« Je suis Sakura Descartes, Grande Vénus et Ran, souveraine de toutes les Orines et Geisha accomplie. Sous mon règne, je ne tolérerais que la beauté à l'état pur et les Arts les plus fins. Je tiens à ce que chaque femme que j'éduquerais soit d'une délicatesse à toute épreuve, qu'elle rayonne tout autant par ces mots que par la grâce inestimable de son visage et les mouvements aériens de son corps. Je bannirais la vulgarité. Je détruirais l'évocateur et le provocant. Mes règles seront parmi les plus strictes et je serais sévère envers celles qui ne les respecteraient pas. Écoutez moi bien, mes demoiselles. Être Geisha, c'est être considéré comme une œuvre d'art vivante. Vous serez l'essence de l'art, l'essence d'une beauté bien à vous. Vous devez donc être des femmes magnifiques, sans jamais vendre vos charmes, vous devrez donc exceller en toute matière artistique sans jamais vous en vanter puisqu'il est naturel pour nous d'être parmi les plus douées, car si ce n'était pas le cas, nous ne serions pas des Geishas. Vous ne salirez pas notre nom, je ne le permettrais pas. Les sélections seront dures, les épreuves, tout autant, car seules les élues pourront accéder à ce titre. C'est un privilège que je n'accorderais pas à la première venue, car nous sommes les artistes d'un monde autre et merveilleux qui ne doit être façonné que par les meilleurs. C'est ainsi, et cela le restera.»

Ainsi s'achevait le vieil ouvrage poussiéreux que Lily-Lune avait déniché dans les tréfonds de la Grande Bibliothèque de Maëlith. Pensive, elle se contenta durant de longues secondes de caresser du bout de ses longs doigts fins les lignes griffonnées rapidement par une Muse qui avait repris à l'écrit le discours prononcé par une Vénus d'autrefois. Doucement, la jeune femme releva la tête pour laisser ses grands yeux sombres se balader dans la pièce. Il faisait jour. Elle jeta un coup d’œil à la fenêtre, elle n'avait pas même prit la peine de tirer les rideaux. « C'est l'aube.» murmura-t-elle d'une voix claire, surprise, puisqu'elle avait commencé sa lecture à la nuit tombée et qu'elle ne s'était même pas rendue compte du temps qui filait. La bougie qui avait éclairé les mots durant la nuit ne brûlait plus depuis bien longtemps, et il n'en restait d'ailleurs presque plus rien. La cire, sèche, tournoyait tout autour du socle en argent. Il fallait bien dire qu'elle avait été captivé par ces écrits, et qu'elle n'avait pas une fois décroché son regard des pages jaunis par le temps avant d'arriver au mot de la fin. Cela faisait tellement longtemps qu'elle recherchait la moindre information sur cet ordre d'autrefois, qui s'était éteint il y a des siècles de cela et qu'elle comptait bien faire revivre.

Un sourire aux lèvres, elle referma avec précaution le grimoire pour le placer sur une étagère, celle où elle disposait toutes les trouvailles inestimables et qu'elle ne comptait pas remettre dans les archives où elles tomberaient dans l'oubli. Ce genre de trésor devait avoir une chance de revivre. « Sakura Descartes...» dit doucement la Vénus, tâchant de se rappeler de quelque chose. Cette femme avait été la dernière Ran, une Vénus qui avait abandonner son poste à la disparition de son maître et en vue des grands troubles de l'époque. Mai n'était-ce pas aussi le nom de la vieille Orine qui vivait recluse dans les ruines de Maëlith ? Lily devait tirer cette histoire au clair et aller à la rencontre de cette femme. Mais s'il s’avérait qu'elle était bel et bien la Ran, il était hors de question qu'elle se présente face à elle avec une pareille demande dans cet état, les yeux cernés par une nuit blanche. Alors bien qu'elle soit incapable de dormir paisiblement, Lily tâcha de se reposer quelques heures.

