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 | Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas |

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Ammon Bethralas
~ Déchu ~ Niveau I ~

~ Déchu ~ Niveau I ~
◈ Parchemins usagés : 89
◈ YinYanisé(e) le : 22/01/2022
Ammon Bethralas
Dim 4 Juin 2023 - 20:53


Image par Philip Sh

Les portes V


Rôle :


En tant que gardien du Livre Sacré, Gaspard était naturellement le garant de la foi du peuple envers les saints écrits religieux. Il avait une connaissance exhaustive de chaque verset, chaque psaume, chaque chronique, chaque épître relatant la vie sacrificielle et tourmentée du Très-Haut sur cette terre avant sa résurrection et son élévation au firmament des cieux. S’il ne doutait pas qu’une femme aussi avisée que Wesphaline de Narfas ait elle aussi une connaissance étroite des textes liturgiques, la présomption voulant que l’irruption des petits nobliaux du royaume voisin ait pu ébranler la ferveur religieuse de Narfas relevait du prétexte fallacieux. Était t’elle celle qui avait ordonné en sous-main les examens gynécologiques ou Jésabelle avait t’elle agi de son propre chef ? Quels objectifs poursuivait t’elle réellement en accueillant les déshérités de Lieugro et en daignant porter l’oreille à leurs leurs insupportables prétentions puériles ? Ne pouvait t’on pas seulement les jeter aux cachots et destiner leurs femmes à une vie entière dédiée à la reproduction dans nos fermes de l’arrière pays jusqu’à ce que mort s’ensuive ? Quoi qu’il en soit, la manœuvre orchestrée par la Reine prêtait à sourire et les deux protagonistes se lancèrent naturellement dans le jeu de dupes qui s’instilait.  

« Oh oui le Très-Haut, bien entendu »  feignit t’il avec intérêt en inspirant une bouffée des notes discrètes du bouquet fleuri de la souveraine.

A mesure que le d’Epilut fit mine de se laisser bercer par le discours de sa vis-à-vis, il en profita pour se rincer l’œil allègrement sur l’harmonie et l’équilibre des courbes qu’une femme de sa stature avait su conserver en dépit de multiples grossesses. L’aura magnétique qu’elle exerçait à la cour et les promesses des plaisirs que recelaient ses cuisses charnues suffisaient à eux seuls à lui permettre de tenir sous sa coupe tous les prétendants au trône. Combien d’entre eux avait t’elle envoyé à la potence ? Pour combien d’autres avait t’elle décidé de se salir les mains elle-même? Combien d’entre eux encore avait t’elle gardé dans son harem personnel pour lui prodiguer les plaisirs et les jouissances qu’une femme de sa trempe était en droit d’invoquer ? Il n’était pas étonnant que Garance ait si vertement accueilli les propos de Wesphaline. L’hostilité latente de la De Lieugro ne s’expliquait sans doute qu’en partie à son rang usurpée de régente – car elle n’avait jamais accédé au trône – en exil alors même qu'elle devait faire face à une Souveraine couronnée exerçant des pleins pouvoirs acquis de longue date. Si l’on devait d’autant plus rajouter à l’ardoise déjà chargée les affres de la grossesse et l’âge des principales intéressées, alors le comparatif coupable virait tout bonnement à la démonstration indécente et au K.O technique en faveur de Wesphaline.  

Gaspard avait adopté un comportement aussi outrancier avec les nobliaux de Lieugro car la démarche s’inscrivait avant tout dans une stratégie officieuse d’enfumage. Il avait pris plaisir à semer les graines de la discorde lors de cette parodie de négociation, à observer les babines de Childéric d’Ukok se retrousser en évoquant son inutilité crasse tout en le ramenant invariablement à ses échecs, à scruter le poil de l'épiderme de Garance se dresser à l’écoute des vérités accablantes qu’il énonçait les unes après les autres comme autant de coups de semonce sur l’avenir hypothéqué qu’ils avaient consenti en acceptant la proposition de Narfas. Lieugro ne revêtait en réalité aucune importance, ils pouvaient bien tous crever la gueule béante dans les sables brûlants environnant avant que leurs carcasses ne soient nettoyés par les coyotes. Un point majeur avait été passé sous silence lors de cette réunion. Le statut de Zebella d’Uobmab restait en suspens et si son sort n’avait pas été abordé, il y avait fort à parier que Wesphaline avait d’ores et déjà prévu un dessein tout particulier pour la pestiférée du troupeau. La Bleue était la véritable clef de voûte des pourparlers et à l’heure qu’il est, la royauté devait déjà l’avoir transféré au sein même des geôles royales sous étroite surveillance. Merlin d’Uobmab serait bien plus enclin à négocier la traite de milliers de ses sujets féminins s’il pouvait récupérer sa chère et tendre gueularde de sœur qu’il pourrait engrosser à son bon désir dés son retour.

« J’organiserai selon le bon vouloir de sa Majesté une Prêche pour m’assurer du soutien indéfectible du peuple envers les préceptes religieux. Je suis certain que l’on trouvera un terrain d’entente pour rétribuer mes services à leur juste valeur. »  

« Après tout, une de Narfas paie toujours ses dettes n’est-ce pas ? »  ponctua t’il avec un sourire qui ne laissait planer aucun doute sur la nature des services dont il escomptait tirer parti.

De D’Epilut, il en avait le pistil frémissant et une corolle de pétales flamboyantes prêtes à se faire butiner par les soins experts d’une abeille chevronnée.



L’entrevue avec Wesphaline n’avait pas suffit à éteindre le feu bouillonnant dans les entrailles du Grand Prêtre. Il n’aimait guère que son autorité soit supplantée de telle sorte, à fortiori lorsqu’il n’était pas tenu au courant des directives de cette gorgone de Jésabelle qui s’évertuait à saper sa réputation. Entre-temps, l’émissaire qu’il avait mandaté pour mener des recherches approfondies avait fait chou blanc. Ce sot n’avait rien trouvé de mieux pour s’illustrer que de l’informer que Childéric d’Ukok avait osé se baigner dans les bains de la demeure d’Epilut et qu’il avait été rejoint par deux autres réfugiés dans son indélicatesse. Pire encore, la Cheffe des Armées avait décidé de les rejoindre pour un brin de toilette ou plus si affinités. Tout était toujours « plus si affinités » avec Tamara et ses mœurs dissolues, l’hypothèse qu’elle ait enfourché le membre de Childéric s’imposait spontanément. A vrai dire, le sang du Pieux n’avait fait qu’un tour lorsqu’il avait appris que le militaire avait osé souiller son eau et Gaspard avait étranglé instinctivement le porteur de l’information. Le Grand Prêtre salivait intérieurement en songeant qu’il disposait d’un ascendant singulier sur le fils de Tamara et l’heure était venue pour Adolphe d’embrasser sa destinée et de subir les épreuves de son oncle pour le faire véritablement devenir un sujet à part entière du royaume: un homme de Narfas en bonne et due forme. L’avenir auréolé de gloire de son fils était en lice et Tamara ne pourrait se soustraire plus longtemps à la négociation de la teneur des épreuves. L’Ecclésiastique pourrait même daigner à ne pas émasculer son neveu selon les compromis qu’ils arrêteraient lors de cette discussion.

« Un pentacle au fer rouge sur le cul pourrait même suffire. Au moins, il serrerait les fesses pour quelque chose » s’esclaffa Gaspard alors qu’il pénétrait en trombe dans le manoir d’Epilut en quête de sa sœur.

« TAMARA, Ou es tu espèce de … »  s’interrompit t’il lorsqu’il aperçut la silhouette humide et alanguie d’une femme au bord de l’eau.

Sous la robe du Prêtre, l’hémoglobine avait pulsé droit vers son appendice avant de le boursouffler et de le raidir en redoublant d’intensité.

« Elle a transformé cette maison en un bordel à ciel ouvert comme sa caserne ? »

Le propos diffamant et éhonté ne rendait pas honneur à Tamara. A sa décharge, le sang du prêtre n'irriguait plus sa boîte cranienne. L'Ecclésiastique poursuivit son inspection au peigne fin des salles une à une, l’Insatiable demeurait aux abonnés absentes. Dans une ultime tentative, l’Homme d’Eglise jeta entièrement son dévolu sur le jardin où la principale intéressée ne s’embarrassait d'habitude même pas du moindre maillot pour entretenir son teint hâlé. Lorsqu’il pénétra dans la pièce en ouvrant la porte à la volée, des feuillets volants tourbillonnaient en volutes dans l'éther. Le temps sembla s'interrompre alors qu'il tomba nez à nez avec une créature diaphane qui peinait à réunir les pages en suspension. Etait-ce un rêve ?


Post VII - 1302 mots




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Mitsu
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Mitsu
Dim 4 Juin 2023 - 22:56


Image par un artiste inconnu

Explications


Bonjour / Bonsoir !  | Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 10 002

Doooonnccc ! Comme il faut un peu de temps pour le bal, ce serait chouette que la moitié de votre prochain message soit consacré à la fin de ce que votre personnage fait et l'autre moitié à sa préparation/son arrivée au bal. Vous pouvez aussi choisir de faire ça la prochaine fois si jamais ce que vous avez à faire prend du temps mais plus vite les personnages y seront, mieux ce sera je pense pour développer une intrigue là-bas !  nastae

Bien sûr, vous pouvez décider que votre personnage n'ira pas. Dans ce cas, je vous laisse vous occuper entre vous.

Priam devrait spécifier mais voici déjà quelques éléments :
- Le bal (mais en fait c'est plus une soirée) se déroule dans une résidence secondaire de Primaël en dehors de la ville nobiliaire/cour.
- S'il y a une partie pour danser, ce n'est pas le cœur des festivités. La demeure de Primaël est très grande (il a bien réussi) et comporte plusieurs pièces/chambres avec des alcôves. Il y a des endroits très intimistes.
- Il y a aussi des spectacles un peu partout, puisqu'il a invité des artistes.
- Mais le plus gros de la fête, ce sont des jeux (de stratégie, de hasard etc). Il y a des jeux d'argent, de cartes, des paris dans lesquels il est possible de tout proposer à la mise (la main de ses enfants, sa semence, son utérus et j'en passe - c'est pas moi c'est Alvine qui l'a dit)
- Les invités sont masqués (le masque cache tout le visage avec un espace suffisant pour la bouche afin de manger et boire). Les tenues sont les mêmes pour tout le monde. Il s'agit de toges, rouges et dorées pour les hommes, bleues et dorées pour les femmes.
- Afin de conserver l'anonymat, les invités sont conviés dans des vestiaires indépendants afin de se changer. De plus, le personnel leur confie un tampon/sceau (comme en Corée voyez) qui sera solidement attaché au poignet de chacun. Chaque tampon correspond à une personne identifiée, ce qui permet aux invités d'être anonymes pendant la soirée aux yeux des autres invités mais pas aux yeux de l'organisateur qui pourra demander les sommes pariées durant la soirée si jamais il y a des problèmes. En gros, chaque personnage pariant quelque chose ne pourra pas se défausser à la fin. Chaque tampon est unique. Le dessin peut être ce que vous voulez.
- L'alcool, la nourriture et le thé coulent à flot ! /sbaf


Narfas : Le Royaume de Narfas était avant séparé en deux territoires (celui dans lequel on joue) et un autre, bien plus éloigné, qui a été pris par Luce d'Uobmab, le père de Judas d'Uobmab, lui-même père de Zébella et Merlin d'Uobmab. Aujourd'hui il ne reste plus que ce Narfas là. Vous avez la carte du monde là >>> Carte <<< Narfas est un mélange de la culture Humaine et de la culture Orine de l'IRL des personnages. On joue dans un climat plutôt chaud mais y a des oasis et de l'eau, des palmiers, de la végétation (on est avec Astriid en vacances quoi o/). L'architecture est plutôt celle des Orines donc temples asiatiques, avec, en plus (c'est pas Orine) quelques touches de cités grecques avec des colonnes sous les bâtiments. Les vêtements sont fait d'étoffes et ressemblent à l'image que j'ai mise en en-tête pour les nobles. Voilààà o/ Le reste vous pouvez inventer. Lisez bien les nouveaux rôles car il y a beaucoup de contexte dedans ^^ Pour l'invention, faites en fonction du rôle de votre personnage (si c'est un marchand vous pouvez inventer des choses par rapport à ça, si c'est un religieux détailler les monuments de culte etc etc).

Rps importants
- Le Royaume de Lieugro - Partie I
- La mort de Montarville et la prise de Lieugro
- Transition - Quand Lieugro devint Uobmab

Longueur des messages ? - 720 mots minimum.

Objectifs secrets et secrets : 8D

Voilà !  | Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 10 002

Si vous avez des questions, n'hésitez pas ! Amusez-vous bien  | Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 10 1628

Participants


La liste des nouveaux rôles est >> ICI << avec la description des rôles sur la page précédente.

En jeu :
- Hélène (Garance) : XII
- Ikar (Placide) : XXIV
- Stanislav (Alembert) : IX
- Dastan (Ludoric) : XII
- Adriaen (Lambert) : XI
- Yngvild (Rosette) : XII
- Tekoa (Childéric) : XIII
- Chuan (Lénora) : IX
- Susannah (Zébella) : XI
- Erasme (Clémentin) : XII
- Miraneiros (Balthazar) : VII
- Fawëlysa (Wesphaline) : II
- Seiji (Wesphaline) : II
- Jil (Anthonius) : VI
- Claer (Jésabelle) : IV
- Ammon (Gaspard) : VII
- Eméliana (Tamara) : VII
- Zeryel (Adolphe) : VI
- Lysium (Melchior) : VI
- Sympan (Gao) : VI
- Oriane (Pénélope) : VI
- Lazare (Primaël) : III
- Orenha (Luthgarde) : III
- Lorcán (Ivanhoë) : III

En pause :
- Kiara (Coline) : V
- Kyra (Adolestine) : IV
- Faust (Gustave) : V
- Lucillia (Eléontine) : XIII
- Laen (Hermilius) : V
- Chelae (Clémentine) : XVI
- Min (Natanaël) : XIV
- Eibhlin (Adénaïs) : IV
- Lucius (Elzibert) : V
- Lana (Yvonnelle) : V
- Thessalia (Irène) : VIII
- Dorian (Ezidor) : X
- Gyzyl (Judas) : VI
- Wao (Merlin) : XIX

Les morts :
- Babelda (Montarville) : XI (dead)
- Léto (Ernelle) : II (dead)
- Stanislav (Déodatus) : IX (dead)
- Latone (Madeline) : 0 (dead)


Deadline Tour n°8


Dimanche 11 juin à 19H

Pour information, il reste 5 tours ^^

Gain Tour n°8


- 1 point de spécialité au choix
ET
- La toge d'Ivanhoë : Il s'agit d'une toge de bonne facture. Elle permet à votre personnage, en l'enfilant, soit de changer de sexe, soit de gommer son identité aux yeux d'autrui pendant un temps dépendant de sa magie.

