Invité
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 | | Mer 08 Juin 2011, 03:02 | |
| Alors que je marchais dans la rue commerçante, un bout de papier vint heurter mon pied. Mon être semblait mort depuis un petit moment déjà, je ne comprenais plus ce que je faisais encore sur terre hormis errer ici et là, ne me rendant point compte du temps qui passait, de ma maigreur qui s'intensifiait du fait que je ne me nourrisse plus réellement. J'étais telle une morte vivante et quand je ramassais ce bout de papier, je n'étais qu'à moitié consciente de mes actes. Je le prenais dans mes mains frêles et lu avec des yeux totalement vides. Je n'avais aucun but dans la vie et depuis que j'avais affronté Delix, j'étais dans un état identique. Je sentais qu'il me manquait quelque chose, moi petite sirène perdue, et sans cette chose, je ne pouvais avancer. Seulement, j'étais incapable de savoir ce qu'était cette chose et incapable d'être consciente de mon état. Oui, j'étais réellement pitoyable.
Je ramassais donc ce petit papier blanc que je voyais comme un message divin, enfin, non, c'est ce que j'allais penser après avoir parcouru les lignes qu'il contenait. Des lignes, cela pouvait paraître exagéré mais il serait mentir de dire que cette feuille à moitié déchirée me sauva la vie. Je lisais alors les écritures sans vraiment y faire attention, perdue dans mon monde de vide :
« Il te faudra trouver la vérité »
Je soupirai, constatant que cette phrase ne voulait rien dire : quelle vérité? Et puis, ce bout de papier ne s'adressait pas réellement à moi, quelqu'un avait dû le jeter là par hasard et le vent l'avait porté jusqu'à moi sans arrière pensée. Et alors que je le jetais derrière mon épaule, un autre bout de papier m'arriva en pleine face cette fois et je le retirai avec la même flemme de mon visage, mes yeux s'écarquillant en lisant l'écriture. Cette fois, j'avais retrouvé une partie de vitalité :
« Il te faudra trouver la vérité Edwina »
Et je ne comprenais pas comment un bout de papier pouvait s'adresser à moi sans que personne ne semble en être le destinateur. Pourtant, à part un hasard malheureux, j'en étais bien le destinataire. Je cherchais une personne des yeux mais à cette heure si matinale, il n'y avait que quelques badauds ivres dans les rues. Je ne savais quoi penser et ma décision fut prise sans une réelle réflexion : j'allais chercher la vérité. Cependant, ce terme était bien trop général et, par où commencer? Et encore une fois, quelle vérité? Peut-être celle-ci me concernait-elle mais je ne voyais pas ce que cela pouvait être.
Je décidai de réfléchir, cette vérité devait se trouver à mes origines, ma source : sous l'océan. Je ne voyais pas ce que la surface pouvait me révéler. C'est pour cette raison que je me dirigeais vers le premier point d'eau que je trouvais qui fut une petite rivière à quelques heures de marche de là. Il est vrai que rester en centre ville ne m'apporterait rien car la seule eau qui s'y trouvait prenait place dans des bouteilles, des jarres ou des fontaines. Je ne pouvais donc aller bien loin en entrant à son contact. Empruntant la rivière, me transformant en sirène, j'arrivais dans un fleuve qui se jeta bien vite dans l'océan. Je retrouvais le fond marin depuis longtemps et je laissais mes nageoires me guider où bon leur semblait. De toute manière, pour ma recherche de la vérité, je ne voyais pas réellement où je devais me rendre. Je prenais partie de laisser mon destin guider mes pas et puis si je devais mourir et bien qu'advienne que pourra. De toute manière j'étais désespérée...
