Intrigue : Daé découvre la gemme de Lua Eyael et applique son savoir théorique acquis ces derniers temps pour tenter de comprendre.

*Toi tu sais. Toi tu sais. Toi tu ne sais pas. Toi tu sais. Toi tu ne sais pas. Toi tu sais. Toi tu sais. Toi tu sais. Toi tu ne sais pas. Toi tu ne sais pas.*

Une corneille survolait Lua Eyael depuis des heures, planant en cercle autour de la ville et analysant les personnes qui y marchaient. Le crépuscule finissait son oeuvre, paisiblement. Comme à la fin de chaque journée, le balais de Lua Eyael pouvait paraître incohérent aux étranger·ère·x·s. A l’heure où habituellement les habitant·e·x·s des villes se préparaient à rentrer ou à passer la soirée entre ami·e·x·s, la Capitale Rehla voyait double. Marchant avec la fatigue du jour des colonnes se pressaient de rentrer, de se changer. Le visage harassé du jour et heureux de la liberté. Au même moment, une seconde colonne semblait s’être levée depuis peu et affichait les traits de celleux qui ont devant elleux une harassante journée, ici, une harassante nuit. En effet, lorsque les étoiles prenaient leur siège dans leur royaume, alors le peuple de Phoebe prenait ses fonctions. Non pas qu’il n’existait pas de Rehlas étant au travail la journée, mais ces dernières semaines avaient été particulièrement nocturnes à Lua Eyael, mettant dans la tourmente celleux qui ne comprenaient pas dans quelle ville iels vivaient et qui ne comprenaient pas ce qui justifiaient qu’autant de personnes travaillent la nuit. Mais par chance, les habitant·e·x·s des Terres de Sympan qui vivaient par là avaient assistés à assez de phénomènes étranges dans leur vie pour ne pas se poser plus de questions. Et pourtant, il y en avait, des questions à se poser. La Guerre opposant les Réprouvé·e·x·s et le Peuple Noir venait de se terminer - pour le moment - les royautés se multipliaient de plus en plus de manière étrange, rebattant toutes les cartes du monde, quelque chose était en train de se produire. Daé en était sûr. Il n’avait d’ailleurs même pas eu besoin de tous ces signes pour se rendre compte d’un « détail » qui avait attiré l’attention de toutes les terres et qui avaient semé, chez les Rehlas, une panique que Daé avait rarement vécue. Le Ciel était sans dessus dessous. Depuis plusieurs jours maintenant, les étoiles filantes et les météorites zébraient la voûte céleste avec une fréquence que l’on n’avait encore jamais observée et, pire que tout, les étoiles semblaient n’en faire qu’à leur tête. Tout le savoir astronomique des Rehlas était devenu, en quelques jours, absolument caduques Les cartographes du Ciel ne dormaient plus depuis des jours, tentant de remettre de l’ordre. Les Rehlas infiltrés dans d’autres peuples avaient reçu la demande express d’arrêter ce qu’iels étaient en train de faire pour tenter de cartographier, dans la mesure de leur possibilité, le nouvel arrangement des étoiles et de faire remonter ça le plus vite et le plus discrètement possible à la capitale. Et toutes ces tentatives, même si elles étaient cohérentes avec la situation, tendaient tout le monde, car personne ne savait si les astres resteraient dans cette position longtemps. Quelle que fût la réponse à cette question, il était essentiel d’avoir une cartographie du ciel ne serait-ce que pour les archives et les archives Rehla étaient peut-être la plus grande source de savoir astronomique du monde connu, alors tout était en jeu depuis quelques jours. Savoir, réputation, anticipation.


Dans tout ce bazar, Daé ne savait pas encore comment se situer. Si ce n’était sa nouvelle certitude, il était là, sur ces terres, pour tenter de faire avancer ce champ très sorcier d’étude, la magicologie. L’étude de la magie. Il avait mis un pied dedans après son accession au trône de l’île de Maggie, trône qu’il n’avait jamais demandé et depuis des mois maintenant, il lisait tout ce qui avait été écrit de trouvable avec ses compétences. Il avait noirci en une trentaine de jours plus de pages de cahiers que jamais auparavant. Et la soudaine nouvelle conjecture du ciel était sa dernière fascination, au-delà de la lubie, il était convaincu qu’une meilleure compréhension de la magie était ensuite tissable avec tous les autres savoirs du monde et il se surprenait d’ailleurs du peu d’hypothèses sur le sujet. Les hypothèses existaient évidemment, même en nombre, mais il avait la sensation que les modèles complexes d’explication du phénomène magique étaient rares. Peut-être que les gens devenaient fous en se posant ces questions. Il fallait ajouter, pour être honnête, à cela deux choses : Les connaissances de Daé étaient encore très limitées et par conséquent il avait chez lui une pile de livre auxquels il ne comprenait absolument rien ; et ce qu’il appelait « peu » tenait dans des centaines d’ouvrages. Il était peut-être simplement frustré que personne ne soit encore arrivé à une réponse. Qu’à cela ne tienne, la réponse, il la trouverait. Et aujourd’hui, à la fois pour se dégourdir les membres, pour réfléchir et pour accumuler du matériel, il arpentait le ciel sous sa forme favorite, celle d’une corneille.