La matinée touchait à sa fin. Il était grand temps d'aller à la rencontre de Sakura. Les cheveux tirés en un chignon élégant à la base duquel Lily-Lune avait planté quelques fleurs fraîches, comme à son habitude. Vêtue d'une grande robe claire qui soulignait avec élégance sa ligne, elle avançait parmi les ruines de Maëlith, cherchant des yeux un quelconque mouvement. « On ne peut être tranquille, quand bien même on se cache !» finit par cracher une voix avec dédain. Lily-Lune releva les yeux pour les poser sur Sakura, assise sur une pierre un peu plus loin, elle semblait tricoter. Malgré les siècles, elle ne semblait pas être bien vieille, même si ses traits étaient légèrement creusés, elle gardait une belle peau halé et des cheveux chocolat ondulés à l'allure soyeux. « Je m'excuse de venir vous importuner, mais j'aimerais vous parler.» - « Tiens donc. Voilà qui est rare, d'habitude, on m'évite.» Sakura leva les yeux avec lassitude pour observer celle qui se présentait devant elle. De toute évidence, elle ne s'était pas attendue à cela. « La Vénus ? Ma foi, Lily-Lune, que faîtes vous dans les parages et que pouvez-vous bien me vouloir ? Vous devez avoir un tas de Muses prêtes à faire tout et n'importe quoi pour vous. Une vieille femme comme moi n'a plus rien.» - « Bien au contraire, j'ai cru comprendre que vous étiez la seule ici bas à pouvoir répondre à mes interrogations et surtout m'aider.» - « Et en quoi ?» Lily-Lune hésita quelques instants. « Peut-être devrions nous en parler plus confortablement installée ?»

Et Sakura invita donc Lily-Lune chez elle, si l'on peut dire. Depuis de trop longues années, elle vivait dans une maison à moitié délabrée, au toit en ruine et aux murs tremblants. Il y avait tout de même une table et quelques chaises, et elles prirent donc une tasse de thé ensemble. « Alors, que vouliez-vous me dire ? Enfin, me demander.» - « J'aimerais seulement faire renaître notre gloire et notre prestige passé.» - « Je ne vois pas ce que je peux faire.» - « Parce que vous devez penser comme une politicienne, seulement, je ne veux pas de ce point de vue aujourd'hui. Songeons comme des artistes.» Sakura semblait troubler de ses paroles, mais n'ajouta rien, attendant de toute évidence la suite. « Je dois avouer être d'une curiosité immense, j'ai soif de savoir et m'informe beaucoup. Je parcours souvent les archives à la recherche de la perle rare. Et il y a peu, j'ai sorti de l'ombre un vieil ouvrage sur … une coutume d'autrefois. Une merveilleuse tradition que j'aimerais voir naître à nouveau, de ces cendres. Et puisque vous êtes la dernière ...» Face au silence de la dernière des Rans, Lily-Lune enchaîna, plus clairement : « Je ferais revenir les Geishas. Mais je ne peux le faire seule, ou tout du moins, je ne le souhaite pas. J'aspire à une légitimité, et en tant que dernière geisha de l'ancien temps, Ran de surcroît, vous êtes la seule à pouvoir me former, si vous estimez bien entendu que mon but est noble et que je mérite une chance de prouver ma valeur.» - « Cela fait bien longtemps que je n'ai plus entendu parler de tout cela .. Voyez-vous ma chère enfant, comme vous le savez mon maître a disparut. Et puisque je vis encore, je sais qu'il vit encore et je ne me suis jamais résout à ...» Elle secoua la tête. « Quoiqu'il en soit, je n'ai pu supporter tout ça, et je ne pouvais me charger des guerres qui se préparaient à l'époque et j'ai cédé ma place à une femme plus encline à rétablir l'ordre. Elle fut la première à causer la perte de l'Ordre, car après elle, la tradition se perdit.» - « Pensez-vous que je puisse le faire revenir du passé ?» Sakura observa avec insistance Lily-Lune. « Lève toi.» Le vouvoiement ne semblait plus d'actualité de son côté et Lily-Lune se doutait de la raison. Sans broncher, elle s'exécuta. Faisant quelques pas, elle vint s'arrêter non loin de Sakura qui l'examinait avec insistance.

« Tu es trop maigre.» dit Sakura le plus naturellement du monde, sur un ton dur et sans appel qui laissait bien transparaître que Lily-Lune ne devait en aucun cas répondre. « Pas assez de muscles.» continua la Ran, froide et distante alors qu'elle était si avenante il y a quelques instants. « Mais tu es grande et élancée, bien cambrée. Belles jambes, longues et fines» Elle appuya sur les épaules de la Vénus, observa ses poignets et les traits de sa frimousse angélique. « Un peu trop blanche peut-être. Mais tu es très belle. C'est un fait. J'aime les traits peu communs de ton visage. Beaux cheveux. Des yeux atypiques. Tu pourrais faire l'affaire. Mais ne crois pas que parce que j'admire ton but je vais te faciliter la tâche. Tu réussiras ou tu échoueras, je me montrerais aussi stricte et sévère qu'avant, je ne te ferais pas de cadeau. Est-ce compris ?» - « Oui, ma dame.» - « Bien. Sais-tu peindre, dessiner?» - « Oui.» - « Danser ?» - « Oui.» - « Chanter ?» - « Oui.» - « C'est déjà ça. Tu as un bon potentiel. Bien qu'il soit inhabituel de commencer la formation à cet âge. De toute manière, la Vénus doit être une Geisha, et la meilleure d'entre toutes. J'espère que tu réussira, parce que je te réserve un entraînement intensif, dur et éprouvant.» - « Compris.» - « Mes félicitations, j'accepte de faire de toi une Riya. Sais-tu ce que cela signifie ?» - « Cela signifie ' choisis ' en ancien langage. Je suis donc une apprentie sans formation.» - « Bien. Reviens demain, nous commencerons ton éducation. Tu ne resteras donc pas Riya très longtemps. A l'époque, je laissais ce rang aux jeunes filles durant des mois, parfois des années, avant de me décider. » Elle rit. « File.»