On dit que les sirènes lorsque après une grande absence regagnent l'océan, ressentent un sentiment indescriptible, comme si le messager de la connaissance leur révélait soudainement qu'ici était leur place. J'espérai cette légende fausse car, en ce qui me concernait, je ne ressentais qu'un grand sentiment de liberté, la gravité n'ayant plus aucun effet sur mon anatomie. Oui, réellement, je me sentais libre, libérée des cages du monde terrestre, comme si mes problèmes s'étaient tout à coup envolés avec le poids de mon corps. Néanmoins, curieusement, à part ce sentiment de déjà vu, de joie de retrouver ce lieu magique, je ne ressentais pas le lien que toutes sirènes ont avec leur père. Je me sentais quelque peu étrangère à ce monde et, malgré ce que vous pouvez penser, ce n'était pas la première fois car j'avais ressenti cela toute ma vie durant. Cependant, peut-être que mon séjour sur la dureté de la terre m'avait grandi sans que je ne m'en aperçoive et, à présent, je sentais que je n'étais pas à ma réelle place ici.
Et alors que je trahissais la confiance que l'océan avait en moi, ma queue de poisson se transforma en deux paires de magnifiques jambes qui, malheureusement, me laissaient sans défense face aux courants de l'eau qui m'entourait. A vrai dire, ce phénomène s'était déjà produit auparavant, lorsqu'Iro et moi avions découvert cet endroit merveilleux dans les entrailles de la rivière que l'on appelait éternité. Sauf qu'à présent, j'étais enfouie totalement sous toute cette masse d'eau et que je ne pouvais plus respirer. La dernière bouffée d'air qui m'avait été donné de prendre diminuait peu à peu, mes poumons ayant besoin de cet air, mon corps en ayant besoin, mon cœur même...et petit à petit que l'air se vidait, je me disais que j'allais mourir d'ici peu, je voyais de petits poissons multicolores vivre leur vie tranquillement, sans se soucier le moins du monde de celle qui n'avait que quelques secondes à vivre. Je perdis connaissance.
Petit à petit, je sentais qu'il y avait quelque chose sous mon corps, quelque chose de chaud et cette sensation je la connaissais : j'étais allongée sur la plage de sable fin, le soleil me séchant de son agréable chaleur, m'éblouissant lorsque j'essayais d'ouvrir les yeux. Je pensais que j'allais mourir mais, finalement, il semblait que l'océan n'avait point voulu prendre la vie de celle qui était comme sa fille. Pourtant, il y avait une autre raison au fait que j'ai la vie sauve car entre l'astre qui m'éblouissait et moi, il y avait un être, à demi transparent, un être que je connaissais et qui me regardait avec ce regard qu'il avait toujours posé sur moi : celui d'un frère pour sa petite soeur. J'avais devant moi l'homme que j'avais cherché tant de temps, Frey, celui qui m'avait abandonné lâchement la veille de nos fiançailles, celui qui ne m'avait jamais aimé autrement que comme une amie très chère. Et maintenant que nous en étions ici, je me rendais compte également que je ne l'avais jamais aimé, j'avais cru l'aimer. Oh bien sûr, vous pourrez penser que je disais cela par dépit, par vengeance, par bassesse, mais c'était la vérité : je ne l'avais jamais aimé autrement qu'un allié, qu'un grand frère. Et à présent, je ne savais pas quoi lui dire, était-il réel ou n'était-ce qu'un mirage envoyé par mon imagination? J'essayais de sourire mais me rendais compte que je ne pouvais bouger réellement, juste les yeux. Et c'est alors qu'il prit la parole, doucement :
« Edwina, tu es ici dans un royaume où je domine. Tu n'es pas morte, mais tu n'es pas vivante. Ecoute moi, n'essaye pas de te débattre... »
Et ma stupéfaction pouvait sans doute se lire dans mes yeux bleus. Je ne savais comment prendre ces paroles et quel sens leur donner et, curieusement, mon côté enfantin semblant disparaître à l'occasion, je décidais de laisser Frey, cet ondin aux cheveux bleus, parler. Souriant d'un sourire qui ferait fondre n'importe quelle créature, un sourire si doux, il ouvrit de nouveau la bouche lentement, comme s'il essayait de me dire que c'était la bonne réaction, comme s'il essayait de me féliciter de mon comportement plus adulte. Alors il dit:
