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 [Q] - Sous les tournesols | Priam

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Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~

~ Orisha ~ Niveau I ~
◈ Parchemins usagés : 2292
◈ YinYanisé(e) le : 24/05/2014
◈ Activité : Horticultrice
Latone
Sam 01 Jan 2022, 11:34



Partenaire : Priam
Intrigue/Objectif : Réprouvés et Marcheurs reprennent leur train de vie suite au siège d'Arcadia, plus ou moins main dans la main

~~~

Les insectes chanteurs accompagnèrent le fracas de la roue sur la terre. Juste sous son nez, une sauterelle passa, évitant avec vivacité et grâce ses genoux. Latone se pencha en avant de son perchoir afin de suivre la trace cet intrus, mais se redressa bien vite lorsque la caravane heurta un plus gros caillou. Elle consolida la bonne tenue de son grand chapeau de paille vissé sur sa tête, de peur de le laisser échapper. C'était la première fois qu'elle en portait et le trouvait fort utile en ces contrées ensoleillées, de même pour cette robe aussi longue qu'aérienne. Finalement, à bien y regarder, c'étaient plutôt eux les intrus.

Leur véhicule qui ferait davantage office de roulotte commerciale suivit les champs lumineux de Bouton d'Or. Ils venaient à peine d'entrer en territoire Réprouvé, et sûrement pas le plus sympathique de tous. Latone n'écouta qu'à moitié les rappels de sa collègue, Charras, préférant tout bonnement admirer les innombrables soleils prenant racine sur ces terres fertiles. Selon leur guide touristique attitré, ces fleurs s'appelaient "tournesols", et la Bleue commençait à comprendre pourquoi : à la fois hypnotisée et l'esprit réchauffé par la danse cyclique de ces beautés. Trop habituée à la flore montagnarde, la moindre dissonance avec ses hauteurs enneigées risquait de la distraire pour encore beaucoup de temps. Malgré tout, ces Marcheurs ne se présentaient pas chez les Bipolaires pour le ravissement de leurs mirettes : ce voyage revêtait avant tout des intérêts commerciaux. Charras, étant une Réprouvée, leur servait de ticket d'entrée, même si elle avait toujours rechigné à l'idée de révéler sa terre natale. Au moins avec elle, le dialecte ne serait pas un problème. Les autres ennuis, en revanche, seraient un autre hasard. L'Orisha jeta un œil à leurs cargaisons : la dernière fois qu'elle avait négocié avec les Réprouvés de Bouton d'Or, ceux-ci refusèrent catégoriquement de lui acheter ses poires. Uniquement à cause du nom. Cette fois, les étiquettes des paniers et bouteilles désignaient ses créations comme des "Jens", et non plus des engeances de l'antique Empereur Noir. Têtue comme elle était, Latone avait mis du temps – beaucoup de temps – à accepter de faire une exception pour les Anges Démoniaques. Entre autres, elle considérait que c'était une atteinte à son savoir-faire, que cela dénaturait le caractère sacré et unique de son jardin, et cetera. Au moins avait-elle fini par se convaincre que tant que l'argent était allongé, le reste n'avait plus grande importance.

Lorsque la caravane s'arrêta, Latone avait déjà observé les quelques maisons sur leur passage. Elles étaient rustiques et lui rappelèrent certains établissements de Ciel-Ouvert. Dans un sens, les Réprouvés lui remémoraient les Marcheurs, à leur attitude taciturne et travailleur. Ce village de Bouton d'Or leur tendait donc enfin les bras ; façon de parler. Elle descendit de l'arrière et rejoignit sa collègue Hurabis à l'avant. Elle capta la curiosité de certains badauds, à la vue du yack.

" Il fait chaud ici. " Sous le zénith. Pas autant qu'à Utopia, fort heureusement.

" Tant que tu te couvres la tête, tu ne devrais pas choper une insolation. La Réprouvée termina d'alléger le poids de leur bête de compagnie et lui offrit quelques récompenses pour ce dur labeur, sous la forme de nourritures ou de câlins. Latone, vraiment. Elle la prit à part, l'invitant silencieusement à installer leur étal. C'est saoulant, je sais, mais les Réprouvés n'aiment pas les étrangers, surtout ici. Tant que tu restes avec moi et que tu me laisses parler, tout devrait bien se passer. "

" J'aurais aimé amener mes fleuristes. Ou… une certaine amie. Elle pensait à Clo, la Fae de la roulotte. Même Cicataz, je me serais faite violence ; c'est grâce à elle que j'ai pu commercer avec eux. " Elles dégagèrent une partie du tissu enveloppant la caravane, afin d'ouvrir le comptoir.

" Oui, oui, mais faire affaires avec les Réprouvés chez nous, ce n'est pas comme faire affaires chez eux. Elle jeta un œil aux alentours, repérant déjà quelques regards noirs. Et crois-moi, tu vas vite t'en rendre compte. "

" Je ne vais pas me taire, tu le sais très bien. "

" C'est pourquoi je t'accompagne, et que j'ai mon arme. "

En soi, cela prenait des allures de mission suicide. De par sa nature, Charras ne connaissait pas les risques, elle savait juste que la Kirzor était encore affectée par son combat avec le Duc d'Arcadia et que la perdre ici-même serait d'une stupidité absolue. Malgré tout, Latone avait insisté pour initier ce voyage, pour à la fois se changer les idées, se ressourcer, et faire florir ses affaires grandissantes. Son appropriation des biens de l'Ordre d'Hébé fut un élan colossal vers sa richesse. Puis… elle avait un instinct, une sorte de prémonition qui lui intimait de se rendre à Bouton d'Or, tôt ou tard. Pourquoi ? Elle le découvrira peut-être bientôt. Dans tous les cas, elle ne reviendra pas les mains vides, et conservera la tête sur les épaules.

Au bout de plusieurs minutes de préparations, sans d'encombre primaire, les Marcheuses terminèrent de dresser le stand. Elles mirent en avant plusieurs kilos de Jens, des potions à base de jus de ces poires, et plus rarement quelques fleurs que Latone avait tiré de son jardin divin. Telle une gérante avisée, l'Orisha demeura plutôt en retrait et laissa le loisir à Charras d'établir le contact client. Bizarrement, la Réprouvée semblait avoir la main et le verbe experts, même si l'Aäsho ne comprenait un traître mot à leur Zul'Dov. De toute façon, la Bleue était perdue dans ses pensées : apparemment, il y avait non la ferme des Belegad. Elle s'était répétée plusieurs fois ce nom. Belegad, Belegad, Belegad. Il y avait comme qui dirait un air de déjà entendu.

" Oh, vous foutez quoi sur notre route ? " Le nouveau venu, un vieillard bien baraqué – Latone s'était faite à l'idée qu'ils l'étaient tous – se fraya un chemin entre les rares curieux. Hélas pour elle, il s'exprimait dans sa langue natale.

" Salut, on vend des produits de Ciel-Ouvert. Sûre que cela ne suffirait pas à l'amadouer, la Hurabis enchaîna aussitôt : Tu connais Ghendell et Tyetvold ? Ils ont acheté chez nous, des jus fortifiants. "

" J'en ai rien à carrer. Allez vendre votre merde ailleurs. Il leva le bras. Vous êtes en plein milieu du chemin ! On fait passer des troupeaux de Bicornes par ici ! "

" Tu exagères, mon gars, on est bien rangé sur le côté. Au moins quatre bêtes peuvent passer côte à côte. "

Belegad, Belegad… Bon, ils commençaient vraiment à être bruyants. Allaient-ils se battre ? Latone ne pouvait décemment pas tenir en place : personne n'allait risquer de casser sa marchandise, sa très belle et magnifique production. Elle se releva, s'avança un brin, jetant un regard assassin au fouteur de troubles, sa taille remarquable le prit au dépourvu.

" Oh… Il la désigna du doigt, troquant sa langue natale pour un commun pantois. T'pas R'prouvée toi ! "

Celui-là ne lui provoquait aucune crainte, mais son initiative lui fit revêtir les apparats d'un lanceur d'alerte. D'autres rustres demeurés en retrait finissaient par se rassembler pour soutenir physiquement leur gueulard. Ils se contentaient de croiser les bras et de fixer d'une œillade acérée leur nouvelle proie. Les interrogations à son encontre fusaient, son identité réclamée à juste titre, avant que le capharnaüm sonore finît par emporter tout sens commun et ne laissant aux Marcheuses aucune chance de répliquer. Charras laissa planer un air perplexe sur son faciès ; à quoi bon lutter, devait-elle se convaincre. Quant à Latone, tue depuis le début, elle releva d'un pan son chapeau. Au grand dam de sa camarade, elle avait au moins retenu une injure de son peuple. Ainsi une règle d'or : connaître les meilleures répliques cinglantes en terres inconnues.

" Naak io kulaas. (Mange mes fesses.) "

Dentures et phalanges émirent leurs grinçantes introductions, initiatrices, peut-être, d'une bagarre inévitable.


1359 mots ~



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Priam et Laëth
~ Ange ~ Niveau III ~

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◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam et Laëth
Lun 31 Jan 2022, 21:57




Sous les tournesols

En duo | Latone & Priam


RP précédent : L’engrenage.


« Piam ! Piam ! » L’enfant souriait de toutes ses dents en agitant une fleur jaune sous le nez de l’Ange. « Piam ! » Il l’attrapa et la posa sur ses épaules. « Bicor ! Bicor ! » Le brun se pencha un petit peu, rentra sa tête dans ses épaules et mima les cornes de l’animal grâce à ses index. Le rire d’Yngvild résonna au-dessus de sa tête. « Encor ! Encor ! » s’exclama-t-elle en secouant sa fleur de millepertuis comme s’il s’était agi d’une épée. Il recommença, en y ajoutant un son caractéristique des grands bovidés. La petite fille rugit de joie. Ils jouèrent ainsi un moment, comme un frère et une sœur. Des décennies les séparaient, des kilomètres aussi, et, plus encore que le temps ou l’espace, leurs natures et leurs peuples. Priam avait choisi les Anges. Plus précisément, il avait choisi Laëth, parce qu’il pensait qu’elle était celle qui aurait le plus besoin de lui. Quand il voyait Dastan et Yngvild, il songeait, avec un pincement au cœur, qu’il avait pris la bonne décision. Ses parents avaient finalement la descendance qu’ils avaient toujours rêvé d’éduquer. Le garçon s’étoffait et grandissait de jour en jour : le visage poupon auquel Priam s’était habitué laissait peu à peu place à des traits plus secs. Quelques poils lui chatouillaient le menton et le torse, quand son pubis portait déjà l’étoffe des hommes. Son caractère s’affirmait et tourmentait Asha et Vrael. Il voulait partir pour Gona’Halv, mais les troupes ayant été rappelées, aucun navire n’avait pris la mer. Il réclamait le droit de participer à la guerre et arguait que si on ne le lui donnait pas, alors il se l’octroierait. Parfois, il arpentait la côte d’un pas rageur et jetait à l’océan des poignées de sable que le vent dérobait. La fille avait la tranquillité agitée des enfants : elle ne se préoccupait pas de la bataille à venir mais menait ses propres combats – nuits sans sommeil, heures saturées de hurlements, hyperactivité infatigable. Les parents persévéraient dans leur travail aux champs, malgré l’appel du sang. Ils s’entraînaient, tard le soir, quand l’éclat du fer, des cris et des rires résonnaient à travers la contrée dorée, juste avant de s’évanouir dans les vapeurs âpres de la bière. Priam les observait et s’imaginait le pire, malgré lui. Peut-être que demain, ce monde de haine et d’amour n’existerait plus.

