'est que nous avons l'éternité devant nous.... concluais-je. Je n'avais pas l'avantage, l'heure était au compromis. J'avais déplacé ma pièce sur l'échiquier où ma couleur partait tronquée de plusieurs pièces. A son tour de jouer...
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Mer 10 Aoû 2016, 00:41

La peur du danger.... Depuis sa première mort, étrangement ce phénomène s'était considérablement amoindri. Peut-être parce qu'il fut un temps, où elle attendait désespérément ladite mort en question. Mais déjà à l'époque, elle savait qu'elle ne pouvait s'ôter elle-même la vie sans être encore plus maudite qu'actuellement. Elle avait demandé à son père de l'achever, la seule personne qu'elle considérait digne de faire cela. Mais bien évidemment il avait refusé, et elle ne lui en tenait pas rigueur. Comment aurait-elle pu ? Depuis elle avait de nombreuses fois dansé une valse très rapprochée avec la grande faucheuse. Mais à chaque fois, elle s'esquivait de ses bras avant que la dernière note ne soit jouée. Elle savait que bien que puissante, elle n'était en rien inébranlable. Et aussi que peu importe la puissance qu'on avait, il y avait toujours plus fort que soi. Un recul poussé à l'extrême qui avait aboutit au fait qu'elle ne craignait plus sa propre mort. Celle de ses proches continuaient de l'effrayer en revanche. Mais la sienne.... Elle était indifférente à sa propre extinction. Elle ne "vivait" que pour que la mort des siens ne soient pas vaine, et pour ne pas laisser son père seul. Aussi, elle répliqua d'un ton neutre à l'ombre.

-Je suis consciente du danger, j'ai juste choisi de ne pas en avoir peur. Si un jour je dois mourir, alors je trépasserais et c'est tout. La peur ne changera rien à cela, et elle ne prévient pas du danger.

Outre son père, on ne pouvait plus vraiment la faire souffrir outre mesure. Elle avait déjà pris involontairement le soin d'être l'objet de son propre malheur, et de détruire malgré elle pratiquement tout ce qui pouvait être sensible pour elle.... La suite de l'échange fut plus tendue, et Wriir, qui avait attendu qu'elle finisse sa tirade, plaça sa réplique en continuant de provoquer sa colère, ainsi que la diminution drastique de la température ambiante. Il venait clairement de jeter un froid*. Mais là où il persistait et signait, l'éternelle demoiselle démontra qu'elle était aussi têtue que lui.


-Hypocrisie ? Quelle prétention, vous connaissez mieux que moi mes émotions peut-être ? Peut-être vous êtes vous forgés une image type des vampires, mais vos croyances n'ont aucunement force de loi. A moins que l'idée que le propre des crises de soif soit qu'elle ne sont pas contrôlables par les nouveaux-nés soit trop dérangeante pour vos convictions ? Ou peut-être préférez-vous croire qu'un vampire ne peut pas éprouver de regrets ou de sentiments pour quiconque ? C'est là la panache de bien des esprits obtus et ignares. Je n'ai aucun intérêt à jouer les outrées. Il n'y a que vous et moi ici, et je ne vois pas quel profit je pourrais avoir à essayer de vous faire croire que j'ai des sentiments.

Ce n'était pas la première fois qu'on lui servait le discours des vampires monstrueux, sanguinaires et au cœur de pierre. Mais même si un vampire pouvait être monstrueux, il avait néanmoins des sentiments. Ils étaient souvent moins sensibles au sort des autres. Mais ils pouvaient tout de même nouer des liens étroits. La différence résidait essentiellement dans le fait que les vampires étaient souvent très pudiques dans leurs émotions, surtout lorsqu'il s'agissait d'affection et d'attachement. La scène poursuivait son déroulement, et alors qu'elle pensait le rendre tout penaud, elle le vit rougir et bégayer. Elle ne comprit pas sur l'instant, surtout que ses propos n'étaient pas claires. Dans un sens, elle sentait qui disait la vérité, mais de l'autre il rougissait, était troublé, et lorsqu'elle baissa les yeux la lumière se fit dans son esprit.

Ses pommettes rosirent à leur tour, et elle s'écarta prestement de lui, affichant une mine renfrognée.


-Votre bouche parle, mais votre corps la contredit ! Un peu de tenue que diable !

Elle avait instinctivement replié ses bras sur son décolleté, profitant pour rehausser aussi discrètement que vainement son corset. Elle ne voulait pas le troubler de cette manière là, et se retrouvait prise à son propre piège. Décontenancée, la glace s'était fissurée bruyamment, avant de finir par disparaître. L'incident passé, Yulenka retrouva sa contenance, et écouta les propos de l'ombre. Elle réprima un soupir à l'entente de mauvais traitements que lui aurait fait subir des vampires de son vivant vraisemblablement. Mais cela expliquait beaucoup de choses.... Croisant les bras elle lâcha.

-Je ne suis pas au fait de toutes les dérives que certains de mes confrères ont pu vous faire dans une autre vie. Et même si l'idée de vous faire ravaler votre insolence n'est pas pour me déplaire, ça ne durerait même pas de quoi finir cette nuit avant que je ne me lasse. Je pourrais m'amuser à vous faire vivre les pires atrocités, cela ne me rendra pas mon comparse.... Et même si je vous arrachais la langue, vous trouveriez le moyen de m'assommer avec vos interprétations douteuses de mon passé.

Elle marqua une petite pause laissant échapper un petit soupir.

-Contrairement à ce que vous croyez, je connais un tant soit peu votre peuple.... Torturer une Ombre reviendrait à vouloir apprendre à nager à une ondine. Vous êtes très doué pour le faire tout seul. Il n'y a qu'à vous écouter parler d'ailleurs. Vous êtes devenu ombre, donc affranchi de ceux qui vous on vraisemblablement torturés et maltraités.... Et malgré votre éternité, malgré le temps, vous ressassez, et cette expérience continue d'occuper votre esprit, de vous hanter dans un sens. Si ce n'était pas le cas, vous n'auriez pas parlé de ce passé....

Elle tourna la tête vers la dépouille du vampire, avant d'ajouter.

-Et vous n'auriez pas mis tant de "cœur" à votre forfait....

Elle s'approcha du cadavre, et le touchant, elle le téléporta dans la morgue de la forteresse gérée par Razyel. Ceux qui étaient envoyés là-bas étaient dédiés à des funérailles traditionnelles, et non à servir d'engrais. Elle n'avait pas pu le sauver, elle tenait donc à ce qu'il puisse reposer en paix. Le défunt évacué, elle se tourna de nouveau vers son assassin. Qu'allait-elle faire de lui ? Mais de nouveau la porte s'ouvrit, et Lyzzie débarqua. Elle observa le sang au sol, elle observa Yulenka, et Wriir et demanda hésitante.

M...Mademoiselle ?

-N'aies crainte Lyzzie, il n'y aura pas plus de sang.... Nous allons te laisser travailler.

Bien que non vampire Lyzzie s'était relativement habituée aux découvertes macabres, mais pas dans ce genre de conditions. Se tournant vers Wriir, la vampiresse lui dit.

-Poursuivons cette conversation ailleurs....

Ouvrant la porte, elle laissa l'ombre passer devant, et dans la logique caractéristique de cette forteresse, ils arrivèrent..... Tout droit dans les jardins. Yulenka commença à marcher à travers l'herbe fraîche, qui lui arrivait aux chevilles. Et tout en faisant, elle proposa à Wriir.

-Nous avons tous nos secrets.... Je suppose que vous n'avez pas envie que j'ébruite votre nature ? Je n'ai pas envie qu'on sache mon passé. Croyez-le ou non, je n'en suis pas fière, et même si mes comparses ne s'en indigneraient certainement pas, je préfère laisser mon ancienne vie reposer.... dans une paix relative. Je subodore également que vous n'avez pas envie que je m'acharne sur vous, alors évitez de vous acharner sur les vampires que me sont proches.... Je pense que c'est là un marché raisonnable.


Non loin de là, dans la rivière qui sinuait, Kaly avait émergé son buste hors de l'eau, et nageait à l'encontre de la vampiresse. S'il était habitué à ce qu'elle parcourt son territoire, il était plus regardant lorsqu'un inconnu rodait dans les environs. L'équidé aquatique avait bondi sur la berge, et observait le duo, hésitant à venir, fixant Wriir pour essayer de voir s'il était hostile ou non. Il racla le sol de son sabot, piétinant lentement sur place.

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Mer 10 Aoû 2016, 11:28

Nous nous étions assurément engagés dans une joute verbale, car dans nos positions respectives, la magie avait de moins en moins sa place. J'imaginais aisément qu'en temps normal, tout non-Ombre serait déjà mort agonisant dans son sang, ou complètement glacé par la température ambiante de la pièce, mais heureusement pour moi, elle savait ce que j'étais, et ce que ça impliquait : perdre du temps à me torturer en espérant que cela lui procure du plaisir. Elle me ferait mal, elle me ferait souffrir, mais toutes ces blessures pouvaient-elles rivaliser avec celles que j'endurais depuis tout ce temps ? Dans l'immédiat elles seraient sans doute plus cinglantes, mais pris dans leur ensemble, elle ne serait qu'un plus de sel sur la plaie béante que constituait mon existence.

- Je ne vous connais, même si je sais vous avoir vue au Conseil des Chefs. Mais vous ne pouvez pas ne plus avoir peur. La peur ne se limite pas à sa propre mort. Elle ne se cantonne d'ailleurs pas à la seule mort. Vous aurez encore forcément peur un jour, que vous le vouliez ou non.

J'haussais les épaules, je croyais intimement qu'il était impossible de ne plus jamais avoir peur. Il s'agissait d'une émotion aussi vivace que l'instinct de survie, et bien plus coriace à déloger que l'amour ou l'amitié. On pouvait trahir ces deux dernières émotions, pas la peur. La braver ou l'ignorer consistait juste à l'éviter jusqu'à la prochaine fois.

- Enfin, concluais-je sur cet aparté, je suis sûr que vous êtes trop fière pour admettre que j'ai raison. Même si au demeurant, ne l'étais-je pas tout autant en n'admettant pas que je puisse avoir tort ?...

Là où par contre j'étais sûr d'avoir été trop loin, c'était après avoir insisté sur ce pan coupable de la vie de mon adversaire. C'était un mal nécessaire, car il me fallait ébranler ses défenses, mais à sentir le froid mordant saisir mes muscles, il ne me serait guère utile de l'avoir déstabilisée si je terminais en statue de glace éternelle. J'en connaissais suffisamment sur les vampires pour avancer des arguments autrement plus convaincants que le fruit de croyances populaires. A avoir été le jouet de l'un d'eux pendant une vingtaine d'année me laissait une certaine expérience de ce dont cette race était capable.

- Hypocrisie oui ... Vous ne savez pas contrôler votre abjecte soif et nous devrions en subir les frais ? Vous pompez ce liquide vital comme des charognards, transformant parfois la victime en la contre nature que vous êtes, et c'est moi l'obtus et l'ignare ? Assumez vos actes en renouvelant votre cheptel de suceurs de sangs, éduquez-les au moins au lieu de les laisser errer à faucher des vies au hasard juste parce qu'ils ont soif. Alors par pitié, ne me faites pas la morale sur les regrets et les sentiments. Tous les vampires que j'ai rencontrés, tous sans exception, fonctionnent exactement sur le même modèle : cette façade de glace cache vos écœurants penchants. J'ai appris à mes dépens à ouvrir les yeux sur cet état de fait. Je vous concède cependant que vous n'avez rien à me prouver, surtout dans nos situations respectives. Peut-être est-ce à vous que vous essayez de prouver quelque chose ?

Je n'aurais pas cru que nous nous serions engagés dans une joute verbale, défiant l'autre sur qui serait le plus convaincant dans ses certitudes. Cela me changeait de mes rapports habituels avec les vampires, consistant habituellement à les tuer, ou si cela m'était impossible de les fuir comme la peste. Quoiqu'il en soit, cette peste là avait des atours qu'elle savait mettre en valeur. Peut-être recevait-elle son amant pour se vêtir de la sorte, ses charmes mis en apparence pour tout homme doté de vue. Même l'Ombre que j'étais ne pouvait ignorer l'évidence même. Je ne pus rien faire contre le rougissement venant colorer mes joues, et ma réaction créa une sensiblement identique sur elle, à mon grand étonnement. Elle osait reprocher mon comportement ?!

- Vous .... vous vous collez à moi, exhibant vos charmes sans que je n'y puisse rien, et vous vous indignez que je puisse en être troublé ! Je ne sais pas ce que vous faisiez avant d'avoir en tête de me tuer et de venir ici, mais à s'habiller aussi court, il ne faut pas s'attendre à ce que je puisse rester aussi froid que vous ne l'êtes !!

J'avais dit ça.... moi ? Je ne sus pas à quoi elle pensait à cet instant, mais la glace disparut aussi vite qu'elle était apparu, la température suivant plus lentement ses pas vers une chaleur tolérable. L'autre bon point était que la patience n'était pas son fort, tout l'inverse de moi. A la bonne heure si elle entendait rapidement se lasser de me torturer. Je n'étais une fois encore pas en position de force, toutes les bonnes nouvelles étaient bonnes à prendre.