« Edwina, tu es actuellement dans un royaume qui se situe entre l'au delà et la vie. Je suis ici pour te révéler la vérité et, il te sera donné de choisir si tu désires vivre ou mourir par la suite. »
Il marqua une légère pause puis fit un commentaire :
« Tu sais, c'est très rare qu'il soit donné l'une de ces chances aux êtres. Souvent, nous n'avons point le choix entre la vie et la mort. »
Il reprit son sérieux, le ton de la narration et je savais que ce qu'il allait me dire changerait ma vie à jamais :
« Edwina, je sais que depuis que nous nous sommes quittés, tu me cherches désespérément et je te remercie de ce geste que tu as eu à mon égard mais, malheureusement, je ne suis plus de ce monde, je ne suis qu'un fantôme, j'ai trépassé. Me chercher, dorénavant n'a plus aucun sens, je suis condamnée à rester dans cet état, un homme que l'on appelle lorsqu'il est donné le choix de la vie ou de la mort aux êtres ayant vécu dans le mensonge toute leur vie. C'est ton cas Edwina. »
Ce qu'il m'apprenait me détruisait, cela me faisait tellement mal que je n'avais qu'une envie : me tordre de douleur, pleurer toutes les larmes de mon corps, courir aussi loin que je pouvais, détruire tout ce qui me tomberait sous la mains. Cependant, je ne pouvais bouger et ma douleur restait interne, tellement forte que je pensais que j'allais exploser...
Imperturbable, il continua son récit :
« Edwina, sache que tu n'es pas ce que tu penses être. Lorsque tu n'étais alors qu'une enfant, un bébé pour être exact, tes parents décidèrent de partir découvrir l'océan en navire. Cependant, une tempête survint, faisant chavirer le bateau, te faisant couler au fond de l'océan... »
Cette histoire était pour moi semblable à une sorte de tragédie. Je comprenais alors que je n'étais pas une sirène et, à vrai dire, je l'avais toujours su au fond de mon être, sans vouloir me l'avouer...
« Edwina, tu possèdes deux donc qui t'ont sauvé la vie, permettant à celui qui serait ton père tout au long de ta vie de te trouver, de te recueillir et de te chérir. Mais la vérité Edwina, c'est que tu n'es point une ondine, tu es une magicienne, fille de deux magiciens encore en vie aujourd'hui. »
Il fit une dernière pause avant la question fatidique :
« Je ne peux t'en dire plus, le reste, tu le découvriras seule si tu prends la bonne décision. Alors Edwina, quelle est ton vœux? Vivre, ou mourir? »
Et c'est alors que mes lèvres remuèrent sans que je ne leur commande réellement quoi que ce soit...
« Je veux vivre... »
Le reste restera flou dans mon esprit, lorsque je me retrouva de nouveau au milieu de l'océan, me débattant avec toute cette eau, mon état de sirène revenant à la normal, me sauvant de nouveau la vie. Je décidais alors que je connaissais à présent la vérité, qu'elle s'était imposée à moi et que je devais essayer de continuer avec. Je ne savais pas si j'en serai capable mais je ne pouvais mourir noyée. Je remontais alors à la surface, décidant que dans peu de temps, je devrai rendre une petite visite aux personnes qui m'avait depuis toujours considéré comme leur propre fille et qui m'avaient tant donné. Je devrai sans doute également chercher mes racines, mes origines...
Peut-être que donner un but à quelqu'un est synonyme de le sauver moralement et j'espérai que cela serait exact dans mon cas, que ce but ne me détruirait pas plus. Frey était mort, je le savais à présent et quelque part, je souhaitais qu'il serait la seule personne de mon entourage à connaître une telle fin. Je ne m'aperçus de mes larmes qu'une fois que ma tête émergea de l'eau, oui, je pleurai depuis le début et, curieusement, retrouver la terre ferme fut pour moi comme un coup de poignard car tout me paraissait beaucoup plus réel ici, plus fort et ma douleur était à son paroxysme... 125 lignes |
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