Laëth était rentrée aux Jardins. Elle ne pouvait pas se permettre de disparaître trop longtemps : le devoir la rappelait souvent. Il pouvait travailler à distance ; c’était plus complexe pour elle. Il pensait aussi qu’elle avait besoin de temps seule. Par rapport à Yngvild, peut-être ; et surtout par rapport à Kaahl. Ses propres sentiments à l’égard du Magicien étaient très nets, mais il n’ignorait pas que sa sœur devait vivre un enfer. Il lui avait dit de laisser tomber, de se préserver, de s’aimer elle au lieu de déverser des amours irrationnelles à qui ne savait pas les recevoir, mais il savait qu’elle n’y parviendrait peut-être pas. Elle vivait une colère que ravivait chacune de ses plaies ; pourtant, peut-être qu’elle lui ouvrirait les bras. On ne leur avait pas appris à se défaire de ceux qui maltraitent. On leur avait appris que l’amour a ses violences que la raison tolère. Il espérait que, s’il tentait de s’excuser ou de se rattraper, elle le repousserait, mais au fond de lui, il savait. Ici comme ailleurs, il n’y avait pas d’amour sans haine. « Allez, dompteuse de bicornes, il est grand temps que je te ramène à tes parents. »

Sur le chemin du retour, il enfila la bague. Il essayait de la mettre régulièrement, afin de s’habituer à l’état dans lequel elle le plongeait. Tandis qu’il sentait s’insinuer en lui les velléités du Réprouvé, il se dit que, peut-être, il aurait dû la jeter. Il y pensait régulièrement. Il ne s’y résolvait jamais. Comme il se dirigeait vers sa ferme, il fut alerté par des bruits de combat qui n’avaient rien à voir avec ceux des entraînements. Intrigué, le Manichéen prit son envol et se dirigea vers le lieu de la rixe. En bordure de la route, une caravane assistait avec impuissance à la bataille acharnée de ses propriétaires contre une bande de Bipolaires. Depuis les hauteurs, Priam les détailla quelques secondes. L’éclair bleu qui déchira sa rétine lui parut familier, puis retrouva la fraîcheur des choses nouvelles. Il n’hésita pas : il descendit vers le sol. Sans ménagement, il attrapa par l’épaule le Réprouvé le plus proche de lui et le retourna, pour lui demander en Zul’Dov : « Azdor. Vous faites quoi ? » Le concerné lui décocha un regard noir. « Toi, tu fais quoi, putain d’Ange ? Tu veux te battre ? » Le brun fronça les sourcils et une grimace agacée dévoila ses dents. Le Réprouvé aimait encore moins que l’Ange être ramené à sa nature véritable, comme si cela remettait en cause l’existence de cette autre essence. « Je voudrais pas te faire mal. » Il le saisit plus fermement par le col, de sorte à rendre sa respiration difficile. « T’es la raison pour laquelle si peu « d’étrangers » se joignent à notre cause ? » La raison principale tenait en quelques mots : l’appel n’avait été lancé que deux jours plus tôt. « On n’a pas besoin d’eux, et ça se trouve, ce sont des espions ! Et elles nous ont insultés, sur nos terres ! » Le regard doré de Priam coula sur les deux femmes, sans omettre de s’attarder sur leurs formes. Il en reconnut une des deux, malgré le chapeau et la robe. Latone. C’était pour cela qu’elle lui disait quelque chose : plusieurs chansons célébraient sa victoire contre le Duc d’Arcadia. Cela, et autre chose, peut-être. Elle réveillait en lui des pulsions que l’Ange essayait trop souvent de faire taire. « Elles ont dit quoi ? » - « Mange mes fesses. » Un sourire amusé et provocateur courba les lèvres du Manichéen. « T’aurais dû dire que t’étais d’accord. » Il le lâcha. « C’est pas des espionnes. Leur caravane porte les couleurs de la Marche Terne. » Comme son interlocuteur ne réagissait pas, il insista : « C’est eux qu’on a aidés, pendant le siège d’Arcadia, abruti. » - « Je sais bien ! » rétorqua l’autre, piqué au vif. « On aurait mieux fait de les laisser dans leur merde ! » Le faux Réprouvé se contenta de le regarder, et l’autre marmonna quelque chose. Il se tourna vers les deux Marcheuses et leur yack. Il s’adressa à elles en langage commun. « Vous faites quoi ici ? Vous vendez vos potions de Sorcières ou vous ramenez vos culs pour la bataille ? » Il s’approcha d’elles. « Ou vous comptez vraiment nous servir vos fesses ? » Le sourire amusé revint, taquin. Dans la poche de son pantalon, trois millepertuis reflétaient le soleil.



Message I – 1162 mots




[Q] - Sous les tournesols | Priam 1628 :


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Latone
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Latone
Sam 12 Fév 2022, 00:25



Un sourire fou fleurit. Malgré le chapeau de paille, il était largement possible à cet inconscient de croiser les yeux injectés de Latone. De quoi ? Pas de sang, mais plutôt de l'appel du sang. Elle-même ne comprenait guère comment une telle véhémence pouvait animer les fibres de son nouveau corps, tant son antique Esprit avait été comme canalisé. En tant que Hozro, elle fut si ingérable, si inhumaine. Et pourtant, parfois, cette folie caractéristique refaisait surface, notamment lorsqu'elle se sentait perdre pied sur cette Vie offerte par la Mort elle-même. L'usurpatrice de Ciel-Ouvert y avait goûté, instillant les graines d'une fureur sans pareille ; le Duc d'Arcadia aussi, lorsqu'il l'enserra dos au mur. Alors, ce fut le tour de ce Réprouvé. Franchement, il n'y avait pas besoin de penser en tant que Marcheuse, encore moins en tant que cheffe. Si elle voulait lui rétamer la face, pourquoi se retenir ? Étant donné la cacophonie naissante – et le sérieux mal de crâne que le troupeau lui infligeait – cette solution se profilait seule. L'environnement y jouait beaucoup, la situation tout autant, mais surtout cette envie soudaine, cette trop longue convalescence depuis l'adrénaline à Arcadia. Au diable ses Sereëkim, au feu les principes ! En tant que l'Éclat, une bonne baston ne se ratait pas. Son sourire s'agrandit encore au soupire de Charras…

Jusqu'au passage d'un nuage, assez grand pour ombrager, fugace, sa vision. Piquée à vif, ses iris vairons suivirent de peu la trajectoire du fameux cumulus, son atterrissage trahissant sa nature somme toute angélique. La tension de ses muscles redescendit aussitôt, le temps de digérer l'intrusion et de comprendre la raison de son intervention. Même si l'Orisha ne comprenait un traître mot de leur baragouin, son attention se fit happée par la silhouette du nouveau venu. Il lui était familier, c'était une certitude. Latone n'avait peut-être pas une si bonne mémoire des noms et notions, mais pour ce qui était des visages, des couleurs, tout s'imbriquait dans son crâne avec aisance. D'instinct, un frisson la prit de court et l'obligea à se tenir ainsi, silencieuse et passive, le temps de comprendre pourquoi ce dîner l'avait tant marqué. Celui-ci fut chaotique, bruyant, avec une multitude de surnoms plus ridicules les uns que les autres. Guimauve, y fut son identité, sentence lyrique sur une toute petite carte innocente.

Et lui, c'était Doudou.

La Kirzor cligna des yeux, aussi déstabilisée par l'apparente rhétorique du Bipolaire que par ses propres souvenances. Il lui était à la fois familier et étranger. Finalement, elle ne l'avait croisé que par concours de circonstances et sans véritable attache avec leur réalité, deux fois de suite. D'abord à ce dit dîner, où l'Ange s'était présenté avec son amie Réprouvée, avant de s'évanouir tout bonnement avec le soudain départ de la blonde. Et… Attendez, comment ça "deux fois" ? Ses sourcils se froncèrent et leurs regards se croisèrent enfin. Il avait l'air moins lumineux que cette fois-là, mais c'était bien lui. Elle ne s'offensa pas de son inspection plus ou moins indécente – après avoir écrasé sa propre dignité autour d'une barre à Sequela, cela n'avait plus d'importance – mais elle avoua ne pas s'y être attendu. Bizarrement, Charras souriait et balançait sa tête, le regard en biais. Latone ne l'avait jamais vu ainsi ; avait-il dit quelque chose de si amusant pour arracher un tel enthousiasme à la taciturne ?

" Quoi ? Qu'est-ce qui te fait rire ? Sans réponse, elle lui agrippa l'épaule pour la secouer. Qu'est-ce qu'ils disent ?! "

Avant que son caprice eût le loisir d'insister, cette connaissance leur accorda enfin quelques palabres en langue commune. Latone libéra sa collègue de son courroux et répondit du tac au tac aux pitreries du Réprouvé. Il s'avérait être un catalyseur adéquat pour le caractère explosif de l'Éclat. Son index fila vers lui, en outre dirigé vers sa partie basse.

" Et pourquoi pas offrir les tiennes, ô notre sauveur ? " Ironisa-t-elle sur le même ton. D'ordinaire, elle ne se serait pas laissé tenter par une telle réplique, mais son instinct la possédait.

Au même moment, les rémanences de l'Ægeri s'embrasèrent au plus profond de son derme. Il n'attisa point assez son corps pour faire réagir sa psyché, puisque la réaction semblait lente et, pour le moment, négligeable. En revanche, le phénomène déchaînait ses Sereëkim d'une énergie nouvelle, leurs afflictions les empêchant de lutter contre cette montée du Désir. Ainsi, lorsque Latone avait fait mention des fesses de Priam, l'un de ses bras invisibles s'entortilla jusqu'au postérieur du natif pour l'agripper, le relâchant au moindre mouvement. La Marcheuse ne s'en était même pas rendue compte, soudainement intriguée par un détail en particulier.

" Mais… "la bataille" ? " Répéta-t-elle, confuse, avant de reporter son regard sur sa camarade.

" Hmm… Charras croisait les bras, recluse. Les Réprouvés s'en vont en guerre contre les Sorciers. "

Elle écarquilla des yeux, stupéfaite. Comment avait-elle pu passer à côté d'une telle information ? Était-ce récent ? Malgré tout, étant donné l'attitude de la Guide, il semblerait que l'histoire était bien plus compliquée que cela, surtout lorsqu'on ne savait presque rien de la Réprouvée.

" Alors… Ce n'est pas que j'ai eu ma dose à Arcadia, mais… La Kehaä s'en retourna vers l'attroupement. Enfin, je ne suis pas une Sorcière, bon sang ! Et je ne vends pas des potions, mais des jus de fruits ! Et juste des fruits ! … Et des fleurs ! "

L'un des Bipolaires s'énerva qu'elle eût mentionné des potions tout à l'heure, elle fit comme si de rien n'était. À défaut de pouvoir lui en coller une.