(Je le note là mais pour tout ce qui est illusion, l'intelligence des personnages qui regardent joue. Plus un perso est intelligent et agile d'esprit, moins il est susceptible d'être manipulé par les magies d'illusion).

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En ligne
Priam et Laëth
~ Ange ~ Niveau III ~

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◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam et Laëth
Lun 5 Juin 2023 - 23:26



Unknown

Les Portes – Chapitre V

En groupe | Dastan


Rôle :


Ludoric sursauta, avant de retrouver le cours normal de sa respiration – si tant était qu’elle pût l’être en présence de Clémentin. « Avec Jésabelle de Narfas. » répondit-il, sans rien préciser de la condition de la bleue. Au vu de son attitude générale, elle aurait sans doute mérité qu’il se moquât d’elle pour l’éternité et répandit le mot partout, cependant, il n’était pas assez mauvais pour lui infliger un tel traitement. « Ma présence n’était pas requise. Qu’est-ce que tu fais là, toi ? » La réponse tomba ; il rumina intérieurement le grognement réprimé. Rosette. La jalouser n’avait absolument aucun sens. Il s’en sentait coupable. Pourtant, il ne pouvait pas s’empêcher d’au moins l’envier. Quand les mains du brun s’égaraient outrancièrement sur sa taille, quand elles avaient l’audace d’effleurer son visage, quand elles se fondaient dans l’écrin roux de ses cheveux, il voulait être à sa place. Il voulait incendier ses yeux de l’éclat que la jeune noble y allumait à chaque fois qu’elle le regardait. Ses désirs étaient des interdits. Il les murait un à un, patiemment, derrière des remparts de raison et des murailles d’amour ; parce qu’il y avait Placide. Dans ce tourment sombre, le Prince était sa lumière. Quand il se tenait près de lui, Clémentin n’existait plus, ou qu’à moitié. Il l’éclipsait, comme il avait toujours su tout éclipser. C’était pour cela qu’il savait qu’il l’aimait. Ça n’empêchait pas ses pulsions d’exister, mais ça les tempérait. Néanmoins, seul face au brun, les ténèbres gagnaient en puissance. Quand ses iris rencontrèrent les siens et qu’un sourire s’étala sur ses lèvres, il se sentit chavirer. Il était beau. Il était tout le temps beau. D’une beauté sauvage, et surtout insolente. Sans bouger, il le laissa filer, le goût amer de ses pensées infusant dans sa bouche. Ses prunelles descendirent brièvement sur ses fesses, avant de remonter vers sa tignasse de jais. De toute façon, même sans tous ces interdits, il n’y avait rien à espérer d’un homme hétérosexuel. S’il avait été Zébella, il aurait pu lui faire une prise de lutte, le clouer au sol avec ses cuisses dignes du plus solide des étaux et espérer férocement que sa bouche plaquée contre la sienne lui inspirât un souffle de désir ; mais il avait entre les jambes ce que la Princesse n’avait pas, et ça changeait tout.

Avec circonspection, il étudia le biscuit triangulaire que le brun lui avait collé au creux de la paume. « Merci. » dit-il en relevant la tête. Il hésita une seconde, amena le gâteau près de son nez pour le sentir, puis croqua dedans. C’était sucré, très sucré. « Tu vas vraiment travailler avec lui ? » Cette capacité à trouver une occupation à peine arrivé était tout bonnement incroyable. « Tu penses qu’on va rester suffisamment longtemps pour que… enfin, suffisamment longtemps pour travailler comme ça ? » Qu’espérait Ludoric ? La réponse lui échappait. Il retournerait à Lieugro s’il le fallait. Il aimait cet endroit, il aimait y vivre et il aurait aimé en devenir un fervent militaire. Cependant, la pensée de revoir son père le répugnait. Il s’était trouvé un autre fils, de toute façon. Un fils qui répondait à ses standards et alimentait ses rêves. « Pas très longtemps… » Il inspira, avant de sourire en voyant Clémentin nettoyer consciencieusement ses doigts de toute miette égarée. Sa condition de roturier crevait les yeux. Rosette ne pourrait jamais l’épouser. « Depuis qu’on est partis, je pense. J’ai commencé mon entraînement il y a longtemps mais avec tout ce qu’il est arrivé, je n’ai pas passé les tests d’entrée. Ça s’est un peu fait sur le tas. Il fallait quelqu’un pour garder Zébella en plus de Childéric. J’étais là, je me suis proposé, et c’est arrivé comme ça. » Depuis, il avait le droit de porter l’uniforme. « Et toi ? Avant d’être vendeur de thés et palefrenier ? D’après ce que j’ai compris, tu as exercé beaucoup de professions. » Il termina le gâteau, puis sortit un mouchoir d’une de ses poches et s’essuya les doigts.

« Un secret ? » Allait-il lui révéler son homosexualité ? Ludoric retint un sourire désabusé. Ça tenait plus du rêve que du secret. Surtout pour un homme qui passait son temps à parler de sa compagne. N’en avait-il pas assez de piailler à son sujet ? Il eut envie de soupirer mais s’en empêcha. Il était pareil avec Placide. Plus discret, par habitude, par mesure de sécurité, mais il en parlait tout de même beaucoup. Il occupait une place centrale dans sa vie. Pourtant, quand la main de Clémentin s’enroula autour de son oreille, quand il sentit contre elle son souffle chaud, il oublia Placide ; un long frisson dévala sa nuque. Il eut la brusque envie de pivoter, d’attraper le brun par le col et de l’embrasser. Il déglutit et inspira, cherchant quelque chose, n’importe quoi, à quoi il pût se raccrocher pour chasser cette imminence. Les mots de l’ancien garçon d’écuries suffirent. Il tourna la tête vers lui, les sourcils haussés et les yeux écarquillés. « Un tra… » Il s’interrompit, avant de jeter des regards autour d’eux. Ils étaient entourés par la foule. « Je vois. » L’information était, en effet, préoccupante. « Promis, je ne dirai rien. » assura-t-il, avant de loucher sur son auriculaire. Lentement, son regard remonta vers lui. Un sourire ironique ourla ses lèvres. Ça, pour ramer, il était doué. Sur le ton de la plaisanterie, il répliqua : « Si tu savais. » Puis, il rebaissa les yeux sur son petit doigt. Attendait-il vraiment qu’il y crocheta le sien ? Et si, en le touchant, il se produisait quelque chose ? Quelque chose de terrible, d’embarrassant, de… Il chassa ces pensées irrationnelles, et accrocha son auriculaire au sien. Rien ne se produisit ; aucune explosion, aucune apocalypse, juste son cœur qui courut encore plus vite. « Je ne dirai rien. » Il le lâcha et se redressa. « Mais comment l’as-tu su ? C’était une source sûre ? Parce que si c’est le cas… Et même si ça ne l’est pas, en fait, je pense que tu devrais en informer Dame de Lieugro, Sire d’Eruxul ou Sire d’Ukok. » Clémentin aurait dû les prévenir avant leur réunion avec le Roi, cependant, Ludoric se garda bien de souligner ce manquement.

Un mouvement sur sa droite l’arracha à son échange de regards et de promesses avec le brun ; il fut étonné – et gêné – de découvrir Placide. Son palpitant caracola dans sa poitrine. Qu’avait-il vu ? Était-il suspicieux ? Il n’avait pas à l’être. Il n’y avait rien. Rien du tout. « Nous aussi, nous vous cherchions. » répondit-il, en tentant de retrouver un peu de contenance. Il n’aurait pas dû promettre à Clémentin de ne rien dire : il aurait dû en parler au Prince. Ils se disaient tout, et ce secret était important. Pour eux tous, pour la suite. Le regard du roux se déporta sur le dénommé Prince Anthonius de Narfas, qu’il salua avec les formes d’usage – révérence, salutation, mots polis. Il fut presque tenté de donner un coup de coude à son compagnon de route pour que celui-ci l’imitât, mais il avait peur de paraître trop familier, et il ne voulait pas que son amoureux s’imaginât quoi que ce fût. Dans son cœur et dans les faits, il n’y avait que lui. C’était le reste – son corps –, qui n’en faisait qu’à sa tête. Ce corps qui, malgré « l’effet Clémentin », réagissait aux mots « protecteur et ami » avec un pincement au cœur, ce corps qui semblait vivre en sevrage permanent de ne pouvoir avoir la vérité pour seule maîtresse. S’il avait été une fille, ou si Placide en avait été une, ils auraient pu être fiancés et se présenter comme tels. Ils auraient pu se marier et fonder une famille. Au lieu de quoi, ils devaient rester aux yeux du monde des « amis ». Pendant des années, Ludoric avait dû se faire à l’idée que le blond épouserait une femme et aurait des enfants avec elle, pendant que lui prendrait une épouse qu’il serait incapable de toucher. Depuis la chute des Lieugro, les perspectives étaient bouleversées. D’autres possibles s’alignaient, mais trop incertains pour qu’il pût s’en réjouir. Ça lui pesait. « Nous ? On… Nous ne nous connaissons pas si bien. En fait, c’est la première fois que nous discutions vraiment. » Quelle angoisse, songea-t-il. Tais-toi, tais-toi, tais-toi, tu t’enfonces. « Nous étions aux bains et nous nous sommes lavés, avec Zébella. » Conscient de l’ambiguïté du propos, il précisa, gêné : « Enfin, Clémentin l’a jetée dans l’eau. » Il croisa le regard de Rosette et ajouta précipitamment : « En tout bien tout honneur, bien sûr. » Il s’humecta les lèvres. Il n’aurait peut-être pas dû le préciser. Elle aurait maudit son amant. Mais l’amant en question l’aurait sans doute maudit aussi. « Et avant cela, nous discutions avec nos hôtes, les d’Eésnep. Actuellement, Zébella est avec Jésabelle de Narfas. Votre tante, je crois… » Il coula une œillade vers Anthonius et lui sourit, avant de balayer l’assemblée du regard. « Et vous ? Votre installation s’est-elle bien passée ? » s’enquit-il, ses iris s’attardant sur le visage du blond, avant de bondir vers le Prince du royaume. « Quel jeu proposiez-vous, votre Altesse ? » N’importe quoi, pourvu que cela coupât court à son embarras grandissant.



« Si tu as un problème, tu hurles. Peut-être que je viendrai. » Il lança une œillade espiègle à Zébella. Depuis qu’il savait qu’elle était enceinte de celui qui l’avait violée, il éprouvait pour elle un peu plus de sympathie que d’habitude – même s’il ne se gênait jamais pour la remettre à sa place quand elle commençait à japper un peu trop fort. Le roquet méritait parfois quelques coups de sandale. Il n’aimait pas l’idée de devoir la laisser seule au bal, mais on lui avait interdit de la suivre dans les vestiaires ou de la retrouver ensuite. Le personnel de l’entrée lui avait assuré que la sécurité ne souffrait d’aucune déficience. Il aurait quand même préféré la garder à l’œil. C’était le rôle qu’on lui avait assigné et, jusque-là, il l’avait scrupuleusement tenu. Il se réconfortait en se disant qu’avec ses cheveux bleus et sa carrure, elle serait aisément repérable, même avec la toge et le masque uniformes.

Les vêtements à la main, le sceau – la représentation d’un soleil – autour du poignet, il se dirigea vers les vestiaires qu’on lui avait indiqués, délaissant enfin la Princesse. Là-bas, il se changea, puis rejoignit la salle principale. En son centre, un large bassin dessinait comme un œil dont le reflet perçait le plafond recouvert de miroirs. Une fontaine sculptée représentait l’emblème de Narfas : une fleur de safran, dont les pétales recourbés semblaient vouloir plonger dans l’eau. Plusieurs jets quittaient son cœur pour se fondre dans le bassin. Réparties dans toute la salle, les fleurs violettes du royaume égayaient les murs majoritairement écrus du lieu. Partout, leur parfum régnait. Quelques colonnes, déchirées entre le rosé et l’orangé, découpaient la pièce, encadrant les nombreuses fenêtres et portes. Certaines étaient ouvertes, d’autres non ; les plus accessibles permettaient de découvrir d’autres recoins de la maison, spécialement arrangés pour la soirée, afin que chacun pût jouer, boire, admirer un spectacle ou discuter. Au sein de la pièce principale, plusieurs espaces avaient aussi été aménagés : devant la fontaine, la piste de danse accueillait déjà quelques adeptes qui se mouvaient sur le rythme donné par l’orchestre, tandis que derrière, on distinguait un buffet sur la droite et, plus à gauche, abrité par un jeu de voilages, quelques tables de jeux. Ludoric tenta de repérer Zébella, mais ne la vit pas. Ni elle, ni Placide, ni Clémentin, ni personne d’autre. Aux aguets, il se dirigea vers le coin des jeux, intrigué. On lui avait raconté que leur hôte les avait érigés au rang de passion. Avec les soldats, il en avait appris plusieurs, au cours du voyage. Peut-être pourrait-il tenter sa chance, ce soir ? « Permettez-vous ? » demanda-t-il en s’approchant de l’une des tables.



Message VIII – 2024 mots

Pardon pour la taille du post /sbaf Concernant le bal, j'ai rajouté une description de la salle principale (dans laquelle vous arrivez depuis les vestiaires) dans mon dernier paragraphe. Ludo a pour sceau un soleil et va aux tables de jeux. Il demande s'il peut participer =)




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Zeryel
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Zeryel
Mar 6 Juin 2023 - 14:39

| Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 10 O0px
Les Portes V - L'arrivée à Narfas
Zeryel, dans le rôle d'Adolphe




Rôle - Adolphe d'Epilut:

L'amertume niellant la remarque au sujet de Gao n'échappa pas à Adolphe. Il la savait promise au semencier, ce dernier jouissait d'une belle réputation, mais il n'avait pas envisagé que Pénélope puisse s'en amouracher. L'hypothèse ennuyait le futur soldat. Il aurait préféré que le seul nom qui étire ces lèvres pulpeuses soit le sien plutôt que celui de Gao. Pouvait-il rivaliser avec le blond ? Là où Adolphe s'armait de ses lames et de ses membres durcis de muscles, Gao s'armait de l'expertise qui lui manquait justement. Quand il y réfléchissait, c'était naturel que Pénélope s'attarde sur lui. De nombreuses filles avaient vu le jour grâce à ses ardents services et surtout, il était plus proche en âge qu'Adolphe ne l'était. Pourtant, n'avait-elle pas accepté son invitation ? Ses chances étaient infimes, mais pas nulles.