L'entendre parler de ma nouvelle et pesante race était presque aussi douloureux, si ce n'est plus, que les atrocités qu'elle aurait pu m'infliger. J'étais comme mis à nu, à l'image d'un enfant qui savait avoir mal agi, mais dont on lui rabâchait les oreilles de A à Z sur ce mauvais comportement, ses conséquences, la honte et le mal qu'il avait fait. Je plissais les yeux en la regardant décrire aussi sommairement que violemment notre condition.

- Vous comprenez alors pourquoi je sais un minimum de quoi je parle sur votre race qui est tout autant contre nature que la mienne. Nous avons une malédiction présentant des similitudes, mais un parcours pourtant bien opposé. Je n'ai pas tiré de plaisir au sens commun du terme quand je me suis acharné sur ce vampire, mais la satisfaction au delà de la tâche à accomplir qu'il a eu ce qu'il méritait. La mort violente contre l'asservissement me semblait être un bon compromis.

Le cadavre disparut de mon champ de vision d'un geste de la demoiselle, et je m'assurais que l'âme soit toujours ancrée en moi. Il ne pourrait pas revivre, je n'étais pas venu pour rien. L'apparition de la domestique nullement choquée par la mare de sang attendit l'aval de sa maîtresse pour nettoyer mon forfait.

- En parlant d'asservissement, elle travaille ici de son plein gré dans la joie et la bonne humeur je présume ? fis-je vers Yulenka en pointant du menton la domestique, avant de quitter la pièce et me retrouver ... dans les jardins de la forteresse. Ce lieu n'aurait jamais ma sympathie c'était évident.

Je suivais Yulenka qui restait après tout la maîtresse de ces lieux, le bout de mes bottes se perlant de la rosée encore accrochée aux herbes folles du jardin. La vampiresse ne semblait nullement gênée de marcher pieds nus, j'en venais presque à croire que la sensation devait être agréable. L'heure n'était cependant pas aux petits bonheurs simples, en tout cas pour moi.

Une fois hors de portée de cette Lyzzie, mon "hôte" évoqua la délicatesse de notre relation, et des secrets que nous avions l'un sur l'autre. Je pesais le pour et le contre de sa proposition.

- Révéler mon secret à tout vent vous causerait bien plus de problème par notre Souverain qu'à moi. Il me suffirait de changer de visage et de nom, et avec le temps refaire un nouveau simulacre de vie. Sauf que je n'y tiens pas spécialement, j'ai de nombreuses choses à accomplir. Votre proposition n'est pas tout à fait équilibrée. Si je peux certes ne pas me focaliser exclusivement sur ceux de votre cour, le cycle reste ce qu'il est, et je ne veux ni ne peux m'interdire d'accomplir ce qui doit être. Je peux cependant vous concéder que je ferai le travail ... proprement. Par égard pour Lyzzie.


Je lançais cette dernière petite phrase non sans dissimuler un léger sourire amusé car elle savait bien que je me fichais un peu des tâches que cette domestique devait accomplir ou non.

- Je peux garantir le secret sur votre passé tant que la réciproque est respectée. J'ai bon nombre de tares, mais briser les secrets comme vous vous en doutez de par ce que je suis n'en fait pas vraiment partie. Ce compromis vous sied-t-il ?

Un animal vint se joindre à notre duo, bien que restant distant. J'avais pu constater ce comportement de nombreuses fois, j'étais après tout un étranger dont les intentions lui étaient inconnues. Quand son regard se porta sur moi, nous nous fixâmes et à la façon autodidacte que j'avais apprise au fil du temps, je lui projetais des images mentales du message que je voulais lui passer, des idées et concepts plus que des mots articulés pour une compréhension humaine. Je lui fis comprendre que j'étais un ami, adoptant mentalement la pose d'un être inoffensif, avant de m'enquérir de son état à lui. "Prisonnier" fut le concept que je tentais de saisir chez lui, mais l'animal vint à ma rencontre, tapant ses naseaux contre la main que je venais de tendre à son approche. Je me mis à sourire, avant de lui flatter les flancs par une volée de caresses.

- Sans vous manquer de respect, voilà la première bonne surprise depuis que je suis arrivé ici.
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Mer 10 Aoû 2016, 21:17

La vampiresse esquissa un sourire en coin avant de rétorquer.

-Je n’ai pas peur du danger, pour ce qui est de ce qui serait susceptible de m’effrayer, je le garde pour moi….

Elle n’était pas assez folle ou étourdie pour lui avouer ses craintes, c’était là une véritable invitation à se faire lyncher. Elle pouvait tout aussi bien se suicider elle-même que l’effet aurait était le même….. Cela dit, elle apporta une nuance à ses propos.


-Si vous croyez réellement qu’on ne peut vivre sans peur, je vous invite à aller rencontrer les pauvres hères qui n’ont plus rien à perdre, et qui sont prêt à sacrifier leur vie sans que cela les fasse sourciller. Ceux qui ont été démuni de tout se moquent du monde et de la souffrance, méprisant jusqu’à leur propre mort, surtout qu’elle résonne le plus souvent comme une délivrance. Pas de famille, pas d’amis, pas d’envie, pas d’espoir, juste une souffrance continue…. En y réfléchissant bien, ce tableau ressemble presque aux caractéristiques de votre peuple, ironique n’est-ce pas ?

Lorsqu’on était suffisamment désespéré pour se pousser au suicide, et qu’une éternité de tourments et de souffrances vous attendait en prime, que pouvait-on craindre de plus ? L’ombre posa une conclusion qui arracha un petit rire sarcastique à l’éternelle demoiselle, qui ne manqua pas de le reprendre.


-Voilà une phrase convenue que je pourrais à loisir vous retourner….

Elle l’écouta persister et signer dans sa vision si personnelle des vampires, un sourire goguenard en coin, avant de lui répondre.

-Le monde en subira en effet les frais, c’est là une fatalité où ni vous ni moi ne pouvons y remédier. Le fait que nous transformions nos infants en vampires ne change en rien le fait que vous manquiez cruellement d’informations sur le mode de fonctionnement des vampires. Tous les vampires que vous avez rencontrés se sont comportés de manière abjecte avec vous.... Mais combien en avez-vous vu ? Une dizaine ? Une vingtaine ? Qu’est-ce que ce chiffre ridicule sur des dizaines de millier de vampires ? Vous n’avez pas eu de chance, c’est indéniable. Connaissant certains penchants des vampires, je pense savoir quelles horreurs vous avez pu éprouver. Mais tous les vampires ne sont pas sadiques finis avec leur proie, ce genre d’attitude est propre à chaque clan, voir à chacun. Par ailleurs les vampires ne traitent pas leur descendance de la même manière que leur proie. Et s’il existe des géniteurs indélicats ou irresponsables, ce n’est pas quelque chose que le reste de la communauté approuve, bien au contraire. Mais chaque peuple à ses contrevenants. Et ses difficultés. Contrôler sa soif est un apprentissage long et fastidieux pour les nouveau-nés, et si nous pouvions nous passer de ce passage laborieux pour directement dompter cette malédiction, soyez sûr que nous le ferions. Personne n’aime perdre le contrôle de soi…. Même si nous œuvrons pour trouver les nouveau-nés abandonnés et délaissés, et les encadrer, notre bonne volonté ne suffira jamais à couvrir toutes les terres du Yin et du Yang….

Pour avoir été livré à elle-même, elle savait à quel point cela été difficile, voire impossible pour un jeune vampire de se débrouiller seul. Elle avait bien essayé de contrer ce problème, mais le monde était si vaste et les vampires si éparpillés…. Les lois ne suffisaient pas à prévenir les abus. Et maintenant que le gouvernement avait changé, il y avait de grande chance pour que ce programme soit abandonné. Mais ce n’était plus son problème. Elle laissa échapper un autre petit rire lorsqu’il lui parlait de vouloir se convaincre elle-même.


-J’ai parcouru ces terres trop longtemps pour devoir me convaincre sur quelque chose que j’ai personnellement vécu et combattu….

Était-il seulement capable d’entendre ce qu’elle disait ? De concevoir que tous les vampires n’étaient pas comme ceux qu’il avait vu ? Elle en doutait très profondément. Plus un traumatisme était profond et douloureux, et plus il était difficile de passer outre. Cela demandait une force de caractère et une capacité de recul presque inouïe. Elle même se souvenait de cette colère et de cette rancune qui l'avait dévoré contre ce géniteur qui, elle le croyait à l'époque, l'avait abandonné. N'avait-elle pas au début, refusé de croire qu'elle n'avait été qu'un accident, et qu'il ne s'était pas rendu compte de ce qu'il avait fait ? La couleuvre avait été ô combien difficile à avaler. Et même une fois passée, ses séquelles s'étaient exprimés à travers les lois qu'elle avait promulgué sur les abandons des nouveau-nés. Changement de ton et de conversations lorsque l'ombre vint à discuter de ses attributs et de ses charmes. Toujours renfrognée, Yulenka ne se démonta pas, et nia en bloc toute imputation à l'incident.

-Figurez-vous que je ne suis pas encore devineresse, et que je n'avais pas prévu qu'un intrus allait s'inviter chez moi ! J'ose prétendre qu'on a encore le droit de s'habiller de manière décontractée chez soi. Et vous exhiber mes charmes, quelle absurdité ! Vous croyez sincèrement que j'ai la moindre intention de vous séduire ?!

Les seules personnes qu'elle avait pu séduire au cours de sa longue existence se cantonnait à une catégorie de personne; ses proies. Et il n'y en avait plus une seule pour en témoigner. Mais cela, il n'y avait qu'elle pour le savoir. Et comme elle n'était pas toujours à l'aise avec l'étendu de son propre charisme, et les effets de sa plastique, il n'était pas rare qu'elle produise involontairement de l'effet chez autrui.... Cela passant, elle observa l'ombre affirmer ses connaissances sur sa race. Ce qui a ses yeux était une grossière erreur, mais c'était là son point de vue, et elle le savait. Elle se contenta alors de lui répondre.

-Vous ne connaissez de ma race que d'un point de vue extérieur, ou plutôt du point de vue d'une "victime". Il est toujours plus facile de critiquer lorsque l'on ne se trouve pas de l'autre côté du miroir. De ne retenir que ce que notre nature nous pousse à faire, sans voir ce qu'elle nous inflige. Mais en adoptant ce point de vue là, vous n'aurez jamais qu'une seule facette de la pièce. Vous n'aurez pas la vérité, ni une constatation des faits. Mais simplement ce qu'il vous sied de croire. Vous avez sélectionné les données du problèmes qui vous convenaient, mais pas l'équation dans sa globalité. Vous ne pourrez donc jamais réellement le résoudre. Mais c'est souvent là ce que recherche les gens. Pas la Vérité, mais leur vérité. Car c'est là la solution la plus simple et peut-être la plus supportable pour vous.

Les choses étant dites, l'arrivée de Lyzzie poussa les deux protagonistes à poursuivre leur conversation ailleurs. La remarque de l'ombre sur Lyzzie fit lever les yeux au ciel à la vampiresse, qui répliqua.

-Évidemment voyons. J'ai pour idée que les gens sont bien plus efficaces lorsqu'ils travaillent selon leur propre volonté que lorsqu'on les y contraint. Lyzzie est logée, nourrie, blanchie, et bien entendu payée. Je la laisse gérer son travail de manière autonome, et elle est également en charge de la gestion et de la rémunération des autres employés. Elle peut partir quand elle le désir, mais je fais en sorte de lui offrir une place très avantageuse pour l'inciter à rester. Ce n'est pas plus compliqué que ça.


Elle avait eu tant d'occasions d'avoir des esclaves, mais pour elle ce n'était ni utile, ni rentable. Il fallait veiller constamment à garder un contrôle dessus, à saper les esprits de rébellion ou de fuite, à veiller si le travail était bien fait.... Sans compter que l'état d'angoisse ou de déprime permanente les usait très rapidement. Vraiment elle ne comprenait pas l'esclavage. C'était contre-productif au possible. Même si elle était trop paranoïaque pour le dire, Lyzzie était avant tout une amie de très longue date et même une confidente. Mais Wriir n'étant pas quelqu'un qui lui semblait bienveillant, elle préféra éviter de paraître trop familière avec elle, histoire d'éviter les tentations de se servir de Lyzzie pour l'atteindre. Peut-être était-ce du zèle, mais elle préférait être prudente.

Elle écouta l'avis de l'ombre sur l'échange. S'il avait trouvé à redire, elle ne pouvait pas non plus lui reprocher d'être trop gourmand. Il avait une mission à laquelle il ne pouvait se soustraire, et elle ne pouvait pas lui demander d'aller à l'encontre de règles qui les dépassaient tous les deux. Sans quoi elle ne vaudrait pas mieux que lui lorsqu'il reprochait aux nouveau-nés de ne pas être capable de maîtriser leur crise de soif. Néanmoins il convint de faire cela de manière plus "propre", presque professionnelle si l'on voulait. Utiliser Lyzzie comme argument sonnait aussi faux qu'un ange chantant le Requiem, mais elle répondit pour la forme.


-Lyzzie vous en remercie d'avance....

Il proposa alors un échange de bons procédés qui semblait relativement honnête à la jeune vampiresse, qui n'avait d'autres choix que d'accepter de toute manière.

-Il me sied. Que le sang en soit témoin.


