Cocoon avait attendu avant de venir ici.
Ce lieu était pour lui un lieu de recueillement, de prière, de doléance envers une divinité suprême ne vivant qu'à travers les croyances de chacun. Puis un jour il se prit par la main et décida de franchir le pas. Mais arrivé devant la grande porte du bâtiment il fit un pas en arrière ne voulant en aucun cas passer cette entrée. Un mélange de peur et d'appréhension. Après tout qu'allait y faire un type tel que lui dans un lieu tel que celui là ? Mais une petite vielle, au nez crochu et à la bonne mine passa à côté de lui et lança, comme si elle avait lu dans ses pensées :

-Allez mon enfant, ce lieu est là pour accueillir des types tels que vous...

Et elle disparut derrière la grande porte en bois. Cocoon resta un moment sur le carreaux, n'osant pas plus entré que tout à l'heure. Mais au bout de quelques minutes planté là, sa conscience fit un bond dans son cerveau : "Bon tu bouge ou quoi ? On se les gèles ici ! T'aurais au moins pu éviter de te mettre dans le courant d'air andouille...". Pour une fois l'orisha n'avait ni armes, ni gants, ni tenue de compétition sur lui. Seulement son débardeur, un pantalon large et ses chaussures, le tout de couleur noire. Son épaule bandée avait arrêté de le faire souffrir et l'éraflure de son bras avait fini par guérir. Sous les bons conseils de son double, il passa la porte. S'imaginant un intérieur, délabré, froid, sinistre, il fut bien étonné car il rencontra tout le contraire. Comme tout le monde, il avait entendu bien des histoires sur cette bâtisses et visiblement... Toutes semblaient vraies. Tout d'abord, il entra dans un petit sas, où était entreposé plusieurs objet de culte et de prière. Le vieil homme devant lui prit une écharpe large d'une dizaine de centimètre, et la posa sur ses épaules. Dessus y était brodé des glyphes et inscriptions divines. Quand Cocoon dépassa l'entrée, il vit plusieurs personnes en porter. Il pensa immédiatement qu'il était dans un temple. La grande pièce était d'architecture ronde. Au milieu trônait un énorme autel en forme de cercle. Des bancs en bois étaient entreposés tout autour, et encore derrière se trouvait des colonnes ouvragées, soutenant un dôme très haut, fait de verre. Entre chaque se trouvait une grande statue de marbre blanc, très bien sculptée, représentant une divinité, un roi, un ange. La lumière venant du dôme se concentrait en un point : le centre de l'autel. L'orisha se rapprocha un peu plus et il pu plus aisément décrire le petit monument. Il formait exactement un hexagone de marbre blanc, très épais, qui arrivait à peu près au niveau de la taille. De petites bougies épaisses, rouges, étaient posées un peu partout dessus. Quand l'homme se pencha, il vit de l'eau claire, cristalline, dans un récipient, au centre.

-C'est l'eau de la pureté. On dit que si on s'y plonge dedans, elle nous lave de tous nos pêchés.

Cocoon sursauta. Une belle jeune femme, à peine plus petite que lui, se tenait près de lui. Elle avait un regard doux et velouté. Cette dernière l'attira sur un banc et il se laissa guider.

-Sais-tu à quoi tu ressemble ?

"Ça c'est louche mon pote...". Mais encore une fois, la jeune femme l'emmena près d'une statut. Au début il ne savait ce qu'elle voulait.

-Dis moi ce que tu vois.

Elle fit une pause entre chaque mot, articulant chaque syllabe, murmurant à son oreille. Il la regarda intrigué. Bon dieu, elle était vraiment belle. Une cascade de cheveux roux frisés tombaient dans son dos. Elle portait une chemise bleu clair allant magnifiquement avec ses yeux, et un pantalon de cuir noir, accompagné de bottes. Malgré la simplicité de la tenue elle lui seyait à merveille. C'était une belle femme. Cocoon se concentra sur le points que lui avait suggéré la belle plante. Au début il vit juste le marbre blanc de la statut, avec le soleil s'y reflettant dessus. Mais à cause de le regarder, il vit plutôt une forme indéfinissable au début. Se rapprochant un peu plus, il vit aussi cette forme se rapprocher. Et puis il identifia. L'être avait une forme en croix aux branches égales. Mais ce n'était pas une croix classique en fer, en bois ou autre, non... Elle était composée de petites boules, semblables à des perles, irrégulières entre elles que ce soit au niveau forme, taille et espacement. En revanche, toutes était de couleur bleu. Il se tourna vers la femme.