« C'est tout naturel. J'ai aussi eu des échos de la venue d'un cortège de gardes à votre domicile pour garder la fille d'Uobmab. » Il eut un sourire compatissant, intérieurement ravi que ces tracas poussent l'enlevée à quêter un abri plus paisible le temps que les choses se tassent. Et si ses frères ne se préoccupaient pas d'où l'enlevée pouvait être à toute heure du jour ou de la nuit, encore mieux. « Si je ne m'abuse, Ludoric De Tuorp réside chez vous ? On m'a parlé de lui aujourd'hui, il s'agirait d'un soldat à fort potentiel. J'aimerais beaucoup le rencontrer, il n'y a pas beaucoup de camarades de mon âge à l'armée, je serais heureux d'avoir un homologue avec qui parler, je me sens parfois seule avec toutes ces femmes autour de moi. » Trop peu d'hommes rejoignaient l'armée, si tant est qu'on puisse toujours les considérer comme tel une fois leurs attributs sectionnés. Cela dit, Adolphe ne cherchait pas à devenir un homme, mais un soldat, et avant, il y avait des expériences qu'il souhaitait vivre. Il revint sur celle qui pouvait lui offrir cet aperçu. Il prit le ton de la plaisanterie, croisant ses bras sur son torse de facon à afficher avantageusement le fruit d'heures de travail et de sueur. « Si vous ne venez pas à ma demeure suite à mon invitation, je me servirai de cette excuse pour venir frapper à votre porte et le rencontrer. Qu'avez-vous pensé de lui ? D'ailleurs, j'ai aussi eu l'occasion de parler avec Clémentin, même si je suis incertain de comprendre son statut. Un domestique à première vue ? Il m'a dit être fiancé. » Et surtout, Tamara lui avait indiqué de garder un oeil sur lui. « Je me demande à qui. Avez-vous des informations à ce sujet ? Des suspicions ? Peut-être l'une des deux domestiques qui logent chez moi avec Childéric ? » S'il s'agissait de Lénora, alors le pauvre Clémentin était cocufié. D'un autre côté, il faisait pâle figure à côté du Chef des Armées. Childéric n'était pas aussi exubérant que Tamara, mais la même lueur dangereuse dormait dans son regard, il possédait la même posture que le brun avait appris à reconnaître à force de tendre à l'imiter, comme celle d'un prédateur constamment sur le point de bondir.

« À vrai dire, je regrette un peu mon offre et j'espère qu'ils auront oublié depuis pour que je puisse vous dédier entièrement ma soirée. C'était justement aux réfugiés que j'ai proposé de nous rejoindre. Le prince Anthonius accueillait le prince Placide, son cousin Alembert et Rosette d'Eruxul, qui est donc la demi-sœur d'Alembert ? La généalogie de Lieugro est un peu complexe, je dois avouer. Mais ils m'ont fait bonne impression. Placide a l'air très déterminé à récupérer son trône. J'espère pour lui que ses rêves se concrétiseront. Qui sait, si une alliance entre Narfas et Lieugro se concrétise, peut-être que je chevaucherai à ses côtés pour faire tomber Merlin ? Ce sera l'occasion de me frotter à Uobmab, c'est un ennemi qui me permettra de rentrer dans l'histoire, ainsi qu'une façon de nous venger de ce qu'ils nous ont fait subir par le passé. » Rien qu'avec ce haut-fait, il éclipserait sa mère et se hisserait ensuite aisément à sa place. Malgré sa jeunesse d'esprit, l'âge gagnait sans pitié sa mère. Là où chaque année renforçait l'adolescent, elles affaiblissaient en retour la guerrière. Chaque jour qui passait le rapprochait de ce moment fatidique où il serait plus fort qu'elle. Serait-elle fière de lui, alors ? Il l'imaginait mal lui céder son poste gracieusement pour prendre sa retraite. Souvent, il se demandait s'il devrait prendre des mesures plus drastiques à son encontre. La tuer lui répugnait, mais il refusait de passer le restant de sa vie dans son ombre à se faire materner. Abandonner sa virilité était un sacrifice trop grand pour ensuite n'être qu'un soldat anonyme dans les rangs de l'armée.  Il faisait face à un dilemme où il devait sacrifier quelque chose dans les deux cas, l'amour qu'il portait à sa mère, ou ses rêves de réussite. Il s'ébroua mentalement pour ne pas abandonner Pénélope au profit de ses perspectives d'avenir. « J'ignore s'ils nous rejoindront. Le voyage a dû les fatiguer et ils auront beaucoup à parler. Les négociations sont restées stériles de ce que j'ai pu comprendre. Leur situation est précaire. J'imagine que mon oncle leur a crûment annoncé la réquisition de leurs appareils génitaux en échange de notre aide. » Adolphe visualisait très bien comment le Grand Prêtre avait pu énoncer ses exigences. Il n'était pas étonnant alors que Lieugro se soit rétracté. L'éloquence du roux ne masquait pas l'aura malsaine qui suintait de sa personne. Il n'aimait pas avoir à partager un toit avec lui, pas avec toutes les histoires qu'il entendait sur les épreuves qui attendaient chaque adolescent.




Adolphe leva son poignet pour croiser le regard pénétrant de l'œil sans paupières ni cils brodé sur son tampon. Le haut de son visage disparaissait derrière une fine plaque dorée resculptant ses traits, avec deux ouvertures en amande pour ses yeux, ourlées d'épais traits noirs, et une dernière pour la bouche. Il se passa une main dans les cheveux. Il avait déjà chaud et l'absence de ses armes, interdites à l'intérieur, lui donnait la désagréable sensation d'être nu.

Il leva les yeux sur une estrade ovale où deux fillettes rivalisaient de souplesse en arquant leurs corps à des angles impossibles, enroulées autour d'un cerceau en métal suspendu au plafond. Distrait par le spectacle, il resta accoudé à une colonne pour les contempler, jetant parfois des coups d'œil sur les invités. Pénélope avait-elle accepté de venir ? Ils avaient été abordés au restaurant par un ami de l'adolescent qui leur avait rapporté les rumeurs gonflant dans les rues d'une soirée organisée par Primaël, en l'honneur de l'arrivée des étrangers en ville. Il avait alors quitté Pénélope en lui faisant comprendre qu'il espérait l'y voir. Elle n'était cependant pas la seule à avoir le teint d'ébène et il désespérait de pouvoir la trouver dans toute cette foule masquée aux nombreuses alcôves dissimulées. Quant à Ludoric, il ignorait à quoi ressemblait le soldat aux mérites tant vantés. Sa main chercha par réflexe à se reposer sur la poignée du poignard habituellement fixé sur sa hanche mais retomba sans succès le long de son flanc. Il soupira, légèrement agacé.

Message VII | 1287 mots


| Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 10 U0au
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Mar 6 Juin 2023 - 18:47




Les Portes – Chapitre V

En groupe | Yngvild


Rôle :


Un oisillon. Dès que Clémentin entra dans son champ de vision, son cœur battit aussi vite que celui d’un oisillon ; et comme lui qui mimait l’affamé, il ouvrit grand la gueule pour accueillir tout l’amour qui voudrait bien s’y engouffrer. Elle lui sourit, d’un sourire alourdi par le poids du secret, tandis que Placide effectuait les présentations. Au moment où il caractérisa son amant, cependant, son regard se focalisa sur le blond et ses paupières clignotèrent deux ou trois fois. Présentées ainsi, les choses paraissaient incongrues et, surtout, inadéquates. C’était la vérité, bien sûr – du moins ça l’était quand elle avait découvert qu’il était le mystérieux admirateur qui lui écrivait des poèmes depuis des mois. Néanmoins, la d’Eruxul eût préféré qu’elle fût un peu enjolivée, ou pourquoi pas masquée, au moins partiellement. Qu’allaient penser les gens de Narfas s’ils se mettaient à croire que les femmes nobles de Lieugro s’entichaient des garçons d’écurie et se pavanaient fièrement à leur bras ? À cet instant précis, elle eut honte ; mais sa honte s’accompagnait d’une colère acerbe, motivée par un sentiment d’injustice. Durant le trajet, elle avait continué à retourner le problème dans sa tête. Même si Clémentin n’avait pas été le bâtard de Montarville, il demeurait un jeune homme courageux, cultivé et plein d’esprit. Plus que certains nobles. Pourtant, pour des raisons de sang et de naissance, si son ascendance n’avait pas été révélée, il n’aurait jamais été accepté parmi eux. Garance l’aurait confiné avec les autres domestiques du convoi, et son père lui aurait sans doute interdit de le côtoyer. Il ne l’aurait jamais laissé vivre chez eux. Tous n’auraient vu en lui que ce palefrenier qui avait su charmer son cœur, mais qui ne pouvait lui promettre ni présent ni futur. Néanmoins, à cet instant même, l’avenir grandissait peut-être déjà en elle. Et on la jugerait pour cela ; parce qu’elle avait eu des relations charnelles avant le mariage – alors qu’elle était persuadée que tout le monde en avait, sauf Alembert qui devait être aussi puceau qu’un nouveau-né – et parce qu’elle les avait eues avec un homme de basse extraction. Alors qu’il valait mille fois mieux que tout un tas de jeunes nobles qu’elle avait fréquentés. Il méritait amplement sa place à ses côtés, si ce n’était parmi eux, mais les mots de Placide ne rendaient pas justice à la qualité de sa personne. Elle inspira, à la fois embarrassée par ses propos et déterminée à assumer cette relation – la honte n’était liée qu’à son éducation– critiquable – de nanti, et nourrie par le diagnostic du médecin. Comment lui dire ? Fuirait-il ? Voudrait-il l’épouser ? Le souhaitait-elle ? Jusque-là, elle n’avait pas sérieusement envisagé de se marier avec Clémentin. Ils étaient jeunes, ils avaient la vie devant eux. Mais si elle gardait son enfant, ils n’auraient pas d’autre choix. Elle pinça les lèvres, réfléchissant à un moyen de s’éloigner du groupe avec lui, au moins quelques instants.

Les paroles de Ludoric, cependant, ébranlèrent net sa volonté. Son regard émeraude s’arrima au sien, et elle le scruta, troublée. L’agitation apparente du roux l’interpelait : était-il en train de mentir, de couvrir son nouvel ami ? Ses iris papillonnèrent jusqu’au visage du brun qui, au contraire, n’avait pas l’air perturbé du tout. Ou il n’avait aucun scrupule, ou il se moquait des mœurs nobiliaires et agissait comme bon lui semblait. Son cœur comme sa raison penchaient plutôt pour la seconde option. Ce qui lui avait plu – et lui plaisait toujours – chez lui s’illustrait ainsi d’une manière moins agréable. Eût-ce été moins pénible si le soldat n’avait pas précisé que l’acte s’était déroulé en tout bien tout honneur ? Pourquoi avait-il éprouvé le besoin de le faire ? « Bien sûr. » répéta-t-elle en plantant son regard sur lui. Que cachait-il ? Ses prunelles retournèrent vers Clémentin, dont elle étudia la figure dénuée d’angoisse ou de culpabilité, seulement éclairée des étincelles qui l’animaient presque continuellement. Il n’avait rien de suspect. C’était l’attitude de Ludoric, qui clochait. Était-il simplement gêné au souvenir du comportement déplacé du brun ou détenait-il un secret ? De quoi parlaient-ils, juste avant ? Pourquoi cette promesse échangée entre leurs auriculaires ? Pouvait-elle s’être trompée à ce point au sujet de Clémentin ou se faisait-elle des idées ?



Ses tourments l’avaient poursuivie jusque devant les portes de la demeure de leur hôte. Elle avait été incapable de formuler à son amant ce que le docteur lui avait révélé. D’abord parce qu’elle n’avait pas cessé de retourner dans son crâne cet étrange échange avec Ludoric, et ensuite – et surtout – parce qu’à chaque fois qu’elle croisait son regard, toute sa bravoure se liquéfiait. Pourtant, le temps lui était compté : le médecin ou Adolphe finiraient par parler – s’ils ne l’avaient pas déjà fait. Ce soir, elle ne se soustrairait pas à son devoir. Peu importait le déshonneur, peu importait que Clémentin lui cachât des choses, peu importait qu’il se détournât lâchement : elle avait été éduquée avec la droiture et l’honnêteté pour lignes de conduite et, si elle s’en était plus d’une fois détournée, ça n’avait été que pour des expériences insignifiantes d’adolescente, des jeux sans conséquence et des plaisanteries sans véritable sentence. Cette fois, elle devait se comporter en adulte responsable et était décidée à le faire. Elle ne s’était pas laissé le choix : elle avait dit à Placide et Alembert d’entrer sans elle, parce qu’elle souhaitait attendre Clémentin.

Dès qu’elle aperçut sa silhouette, son cœur bondit et sa gorge se serra. D’un pas aussi hésitant qu’intrépide, elle se dirigea vers lui. « Clémentin. » Son attention acquise, elle ne s’autorisa pas à tergiverser : « J’ai quelque chose à te dire. C’est important. » Plus d’issue de secours. Directement dans la gueule du loup. Elle attrapa sa main et l’entraîna à l’écart, à l’abri d’une série de colonnades supportant un balcon du premier étage. Malgré la pénombre, l’air de Narfas était encore brûlant ; il attisait le feu de ses joues, à demi-masqué par le crépuscule. Les yeux baissés, elle s’humecta les lèvres, avant de relever le visage vers son poète. « Tu sais, ça fait quelques temps que je ne me sens pas très bien… » Elle avait toujours prétexté que le voyage la dérangeait. L’évidence désormais devant elle, elle ne pouvait plus se dérober. « Quand j’ai vu le médecin, il m’a posé des questions, et je lui en ai parlé. » Ses iris verts détaillaient les siens, à la recherche de la plus infime réaction. « Il m’a examinée, et il… » Rosette s’interrompit, les yeux fermés. Son pouce et son index pincèrent l’arête de son nez. Lorsqu’elle baissa la main et rouvrit les paupières, ses pupilles brillaient. « J’avais quelques soupçons mais je préférais ne pas y penser, parce que… enfin… » Elle s’était promis de dire les choses clairement, de ne pas tourner autour du pot, de ne pas pleurer ; toutes ses promesses s’enferraient dans la brisure de sa voix. « Je suis enceinte. » acheva-t-elle dans un souffle. Elle ne lui laissa pas le temps de parler : « Nous ne sommes pas obligés de le garder. Il y a des méthodes pour… enfin, tu sais. » Elle déglutit, le corps parcourut de frissons, comme piqué de millions de petites menaces prêtes à s’exécuter.