L'affaire conclue, l'arrivée de Kaly changea quelque peu la donne. La créature, après avoir observé Wriir et reçu de lui des signaux exprimant une certaine bienveillance, s'était approchée pour découvrir plus en détails ce nouveau venu, et en plus se faire cajoler au passage. Bien qu'un peu farouche de tempérament, la présence continue de bipèdes sur son territoire lui avait appris à reconnaître les bons moments à saisir avec ces curieuses bestioles à deux pattes. Aussi ne boudait-il pas son plaisir. Yulenka en revanche fut surprise de découvrir l'attrait de l'ombre pour le monde animal. Elle ne manqua pas la réplique de l'ombre pour en placer une autre.

-Si vous voulez des bonnes surprises ici, il suffit de vouloir en trouver et elles s'offriront à vous.... Cela dit, je dois avouer que vous savez y faire, Kaly est du genre méfiant, et il a déjà noyé des visiteurs qui on voulu le brusquer où qui n'ont pas respecté son environnement. Mais je trouve que son caractère fait aussi son charme. Et avant que vous ne posiez la question, oui il est ici en parfaite liberté. Enfin presque.... La vérité est que Kaly est ici parce qu'un village d'humain a complètement détruit son ancien habitat, ne tolérant pas la présence d'une créature sauvage qu'ils ne pouvaient pas dompter, et surtout qui défendait son territoire. J'ai été témoin de cet événement, à l'époque j'étais bien impuissante pour pouvoir faire quoique ce soit. Et lorsque j'ai pu construire mon propre domaine, je lui ai proposé de s'installer ici. Le coin doit lui plaire car depuis, il n'est plus jamais parti. Ha, vous pouvez lui parler il nous comprend parfaitement.

Le kelpie continuait de découvrir, et en un sens, de faire connaissance avec l'ombre. Il vint frotter le bout de son museau sur la tête de Wriir, respirant son odeur, ébouriffant un peu ses cheveux et testant sa consistance. Et visiblement, sa découverte lui plaisait. L'imposant équidé poussa une sorte de hennissement suraiguë, rappelant un peu le son que pouvait faire les dauphins. Il se mit à pousser de sa tête l'ombre vers la rivière, comme l'invitant à y aller, avant d'y plonger lui même avec bonheur. Yulenka observait la scène un large sourire amusé aux lèvres, se demandant si le Kelpie allait arriver à mettre l'ombre à l'eau, ou s'il lui laisserait le choix. La créature guillerette, nageait paisiblement et avec fluidité sur l'eau. Tout en croisant les bras, la vampiresse commenta.

-On dirait qu'il vous apprécie beaucoup, pour vous inviter à entrer dans "son eau", vous avez dû le charmer. C'est un honneur qu'il vous accorde.

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Mer 10 Aoû 2016, 23:29

A la pirouette syntaxique dont la vampiresse venait de faire, je finis par hausser les épaules.

- Soit, vous n'avez pas peur du danger, mais ce qui vous effraie n'en est pas un, de danger. Admettons.

La peur, ou sa cousine l'effroi étaient intimement liée au danger, à la menace, rationnels ou non, réels ou supposés. Avoir peur du noir par exemple n'était pas tant l'obscurité en soi qui était inoffensive, mais tout ce qu'elle pouvait cacher en son sein qui générait cette paralysie. Quant à la notion de vivre sans peur, une fois n'était pas coutume nos points de vue ne s'accordaient pas. Vivre sans peur était impossible quoi qu'elle en pense.

- J'ai bien peur que vous vous trompiez. Je vous concède bien volontiers que certains se donnent à la mort telle la délivrance qu'ils espèrent avoir, après une existence misérable, et croyez-moi, j'en ai rencontré bon nombre dans le cadre de mon ... travail. Après tout, ceux qui voulaient se suicider étaient rarement ceux à qui la vie souriait. Mais pour en arriver à ce stade de pensée, c'est que c'est la vie même qui leur fait peur. Certains ont même peur de se suicider, non pas par l'impossibilité de faire marche arrière, mais de se louper et de se trouver encore plus misérable tandis qu'ils pensaient avoir déjà touché le fond. La peur est omniprésente, ce qui nous différencie est notre faculté à l'appréhender, l'apprivoiser, même en l'oubliant, en se persuadant qu'elle a été domptée, elle se tapit toujours au fond de vous et vous surprendra au moment où vous vous y attendrez le moins.

Je ne pus m'empêcher de sourire sans joie quand les chiffres entrèrent en ligne de compte. S'il fallait rencontrer tous les êtres d'une race pour s'en forger une idée, il me faudrait effectivement un peu de temps pour affirmer quelque chose sur les vampires. A l'entendre, nous devrions presque plaindre ces pauvres êtres dont le destin n'a pas été facile, tributaires et dépendance d'une soif qu'ils devaient épancher .... oh, au détriment de la gorge d'une autre personne qui n'avait rien demandé.

- Évidemment, je n'ai .... hmm... pas eu de chance oui. A chaque fois, mauvais endroit au mauvais moment. A chaque vampire rencontré, toujours ce même archétype mais il semblerait que je défie à moi seul la loi des probabilités : je ne suis tombé que sur les mauvais, à chaque fois !! Fort de cette malchance que nous autres Ombres traînons, je vais, pour la forme, vous accorder le bénéfice du doute. Je ne vais donc pas parler de ce vampire occis que vous venez de faire volatiliser, et qui retenait captive une vierge probablement pour lui apprendre les règles de bienséance : ce serait être inconvenant avec la respectabilité qui est due chez vous.

En parlant d'inconvenance, son rapprochement aussi soudain que quasi tactile me troubla autant que le déchaînement glacial de magie dont elle avait fait montre peu de temps avant. J'avais beau crier à mon innocence, n'étant tout de même pas responsable de ses tenues affriolantes, elle eut le culot de nier en bloc toute responsabilité.

- Bah je ne sais pas, mettez une cape, un manteau, ou que sais-je encore si vous détectez un intrus chez vous bon sang !! Hmm, à y réfléchir, ce n'était peut-être pas l'expression la plus appropriée en l'espèce. Il ne manquerait plus que ça que vous tentiez de me séduire ! Cette tenue montre presque ... presque tout de votre corps allons ! Vous .... vous n'êtes pas DU TOUT mon genre sachez le !! Je grommelais dans mes dents d'autres borborygmes inintelligibles, témoignage du combat entre ma raison et mes pulsions, dont l'issue était incertaine.

- N'étant pas vampire, j'ai été leur victime oui, il ne faut pas non plus être devineresse pour s'en douter.
J'allais continuer quand la dénommée Lyzzie arriva en renfort domestique. A entendre Yulenka, il y avait des gens assez fous, désespérés ou stupides pour sciemment proposer leurs services à ces prédateurs sur pattes. Je jetais un regard froid en direction de la servante, avant de couler celui-ci vers sa maîtresse.

Quand nous sortîmes de la pièce pour déboucher en toute logique dans les jardins, je ne pus m'empêcher de lancer une pique futile en direction de la vampiresse.

- Quelle bonté d'âme. J'ai du mal à croire ce que vous me dites, surtout avec le pouvoir qui a réussi à me paralyser, mais une fois encore, disons que je vous accorde le bénéfice du doute, comme vous semblez faire partie des - et j'accompagnais le mot qui suivit de mes doigts - "gentils" vampires.

Le problème quoiqu'il en soit n'était pas cette domestique folle à lier mais le lien inconfortable qui s'était tissé entre Yulenka et moi. Chacun de nous détenions un secret de taille sur l'autre, et aucun de nous deux n'avoir le pouvoir nécessaire pour tuer l'autre. L'heure était donc, aussi pénible cela me fut-il, à la négociation. A force de discussion et de rectifications ici et là, Yulenka finit par accepter le compromis. Point de tueries aveugles contre point de fuites sur ma race. La phrase scellant cet accord me fit pour autant tiquer.

- Laissons le sang où il est si vous le voulez bien. Celui que j'ai fait couler dans votre demeure n'est rien à côté de celui que l'un des vôtres à fait couler de mon corps.

Nous continuions notre route jusqu'à tomber sur une faune et une flore bien plus variée que je ne l'aurai escompté, dont une sorte de cheval aquatique que je n'avais vu auparavant. Ma curiosité me poussa forcément à vouloir communiquer avec lui. J'avais bien conscience que certaines créatures pouvaient se montrer aussi vicieuses que les pires races "supérieures" peuplant ces terres, mais généralement, leurs modes de pensée étaient assez simples, sans pour autant qu'ils soient dénués d'intelligence.

Délaissant un peu la vampiresse pour me concentrer sur l'animal, je fus satisfait de voir qu'il répondait à mes appels positivement, et me laissait faire lors de son inspection alors que je lui flattais l'encolure. Une belle bête assurément, dont le regard trahissait une certaine noblesse et fierté d'âme. Je le fis remarquer à mon hôte qui m'enjoigna de porter mon regard partout où je me trouvais. Je découvris alors une variété assez impressionnante d'animaux en tout genre, pour peu que l'on y faisait attention. Autant s'y trouvaient des oiseaux, quadrupèdes carnivores ou herbivores des plus classiques, le félin gigantesque aux ailes de dragons qui paissait un peu plus loin en nous jetant un regard presque blasé méritait sacrément le coup d’œil.

Sans trop m'en rendre compte, la créature que je flattais, dont j'appris qu'il se prénommait Kaly, m'avait amené non loin de son habitat naturel, et je pris en coupe un peu d'eau pour l'en asperger et reprendre mes flatteries. J'écoutais Yulenka m'expliquer qu'il était assez rare qu'il accorde ce genre d'affections au premier étranger venu, et je souris légèrement vers cette créature que j'appréciais soudainement bien plus.

- Toi aussi alors tu as été arraché à tes terres. Tu aurais quand même pu choisir meilleure maîtresse des lieux tout de même
, fis-je d'un ton taquin, baissant d'un ton sans pour autant le rendre inaudible à la vampiresse. Tournant mon regard vers cette dernière, je m'adressai ensuite à elle : Des animaux que je connais et que je vois ici, je dois reconnaître, même si ça me fait mal de l'avouer, qu'ils n'auraient pas élu domicile ici s'ils ne s'y étaient pas senti à l'aise. De ce que j'ai pu comprendre d'eux, ils ...

Je ne pus terminer ma phrase, car notre cher Kaly ne semblait pas trouver à son goût que je puisse plus m'intéresser à cette deux pattes qu'à lui, et d'un coup de violent bien calibré, me fit voler vers l'eau d'où je m'y engouffrais entièrement. Finissant par remonter ma tête, les cheveux se collant devant mon visage, Kaly avait disparu de mon champ, avant qu'il ne réapparaisse dans l'eau en s'y mouvant avec une dextérité incroyable.

- Il a une bien étrange façon de montrer son attachement, et son sens de l'honneur est particulier de mon point de vue. Je ne suis pas encore coutumier de ses habitudes c'est évident. Je me relevais alors que j'avais pied, l'eau m'arrivant jusqu'aux genoux, et bien décidé à remonter sur la rive, je sentais une mâchoire attraper mes vêtements par le dos et me tirer une fois encore en arrière, me faisant goûter la fraîcheur du bassin.

Surnageant dans les ondées sombres du lac, je sus qu'il n'était pas dans mes plans à court terme de pouvoir remonter sur la terre ferme.

- Celle qui finalement m'a indirectement conduit jusqu'à cette situation compte-t-elle me regarder d'un air moqueur avec pour seule humidité ses orteils sur l'herbe ? Avec un peu de persuasion, je peux peut-être convaincre Kaly de vous faire patauger à votre tour ?... Quoique, dans cette tenue aussi.... comment avez-vous dit déjà, décontractée oui c'est ça, vous ne voudriez pas encore vous offusquer des réactions que cela engendrerait.

Je ne pouvais me résoudre à ne pas l'agacer, la titiller. Elle m'énervait autant qu'elle m'intéressait. Je la haïssais autant qu'elle me fascinait en quelque sorte. Cette fichue vampire avait le don de m'exaspérer, mais je ne faisais rien pour l'en empêcher.
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Jeu 11 Aoû 2016, 18:35


L'ombre restait fermement convaincue que même dans les pires situations, même pour ceux qui se suicident, la peur existait. Ce qui n'était peut-être pas faux, mais à vrai dire, ce n'était pas à cette catégorie là à laquelle pensait la vampiresse. Car comme l'avait fait remarquer très justement Wriir, celui qui se suicide a peur que sa vie continue. Non, elle pensait davantage à ceux qui étaient dépossédés de toute forme d'intérêt, pour quoique cela puisse être. Une catégorie de personne relativement rare, dont elle ne savait s'ils résultaient d'une forme de dépression gravissime ou autre. Le fait était qu'ils ressemblaient plus à des légumes qu'à des êtres vivants, et étaient souvent recyclés en esclaves bas de gamme ou en chair à canon. Dénués de toute volonté, ils étaient malléables à loisir, du moins pour ceux qui n'étaient pas juste complètement prostrés dans on ne savait quelle partie de leur tête. Ils étaient des êtres qui se contentaient d'exister, jusqu'à ce que la vie, ou le premier péon du coin, en décide autrement. Néanmoins, partir dans ce genre de détails, ou même prolongé le débat ne rimait à rien. La vampiresse esquissa un petit sourire, se contentant de répondre sur un ton condescendant.

-Si vous le pensez....

Aux sarcasmes de l'ombre, la vampiresse répondit par pragmatisme, bien qu'assez détachée dans son intonation.