Et Lily-Lune s'en alla le plus calmement du monde bien qu'elle se sente étonnement légère et heureuse, elle ne put refréner un petit sourire sur ses lèvres rouges. Elle savait que les jours, les semaines et les mois à venir ne seraient pas une partie de plaisir, et elle s'était bien gardé de livrer à Sakura qu'elle était enceinte, mais le jeu en valait la chandelle, et elle prouverait à la Ran qu'elle était digne de lui succéder, elle ne comptait très certainement pas abandonner. Jamais.

« Tu m'as l'air bien heureuse.» murmura doucement Caleb en serrant délicatement sa bien-aimée contre lui. Lily-Lune souriante, passa lentement ses doigts sur le visage du Rehla, traçant le contour de ses visage et de ses lèvres. « Tu ne devineras jamais.» Et à bien y réfléchir, ce n'était pas certain que la nouvelle lui plaise et le ravisse au plus haut point. « Je t'écoute ma belle, raconte moi. Mais à table, s'il te plaît, j'ai cuisiné toute la matinée.» - « Vraiment ? Quel miracle. Suis-je ton cobaye en la matière ?» - « Je le crains, mais mon expérience a l'air comestible, tout du moins.»

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« Es-tu certaine que cette décision est sage, Lily-Lune ?» - « Je pense qu'elle l'est.» - « As-tu prévenu Sakura de ton état, ou as-tu jugé que cela n'était pas réellement utile ?» Lily-Lune détourna les yeux. Caleb avait l'air peiné bien qu'il tâche de le cacher du mieux qu'il puisse. « Si j'ai bien compris ce qui te dérange, non, Caleb, je ne cherche pas à cacher ma grossesse, et je n'en ai évidemment pas honte ou je ne sais quoi. Je suis heureuse de pouvoir donner la vie dans quelques mois, fière et honorée que tu en sois le père. Simplement … Je veux et dois faire revivre cet Ordre, et je ne tiens pas particulièrement à repousser l'échéance. Nous ne devrions pas même savoir que je porte ton enfant, il est trop récent, c'est Mère Nature qui a bien voulu me le dire. Il n'y a aucun risque, ni pour lui, ni pour moi, et je ne suis pas plus fragile, pour l'instant tout du moins.» Caleb tendit doucement une main pour caresser fébrilement la joue de sa bien-aimée. « Je ne t'ai fais aucun reproche.» - « Pourtant, je te sens soulagée. C'est donc que j'ai dis des paroles qui t'ont rassuré et apaisée.» Il rit. « Je ne mentirais pas. Mais fais tout de même attention.» - « Ne t'inquiète pas pour moi, je ne suis pas faible.» - « Je le sais. Mais tu devrais quand même songer à trouver une explication digne de ce nom à servir à Sakura le jour où elle apprendra l'heureux événement.» Ce fut au tour de Lily-Lune de rire. « Je lui cacherais ma grossesse jusqu'à la fin et je ferais l'étonnée.» - « Quel plan sans faille.» - « Viens.» Lily-Lune, un doux sourire aux lèvres, laissa glisser ses mains du cou du jeune homme qu'elle enlaçait, passant sur ses épaules et ses bras, pour arriver jusqu'à ses mains, qu'elle sera dans ses paumes pour ensuite l'entraîner dans les profondeurs de Maëlith, les coins sauvages où peu d'Orines s'aventuraient, pour un peu plus d'intimité.