Message VIII – 1214 mots




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Mer 7 Juin 2023 - 0:54



Les Portes : L'arrivée à Narfas


Au milieu des allées, le temps semblait filer à toute vitesse. Je le trouvais agréable et lui aurais volontiers raconter ma vie entière s’il avait eu la patiente d’écouter et si nous avions été moins exposés aux bruits environnants également. Ma mère avait toujours veillé à m’éduquer. Elle l’avait fait avec l’argent de Madeline d’Eruxul. Si elle n’avait pas disposé de ces fonds j’aurais sans doute simplement été l’apprenti d’un maître qui m’aurait formé afin que je pusse prendre sa suite. Cependant, le fait que la femme de Lambert crût que je pusse être son fils avait changé considérablement ma vie. En y songeant, je perdis mes yeux dans les prunelles du roux. Il semblait avoir toujours su ce qu’il désirait dans la vie là où je n’y avais jamais songé ou presque. Je m’étais contenté d’aller là où la vie et ma mère me menaient, sans réfléchir au lendemain. J’avais toujours aimé cette liberté, celle qui voulait que je ne susse pas de quoi serait fait demain. La liberté d’aimer, la liberté de partir, la liberté d’être qui je voulais. Le fait d’avoir vécu à différents endroits me donnait l’impression d’être à la fois unique et multiple. Au fur et à mesure de mes aventures, j’avais découvert d’autres facettes de ma personnalité, dont une propension à me lier facilement avec autrui. Néanmoins, Narfas n’avait pas été une expérience plaisante. J’avais fini par m’enfuir, en libérant par là-même des esclaves qui devaient être livrés à Lieugro. Le Roi avait dû maudire l’individu qui avait osé lui voler son butin. « C’est une source sûre. » assurai-je. « Mais je pense que comme on sera dans la même chambre pendant notre séjour, on aura l’occasion de passer des nuits à en discuter. » En m’imaginant avec lui en pleines confidences, un sourire s’arrima à mes lèvres. J’avais beaucoup été avec Rosette durant le trajet, Rosette et Alembert. Une présence différente me manquait. Avant, Adolestine écoutait mes histoires et nous pouvions parler en toute amitié. J’espérais peut-être que Ludoric serait la prochaine Adolestine, en différent. Son auriculaire contre le mien avait illustré une promesse et le début d’une histoire liée à cette promesse. « Je leur dirai si on estime tous les deux que c’est nécessaire. On prendra la décision ensemble. » Il m’inspirait confiance.

Lorsque nous fumes interrompus, mon regard coula sur Placide. Je restai un instant sans rien dire. Placide, mon frère. Je le regardai. Je l’avais déjà vu. Le constat était le même à chaque fois : nous ne nous ressemblions pas du tout. Les yeux seulement, et encore. S’ils étaient bleus, la couleur était différente. Les siens semblaient d’une teinte plus vive que les miens. Il devait tenir plus de sa mère car, depuis que je savais, à chaque fois que je me regardais dans la glace, j’avais l’impression de découvrir certains traits de Montarville. Lambert me l’avait dit : je lui ressemblais beaucoup ou, du moins, je ressemblais à l’homme qu’il avait été dans sa jeunesse. La vieillesse et les épreuves de la vie ne l’avaient pas épargné. Dans mes moments de mélancolie, je songeais parfois que je finirais peut-être comme lui, rongé par le désespoir, par la tristesse et par l’impuissance face à la fatalité. Je n’aimais pas les nobles, parce qu’ils se croyaient tout puissants alors que leur monde n’était fait que d’hypocrisie et d’illusions. Je finis par sourire à Placide et par regarder le Prince de Narfas. Il était petit et blond. En fait, Placide et lui se ressemblaient, à quelques années près. Mes yeux se posèrent sur Rosette mais pas trop. Je tentais d’être discret, et je l’avais aussi tenté durant le trajet, mais je finissais toujours par faillir. J’avais envie de la toucher et de parler avec elle. Je rêvais de sa poitrine et du parfum de ses cheveux. Je rêvais de bien des choses. Cependant, lorsque Placide me présenta, ses mots firent voler en éclats notre couverture. Il fallait se rendre à l’évidence : tout le monde était au courant. Même un aveugle l’aurait su. Ça me fit rire et je saluai le Prince de Narfas. « Enchanté. Comme le Prince Placide l’a si bien dit, je suis Clémentin, le palefrenier qui a su charmer le cœur de sa cousine. Cependant, je pense que l’inverse est plus juste. » C’était amusant. « Si vous avez besoin de quoi que ce soit, je suis à votre service. » Il était trop jeune pour que j’eusse envie de lui faire des courbettes. De toute façon, je n’en avais jamais eu envie, avec personne, et il me semblait que ça ne changerait jamais. Tous ces gens n’avaient de noble que le hasard de leur naissance. Je n’estimais les autres que vis-à-vis de faits. Pour le reste, j'étais toujours curieux de découvrir de nouvelles personnes. « Je m’y connais en chevaux, en bateaux, en parfums, en mandoline… je connais la plupart des nœuds et des espèces de fleurs. Je fais des poèmes à mes heures perdues et suis devenu apprenti vendeur de thé pas plus tard que cet après-midi ! » Je continuai. « Oh et, grâce à Rosette… enfin, Dame d’Eruxul, j’ai appris toutes les espèces d’oiseaux. » Pour l’impressionner.

Quand Placide s’adressa à Ludoric et moi, je vins en renfort. « C’est vrai mais j’aime beaucoup la compagnie de votre ami, Prince Placide. » J’aurais volontiers dit Placide tout court mais je ne voulais pas mettre le roux dans l’embarra. « Exactement ! C’était très drôle. J’ai même chevauché le soldat de Tuorp ! C’est dommage que vous ne fussiez pas avec nous. » Je souris en m’en souvenant. Ludoric avait des réactions un peu étranges parfois mais il était fils unique et n’avait pas dû avoir beaucoup d’amis proches. « À quoi jouons-nous ? » Je n’étais peut-être pas inclus dans le jeu. Après tout, ils étaient tous bien nés alors que je ne l’étais officiellement pas.

___________________

J’avais pensé à cette soirée longuement, mon cœur battant la chamade dans ma poitrine à la seule idée de me remettre à jouer. J’avais appris dans différents endroits et avec différentes personnes. Certains étaient des joueurs rigoureux, d’autres étaient de sales tricheurs. Je faisais peut-être partie du dernier clan. Il fallait être malin et j’avais tendance à dissimuler mes cartes sans me faire prendre, ce qui m’incitait à continuer. Il me suffisait de raconter des histoires ou d’attirer l’attention ailleurs. Ce n’était pas si compliqué. Néanmoins, ce qui capta toute mon attention fut la silhouette de Rosette. Depuis que nous étions arrivés à Narfas, nous n’avions pas eu l’occasion de nous retrouver tous les deux. Pendant le trajet, il avait fallu être prudents. À présent, j’espérais que nous pourrions nous voir plus souvent et nous prouver mutuellement notre amour de façon plus appuyée que de simples regards. « D’accord. » J’espérais que c'était une technique pour m’attirer à l’écart. Je pourrais alors la serrer longuement dans mes bras avant d’entrer dans la demeure du dénommé Primaël. « Oui j’ai remarqué. Mais ça va aller mieux maintenant qu’on est arrivés. » dis-je, en me voulant rassurant. Je ressentis cependant une pointe d’inquiétude, notamment quand elle parla du médecin. Avait-elle attrapé une maladie entre Lieugro et Narfas ? Était-ce dû à l’anxiété ? Attentif, j’attendis qu’elle parlât, en silence et en tentant de ne pas me laisser totalement abattre par ses cornées larmoyantes.

Quand la nouvelle tomba, je clignai des yeux. Aucun sentiment particulier ne pulsa dans ma cage thoracique. Je sentis mon souffle entrer et sortir, eus une image très précise d’Adénaïs et déglutis. Ma bouche tenta vaguement quelque chose, sans que je ne susse quoi. Je n’avais aucune idée de ce qui me traversait. Un semblant de sourire gagna mes lèvres, atténué par une sorte de grimace, puis un nouveau sourire. L’une de mes mains trifouilla mes cheveux à la recherche d'un élément inconnu. « Tu es enceinte de moi ? » demandai-je, comme si ça me paraissait irréel. Ça ne l’était pas. C’était ce qui arrivait quand on faisait l’amour sans se protéger. Je l’avais vu plusieurs fois. Les campagnes regorgeaient de filles enceintes malgré elles. Certains hommes restaient mais la plupart prenait la poudre d’escampette. « Tu ne veux pas le garder, c’est ça ? » la questionnai-je, tout en posant mes mains sur ses bras. Elle avait l’air ébranlée, si bien que ça nourrissait davantage mon incapacité à me positionner. « Ne te méprends pas, je ne veux pas que tu t’en débarrasses. Enfin… je pense que c’est surtout ta décision. » Le problème c’est que si elle le gardait, ça voudrait dire… Qu’est-ce que ça voudrait dire ? Elle ne pourrait pas m’épouser si je n’étais pas reconnu comme étant le fils de Montarville. Et si je l’étais, je serais enchaîné à ce rang de Prince bâtard. Mais si je ne l’étais pas, elle devrait probablement épouser quelqu’un d’autre, quelqu’un qui se ferait passer pour le père de l’enfant. Ce serait potentiellement un homme plus vieux, un homme qui accepterait d’élever la progéniture d’un autre. Je fronçai les sourcils. « Ton père il… sait ? » Comme un bouchon de champagne qui finit par sauter, mes émotions fusèrent de nouveau pleinement en moi. Confuses mais bien présentes. Finalement, je laissai tomber les réflexions vaines et la pris dans mes bras. « Je n’aime pas quand tu pleures. Je suis désolé… Tu sais que je t’aime. Je n’ai pas envie que ce soit un problème entre nous. On peut discuter d’une solution, en fonction de ce qui nous conviendrait le mieux. Ce n'est peut-être pas l’idéal tout de suite mais je ne veux pas que tu penses que je tente de me défausser de mes responsabilités. Je peux assumer. Mais je ne veux pas non plus que tu culpabilises si tu n’en veux pas… on aura le temps d’en refaire un si tu veux, plus tard, quand je serais riche et encore plus beau. » Je déposai un baiser sur son crâne après avoir laissé échapper un rire. Il valait mieux rire dans ce genre de situation. Je disais que je pouvais assumer mais je n’en étais pas sûr. Je n’avais jamais eu de père. Je ne savais pas ce que ça signifiait. En plus, nous étions jeunes et… Si elle le gardait, nous serions enchaînés. Ensemble, à un statut. Et un être compterait sur nous, sur moi. Pouvait-on vraiment compter sur moi ? L’angoisse me saisit. Surtout, les abortifs restaient dangereux et peu fiables. Si elle ne désirait pas le garder, ce serait un risque au moins aussi grand qu'un accouchement. Je m'en voulus à mort.

1714 mots
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Mer 7 Juin 2023 - 14:17



Unknown

Les Portes – Chapitre V

En groupe | Lazare


Rôle :


Le regard de Primaël quitta les livres pour remonter sur Ivanhoë. Il scruta son profil, prêt à déceler la moindre information. Les jeux lui avaient appris à étudier les expressions. Ou était-ce la nécessité absolue de survivre ? Quand les marchands d’esclave avaient tous les droits sur lui, l’erreur n’était pas admise. Il devait être capable d’anticiper la moindre réaction, capable d’analyser chacun des rouages de leur esprit, capable de pourvoir à leurs ordres avant même qu’ils ne les prononçassent. Il s’était entraîné à décortiquer les visages pour désosser les âmes. Avec le roux, ça n’avait rien d’aisé. L’amour couvrait ses yeux d’un voile criblé d’étoiles qui l’éblouissaient de jour comme de nuit. « Il y sera. » Parce qu’il fallait qu’ils y fussent tous. Il se redressa et le dévisagea, surpris par la froideur de son ton. Non, avec Ivanhoë, ça n’avait vraiment rien d’aisé. Ses stratégies si bien huilées crissaient contre ses tympans. Il y avait sans doute trop d’affect pour qu’il pût agir rationnellement – ce devait être aussi vrai pour l’assassin. « Parce que ça avait l’air important pour toi. » répondit-il, honnête. Ça ne lui faisait pourtant pas plaisir. C’était évident. Sa façon brusque de se rhabiller, sa voix sèche, son regard fuyard. Le cœur de Primaël se serra. Il aurait peut-être dû garder l’information pour lui, quitte à l’aiguiller benoîtement vers la vérité. Il aurait pu le pousser vers Ludoric ; mais l’adolescent aurait-il su lui donner les informations suffisantes pour qu’il pût déduire que Gustave de Tuorp était aussi son père ? Il en doutait. Le bleu soupira. Sans un mot, il se leva et se dirigea vers le bureau. Il ouvrit l’un des tiroirs et en tira un jeu de tarot, le préféré d’Ivanhoë. Durant quelques secondes, il le considéra, puis retourna vers son amant. « Je la verrai au bal. Je ferai en sorte que tu n’aies pas besoin de la tuer. » L’ombre d’un sourire fila sur ses lèvres. Tamara ne lui faisait pas peur. Elle couchait avec Gao depuis des années. Il avait souvent entendu parler d’elle, par lui ou, plus récemment, par toutes les oreilles qu’il avait disséminées dans la cité et dont les bouches ne manquaient jamais de lui rapporter ce dont les yeux étaient témoins. La Cheffe des armées était une femme de caractère, mais elle n’était pas stupide. Les imbéciles comptaient parmi les gens les plus dangereux, parce que leur faire entendre raison relevait souvent de l’impossible. Ils étaient trop convaincus d’être dans leur bon droit. Avec quelqu’un d’intelligent, on pouvait toujours négocier. « Tiens. » Il lui tendit le jeu de tarot. Il retint un « ne le perds pas » espiègle. La figure d’Ivanhoë portait encore les stigmates de son mécontentement. « Je suis désolé que ça t’ait pris de court. » dit-il, ses yeux à la recherche des siens. « Je pensais te faire plaisir, ou au moins te soulager d’un poids. » Son regard céruléen le détailla. Les relations parents-enfants n’avaient jamais été son fort. Ses géniteurs l’avaient vendu au plus offrant. Ses descendants vagabondaient par dizaine parmi les nobles, sans qu’il n’eût jamais établi le moindre contact avec eux. Ce n’était pas son rôle. Il n’avait été qu’un semencier. Au-delà de cette fonction, il n’avait pas la fibre paternelle. Aimer Ivanhoë avait bien des avantages, notamment parce qu’il ne lui demanderait jamais de lui faire un enfant. S’il avait été amoureux d’une femme, aurait-il été capable d’assumer le rôle de père ? L’exigerait-on de lui, un jour ? « Bref. » Il se décala et s’avança jusqu’à son jeu d’échecs éparpillé sur le sol, et entreprit de ramasser le plateau et les pièces. « Tu repasseras ici avant la fête ? » s’enquit-il.