-Sans être une généralité, les vampires qui jouent avec leur victime ne sont pas non plus un fait rare. Vous êtes malchanceux oui, tout comme cette demoiselle vierge qui a croisé la route de ce vampire. Elles sont particulièrement appréciées pour leur goût, et il n'est pas rare qu'il veuille la conserver pour certaines occasions, ou tout simplement qu'il souhaite la faire durer.

Elle s'abstint de dire que ce genre de procédé évitait une trop grande consommation de vierges, car les autres races avaient énormément de mal avec le fait de faire partir de la chaîne alimentaire, sans être au dessus du panier. Si elle parvenait à conserver plus ou moins une certaine tenue dans son discours, lorsqu'il s'agissait de l'incident, elle était beaucoup moins détachée que précédemment. Essayant toutefois de se contenir, elle précisa à son interlocuteur.

-Lorsque j'ai détecté votre intrusion, je pensais à un assassin vampire venu pour essayer de me tuer, pas à une ombre venue massacrer les miens ! Il n'était pas prévu que je ne puisse pas exterminer l'intrus. Je n'allais pas prendre le temps de me changer pour occire un malfrat, l'affaire devait se régler en à peine quelques minutes, et ne laisser aucun témoin. Et cette tenue ne montre pas autant que cela mon corps, c'est vous qui avez l'esprit terriblement mal placé, et qui vous troublez pour rien ! Parce que désolée de vous le dire, mais pour une personne qui n'est pas du tout de votre genre, vous avez du mal à vous remettre je trouve !

Dire que Wriir se troublait pour rien était terriblement injuste et faux, mais encore fallait-il qu'elle soit aux faits des impressions qu'elle inspirait. Lyzzie avait pourtant bien essayé de lui mettre la chose dans le crâne, mais l'absence de retour de la gent masculine ne l'avait pas aidé. La présence d'un certain bélua n'étant pas étrangère à cela.... Le duo improbable à l'extérieur, Yulenka décida de snober purement et simplement la pique de Wriir, la trouvant trop basse à son goût, pour mieux jouer à fond la carte du pragmatisme.

-Croyez ce qu'il vous plaira de croire concernant Lyzzie, j'ai autre chose à faire que soigner votre paranoïa. Pour ce qui est d'être gentille, je laisse les conceptions de bien et de mal à ceux qui ont envie de se coller une étiquette sur le front. Je n'agis pas pour être gentille ou bonne, j'agis en fonction de ce qui me semble important ou nécessaire. Prétendre que mon jugement est bon ou mauvais est absurde, il m'est juste propre. Certains le trouveront bon, d'autres le trouveront mauvais, et dans l'absolue je m'en moque. L'important est que j'agisse au mieux pour moi en fonction de mes convictions.

Elle n'était pas aussi sombre que certains de ses confrères, mais elle ne pouvait pas se résoudre à dire qu'elle était gentille, même pour une vampire. Cela aurait été prendre les gens pour des imbéciles. Elle avait ses moments de cruauté et de jeux, elle avait ses moments de clémences et parfois même de bienveillance, voilà tout. La gentillesse et la bonté appartenait à sa jeunesse d'ange.... Du moins c'était ainsi qu'elle même voyait les choses, car les points de vue extérieurs étaient souvent bien différents. Elle esquissa un sourire en coin lorsque Wriir tiqua sur ses paroles, et ajouta légèrement moqueuse.

-Vous comptez vous vexer au moindre idiome vampirique ? Vous n'avez pas fini.... Par ailleurs, je ne parlais pas du sang que vous avez versé ou fait verser, mais du sang en général, après tout c'est une locution.

La rencontre avec Kaly avait peut-être permis à l'ombre de se détendre un peu, mais pas d'arrêter ses piques et bassesses. La vampiresse avait bien évidemment entendu sa messe basse, et croisant les bras, elle en profita pour lui renvoyer la balle.

-L'avantage des animaux, c'est qu'ils n'ont pas l'orgueil démesuré et injustifié des humanoïdes, qui chouinent lorsqu'ils se retrouvent sur le menu. Même s'ils peuvent tout à fait se faire dévorer ou accablé par un humain ou autre, ils ne jugent pas sur le régime alimentaire ou les pratiques d'une race. Ils ne prennent en considération que ce que la personne est réellement avec eux. Ils sont bien plus sages et nobles que certains bipèdes....

Un petit retour de tacle qui ne visait pas uniquement Wriir, mais l'ensemble des races en général. Alors que Wriir parlait, Kaly réussit à le pousser à l'eau arrachant un rire à la vampiresse qui vint ramener sa main devant ses lèvres pour dissimuler quelque peu ce dernier. Mais elle eut du mal à s'arrêter, surtout lorsque Kaly vint ramener Wriir à lui, bien décidé à garder près de lui son nouvel ami. Finalement, l'ombre vint rappeler à l'éternelle demoiselle qu'il lui serait agréable qu'elle puisse le sortir de là, tout en continuant de l'enquiquiner verbalement. Yulenka s'approcha du bord, tout en lui répondant.


-Parce que vous croyez réellement qu'il vous a attendu pour m'emmener faire trempette avec lui ? Si je me promène trop proche des rives, j'ai une chance sur deux de finir trem....

Elle n'eut pas le temps de terminer sa phrase que Kaly surgit des eaux pour pousser la vampiresse à l'eau via un bon coup de buste. Yulenka se redressa rapidement, ses cheveux flottant à la surface de l'eau en une seconde couche bleutée qui ondulait sagement sous les remous.

-....pée.

Elle se tourna vers le kelpie, qui était retourné dans l'eau, et le gronda les poings sur les hanches.

-Kalyyyyy.....

Mais l'équidé n'en avait cure, et se contenta de pousser un hennissement moqueur, tout en donnant un coup de tête à Yulenka. Si elle n'avait pas sa force pour elle, cela l'aurait surement plus ou moins assommée, comme cela s'était déjà produit auparavant. Pourtant c'était là un geste affectueux de Kaly, et la vampiresse le savait. Il essayait juste de se montrer mignon pour ne pas qu'elle râle.

-Oui, oui, tu sais très bien ce que j'en pense, et ton air innocent ne trompe personne hein !

Mais Kaly semblait très content de son coup, et nageait gaiment autour de l'ombre et de la vampiresse, qui voyait sa tenue devenir encore plus moulante que prévue.... En plus sa jupe commençait à flotter ce qui n'arrangeait rien. Poussant un soupir bien embêtée, Yulenka voulu sortir à son tour. Mais c'était sans compter sur Kaly qui avait décidé de jouer avec les longs cheveux de la vampiresse, en enroulant autour de son museau, ou encore en glissant sa tête en dessous pour les faire glisser contre lui. Elle savait qu'il n'allait pas la lâcher de si tôt, et ce fut à ce moment là qu'elle esquissa un sourire mauvais en coin, et s'adressa à l'équidé.

-Et si tu allais jouer avec le monsieur ?! Montre lui à quel point tu nages vite !

Remarquablement agile et à l'aise dans l'eau, Kaly fier de pouvoir montrer ses prouesses, ne se fit guère prier, et en un instant, il avait délaissé Yulenka pour se retrouver derrière Wriir. Il plaça sa tête contre le dos de l'ombre, et se mis à nager à toute vitesse tout en le poussant devant lui. Yulenka en profita pour sortir de l'eau, tout en riant sous sa cape absente. Elle cria à l'équidé qui faisait le tour du propriétaire à l'ombre en un temps record, quelques recommandations.

-Attention à lui tout de même, il est fragile ne vas pas l'abîmer !

Elle essora un peu ses cheveux, et fit rouler entre ses doigts une petite corde brune.... La magie de cette dernière s'activa, et l'éternelle demoiselle vit ses anciens effets disparaître pour laisser place à une robe. Tout en velours noir rehaussé de broderies en fil d'or, elle était munie d'épaulières tombantes du même tissu. Pour couper l'austérité de la robe, de la soie dorée avait été placée sur la partie frontale, décorée de brocardes en feuille d'or, conférant une certaine finesse à l'ouvrage. La taille était cintrée à l'aide d'une ceinture tissée intégrée, qui accueillait en son centre, un rubis taillé en princesse. Le décolleté en carré était harmonieux avec sa poitrine, tout en restant sobre, ce qui permettrait à l'ombre de se remettre des émotions que la vampiresse aurait pu lui provoquer suite à sa baignade forcée. A peine avait-elle terminé de se changer que Wriir et Kaly revenaient déjà de leur promenade expresse. Toujours propulsé par l'équidé aquatique, Yulenka s'approcha prudemment du bord, et attrapa en pleine nage l'ombre, pour le sortir de l'eau. Kaly nageait triomphale, très fier de sa prestation, et Yulenka se recula bien vite du bord avant qu'il ne lui vienne l'envie de lui faire faire un tour gratuit. La vampiresse amusée proposa alors à l'ombre un autre voyage.

-Le tour du propriétaire vous a t-il plu ? Je peux toujours demander à Baal'Iag s'il accepte de vous faire faire une vue d'ensemble du domaine depuis les airs..

Elle pensait très fortement que l'ombre allait décliner son invitation, et de toute manière connaissant Baal', le caractère altier du cataragon lui interdirait surement ce genre de faveur. Elle observa l'ombre quelque peu trempée, et ajouta.

-Je ne sais pas si vous pouvez tomber malade, mais je peux vous proposer de rentrer vous sécher si besoin. Ma cruauté me l'autorise. A moins que vous ne préféreriez que je vous brûle vif, plus rapide mais plus délétère.

Elle avait ponctué ses propos en faisant apparaître des petites flammes bleu-violacé au bout de ses doigts, caractéristique du feu sombre qu'elle manipulait. Elle savait qu'il allait dire non, mais le plaisir de la provocation était le plus fort. Elle les ferait disparaître tout aussi vite une fois son refus signifié.

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Jeu 11 Aoû 2016, 21:21

Délié du pouvoir de coercition que la vampiresse lui avait infligé peu de temps auparavant, j'en profitais pour ébouriffer un peu plus mes cheveux, non pour me donner un genre, mais plus comme un toc qui pour une raison tout à fait obscure me remettait les idées en place.

- Quiconque croise un vampire est un malchanceux de base. Vous vous nourrissez de sang, que ce soit contrôlé ou non, l'individu aux côtés de l'un des vôtres pourra toujours, à un moment ou un autre, servir de repas faute de trouver mieux. Je ne connais personne qui a pu me dire un jour : "Quelle chance j'ai de vivre aux côtés d'un vampire !" Mais j'imagine que vous allez me demander combien de personnes j'ai rencontrées par rapport au nombre total d'êtres vivants sur ces terres et que forcément, je ne peux pas me forger une idée.

Je remettais un peu d'ordre dans ma tenue, croisant les bras pour écouter les répliques aussi répétées que ne l'étaient mes attaques. A moins qu'il ne s'agisse de l'inverse. Nous en étions arrivés à un stade où nous ne comptions plus trop chercher à convaincre l'autre, mais s'écouter parler pour nous persuader du bien fondé de nos positions. Nous étions elle et moi trop différents pour nous entendre. C'était en soi un grand pas que nous ne passions pas notre temps à nous écharper dans la joie et les entrailles.

Quand le débat se tourna sur un sujet bien plus futile et décalé, l'argumentaire de la demoiselle ne manqua pas de me surprendre pour justifier sa tenue devant moi.

- Vous croyez que seuls les vôtres en ont après vous ?... Je vous ai connue Souveraine de votre peuple, avant d'avoir vent d'un mouvement de rébellion dont je ne connais pas tous les tenants et aboutissants. Si je peux comprendre qu'une Ombre ne soit pas forcément la première chose à laquelle on pense quand il s'agit d'intrus, vous auriez pu au moins vous dire que cet ennemi était sacrément doué pour parvenir jusqu'à cette chambre non ? A moins que vous ne vous moquiez de son sens de l'orientation en le voyant assez éloigné de vos propres appartements. Les deux se tiennent après tout.

De toute façon, il n'avait été question de la tuer elle au départ. J'avais encore un minimum de jugeote pour ne pas aller me frotter à pareille adversaire. Même si en l'espèce, c'était elle qui semblait s'amuser à se frotter contre moi ! Quant à sa dernière phrase, visant visiblement autant à me déstabiliser qu'à me rendre plus honteux encore de l'état de trouble dans lequel je me trouvais, je ne pus que lui rétorquer :

- Une Ombre qui éprouve plus de choses qu'une Vampiresse, je ne sais pas qui de nous deux est le plus à plaindre à présent. Ne pouvant empêcher mes joues de rougir comme un abruti fini qui n'avait demandé de tel, je ponctuais mes mots d'un autre problème typiquement vampirique : Je sais que vous avez des problèmes avec les miroirs vous autres, mais baissez la tête, et osez admettre que vous portez une tenue plus que légère. Je me contenterai de cet aveu.

Vu son caractère fier et évidemment d'une particulière mauvaise foi, je doutais qu'elle me fasse pareille confidence.

Nous étions à présent dans les jardins, un environnement bien moins oppressant qu'une chambre souillé de sang avec une hôte particulièrement regardant sur la propreté des sols.