Et c'est là, sous un grand saule pleureur au bord du Lac à la réputation maudite, qu'ils s'allongèrent, une main dans l'autre. Caleb, pensif, contemplait sans qu'elle le sache l'Orine qui gardait paupières closes. « A quoi penses-tu ?» finit-il par lui demander. « Ne lis tu pas les pensées ?» - « Je ne me permettrais pas d'aller fouiller dans ta tête, je préfère entendre la réponse que tu voudras bien me servir.» Sans ouvrir les yeux, elle sourit. « A tout et à rien. A Sakura, à ce que je vais devenir, à mon avenir en général, avec toi … à des possibilités de prénoms pour notre enfant.» Lui aussi sourit. « Il faudra qu'on en parle.» - « Oui. Je sens que se mettre d'accord va être amusant.» Ils discutèrent encore quelques instants de sujets légers, avant que Lily-Lune s'excuse, puisqu'elle devait s'en aller voir l'ancienne Ran, et qu'elle devait se préparer selon ses directives avant d'aller se présenter à elle. Il n'était pas vraiment envisageable d'aller contre ses volontés, et l'Orine refusait de risquer d'échouer pour si peu. Elle se rendit donc en toute hâte dans son manoir, et fila dans sa chambre, pour se déshabiller entièrement en enfiler des sous-vêtements blancs et une longe robe qui l'était tout autant, sans manche, le haut lacé. Elle attacha rapidement son immense chevelure à la longue extravagante en une large tresse qui n'en finissait plus et partit de ses appartements aussi vite qu'elle était venue.

« Te voilà enfin.» constata Sakura, les bras croisés, en voyant Lily-Lune arriver. La Ran ne fit aucune autre remarque et se contenta de tourner les talons pour s’enfoncer dans les ruelles délabrées des Ruines. La Vénus, quant à elle, osait espérer que cette absence de commentaire signifiait qu'elle n'avait rien à lui reprocher, et sans broncher, elle suivit la vieille Orine qui l'entraînait elle ne savait trop où. Les Orines ne venaient pas vraiment dans les Ruines, cela ne les intéressait guère, il y avait des tas d'air de jeu sauvage plus amusante que ces décombres du passé. Pourtant, l'histoire que comptait les vieilles battisses n'étaient pas banale. Après avoir parcourut quelques rues, Sakura s'arrêta. Et Lily-Lune leva les yeux, écarquillés, devant un tel bâtiment. Massif, à l'architecture fine et élégante, il tenait étonnement debout et ne semblait pas vraiment en mauvais état. Le toit était aussi sombre que les yeux de Lily, recourbé et tordue, il faisait un petit pan d'ombre, et les murs étaient d'un rouge sable. Il restait tout autour les vestiges d'espèce de rempart de la grande porte d'entrée qui devait mener à l'intérieur. « C'était ici» expliqua Sakura « Que l'enseignement était donné. Il s'agissait du cœur de Maëlith, à l'époque. Mais depuis la destruction alentour et la fainéantise de la dirigeante en place à ce moment, rien n'a été refait, et peu à peu, le centre est allé ailleurs, là où il est aujourd'hui.» Elle fit une petite pause, nostalgique. « C'est donc Risata, l'école des Geishas. Ce qu'il en reste.»

« Bien.» dit simplement Sakura après que Lily-Lune lui ait fait des démonstrations de tout ce qu'elle savait faire dans les domaines que demandait la Ran. «J'ai donc pu constater que je n'ai pas à t'apprendre l'Art. Tu le maîtrises assez bien. Tu es très bonne danseuse, souple et élégante, ta voix est belle … Tu m'as dis faire toi même tes vêtements, qui sont réussis. On m'a déjà vanter tes talents d'acrobates. Bonne musicienne. Peintre et dessinatrice douée. Soit.» Une petite moue se dessinait sur ses lèvres, comme si elle semblait énervée que Lily-Lune maîtrise si bien la matière. Peut-être y avait-il un semblant de jalousie, mais Lily-Lune ne fit aucune hypothèse et se contentait d'écouter. « Au moins, ta formation n'en sera que plus rapide. Cependant, il faut que nous travaillons ensemble et maintenant la souffrance. Car vois-tu, elle fait partie intégrante de nous. C'est ainsi. Nous ne sommes pas des catins qui se reposent sur leur lauriers, leur beauté et leur talents, et elle est là pour nous le rappeler, pour entretenir l’œuvre. Tu vas me rejouer un morceau. Mais avant ...» Elle alla chercher une bassine remplie d'eau et de glaçons. « Plonge tes mains là-dedans.» Et une fois n'est pas coutume, docile, Lily-Lune fit ce qu'on lui demandait sans émettre la moindre protestation, plongeant ses mains fines et délicates dans l'eau glacées. Et durant de longues minutes, peut-être une dizaine, le silence se fit, jusqu'à ce que Sakura le brise par un nouvel ordre. « Suffit, maintenant, joue.»

