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 Panne de majordome ! [Q Solo]

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Sam 13 Juil 2013, 09:44

Loki tendit la main à Lully. Cette dernière la serra en le regardant d’un air curieux puis lui emboita le pas, quand celui-ci se dirigea vers le hall de l’Antre enflammée de Vulcain. Lully était déjà tentée d’abandonner la mission que Takias, la souveraine des Elementals, lui avait confiée : jouer la majordome d’un de ses invités politiques, maître Monternac, pour en fait lui rapporter tous ses faits et gestes –une ruse à laquelle ce dernier ne s’attendait pas, espérait-elle. En effet, le maître Elemental de l’eau était l’un de ses anciens ennemis et fuguait tous les soirs pour se rendre dans des lieux mystérieux. La sirène n’aurait qu’à le suivre et écouter, ou à défaut, s’il ne voulait pas qu’elle le suive, se servir de ses atouts pour le filer en toute discrétion –une de ses spécialités. En bref, cela lui avait paru plutôt facile. Mais l’endroit l’enchantait le moins du monde ; voilà qu’elle devait encore croiser le chemin d’un volcan ardent, la lave étant partout autour d’elle, lui donnant des bouffées de chaleur insupportables. Cela lui rappela cette quête qu’elle avait fait avec Yûki, au cœur-même d’un volcan, où elles avaient dû affronter un pyromancien… ici, même dans le hall, la lave était partout, remplaçant presque les murs, étant la seule source de lumière et de chaleur (une chaleur qui suffisait amplement). Alors qu’elle accélérait discrètement le pas, n’ayant que l’envie de se reposer dans sa chambre pour retrouver un peu de courage, Loki, qui lui révélait où menaient les chemins qu’ils croisaient en se dirigeant vers sa chambre, se tut un moment puis lui demanda :

    « Alors, mademoiselle, comment trouvez-vous le château de notre souveraine ? »

Lully le regarda en écarquillant les yeux et se demanda quoi répondre. Les normes sociales imposaient de mentir, mais elle n’en avait aucune envie : pour elle, il lui tendait une perche. Celle d’exprimer sa haine du feu, de la chaleur, du volcan. Pourquoi se retenir ? De toutes manières, elle ne rapporterait rien en s’attirant la sympathie de l’homme qui l’accueillait. Mais si elle le blessait, peut-être qu’il lui retirerait sa mission, et au revoir la récompense… elle décida donc d’être franche, mais pas trop, et répondit, en montrant les murs de lave qui les entouraient :

    « Comment dire… je suis une femme de l’eau, et non du feu. Je supporte mal la chaleur et l’éclat de toute cette lave. Je trouve que ce château est… redoutable. Je ne me sens pas comme chez moi. »


Oui, redoutable, c’était bien le mot. Rien ne lui inspirait confiance, mais plutôt la peur, voir le dégoût. La sirène remarqua le regard interpellé de son interlocuteur, peut-être vexé, ou énervé, même. Ce dernier ouvrit la bouche, puis la referma, ne sachant plus quoi répondre. Pendant quelques minutes, il n’y avait plus que leurs pas qui échangeaient leurs échos dans les larges couloirs, parfois ponctués par d’autres passants. Puis, ce dernier se décida à briser le silence en lui disant, d’un ton qui lui semblait plus forcé qu’au début, que sa chambre lui plairait beaucoup plus que l’entrée du château. Il n’ajouta rien, mais Lully sentait qu’il voulait défendre son lieu bien-aimé. Elle jugea qu’il avait bien fait de ne rien dire, car elle aurait commencé à s’énerver… vraiment. Mais elle n’était pas là pour ça.

Après quelques minutes de marche, l’homme et la sirène s’arrêtèrent devant une gigantesque porte, juste en haut des escaliers qu’ils avaient franchis. Les deux gardes reconnurent Loki et se tournèrent vers la porte pour l’ouvrir. S’il était une chose que Lully avait remarqué, c’était que cet antre était énormément protégé. Cela lui offrait au moins un bon point. Quand les gardes eurent ouvert la porte, Loki leur fit un signe de remerciement, non-suivi par Lully qui n’avait aucune envie d’être polie, et ils traversèrent un couloir qui n’avait rien de différent des autres. En revanche, ce qui interpellait Lully, c’était que le couloir qui suivait celui-ci se terminait par une multitude de portes, d’où sortaient des personnes qui marchaient d’un pas nonchalant : des invités, certainement. Mais avant d’arriver à ce couloir, les deux personnes devaient franchir une place. Quand les deux y arrivèrent, Loki s’arrêta en son centre et se mit à discuter avec certains invités qui s’étaient stoppés. Lully n’existait plus, pour lui. Faisait-il exprès ou non ? Il était censé l’amener jusqu’à sa chambre, pas jusqu’au couloir de sa chambre ! Lully s’apprêta à s’adresser à lui, pour lui rappeler ce qu’il était censé faire, mais en se tournant vers lui, son regard se dirigea vers le couloir qui se trouvait loin derrière lui.


    « Waouh. »

Ce fut le seul mot qui lui vint aux lèvres. Dans le couloir qu’elle regardait s’entremêlaient des dizaines d’éclairs, et des boules d’électricité le traversaient sans interruption, l’illuminant. Aucune lave, aucune pierre volcanique : ce couloir était entièrement à l’effigie de la foudre. Et à côté de celui-ci se trouvaient deux autres couloirs, tout aussi impressionnants : celui de l’air, où un vent sifflait et où la décoration était aussi claire que le jour, et celui de terre, où des animaux se prélassaient dans une forêt qui semblait plus que réelle. Si chacun des couloirs était créé à l’effigie d’un élément, où se trouvait celui de l’eau ? Lully se tourna vers celui de feu, puis se retourna et vit les trois derniers couloirs : il y en avait un où une brume régnait, accompagnée par une tombée de neige ininterrompue, un où des pièces métalliques constituaient l’ensemble du décor, et enfin, un dernier où l’eau tombait des murs et où des fontaines faisaient danser l’eau. Lully se tourna une dernière fois vers Loki : le groupe de personnes à qui il parlait avait grossi, et il ne semblait pas disposé à la guider vers sa chambre. Sans plus attendre, elle se dirigea vers le couloir de l’eau, qui lui semblait magnifique, grandiose. Dès qu’elle s’engagea dans ce couloir, regardant l’eau tomber calmement des murs, elle distingua un filet d’eau qui ne suivait pas la cascade : il avançait à son rythme, passant au-dessus des portes, puis s’arrêta soudain au-dessus de l’une d’elle. Lully comprit que c’était la façon de la guider, et elle ouvrit la porte de sa chambre. Il n’y avait aucune clé, mais elle se doutait qu’elle n’aurait pas réussi à entrer dans une chambre qui ne lui était pas destinée.