- Ça me fait mal de l'admettre, mais je reconnais que votre vision des choses me plait, pour la partager en quelque sorte. M'avez-vous ensorcelé pour j'en vienne à être d'accord avec vous ?! fis-je d'un ton malgré moi plus léger que la phrase précédente. Le Bien et le Mal restent abstraits selon de quel côté de la barrière nous nous trouvons. Les Démons trouveront toujours que les Anges brident la Vie avec des règles contraignantes, tandis que les Anges estiment que la dépravation des Démons nuit à la société. Regardez, vous par exemple, je ne vous aime pas, mais ça ne veut pas dire que vous n'êtes pas intelligente. Je tournais à moitié la tête dans sa direction, poursuivant ma phrase : C'est le meilleur "compliment" que je puisse vous faire, appréciez le au moins à sa juste valeur !!

L'endroit était riche dans tous ses éléments, bien entretenus de surcroît. Du petit buisson malingre à l'énorme arbre qui devait draper d'ombre tout ce qui se trouvait sous son rideau de branchages, la faune était encore plus fascinante. Je n'aurai su compter combien d'espèces nouvelles je voyais dans des intervalles assez courts. Sortant de ma contemplation des lieux, j'haussais les épaules vers Yulenka :

- Il n'y a bien que les vampires pour tout ramener au sang. "Marché conclu", "J'accepte", même un "D'accord" aurait tout autant suffi. Vous savez comme moi que nous n'avons pas intérêt à titiller l'autre dans la catégorie des Secrets.

La donne changea alors que Kaly rentra dans la danse. L'animal dans son étrangeté était charismatique et son côté altier lui donnait aisément le change. Le contact fut rapidement pris avec lui, et comme je m'y attendais, la dame ne manqua pas l'occasion de mettre de l'huile sur le feu que j'attisais juste avant.

-  Certes, et comme ils ne vous considèrent pas non comme une ennemie car ce n'est pas le genre de menus qui arrivent jusqu'à vos canines assoiffées, ils ont la paix et en profitent. Nous sommes d'accords. Quant au mot "bipèdes", on croirait entendre une Ondine. Lhyaerae parlait de nous de la sorte, il y avait les Ondines, puis tout le reste terrestre, les bipèdes, les ennemis à abattre. Je me demandais l'espace d'un instant fugace où elle était, et si elle allait bien.

Kaly le jaloux estima qu'il était temps qu'après l'effort d'avoir occis un vampire, il était temps que je prenne un bon bain, me projetant en arrière avant non pas une fois, mais deux fois quand il perçut mon souhait un peu trop vite à son goût de retrouver la terre ferme.

Je voyais Yulenka rire de la situation et la mit au défi de venir nous rejoindre plutôt qu'être une simple spectatrice. Je lançais mentalement l'idée à Kaly alors qu'elle s'approchait suffisamment pour me répondre.

Victoire m'exclamais-je mentalement, avant d'exprimer d'un ton que je voulais le plus détaché possible mon ressenti sur ce qui venait de se passer :

- Je vous remercie pour cette démonstration très à propos sur ce dont Kaly est capable. L'eau est bonne à votre goût au moins ? Yulenka sermonnait sans trop de conviction l'équidé, en tout cas le lac et nous à l'intérieur ne fûmes pas gelés moitié à l'intérieur moitié à l'extérieur. Quoique, je jetais un coup d’œil vers le glaçon en puissance pour remarquer l'état de sa tenue, écarquillant les yeux de voir ses formes mises encore plus en avant. Elle s'exprimait à l'équidé, l'incitant à vouloir jouer avec moi, enfin plutôt me prendre comme son jouet, et alors que j'avais ENFIN devant la preuve irréfutable que sa tenue était indécente, Kaly ne me laissa pas le temps de placer un mot que je devins le premier cerf volant aquatique que ces terres aient jamais portés. Tantôt sous l'eau, tantôt ricochet, je perdis vite tout sens de l'orientation, tentant par instinct de ne pas boire la tasse entre deux sauts agiles de la bête.

Avait-il fini le tour du lac, avait-il fini par s'ennuyer, j'eus l'immense privilège d'être déposé telle la loque que j'étais sur le rebord, déboussolé, trempé, hagard. Du moins devrais-je happé au passage par la vampire qui dans un élan de pure générosité gratuite mit fin à mon supplice. Passant ma main sur les yeux comme sur le front pour en chasser les touffes de cheveux y ayant élu domicile, je dardais un regard mauvais vers la vampiresse, qui avait eu tout le temps de se refaire une beauté, changer d'apparat, bref, comme si rien de tout cela ne s'était passé.

- Je vois que Madame s'est bien amusée de voir tourmenté de la sorte, profitant pour faire sa petite toilette et jubiler du spectacle. Qui est ce .... ce .... Balle de je sais pas quoi, qu'on continue à s'amuser ?...

Je savais pertinemment que j'étais à ses yeux une sorte de faible curiosité qu'elle voulait modeler pour l'éduquer selon ses critères. Me montrer ses trésors animaux et les dangers qu'ils pouvaient à eux seuls représenter était une autre façon de me passer le message suivant : "Tu es au creux de ma main, et je t'écrase quand bon me semblera".

Dans l'immédiat, je pourrai tout à fait me transformer en brume, disparaître dans les ombres, je ne la pensais pas assez vive pour m'en empêcher. Cela ne voulait pas dire qu'elle n'avait pas après m'avoir détecté dans ses murs érigé une barrière magique qui me ferait me retrouver au piège avec une vampire courroucée d'avoir tenté de lui fausser compagnie.

Pantelant et ruisselant, je lui jetais un regard à peine voilé de toute "l'estime" que je lui témoignais en cet instant.

- Me brûler ?... Vous pensez pouvoir ? Vous arriverez à me voir nu, si tel est votre désir, mais je doute que ce soit le cas. De votre côté je vois que vous avez adopté pour une tenue bien plus respectable vu les circonstances. Vu l'état de mes frusques actuelles, il m'en faudrait surtout des autres de rechange - temporairement je vous rassure - sauf si vous n'avez que des tenues de femmes, auquel cas je ne vous ferai pas ce nouveau plaisir de vous moquer de moi dans le genre de jupe courte que vous portiez tout à l'heure. Quoiqu'il en soit, je vous suis, vous connaissez mieux les lieux que moi après tout.

Nous marchâmes elle silencieusement, moi accompagné de ces bruits de succion immonde à chacun de mes pas gorgé d'eau. Avant que nous n'atteignions la porte empruntée précédemment et qui nous emmènerait à coup sûr exactement à l'endroit où nous n'étions pas, je m'hasardais à une question un peu indiscrète.

- Pourquoi pensiez-vous qu'il s'agissait d'un vampire qui voulait votre peau, guerre de clan, ou quelque chose de plus grave encore ?...

Vu l'état dans lequel je présentais, elle aurait peut-être une once de pitié à me répondre pour la peine.

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Jeu 11 Aoû 2016, 23:55


La vampiresse esquissa un sourire en coin à l'attitude de l'ombre et lui répondit l'air de rien.

-Non, je vous demanderais seulement combien de personnes ont pu dire "Quelle chance j'ai de vivre aux côtés d'une ombre!". Par ailleurs ce n'est pas notre rôle, ni notre volonté de porter chance à ceux qui nous entourent. On se contente de vivre, c'est déjà pas mal.

Sa remarque l'avait presque amusée. Mis à part les anges, elle ne voyait pas une race qui aurait pu correspondre à cette situation. Quand elle y repensait, elle trouvait que ce genre de propos irait très bien dans la bouche d'un humain. Incapable de se débrouiller par eux-mêmes tant ils étaient faibles de base, ils devaient espérer sur les autres, et en particulier les anges, pour survivre. Elle ne savait pas ce qui était le pire entre être une ombre et être un humain. Le premier était synonyme de tourments éternels, le second de faiblesse et de médiocrité. Mais à vrai dire, c'était surtout l'idée d'être dépendante d'une autre race pour pouvoir vivre qui la rebutait le plus. Au fil des siècles son goût pour l'indépendance et l'autonomie s'était très renforcé. Elle garda ses divagations pour elle, tandis que Wriir s'étonnait de la réaction de Yulenka, qui vint alors lui préciser.

-Mais c'est justement parce que c'était le premier à pénétrer dans ces lieux que j'ai décidé de lui faire la faveur de me présenter à lui. J'ai peut-être beaucoup d'ennemis que j'ignore, mais les seuls à être assez fous et pugnaces pour venir me provoquer jusqu'à chez moi sont des vampires.

Lorsqu'il en vint à la plaindre, elle esquissa un sourire narquois en lui répliquant.


-Je dirais celui qui n'assume pas ce qu'il ressent en cet instant. Si vous continuez de rougir, vous allez vous transformer en cerise géante.

Et comme pour ne pas aider la pauvre ombre qui luttait verbalement avec vaillance, ses joues ne cessaient de rougir. Il lui demanda alors des aveux sur sa tenue, soulevant le fait qu'elle ne pouvait pas se regarder dans une glace pour juger. Elle se regarda rapidement, du moins comme elle pouvait, et répondit simplement, un sourire léger aux lèvres.

-Je suis habillée décontractée. Je n'ose même pas imaginer ce qu'il se serait passé si j'étais en tenue légère....

La chipie espérait au contraire que l'imagination de Wriir soit plus rapide que sa raison, juste pour le vilain plaisir de le voir encore plus troublé. Elle était bien loin de se douter que plus tard, il aurait tout loisir de voir bien plus qu'il ne l'aurait cru.... Ils étaient dans les jardins lorsqu'il vint la soupçonner de l'avoir ensorcelée pour qu'il en vienne à partager un de ces avis. Ce qui était pour elle l'occasion de le taquiner davantage.

-Avez-vous si peu de foi en vos convictions pour douter qu'elles viennent de vous ? Quand bien même, admettons que je ne sais pour quelle raison, j'en vienne à vouloir vous incruster dans le crâne mes idées. Je me serais simplement contentée de vous aliéner. Je ne fais ici que partager un avis, ou des observations.

Elle écoutait Wriir décrire la manière dont chacun voyait l'autre comme étant le mal et lui le bien, le tout en acquiesçant silencieusement ses propos par quelques hochements de tête ponctuels. Là dessus, elle devait bien avouer qu'il avait raison, et c'était aussi pour cela qu'elle ne cherchait plus à ranger ses actes dans une catégorie quelconque. Elle ne broncha même pas lorsqu'il lui dit qu'il ne l'aimai pas. Après tout, elle n'était pas aimée par grand monde, encore plus maintenant, et elle n'avait jamais cherché à l'être depuis qu'elle était vampire. Mais elle nota qu'il avait eu l’honnêteté et la noblesse de lui accorder au moins un compliment. Fait si exceptionnelle que lui-même le souligna, d'une manière si spontanée et inattendue qu'il parvint à arracher un rire sincère à la vampiresse, qui lui répondit.

-Je prends bien note de votre grande mansuétude, et je salue votre effort également.

Elle trouva curieux qu'il puisse s'étonner des expressions vampiriques, et lui répondit.

-Peut-on réellement reprocher à une vampiresse d'user des expressions courantes de sa langue ? Cela n'a rien de personnel, mais si cela vous perturbe tant, je suppose que je peux faire un effort.


La vampiresse arqua un sourcil aux propos de l'ombre, avant de rétorquer.

-Les animaux peuvent être la proie de vampire vous savez ? C'est plus restreint car le sang animalier est insuffisant, mais il n'est pas rare qu'un jeune vampire acculé se retrouve à se nourrir d'animaux pour survivre. Certes, cela ne concerne que les plus jeunes d'entre nous. Et il est clair aussi que Kaly n'aurait aucun mal à maîtriser un jeune vampire, même assoiffé. Mais tout de même.

Elle esquissa un sourire lorsqu'il fit le rapport entre ses expressions et le langages des ondines, chose à laquelle elle répliqua.

-Vraiment ? C'est possible, après tout j'entends souvent dire que vampires et ondins sont comme des cousins, et j'ai même entendu des personnes décrire les ondines comme des vampires des mers... Curiosité que cela.

Elle eut une pensée pour Alyna, cette curieuse fille était son sosie fidèle, et surtout une sirène. Ironie de la situation. Tout étant lié dans cette histoire, le royaume des eaux vint faire son entrée en jeu, appelant à elle les protagonistes présents comme pour faire honneur au peuple ondin. Tel un sale gosse fier de son coup, l'ombre bichait sans scrupule du sort qu'il partageait avec Yulenka.... Jusqu'à ce que le kelpie ne vienne l'emmener vers d'autres eaux. La ballade terminée, notre Wriir renfrogné vint poser une question que la vampiresse n'espérait même pas, et qui pourtant était arrivée. Elle afficha un sourire de tous ses magnifiques crocs acérés et lui répondit.

-Il est vrai que votre duo avec Kaly était épique.... Quant à Baal'Iag.... Voyons s'il est d'humeur à se montrer.

Elle se redressa et levant son visage vers le ciel, elle prit une profonde inspiration. Elle poussa alors une sorte de rugissement sourd, qu'elle avait appris à émettre lorsqu'elle avait obtenu la capacité de se transformer elle même en tigresse atypique. Un autre rugissement définitivement plus sourd et guttural vint lui répondre, et le colosse angora vint se poser devant eux, faisant légèrement trembler le sol. L'allure majestueux, le pas souple et assuré, il vint à l'encontre du duo, les surplombant de toute sa hauteur. Son regard sauvage se posa sur Wriir, comme s'il le jugeait, puis sur Yulenka. Il ne parlait pas, ne faisant pas l'effort, puisqu'il savait qu'elle pouvait déchiffrer ses regards. Kaly, vexé qu'on vienne lui piquer la vedette, s'en retourna dans les eaux pour bouder. Il n'était pas de taille à rivaliser avec une créature qui pouvait l'avaler tout rond sans effort.