Dans ses appartements, Primaël terminait de rédiger une réponse à Melchior d’Eésnep. Il n’avait jamais approché le frère de Gao, parce que c’était le frère de Gao. Il savait pourtant qu’ils n’avaient rien en commun. Il avait aussi connaissance du genre de cercles que Melchior fréquentait. Bien qu’il eût conscience qu’un rapprochement eût pu être utile ou, a minima, pertinent, il ne l’avait jamais initié. Presque dépourvu de tabous ou d’interdits, celui-là faisait résistance. Néanmoins, lorsqu’il avait reçu sa missive, il avait compris que cette fois, il ne pourrait pas se dérober. Il acceptait donc son invitation, en lui proposant de se retrouver le lendemain de la fête organisée chez lui ou, s’il n’était pas gêné de parler investissement durant la soirée, de discuter au cours de celle-ci. Depuis qu’il n’était plus semencier, Primaël entretenait sa fortune notamment en soutenant des commerces. De toute évidence, ce n’était pas ce dont ils parleraient, mais peu importait. Il était à peu près certain que, même enveloppé d’un vêtement identique à celui des autres hommes, même pourvu d’un masque et d’une teinture pour masquer le bleu de ses cheveux, Gao serait capable de le reconnaître. Ils s’étaient appris autrement que par la vue. Si Melchior le cherchait, il pourrait le trouver. Sinon, ils se rencontreraient le lendemain, au domicile du faux noble. Il ne voulait pas retourner chez Gao.



« Ma Dame. » prononça-t-il, à voix basse, derrière l’épaule de Tamara. Le tissu bleu de sa robe rehaussait la teinte fauve de ses cheveux. Durant une seconde, il imagina la main de Gao s’agripper à sa chevelure. La vision disparut aussitôt. « Puis-je vous offrir une coupe de vin ? » Chacune de ses mains tenaient un verre. Il lui en tendit un, poli, avant de demander avec taquinerie : « Vous qualifieriez-vous de femme de réflexion ou de femme d’action ? » Face à elle, ses iris céruléens sondèrent les siens. À l’instar d’Ivanhoë, il avait appris par cœur les sceaux des invités spéciaux. D’un coup d’œil à leur poignet, il était capable de les reconnaître, quand ça n’était pas leur allure, leur attitude ou leur démarche qui l’aiguillaient ou, de façon plus flagrante, leur carnation, leurs caractéristiques capillaires ou leur carrure. Il avait passé des années à parcourir des corps et à les éprouver. Leurs souvenirs étaient imprimés sur sa rétine. « Si vous préférez réfléchir, je vous entraînerais volontiers à une table de jeux ; mais si vous avez plus d’appétence pour l’action, je vous volerais bien une danse. » dit-il, le ton de sa voix trahissant la présence d’un sourire, caché par le masque qui recouvrait la totalité de son faciès. De chaque côté du mascaron, des cheveux anthracite s’éparpillaient dans les fils d’or de sa toge.



Message IV – 1080 mots

Il s'est teint les cheveux en gris foncé.


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Mer 7 Juin 2023 - 14:19


Images par wlop
Les Portes V - L'arrivée à Narfas
Orenha dans le rôle de Luthgarde

Rôle:
Toute a sa hâte de récupérer les fruits de ses dernières heures de labeur, Luthgarde ne réalisa pas tout de suite l’intrusion du Grand Prêtre dans le jardin ; ce n’est qu’après une pirouette plutôt impressionnante au-dessus de la fontaine dans laquelle menaçait de se noyer un de ses croquis que son regard accrocha celui de l’Homme Sain.
De surprise, elle perdit l’équilibre et le pied qu’elle maintenait périlleusement en l’air plongea au fond de l’eau avec la vélocité et la grâce d’une grosse pierre, projetant des gerbes d’eau aux alentours dans de retentissantes éclaboussures. Ses bras moulinèrent un instant dans le vide avant qu’elle ne parvienne à trouver une prise sur le rebord de la fontaine, empêchant de justesse le reste de son corps de finir trempé jusqu’à l’os.
« Vo… Votre Sainteté ! »
Sa voix lui cingla les tympans, bien plus aiguë qu’à l’ordinaire, la dernière syllabe avalée par ce qui ressemblait à un couinement de souris ou un pépiement de moineau. La jeune femme se redressa a demi, la posture figée en une courbette avortée, le mollet toujours immergé. Le sang lui coloriait le visage de rouge jusqu’aux oreilles. Elle n’osait lever les yeux pour confirmer ce qu’elle savait déjà ; la chevelure enflammée lui avait brûlé les rétines et son propriétaire n’était assurément pas la Cheffe des Armées, cette fois ; le bleu roi de la toge qu’elle apercevait aux limites de son champ de vision dissipait le peu de doutes qu’elle aurait pu avoir quant à son identité.
Elle se maudit. Qu’est-ce qui ne tournait pas rond chez elle ? Comment était-elle parvenue à se couvrir de ridicule devant les deux maîtres de la maison et pourquoi y avait-il toujours un bassin d’eau à proximité quand ça arrivait ? Au moins, cette fois-ci, elle avait gardé ses vêtements – et elle ne sentait pas le purin.
« Je suis profondément confuse d’apparaître ainsi devant Votre Éminence… croyez-moi, j’ai rêvé de cette rencontre plus d’une fois, mais les circonstances étaient bien différentes dans mon imagination ! »
En effet, elle avait préparé ce moment depuis que son projet de visiter Narfas avait été validé par le comité chargé d’envoyer les étudiants à travers le monde ; évidemment, aucun de ses scénarios hypothétiques n’impliquait l’embarras qui l’envahissait à l’instant et hachait ses phrases de balbutiements ridicules.
Ce qu’ils avaient tous en commun, par contre, c’était la chaleur qui monterait en elle tandis qu’elle se ferait introduire auprès du Grand Prêtre ; son port de tête inébranlé malgré l’excitation d’avoir obtenu un rendez-vous privilégié avec un Homme qui touchait du doigt le divin ; le discours plein d’esprit qui coulerait sur sa langue comme du miel sur un fruit mûr ; Sa Main qui s’abaisserait sur son front pour y oindre Sa bénédiction, avant de descendre...
Il lui fallait reprendre ses esprits, et vite.
« Permettez-moi de me présenter, mon Père. » L’éloge qu’elle avait pourtant maintes et maintes fois répété devant son miroir lui échappait complètement, ainsi que les salutations d’usage ; et pour ne pas arranger la situation, les Voix se faisaient muettes depuis qu’elle était arrivée à la résidence. Il lui fallait improviser. La jeune femme extirpa sa jambe du bassin dans un mouvement qu’elle essaya de rendre le plus gracieux possible – sans grand succès – et, toujours sans oser croiser le regard du Grand Prêtre, se racla la gorge en serrant les feuillets sur son cœur.
« Je me nomme Luthgarde Etnias. Je suis venue de la contrée voisine d’Erréil afin d’étudier d’au plus près votre noble culture et, surtout, Votre Sainteté Lui-même. Je suis une grande admiratrice de vos ouvrages, et les démonstrations perpétuelles de votre dévotion sans bornes ont été un grand moteur pour la Foi qui m’anime . C’est un honneur immense de baigner dans Votre Sainte Lumière... » c’était une expression plus appropriée pour le Monarque suprême, renommé pour briller plus fort que le soleil lui-même ; mais l’éblouissement qu’elle ressentait envers Sa Sainteté éclipsait la réputation du Roi. « ...et je vous présente mes plus sincères remerciements pour m’avoir accueillie au sein de votre foyer malgré les... circonstances actuelles. Les pauvres réfugiés de Lieugro ont une chance d’inouïe de pouvoir bénéficier de votre bonté. J’espère que Dame d’Epilut votre sœur et Vous-même saurez trouver en votre cœur l’indulgence de me pardonner pour mes nombreux manquements aux règles que dictent la bonne conduite. Je vous supplie de n’y voir aucune insulte de ma part ; ils ne sont que les malheureuses conséquences de la maladresse d’une étrangère qui doit encore trouver ses marques en terre inconnue.»
Le bas de sa toge dégouttait le long de sa jambe ; n’y tenant plus, elle posa précautionneusement les papiers qu’elle pressait encore contre sa poitrine sur un banc – certaines pages se baladaient toujours au gré du vent, mais elle n’y prêtait plus attention – et se permit d’interrompre son monologue pour essayer de corriger la situation. Tandis qu’elle se penchait pour essorer le tissu gorgé d’eau de ses deux mains, elle risqua un coup d’œil discret en direction de l’Homme Sain.
Il ne correspondait à rien de ce qu’elle avait imaginé. Elle pensait qu’il serait un peu plus… enfin, un peu moins… une chose était sûre, c’était qu’il était très… roux ? Non, il ne fallait pas laisser la perplexité se teinter de déception ; il n’y avait pas de place pour des considérations aussi superficielles dans son cœur.  Le Très-Haut avait façonné son Élu sur terre sous les traits d’un homme qui avait bien vécu et bien mangé. N’était-ce pas logique, après tout ?
« Mais ne me laissez pas abuser de votre précieux temps plus que de nécessaire ; je sais à quel point Votre Excellence est un homme occupé.» Un temps d’hésitation. « Je réalise que j’outrepasse les limites de votre hospitalité en osant vous faire une pareille suggestion mais... si d’aventure vous aviez une petite heure à m’accorder… j’aimerais beaucoup faire votre portrait et vous poser quelques questions… dans le cadre de mes études. »
Elle sourit nerveusement, enhardie par sa propre audace.

Message IV | 1012 mots


| Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 10 Gfo3

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Mer 7 Juin 2023 - 18:25




Les Portes – Chapitre V

En groupe | Hélène


Rôle :


Les raisons des invasions ne sont jamais valables. Garance retint un sourire. Malgré la situation dramatique, Lambert l’amusait. Il avait toujours eu cette droiture si prononcée qu’elle le confinait parfois à la naïveté. L’échiquier géopolitique était truffé de bonnes raisons. Chacun y allait de la sienne, et c’était ainsi que le monde se mouvait. Tout était valable quand les besoins s’exprimaient. En ce sens, les humains ne valaient pas plus que des bêtes ; s’ils devaient se battre à mort pour une ressource ou une idée, ils le feraient. À la place de Narfas, elle n’aurait pas hésité à employer les grands moyens. Seulement, elle l’aurait fait avec finesse et intelligence. Elle aurait embrassé du regard l’ensemble du plateau et aurait pris le soin d’étudier les perspectives de chacun – autant que faire se peut – avant de prendre une décision et de commander des actions. Ils ne l’avaient pas fait, et à cause de cette négligence, ils plaçaient Lieugro dans une position délicate mais déterminante – à mi-chemin entre la faiblesse et la force. Ils leur avaient confié la clef de leur liberté. La sortie n’était pas évidente, mais elle était possible, et elle pouvait s’effectuer soit par le retrait, soit par la violence. Soit par le départ, soit par l’élimination. La régente ne croyait plus que très moyennement à la négociation. Avec Jésabelle et Balthazar, peut-être. Malheureusement, l’hydre comptait déjà quatre têtes. « Je ne suis pas certaine qu’une entrevue avec le Roi fasse effet. Si sa femme lui roule autant dessus en privé qu’elle ne le fait en public, je crains que nos efforts ne mènent à rien. J’ai besoin de réfléchir à ce qu’il s’est passé. Dans tout cela, quelque chose sonnait faux. »

Face au messager, elle se composa un masque impassible. En son for intérieur, l’envie de rire était féroce. La farce était d’envergure. Wesphaline, qui venait de les insulter et de les menacer, opérait un revirement complet et promettait de les aider à ne pas respecter l’accord ? Elle, qui avait brillé par sa sottise et sa démesure, essayait de leur faire croire que Balthazar était le plus idiot des deux ? Après avoir défendu une ligne si dure face à son mari plus conciliant, elle regrettait d’avoir dû suivre les soi-disant volontés du Roi ? Que tentait-elle de faire ? Voulait-elle qu’ils crussent qu’elle était malmenée par son époux quand c’était elle qui l’avait sauvagement rabroué devant leurs invités ? Souhaitait-elle leur faire croire qu’elle les soutiendrait alors qu’elle les avait enfoncés, au contraire de son Roi qu’elle traitait d’abruti ? Pourquoi se désolidariser du Grand Prêtre, qu’elle avait si bien épaulé lors de leur entrevue ? Qu’est-ce que c’était que cette mise en scène grotesque d’un gamin venu leur annoncer la bouche en cœur qu’elle était désolée et se comporterait désormais comme une alliée et une sainte ? Elle les prenait véritablement pour des imbéciles. « Sa Majesté désire voir Lambert ? » reformula-t-elle, en tournant la tête vers ce dernier. Il n’eut pas le temps de répondre. Un fracas sinistre brisa la dynamique de leur discussion, et lorsque Garance pivota, elle découvrit le visage ensanglanté de l’enfant écrasé contre la table, maintenu par la poigne solide du chef des armées. Sans un tressaillement, elle leva les yeux vers lui. À ses tempes, son cœur battait. Dans le regard du brun résidait une violence qu’elle avait déjà vue. « Réprimez vos pulsions, Childéric. » souffla-t-elle calmement. Ses iris suivirent ensuite les siens et se posèrent à leur tour sur Lambert. Il n’était pas un traître. Elle n’avait jamais douté qu’il pût la trahir ; en revanche, jamais il ne serait allé contre Montarville ou contre Lieugro. Sans compter qu’il aimait les enfants de son meilleur ami presqu’autant qu’il aimait sa propre fille. S’il s’était mis à jouer avec Narfas, il aurait agi contre eux tous. Quant à Childéric… Ses pupilles écalèrent sa silhouette. Elle ne le connaissait pas si virulent. La fatigue du voyage pesait-elle à ce point sur ses nerfs ou abritait-il une démence qu’elle ne lui avait jusqu’alors jamais découvert ? Garance n’aimait pas les hommes imprévisibles. Il ne valait guère mieux que les fous et les idiots. Elle glissa un coup d’œil au garçon. Il respirait.

Dès que Lambert prit la parole, elle se concentra sur lui. Malgré son apparente assurance, son malaise était palpable. Ses révélations, quant à elles, s’avéraient surprenantes. Les sourcils haussés, la blonde le dévisagea. « La seule raison, vraiment ? » releva-t-elle, un sourire coincé à l’orée de ses lèvres. L’emphase que les honnêtes gens – ou les mauvais menteurs – mettaient sur certains mots les confondait. Ils avaient passé du temps ensemble ? Elle ne lui avait jamais dit être la femme de Balthazar ? Elle voulait le voir ? Étonnant. Lentement, Garance acquiesça, les mains toujours posées sur la table. « Je sais que vous vendriez votre âme pour protéger le royaume de mon frère. » approuva-t-elle. C’était, de son point de vue, l’un des atouts principaux de Lambert. Pour Lieugro, il serait prêt à presque tout. Ses informations, néanmoins, lui arrachèrent un pli de bouche mécontent. « J’aurais aimé que vous nous l’appreniez avant notre arrivée à Narfas. » Comment avait-il pu ne pas voir l’intérêt stratégique de ces éléments ? Si c’était vrai, cela expliquait en partie l’attitude de Jésabelle durant l’entrevue. Elle tirait définitivement plus de ficelles qu’elle ne voulait bien l’admettre. « Très bien. Essayez de savoir dans quelle mesure elle n’est pas qu’une reine consort. » glissa-t-elle, avant de se retrouver seule avec Childéric. Elle se tourna vers lui. « J’espère pour vous que le choc a fait perdre la mémoire à ce garçon. De tels agissements sont intolérables. Vous feriez mieux de garder vos excès de violence pour des actions utiles. » À son tour, elle attrapa la carafe d’eau et se servit. « Selon les résultats de l’entrevue entre la Reine et Lambert, il se peut que quelques têtes doivent tomber. J’aimerais pouvoir compter sur vous à ce moment-là. » Elle but, puis reposa son verre. « En ce qui concerne le messager, faites venir un médecin. Débrouillez-vous pour que les conséquences de vos actes ne nous causent pas plus de problèmes. » Sans dire un mot de plus, elle quitta la pièce, emportant avec elle la première ébauche d’accord. Elle y abrogerait ce qu’elle jugerait nécessaire.