À l’intérieur, tout était aussi beau que dans le couloir. Tous les meubles rappelaient l’Océan, et l’eau était partout : sur les murs, et dans le sol, là où une gigantesque piscine s’offrait à elle. Tout le stress qu’elle avait accumulé en traversant le château de lave s’en était allé, et Lully ne pensait plus qu’à une chose : rester ici. Maintenant, oui, elle était comme chez elle. La jeune femme était fatiguée, car elle était arrivée tard, pour commencer en tant que majordome le lendemain matin, mais elle n’avait aucune envie de se coucher maintenant : elle voulait aller dans la piscine et retrouver son corps de sirène, en harmonie avec l’élément de sa vie. Autant profiter au maximum de l’hospitalité de son hôte !

*
Le lendemain, Lully se leva la boule au ventre. Aujourd’hui, il faudrait qu’elle fasse de son mieux : son but, c’était d’être crédible. Elle devait s’attirer la confiance de Monternac, pour qu’il la laisse assister à ses réunions secrètes, et qu’elle aille tout balancer à la souveraine. Sa mission était plutôt machiavélique, en fait… rapidement, la sirène s’habilla, mettant la tenue la plus sobre possible –un haut simple avec un pantalon simple, tout en nuances de bleu, et des chaussures ouvertes, blanches. Cette fois, Lully avait laissé de côté tout accessoire. Elle n’avait aucun sens de l’esthétique, il fallait l’avouer, mais plus elle faisait simple, moins cela se voyait. Puis elle sortit de sa chambre et se dirigea vers le hall d’entrée, là où elle devait retrouver Loki et ce fameux Monternac, pour commencer son travail.

Quand elle arriva, Loki lui fit un signe de la main, le sourire aux lèvres, comme s’il n’attendait qu’elle –alors qu’il ne lui portait aucune sympathie, surtout depuis qu’elle avait critiqué le château. Lully ne s’embarrassa pas d’hypocrisie et l’ignora, son regard se fixant sur le maître Elemental, qui s’était tourné vers elle. Il était très élégant ; tout en lui indiquait qu’il était une personne importante. Elle aurait préféré avoir affaire à une femme, détestant tout contact avec les hommes, mais le sort semblait s’acharner contre elle. Cela la déterminait à mener à bien sa mission. La récompense avait intérêt à être de taille ! D’ailleurs, Lully négocierait, s’il le fallait. Laissant ses pensées de côté, la sirène descendit les escaliers puis salua l’Elemental :


    « Je m’appelle Lully Lin, enchantée. À partir d’aujourd’hui, je suis votre majordome : je veillerai à vos besoins et à votre sécurité. »


Cette dernière tiqua à sa dernière phrase, qu’elle répugnait à dire, mais il ne sembla pas le remarquer. On l’avait informée que cet homme était puissant et qu’il savait lire dans les pensées, mais Lully était immunisée aux sorts mentaux : ainsi, elle se sentait protégée comme jamais. Ce dernier hocha la tête en réponse, puis Loki répondit à sa place, lui présentant ce dernier. Ensuite, il s’excusa puis prit congé. Rien qu’à voir le rythme avec lequel il partait, Lully savait qu’il était plus heureux que jamais de s’éloigner d’elle, ce qui lui arracha un rictus. Bizarrement, elle était fière d’elle.

    « Un beau-parleur, hein ? Mais au fond, il ne m’aime pas. J’ai l’impression que toi non plus. » En entendant son tutoiement, Lully tiqua et lui lança un regard farouche. Mais elle se rappela leurs différences hiérarchiques, et elle se calma. Elle répondit, en se forçant à le vouvoyer, que Loki avait juste mal digéré les petites critiques qu'elle lui avait adressées.

    « Des critiques, tu dis ? Sur quoi donc ? Demanda-t-il. Et, tout en parlant, il commença à se diriger vers la sortie du château. La sirène appréhendait la sortie, mais elle fut abasourdie en voyant que la chaleur ne l’atteignait plus. Elle se dit que c’était une aura que devait dégager l’Elemental ; s’il était d’eau, lui non plus ne devait pas aimer cela.

    -J’ai juste dit qu’il faisait trop chaud… mentit-elle à moitié.
    L'Elemental eut un petit rire.

    -Je lui ai dit aussi. Il est un peu susceptible, c’est tout. Monternac la jaugea du regard sans rien dire puis ajouta : tu peux vraiment te charger de ma sécurité ? J’aurais plutôt dit que j’aurais pu me charger de la tienne.

    -J’ai été entraînée comme gardienne de notre reine Vanille, donc, oui, j’en suis capable. Enorme mensonge, mais qui ne pouvait pas être vérifié, espéra-t-elle. Peut-être que ma force n’égale pas la vôtre, mais je sais mieux que quiconque quand une menace guette. Vous voyez ce garde, là-bas ? Dit-elle en montrant l’un de ceux qui gardaient l’entrée du château. Il a pour charge de vous surveiller personnellement. Il vous espionne quand il n’est pas posté ici. Là, ce n’était pas un mensonge : il s’était présenté en même temps qu’elle pour le poste de majordome, mais son immunité aux sorts mentaux avait dû primer sur ses capacités à lui.

    -Je le savais », répondit-il.


Etait-ce pour la tester, ou le savait-il vraiment ? De loin, il avait l’air d’un garde normal. Lully fit mine de ne pas être surprise et surenchérit, en citant quelques-unes de ses pseudo-combines. Oui, Monternac avait dû la tester : c’était normal qu’il se méfie d’elle au début. Mais elle ne s’inquiétait pas de ça ; étant tous deux des adeptes de l’Eau, ils avaient au moins un intérêt en commun. De plus, elle avait beaucoup appris en manipulation depuis sa mission avec Jun : tout était une question de logique et de finesse. Peut-être qu’il ne la laisserait pas venir avec lui les premiers soirs de ses réunions secrètes, mais il finirait bien par céder : et si ce n’était pas le cas, elle pourrait appliquer son plan B. Non, Lully n’avait aucune inquiétude pour cette mission, si ce n’était de mourir de chaud sur ces terres.