" Vous parliez d'Arcadia ? Elle était assez certaine d'avoir distingué le nom dans le miasme du Zul'Dov. Vous y étiez, vous ? Au fond, elle eut un malin plaisir à imaginer ce guerrier en particulier sur le champ-de-bataille qu'elle avait dressé. Si vous aviez fait ami-ami et charger main dans la main avec les Sorciers, pourquoi se retourner contre eux maintenant ? Vous n'assumez pas votre courte et intense idylle ? "

" Latone… "

Sourire amusé, sourire taquin. L'inconscience n'avait pas de limite lorsque nous ouvrions à peine les yeux sur ce monde de dingues.


1085 mots ~



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Priam et Laëth
Dim 13 Fév 2022, 23:20




Sous les tournesols

En duo | Latone & Priam



Comme il relevait les yeux après les avoir baissés sur son entrejambe, suivant l’index de la Bleue, le sourire de Priam s’agrandit. « Je dirais que ça se négocie, mais ça coûte cher. Les fesses d’Ange, c’est précieux. » s’amusa-t-il en s’approchant encore des deux femmes, curieux. Il avait déjà fait des rêves plus réalistes qu’ils n’auraient dû l’être. Il avait déjà songé aux courbes de la vie et du corps d’Aliénor, à des fantaisies vampiriques avec Kagamiko, à des rituels impossibles avec Za. Et il y avait celui-ci, avec une fille aux cheveux bleus, une fille qui avait su répondre à un Sorcier avec la fougue d’une Réprouvée et le tact d’un bicorne. Il se souvenait d’un repas parmi les fleurs et les champs, du goût d’un gâteau et de celui de ses lèvres. Plus il la regardait, plus il sentait monter en lui un désir à assouvir. Néanmoins, quand il sentit quelque chose lui toucher les fesses, il sursauta de surprise et se retourna vivement. Il n’y avait rien. Les sourcils froncés, il pivota à nouveau vers les deux femmes, mais elles agissaient comme si de rien n’était. Il regarda ses compagnons. Aucun n’avait bougé. Ce contact incongru n’était-il que le fruit de son imagination ? Avait-il tant pensé à cette drôle de rêverie qu’elle s’était invitée dans la réalité ? L’esprit a parfois sur le corps des pouvoirs insoupçonnés. Pourtant, il était à peu près certain d’avoir senti une main.

Demeurant sur ses gardes, il se reconcentra cependant sur cette histoire de guerre. Elle approchait, à pas de loups, la gueule ouverte. Ils s’apprêtaient à tous s’y jeter avec la plus grande joie du monde et la plus folle inconscience. Il sourit. C’était amusant de se rendre compte jusqu’où l’orgueil et la haine pouvaient mener. Finalement, ce n’était ni la raison ni les lois qui régissaient le monde ; juste un petit paquet d’émotions bien dosées. « Je me porte garant. » dit-il en Zul’Dov, à l’intention des Réprouvés. « Si elles causent des problèmes, c’est avec moi qu’il faudra voir. Je dédommagerai, si besoin. » Il avait parlé avec aplomb. Les Manichéens le regardèrent. Certains grognaient, d’autres approuvaient. Son travail en diplomatie lui avait permis d’acquérir une assurance certaine. Il s’apprêtait à ajouter quelque chose, lorsque la jeune femme reprit la parole. Il tourna la tête vers elle. « Oui, j’y étais. » répondit-il, cette fois-ci en langage commun. Il ne se rappelait pas grand-chose, mais il avait participé. Sa blessure avait si bien amenuisé ses forces qu’elle semblait l’avoir privé de la plupart de ses souvenirs liés aux combats.

L’offense lui fit esquisser un rictus, tandis qu’elle ne provoquait chez ses pairs qu’un silence attentif. « Qu’est-ce qu’elle a dit ? » demanda Azdor. « Elle a parlé des Sorciers, non ? » - « Elle a dit que… Elle a dit qu’ils avaient été vraiment mauvais à Arcadia, et que si on avait besoin de son aide pour leur botter le cul, elle serait ravie de nous aider. » Le Réprouvé dévisagea la jeune femme, les yeux plissés. « C’est vrai, ça ? » - « Puisque je te le dis. » - « Hum. » Priam reporta son attention sur la femme aux yeux bicolores. Elle avait de la chance que pas un n’eût compris un mot de ce qu’elle venait de prononcer. Et de la chance d’être tombée sur lui. « Vous pouvez retourner travailler si vous voulez, je verrai avec elles comment elles comptent aider. » Dans le regard d’Azdor, il vit qu’il s’apprêtait à refuser son offre, mais se ravisa. « Y’a bien qu’un Ange qu’a du temps à perdre comme ça avant la guerre. » cracha-t-il avant de se détourner. La plupart des autres lui emboîtèrent le pas. Les plus curieux s’approchèrent du stand des deux femmes.

Le faux Réprouvé revint vers l’éclair bleu. « Je viens de te sauver la vie, alors j’espère que tu me le revaudras. » lui lança-t-il avec un sourire. « Pendant la bataille, Val’Aimé Taiji a tué Shezira Ossana, la Thur de Sceptelinôst. » Un rictus mauvais remplaça son sourire. « Les Sorciers ont laissé croire à tous que c’était un accident, mais ce n’est pas le cas. Pas grand-chose à faire quand c’est parole contre parole. » Il aurait fallu clamer la vérité dès le départ. « Et les Réprouvés étant ce qu’ils sont… » Une lueur de malice passa dans ses yeux. Pourtant, elle côtoyait des volutes de tristesse. « L’honneur ne peut être lavé que par le sang de l’ennemi. » C’était un peu plus compliqué. Il y avait des siècles de haine. Lumnaar’Yuvon brûlée. Des cultures opposées. Tout. « Mais bon, je ne doute pas que grâce à ton aide, ils s’en sortiront sans problème. » Il sourit, taquin. « Je leur ai dit que c’était ce que tu proposais, quand tu les as insultés. J’espère que tu as une idée sur la nature de l’aide que tu peux apporter, sinon tu risques de finir crevée sur le champ de bataille, ou la tête au bout d’une pique. » Ce n’était pas au bout d’une pique qu’il avait envie de mettre sa tête, lui.



Message II – 865 mots




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Latone
Dim 20 Fév 2022, 12:51



Ni l'une, ni l'autre Marcheuse ne pouvait omettre le charisme inhérent du conciliant Bipolaire. Même si son entourage conservait une certaine hargne renflouée, ils l'écoutaient systématiquement et prenaient, malgré eux, en compte ses dires. Un leader. Latone l'observait faire, sa carrure et son attitude, ses mimiques et le contrôle de ses expressions. Durant ses propres moments éclatants, elle n'avait plus l'occasion de dissocier son Esprit afin d'étudier son Corps. Se montrait-elle aussi assurée ? Quel type de sourire illuminait son visage, quel éclat scintillait au sein de ses prunelles ? Avec du recul, la tournure de son discours était-elle correcte ? Un miroir lui faisait tant défaut. Voir cet homme agir de la sorte lui faisait prendre conscience de l'importance de cette image, de ce message que nous transmettions durant ces terribles épreuves. Briller, ce n'était pas juste se tenir au centre de la lumière : c'était l'user avec brio, sublimer son aura. La Kirzor prendrait bien des cours avec lui, les Anges devaient s'y connaître en galvanisation ; seulement, elle n'était pas bien sûre de se contenter que de ça avec lui. Ses idées s'embrouillaient, pénibles.

Pendant ce temps, Charras s'avérait plutôt désemparée, même si elle conserva une certaine réclusion. Elle savait bien que partout où irait la Hurabis Bleutée, les événements finiront forcément par déraper. Mais cela lui était d'autant plus agaçant lorsqu'il était question de son propre peuple. Avec eux, ils se catalyseront mutuellement jusqu'à exploser, puisque ni l'une, ni eux ne courberont l'échine avant de faire parler les poings. Puis, cet homme confirmait les avoir aidés lors du siège, l'ingratitude de Latone commençait franchement à l'emmerder. Au moins, le fameux guerrier fit contourner le courant pour le lui renvoyer à la face. Avec une certaine malice non dissimulée, la Réprouvée le laissa faire et s'avéra très curieuse de la réaction de la Marcheuse. D'ici-là, elle s'en retourna auprès de l'étal, afin d'aiguiller ses camarades d'antan sur les produits. Elle ne se gêna pas pour donner quelques échantillons gratuitement, les caressant alors dans le sens du poil. C'était au moins ce qu'elle savait faire de mieux avec les Bipolaires.

" Quoi ? Ça ? Dit-elle en désignant ses plus hargneux paysans. Ce n'était franchement rien. " Elle aurait pu les gérer sans suer, mais elle n'avait encore pas conscience du pétrin qui l'attendait.

Latone fit moins le paon lorsque, d'une part, il lui conta la bavure des Sorciers, et d'autre part… Nous y reviendrons plus tard. Pour commencer, l'évocation de Val'Aimé lui rappela une nouvelle fois ce dîner infâme. Même si elle ne l'avait entraperçu que de loin, son instinct lui imprimait la menace dans les fibres de son esprit. Ce type n'était pas qu'un simple Sorcier ; et après coup, il ne déméritait pas son titre de Chancelier. Mais de là à insulter tous ses propres efforts avec un tel audace… Latone vit rouge. Même si elle n'assimilait pas le terme de "Thur", un meurtre restait un meurtre. Intolérable.

" Tu ne rigoles pas. En fait, c'était bien trop sérieux pour être une fausse excuse. Tu es en train de me dire – elle s'avança d'un pas, visiblement hostile – que ce connard a osé assassiner l'une de nos alliés pendant MON siège ?! Autrefois, elle aurait fait virevolter des éclairs partout autour d'elle. Et personne ne m'a mise au courant ?! Elle se tourna vers Charras, celle-ci haussant les épaules avec nonchalance. La Bleue serra les dents, l'œil fou sur ses propres paumes en proie à de légers spasmes. Je le savais ! Je le savais qu'on aurait dû en profiter pour les éclater au passage, le Duc était entre mes mains, tous les Marcheurs à la citadelle auraient pu se retourner contre eux, dès que nous aurions chargé, les Réprouvés auraient suivi notre initiative, et nous n'en aurions fait qu'une putain de bouchée ! " Sa Voix s'emballa.

Aussitôt, l'Orisha prit une grande inspiration, afin de contenir un potentiel dérapement de son Velthar. Déjà que les natifs de Bouton d'Or ne toléraient guère sa présence, créer un nouvel accident risquait d'attiser d'autant plus leur soif de guerre. Latone se fit alors violence pour stabiliser sa respiration et apaiser cette éruption de colère. À vrai dire, même si elle ne portait pas les Sorciers dans son cœur, c'étaient surtout les Mayfair qui titillaient son courroux. Cependant, avec cet assassinat, ils venaient tous de mettre un pied dans son cimetière, prêt à être renfloué de cadavres. Pour commencer, Val'Aimé sera son premier trophée.