Juste avant les festivités organisées en l’honneur des réfugiés, Garance avait sollicité pour le lendemain une audience auprès du Roi et de lui seul, en lui faisant parvenir les rectifications et corrections qu’elle avait apportées et fait valider par Lambert et Childéric, avant le départ spontané – imprévisible et agaçant – de celui-ci. Les retours de ses espions, tôt dans la matinée, semblaient confirmer ce qu’ils soupçonnaient déjà. Cette soirée pouvait être l’occasion parfaite pour passer à l’action. Elle n’excluait pas de le faire, mais elle voulait prendre les décisions en toute connaissance de cause. Trouver Tamara d’Epilut et lui parler figuraient aussi parmi ses objectifs. En fonction de ce qu’ils apprendraient, ils sauraient s’il fallait attendre le lendemain pour mettre un plan à exécution. Dans ce cas, elle patienterait. Munie de son sceau représentant une lionne et parée de la tunique bleue des femmes, elle se fondit dans l’anonymat de la salle. L’organisateur de cette soirée, Primaël, éveillait aussi son intérêt. Qui était-il ? Que représentait-il ? Que voulait-il ?



Message VIII – 1253 mots




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Jeu 8 Juin 2023 - 0:00



Les Portes : L'arrivée à Narfas



« Ça ne m’étonne pas de lui. » soufflai-je, lorsqu’il m’annonça que Gaspard avait agi comme un parfait crétin. Le résumé seul de la réunion suffit à me faire prendre conscience du désastre. À croire qu’un vent de folie s’était abattu dans la salle du trône. Je n’avais jamais été subtile. Je détestais la finesse quand elle n’était pas nécessaire et abhorrait les individus qui tournaient autour du pot sans jamais y entrer. Néanmoins, il me semblait qu’une stratégie douce et mesurée était bien plus pertinente, quitte à entrer dans le pot par derrière. Ils auraient pu proposer des mariages, une zone de paix entre les deux Royaumes ou n’importe quelle autre solution qui aurait conduit à faire venir des femmes à Narfas. Tout aurait pu être imaginable. Pourquoi pas, même, offrir aux jeunes filles de venir étudier au sein du Royaume ? Si elles passaient quelques années dans ce dernier, les chances pour elles de tomber sous le charme d’un natif seraient grandes. Cela impliquait de s’installer sur place et de fonder une famille. Il y avait bien des méthodes. Mais non. Ils avaient décidé de parier que la perspective de viols collectifs serait plus propice à la discussion. En y réfléchissant, un rire sortit d’entre mes lèvres. Voilà pourquoi je n’aimais pas la politique. Ceux qui la pratiquaient n’avaient souvent aucune putain d’idée de notions pourtant simples, comme celle de réalité. « Cela m’étonne de ta femme, en revanche. » Peut-être la perspective de l’adolescence proche d’Anthonius la rendait-elle instable ? D’ici peu, elle ne pourrait plus cacher au monde qu’une fente se trouvait entre les cuisses de son « fils ».

Lorsqu’il parla de religion, je faillis lui dire que la misère avait pour elle d’être concrète, alors que les Dieux toujours restaient silencieux. S’ils avaient ouvert leur clapet, mon frère ne serait pas Grand Prêtre, quoi que cela voulût dire dans un univers contrôlé par des femmes. Il y avait tout de même une limite à la connerie. Néanmoins, je retins l’envie, tout comme celle de l’attraper et de le secouer pour qu’il cessât de se cacher derrière des préceptes qu’il ne respectait pas lui-même en trompant sa femme avec moi. La fidélité n’était pas un principe clé de la religion, d’où l’acceptation des semenciers, mais la Reine n’avait eu théoriquement que des garçons et, en tant que Roi, il aurait été logique qu’il perdît sa semence dans son ventre à elle plutôt que dans le mien, dans l’objectif de voir naître des filles. Savait-il pour Anthonius ? Les hommes n’étaient pas conviés aux accouchements et Wesphaline aurait pu garder l’information pour elle seule. Étais-je prête à vendre l’enfant, à dénoncer son statut féminin ? Je pouvais toujours proposer un mariage, entre l’héritier du Royaume de Lieugro et Anthonius. Les deux Royaumes seraient liés et, en évinçant les aînés de la blonde, un couple royal se formerait, unissant les deux territoires à la reprise de ce qui avait été volé et, par là-même, leurs habitants. D’ici peu, l’information que je détenais ne vaudrait plus rien. Anthonius grandirait et gouvernerait. Elle devrait se marier à un homme qui serait considéré comme le Roi à l’extérieur mais qui lui serait soumis dans les faits, tout comme Balthazar l’était à Wesphaline. Il faudrait, dans tous les cas, trouver un moyen discret d’évincer ses aînés, à moins que la Royauté décidât de confier les rênes de Narfas à une étrangère ? Après tout, Balthazar était le fils de l’ancien Roi. Wesphaline était une pièce rapportée. La question demeurait. Devais-je lui dire, pour Anthonius ? Que ferait-il de l’information s’il l’avait ignorée jusqu’ici ? Le plateau de jeu ressemblait à un champ de bataille. Chacun possédait des intérêts et des informations. Restait à savoir qui serait le plus à-même d’utiliser ce que je savais correctement. Balthazar avait l’avantage d’être sensé et peu intéressé par le pouvoir et la gloire. « Ils se rappelleront qu’ils sont faillibles une fois que les murs trembleront. Mais ce sera trop tard. » laissai-je entendre. Lui comme moi n’étions pas aveugles. Les tensions existaient et se renforçaient. Vivre dans le déni n’apportait rien de bon sur le long terme.

Je m’approchai du Roi, en relevant ses doutes et ses hypothèses. Si les réfugiés partaient, une porte de sortie se refermerait. À force de rester entre nous, nous nous scléroserions. Surtout, qu’importassent les moyens mis en œuvre : rapts, viols, exigences démographiques, le Royaume restait toujours en déclin féminin. Ma main se posa sur son torse. « Mes pensées n’engagent que moi mais je pense qu’une alliance royale entre Lieugro et Narfas pourrait être préférable et envisageable, si nous décidons de partir en guerre contre Merlin d’Uobmab. Je trouve ça étrange, venant d’un homme qui n’a eu de cesse d’avaler les Royaumes à son seul profit, de placer soudainement son fils à la tête de sa propre conquête. À ton avis, que cherche-t-il à faire ? Il n’a pas bougé le petit doigt pour récupérer Zébella. Bougera-t-il seulement celui-ci pour aider Merlin ? Au lieu de demander aux femmes d’écarter les cuisses, tu ferais mieux de décider que si Narfas aide Lieugro et arrive à récupérer le Royaume, alors les deux fusionneront par mariage royal. Montarville a deux filles et un garçon. Toutes les combinaisons sont possibles. L’un de tes fils aînés pourrait se marier à l’une des sœurs de Placide… ou Anthonius avec Placide. » Je le fixai et souris. « Si nous récupérons Lieugro, elle n’aura plus à se cacher. » murmurai-je, proche de lui, comme s’il me paraissait évident qu’il fût au courant du sexe de son propre enfant. Ma main remonta sur sa joue. « Si tu pouvais faire plus que de simplement jouer à être le Roi, alors peut-être que tu sauverais ton Royaume. Mais si tu laisses ce même Royaume entre les mains de Gaspard et de Wesphaline, je t’assure que tout ceci se terminera dans un bain de sang. Le peuple te tiendra pour responsable et te fera tomber de ton trône. Ça m’embêterait que tu meures. Tu as toujours été doué avec ta langue et c’est une qualité rare dont je ne pourrais pas me passer. » Je ris.

____________________


Mon sceau était un rond au sein duquel étaient enfermés un triangle et un carré. Parée de mon masque, j’avais l’intention de m’amuser chaudement. Les soirées de Primaël étaient connues et j’avais pu, à de nombreuses reprises, profiter de leurs bienfaits. Gao n’avait cependant jamais désiré m’y accompagner et ne m’avait jamais fourni la moindre explication. Dans la foule, je tentai de repérer deux silhouettes. Celle de mon fils, tout d’abord, car je m’inquiétais toujours. Celle de Childéric, ensuite, pour des raisons différentes. Les alcôves permettaient l’intimité et je désirais m’entretenir avec lui. Nous pourrions parler de nos fonctions homologues, de la bonne longueur des épées et de l’art de les faire pénétrer dans le corps de l’adversaire. Je souris derrière ma cachette, en imaginant mes jambes entourer son bassin. Ce ne fut néanmoins pas lui qui m’aborda. L'homme en question n'avait pas la même carrure, même s'il dégageait, rien qu'à la position de son corps et à sa voix, quelque chose de particulièrement attirant. « Pourquoi pas. » Le vin avait tendance à magnifier les corps. Je m’étais parfois réveillée à côté d’un torchon alors que j’avais cru, la veille, avoir affaire à une serviette. « Essayez-vous de percer à jour ma psyché ? » m’amusai-je, tout en soutenant son regard. « Et si je vous réponds que je suis autant une femme d’action que de réflexion, que me proposez-vous ? » J’aimais taquiner les hommes, leur répondre, jouer avec eux. « Surprenez-moi. » C'était un défi. Presque un ordre.

1241 mots
Eméliana - Tamara:

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| Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 10 Wpw2
Image : Artiste inconnu
Les Portes : L'arrivée à Narfas

Seiji dans le rôle de Wesphaline De Narfas:


Peu de temps après le départ de son serviteur, la souveraine avait sombré dans un sommeil sans rêves. Depuis quelque temps, des crampes assaillaient son ventre ; insensible à ses douleurs, la délivrance rouge tardait à venir. À son âge, le corps se faisait traître. Des insomnies la tourmentaient, toujours précédées de bouffées de chaleurs à faire s’évanouir un bédouin. En conséquence, elle s’assoupissait fréquemment en pleine journée, regagnant par ces siestes inopinées dynamisme et clarté d’esprit.

Hélas, le repos ne durait jamais bien longtemps. Tirée de l’inconscience par une bataille de pensées, elle se redressa sur son divan. Les yeux mi-clos, elle fixait un horizon qu’elle seule apercevait, en proie à des délibérations intérieures sans fin. Le trouble que jetait sur son pays l’arrivée des réfugiés la réjouissait autant qu’elle le craignait ; le moment où tout se jouerait était venu. Ses prochains choix la porteraient aux nues, ou l’enverraient droit à l’échafaud. Pas une ombre de peur ne flottait dans son regard. Son peuple devait être libéré de ses chaînes, et elle lui apporterait la liberté, dût-elle y laisser sa tête ou sa couronne. À l’exception de ses enfants, elle se tenait prête à tous les sacrifices.

Lorsqu’un serviteur vint l’informer de l’arrivée de son invité, elle se surprit à murmurer une prière. Quel que fût le nom que portait le dieu qui les regardait depuis les cieux, elle espérait qu’il se montrerait au mieux généreux, au pire indifférent. Quand Lambert se présenta, elle enfonça un ongle dans la paume de sa main. Le voir dans ses appartements avait quelque chose de troublant. Tant bien que mal, elle tâcha de réprimer la chaleur adolescente qui s’installait dans son ventre. N’osant l’approcher, elle baissa la tête, contrite.

« Je regrette de m’être emportée devant votre régente. Je sais que cela n’a fait qu’aggraver la situation, mais je me devais de soutenir le Grand-Prêtre. »

En public, du moins. Les impardonnables habitudes de l’Ecclésiastique éveillaient en elle une nausée latente, et l’incitaient sérieusement à revoir sa position sur la peine de mort. Soudain très lasse, Wesphaline se leva, venant faire face à son invité, et poussa un soupir qu’elle retenait depuis trop longtemps.

« Mon peuple souffre, Lambert. Les exigences que nous vous avons présentées, et que vous avez trouvées si intolérables, il les subit tous les jours, sans possibilité de refuser ou de se réfugier ailleurs. »

La vie avait beau n’être rose que dans les contes de fées, la souveraine avait conscience que, dans certains pays, l’existence était bien plus paisible que dans d’autres. Les problèmes, bien entendu, existaient partout ; toutefois, le devoir battait au plus profond d’elle-même. Il lui fallait protéger les siens de la violence du monde, quel qu’en fut le prix.

« Je veux être honnête avec vous, cette fois. Par respect pour ce que nous avons partagé autrefois, et parce qu’il y a des circonstances où les manigances ne font que nuire à tout le monde. Les obligations des femmes et le sort des hommes de Narfas sont inadmissibles. Il est exclu que les vôtres fassent les frais d’une… politique similaire. »

Ses épaules se détendirent brusquement. Prononcer à haute voix ce qu’elle pensait réellement de toute l’affaire lui laissait un goût étrange dans la bouche, un goût qui n’avait rien à voir avec celui de la trahison.

« Mon mari appartient à l’espèce des modérés. Ce n’est pas un homme mauvais, mais il croit dur comme fer aux préceptes de notre religion, et il n’osera jamais s’opposer à qui que ce soit. Le Grand-Prêtre lui souffle à l’oreille comme on fait des suggestions à un enfant. »

Prise d’un frisson, elle recula d’un pas. À présent que Gaspard lui avait fait comprendre ses exigences, toute l’horreur du personnage lui éclatait au visage. Comment avait-elle pu ignorer si longtemps le monstre dans l’ombre du roi ? Malgré sa passivité, Balthazar ne méritait pas d’être la marionnette d’un homme qui ne songeait qu’à assouvir ses propres pulsions.

« La situation ne peut perdurer ainsi. Pendant des années, j’ai essayé d’amener des changements en douceur. Adoucir les traités, proposer des alternatives, tempérer les appétits du Grand-Prêtre, mais ce n’est pas suffisant. Le Clergé a une influence démesurée, ici. »

Un nœud dans la gorge, Wesphaline réalisa enfin la nature de la bouillie immonde qui, depuis des semaines, remontait depuis les tréfonds de son estomac pour lui donner des haut-le-cœur. S’appuyant sur la table, elle retint une envie de crier. Elle confiait à Lambert le plus douloureux de ses secrets, plus précieux que n’importe quel joyau ; l’aveu de son impuissance.