Tremblante, Lily-Lune s'empara de l’instrument à corde et joua, tâchant de ne pas se préoccuper de ses longs doigts aux teintes bleutés, endoloris et endormis. Chaque mouvement était soudainement bien plus complexe. Les jours suivant, le supplice de la glace revint sous d'autres formes. Lily-Lune dut peindre de cette manière, réaliser quelques acrobaties avec les mains gelées, puis Sakura lui ordonna d'aller nue dans une baignoire remplie d'eau froide. Certes, seulement quelques minutes, mais cela était assez pour engourdir le corps de la jeune femme, et danser dans ces conditions n'était pas vraiment une partie de plaisir.

« Tu te tiens droite. C'est bien. Mais est-ce que tu y penses ?» - « La plupart du temps, non.» Elle avait hésité quelques instants avant de répondre mais avait choisis de ne pas mentir. Car oui, elle avait pour habitude d'avoir un port de tête irréprochable, et ce, naturellement, mais comme dans tout, il y avait quelques exceptions. « Nous allons y remédier. Tu n'y penseras plus du tout» C'était bien ce qu'elle craignait. Lily-Lune dut porter un corset horriblement serré, sertie de baleine en métal qui rentraient dans la peau dès qu'il y avait le moindre relâchement. Et tout les exercices d'Art furent refait, avec le dit corset, et même ce qui semblait être banal et peu important, comme se coiffer, se maquiller et manger.

« Tu es quelqu'un de raffiné. Je n'ai pas à revoir ton comportement en société. Tu es Reine après tout, c'est plutôt une bonne nouvelle pour les Orines. Et tu t'exprimes très bien. Nous ne verrons donc pas l'expression.» Et pourtant, Lily-Lune aurait aimé. Cependant, autant ne pas perdre de temps sur des choses qu'elle savait déjà.

« J'ai cru voir que tu avais un homme dans ta vie, n'est-ce pas ?» - « C'est exact.» Lily-Lune commençait à ne pas vraiment aimé la tournure que prenait la conversation. « Sache que c'est autorisé. Enfin, c'est plus compliqué que cela. Car normalement, une Geisha prends son protecteur pour maître, qui est obligatoirement un homme, sauf que tu es déjà liée, à une femme, qui plus est. Mais les hommes que nous allons divertir n'ont pas à savoir ta vie sentimentale. Tu seras une œuvre, comprends-tu ? Un fantasme que l'on admire, que l'on désire, et le mythe ne doit pas être brisé. Même les Geishas qui ont un protecteur ne disent rien sur les sentiments. Les sentiments, ce ne sont pas l'affaire des Geishas. Est-ce compris ?» - « Oui.» - « De toute manière, nous n'en sommes pas encore à là, tu n'es qu'une Rinda. Mais autant te prévenir tout de suite, si tu parviens à aller au devant.» - « C'est préférable en effet.» - « Donc, dans ton cas, ton protecteur ne sera pas ton maître, cependant, vous serez très liés tout les deux par un contrat magique incassable, et dans ton cœur, tu ressentiras ton protecteur comme un égal de ton maître.» - « Je vois … Mais n'est-ce pas problématique par rapport au Lien ? Cela n'a jamais posé problème ?» - « Les cas comme les tiens dans l'histoire des Geishas sont rares, tout comme les étrangères qui accèdent à ce titre. Mais il y en a déjà eu, et cela ne gêne en rien la nature d'Orine. Les Geishas sont à part, elles ont des privilèges, et peuvent donc, par là, appartenir à plusieurs personnes dans de rares cas comme le tien. Si tu parviens jusqu'au bout.» Elle aimait à rappeler ce dernier détail. « Maintenant, file, et reviens demain aux premières heures de la matinée.»

« Tu reviens de plus en plus épuisée, de jour en jour.» constata Caleb en voyant sa dulcinée presque endormie dans le lit. « Mais j'approche au but, je le sens.» murmura-t-elle dans un souffle ensommeillé. Caleb, attendri, s'approcha d'elle avec douceur pour passer une main dans ses cheveux. « Endors toi, belle aux bois dormants.» Et il l'embrassa tendrement avant de se glisser lui aussi dans les draps, toujours aussi pensif, contemplant de la fenêtre les étoiles danser dans les cieux. « Momiji si c'est un garçon, Misa ou Mariko si c'est une fille.» chuchota-t-il. « C'est très joli ...» et elle sombra dans le monde des rêves.

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