-Je...

-Tu es un élémental de givre.

Pourtant quand il regardait ses mains, il les vit bel et bien, de ses yeux. Mais au yeux des autres, c'était quelqu'un -tout du moins quelque chose- de différent. Totalement différent. Alors qu'il regardait son reflet, il vit la main de la jeune femme s'approcher et d'un doigt elle frôla son nez, son front, son menton, puis reprit sa main. Enfin ça c'est ce qu'il sentit. Ce qu'il vit était simplement de petites perles flottantes, tinter et bouger légèrement quand le doigts les toucha.
Un élémental.
Il s'assit un moment sur un banc. La jeune femme sourit et lui continua :

-C'est la représentation que tu as de ta personne. Du coup nous tous ici voyons cela. En sortant de ce temple peu de gens sauront te reconnaître entre ici et dehors, mais souvent les détails ne trompent pas.

Elle fit une pause et l'orisha tourna les yeux vers elle, à moitié accablé.

-Tu es quelqu'un de froid, de distant, de frigide. D'où le givre. Pourquoi un élémental ? Je ne saurais le deviner. Ca, c'est bien trop aléatoire... Mais ce que je peux dire c'est que tu n'es jamais d'accord dans tes choix, tu hésite la plupart du temps, d'où l'irrégularité de ta forme physique en cet endroit. Tu n'es jamais certain. Peut être es-tu un élémental car tu n'es simplement pas en paix avec toi même ? Quoi que...

Cocoon se leva. Il en avait assez entendu sur lui. Pourquoi ça se passait toujours comme cela ?
Alors qu'il se dirigeait vers la sortie, l'orisha s'arrêta et regarda en arrière. La femme était toujours sur le banc et le suivait du regard. Pourquoi savait-elle temps de chose sur lui ?

-Ceux sont les vérités qui nous touchent le plus. Et toi alors, quelles sont tes vérités ?

Il se concentra. Pourquoi cet énervement ? Qu'est ce qui l'avait fait réagir de la sorte ? Il n'était pas de nature excessive d'habitude, et là il ne pu s'empêcher de s'énerver sur le champs. Décidant d'être moins taciturne, il revint vers elle, s'asseyant à ses côtés. Peut-être finalement était-ce elle la solution à ses questions ? Les réponses qu'il attendait depuis tan de temps. Là aussi, elle n'attendit pas qu'il fasse quoi que se soit, et elle alla chercher un petit verre, pour le remplir de l'eau trônant au milieu de l'autel.

-Bois cela.

Il la fixa.

-Aller bois je te dis, ne me fais donc pas perdre patience.

Bien que son ton fut ferme, elle elle était toujours aussi douce. Et il bu. Il bu les dix millilitres d'eau venant de la soucoupe. L'eau cristalline, censé lavé tous les pêchés. Mais au lieu de sa, il sentit comme une nausée arriver. Il ouvrit la bouche légèrement, pendant un moment, tenant sa tête entre ses mains. Rien ne sortait. Au bout de quelques minutes il se redressa. Bizarrement tout effet de nausée était partie, ainsi que le poids qu'il portait sur ses épaules. Un poids invisible mais présent à souhait depuis tan d'année, qu'il avait appris à vivre avec. Même assit, il se sentit déjà plus léger, et légèrement plus apaisé.

-Alors, raconte moi tes démons. Pourquoi je viens de voir s'envoler un énorme nuage de sentiments emmêlés ?

Elle avait raison. Elle voyait tout. Mais qui était-elle ? Il la scruta encore. Pourtant elle avait l'apparence d'une jeune femme tout à fait banale. Juste très belle. Et puis il enclencha. Sa bouche débita des mots, alors que son cerveau n'avait pas encore eu le temps de les formuler. Pourtant tout sortit. Et il ne pu empêcher le flot.