-Pourrais-tu nous guider sur les toits s'il-te-plaît ?

L'imposante créature poussa une sorte de grognement en s'asseyant, visiblement pas du tout disposer à servir de monture, surtout pour quelqu'un d'autre qu'elle. S'il lui accordait toutes ses demandes, c'était parce qu'elle l'avait trouvé à l'état d’œuf, et qu'il lui devait tout. Bien qu'il préférerait mourir que l'avouer, il l'aimait cette mini-chose vampirique. Mais il n'y avait qu'elle qui avait ses faveurs. Il ne connaissait pas "l'autre", et en plus.... C'était un mâle ! Alors qu'il faisait clairement sa mauvaise tête, Yulenka soupira.

-Ça ne m'étonne pas....

De nouveau, elle afficha un sourire mauvais en coin, et dit sur un ton innocent.

-Tant pis, je vais devoir le prendre dans mes bras pour l'emmener là-haut alors....

Baal'Iag poussa un grognement bien plus rageur, en se redressant sur ses quatre pattes, l'air très désappointé par cette annonce. Yulenka tout sourire, pensait avoir trouvé un argument pour que le cataragon cesse de se faire prier, et les emmène dans les airs..... Mais c'était sans compter la mauvaise tête du dragon-félin, qui n'était pas décidé à s'en laisser conter. Dans un exercice extrêmement compliqué et délicat pour lui, il attrapa Wriir par le dos de ses vêtements, et tandis que la créature se redressait sur ses pattes arrière en soulevant l'ombre sous le regard surpris de Yulenka, qui comprit ce qu'il comptait faire. L'envoyer dans les toits en le jetant comme un vieux sac ! Avant de se faire dépasser par sa créature, Yulenka se montra plus ferme et rappela son cataragon à l'ordre.

-Baal' NON ! Repose le tout de suite !

Revenant sur ses pattes, le dragon-félin poussa un grondement sourd, avant de lâcher au sol l'ombre, et de s'en aller contrarié de ne pas avoir pu balancer Wriir. Yulenka l'observa partir, ne pouvant s'empêcher de penser que c'était vraiment une bestiole caractérielle. Elle se tourna vers Wriir, et ne trouvant pas quoi dire, elle lâcha.


-Voilà.... C'est Baal'Iag. Il est un peu soupe au lait depuis que les vagues d'assassinats ont commencé. Ça ira mieux une fois que tout ça se sera calmé.

A sa proposition de réchauffer l'ambiance, Wriir avait offert la déclination attendue. D'ailleurs elle ne souhaitait effectivement pas le voir nu. Elle acquiesça lorsqu'il demanda des vêtements secs avant de rétorquer avec un aplomb et un sérieux déconcertant.


-S'il avait fallu vous travestir en femme, au vu de votre morphologie je vous aurais prêté une robe empire, elle aurait bien mieux mis en valeur votre silhouette.

Alors qu'ils allaient pour rentrer à la forteresse, Wriir se risqua à une question qui surprit un peu la vampiresse. Néanmoins, elle ne vit aucune raison de ne pas lui répondre, car ce n'était pas comme si la chose était secrète.


-Parce que lorsqu'on m'a remercié du trône, j'ai décidé de m'affranchir. Je n'ai pas besoin de vous dire à quel point les vampires sont fiers. Même si dans un sens c'était la seule solution acceptable pour tous, ce peuple ne supporte pas qu'on puisse lui tourner le dos. Aussi, presque tous les vampires souhaitent ma mort. Certains s'acharnent à cela. Une petite poignée se fiche éperdument de tout cela. Mais ce n'est qu'une question de temps avant qu'ils ne se lassent et passent à autre chose, m'oubliant complètement. Cela peut durer des mois comme ça peut durer des années.... L'avenir me le dira.

Elle ne comptait plus le nombre d'assassins qu'elle avait exterminé, certains venant même en véritables escouades de commandos. Une chance qu'on ne lui envoyait pas l'armée ! Là dessus, elle se doutait que l'absence de gouvernement y jouait pour beaucoup. Ouvrant la porte, ils atterrirent tout deux dans une des nombreuses chambres. Yulenka s'avança vers une penderie en bois et ouvrit les portes sur des vêtements masculins. Elle sortit plusieurs tenues, les mettant devant Wriir pour juger celles qui avaient la bonne taille, et celle qui n'étaient pas adaptées. Elle finit par lui proposer une tenue complète qui avait le mérite d'être à sa taille.

-Saurez-vous vous en contenter, ou faut-il trouver autre chose ?

Un paravent attendait patiemment qu'on vienne l'utiliser, mais avant qu'il se décide, la vampiresse rajouta.

-Ha j'oubliais....

Sur sa main libre, elle fit apparaître une ample serviette, car si l'ombre ne se séchait pas un minimum, il ne lui servait à rien de se changer.


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Ven 12 Aoû 2016, 10:59

- Vous seriez surprise de la réponse à votre question. D'une Ombre en tant que tel, personne assurément, notre race secrète et notre malédiction ne rendent pas notre compagnie forcément agréable, voire même passablement déprimante. Mais quand nous ne paraissons pas ce que nous sommes, hé bien .... j'ai pour ma part fait d'agréables rencontres que je pense réciproques. Quant à se contenter de vivre, vous savez comme moi que ce verbe nous sied mal. Nous existons, il m'est difficile de dire que je vis quand on voit son cadavre à côté de soi.

Surtout l'état dans lequel il était, alors que je n'étais que brume, et qu'à peine transformé en Ombre on m'expliquait ce qu'allait être cette nouvelle vie, faite de tourment, de malédiction et de secret. En attendant, mon tourment actuel se trouvait face à moi et je devais rester vigilant à ses éventuels caprices ou démonstrations de puissance. Quand elle me parla de la forte probabilité que la race de l'intrus soit l'un des siens, je m'osais lui faire un aveu.

- Saviez-vous que j'étais déjà venu ici ? Non pas comme un intrus, disons comme un invité de substitution. Je ne saurai dire si vous étiez présente, ou même si vous aviez déjà élu domicile à ce moment-là, mais de charmants vampires profitaient de la magie de ces murs pour s'amuser de nous. Je suis sûr que les épreuves que j'ai dû passer vous auraient faite bien rire. D'un rire mauvais évidemment. C'est la raison pour laquelle il m'a été légèrement plus aisé de m'introduire ici. Je marquais une ou deux secondes à peine de silence. Je me demande pourquoi je vous dis ça ....

Même si en soi le lui avouer n'avait que peu d'importance, j'eus peut-être une partie de ma réponse alors qu'elle se moquait de nouveau ouvertement de mon rougissement bien involontaire, en partie dû par sa tenue qu'elle jugeait ...

- Décontractée ?! Parce qu'il y a plus léger encore que cela ?... Tsss.... Vous vous baladez nue en gros .... Je n'ose imaginer la tête de votre intrus si vous étiez arrivée ainsi oui. Je pris une voix plus aiguë et féminine, le ton hautain et dédaigneux, grossissant le trait pour imiter très mal Yulenka "Ne peut-on pas prendre un bain de sang tranquillement chez soi ? Je fis claquer mes doigts avant de reprendre : Et là vous l'auriez désintégré, glacé, annihilé, bref il y aurait toujours eu un mort dans cette chambre, et l'un des vôtres aurait été heureux d'assister à cette scène surréaliste. Un vampire pour un vampire, je n'aurai pas été malheureux du résultat quel qu'il soit en fin de compte.

Je détaillais de haut en bas Yulenka avant de détourner le regard, c'était la seule solution de repli qu'il me restait.

- Si vous saviez ce qu'elle vous dirait la cerise. Il me suffit de ne plus vous regarder, et l'affaire est entendue. Heureusement que vous n'êtes pas un fruit vous, vu votre âge vous seriez blette depuis un sacré bout de temps. La pique était gratuite, mais les siennes ne l'étaient-elles pas non plus ?... Elle devait pertinemment savoir que rappeler à quelqu'un qui rougissait était le meilleur moyen pour le faire rougir plus encore. Fixer cependant un mur, un sol ou un point imaginaire dans un horizon entouré de murs allait vite s'avérer délicat quand on entretenait une discussion autant à couteaux tirés.

Je doutais fort qu'elle m'ait ensorcelé mais si l'humour ne faisait pas partie de mes qualités premières, force était de constater qu'elle prenait tout encore plus que moi au premier degré.

- Laissez tomber .... Mais je ne pense pas que vous m'auriez aliéné si vous teniez à me convaincre de quelque chose. Actuellement, vous devez hésiter sur comment me considérer : un ennemi que vous ne pouvez tuer ou une curiosité à malmener tout en lui soutirant ici et là des informations. Quant aux expressions propres à votre race, vous êtes chez vous après tout, c'est à moi de m'adapter à vos mœurs aussi étranges soient-elles.

J'appris que les vampires pouvaient se rabattre sur les animaux. Il fallait dire que mon tortionnaire du temps où j'étais Orisha m'empêchait de voir l'extérieur, je n'étais pas non plus aux faits de son régime alimentaire autre que celui du sang de ses esclaves ou de ses prises. Je ne pus m'empêcher de jeter un coup d'œil vers le bestiaire du jardin, me demandant si Yulenka, ou l'un de ses comparses d'ailleurs, s'était déjà abreuvée d'un de ces animaux ici ... Voulais-je vraiment le savoir, à part pour m'attirer un haut-le-cœur ? En parlant de dégoût, la comparaison entre les Vampires et les Ondins m'arracha une grimace de dégoût. Associer le premier mot au deuxième souillait l'image que je me faisais de Lhyaerae, et je détestais cela. J'avais bien conscience, pour l'avoir constaté de mes propres yeux le sadisme dont elle pouvait faire preuve, je ne pouvais me résoudre de lier celle que j'aimais à une race que j'exécrais viscéralement.

J'avais encore bien des progrès à faire en milieu aquatique en voyant - et subissant - l'agilité et l'habileté de Kaly pour me bringuebaler là où il en avait envie sans que j'ai mon mot à dire. Une fois l'impression d'avoir été un linge entre les mains d'une femme et d'un battoir, Yulenka voulut que je fasse connaissance avec ce truc au nom bizarre, Baal'Iag, poussant un rugissement étonnamment rauque pour une silhouette comme la sienne. Arquant un sourcil, la réponse qui déchira le silence au loin me fit alors écarquiller les yeux.

- Ah .... Baal'Iag est la bête géante que j'avais entr'aperçue tout à l'heure. Qui paraît encore plus géante.... J'ai déjà croisé par le passé un dragon, mais cette créature n'est pas mal non plus dans son genre tiens ... Quand mon regard croisa celui du bestiau, le courant passa bien moins bien qu'avec Kaly. J'étais un insecte pour lui, et seule la présence de Yulenka l'avait amené ici, attendant un éventuel ordre pour me mettre en charpie d'un air presque désintéressée. Aussi ne pris-je pas la peine de tenter un contact mental avec lui, et laissais la Vampiresse prendre le contrôle des opérations.

Par contrôle, tout était relatif car le gros bébé avait visiblement son petit caractère, peu désireux de m'emmener dans les hauteurs et préférant se coucher drapé de toute sa fierté. Je n'allais pas m'en plaindre !

- Bah tant pis hein, la balade aquatique était déjà suffisamment sportive de toute façon, murmurais-je à Yulenka, pas forcément enthousiaste de me retrouver dépendant de cette créature à un moment ou un autre. Pour me retrouver en hauteur, j'aurai pu me téléporter, mais je ne tenais pas sauf cas extrême à dévoiler ce pouvoir devant mon hôte. Il pourrait s'agir de mon seul moyen pour m'échapper, je n'allais pas gâcher l'effet de surprise juste pour impressionner mon monde.
Yulenka ne vit pas la chose de la sorte, et joua sur la corde de la .... jalousie ?! pour faire réagir la créature, qui tomba dans le panneau en s'imaginant la proximité que je pourrais avoir avec sa protégée si elle venait à m'entourer de ses bras.

- Non non.... mais.... vous n'êtes pas en train de l'énerver contre moi là hein ?! Il va ....
Visiblement ces verdoyants jardins et ses champêtres occupants ne laissaient guère le temps à l'Ombre que j'étais de terminer mes phrases, et l'adulation presque obsessionnelle qu'ils avaient pour mon dos me joua encore des tours, alors que je me retrouvais soulevé comme un vulgaire sac à patates, prêt à être éjecter vers l'infini et l'au-delà si Yulenka d'une voix ferme ne le lui avait pas interdit.

Je retombais sur mes fesses, piétinant par la même occasion le peu d'ego qu'il me restait encore, tandis que Yulenka expliquait le caractère de Baal'Iag.

- Vous avez .... Tsss .... vous avez rendu jalouse une bête qui fait bien cinquante fois mon poids ! Il aurait joué à la catapulte avec moi sauf je n'ai pas la tête aussi solide qu'une pierre ! Soupe au lait, non mais c'qu'il ne faut pas entendre ici ...