L'autre part maintenant. Même si sa rage diluée avait démontré sa détermination, la corde que venait de lui mettre l'Ange autour du cou la surprit. Elle garda les yeux écarquillés, le temps d'analyser ce qu'il venait de lui mettre sous le pif. Et pour une fois, ce qu'il lui exhibait, ce n'était pas bien agréable à l'œil.

" T'es sérieux ?! Mais t'es un enfoiré en fait ! Elle le repoussa d'une main, le bref contact eut comme un effet ardent pour elle. Elle raccourcit aussitôt la distance créée, à tout moment tentée de lui donner un coup de boule. Je ne peux pas entraîner la Marche comme ça ! Toute façon, ils ne voudront sûrement pas, ce n'est pas notre guerre, vous ne nous aviez pas appelés et on a d'autres problèmes à régler ! Étant donné le sourire mutin du faux Réprouvé, elle se doutait bien qu'il n'était pas forcément question des Marcheurs, mais plutôt de son cas à elle. Elle grogna, sa poigne resserrée sur son chapeau, entre deux eaux : le frapper plusieurs fois pour se défouler ou ronger son frein. Si on me voit là-bas, tout le monde va péter un câble. Et contrairement à ce que tu insinues, aucun Sorcier ne m'enverra dans les bras de la Mort : moi seule en décidera. Elle lui avait déjà dit ces mots, au cours de leurs retrouvailles fantasmagoriques. Cette impression de déjà-vu la piquait à vif, même si c'était bien de rester en phase avec ses idées. Raaah, allez quoi, sors-moi de ce pétrin, je… Elle ferma les yeux, dégoûtée de se rabaisser à ça. Je te dédommagerai en échange. Elle voulut émettre son identité en rouvrant les yeux, à la fois déterminés, irrités, et aussi décontenancés. Si je me souviens bien, ton nom… Priam, c'est ça ? " Ils avaient eu l'occasion de les échanger lors du dîner incongru, mais elle avait surtout eu le loisir de l'expirer plusieurs fois aux tréfonds oniriques.


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Priam et Laëth
Sam 26 Fév 2022, 21:25




Sous les tournesols

En duo | Latone & Priam



Le Réprouvé le rendait plus sûr de lui. S’il n’avait été que lui-même, il n’aurait sans doute pas osé s’imposer de cette façon. Il aurait avancé à tâtons, peu désireux de provoquer le courroux des Bipolaires, incertain quant à ses prérogatives. Il était né ici, il avait gagné le Naakar’Lus, il avait participé à l’Odon do Dur, il retapait et réaménageait une ferme, il participait à l’économie locale, il aidait à l’effort de guerre ; mais il était parti, il s’illustrait en diplomatie pour le compte des Anges, sa sœur portait les armes angéliques, et il n’essayait pas d’empêcher son idylle avec un Mage Blanc. Plus tard, lorsque suffisamment d’étrangers viendraient aider, les Réprouvés apprendraient même qu’il fréquentait une Magicienne dont on le disait amoureux. Ils ne sauraient pas qu’il l’avait épousée. Il ne fallait pas qu’ils le sussent. Ni eux, ni le reste du monde. Ils ne seraient sans doute pas les seuls à vouloir le tuer. Elias Salvatore lui avait proposé de vivre avec elle son amour secret, pas de la marier. Quand le Manichéen qui enveloppait son essence angélique songeait à cette discussion avec l’Empereur, il fustigeait l’Aile Blanche. Son refus était une bêtise. S’il avait accepté, il aurait pu prendre Aliénor de toutes les manières imaginables. Il aurait pu presser ses cuisses contre son bassin, agripper ses fesses, l’embrasser ou la mordre avec la même passion, contre une table, un mur, dans un fauteuil, sur un lit ou un tas de paille, debout ; n’importe où et comme ils leur auraient plu – ou en tout cas, comme il lui aurait plu. Il aurait pu la serrer contre lui et l’aimer, tantôt avec douceur, tantôt avec violence. Tandis qu’il scrutait Latone, les yeux céruléens d’Aliénor se perdirent dans le bleu des cheveux de la femme, et rapidement, son visage remplaça celui de la Magicienne.

Il pourrait peut-être lui proposer de participer à l’effort de guerre en lui offrant vraiment ses fesses, néanmoins, il n’était pas certain de la réussite de cette entreprise – malgré la véhémence des envies de son entrejambe. « C’est ça. » Il frotta sa mâchoire d’une main songeuse. « Les deux peuples se sont retirés discrètement. » expliqua-t-il. « Puis les Sorciers ont annoncé plus ou moins publiquement que c’était un accident, et ils ont- » Son exclamation l’interrompit. Il la dévisagea, silencieux et bien plus sérieux qu’il ne l’aurait souhaité. Même avec la mentalité réprouvée, la perspective de cette guerre ne l’amusait pas. Il était d’accord avec Laëth : ce serait un massacre. Avec les siècles, les techniques magiques avaient gagné en efficacité, tandis que les Manichéens s’étaient d’autant plus retranchés derrière leur détestation des sortilèges. Pourtant, ni leur bravoure ni leurs haches ne les sauverait des volutes noires. Une à une, elles nécroseraient leurs chairs et raviraient leurs vies. Les Mages Noirs laisseraient sans doute une poignée de survivants, simplement pour que la nouvelle de leur puissance se répandît, et que les Réprouvés n’oubliassent jamais leur cuisante défaite. Après celle-ci, songeraient-ils à faire appel à leurs dons ? Ou s’enfermeraient-ils dans leurs cités comme des souris dans des trous qu’elles croient être inaccessibles aux chats et aux rapaces ?

L’ombre d’un sourire étira ses lèvres. Latone avait les réactions typiques des personnes que tout un chacun adore embêter. La moindre pique la faisait bondir. Priam ne chercha pas à lutter contre sa poussée et recula volontiers. En fait, c’était d’autant plus amusant qu’elle s’emballait et échafaudait des discours qu’il n’avait jamais tenus. Les Marcheurs ne viendraient jamais, c’était une évidence. Dans cette guerre, les Réprouvés seraient seuls. L’aide extérieure ne les aiderait pas suffisamment. « Ah oui ? » la nargua-t-il avec un sourire défiant. La phrase le fit à peine tiquer. Elle faisait partie de ces vagues déjà-vus que l’on ne sait plus situer. « J’ai pourtant entendu dire que la Mort était très entreprenante. » S’il avait su ce qu’il disait et ce que cela signifiait, il ne l’aurait peut-être pas dit – mais il était loin de savoir que Jun Taiji était Ezechyel, qui était la Mort, qui entreprenait parfois bien des choses avec bien des gens, dont sa sœur, dans cet univers ou dans un autre. « Je sais pas si j’en ai très envie. » Son sourire s’élargit. « Oui, Latone. » Quelques années auparavant, il eut été étrange qu’elle connût son prénom. Cependant, désormais, il jouissait d’une petite réputation, qui permettait aux gens d’associer son visage à son patronyme. C’était parfois perturbant. Plus jeune, il ne s’était jamais imaginé frôler la célébrité. Il se voyait dans un champ, entouré de bêtes. Cela arrivait encore, parfois, mais le reste du temps, il rédigeait des rapports et s’entretenait avec des personnages plus ou moins éminents. Il repensa à Florance. Il lui avait dit qu’il reviendrait vers elle, après sa première visite à Arcadia. Il ne l’avait pas fait. « Je crois qu’on ne s’est jamais rencontrés. Enfin, face à face. » Un rire bref lui échappa. Ce n’était pas ce qu’il voulait sous-entendre initialement, mais effectivement, même dans le rêve, il avait plus longuement admiré son dos et la chute de ses reins que son visage. « Enchanté. Dans la mesure où je peux l’être après tout ce raffut. » Il jeta un coup d’œil à la femme qui l’accompagnait, sourit, puis la regarda à nouveau. « T’as l’air de vraiment tenir à te battre, alors je sais pas si ce serait très pertinent de te proposer d’autres façons de filer un coup de main. Sans mauvais jeu de mots, évidemment. » Il sourit encore. Il jouait à un jeu dangereux, le genre de jeux dans lesquels on pouvait vite perdre la main, justement. « Puis y’a pas à dire, ce sera une expérience enrichissante, de se faire terrasser par les Sorciers. » Il s’était légèrement incliné vers elle et avait parlé plus bas, conscient que des guerriers convaincus du bienfondé de l’opération auraient pu l’entendre. « Je vois pas qui ne voudrait pas y aller. » Il se redressa. « Je comprends bien que tu n’enverras pas la Marche, et je n’en demande pas tant. » Ses prunelles allèrent de l’une à l’autre des siennes. « Je serais ravi que tu combattes à mes côtés. » Et pas que. « Mais si tu préfères m’aider à polir et affuter de vieilles lames et à arracher quelques plantes médicinales, je ne dis pas « non » non plus. On aura bien besoin de quelques armes et de soins, si on espère tenir plus d’une seconde. » Du pouce, il indiqua le paysage, derrière lui. « Auquel cas, c’est par là. » Puis, il moulina l’air du bout de l’index pour désigner vaguement une zone devant lui. « Sinon, pour l’entraînement militaire, c’est par là-bas. T’as les bras un peu frêles, alors si tu veux te battre, tu ferais mieux de commencer tout de suite. » dit-il d’un ton neutre, comme s’il ne faisait que constater, sans arrière-pensée taquine.



Message III – 1159 mots




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Latone
Jeu 03 Mar 2022, 23:31



Ses yeux roulèrent de mécontentement à l'évocation de la Mort. Latone ne pensait pas vraiment à cette entité en particulier, davantage au concept. Bien que cette personne représentât tout un concept pour ses nerfs. Alors qu'il devrait inspirer davantage la crainte, il semblait s'être taillé une sacrée réputation, jusqu'ici. Malgré son dépit, elle se demandait si lui aussi était une connaissance d'Ezechyel. S'était-il déjà fait tourner en bourrique par le feu Empereur Noir ? L'avait-il hanté en lui envoyant à la tronche des immondices de la guerre ? Avait-il dû danser avec lui autour d'un feu cérémonial, à l'orée des corps nus et en sueur ? L'espace d'un instant, Latone se souvint du goût des lèvres de Jun, celles-ci offertes pour éveiller d'autant plus ses bas instincts de bête sauvage. L'Hozro avait beau s'être ressassée encore et encore ce singulier toucher, le froid de la Mort lui laissait un vide insatisfaisant. Cela n'était en rien comparable avec le goût de la Vie, de sa chaleur et de sa saveur. Quand elle embrassa Priam, les rémanences de la chair et du fruité l'avaient marquée. Danser avec lui autour du feu de Souw'Gar ne lui aurait pas déplu.

Son nom relevé, son sang ne fit qu'un tour. Il se souvenait d'elle et elle se souvenait de lui. Visiblement sceptique, la Bleue passa outre les pitreries de l'Ange Réprouvé pour ravaler ce malaise qu'il lui provoquait. Celui-ci se montrait d'autant plus persistant avec sa proximité, leur isolement dans cette bulle intimiste. Effectivement, ce moment pouvait représenter leurs présentations, alors qu'elle avait l'irascible impression de tout connaître de lui. Face à face, c'était bien différent. Elle secoua la tête.

" Les autres fois ne comptent pas. Enchantée. " Cette affirmation impliquait qu'il y ait eu au moins une autre rencontre à part le dîner, ce qui était tout à fait fantasmagorique.