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Sam 13 Juil 2013, 09:52

Au fil des jours, Lully en apprenait plus sur l’Elemental, et on aurait dit qu’il commençait à l’apprécier. Lully feignait une réciprocité, mais en fait, elle n’attendait qu’une chose : que cette mission se termine vite. Elle n’aimait ni le lieu, ni les gens, et encore moins lui. Déjà, elle n’aimait pas les hommes ; mais alors, des hommes si arrogants ! C’était juste insupportable : chaque parole qu’il prononçait lui sortait par les trous de nez. Parfois, elle avait une envie irrépressible de fermer son clapet en se servant de son pouvoir, pour réduire à néant tous les sons qu’il émettait. Pour toutes ces raisons, après avoir essuyé maints et maints échecs pour l’accompagner dans ses escapades nocturnes, la sirène se mit à établir un plan pour la soirée qui viendrait : puisque son plan ne marchait pas aussi vite qu’elle le voulait, Lully forcerait les choses. Il n’y avait que ça à faire si elle tenait à ne pas avoir des envies de meurtre –vraiment. D’ailleurs, sa colère était arrivé à son paroxysme la veille. À cause du temps que prenait sa mission, l’un des assistants de la souveraine lui avait proposé de jouer de ses charmes : après tout, ils avaient plusieurs points en commun, et elle avait toutes les opportunités qu’elle désirait. Quand cet abruti lui avait dit ça, Lully n’avait pu s’empêcher de… lui faire un peu peur. En le menaçant avec ses pouvoirs, en quelque sorte. Cela avait dû bien marcher, puisque quand elle l’avait recroisé, il était sorti de son champ de vision aussi vite que possible, comme si elle devait oublier son existence. Lully avait été plutôt fière d’elle. D’ailleurs, il aurait pu être tout aussi drôle de menacer Monternac comme ça, mais elle n’en avait pas le pouvoir : si elle faisait ça, elle n’aurait eu rien de plus que des représailles de sa part, et finie la mission…

En bref, elle comptait appliquer son plan B. Aujourd’hui, elle ferait semblant de ne pas être bien –car elle savait qu’elle ne pourrait pas rester dans le même état que d’habitude, et qu’il le verrait si elle le feignait. Elle trépignait tellement d’impatience ! Et surtout, il avait un tel instinct… des vrais yeux de renard. Quoiqu’il en soit, l’important n’était pas qu’il ait des doutes ou non : c’était juste de ne pas se faire repérer quand elle le suivrait. Lully avait mis en place un plan d’attaque pour s’infiltrer dans sa chambre –en plus, elle avait le soutien de tout le personnel qui était loyal à son employeuse. Elle n’avait eu aucun mal à demander à un responsable de la sécurité de lui ouvrir sa chambre. Et voilà qu’elle attendait, feignant d’être partie dans sa chambre, comme tous les soirs. Lully s’était réfugiée tout au fond de la piscine. Elle n’était pas allumée, et selon les dires du personnel, il n’y avait aucune chance pour que Monternac se prélasse dans la piscine avant de partir en vadrouille… et grâce à sa nature de sirène, l’eau n’était pas un obstacle pour entendre les bruits de l’extérieur : elle entendait tout, comme si elle avait gardé sa tête à l’extérieur de l’eau.

Lully se mit donc à attendre de longues minutes, échafaudant des plans C ou D, si jamais elle se faisait voir à un moment où à un autre. Elle se demandait surtout ce que mijotait Monternac, à partir secrètement. Etait-ce un complot contre sa nouvelle alliée, comme le craignait la souveraine ? Ou quelque chose de tout à fait autre ? Quoiqu’il en soit, Lully était sûre que si c’était contre elle, il passerait un très mauvais quart d’heure. Cela lui donnait même envie d’inventer le plus horrible des complots… mais elle savait que l’Elemental ne la croirait pas. Bien que Lully soit immunisée contre les sorts mentaux, ceux de cette dernière semblaient prendre effet tout de même, parant ses défenses. À moins que ce ne soit un instinct formidable pour reconnaître le mensonge…



    « …c’est ça ! On en rediscutera demain à la première heure, monsieur ! »


Cria Monternac à une personne inconnue de Lully, avant de refermer la porte de sa chambre. Dès qu’il y fut entré, ce dernier soupira et s’assit un moment. Il était vrai que ses journées étaient assez palpitantes : il n’était au château que pour une semaine, et il avait de maintes négociations à faire, que ce soit avec les habitants du château ou avec des invités de marque, tout comme lui.

Bref, ce n’était pas le moment de penser à ça. L’important, c’était ce qu’il allait se passer. Sans bouger d’une écaille, Lully écoutait. Monternac ne faisait aucun bruit ; il restait sur sa chaise, immobile. Elle perdait patience –elle n’était pas vraiment connue pour ça, mais elle attendait, consciente de l’importance de ce moment. Les minutes passaient, puis des dizaines de minutes… et soudain, l’Elemental se décida enfin à bouger. Lully devina qu’il changeait de tenue ; sûrement pour mettre quelque chose qui ne l’entraverait pas dans ses mouvements. Dès que ce fut fait, elle entendit des pas précipités qui venaient… de la fenêtre. C’était un autre homme, plus mince à en juger par le son de ses pas. Des paroles hâtives étaient échangées :



    « Y’a-t-il encore quelqu’un qui vous suit ?

    -Oui, encore. Deux personnes, cette fois. Madame la Souveraine semble élargir son budget pour me coincer, comme si elle était sûre que ça changerait quelque chose…

    -Sans parler de votre majordome, continua l’inconnu en s’éloignant de la piscine, comme si les deux protagonistes commençaient à partir.

    -Non, elle n’a toujours pas abordé ce genre de sujets. Aucune curiosité, aucun envahissement… mais cela ne veut pas dire que je lui ferai confiance, crois-moi, j’en ai vu d’autres… tu te souviens de cet homme à Megido ? Plutôt baraqué, tout ça... il avait failli… » et à mesure qu’il parlait, sa voix se faisait de plus en plus lointaine, jusqu’à ce que Lully ne puisse plus distinguer leurs paroles.