Je me relevais dans la dignité qui m'était accordée, époussetant ma tenue de toute façon réduite depuis longtemps à l'état de loque dégoulinante. La Vampiresse s'en aperçut et accéda à ma requête d'obtenir de nouveaux vêtements. Je ne compris pas quelle tenue elle m'aurait choisie par contre.

- Une robe, en pire ?... Vous ne croyez pas qu'une robe est déjà assez ridicule pour me trouver une tenue qui le soit encore plus ?... Vous êtes vraiment retors même dans ce genre de détails, pas étonnant que Baal'Iag ait pareil caractère. Je me regardais d'un air étonné. Elle a quoi d'ailleurs ma morphologie ?

Certes ma tenue ne me mettait sûrement pas en valeur, mais j'ai une tête, un corps, deux bras et deux jambes, rien d'original ou d'exceptionnel à ça .... Il valait mieux évoquer un sujet que je pouvais mieux comprendre, comme celui où elle avait quitté son trône. Elle me répondit d'un ton qui flirtait avec la sincérité, aussi l'écoutais-je avec attention. Quand elle parla du mot s'affranchir, tout fut de suite plus clair. Certaines Ombres avaient décidé de ne pas rallier la cause de Sympan, et elles étaient considérées par les autres comme des pestiférées.

- Vous vous êtes dit, tant qu'à faire les choses, autant ne pas les faire à moitié. Quitter le trône et vous retrouver avec tous ceux qui avaient voulu votre mort, et qui pourront enfin tenter d'assouvir leur vengeance maintenant que vous n'avez plus le pouvoir, mais également vous affranchir, vous mettant à dos tous ceux croyant aux Aetheri. Joli .... Je souriais légèrement, autant pour admirer son courage que son inconscience. La savoir dans la panade n'était pas non plus pour me déplaire après tout.

Face à la porte empruntée quelques dizaines de minutes avant, nous atterrîmes dans une pièce penderie où trônait une imposante penderie qui une fois ouverte dévoila toute une ribambelle d'habits masculins de toute taille et de tout style. Yulenka prit une fois n'était pas coutume les devants, décidant ce qu'elle estimait bien m'aller ou non, enchaînant tenue et tenue devant moi avant de fixer son choix sur une tenue que les nobles semblaient porter habituellement.

- Je ne suis pas très au fait de ce qui me va ou pas, et je ne vais pas faire la fine bouche alors que vous avez l'extrême amabilité de me proposer une tenue de rechange. Je vérifierai quand même que les coutures ne recèlent pas de poison, ou qu'elle est enchantée pour me faire m'étouffer une fois que je l'aurai mise. Simple précaution bien sûr.

Je me saisis de la tenue et de la serviette qui apparut par magie, avant de me diriger vers le paravent qu'elle m'indiqua de la main.

- Ah oui, ça non plus je n'ai pas l'habitude. Je vais respecter votre pudeur ne vous inquiétez pas. J'espère que l'eau du lac était propre, porter des vêtements propres quand on sent la vase, ça n'est pas très recommandé.

Je commençais à me déshabiller, laissant tomber mes habits au sol dans un "splotch" visqueux significatif, avant de regarder mon corps dénudé, seulement caché par mon caleçon humide qui se plaquait désagréablement à la peau. Mon cœur se serra à l'idée de me retrouver dans cet état de quasi nudité en présence d'une Vampiresse. Des souvenirs douloureux resurgirent sans que je n'eus mon mot à dire. Je parlais lentement et doucement derrière le paravent, que seule une oreille attentive pourrait entendre.

- Étrange moment que voilà. Je me retrouve ainsi dévêtu près d'une représentante de la race que j'exècre le plus, comme dans des temps reculés que je préférerai oublier. Or mon corps se berce d'illusions en ne portant aucune séquelle de tout ce qu'il a pourtant subi.

Ma main parcourait mon torse, ne trouvant rien d'autre qu'une peau exempte du moindre défaut, alors que mon cerveau se rappelait de chacune des blessures.

A quoi bon ressasser tout cela, il était l'heure de s'habiller, et de continuer à survivre. Survivre....

2 140 mots.
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Ven 12 Aoû 2016, 14:14


-Je suis surprise que vous n'ayez pas eu cette même réflexion pour les vampires. Car la plupart des miens vivent parfaitement infiltrés parmi les autres races, sans que personne ne se doute de leur nature. Ils sont vus comme charmants, avenants, dotés d'une certaine éloquence.... En réalité les vampires sont même souvent appréciés pour les personnes qu'ils sont. Mais dès que l'on sait notre nature, tout cela ne compte plus, aussi injuste que cela puisse paraître. Pour ce qui est de l'abus de langage concernant notre "vie", je vous l'accorde, même si pour nous, c'est un peu plus délicat. Car nous continuons d'exister dans notre cadavre.... Conjugué avec l'impossibilité de voir notre reflet, nous avons plus facilement l'illusion de poursuivre notre vie.

Même si elle préférait ne pas en parler, beaucoup de nouveau-nés ne supportaient pas cet état. Entre le fait d'être obligé de tuer, de découvrir le plaisir et le besoin qui était lié à cela, d'accepter de devenir "un monstre" et enfin de ne même pas être en mesure de pouvoir s'identifier complètement de manière physique, c'était extrêmement perturbant et déstabilisant. Les suicides étaient nombreux, car dans leurs esprits, ils étaient déjà maudits et condamnés. Les plus avisés dans leur dépression attendait simplement qu'on les tue pour atteindre la "délivrance". N'était pas vampire qui voulait.... Wriir vint lui avouer qu'il était déjà venu ici, et que certains vampires avaient joué avec lui quelques vilains tours dont ils avaient le secret. Yulenka eut un sourire amusé aux lèvres avant de répondre.

-Cela ne me semble pas impossible, autrefois j'avais ouvert l'accès de la forteresse à tous, chacun était libre d'y aller et venir. C'était un endroit toujours très peuplé, malgré la présence des vampires. Comme quoi.... C'est bien plus calme aujourd'hui, mais les circonstances obligent. Je n'étais peut-être pas présente à ce moment là, mais une chose est sûre. J'y avais déjà élu domicile. Vous êtes ici dans ma demeure, que j'ai faite construire selon mes volontés et mes goûts.... Il y a de ça bien longtemps à présent. Cette forteresse n'a jamais eu d'autre propriétaire que moi.

Elle se garda de lui dire que sans elle, il ne resterait de la forteresse que la structure de l'édifice. Elle était la source qui avait donné toute sa magie à l'endroit, un don qui avait été long, pénible, extrêmement vorace en énergie. Elle avait cru y passer plus d'une fois.... Mais à présent, elle n'avait presque plus besoin de donner de sa magie pour alimenter les lieux. Elle observa un instant l'ombre qui se demandait pourquoi il lui parlait, jusqu'à ce qu'elle lui dise.

-Je ne saurais vous dire, peut-être parce qu'un être doué d'intelligence et de parole est enclin à dialoguer avec une personne capable de l'écouter et de lui répondre ? Parfois il ne faut pas chercher à comprendre.

L'ombre eut visiblement bien du mal à concevoir qu'on puisse faire plus affriolant que ce qu'elle portait. L'éternelle demoiselle secoua légèrement la tête en levant les yeux au ciel. Quand elle pensait qu'on la disait prude et très innocente sur la question de la séduction, elle se dit qu'elle avait encore de la marge.

-Un bain de sang, vous avez lu trop de romans voyons. Est-ce qu'on imagine les elfes prenant des bains de ratatouilles ? C'est tout aussi absurde. Mais oui il existe bien plus léger que cela sans être nu pour autant. Je vais mettre cela sur le compte de votre ingéniosité en la matière, et ne pas en dire plus. Il serait dommage de corrompre votre attendrissante innocence....

Oui elle se moquait de lui, ce qui pour quiconque la connaissait serait le monde à l'envers. Une vierge d'un demi-millénaire qui affublait quelqu'un d'autre d'ingénue et d'innocent, c'était un comble de dimension presque cosmique. Elle l'écouta lui lancer une pique qui l'aurait presque fait rire tant elle la trouvait digne d'un enfant. Elle lui dit en souriant.

-Vu votre réaction, je pense pouvoir prétendre que peu importe le temps, je demeure plus fraîche et pimpante que jamais. A moins que vous rougissiez pour les fruits blettes.... Mais après tout, chacun ses goûts....

Elle en avait profité pour lui rappeler insidieusement que, même si sa raison pensait le contraire, le reste de son être, lui, trouvait la vampiresse très à son goût. Puisqu'il n'assumait pas cela, le titiller là-dessus n'en était que plus délicieux pour elle, en bonne petite peste qu'elle était. Elle fut quelque peu surprise d'un point de sa réponse, qu'elle souleva.

-Soutirer des informations ? Voilà qui est singulier, que pourrais-je bien vouloir vous prendre comme informations ? A moins que par cela vous n'entendiez vos avis et votre point de vue, je doute être en position d'attendre quelques éléments cruciales de vous.

Elle n'était plus reine, elle s'orientait de plus en plus vers une situation d'apolitisme, et elle ne pouvait pas tuer Wriir. Même le torturer lui était inutile. Que pouvait-elle espérer de lui ? Les échanges se poursuivaient, et Baal'Iag fit son apparition. L'enchainement des événements se passa assez vite, et bien que cela lui fasse mal à admettre, Yulenka ne put contre-dire Wriir sur le fait que Baal'iag s'en prenait à lui suite à sa tentative de le rendre jaloux. Heureusement qu'il l'écoutait quand même un minimum, sinon l'ombre allait s'envoler vers d'autres cieux. Wriir se mit à râler, mais ici c'était tout de même justifié. Yulenka ne pouvant pas lui en tenir rigueur se contenta de répondre.

-Il est souvent froid et distant avec les autres, mais quand on a la chance de pouvoir le connaître, il a une noblesse d'âme que j'ai rarement pu voir au cours de ma longue vie.

Encore fallait-il pouvoir avoir la chance de connaître le cataragon. Baal'Iag cumulait la fierté caractéristique des dragons et celle des félins. Ayant été dérobé à sa mère à l'état d’œuf, et en plus déjà conscient à ce stade qu'il allait au mieux servir d'esclave ou de bête de foire, si on ne l'abandonnait pas purement et simplement à une mort certaine, il avait longtemps voué une haine viscérale aux humanoïdes. A force de contact avec Yulenka et quelques autres créatures à deux pattes, sa haine s'était atténuée en mépris et en une méfiance récurrente. Les béluas trouvaient relativement grâce à ses yeux, de même que certains elfes. Mais il n'offrait rarement plus que de l'indifférence. Yulenka ayant droit à un traitement de faveur pour l'avoir sauver et "couver" en un sens. L'incident passé, la vampiresse laissa échapper un rire au quiproquo de l'ombre. L'idée d'une robe "en pire" lui était particulièrement amusante, surtout lorsqu'elle s'imaginait Wriir en portant une. Une fois plus calme elle corrigea l'ombre.

-Mais non voyons, une robe empire comme un empire. C'est un style de robe qui généralement se cintre juste en dessous de la poitrine, pour ensuite partir de manière plus ou moins évasée, mais généralement tombante et fluide. Et ce genre de robe va particulièrement bien au personne qui ont une morphologie semblable à la vôtre. Le corps n'est pas agencé de la même manière chez tout le monde, même si généralement on est constitué à l'identique. En fonction de la forme du corps, certains vêtements mettent en avant la silhouette des gens, et d'autre au contraire ne vont pas du tout.....

Yulenka réalisa qu'elle était entrain de donner un cours de mode à une ombre.... Et elle se demanda pourquoi et comment elle arrivait à se mettre toujours dans ce genre de situation parfaitement improbable ! Retour à des conversations plus sérieuses. Elle esquissa un sourire en coin amusée à sa remarque.

-C'est là l'histoire de mon éternité, enchaîner les complications que je le veuille ou non. Mais peut-être comprenez-vous maintenant pourquoi je n'ai pas peur du danger. Avec mon train d'existence, ça ne serait pas vivable, si je puis m'exprimer ainsi.

Les voilà à l'intérieur, Yuelnka ayant offert une tenue à l'ombre. Entrant dans le jeu des conspirations insensées pour la perte de Wriir, la vampiresse lui répondit avec un sourire goguenard.

-Voyons si j'avais voulu vous piéger avec une tenue, j'aurais fais broder un gros "je vénère les vampires" dans son dos, avec un fils luisant de nuit comme en plein jour.

Quitte à faire dans l'absurde, autant taper dans le très gros. Elle laissa l'ombre aller se changer, s'installant dans un petit fauteuil le temps qu'il s'exécute.

-Soyez sûr que si l'eau des rivières et des lacs de la forteresse n'étaient pas d'une excellente pureté, Kaly refuserait d'y vivre. Mais il y veille scrupuleusement. Et le reste de la faune aquatique n'en est que plus ravie.

L'ombre se changeait, et changeait également. Le ton de sa voix, sa manière d'articuler, et la nature même de ses propos.... Il n'était plus le Wriir vindicatif et acerbe qu'il lui avait offert, l'éternel piquant comme un cactus. En cet instant, il semblait partir dans des lointaines réminiscences des plus obscures. Elle avait l'impression de revoir son père lorsqu'il était ombre, ce genre de moment sombre étant le quotidien des ombres après tout. Sans qu'elle ne sache vraiment pourquoi, elle se leva, et s'approcha silencieusement du paravent. Mais elle n'alla pas plus loin, trop respectueuse de l'intimité de l'ombre, surtout en cet instant où il se mettait bien plus à nu qu'il ne l'aurait lui-même cru. Elle parla alors bien plus doucement que d'ordinaire.