Hmm, elle craignait qu'il fût aussi authentique que celui avec Miles. Dans un tel cas, elle ignorerait comment réagir. L'ignorance, justement, avait du bon parfois. Il plaisantait sur les Sorciers, mais elle ne trouvait pas l'humour adéquate pour suivre. Cette histoire sur Val'Aimé la tiraillait et instillait une haine aussi profonde et enracinée qu'auparavant, lorsqu'elle apprit les parjures du Duc d'Arcadia. C'était comme si sa colère envers l'injustice s'était retournée sur le Chancelier. Un à un, la Reine qu'elle était tissera son chemin jusqu'à ces pions indésirables. Ils étaient nombreux, si nombreux, mais si la folie pouvait l'arrêter, la Championne n'en serait pas là aujourd'hui. Il était de toute évidence impossible pour elle de rentrer à Ciel-Ouvert tout de suite ; Priam serait son premier point d'ancrage.

" Je ne comprends pas ton fatalisme. Même si le langage commun demeurait de mise, elle s'était prêtée à son jeu de discrétion. Tant que tu ne fais même pas encore face aux murs d'Amestris, rien ne t'oblige à partir du principe qu'ils vont gagner. " Elle se souvenait alors des remparts d'Arcadia, de ce sentiment aussi écrasant qu'énivrant.

Malgré tout, étant donné sa propre expérience de la Mort, elle pouvait bien en comprendre les tenants et aboutissants. Elle jeta une œillade en biais à Charras. La perdrait-elle aussi, ce jour-là ? Était-ce son destin, d'être engloutie par l'Ombre ? Par les Ætheri, elle n'était pas supposée se surmener à ce point avec ses Sereëkim tranchés, mais l'appel de la guerre lui paraissait si fort. Après tous ces réseaux esclavagistes, tous ces duels remportés, après un sacré Empire renversé, la Kirzor en réclamait plus. Et si les prochains étaient les Sorciers ? C'était si… alléchant. Son corps commençait déjà à s'échauffer de cette perspective, alors que – en réalité – il répondait à la présence de son compagnon onirique.

" "Frêles" ? C'était clairement insultant, même Charras se serait laissée aller à un tel commentaire ; après tout, malgré ses muscles, Latone n'atteignait guère les standards Réprouvés. Tu tiens tant que ça à les tâter pour me provoquer comme ça ? Elle contracta son biceps et l'exhiba juste sous son nez, comme pour l'inviter à tester sa solidité ; la narquoiserie dégoulinait de son sourire. Enfin, je m'occuperai de ton cas plus tard. Elle recula un brin, son attention voguant sur la direction alternative. Je vais d'abord affûter ta lame, tu en auras besoin. Sans arrière-pensée. Honnêtement, c'est le moins que je puisse faire, afin de ne pas te voir charger un Mage avec une arme émoussée. " Elle lui sourit, le genre qui trahissait une certaine appréhension.

Un signe entendu à l'autre Hurabis et la Marcheuse la laissa volontiers s'occuper de la caravane, et ainsi emboîta le pas du Belegad. En terres plus avancées, il était de bon ton de demeurer aux côtés du Réprouvé, il lui épargnera au moins d'autres maux de tête avec les locaux. Certains leur lançaient quelques regards noirs mais Latone conservait une certaine sagesse d'esprit pour laisser couler. En fait, cette hargne constamment titillée fut diluée par la compagnie de Priam. Elle se rappelait l'influence de sa magie au dîner, inhérente d'Ahena et des Vertus angéliques. Ici, cette aura lui paraissait si ténue. Elle s'en était rendue compte dès son arrivée…

Le long du sentier, ses iris vaironnes s'égarèrent un moment sur les champs de tournesols. La métaphore des innombrables soleils berça à nouveau sa poésie. Les Échos lui chantonnaient autant d'optimisme que de tristesse, alors que les serres de la guerre se resserraient sur ces contrées. Il se dessinait ici-même un charme plus enjôleur qu'à Lyscenni, puisque le fer implacable ne ternissait pas le paysage. Chaque agriculteur, chaque éleveur, chaque cueilleuse s'avéraient être un soldat, sous leurs guenilles et airs bourrus. Dans un sens, ils lui rappelaient son propre pays.

" Pourquoi vous détestez tant les étrangers ? Sans rompre le rythme de la marche, elle tourna toute son attention vers lui. Chez moi, tant que tu ne t'attires pas nos foudres, tu es bienvenu et libre de venir chez quiconque. Un pas de travers et tout le monde a le droit de te casser la gueule. " Elle avait presque le sentiment que c'était tout comme à Bouton d'Or.

L'Orisha l'observa un brin : il lui paraissait vraiment différent de la dernière fois. Le changement était inévitable, alors que les sentiments, du mieux qu'ils purent, demeurèrent intacts.

" Tu n'es pas un Ange, à la base ? Elle se souvenait de ses ailes immaculées, si agitées durant le dîner. Pourquoi t'es plus moche que d'habitude ? Elle lui tira aussitôt la langue ; c'était plus fort qu'elle : il y avait des individus dans son entourage qui méritait ses assauts. C'est vrai que tu disais venir de Bouton d'Or, j'aurais dû y penser en arrivant. Étrangement, elle s'en était bien souvenue durant le rêve ; vu qu'elle s'y était bel et bien rendue, jusqu'à chez lui, et contre lui. Tu y as toujours vécu ? Tu as genre… une ferme ? L'envie de lui montrer son jardin secret la chatouillait. Tiens, tu étais avec cette blondasse, là – je ne sais plus son nom – c'était qui, en fait ? Une amie ? Elle n'est pas morte, hein ? Jun le leur avait bien dit que tout accident autour de cette table ne menait pas à son berceau. … Elle n'est pas morte, hein ? " Cela étant, la méfiance s'avérait de rigueur vis-à-vis de l'Æther.

Alors que Priam réagissait à ses répliques, elle-même bien attentive, son vil Sereëkim revint à la charge. Avec beaucoup plus de délicatesse, il s'approcha du bras du Belegad pour l'enrouler avec une lenteur aguichante. Ses caresses non avenues servirent surtout à attirer l'homme, peu à peu, vers la jeune femme, jusqu'à que leurs épaules se frôlassent. Intriguée par le soudain contact, Latone leva un sourcil.

" Quoi… ? Elle s'était bien rendu compte de ce qui se tramait ; de ce qu'elle provoquait malgré elle. Pourtant, la Kehaä fit comme si de rien n'était. T'as peur de tomber ? "


1388 mots ~



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Priam et Laëth
Ven 25 Mar 2022, 22:49




Sous les tournesols

En duo | Latone & Priam



Priam sourit. « Je n’ai pas besoin de les tâter, je les vois très bien. J’aurais peur de les briser avec ma poigne de Réprouvé. » s’amusa-t-il, avant de croiser les bras. « Je crois que ça ne changerait pas grand-chose, tu sais. » Il n’avait pas rebondi sur son fameux fatalisme, mais n’en pensait pas moins. Les Réprouvés étaient condamnés. Ils savaient se battre, ils savaient manier des armes, ils savaient charger tête baissée. Pourtant, jamais ils ne rivaliseraient avec la technicité magique des Sorciers, et surtout pas sur leur territoire. Ça lui semblait évident. Latone pouvait faire tous les sous-entendus graveleux qu’elle voulait, ça ne changerait rien à l’impasse dans laquelle les Manichéens s’apprêtaient à s’engouffrer. Néanmoins, il ne dit rien, et tâcha simplement d’emprunter l’une des directions qu’il venait de lui indiquer. Ils traversèrent plusieurs champs, sous les regards tantôt suspicieux, tantôt haineux, tantôt curieux des Bipolaires affairés. Le brun restait concentré sur le trajet. Par instant, sa vision se floutait, lui indiquant que la bague faisait des siennes. Il avait le sentiment qu’à force de la porter, ses effets négatifs s’estompaient. Cependant, certains persistaient encore. Peut-être qu’il devrait la retirer à un moment ou à un autre.

La question de la bleue le tira de ses pensées et lui arracha un sourire. « Peut-être parce qu’on a dû casser la gueule à trop d’étrangers qui faisaient trop de pas de travers. » Ce n’était pas ça, mais ça aurait pu. « Non, je crois que c’est surtout historique. Les autres races, les Anges et les Démons en première ligne, ont mené la vie dure aux Réprouvés durant des siècles. Même si ça fait longtemps, depuis qu’ils se sont libérés de leur joug, ils restent méfiants. Certains ont dû oublier pourquoi ils devaient l’être. C’est juste que c’est comme ça qu’on nous apprend à grandir. » C’était devenu culturel. Cette période de l’histoire avait façonné une mentalité propre à la race. « Et puis comme ça, ils ont la paix. Personne ne vient mettre son nez dans leurs affaires. » Malgré son exubérance, le peuple avait ce petit côté secret, presque mystérieux. Comme si les champs d’or recelaient des trésors inestimables – c’était le cas, pour ceux qui savaient sentir et regarder.

Surpris, il jeta un coup d’œil à Latone, avant de lâcher un « hein ? » aussi étonné qu’à moitié outré. « Pfff ! » siffla-t-il dans un sourire. Si elle avait lancé cela à l’Ange, il aurait sans doute réfléchi à la réponse la plus adéquate. Il se serait demandé s’il était judicieux de la laisser comprendre la vérité ou s’il valait mieux la taire. Le Réprouvé, lui, s’en foutait. Il laissa couler, sans se départir de son rictus espiègle. Il avait des pensées bien plus légères que celles qui concernaient ces histoires de bague. « Ouais, je suis né là. Mais j’étais assez jeune quand je suis parti chez les Anges. » Il passa sous silence les détails de ce brutal déménagement. « Ma sœur et moi, on a racheté une vieille ferme. On est en train de la retaper. » Priam ne s’attendait pas du tout à ce que la conversation dériva vers Za. Il fronça les sourcils, jeta un nouveau regard à la bleue, retroussa les lèvres. Il se détourna et continua à marcher. « Je vois pas de qui tu parles. » rétorqua-t-il froidement. Ce dîner n’avait été qu’un rêve, et il n’avait aucune nouvelle de la blonde. Il ignorait si elle était morte ou vive, encore à Amestris ou en pleine fugue. Il ignorait tout, et c’était ce tout qui se révélait infiniment insupportable.