Dès qu’elle ne les entendit plus, la sirène fonça vers la surface. Elle se sécha avec une serviette qu’elle avait caché, une qui était ensorcelée pour la sécher complètement rien qu’en la touchant –un outil qu’elle avait emprunté à une femme de ménage qui partageait sa cause. En fait, il lui avait suffi de vendre des informations sur Monternac, tout ce qu’elle avait appris de lui : la pauvre petite en était folle. Lully lui aurait bien réglé son compte, à cette ahrutie de niaise qui croyait encore au prince charmant… c’était à cause de ce genre de femmes que les hommes étaient si cruels. Bref, elle s’était bien sûr retenue, puisque ce n’était pas dans son intérêt et que l’autre lui avait donné quelque chose d’utile. Une fois séchée, et ayant retrouvé ses vêtements (juste son pyjama, en fait, puisque Lully avait voulu être la plus légère possible pour préserver une partie de son agilité… sans se dire que cela pourrait la rendre tout sauf discrète), la fausse majordome courut vers la fenêtre, qui avait été refermée par un subterfuge inconnu, et regarda à travers pour retrouver ses cibles. Elle pensait que ce ne serait pas difficile au-dessus de cette terre de désolation, mais elle ne les voyait nulle part… jusqu’à ce qu’elle se décide à lever le regard. Loin devant elle, plus de cinquante mètres au-dessus des terres, volait un griffon, comme on en voyait souvent autour du château. Seulement, Lully était sûre de voir des choses sur ce griffon… Monternac et son acolyte. S’apercevant qu’elle ne pourrait les suivre à la même allure, Lully hésita. Devait-elle monter pour voir où ils se poseraient, ou essayer de les suivre sans être semée ? Elle opta pour la seconde option, voyant la vitesse à laquelle ils allaient. Retournant dans le couloir à une vitesse folle, en pyjama, Lully ignora les regards qu’on lui lançait et courut le plus vite possible vers la tour, à l’étage juste au-dessus des chambres. Quand elle y arriva, elle remarqua deux griffons, qui étaient tellement loin qu’elle ne pouvait pas savoir lequel était le bon. Celle-ci les fixa, les voyant s’éloigner inexorablement de son champ de vision. Si jamais elle les perdait de vue… alors qu’elle se posait mille questions, l’un d’eux alla se poser à l’orée d’une forêt, en même temps qu’un autre qui alla se poser aux environs du cimetière. Il fallait que Lully s’y rende coûte que coûte.
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Sam 27 Juil 2013, 06:52

Quand elle redescendit en trombe, elle croisa le chemin de Loki. Ce dernier s’immobilisa et s’apprêta à la retenir, mais en voyant son air paniqué et sa course folle, il se décida à la suivre dans sa course. En tenant son rythme, il lui demanda :

    « Mademoiselle la majordome ! Mais quel feu vous pousse donc à courir si vite !

    -Il a filé à sa réunion secrète ou je sais pas quoi… je dois y aller ! Répondit Lully en accélérant sa course. Quand les deux personnes atteignirent l’entrée, Loki fit un geste à un groupe de voyageurs qui revenaient, puis un cheval arriva à côté de Lully, prêt à être monté.

    -Prenez ce cheval et accomplissez votre mission, termina ce dernier en voulant l’aider à monter.

    -Pas besoin, les dauphins vont m’aider. »


Et Lully continua de courir en ignorant royalement Loki. Elle vit un dauphin arriver à quelques mètres d’elle, et elle lui fit signe de s’approcher. Ce dernier poussa un cri et se mit à côté d’elle, attendant que la sirène saute sur son dos. Après s’être concentrée sur la trajectoire de son saut, cette dernière atterrit sur lui et s’agrippa à sa nageoire, laissant le dauphin l’emmener jusqu’au cimetière, pour commencer. Lully appela ensuite ses crevettes et les ordonna d’aller espionner à l’orée du bois, là où le second griffon s’était posé. À vrai dire, tout cela ne l’aidait pas, puisque ce n’étaient qu’illusions. Mais grâce à elle, la sirène ne sentait pas la fatigue l’envahir alors qu’elle courait en traversant la plaine qui menait à la forêt et au cimetière… bien qu’elle n’allait pas plus vite.

Au bout de plusieurs minutes de sprint –ou presque, Lully aperçut le cimetière au loin. Il lui semblait bien qu’il y avait du mouvement, à l’intérieur : elle distinguait même plusieurs voix, bien qu’aucune ne corresponde à celle de l’Elemental. Cela ressemblait à une discussion sérieuse entre deux personnes, qui étaient en mouvement. Puis, soudain, plus rien : ils étaient sûrement partis dans un endroit fermé. Jugeant que la voie était libre, la sirène longea tout un côté du cimetière, pour arriver au niveau du portail. Depuis le moment où elle avait quitté sa chambre, le soleil était tombé à moitié de l’autre côté de l’horizon, laissant l’obscurité s’emparer du cimetière. Funeste endroit pour se retrouver… cette dernière concentra son pouvoir et se rendit invisible. Après avoir rapidement vérifié qu’elle était entièrement invisible, la sirène escalada le mur sans soucis et s’avança vers le milieu du cimetière : là-bas trônait une petite maisonnette, devant laquelle un homme tenait la garde. Mais ce dernier, après avoir rapidement évalué les environs, il fit demi-tour et… n’alla pas ouvrir la porte, comme elle l’aurait prédit, mais alla appuyer sur une tombe près de la maisonnette. Lully avait l’impression d’assister à une scène irréelle : à la pression de l’homme, un trou se creusa à même la terre, laissant place à un fin passage et à des escaliers. Lully sut qu’elle ne devait pas laisser passer ce moment : elle se mit à courir pour atteindre l’endroit où se trouvait l’homme, camouflant le bruit de ses pas et de sa respiration par son pouvoir, tout en restant invisible, et s’engouffra dans le trou juste au moment où il commençait à se refermer sur elle. Malheureusement, entraînée par sa course, cette dernière alla s’étaler parterre, perdant toute sa concentration : son invisibilité fut interrompue et le bruit de sa chute résonna dans tout le couloir. Aussitôt, l’homme s’était retourné, torche en main, et lui avait crié en dégainant une épée :


    « Qui va là ?! »

Se relevant, Lully s’empressa de mettre les mains au-dessus de sa tête : elle avait vite compris qu’elle ne pouvait pas l’éliminer, au risque de laisser s’effondrer tout son plan (ou plutôt, son semblant de plan, puisqu’elle n’en avait pas vraiment). Une seule autre solution s’offrait à elle : gagner sa confiance. Oh, qu’est-ce qu’elle aurait aimé avoir le pouvoir d’hypnose ! Mais ce n’était pas le moment de se lamenter : l’homme était en train de s’approcher d’elle, l’épée à la main. Lully put avoir le temps d’étudier ses traits : c’était un homme qui faisait partie du château. Il faisait partie du personnel de nettoyage : elle l’avait vu quand elle était allée dans le local du personnel pour aller parler à l’agent de sécurité. Assis dans un coin, il buvait un thé, observant silencieusement la scène, et il avait posé un regard sur elle qu’elle avait détesté. Sans doute, il la reconnaîtrait. D’ailleurs, sa réaction ne se fit pas attendre : arrivant à deux mètres d’elle, il eut un air de surprise puis sourit :

    « Tiens tiens… la majordome se serait-elle un peu trop attachée à notre homme ?