Après plusieurs heures à voler, alors qu’il sentait ses ailes fatiguer du traitement qu’il leur infligeait, Daé vit du coin de l’oeil une colombe, splendide, aux reflets irisés bleus le rejoindre. « Géralt. » croassa-t-il sans dévier de sa course. « Daé. » La voix de son mentor était apaisante, il aimait l’entendre, malgré le fait qu’il venait principalement lui annoncer de mauvaises nouvelles. « Oui en effet. » Daé tourna la tête un instant, interloqué que le Rehla ait compris avant même qu’il ne formule cette habitude de la mauvaise nouvelle. Le Martyr de la Lune n’était pas surpris qu’il sache faire cela, c’était même une forme d’évidence à qui pratiquait un minimum la magie que les pensées étaient quelque chose à maîtriser autant que son langage en la présence de pratiquant.e.x.s de la magie. Non, il était surpris que son mentor se permette de le lui faire. Il existait une forme de respect des êtres et de leurs secrets chez les Rehlas qui rendait, du moins à l’expérience de Daé, cette pratique peu courante. Et cette fois ce fut avant même que Daé n’ait pu le formuler à l’intérieur de son esprit que Geralt comprit et répondit : « Oui, tu penses bien que si je communique comme cela avec toi, c’est pour aller au plus vite. L’heure est grave, on le sait, mais on ne sait ni pourquoi elle l’est, ni la gravité de la situation." Daé s’arrêta en l’air et se retransforma en sa forme habituelle, afin de pouvoir plonger plus rapidement en piqué en direction du bureau de Géralt et en chemin il comprit. Au centre de la ville se trouvait une immense gemme, magnifique au demeurant, aux reflets violacés. Daé ne l'avait pas vu arriver, mais il comprit vite en arrivant que le problème était sérieux. Des dizaines de rehlas volaient aux alentours, certain.e.x.s semblaient repartir, blessés et les cheveux brûlés en direction de l’hôpital de la ville. Il connaissait la majorité des têtes présentes, mais personne n’était très disponible à la conversation et Daé non plus. « Un état de la situation et de ma mission ? » « Sincèrement, je pense que tu as compris aussi bien que moi à l’heure actuelle. Cette gemme est apparue, à l’intérieur, une femme, les bras en croix, semble endormie. La gemme est indestructible et inapprochable, toutes les tentatives de magie ne marchent pas contre elle. Actuellement des gens essaient de l’approcher, d’autres prennent des notes. Tu es un praticien de la magie qui connaît son affaire, d’une part, et je sais que tu as commencé à t’intéresser à sa partie théorique. Nous avons des gens qui maîtrisent le sujet mieux que toi sur le plan théorique, mais personne qui est actuellement ici et qui a en tête les théories des bibliothèques de Lua Eyael et qui en plus possède une maîtrise pratique. Ta mission est floue, le plus tu arrives à comprendre de choses sur cette gemme, le mieux cela sera. Dans l’absolu, considère cette mission comme une tâche de fond. Tu as commencé à te rapprocher de Sombrevoyance, la caravane, pour cette histoire d’île dernièrement si je ne m’abuse ? » Daé acquiesça. « Ce ne sera pas quelque chose dont il faudra leur parler de suite, mais si tu arrives à glâner des informations, cela nous sera très utile. On suppose qu’elles sont apparues partout, mais nous n'avons les preuves formelles de cela que pour certaines villes. Nous avons des agent.e.x.s sur place. » Daé se rendit compte qu’il aurait peut-être été mieux pour lui de rester dans ses délires existentiels sur le sort de l’humanité et la connaissance des êtres qui peuplaient ces terres plutôt que de retrouver sur ce dossier. « Tout le monde est dessus actuellement. Si tu as besoin d’informations en plus, je peux te donner accès à une partie de l’état des recherches, mais actuellement… » «...il vaut mieux que je me fasse un avis par moi-même pour voir si je peux corroborer certains faits. » Daé termina la phrase de son mentor. Volait déjà autour de lui plusieurs carnets t des instruments de mesure qu’il s’était procuré dernièrement. Rien de très fiable, comme tout ce qui concernait la magie, mais c’était déjà quelque chose.

Les tentatives furent nombreuses de son côté et toutes conciliées avec soin selon un protocole qu’il avait créé à partir de ses lectures. Le protocole était sûrement truffé de problèmes, mais au moins, il s’y essayait. C’était la première fois que depuis ses longues lectures il s’essayait à du terrain. Evidemment il regarda un instant l’astre lunaire qui veillait sur ses enfants en train d’essayer de comprendre ce qui se passait - le comprenait-elle elle-même ? - et se demanda si un des buts de cette gemme, n’était pas de lui permettre de passer à la pratique.

Il mesura toute la nuit. La ville avait été bouclée pour des questions de sécurité. Il s’essaya à s’approcher, mais s’arrêta vite à cause de la chaleur. Il tenta de faire de la magie de plus en plus proche pour comprendre comment fonctionnait cet arrêt de la magie autour de la gemme. Il avait des hypothèses, mais rien de plus, mais des hypothèses.

Il confia alors son cahier à Mobile, le dragon de papier qui l’accompagnait depuis un moment maintenant et fit porter ça au bureau de Geralt.

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« Rien de nouveau, le protocole n’est pas très bon, mais c’est prometteur. » Géralt ferma les notes de Daé en écrivant cel sur un morceau de papier qu’il glissa entre les pages et renvoya le cahier via Mobile avant de se remettre au travail.

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