La chose qui s’enroula autour de son bras le fit sursauter, et il tenta de résister mais, déjà, il se retrouvait en contact direct avec la jeune femme. Malgré son agacement, le désir qu’elle provoquait chez lui connut un regain. Il aurait pu la plaquer au sol et la trousser pour apaiser ses nerfs. Considérant son regard, peut-être que ça lui aurait plu. Mais il songeait à Za, à leur potentiel enfant, et à leurs deux vies prisonnières d’Amestris. C’étaient des pensées faites pour annihiler toute libido. Durant quelques secondes, il la toisa, muet. Puis, il finit par lâcher : « Nan. Mais toi, tu devrais faire attention. » Il s’inclina vivement vers elle pour la déséquilibrer, puis s’écarta de la même façon. Le mouvement lui arracha pourtant un froncement de sourcils : les vertiges provoqués par l’artefact ne s’arrangeaient pas. « C’est par là. » fit-il, comme si de rien n’était, avant de reprendre son chemin. Rapidement, ils parvinrent devant les portes d’une grange. Il les poussa : à leur vue s’offrit tout un bric-à-brac d’armes entassées sur la paille et le foin. « Bienvenue à l’armurerie. » Certaines pointes en fer avaient rouillé, des manches en bois étaient cassés, et la majorité avait besoin d’un bon coup de neuf. Ces dernières années, les Réprouvés avaient concentré leurs attaques sur les Goled, et préféré des raids rapides et précis à des déploiements de grande envergure. Il pivota vers sa compagne. « Avec tes pattes invisibles, tu vas pouvoir travailler deux fois plus vite, non ? » Il n’avait jamais croisé qui que ce fût avec un tel pouvoir, mais il ne voyait pas d’autres explications à ces deux contacts qu’il n’avait pas vu venir. « Si t’arrives à t’empêcher de me tripoter. Ça te vient d’où, ce pouvoir, d’ailleurs ? » Pris d’une nouvelle attaque de la bague, il ferma les yeux et secoua la tête. « Désolé. Migraines récurrentes, en ce moment. » Un vague sourire courba ses lèvres ; c’était bien digne d’un Ange de sortir ce genre de répliques dans un moment pareil.



Message IV – 951 mots




[Q] - Sous les tournesols | Priam 1628 :


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Latone
Mar 05 Avr 2022, 00:05



Avec une certaine véhémence, Latone parvint à renflouer les foutues lubies de son Sereëkim et se laisser, malgré elle, avoir par l'intimidation de Priam. Pour un Ange, il faisait preuve de bien plus de témérité que ceux de la Marche Terne. Ça la saoulait fichtrement de se faire passer pour la plus grande des gourdes, mais comment expliquer un tel phénomène à un démuni du Troisième Œil ? Et l'envie y était-elle ? Non. Puis, depuis tout à l'heure, il tirait une de ces tronches. Le sujet de la blondasse n'avait pas l'air d'être bien passé, pas plus que les pitreries de son Bras Invisible. Elle était peut-être allée trop loin pour une semi étrangère, mais bon, il s'était tout autant prêté au jeu. Si c'en était bien un. Latone plissa les yeux, sceptique quant à l'empressement du fameux Réprouvé pour leur lieu de destination.

Sur le peu de chemin qui leur restait à parcourir, la Bleue se ressassa son histoire de leur peuple. En un sens, elle comprenait leur aversion. Quand elle était elle-même Hozro, les traits du visage et les mœurs n'avaient aucune importance : tout ce qui ne lui ressemblait point méritait son courroux. Sans les chaînes de la Sùlfr, Lolaha Kirzor serait restée une bête assoiffée de violence à tout jamais. Si ce n'était pire ! Les Bipolaires n'en étaient pas à un tel stade de prédation, néanmoins elle supposait – avec justesse – que cette future bataille représentera un tournant dans leur être profond. Au fil de son imprégnation de l'histoire des Orishas, la novice retrouvait certaines similitudes dans les affirmations du Belegad. À la notable différence que les siens du Désert de Mow s'en étaient sorties transcendés, méconnaissables de leurs ancêtres aliénés. Elle ne pouvait en dire autant des Réprouvés, étant donné que ses connaissances en matière d'Anges et de Démons frôlaient le néant. Sur un terrain qu'elle ne connaissait pas, lors d'un combat qu'elle ne pouvait gagner, Latone préférait bel et bien esquiver et repartir sur de meilleures bases.

Cette grange, en l'occurrence, sera son nouveau territoire. Elle passa les portes, peu accoutumée à une odeur aussi forte que la chaume. Malgré ses origines à priori assez élitistes, la Kirzor préférait largement côtoyer ce monde bien plus terre à terre. Les montagnes, les forêts, et maintenant les champs ; peut-être, demain, les vallées et les côtes, tant qu'elle se tenait loin des dunes et des jungles. À l'abri des assauts directs du soleil, la Bleue se découvrit du chapeau de paille et le déposa dans un coin, guère attachée à celui-ci de toute façon, malgré les importants conseils de son amie. Depuis le siège d'Arcadia, son attention sur la qualité des armes s'était décuplée, ainsi en observa-t-elle quelques-unes, consciente du travail qui les attendait.

" Oh. Émit-elle en se retournant vers lui, trahie malgré elle. Elle passa outre ses commentaires et préféra croiser les bras, visiblement agacée. Ce n'est pas juste de la magie, ces "pattes", comme tu dis, sont une partie de moi. C'est lourd à expliquer… Elle soupira fortement, se gratta les cheveux, elle n'avait vraiment pas envie d'en parler mais il la provoquait. Ces Bras font partis de l'Invisible, ce que nous sommes capables de Voir. De l'index, elle tapota la gemme translucide sur son front pour illustrer son propos. À Arcadia, j'en ai deux qui ont été tranché. Les autres, je ne les contrôle pas si bien. Elle fronça les sourcils, malgré son sourire amusé. Je ne promets rien, mais je ne cherche pas à te toucher. "

C'était un fait. Depuis tout à l'heure, la Kehaä ne comprenait pas pourquoi ce Sereekim en particulier cherchait à emmerder Priam ; enfin, surtout elle, par extension. En soi, ce pouvait être une bonne chose qu'il ait conscience de la chose. Quant à savoir si elle aurait dû garder le secret vis-à-vis des siens, eh bien… C'était une tout autre histoire.

" Puisqu'ils ont l'air si distraits en ta présence, je me contenterai d'aiguiser avec ceux que tu aurais peur de briser. " Ironisa-t-elle en s'installant près d'un recoin qui lui quémanderait bien du temps pour remettre à neuf tout ce matériel.

Tout juste assise, Latone remarqua le nouveau mal-être inhérent de Priam. Son premier réflexe fut de réfléchir à une potentielle aide de sa part, mais à part l'étreindre en guise d'apaisement, rien de viable ne lui vint à l'esprit.

" Hé, te surmène pas. Tes gars de tout à l'heure m'accuseraient de t'avoir empoisonné. Ce qui était amplement vrai : elle refuserait de se faire à nouveau traiter de Sorcière. Franchement, laisse-moi gérer. Ça ne me dérange pas de dépanner. Elle lui sourit, sincère, alors que sa poigne s'était déjà refermée sur le manche d'une lame émoussée. En attendant… "

Ceci ne s'avérait guère être une bonne idée, point vraiment utile en soi. Malgré tout, pour la Fille des Chants, cette seconde nature refaisait surface bien trop souvent en son for intérieur. Les Échos faisaient partis intégrants de sa respiration. Elle ne pouvait s'en passer, tout comme un barde de Ciel-Ouvert ne pouvait s'empêcher de pincer ou une deux cordes au gré de son pas, qu'une Orine ne pût retenir sa Voix d'éclater en une sérénade sans frontière. De sa main libre, Latone moulut les vibrations entre ses doigts jusqu'à leur donner une consistance acceptable, l'échauffement suffisant de sa Voix meurtrie. Dressé en ce sens, son Sereëkim le moins récalcitrant alla chercher l'un de ses tambourins dans sa sacoche et se mit, par à-coups, à pulser au rythme d'une succincte mélodie, douce et champêtre. Si les Échos de cet instrument rappelaient le mysticisme d'une tribu antique, c'était bien sûr parce qu'ils servaient de support à l'élément principal de cette théâtralité.

" Je ne fais pas ça souvent. " Confessa-t-elle avant de clore à moitié ses paupières, emportée par sa bien récente coalescence avec les vibrations de Senere.


En rythme, ses muscles s'activèrent pour ajouter du mordant ferrique à la pureté de cet instant. Latone ne se permettrait pas de glander de la sorte sous l'œuvre de son jeu. Il était le quotidien d'un Marcheur de travailler sur le tempo des chansons et des cordes. Ainsi, elle se retrouva à fredonner pour ne point autant décontenancer son compagnon onirique, alors que l'Orisha s'attaquait bel et bien au bon soin du fil de ces lames. Il ne serait que vanité d'affirmer que sa Voix pourrait annihiler ces vilaines afflictions mentales, mais il était coutumier au sein de l'Empire de s'imprégner des sons les plus harmonieux pour apaiser les âmes. En un sens, c'était sa réponse à cette confiance – malgré les circonstances – qu'il lui accordait volontiers à la tâche.

Il pouvait fermer les yeux, se laisser bercer quelques minutes par les indulgents fracas du tambourin, ou l'accompagner dans cette valse chantonnée derrière ses lèvres scellées. Il n'existait pas de juste réponse, car le plus important demeurait de se coordonner aux pas les plus adéquats.


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Priam et Laëth
Sam 16 Avr 2022, 08:31




Sous les tournesols

En duo | Latone & Priam



À l’instant où la première note tinta dans la gorge de Latone, un long frisson résonna dans le corps de Priam. Il songea au violoncelle de sa sœur, et aux notes vibrantes qu’elle parvenait désormais à en faire sortir. Parfois, tard le soir, elle se mettait à jouer dans leur salon. Dans un fauteuil, droite et tonique, elle tenait l’instrument contre elle comme elle aurait pu étreindre un sentiment particulièrement fragile, avec toute la douceur dont elle était capable. Sa tête s’inclinait une première fois vers les cordes, elle s’humectait les lèvres, faisait tourner son poignet pour échauffer l’archet, puis fermait les yeux et composait les premiers pas d’une mélodie. Quand elle faisait de la musique, tout son corps se détendait. Elle plongeait dans une sorte de transe dont il était certain que rien au monde n’aurait pu la tirer, et dans cette perdition-là, il voyait quelque chose d’infiniment beau et de terriblement intime à la fois. Étendu sur son lit ou assis dans le canapé, il l’écoutait jouer. Le chant du cœur de l’instrument s’enroulait autour de ses oreilles pour pénétrer en lui, profondément et intensément. Il faisait frémir ses poumons et trembler son palpitant, bouillir son sang et contracter ses organes. La voix de Latone imprimait sur sa peau et dans son corps les mêmes sensations. Durant quelques instants, il l’observa. Ses paupières mi-closes, la légère inclinaison de sa tête, le mouvement régulier de son thorax, les vibrations dans sa gorge, le tempo rythmé du tambourin, ses mains autour de l’arme. Il scruta les traits de son visage. Comme un secret commun à tous les musiciens, un mélange d’émotions s’y lisait, entre l’apaisement, le dévouement, la dévotion et la passion. Lui, il en oubliait presque sa migraine.