    -Curiosité, répondit Lully d’un ton bourru. Elle n’avait aucun mensonge à inventer ; ou du moins, aucun qui aurait été crédible. La sirène n’avait jamais été forte pour établir des solutions de secours…

    -Oh, curiosité, vraiment ? La curiosité t’aurais-t-elle poussée à prendre autant de risques pour venir jusqu’ici ? Non… je vais avoir besoin de la véritable raison pour te laisser passer –ou pas, d’ailleurs. »


Et, alors qu’une solution commençait à germer dans son esprit, quelqu’un vint interrompre leur conversation : un autre homme accourra et cria à l’homme de se dépêcher. Ce dernier lui répondit que la sirène avait pointé le bout de ses écailles et que l’Elemental devrait être prévenu. Là, ça tournait complètement au vinaigre. Lully étudia ses options en une fraction de seconde : tuer, fuir, se rendre. Aucune ne convenait. Si elle voulait réussir sa mission, il n’y avait plus qu’une solution. Endormir une fois pour toutes la méfiance de l’Elemental. Et pour y arriver, c’était simple : il suffisait de flatter son énorme orgueil d’homme important. Il suffirait de se prendre pour la plus idiote des femmes, la plus niaise, la plus méprisable : celle qui tombait bêtement amoureuse. Une femme amoureuse, ce n’était pas dangereux, après tout. Effrayée à l’idée de jouer ce rôle, Lully laissait l’adrénaline la conquérir petit à petit et regardait fixement son défunt mari qui la regardait, immobile. Cette fois, elle n’eut pas peur de son regard : sa détermination grandit. Oui, maintenant, ce n’étaient plus les hommes qui se jouaient d’elle. C’était elle qui se jouait des hommes. Déterminée, elle rejoignit le regard accusateur de l’homme de ménage. Ce dernier venait de rengainer son arme d’un air fier. Savourant ce qu’il croyait être sa victoire, il la détailla du regard un moment. Puis, évidemment, il ne put se retenir d’ouvrir la bouche une fois de plus.

    « La curiosité, c’est quelque chose que n’avalera pas le chef, c’est moi qui te le dis. Il n’est pas un homme de cœur, alors tu auras intérêt à être crédible, ma jolie, continua-t-il. À ces derniers mots, Lully ne put se retenir : elle se jeta furieusement sur lui et le prit au cou. Surpris, ce dernier laissa tomber sa torche. Puis, d’une main, il parvint à l’envoyer valser quelques mètres plus loin : à n’en pas douter, il était doté de superforce. Sonnée, Lully crut entendre un sifflement ininterrompu. puis elle put distinguer les paroles de ce même homme : …peux pas lire dans ses pensées, elle est immunisée.

    -Du calme, mon petit, ne l’abîme pas », lui répondit calmement l’Elemental, qu’elle reconnut grâce à sa voix.


La sirène commença à se relever péniblement, mais ses bras furent ramenés au sol par quelque chose de froid. Quand elle regarda, elle s’aperçut que les marches de pierre s’étaient refermées sur ses poignets. Apparemment, c’était le troisième homme qui était responsable de cela. L’homme de ménage semblait bien énervé, au vu de son souffle de buffle. Il bouillait : il n’avait sûrement pas apprécié le petit assaut qu’elle lui avait porté. Lully fut tentée de lui tirer la langue, mais elle se doutait que cela ne lui ferait pas gagner des points auprès de Monternac… ce dernier avançait vers elle, d’un air fier. Il avait un regard tellement fier qu’elle avait l’impression qu’il jugeait que tout se passait… comme prévu. Savait-il qu’elle aurait fini par venir ? Alors qu’elle se posait toutes ces questions, l’Elemental fit danser un petit filet d’eau devant elle. Cette dernière le regarda et entreprit de jouer avec, s’emparant d’une partie du filet, lui faisant faire des vagues. Puis elle lui jeta un regard : là, elle avait l’impression d’avoir gagné des points. L’Elemental se décida ensuite à parler :


    « Tu veux me voir en-dehors du boulot, maintenant ? Tu avais quelque chose de si important à me dire pour venir à mon insu, comme une petite ombre fourbe ? finit-il sur un ton de reproche. Lully jeta un regard aux deux hommes qui la dévisageaient, prêts à agir à son moindre faux pas, puis se jeta dans son rôle.

    -Pourquoi tous ces mystères ? demanda-t-elle d’un ton misérable, comme si elle dévoilait le fond de sa pensée.

    -Et toi, alors, pourquoi tous ces mystères ? Tu ne veux pas laisser mon sujet laisser rentrer dans ta tête, si tu es aussi honnête ?

    -Je… j’ai mon intimité à avoir.

    -Ah oui ? Tu pense être en position de réclamer quelque chose, maintenant ? Monternac continuait à jouer avec son filet d’eau. Maintenant, il la faisait tourner autour d’elle, de plus en plus près. Gênée, la sirène l’éloignait instinctivement d’elle. Mais ce dernier renforçait son pouvoir sur celui-ci : il voulait fermer la porte à son propre contrôle. Lully le regardait droit dans les yeux, le forçant à lâcher son emprise sur le filet. Ce dernier finit par froncer les sourcils, quelques gouttes s’échappant parfois de son contrôle. Mais il n’y avait aucun doute là-dessus : sa magie n’égalait pas celle du maître Elemental. Alors ? Tu ne le laisse toujours pas lire tes pensées si pures et innocentes ?

    -Je… je suis prête à les montrer, mais seulement à vous. Et voilà, c’était lancé. Ce dernier avait déjà tout compris, normalement. Les deux hommes pouffèrent, tandis que Monternac, intrigué, fit un signe ordonnant aux deux autres personnes de se retirer. Lady Takias te paye-t-elle bien pour ton boulot ? demanda-t-il soudain.

    -D’un salaire raisonnable qui me sied, si là est votre question, répondit la sirène en le regardant avec des grands yeux, comme elle avait autrefois regardé son mari.

    -Et ne t’a-t-elle pas promise quelque chose en échange d’un boulot… plus secret ? Plus difficile ?

    -Je ne fais pas partie de ces espions. Croyez-moi.