-Ce corps vous dit pourtant bien plus la vérité que votre esprit ne lui accorde. Il n'a pas de séquelle parce que vous n'êtes plus cet esclave qui se faisait torturer par des bourreaux. Vous n'êtes plus l'esclave de vampires. Il n'y a même plus de vampires pour vous accabler à présent. Vous vous êtes libéré d'eux.... Alors pourquoi vouloir garder d'autres marques indélébiles de cet épisode de vie, qui a été tant douloureux ? Pourquoi s'affranchir d'un bourreau, si vous devenez-vous même votre propre bourreau.... Ce que vous devez affronter à présent, ce ne sont pas vos bourreaux. Ni même les vampires dans l'absolu. Ce à quoi vous devez faire face.... Ce sont vos souvenirs. Vos propres démons.... Même si vous pouviez exterminer notre race entière, vous ne trouveriez pas le repos ou le soulagement attendu. Votre bataille ne se déroule pas dans le présent. Elle se déroule dans votre passé. Et ce sont là les guerres les plus dures et les plus fastidieuses....

Elle marqua une courte pause, avant de conclure.

-Bon courage..... Vous en aurez besoin.

Elle ponctua ses mots en retournant à sa place, dans le fauteuil. Elle s'accouda sur le bras du fauteuil prévu à cet effet, attendant qu'il termine, ou qu'il réponde. Parviendrait-il à se défaire de cette rancœur qui au final ne servait à le faire souffrir que davantage ? A cette haine et cette amertume qui ne faisaient que le ronger à l'infini, puisqu'on ne pourrait jamais lui rendre ses années de captivité, ni effacer les souffrances qu'il avait vécues ? Elle en doutait.... Ce genre de luxe était-il seulement autorisé aux ombres ? Elle n'en savait rien. Mais elle savait que pour des personnes lambda, ce genre de blessure ne guérissait que très difficilement, voire ne se refermaient jamais. Alors qu'en serait-il pour une ombre ? Elle ne savait pas depuis combien de temps Wriir errait sur ces terres. Mais jusqu'ici, il n'était pas parvenu à vaincre ses démons....

Une paire d'yeux luminescents apparut tout droit du néant, avant d'être rapidement rejoint par de curieuse marques tribales. Les yeux, comme ces marques, flottaient dans les airs en irradiant leur lumière phosphorescente par intermittence. Le gardien félin était venu trouver Yulenka, après avoir rencontré Baal relativement de mauvaise humeur. Il allait pour lui parler, mais il remarqua la présence de Wriir, et décida de prendre de la hauteur pour se situer près du plafond, attendant que sa protégée ait fini avec son interlocuteur. Habitué à effrayer par son apparence, et de nature plutôt discrète, Chess était habitué à ce genre de précautions pour ne pas choquer les gens. Mais il n'était pas dit qu'il parviendrait à choquer Wriir, encore fallait-il que ce dernier parvienne à le remarquer.

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Ven 12 Aoû 2016, 20:07

- Hmmm, il est vrai que votre côté fier et arrogant peut vous servir pour vous faire servir justement. Je ne vois cela que comme une finalité, un moyen non pas pour réellement vous intégrer, mais vous fondre dans une masse pour s'en nourrir de l'intérieur. Quand il y a un crime, on soupçonne toujours l'étranger, jamais celui qui est bien intégré et blanc comme neige. Au moment où je finissais ma phrase, je remarque l'incongruité de ma dernière expression, que je m'empressais de préciser : Je ne disais pas cela pour vous teint de peau bien sûr. Toujours est-il que je ne sais pas ce qui est le mieux entre votre condition et la nôtre : vivre dans une illusion, ou vivre dans son propre cadavre. A moins que ce ne soit, comme vous dites, qu'une même facette d'une illusion, d'une malédiction qui se moque de notre existence.

Je divaguais sur un sujet dont je restais bien peu informé en fin de compte. Je n'arpentais pas ces terres depuis très longtemps comparé à celle qui se tenait face à moi, et quel comportement aurais-je à l'égard de mon prochain si j'atteignais le demi-millénaire ? Il était probable que je sois pire qu'elle, force était de l'admettre, plongé soit dans une amertume si grande que le peu de goût de la vie m'aurait été ôté depuis bien longtemps, soit dans une haine farouche contre ceux qui avaient ce que je ne pouvais obtenir. Lhyaerae serait probablement morte depuis longtemps, à moins que je ne trouve un moyen de la garder à jamais à mes côtés. L'éternité était un fardeau, être Ombre le rendait encore plus pénible à porter.

- Ainsi vous êtes responsable de tous ces pièges disséminés ça et là dans les différentes pièces de votre forteresse délirante. Franchir une porte puis se retourner, et constater que la pièce qu'on a à peine quitté s'est transformée en quelque chose de complètement différent. Vous avez une imagination tordue quand même, quand on pense que j'ai failli me noyer dans une salle de bain où l'eau mousseuse finissait de remplir la totalité de la pièce, ou encore celle où mon corps s'était échangé avec celui de la femme qui était avec moi. Je marquais un temps d'arrêt. Je vous arrête tout de suite, n'osez même pas me faire ce coup là juste pour me mettre encore plus mal à l'aise !!

Juste pour se moquer de moi, me voir plus ridicule que je ne cessais de l'être depuis que j'avais croisé son chemin, elle aurait été capable de dégoter une servante pour me faire traverser cette fichue pièce et rire de moi. Je penchais un peu la tête alors qu'elle revenait une fois n'était pas coutume à la charge sur mon embarras. Oh elle avait l'avantage et elle en jouissait allègrement !

- Bah, quoi que je dise, vous aurez le dernier mot sur ce domaine là. Vous avez eu le temps en un demi-millénaire de perfectionner votre rhétorique et si votre aspect extérieur n'y laisse rien transparaître, c'est peut-être l'intérieur qui est flétri depuis bien longtemps. Aussi gloussez-vous de mon embarras, mais éternels que nous sommes, les Ombres sont très rancunières. Je ne manquerai pas de vous le rappeler si un jour les situations sont inversées, à disserter sur la presque nudité dont vous faites montre actuellement. Quant au bain de sang, ça ne me semblerait pas plus illogique qu'un bain de je-sais-pas quoi pour les elfes. Vous avez toujours aimé vivre dans le faste et l'opulence, un peu de gâchis de matière première ne doit pas être un problème pour vous. Il n'y a qu'à voir la taille de cette forteresse pour constater que vous cultivez le goût de la démesure. Vous n'êtes pas à un bain de sang près non ?

Je me donnais deux petites tapes sur chacune des joues, espérant reprendre mes esprits que diluer un peu cette chaleur désagréable dans une zone aussi visible. Ne pouvait-on pas plutôt rougir des coudes quand la gêne nous empourprait ? Même si elle avait rosi légèrement quand elle avait réalisé la proximité dans laquelle elle s'était mise pour mieux m'impressionner, mais elle avait rapidement, trop rapidement repris contenance pour que je puisse lui rétorquer qu'elle s'était trouvée dans le même état que moi. Sans compter sa mauvaise foi outrancière, elle nierait de toute façon en bloc !!

Je ne doutais pas un instant que celle se trouvant face à moi était dotée d'une intelligence supérieure. Une imbécile ne pouvait détenir une telle demeure, ni avoir une telle répartie. Pourtant, je fus on ne peut plus surpris de l'entendre dire qu'elle ne verrait pas l'intérêt de me soutirer des informations. N'avait-elle pas vu ma démonstration sur son passé, et la mine de connaissances que j'avais en ma possession. Trop heureux de m'en sortir à bon compte, je fus très laconique dans ma réponse.

- Probablement, j'en doute également. Vous avez un âge avancé après tout. J'haussais les épaules espérant ce pan de conversation clos.

En attendant je servis sous l'oeil amusé et sadique de Yulenka de cobaye à un équidé aquatique trop heureux de trouver un jouet qui flotte à se mettre sous la dent, puis d'un énorme dragon chat trop grognon pour m'emmener autrement qu'en envoyant valser ledit jouet.

- Froid et distant ? Si vous ne l'aviez pas arrêté à temps, il serait pour sûr distant d'au moins dix lieues de là où mes fesses auraient atterri oui ! Que risquait-il, que je lui ravisse votre cœur parce que vous vouliez m'enlacer ? Tsss .... Vous n'en loupez pas une vous ....

Par quel improbabilité s'était-elle retrouvée avec une telle créature qui paissait dans son jardin l'air de rien ?...
- Vous avez d'autres surprises de ce genre peut-être, un ver de terre géant qui s'appelle Jim et qui va me faire visiter les fondations de votre forteresse ? Vous m'aurez vu couler, voler, allons y pour le ramper non ?

Je n'aimais pas du tout me faire malmener et même sa proposition de m'accorder des vêtements propres sonnait faux à mes oreilles. Même quand nous parvînmes jusqu'à la pièce faisant office de penderie, je restais sur mes gardes, jugeant plus l'aspect de dangerosité de la tenue que son esthétisme.
Aussi quand elle me parla de robe Empire - oui, visiblement il y avait des robes pour un Empire, je me demandais quel était le crétin qui avait trouvé un nom pareil - je la regardais les yeux grand ouverts, les lèvres légèrement détachées tandis qu'elle me décrivait ce type de robe, ses avantages et ses inconvénients, sur qui elle allait, la sublimation de la silhouette.

- Vous vous rendez compte que vous essayez de décrire à une Ombre mâle une robe que je ne verrai jamais, que je ne porterai jamais et dont je n'ai pas compris un traître mot de ce qui est évasé, fluidifiante ou qui tombe plus facilement selon le corps qu'on avait. Y'a-t-il des drogues inhalées dans cette pièce ?.. Je m'attends à tout avec vous vous savez ...

J'attrapais la tenue tout en me dirigeant vers le paravent, prenant quand même la peine de regarder le dos au cas où une inscription grossière en fil luisant y aurait été mis. Ouais, elle en aurait été bien capable la garce ! Le problème ne vint pourtant pas des habits, mais du déshabillage auquel je me livrais, en compagnie d'un vampire plus puissant que moi, entre quatre murs de pierre. La seule différence résidait dans cette cage fait de toile et non de barreaux de fer. Pourtant, j'étais bel et bien prisonnier derrière ce paravent de la même façon que je l'avais été de mon vivant.

Les tourments longtemps enfouis en moi, que je pensais avoir maîtrisé depuis que j'étais devenu Passeur, se rappelèrent à mon bon souvenir. Le timbre de ma voix se fit mélancolique, mon regard dérivant vers cette farce illusoire qu'était mon corps actuel.

J'entendis à peine les pas feutrés de ma tortionnaire quand elle adopta une voix plus compréhensive, suave. Il devait s'agir d'une nouvelle façon de me torturer assurément. Pourtant ses paroles étaient empreintes de sagesse, et ses conseils semblaient étrangement sincères. Pire encore, j'arrivais presque à croire son encouragement final. Que cherchait-elle à faire ? Elle voulait que je cesse de détester les vampires, à la bonne heure ! Hop on se suicide et on efface l'ardoise.

Je serrais les poings de rage, elle ne pouvait pas comprendre, elle n'était pas dans le camp des torturés, des humiliés, des asservis.

Un sillon ensanglanté se dessinait lentement sur mon torse, comme si un couteau invisible tranchait ma chair de l'épaule gauche jusqu'au nombril, laissant sa marque avant de recommencer ailleurs, se multipliant même partout où ma peau était visible. Des micro-coupures aux plaies béantes, mon passé voulait me rappeler les marques de ma tendre enfance, l'enfer que j'avais vécu sous les doigts agiles et sadiques de ce vampire. Le sang coulait le long de mon corps, jusqu'à former cette petite flaque rougeâtre qui croissait par les sentiers carminés longeant mes jambes. Mon corps ressemblait plus à un champ de bataille qui n'avait que trop duré, cette déclaration de guerre avec ma santé mentale dont tout le monde serait perdant. Je savais que j'étais le responsable de cet état actuel, des souffrances que j'étais en train de m'infliger et qui me faisaient couler des larmes de colère.

Les paroles de Yulenka le firent sortir de sa torpeur. Il ne savait pas combien de temps il était resté dans cet état de dérive complète, mais il espérait qu'elle n'avait rien vu. C'était la première fois que cela lui arrivait, et elle était la dernière personne à qui il voulait montrer une telle faiblesse.

L'illusion aussi lisse que parfaite reprit le dessus, les plaies disparaissant et le sang fut comme aspiré pour n'avoir jamais existé.

Je m'attelais à m'essuyer le corps désormais débarrassé de tout habit, pour enfiler la tenue que la Vampiresse m'avait choisie.
Le tissu était confortable, de bonne qualité, il me rappelait la tenue que j'avais dû porter ici-même dans l'une des pièces qui se jouaient de nous. Une fois convenablement vêtu, je quittais mon abri de fortune pour me soumettre au verdict probablement goguenard de celle qui était face à moi.

- Alors verdict ?
1 806 mots.
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Sang-gêne et Sang Haine [Yulenka & Wriir]

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