-Quand j'avais cinq ans, je suis tombé dans un ravin. Enfin non. Je jouais près d'une falaise et je suis tombé. On m'a retrouvé au fond du ravin. Moi je ne me souviens ni de ma chute, ni de tout ce qu'il y a autour. Je jouais. Et puis ravin. Quand on m'a trouvé là, les gens me prirent pour un miraculé. Ceux de ma ville, mon peuple, décida tout de même de ne pas trop m'approcher, ne sachant vraiment que penser. Mais ce ne fut pas le seul évènement. A dix ans, je me suis jeté dans la mer exactement comme mes amis. Nous ne faisions rien de mal. Mais tout ce dont je me souviens c'est de l'instant où je nageais vers la rive, bien que j'en étais loin, et tout à coup, du moment où je me retrouvais allonger sur la rive. Pourquoi ? Pourquoi j'ai eu ces pertes de connaissances ? Quand j'essaye d'accéder à des souvenirs similaires, ma mémoire se bloque, fait un refus et une espèce de nausée m'envahit. Alors qu'au fond, j'aimerais surtout savoir d'où je viens et pourquoi tout le monde m'a toujours fuit...

Il eu tout à coup l'air nostalgique, avec un grand coup de blues pour enjoliver le tout. C'était réel, pourquoi avait-il subit cet éloignement constant, alors qu'au fond il était un petit garçon comme les autres ? Bien que son peuple ne soit pas forcément solidaire, il voyait bien que les gens n'agissaient pas pareil avec lui, qu'avec les amis de son âge. Quelque chose le distinguait des autres et il n'arrivait pas à savoir quoi.

-Comment puis-je trouver mes réponses ici ?

Et la belle jeune femme sourit.

-Ça mon ami, c'est à toi de le découvrir. Et un conseil, ne te fis pas aux apparences...

A peine avait-elle dit cela qu'elle avait disparut derrière une des statues disposées en cercle. L'orisha prit sa tête entre ses mains et ferma les yeux. Il réfléchit sur son passé, sur ces images, sur ses souvenirs, il essaya de forcer la porte, et un haut le cœur lui parvint. Se stoppant, il se leva puis alla vers l'autel. La lumière qui ne venait qu'en un point, avait une signification divine sous cet angle. Ici, là, dans cet eau bénite. Et alors il ferma les yeux et revit la falaise, et lui étant tout petit, jouant vraiment comme un enfant. L'air était vif, comme à son habitude, et le soleil était bien haut dans le ciel. Il se regarda alors gambader le long du bord, essayant de comprendre. Et puis l'enfant glissa malheureusement, et... il se retrouva debout, devant le petit orisha sur le dos, dans le ravin. Il regarda en haut. La hauteur était folle et il n'eut pas le temps de voir la chute ni quoi que ce soit. Alors il se concentra à nouveau. La scène se rembobina. Il s'accrocha mentalement, à l'herbe que ces chaussures foulaient, au paysage. Et puis quand l'enfant chuta il fut attentif à tout ce qu'il y avait autour. Tout ce qu'il vit fut un ciel couvert et noir comme la nuit, en une seconde, et une tâche bordeaux, ou peut-être noire, près du mome. Ensuite il fut à nouveau téléporté en bas du précipice, son double au sol. En levant là aussi les yeux, le ciel était clair, avec un soleil rayonnant. Pas du tout le temps de l'enfer qu'il vit juste avant. Bon sang, mais pourquoi tout... ?
Il eu une nausée débordante et du ouvrir les yeux en vitesse. Cocoon avait dupé sa mémoire et celle-ci en fut très furieuse et lui fit regretter en lui infligeant plusieurs vertiges. Doucement il s'assit alors, respirant à pleins poumons pour se calmer. Il chercha malgré tout la jeune femme des yeux et vit un bout de crinière dans le sas d'entrée. Se relevant en vitesse, faisant attention de ne pas chuter, il la suivit au petit trot. Mais quand il sortit, la rue était bondée de monde. Les seules personnes devant le temple étaient un jeune homme impatient tapant du pieds sur le trottoir, et une petite lui tournant le dos. Malgré tout il posa ses yeux sur elle, désespéré de n'avoir pu rattraper la jeune femme. Quand cette personne âgée tourna la tête dans sa direction, il vit son visage, similaire à celle de la vieille femme croisée à l'entrée (d'ailleurs, ce devait être la même), et ses yeux bleu clair, soutenant un regard de velours. Un regard, ça ne trompe pas. Mais quand il se rendit compte que la pin-up, se cachait en fait derrière une vieille femme ridé aux cheveux blanc relevés en chignon, et portant un vieux châle miteux, celle ci disparut dans la foule à vitesse grand V.
L'orisha mit une main sur son front, secouant légèrement la tête. Ah oui... Se méfier des apparences. Mais sa conscience le rappela à l'ordre d'une voix presque solennelle, résonant dans sa boite cranienne.
"Allez mon grand, tu as bien travailler aujourd'hui, rentrons maintenant..."