    -Voilà qui est direct. Alors, tu serais venue pour ton compte ici ? En suivant tes propres envies, c’est ça ? Juste comme ça ?

    -Je savais que vous partiez tous les soirs et… je voulais être sûre que… enfin, oubliez.

    -Je te rappelle que tu n’es pas en position de me donner des ordres. Continue à parler. Maintenant, elle allait lancer la seconde réplique-choc de son personnage. En inspirant un coup, elle regarda l’Elemental plusieurs fois, comme si elle hésitait. Après s’être assurée qu’il s’impatientait assez, elle répondit.

    -Je… je me disais que vous alliez voir une femme. »


À ses mots, Monternac recula d’un pas et fit disparaître son filet d’eau. Il sourit puis soupira, comme s’il était sûr d’avoir tout compris. Maintenant, il allait prendre une décision : et celle-ci allait décider de la réussite de sa mission. Complètement. Il était à la croisée des chemins : soit il renvoyait Lully, soit il l’invitait à sa petite réunion secrète, cette réunion qui intriguait tant tout le château. Lully attendait, en gardant son regard à moitié coupable, à moitié timide. Etait-il tombé dans le panneau, ce grand manipulateur ? Si elle avait visé juste, c’était sa faille où elle s’était introduite. Le tout était de deviner si ce dernier l’avait sentie s’y engouffrer.
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Mer 04 Sep 2013, 17:16

« Viens par ici, majordome, et que ça saute. »

Sa réponse avait été sèche, courte, lancée d’un ton qui ne rassurait pas la sirène. Il ne l’avait encore jamais employé envers Lully… jusqu’à maintenant. Mais elle savait qu’elle n’avait plus aucun choix, hormis celui de suivre ses ordres. Cette dernière n’osa rien ajouta. Elle feignit d’être toute retournée par l’ignorance de son soi-disant aveu, se releva et le suivit.

Les deux personnes traversèrent un long couloir, puis ils atteignirent une place donnant sur un dédale de couloirs, tous froids et identiques. Monternac y retrouva ses chers gardes, que Lully portait beaucoup moins dans son cœur : ces derniers ne manquèrent pas de lui jeter des regards méfiants ou méprisants. Mais elle préféra les ignorer, se mettant à observer le lieu. C’était un tunnel confiné, fait de métal, comme s’il avait été rajouté après avoir été construit par la roche. C’est un orisha qui serait déjà devenu fou dans cet endroit… pendant qu’elle rêvassait, l’elemental envoya un des gardes chercher des informations sur elle. Lully le regarda d’un air surpris. Déjà, elle avait peur de ce que pourrait trouver ce dernier… et surtout, elle se demanda pourquoi il ne l’avait pas fait avant. Quoiqu’il en soit, ça ne la rassurait pas. Monternac ne lui adressa pas un seul regard et se dirigea vers le couloir d’en face. Comme d’habitude, Lully le suivit sans un mot et s’éloigna le plus possible des deux gardes qui les accompagnaient.

Le petit groupe traversa encore plusieurs couloirs. Après quelques minutes, Lully abandonna l’idée de retenir leur chemin. Elle se serait crue dans une fourmilière, avec tous ces chemins… sans les fourmis, bien sûr, puisqu’il lui semblait qu’ils étaient seuls dans cet endroit. D’ailleurs, il était tellement glauque que la sirène se demandait si cela lui servirait de salle de torture, ou pour d’autres tâches plus ou moins malsaines. Mais Lully allait bientôt être détrompée : au fil du temps, elle entendit les bruits, d’abord indistincts puis reconnaissables, d’une foule et d’une musique. Enfin, ils arrivèrent au cœur de la fourmilière, et la sirène fut presque plus horrifiée du lieu que d’une salle de torture.

C’était une large pièce incrustée dans la roche, avec des tables remplies de riche nourriture au fond, des danseurs au milieu et une estrade pour les musiciens. Les femmes n’étaient presque pas habillées, et les hommes avaient l’air bien alcoolisés. Bref, c’était tout ce qu’elle détestait. Quand la foule remarqua Monternac, elle l’applaudit et l’acclama. Ce dernier, en réponse, salua le plus de monde possible, puis fit signe aux musiciens de continuer. L’elemental alla jusqu’au fond de la salle et s’installa à la table des festins. Il l’invita à s’asseoir sur la chaise se trouvant à côté de lui, libérée par miracle par un invité. Dans cet endroit, tout le monde marchait dans le sens de Monternac. Ne pouvant pas refuser, une fois de plus, Lully s’assit. C’était donc ici qu’il passait toutes ses nuits… il festoyait et s’adonnait aux débauches. Cela ne la surprenait pas. Alors qu’elle se demandait ce qu’elle pourrait bien manger, elle sentit la main de Monternac sur son épaule. Lully sursauta : il avait tiré son haut pour dévoiler son épaule.


« Tu es encore trop décente, mais tu n’as pas pu te préparer, alors on te le pardonnera. » À l’entendre, Monternac semblait encore plus sûr de lui que d’habitude. Il était dans son élément. Il était presque joyeux, en fait. Mais ce n’était pas le cas de Lully. Ne pouvant plus se retenir, elle lui demanda :

« Mais… c’est quoi ce foutoir ?! »

« Oh, je te reconnais, là. C’est une fête entre Elementals d’eau, voilà tout. En fait… j’emmène toujours quelques personnes de mon peuple là où je voyage, et je les installe. Comme ça, je peux festoyer par nos propres traditions, et avec des personnes que je connais bien. Cela m’évite d’avoir le mal du pays… »

« Ah, d’accord », répondit simplement Lully avec un faux sourire. Il cherchait quoi, là ? À s’attirer sa pitié, peut-être ? Pauvre Monternac qui voyage à cause de ses responsabilités ? C’était ridicule. Vraiment, Lully avait hâte de ne plus voir sa face aussi aimable qu’une porte de prison.

De nombreuses paroles empoisonnées montaient jusqu’aux lèvres de Lully, mais elle savait que si elle ne voulait pas tout faire foirer maintenant, elle devrait se retenir et se taire. Elle regardait les invités manger à s’en faire péter la panse, donner sensuellement des morceaux à leurs voisin(e )s, danser sur la piste comme s’ils avaient le diable au corps, et surtout, surtout, elle était obligée d’entendre la musique dissonante des musiciens : ils lui écorchaient les tympans. Le pianiste martelait ses touches, le violoniste écrasait son archet contre les cordes à les faire grincer, et les autres faisaient de même avec leur instrument, comme si l’ivresse des invités leur était montée à la tête, à eux aussi.