« Lui faire entendre raison est impossible. J’ai eu l’audace de lui demander un discours tout à l’heure, et il attend désormais de moi que j’écarte les cuisses quand il le voudra. »

Désormais à quelques pas du blond, elle plongea son regard dans le sien. Il lui était impossible de savoir quels sentiments le traversaient ; ses propres émotions se mêlaient à la partie avec une force insoupçonnée.

« Il est le seul véritable obstacle à un accueil sans conditions des vôtres. En gage de ma bonne foi, je vous promets de le faire tomber. Pourriez-vous apaiser la colère de Garance le temps que je me charge de lui ? »

La Violette n’ignorait pas qu’elle lui en demandait beaucoup. Néanmoins, pour équilibrer les choses, elle plaçait son avenir entre ses mains. Il lui suffisait de solliciter une audience avec le Roi, et de lui répéter les paroles de sa femme, pour que sa tête se retrouvât sur le billot ; s’il la laissait faire, elle aurait envers lui une dette qu’elle devrait rembourser pour le restant de ses jours.

« Il me fallait jouer la comédie, tout à l’heure. Je crains que Gaspard ne démasque mes projets, et qu’il me fasse assassiner. »

Quand bien même le Grand-Prêtre avait sans doute en tête un arsenal de manières de la faire souffrir bien plus qu’en mettant fin à son existence prématurément.

« Je veux que les réfugiés n’aient à subir aucune des horreurs auxquels les miens sont soumis. Et j’espère qu’à vous voir libres de disposer de vos corps et de vos vies, à voir qu’il est possible de vivre autrement, ils finiront par réclamer la même chose. »

Pendant un instant, Wesphaline se tut. De tous les hommes auxquels elle aurait pu confier ses projets, jamais Lambert n’avait figuré sur la liste. Et, pourtant, à le voir devant elle, elle savait qu’elle n’aurait jamais pu les souffler à un autre. C'était risqué, plus que tout ce qu'elle avait entrepris jusqu'à aujourd'hui. Pensivement, elle entreprit de se servir à boire. Ses jambes flageolaient, peut-être en raison de la confidence qu’elle venait de lui faire, ou peut-être plus un motif plus intime encore. Se mordant la lèvre, elle tendit un verre au blond.

« Avez-vous parlé de quelqu’un à notre passé ? Est-ce que… Vous m’en avez voulu ? »

La souveraine s’était toujours sentie responsable de l’incident qui avait eu lieu à l’époque. Combien de nuits avait-elle passé à se dire qu’elle n’avait pas été à la hauteur, et qu’à n’avoir connu qu’un seul homme elle était incapable d’en satisfaire un autre ? Combien de fois s’était-elle retrouvée une plume à la main au petit matin, prête à lui exprimer ses regrets d’avoir menti, et à lui écrire des mots qui ne devaient jamais franchir ses lèvres ? Et puis, elle avait appris le mariage de Lambert, et jusqu’à le revoir dans la salle du trône, elle avait banni son souvenir.

« J’ai toujours eu à coeur les intérêts du royaume, et de ne laisser personne d'autre que mon époux m’approcher, mais votre départ m’a permis de comprendre que mes désirs et mes sentiments devaient disparaître. Vous m’avez aidé à devenir ce que je suis, en un sens. »

Un sourire un peu triste flotta sur ses lèvres. Que serait-il advenu, si, à l’époque, elle avait mis sa fierté de côté et trouvé le courage d’envoyer la lettre ?

« Avec vous, je n’étais plus la reine, mais une femme comme une autre. Bien que ce ne soit pas la seule chose qui m’ait plu. »

Le rouge aux joues, elle s’aperçut soudain de leur proximité et avala le contenu de son verre, espérant engloutir son trouble avec lui. Elle ne comprenait pas pourquoi son cœur, toujours si docile et raisonnable, battait tout à coup au rythme du passé.

~ . ~

Lorsque l’invitation parvint à la souveraine, elle n'osa croire en sa chance. Depuis leur dernière entrevue, elle n’avait heureusement pas recroisé le Grand-Prêtre dans les couloirs du palais. Toutefois, la réception représentait une occasion qu’elle n’aurait sans doute plus jamais. Il fallait agir. C’était pour cela qu’elle se trouvait en compagnie de sa sœur. Observant les volutes de fumée s’élever de sa tasse de thé, elle esquissa un large sourire.

« J’ai demandé à Gaspard de faire un discours pour raviver la foi du peuple. L’arrivée des réfugiés n’est pas vu d’un bon œil par les nôtres. Sais-tu ce qu’il va exiger en retour ? »

La Violette laissa la question en suspens. Son regard, toutefois, descendit jusqu’à ses cuisses, jusqu’aux replis humides qui lui valaient à la fois sa position et ses tourments. Pourquoi fallait-il que la vie entière tourne autour d'un morceau de chair, ou de son absence ?

« Je suggère que nous nous rendions tous à la soirée à laquelle nous avons été conviés. Je voudrais que tu trouves une drogue, qui affaiblisse le corps mais garde l’esprit alerte. Que je puisse me porter pâle, et que je demande à Gaspard de m’accompagner à l’écart, le temps de reprendre des forces. »

Une substance aux effets rapides, administrable avec une aiguille, aurait été idéale ; il lui suffirait de se piquer la main à leur arrivée, et de glisser discrètement l’objet dans la soutane de l’Ecclésiastique.

« J’en profiterais pour le séduire. Qu’il se laisse aller à ses plus bas instincts quand je ne pourrais pas me défendre. »

La perspective de sentir son souffle de bête sur sa nuque réveilla sa nausée. Fermant les yeux, elle se rappela les larmes des siens. Les visages déformés de femmes en couches. Les yeux ternes d’hommes sans espoir.

« J’aimerais que tu viennes nous chercher au bout de quelques minutes, si possible avec Balthazar, ou toute autre personne d’influence, qui pourra témoigner de ce qu’elle a vu sans que sa parole soit mise en doute. »

Prenant la main de sa sœur, elle vissa son regard dans le sien. Sa détermination ne flancherait pas.

« Il est temps de couper la tête du serpent, Jésabelle. »

1 727 mots

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Jil
Sam 10 Juin 2023 - 14:33


Si Anthonius s’attendait à une tirade de la part du Prince de Lieugro, il fut déçu. Contrairement au reste du petit groupe, celui-ci se limita à une courte phrase simple, à propos de son père et le souverain d’Uobmab. Pas de remarque philosophie, pas de considération sociale ou d’argument complexe ; à vrai dire, même à comparer à Adolphe, sa réponse sonnait creux. La fille de Wesphaline hocha la tête sans rien ajouter. Elle était curieuse de savoir ce qu’il pensait réellement, au point de vouloir garder son opinion pour lui – et elle se refusait à croire qu’il n’avait rien de plus intéressant à dire. Les nouveaux arrivants vinrent interrompre leur discussion : tous les deux de jeunes hommes, l’un roux, et l’autre aux cheveux noirs. D’un coup d’œil, elle pouvait voir que l’un d’entre eux était un soldat, à la manière qu’il avait de marcher et de se tenir. Quant à l’autre, il n’avait pas de manière. Placide fit les présentations, en commençant par son hôte, tel qu’il était convenable de le faire. Ludoric de Tuorp était le nom du premier, et il s’attirait visiblement les louanges et l’intérêt du prince. Le second, dont le nom de famille n’avait visiblement pas besoin d’être mentionné, Clémentin, était loin du compte. Placide débita la son prénom et la raison de sa présence rapidement, avant de passer à autre chose.

Simple palefrenier. Elle jeta un coup d’œil à Rosette, qui n’appréciait probablement pas ce commentaire aussi vrai que réducteur. Anthonius salua, comme il était d’usage. La cousine du Prince était plus chanceuse que celui-ci ne semblait le réaliser. Elle avait le libre usage de son corps et de son cœur. C’était bien plus que ce à quoi une princesse de Narfas pouvait prétendre. Le fait que leur relation puisse être aussi aisément évoquée en public avait quelque chose d’irréel. La Princesse restait muette, perdue dans ses pensées, tandis que Ludoric s’empêtrait dans des explications visiblement complexes. Quand on lui demanda d’expliquer les règles du jeu, il sourit et commença à parler :

— « C’est un jeu simple, ici, on l’appelle ‘Faucon, Tigre, Cobra. On divise les joueurs en trois équipes ; les Tigres chassent les Faucons, les Cobras chassent les Tigres, et les Faucons chassent les Cobras. On chasse un joueur quand on parvient à le toucher ; si un Faucon est touché, il rejoint l’équipe des Serpents. Lorsqu’un Serpent est touché, il rejoint l’équipe des Tigres, et lorsqu’un Tigre est touché, il rejoint l’équipe des Faucons. Ainsi, plus on gagne, plus on a d’ennemi, et moins on gagne, plus nos ennemis sont menacés. Il n’y a pas vraiment de fin, on arrête lorsqu’on en a marre. Qu’en dites-vous ? En revanche, si vous me permettez, je vais ôter ce manteau avant que nous commencions, ma survie en dépend. »

Il ajouta ce dernier commentaire en souriant avant de se diriger en direction des parcs, où ils auraient davantage d’espace pour courir.

---

L’après-midi avait été exténuant, tant à force d’exercice que de concentration pour maintenir le décorum. Malheureusement pour Anthonius, il était loin d’être au bout de sa peine. Sa soirée avait été réservée à un bal d’envergure, auquel il se rendait en compagnie de ses parents. Ils étaient supposés porter des masques, pour une raison qui échappait au Prince. Quoiqu’il en soit, c’était moins un évènement diplomatique qu’une soirée de jeu, de détente – et en toute clarté, de débauche. La résidence secondaire de Primaël était de ces lieux comparables à un palais, en peut-être un peu moins grandiose. Assez rapidement, à l’entrée, on les orienta vers des vestiaires où ils allaient pouvoir se changer afin de conserver l’anonymat. Avant qu’ils ne se séparent, Anthonius sentit sur lui le regard de sa mère, le dernier qu’elle lui porterait directement pour ce soir, un regard lourd de sens : l’anonymat n’était pas un prétexte au relâchement. Il inclina imperceptiblement la tête avant de prendre la direction qui lui était indiquée.

À l’intérieur du vestiaire, un masque, ainsi que deux tenues. Rouge et dorée pour les hommes, bleue et dorée pour les femmes. Sur le banc, un sceau, qu’elle devrait attacher à son poignet pour la soirée. Il représentait un hérisson roulé en boule. Anthonius commença à se déshabiller, posa dans un coffre ses vêtements, avant de marquer un temps d’hésitation. Elle jeta un long regard aux deux tenues accrochées contre le mur. Un instant passa, une heure pour elle, une minute pour ceux qui patientait à l’extérieur. Avec application, elle commença à retirer le linge autour de sa poitrine, et la prothèse fixée à son entrejambe. Sa main tremblait légèrement lorsqu’il saisit le tissu bleu, avant de s’affermir lorsqu’elle l’enfila. Son cœur battait la chamade, mais il était de toute façon trop tard pour reculer.
Résumé et mots :


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Sam 10 Juin 2023 - 20:42



Les portes : L'arrivée à Narfas



Quelques longues secondes après le départ de Garance, je remarquai que les paumes de mes mains me faisaient mal. Mes ongles, enfoncés dans la chair de mes poings fermés, avaient commencé à l’abîmer. Mes jointures rivalisaient de blancheur. J’inspirai et expirai, les yeux rivés sur le messager. Mes doigts se détendirent, lentement mais surement. Ezidor avait peut-être raison dans sa façon de fonctionner ou, du moins, il avait eu raison, avant de se marier à cette folle. Il valait mieux vivre seul, pour soi, avec ses propres desseins. C’était difficile, parce qu’il fallait avoir conscience de ses désirs profonds et les accepter pleinement. J’avais choisi la facilité : être le chien fidèle d’un autre. Je n’étais plus sûr de le vouloir à présent. Intolérables, avait-elle dit. Le silence qui régnait à présent dans la pièce fut froissé par mon sourire et le rire qui sortit d’entre mes lèvres. « Ah… » finis-je par murmurer. Le mot sonna la fin de mon hilarité, bien qu’une courbe continuât d’exister sur ma bouche. Je me déplaçai doucement vers la porte et la fermai à clé. Mes doigts fouillèrent dans la poche intérieure de ma tenue et en sortirent un flacon contenant une poudre blanche. Je trouvai un verre, la versai dedans et ajoutai de l’eau. J’attendis ensuite que l’adolescent se réveillât. Je ne lui laissai pas le temps de comprendre et pris un air inquiet. À son chevet, je le soutins et lui proposai à boire. Il le fit. Ils le faisaient tous. Dès qu’une personne était dans un état similaire, elle ne refusait jamais un verre d’eau. Je vis dans son regard que les souvenirs étaient en train de lui revenir. C’était trop tard de toute façon. Une forme d’inconscience ne tarderait pas à le saisir et, plus tard, les événements récents ne seraient plus que des bribes incompréhensibles, des sensations semblant venues d’un autre monde. Il ne s’en rappellerait pas. Ni de ce que je lui avais fait précédemment, ni de ce que je lui ferais ensuite. Peut-être même ne se souviendrait-il pas non plus d’avoir apporté le message de la Reine. Finalement, lui et moi avions été semblables jusqu’ici : deux chiens au service d'autrui. À sa différence, j’étais capable de mordre et d’arracher la main qui me nourrissait depuis longtemps. Nos chemins se séparaient, à présent. Je n’étais visiblement pas fait pour être domestiqué et tenais plus du loup que de son descendant.

Quand il fut dans un état second, je le choppai et plaquai son torse contre la table. Son corps semblait mou. Ses pieds touchaient le sol mais seul le bois le soutenait encore. Je songeai au comportement de Lambert, à ses secrets, au fait qu’il ne voulût pas que je doutasse de sa loyauté. Quant à Garance, elle s’était montrée telle qu’elle avait toujours été. Néanmoins, cette fois-ci, ses réprimandes avaient coulé devant ma gueule comme le sang d’un morceau de choix. Le fait qu’elle ne se rendît pas compte que le fait de tendre un bâton en ma direction tout en désirant m’utiliser était une erreur me fit sourire une deuxième fois. Je découvris les fesses du messager. J’avais vu Ezidor faire plus d’une fois. Comme une transposition, dans mon esprit, j’eus presque l’impression d’être lui quand je poussai un soupir de plaisir. Le premier, celui du commencement. Telle une libération, m’introduire au creux de ses reins me procura une sensation inespérée qui devint plus prégnante lorsque j’accélérai. Je n’avais plus rien à faire ici. C’était une certitude. Puisque Lambert et Garance décidaient de jouer le jeu proposé par Narfas, puisque faire taire les oppresseurs ne semblait pas dans leurs priorités et qu’ils désiraient brider mon comportement lorsqu’il ne leur convenait pas, tout en profitant de mes qualités uniquement lorsqu’ils le voulaient, ils n’avaient qu’à se débrouiller seuls. Je n’avais que faire de leur avenir. Je devais récupérer Ezidor à tout prix, l’arracher à ce mariage putride. Il n’aurait, de toute façon, pas la force de me résister. S’il persistait dans ses travers, je le contraindrais à m’obéir. Peut-être même se retrouverait-il à la place de ce corps sans défense, acculé contre une table, à devoir subir mes volontés. Il devrait faire un choix et, s’il faisait le mauvais, je le tuerais.