Le Réprouvé s’approcha lentement. Faisant fi de la demande de la jeune femme, il attrapa une épée suspendue au mur, puis la contourna pour s’asseoir à sa gauche. Il se mouvait avec le plus de discrétion possible. L’impression que le moindre bruit discordant eût pu briser la magie de l’instant ne le quittait pas. Près d’elle, il ferma les yeux. La musique s’enroula autour de ses oreilles, puis se lova dans son cœur. Elle dissipa toute la colère qu’avait pu causer la mention de Za et toute l’animosité qu’il avait pu exprimer à cause de celle-ci. Il n’était lui-même pas musicien, pourtant, les notes sonnaient en lui de façon singulière. Un écrin se créait, écho entre le réel et l’irréel, où pouvaient se perdre toute la négativité du monde. Durant une fraction de seconde, il eut la pensée folle que la musique avait le pouvoir de sauver les âmes. Qui aurait pu rester de marbre face à de telles mélodies ? Qui aurait pu continuer à vouloir tuer et massacrer en entendant résonner ces chants ? Peut-être qu’il aurait suffi aux Bipolaires d’apprendre la musique pour se débarrasser des Sorciers. Un rire bref et léger, proche du soupir, franchit les lèvres du brun. Il rouvrit les yeux. « Pardon. Continue, s’il te plaît. » souffla-t-il. « Je me disais juste que… J’ai pensé à quelque chose de fou. Tu imagines, s’il suffisait de jouer de la musique pour empêcher toutes les guerres ? On devrait essayer, peut-être. Je ne sais pas. Ça ne me paraît pas improbable, là, tout de suite, que ça fonctionne. » Un sourire mi-amusé mi-dépité courba ses lèvres. « C’est pourtant avec des chants que vous avez combattu, à Arcadia. » Il se rappelait de cette partie-là. Le fils de Manichéens ferma à nouveau les paupières. Ses doigts effleurèrent sa bague et la firent rouler autour de sa peau, en rythme avec le chant de la bleue. Lentement, l’anneau glissa vers l’extrémité de son doigt, jusqu’à ce qu’il ne le retirât tout à fait. Un vertige le secoua et il se bénit d’être assis. Le mal de crâne s’évanouit et tout le reste aussi ; il ne demeura plus que lui-même, avec le sentiment diffus d’appartenir à un autre aussi. La bague au creux de son poing fermé, il la fit disparaître.

Ses deux mains rejoignirent la lame posée sur ses genoux. Son index courut sur l’un des tranchants. Ses yeux, une fois de plus ouverts sur le monde, se posèrent sur le tambourin, qui battait invisiblement un rythme. « Qu’est-ce que tu vois, exactement, avec ta gemme ? Qu’est-ce que c’est, l’Invisible ? » demanda-t-il. Pour avoir côtoyé des gens très divers, il connaissait l’existence des Orishas. Il savait qu’ils portaient tous une pierre, incrustée entre leurs yeux. Il s’était toujours imaginé, sans doute trop naïvement, qu’elle était un bijou dont ils s’ornaient pour des raisons culturelles. De façon générale, il ne s’était jamais trop intéressé au fonctionnement de cette race. « Parle-moi de ton peuple. » Il se tourna vers Latone et la regarda franchement. « Si ça ne te dérange pas. » Il la sonda, comme s’il cherchait au fond de son regard toutes les vérités qu’elle pouvait cacher. Une part de lui avait envie d’y plonger un peu plus que juste pour y découvrir des secrets enfouis. « J’aimerais comprendre. »



Message V – 951 mots

J'aime trop cette musique, ça m'a bercée pendant tout mon rp [Q] - Sous les tournesols | Priam 009




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Latone
Sam 30 Avr 2022, 15:36



En soi, sa témérité aura sa peau. Depuis le traumatisme de ses Sereëkim, Latone savait pertinemment qu'elle devrait les laisser se reposer pour un bon bout de temps, même pour les plus opérationnels. Comme tout malade, elle devrait tout bonnement patienter l'arrivée d'un expert et aviser ensuite. Si la plupart des êtres humains ne possédaient qu'une paire de bras, c'était bien pour une raison : elle leur suffisait. Au fil de son exercice, le rythme du tambourin tirait sur ses Bras perdus, lui évoquant sans cesse la fourberie du Duc d'Arcadia. Pourtant, comme toute Marcheuse, comme toute Linèsienne qui se respectait, la Kirzor avait besoin de ce moment. Il existait une tradition enfantine dans les mœurs de Ciel-Ouvert, celle affirmant que la musique et le chant possédaient le pouvoir de guérir les âmes meurtris. Ce folklore se cantonnait aux jeunes pousses et aux cantateurs passionnés, afin d'entretenir le mysticisme et la beauté des Voix. Pour Latone, bien consciente des limites de sa propre Voix, ce caprice ne cherchait pas à apaiser foncièrement ses maux, mais plutôt à poursuivre son emprise sur les Échos. Elle continua alors, son fredonnement plus acéré et son jeu de Sereëkim aussi fin.

Comme tout Réprouvé borné, Priam refusa de se laisser dompter par sa fermeté. Elle n'en attendait pas moins de lui dans tous les cas. Seul le respect des Échos lui était primordial. Et pour cela, Latone lui accorda du crédit : il écoutait, semblait faire le moins de brouhaha possible et accompagnait, avec elle, le tempo de la pierre à aiguiser. Elle ferma alors totalement les yeux et entonna davantage son chant. Ramener un fragment de Ciel-Ouvert jusqu'aux confins des Terres lui procurait un plaisir remarquable. Elle se sentait si bien, comme si ces vacances improvisées remplissaient leur rôle avec brio. Ce n'était pas bien gagner avec les Bipolaires de tout à l'heure, mais l'arrivée impromptue du Belegad avait chamboulé ses plans, pour le meilleur.

Silencieuse, la percussion continua son œuvre sur les réflexions à haute voix de Priam. Elle l'observa tisser ses idées sans s'arrêter de jouer et d'affûter ces lames qui lacéreront la chair putréfiée des Mages Noirs. Dans le lot, elle espérait que quelques Mayfair se feraient massacrer par les Guerriers des Zaahin. Rien que pour cette perspective, la tentation de joindre le front la tiraillait. La Bleue offrit un demi-sourire au Réprouvé Angélique, son attention retombant sur ses œuvres en cours.

" Tu as pu l'entendre de tes propres oreilles : il a fallu élever les Voix pour casser leur muraille et obliger les Chevaliers à se battre pour leurs péchés. Elle acéra quelques secondes cette hache avant de la déposer sur le côté. C'est ce qu'ils s'attendent tous : au fer et au feu. Mais moi, je leur donnerai bien plus que cela, un fil dont ils seront incapables de percevoir la portée. Et quand je le pincerai, ils ne sauront plus quoi faire. Elle se retourna en sa direction. Imagine un esclave d'Amestris, au fond d'une cave humide et froide, isolé de tout ce qu'il a pu connaître par le passé : les couleurs, les sons, les visages. Ou pire encore, qu'il n'ait jamais connu toutes les merveilles de ce monde. Elle balaya devant elle, comme si elle présentait un plateau ou une carte. Et un jour, il entend au loin un chant, un instrument ; une musique. Il nous entend nous, notre appel. C'est comme… les premiers mots d'une mère à son enfant qui vient de naître… je suppose ? Elle était loin d'avoir une telle allégorie en tête. S'il suffisait de chanter et de danser pour anéantir toutes les injustices de ces Terres, ce serait fou, tu as raison. Mais c'est ce à quoi j'aspire, ça doit être pourquoi tout le monde me traite de folle ! Entre autres. Tu sais, quand on capture les têtes pensantes de ces atrocités, on les enferme dans une prison de glace. Ils subissent ce que le fameux esclave d'Amestris a vécu, sans qu'aucun appel ne leur parvienne. Elle fronça les sourcils, peut-être bien un peu folle. Ça, c'est la vraie justice. "

Une justice propre à son Empire, par définition subjective et bancale pour d'autres. La Kirzor n'en avait cure, car si des âmes s'agglutinaient sous son aile, ce devait être que cette voie était la bonne. Contrairement à certains peuples, elle ne cherchera pas à conquérir par la domination pure et dure, mais à imposer une harmonie par ces valeurs. L'idée de Priam n'était définitivement pas si terrible ; peut-être pourrait-elle-même parvenir à le convaincre de la rejoindre sur la scène.

Comme convenu, Latone continua son chant et s'empara d'une autre arme émoussée. De son côté, elle ne le remarqua guère tout de suite, mais l'essence du Belegad fluctuait. Petit à petit, l'Orisha ressentit à nouveau ce bien-être qui l'accompagnait, comme la fois avec ce Dîner où elle s'était retrouvée démunie de toute animosité, pourtant en compagnie de Mages Noirs et de Diables. Ses iris vairons se braquèrent sur le fils de Bouton d'Or ; il était vraiment un être curieux. Pour s'avérer elle-même être une anomalie, les barrières s'effritaient à ses côtés.

" Je suis bien plus une Marcheuse qu'une Orisha, pour être franche. J'ai vécu toute ma vie à Ciel-Ouvert. Les miens de Megido, ou encore de l'Edelweiss Enneigé, me sont moins communs. Pense donc à tout instant que je suis loin d'être une experte. Elle stoppa pour le moment son devoir en cette armurerie, seul son Sereëkim s'obstina, simplement changea son doigté pour tapoter plus fermement et rapidement sur le tambourin ; il engendra ainsi un rythme plus soutenu, en phase avec ses pensées. Les Orishas… Ce sont à l'origine des esclaves, une multitude d'esclaves sur qui on a réalisé des expériences, qu'on a pour ainsi dire transformés en monstres. Leur histoire est tellement bordélique, autant que toutes les horreurs qu'ils ont dû traverser. Enfin, au bout d'un moment, ce qu'on appelle le Temps des Révoltes – qui succèdent aux Temps des Supplices – ils gagnèrent leur indépendance et fondèrent le peuple des Orishas. Les écrits content que si les Orishas continuent de muter encore aujourd'hui, c'est à cause, ou grâce, aux atrocités des Maîtres de leurs ancêtres. Elle effleura avec délicatesse sa pierre translucide. Ce n'est pas une gemme, c'est notre Troisième Œil. Il est la source de notre identité et de nos pouvoirs, mais il ne s'est éveillé chez nous il y a peu. Elle s'adossa, les yeux au plafond. Et l'Invisible, eh bien… c'est tout ce que vous autres, les non-Orishas, vous ne pouvez pas percevoir. Elle pencha la tête en sa direction, parfaitement sincère dans ses propos. C'est comme un monde superposé sur le nôtre : parmi nous, il y a des choses invisibles, qu'on ne peut pas voir mais qu'on peut toucher. Des choses vivantes ou non. Une fois, j'ai atterri dans l'Invisible et j'y ai surtout vu des créatures bien dégueulasses. Elle se tut, consciente que cela lui évoquait les Esprits et l'Au-Delà. C'était un accident et j'imagine que de "vrais" Orishas sauront mieux t'expliquer que moi… S'ils le veulent. De toute manière, tous ses dires s'appuyaient sur des récits officiels et ses propres expériences. Sinon, notre Troisième Œil peut voir bien plus, comme… les liens entre les gens, par exemple. Et les mensonges ; tu ne peux pas me mentir, en théorie. " Elle lui sourit, défiante.

Toutes ces palabres lui donnaient de plus en plus envie de concrétiser son savoir sur son peuple. Même rattachée à l'Empire de la Marche Terne, Latone demeurait une Orisha, avec ses avantages et ses inconvénients, ses ressentis et ses faiblesses. Tôt ou tard, elle devrait se raccrocher aux nouvelles racines qu'Ezechyel lui offrit, au moins pour recouvrer l'usage de ses Bras Invisibles.