D’ailleurs, quelque chose louchait dans cette fête. Les musiciens, autant que les invités, n’avaient pas l’air d’avoir toute leur tête. Il n’y avait que les gardes et Monternac qui avaient l’air d’être saints d’esprit ; et elle se doutait bien que c’était grâce à leur immunité aux sorts mentaux. Oui, les invités avaient juste l’air ensorcelés, tous pour marcher dans le sens de l’Elemental. Ils semblaient percevoir ses pensées et ses désirs, où qu’ils soient, et ne pouvaient pas y aller contre. Maintenant, la sirène comprenait pourquoi il se cachait : ces personnes étaient ses marionnettes, et Lully doutait que la reine du château ait accepté cela si elle avait été au courant. La sirène sut aussi qu’elle ne venait que d’accomplir la moitié de sa mission : elle savait ce qu’il manigançait chaque soir, mais maintenant, l’objectif était d’abord de se sortir de là, ensuite d’en avertir Loki, et enfin… partir. Tout en mangeant des salicornes, Lully réfléchissait et feignait d’écouter la conversation qu’entretenait Monternac avec un petit groupe de gens. C’était plus un monologue qu’autre chose : ce dernier contait les meilleurs de ses « exploits » et n’attendait que l’approbation ou l’admiration des convives.

Au bout d’un moment, le sujet de conversation tomba sur Lully, après que le garde soit revenu et ait pris Monternac en privé pour lui dire ce qu’il avait appris d’elle. Il se mit à lui poser beaucoup de questions, sûrement sur toutes les choses qu’il avait apprises : il voulait voir si elle niait. Il lui parla de son passé, ce qui ne lui plaisait guère, puis sur ses découvertes à la Surface, et enfin, sur ses talents d’artiste. Il posait beaucoup de questions sur les sirènes, aussi : là, cela semblait être de la pure curiosité. Quoiqu’il en soit, elle répondait avec la plus grande sincérité –de toutes manières, elle n’avait rien à cacher… pas même ses meurtres, puisqu’elle en était plutôt fière ; et elle faisait semblant d’être flattée de toute l’attention qu’il lui portait. Enfin, ce dernier lui demanda de jouer un morceau de musique pour les égayer un peu, dans une ambiance sous-marine, comme il disait. Cette dernière accepta –puisqu’elle n’avait pas le choix, de toute façon, se leva et alla se diriger vers l’estrade.

Elle était sûre de savoir pourquoi Monternac l’avait conviée à ses fêtes nocturne, désormais : il voulait certainement l’engager comme garde, parmi le groupe des personnes qui n’étaient pas touchées par ses sorts. Il semblait aimer sa présence, sûrement car elle flattait son égo de la meilleure façon en se prétendant être aguichée par un homme « de cette envergure ». Au final, ça avait marché ; il l’avait trouvée crédible, jusqu’à maintenant. Elle n’aurait plus qu’à l’impressionner avec son morceau, puis profiter de son moment d’admiration pour lui quémander une nuit de repos, avec quelques promesses en prime, pour qu’il la laisse partir en cours de soirée… oui, ça avait l’air bien.


« Quand vous entendrez ma mélodie, ce sera comme un morceau venant tout droit des profondeurs, pour vous, qui vouez tout comme moi un culte aussi fidèle à l’Eau. » Il était rare que Lully puisse parler si noblement, mais elle se sentait inspirée par sa future démonstration. Cela lui fournirait un semblant de divertissement, dans cette nuit de débauche dégoûtante.

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Mer 11 Sep 2013, 20:59

Lully balaya toutes ses pensées parasites et se concentra uniquement sur sa mélodie. Elle visualisa les premières notes, vérifia un peu les accords (mauvais, soit dit en passant) puis se lança. Elle se mit à jouer, manipulant l'archet d'abord un peu étrangement, puis parfaitement, le temps de reprendre les vieilles habitudes. Elle écoutait avec délectation le son des cordes et du bois qui se faisaient écho.

Elle avait tellement joué cette musique, à l'Orphelinat, qu'elle n'avait même plus besoin de réfléchir aux notes et au rythme : ses doigts dansaient d'eux-mêmes sur les cordes. Les larmes lui vinrent aux yeux, alors que la musique l'entraînait dans des souvenirs dorés qu'elle avait voulu enfouir. Lully se souvenait de l'Eau, du rire des enfants, du regard de Mme Kopern, sévère mais à la fois plein de douceur. Puis, elle se souvenait de son amour de toujours : son mari. Il était celui qui l'avait rendue à la fois la plus vivante et la plus morte.

Ces souvenirs étaient pour elle comme des vestiges, si vieux qu'ils auraient dû perdre leur éclat d'antan, mais au contraire, ils en avaient gagné. Lully avait l'impression de revenir à une vie lointaine, antérieure, presque rêvée. Ah, elle désirait tellement se plonger dedans, pour ne plus jamais en ressortir, rester figer dans les courtes scènes de ses souvenirs à jamais, retrouver la douceur des premiers jours... elle souhaitait ne jamais avoir découvert la Surface, le jamais avoir tué personne, ne jamais être sortie de son Eden qu'avait été l'Orphelinat.

Mais elle ne pouvait pas y retourner, pas plus que de lutter contre le temps. Lully était morte. Elle reposait dans le sable, au fond des mers, avec le squelette rongé de son mari et tout l'amour qu'elle avait pu donner. L'art et le sang étaient les seuls restes de la personne qu'elle avait été, les derniers fragments de son âme, ceux qui restaient insensibles à l'appétit vorace de sa haine qui avait déjà tout englouti. Non, ce temps sacré était révolu, et ce pour toujours. Et maintenant, la sirène se retrouvait à jouer sa mélodie à l'adresse d'Elementals, de terriens qui ne comprenaient rien à son art, qui ne savaient pas tout ce que c'était pour elle, et qui s'en fichaient bien. Elle était à la Surface, arrachée à son bercail, étouffant dans l'air, ne respirant vraiment que dans ces moments-là, dans ces moments où d'habitude, elle oubliait que sa vie était une ruine.

Tout comme les moments où elle faisait souffrir les humains.