Une fois que j’eus fini, je rhabillai ma victime, songeur. Si je rentrais à Lieugro, il me faudrait une monnaie d’échange, quelque chose ou quelqu’un d’une valeur suffisante pour garantir ma sécurité le temps que je réglasse mes affaires. Je plaçai le messager sur le canapé délicatement. Quoi qu’il pensât de son état, je serais déjà loin quand il reviendrait à lui. Je m’approchai de la table après être allé chercher le nécessaire à écrire et composai une brève lettre, indiquant des affaires urgentes à régler en compagnie de la Cheffe des Armées de Narfas et qui ne prendraient pas plus d’un ou deux jours. Puis, je plaçai un peu de la poudre de ma fiole dans une coupelle et écrivis un post-scriptum, indiquant à la régente que j’avais remarqué ses migraines et que ce remède devrait être capable de les faire disparaître ou, au moins, de les atténuer. Ne me restait plus, à présent, qu’à lui arracher son trésor et à rejoindre un port afin d’embarquer sur un navire en direction de Lieugro.

877 mots - Fin
Childéric repart pour Lieugro en enlevant quelqu'un au passage. C'est soit Alembert, soit un fils ou une fille de noble PNJ en fonction de ce que tu décides de faire, Stanislav. Je comprendrais que tu ne veuilles pas terminer le rp si tôt par rapport à la date de fin. On intégrerait le prochain rp de Lieugro ensuite, directement ou avec un décalage. Le bateau c'est plus rapide que les convois  | Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 10 2289842337 Par contre, je ne garantis pas le bon comportement de Childéric pendant le trajet.

Tekoa - Childéric:
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Dim 11 Juin 2023 - 12:23


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Les portes V - L'arrivée à Narfas
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Rôle - Jésabelle De Narfas:


« Entrez. » Jésabelle termina de rédiger ses instructions sur un parchemin. Elle organisait également quelques festivités : les baptêmes des filles nouvellement nées dans la cité. Ces tâches ne lui incombaient plus depuis longtemps, mais elle avait jugé bon de remettre la Foi au cœur de ses occupations, afin d'y convier quelques réfugiés. La conversion à leur religion était une forme de manipulation passive et détournée. Si les têtes pensantes se refusaient à céder aux pièges de leurs hôtes, le peuple se montrerait peut-être moins avisé. Abandonner ses croyances et ses racines était complexe et demanderait du temps, mais la blonde n'avait jamais été effrayée par les défis. Elle mettrait les ressources nécessaires pour appâter les agneaux jusqu'à son pré. Lorsque les plus blancs s'y risqueraient, le reste du troupeau suivrait, lentement mais sûrement.

La Prêtresse déposa sa plume puis se leva de son bureau, se tournant pour faire face à son invité et lui dédier son entière attention. Elle se para d'un sourire bienveillant, presque maternel. « C'est un plaisir de vous revoir, Princesse d'Uobmab. » salua-t-elle l'adolescente tout en s'inclinant pour lui payer femmage. Elle avait cependant refusé de l'appeler par son titre de reine. C'aurait été reconnaître un statut illégitime que la Couronne de Narfas réfutait. La bleu n'en restait pas moins de sang royal et méritait donc une forme de respect. « Vous ne vous en souvenez peut-être pas, mais nous nous sommes déjà rencontrées, lorsque vous étiez plus jeune. » Elle en gardait sans doute encore quelques souvenirs : leur partenariat avait été fructueux. L'adulte l'invita à s'installer sur un fauteuil, d'un geste du bras, prenant elle-même place à ses côtés. « Merci d'avoir accepté de venir. » Elle n'avait pas vraiment eu de choix. Toutes deux le savait mais les convenances exigeait que l'on joua la comédie. Le fait que la téméraire soit connue pour son tempérament tempétueux et indomptable rendait la jeune femme plus intéressante aux yeux de la femme de pouvoir. « J'espère que la fatigue ne vous accable pas trop. J'ai entendu dire que la traversée du désert avait épuisé bon nombre des voyageurs. » La blonde échangea quelques autres banalités, l'air de rien, pour essayer de détendre l'atmosphère. Elle voyait sur le visage de la plus jeune quelques traits qui ne trompent pas. Avant que la prisonnière ne lui soit amenée, un messager lui avait transmis le rapport préliminaire de la médecin. La grossesse était confirmée, et tout le poids de cette révélation semblait désormais peser sur les épaules de la mère en devenir.

« On vous dépeint comme une femme puissante. » déclara Jésabelle en reprenant la tasse de thé fumant qu'elle s'était servie - une autre était destinée à Zébella. « Une renommée que vous avez forgé, sans aucun doute, bien qu'on attribuera vos exploits à l'éducation fortifiante de votre père. Les enfants de Judas ne peuvent être que puissants - même sa fille ne peut se permettre d'entacher sa grandeur. » La blonde laissa un rictus se dessiner sur ses traits. « C'est enrageant, n'est ce pas ? De penser que vos mérites seront toujours teintés de l'emprunte d'un homme. » C'était le sort des femmes. Même à Uobmab, où l'on prétendait que les individus se démarquaient par leur puissance propre et que seuls les méritants parvenaient à s'élever de leurs terreaux. La vérité était que la terre n'était pas aussi fertile pour tous, et que l'on privilégiait inconsciemment certains. « Ne prenez pas ombrage de ma remarque, mais notons les faits. Votre règne commençait à peine et voilà qu'on vous sort de la coupe de votre père pour vous passer sous celle de votre frère. Les traditions vous on choisi un époux que vous répugnez. Dès que vous céderez et consentirez - ou que votre époux vous arrachera de force son dû - vous n'aurez plus de valeur : Merlin aura pris l'ascendant sur vous le moment où il posera les mains sur votre personne. » Il n'était pas un secret que la Bleue avait fait vœux de ne jamais lui succomber. Il y a cependant des limites à l'entêtement. Le royaume réclamerait tôt ou tard des héritiers. « Judas semble avoir placé sa Foi en votre frère, supposant qu'il parviendra à vous imposer des héritiers. Je n'ai jamais été de son avis. J'ai placé mes espoirs en vous, depuis le début. Vous souvenez-vous de notre accord ? » demanda Jésabelle en sirotant son thé, laissant à la princesse l'opportunité de se remémorer leur alliance. « Je n'ai jamais aimé les hommes imbus d'eux-mêmes, se pensant supérieur aux femmes. Merlin fait indéniablement partie de ceux-là. Or, nous savons vous comme moi que ce morveux n'engendrera jamais d'héritiers. Nous nous en sommes assurées ensemble. » Lorsque la fillette lui avait permis de rendre Merlin stérile. Sa haine envers son frère lui avait valu de prendre la bonne décision, bien que celle-ci n'ait à l'époque été désignée que dans l'unique but de nuire à son emmerdeur de frère. « Il est de mon avis que votre place sur le trône est légitime : votre puissance vous y assied, plus encore que votre sang. Votre frère, cependant, n'apportera rien d'autre que des ennuis pour la nation. Que diriez-vous que nous concluions une nouvelle alliance, afin de l'évincer une bonne fois pour toute ? » Jésabelle espérait insuffler chez sa disciple une vision semblable à la sienne. Une idéologie où la femme régnerait en maîtresse absolue, sans contestation. Narfas avait commencé à tracer le chemin, mais la blonde n'aurait de cesse de vouloir étendre cette influence. Si Garance montait sur le trône de Lieugro, elle ne tarderait pas à céder sa place à son fils et cette succession n'intéressait aucunement la Prêtresse. Zébella avait cela d'utile qu'elle était encore influençable. En ajoutant à cela que le royaume de Judas lui reviendrait ensuite, Jésabelle comptait propager sa vision du monde par ce biais. Bien sûr, la tâche prendrait du temps. Il faudrait se montrer prudent, pour ne pas éveiller les soupçons.




Jésabelle fronça les sourcils face à la révélation de sa sœur. Une vague d'écœurement lui souleva les entrailles. Gaspard la répugnait au plus haut point. Il représentait tout ce qu'elle détestait. Le pouvoir auquel il prétendait lui faisait penser qu'il lui était permis d'exiger tous les dû. Puisqu'il tenait tant à cet appendice qui lui donnait sa virilité, la blonde se ferait un plaisir de le lui retirer en punition pour l'outrage qu'il faisait porter à la violette.  La Prêtresse soupira puis se leva. « Je n'avais pas prévu de me rendre à cet endroit... » Le dédain de ses paroles laissait deviner qu'il n'était pas dans ses habitudes de se rendre à ce genre de célébration. « Mais il faut remettre ce chien à sa place. Je me procurerait ta drogue. » confirma-t-elle. Couper la tête du serpent. Et toutes les suivantes, si le reptile se révélait être une Hydre. Jésabelle ferait s'effondrer toutes les falaises qu'il faudrait pour ensevelir les monstres menaçant son pouvoir ou sa famille.
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Les portes - Chapitre V
Stanislav

Rôle - Alembert De Lieugro:
Je compte sur vous, cher cousin, pour me soutenir. La phrase tournait en boucle dans la tête d'Alembert. Il avait noté l'assurance dans sa diction, l'affirmation lavée du moindre doute. Ses paroles se faisaient prophéties : le blanc se pensait déjà couronné. Pourtant, la régente avait reprit les reines et l'évinçait déjà du conseil, dépourvu de poids décisionnel dans le sort réservé au convoi des sujets. Placide ne régnerait sur Lieugro qu'une fois que Garance l'aurait récupéré des griffes de l'envahisseur. Or, la blonde ne cèderait pas sa place si facilement. Les paroles de l'adolescent laissaient alors un arrière goût d'amertume. La guerre était déclarée. Pourtant, le fils de la reine se devait de garder les apparences. En cela, la prétendue allégeance se devait totale. « Ce sera un honneur que d'aider mon Roi de toutes les façons qu'il lui plaira. Si mon soutien peut vous être utile, n'hésitez pas à en faire usage. » avait-il dit avec une ferveur naïve. Son jeu d'acteur étonnait le brun lui-même. Mais il avait étudié la meilleure des comédienne de près. Aussi, il avait apaisé son aigreur en se répétant que Placide finirait par baisser sa garde face à lui. S'il se prétendait loyal et assujettit, il lui serait plus facile de rafler la couronne le moment venu. C'était la seule chose qu'il avait jamais voulu. Parce que c'était ce qu'attendait de lui Garance. Parce qu'il n'avait vécu que pour une unique raison : rendre sa Mère fière et recevoir de sa part des louanges. L'avoir découverte en compagnie d'un homme, lors du convoi, l'avait contrarié. Il lui en avait voulu, et avait sentit quelque chose se briser en lui-même. Pourtant, il ne pouvait pas envisager de lui en vouloir. Il l'aimait, de cet amour inconditionnel qu'on les nourrisson envers leur mère. Elle était son monde et, en bien des manières, il n'avait jamais réussi à couper le cordon qui avait subsisté entre eux bien après sa naissance. Malgré sa rancœur, il ne savait faire autrement que de chercher son approbation, à tout prix.

Le Marionnettiste suivit le groupe. Il était satisfait que son cousin eut envie de rejoindre son amant : cela le rapprochait de la Princesse Zébella. Pourtant, il éprouvait également l'envie de retrouver la tranquillité de sa solitude. Il avait envie de retourner dans la seule compagnie de ses poupées inanimées. Son travail inachevé le démangeait, il avait envie de la compléter. Que ferait-il, une fois qu'elle serait terminée ? L'offrirait-il à sa sœur, ou la garderait il jalousement ? Peut-être en confectionnerait il une également pour l'enfant de son oncle. Bon et craint. C'était un mélange délicat. Il se demandait comment deviendrait un tel monarque incarné en cet enfant dont l'insouciance avait été violement brisée. Déjà, l'illustration d'une nouvelle marionnette lui venait à l'esprit, et il eut envie de commencer ce nouveau projet - autant pour laisser libre court à son âme artistique que pour se moquer du plus jeune.

Le quatuor finit par rencontrer le soldate et le palefrenier. Si le brun salua le roux lors des présentations, son regard ne tarda pas à fouiller les alentours à la recherche de la prisonnière assignée à l'adolescent. Réalisant qu'elle n'était pas là, il se mordit la langue pour se retenir de couper les intervenants dans leur discussion. Il les écouta sans broncher. Lorsque le jeu débuta, il s'y plia sans grand entrain. La partie aurait été plus intéressante, si Zébella avait été là.



Les quelques coups portés à la porte le firent sursauter. Alembert avait l'habitude, cependant. Sa mère n'avait jamais spécialement apprécier son passe temps et afin de ne pas recevoir de remontrance, il avait plusieurs fois du feindre de ne pas y consacrer son temps. Ses précepteurs l'avaient parfois surpris, d'autres fois, il avait pu masquer son activité. Avec une habitude devenue experte, il recouvrit le corps en bois et s'essuya les mains recouvertes de peinture. « Entrez. » S'agissait-il de Rosette ou de Placide ? S'ils découvraient l'effigie de la rousse, le brun n'aurait qu'à prétendre à une offre de paix, un peu maladroite mais crédible venant de quelqu'un qui avait été reculé du monde et des convenances sociales. Le fils de Garance ne s'était pas attendu à rencontrer le chef des armées. La surprise marqua légèrement ses traits mais il la chassa si rapidement que le fantôme de ses émotions ressembla à un simple mirage. « Ma Mère cherche-t-elle à me voir ? » demanda-t-il, un sourire se peignant sur ses traits. « Dans ce cas je vous suis. » Il aurait aimé qu'elle vint le trouver directement mais la blonde faisait confiance à son subordonné. Il était le meilleur combattant et assurerait sa sécurité à merveille. C'était sans doute la raison pour laquelle elle l'avait dépêché à sa place. « Le conseil s'est bien déroulé ? » questionna-t-il, trop curieux pour attendre que sa mère ne lui donne les réponses de vive voix.

Sans voir le piège dans lequel il s'engouffrait, il suivit son ravisseur. Le voile de l'obscurité s'abattit avant qu'il n'ait le temps d'en prendre peur.
891 mots sans les paroles de Placide.
Childéric peut faire ce qu'il veut pendant le trajet. On dira que c'est le mauvais charma de Déodatus. 8D



Merci Kyky  nastae
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