Enfin, la sirène tira la dernière note, longtemps, et la laissa s'évanouir comme un écho qui s'éloignait. Il n'y avait aucun silence, ni aucun applaudissement. Les personnes riaient, égayés par sa musique, et n'avaient fait que danser de plus belle. Mais Lully voyait au loin le majordome qui applaudissait. Et, bizarrement, elle détesta cela encore plus que l'ignorance des autres. Descendant de l'estrade, la pseudo-majordome espérait juste que le politicien Elemental en avait eu assez, et qu'il était satisfait. Quand elle alla le voir, il la félicita. Lully sourit poliment, non sans efforts, et se rassit. Tout cela lui tapait sérieusement sur les nerfs: Monternac, Loki, le château, le feu, les gens. Tout, quoi. Elle n'avait plus qu'une seule envie : abréger sa mission. Lully mangea et se mit à chercher des moyens de l'écourter le plus possible. Elle en retint une, aussi ridicule qu'elle soit... et fit semblant de s'évanouir. Elle se détacha du monde, comme elle l'avait appris étant petite pour inquiéter les adultes, et oublia tout.


*

Quand Lully ouvrit les yeux, elle se trouvait dans sa chambre... ou plutôt, dans la chambre qui lui avait été donnée. La nuit était presque totale : on pouvait à peine deviner qu'elle tendait vers l'aurore. On entendait aucun bruit, hormis celui des cascades, loin dans le couloir. Tout avait fonctionné : apparemment, ils avaient vraiment cru à sa comédie. Ah, ce coup avait toujours marché... il y avait des choses qui ne changeaient pas, dans la vieille école.

Quand elle s'était "évanouie", personne à part Monternac et les gardes ne l'avait remarqué : c'était une preuve de plus que les convives étaient ensorcelés. Ensuite, ce dernier avait ordonné à un garde de la ramener avec leur griffon et ne s'était plus embarrassé d'elle, recommençant déjà à rigoler avec une femme qu'il pelotait ridiculement.

La sirène serait prête à parier que l'Elemental avait été satisfait de son petit effet : il aurait sans doute hâte que Lully lui donne ses impressions. Il avait fait son coq et n'avait pas vu que la poule était une renarde déguisée... elle était sûre qu'il aurait attendu des flatteries, puis qu'il l'aurait emmené d'autres fois à ses fêtes malsaines, jusqu'à la rendre accro, comme ses convives, mais pas grâce à sa magie : juste grâce à sa persuasion, puisqu'elle était insensible aux sorts mentaux.

Mais la sirène ne lui laisserait pas ce plaisir : à l'heure où elle aurait dû travailler, elle serait partie, lui laissant une dernière lettre enflammée où elle lui expliquerait pourquoi elle ne supporterait plus de le voir. Eh oui, elle l'aimait tellement qu'il serait tellement douloureux de le côtoyer, alors qu'il était si inaccessible... souriant à sa mascarade, Lully sauta du lit et se mit à écrire la lettre, haletante. Elle était extrêmement joyeuse : enfin, cette mission se terminait ! Après cet endroit horriblement chaud, elle espérait aller dans l'endroit le plus froid du continent. Elle en avait assez, il lui fallait un bol d'air frais... mais vraiment frais. Au sens propre.

A la fin de sa lettre, Lully la relut et la trouva parfaite. Elle la plia et alla la glisser sous la porte de la chambre de Monternac, après avoir fait ses bagages. En sortant dans le couloir, elle prit garde à ne faire aucun bruit. Après avoir livré sa première et son ultime lettre d'amour à l'Elemental, Lully se précipita jusqu'au bureau de Loki. Elle savait qu'il y passait ses jours et ses nuits : il se tuait à la tâche, cet imbécile. Une fois arrivée, elle frappa et entra sans attendre. On aurait dit que son bureau avait été saccagé par une tornade. Il y avait des papiers partout, même sur les genoux de Loki, et il dormait sur un livre. Lâchant un soupir exaspété, Lully lui cria :


« Debout, larbin de la paperasse ! »

Réveillé en sursaut, ce dernier leva la tête d'un coup, ses genoux claquant contre le haut de son bureau. Affolé, il sonda toute la pièce avant de voir la sirène. Et même quand il la vit, il mit quelques secondes avant de la reconnaître. Semblant nullement vexé par son appellation, il lui dit en se levant :

« Madame ! Vous voilà. À vous voir à cette heure et dans cette humeur, j'en déduis que vous avez les informations que nous vous avions demandée ? »

« Presque perspicace, hein ? Oui, c'est ça, j'ai filé Monternac. Figure-toi qu'il trimballe une cinquantaine d'Elementals de son peuple pour festoyer chaque nuit, dans la plus grande débauche qu'il soit, en-dessous du cimetière proche du château... »

« Que... hein ? C'est tout ? » Loki semblait rassuré : sans doute, il avait peur que ce dernier ne prépare un mauvais coup contre sa Reine. Mais il n'en était rien. Lully le voyait bien : il était du genre à simplement voir où était son intérêt, ne s'occupant que de son nombril...

« Ses 'invités' sont ensorcelés, figurez-vous ! Il les fait danser chaque nuit et rester loin de chez eux juste pour son petit plaisir... vrai ! Les gardes sont les seuls à être lucides ! »

« Vraiment ? Mais c'est immoral, ça... oh, nous tenons quelque chose. Mais peu importe, ce ne sera qu'un détail. Oui, oui... oh, j'en déduis que votre mission parmi nous est terminée... j'espère que vous avez passé un bon séjour et... »

« Bla bla. La récompense. » Lully en avait pardessus la tête. Elle voulait partir, et c'était tout. Ses jambes voulaient courir en-dehors du château et ses poumons respirer de l'air frais. Elle étouffait.

« Oui, oui ! Suivez-moi. »

Loki l'emmena dans un dédale de couloirs, puis s'arrêta devant une porte, au sous-sol. Il entra et laissa Lully attendre à l'extérieur, la priant de ne pas rentrer. Il ferma la porte derrière lui, mais la sirène avait eu le temps d'entr'apercevoir la pièce : c'était un espèce de débarras... ou de coffre-fort. Quand il en sortit, il lui donna une bourse remplie à souhait et lui donna un médaillon en métal. Ce dernier lui expliqua qu'il lui servait à amener à elle tous les objets en métal. Ravie, Lully l'expérimenta sur les pièces qu'elle avait gagné; puis, le remerciant à demi-mot, elle s'en alla. Juste avant de sortir, elle se vêtit de son costume invisible et partit en courant. Derrière elle rétrécissait l'immense château, et l'air devenait de plus en plus frais. C'était un air d'aurore, celui qu'elle préférait de toute la journée. C'était celui qui était encore humide de la rosée et pur de la nuit.

Une matinée idéale pour voyager !
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