" Et toi ? C'était bien trop flou dit comme ça, elle rectifia alors aussitôt : Parle-moi de toi, ou de ce que tu veux. Elle songea quelques secondes, un brin confuse. J'aime bien le son de ta voix. " Honnête, les rémanences de l'Ægeri lui collaient à la peau et au galbe de son âme.


1422 mots ~
Oui mais tu n'as pas édité le bon lien pour ta musique [Q] - Sous les tournesols | Priam 1929536143



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Lun 16 Mai 2022, 11:58




Sous les tournesols

En duo | Latone & Priam



Priam imagina cet esclave, terré entre des murs de pierre, dans la fraîcheur et l’humidité de la terre. Il imagina la peur dans son ventre, la lassitude dans ses yeux. Il en avait croisé, lors de son excursion à Amestris, pour la Coupe des Nations. Il lui semblait qu’ils étaient rarement reclus au fond de caves, parce que les Sorciers s’attelaient à leur trouver une ou plusieurs utilités, mais en vérité, ça n’avait pas grande importance. Il voyait où Latone voulait en venir. Il imagina un homme ou une femme privé de sa liberté, asservi par la noirceur d’âme de ses propriétaires. Il ne se doutait pas que, d’ici quelques semaines, sa sœur subirait cette situation. Il se doutait encore moins qu’il la livrerait à ce sort sans se préoccuper de son devenir. Si on le lui avait dit, il ne l’aurait jamais cru. À cet instant de sa vie, il lui semblait que le lien qui les unissait était trop puissant pour être brisé. Il aurait dû savoir qu’en ce monde, il n’existait aucune certitude, et qu’un rien pouvait tout faire basculer. « C’est un beau rêve. » Il sourit. « Mais peut-être que ce n’est qu’une utopie. » Il tourna la tête vers elle pour l’observer. Il avait si longtemps vécu avec les Réprouvés qu’il ne parvenait pas à envisager un univers sans violences. Certains peuples avaient ça dans les veines. Ils avaient besoin du combat pour se sentir exister. Le sang et la sueur traçaient leur histoire ; passé, présent et futur. Les massacres pavaient leurs vies. « Tu crois ? » fit-il. Son sourire s’élargit dans l’amusement. « Ce n’est pas du tout ce que mon peuple ferait. Je suis sûr qu’il trouverait même votre façon de faire injuste. Ici, les criminels sont tués. C’est ça, leur justice. » Et chez les Anges, c’était encore différent, bien différent.

Et chez les Orishas, ce doit être autre chose encore, songea-t-il tandis qu’elle débutait ses explications à leur sujet. À quel type de justice pouvaient prétendre des descendants d’esclaves ? Priam inspira et soupira doucement. Il comprenait au moins l’attachement de Latone à cette cause. Peu importait que ce fût ancien ; les Réprouvés en voulaient encore aux Sorciers pour l’incendie de Lumnaar’Yuvon et la destruction de l’orphelinat. Cela s’était déroulé des siècles plus tôt. La rancœur et la haine n’avaient ni âge ni fin nécessaire. Elles appelaient leurs consœurs, elles appelaient le conflit : c’était la raison pour laquelle ils en étaient là, en partie. C’était terrible. Il sentit son cœur se crisper sous l’effet de la peine, et se hâta de se raccrocher aux paroles de la bleue. Ses yeux dorés remontèrent vers la pierre qui ornait son front. Son Troisième Œil. Cet élément improbable qui discernait un monde inatteignable pour le reste des individus de ces terres. Quel était cet univers ? Que contenait-il, hormis ces « créatures bien dégueulasses » ? Comment s’organisait-il ? Des peuples y vivaient-ils ? Lesquels ? À quoi ressemblaient-ils ? Ce que l’Orisha disait ouvrait sur de trop nombreuses possibilités. Il eut envie d’en savoir plus, et pourtant, ses explications arrivaient à leurs fins. « Les Anges ne mentent pas. » Il sourit. « En théorie. » ajouta-t-il, aussi défiant qu’elle.

« De moi ? » Il leva les yeux vers le plafond, songeur, avant de les rebaisser vers elle. Un sourire énigmatique peignit ses lèvres, mais il ne répondit rien. Elle lui faisait un effet similaire. Le rêve avait distillé des sensations qui n’auraient pas dû être. Comment ? Ce n’était pas la première fois que ça lui arrivait. Il pouvait conter la vie d’Aliénor dans les moindres détails. Pourquoi ? Ces restes oniriques posaient question, eux aussi. Le Belegad passa une main sous son nez et renversa la tête en arrière. Les poutres de la grange s’enchevêtraient au-dessus d’eux. « On peut aussi dire que j’appartiens à deux groupes différents. » Vaguement, il haussa les épaules. « La vie ici et la vie chez les Anges, ça n’a rien à voir. » Il sourit. « Je ne suis pas vraiment censé être là. » Il se redressa. Les mouvements et le son chantant de la pierre à aiguiser reprirent contre la lame qu’il tenait. « Je devrais être chez les Anges, et regarder de loin mon peuple d’origine partir en guerre. C’est ce que font certains d’entre nous – les Enfants de Réprouvés. C’est peut-être bien le plus sage. Mais pour beaucoup, c’est compliqué. » Il retourna l’arme pour polir son autre face. « On est tous partis pour des raisons différentes et je crois que finalement, elles n’ont pas beaucoup d’importance. On s’est tous plus ou moins heurtés à la réalité de la vie parmi les Anges. Les principes d’éducation qu’on a reçus sont très différents des leurs et quand on est arrivés, avec ma sœur, peu de choses étaient faites pour aider les nouveaux venus à s’intégrer. C’est à peine mieux aujourd’hui, même si on y travaille. » Il y travaillait, à travers ses projets. « Je pense que les Anges n’avaient pas idée de la population qu’ils allaient récupérer en nous accueillant. Je pense qu’ils étaient surtout mus par un besoin urgent de regonfler leurs rangs et qu’ils n’ont pas cherché à savoir qui étaient ceux qu’ils recrutaient. Aujourd’hui, c’est compliqué. Il y a les Pacifistes, les Extrémistes, et il y a nous. » Le Belegad posa l’épée à côté de lui et se leva pour aller chercher une autre arme. Il prit une hache, puis revint s’asseoir près de Latone. Il la regarda. « C’est compliqué, de déraciner quelqu’un, ou de se déraciner soi-même. Ma sœur a essayé, et tu vois, maintenant, elle est ici, à essayer d’empêcher une guerre inévitable. Elle a quitté la Compagnie de Yuërell et elle se battra sans doute aux côtés des Réprouvés. » Il sourit, mélancolique, puis reprit le travail du métal. « Je pense qu’on n’avait pas non plus idée des gens chez qui on débarquait. C’étaient beaucoup de fantasmes et d’espoirs. La vérité est un peu moins plaisante. » Il n’avait pas voulu y aller, et si désenchantement il y avait eu, il l’avait rapidement subi. Erza n’avait pas mâché ses mots, à l’époque, et tout semblait indiquer qu’elle avait raison. « Peut-être qu’on n’est à notre place ni ici ni là-bas. Peut-être quelque part entre les deux, ou dans quelque chose à inventer. » De nouveau, il haussa les épaules. Pour le moment, il se contentait d’aller et venir de l’un à l’autre. « Tu as de la chance d’avoir trouvé la tienne chez les Marcheurs. » Il releva la tête vers elle. « Tu n’as jamais eu envie de plus te renseigner sur tes racines ? » Songeur, il la dévisagea. « Moi ça m’intrigue, ces histoires de monde invisible et de… la possibilité de voir les liens entre les gens. Tu sais en quoi ça consiste, exactement ? Par exemple, si tu vois ma sœur, tu peux savoir que c’est ma sœur ? Comment ça se manifeste ? Et à quoi ça vous sert de « voir » ces liens, à part à avoir des informations sur les gens ? Vous pouvez agir dessus ? » Plus il l’interrogeait, plus il avait la sensation qu’il touchait du doigt des secrets délicats.



Message VI – 1217 mots

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Ven 27 Mai 2022, 17:58



Une utopie ? Latone ne semblait pas capter toute la portée de cette notion. Un rêve demeurait un rêve, parfois palpable, parfois plus récalcitrant au toucher. Mais pour une têtue comme elle, un tel mirage n'était jamais inaccessible. Certaines ressources étaient nécessaires, des capacités hors normes devaient être acquises, pour autant, elle refusait de croire que son propre but s'apparentait à une chimère. Auquel cas, pourquoi n'était-elle plus seule dans cette folie ?

" Va dire ça aux Anges et Réprouvés de Ciel-Ouvert, alors. Lança-t-elle, défiante, guère moralisatrice. Après quelques ajustements sur la lame, chaque coup accompagnant une réflexion, elle finit par lui accorder ce crédit. Tu marques tout de même un point : la justice n'est pas universelle. " Étant donné le cas de Drëjtesi, elle ne le sera jamais.

Ce constat lui fit noter à quel point son Empire s'aventurait sur une pente glissante. L'éradication de l'Ordre d'Hébé – ou préférait-elle dire : sa conscription, puisque l'objectif s'avérait de sauver Hébé elle-même – démontrait le seuil dont étaient capables de franchir les Marcheurs au nom de la Justice. Ils étaient bénis par les Mord'th pour leurs actes, mais Latone elle-même avait encore du chemin à parcourir pour être sacré par la Mère en personne. Dans le même temps, il ne suffisait point de faire ses preuves pour les siens : il fallait qu'elle se montre convaincante aux yeux des autres peuples. Ses alliés, ses potentiels amis de demain, et même ses plus fervents opposants. Comment opérer un tel baptême du feu, cela, la Bleue n'en avait aucune foutue idée. Elle doutait qu'une fade audience suffirait, surtout que quelques nations avaient bien mieux à faire que recevoir une détrônée. Cette perspective possédait le mérite d'être étudié davantage, puisque selon elle, on n'apprenait bien que des meilleurs.

Ce Priam était tenace. Au fond, Latone commençait à l'apprécier. Il était assez éloigné de l'idée qu'elle se faisait d'un Ange, ce qui s'expliquait assez bien par les origines qu'il lui contait. Par sa seule volonté, la Kehaä fit en sorte que le Sereëkim adoucit son rythme sur le tambourin, comme pour se rapprocher de la sérénité qu'on associait aux Immaculés. Sur ce doux tempo, Latone atténua tout autant sa force sur la lame émoussée afin d'offrir une oreille bien attentive au Belegad. Cela lui paraissait assez étrange d'échanger de telles confessions dans un tel lieu, avec un tel individu. Ils ne se connaissaient pas plus que cela et pourtant, l'Orisha avait la singulière impression de pouvoir lui dire la vérité sur sa nature. Il n'était, hélas, ni dans les bonnes grâces du Cycle de la Vie et de la Mort, ni entraîné dans les rouages des Échos. Au-delà de ce passe-droit, il ne comprendrait sûrement pas ; c'était à peine s'il assimilait les pouvoirs de ses congénères. Miles, en ce sens, était une exception ; une agréable exception. Malgré tout, du fait de son bien-être intarissable et sa quête de placidité, Latone se sentait capable de lui accorder sa bonne faveur alors que ses interrogations se multipliaient avec atrocité. Peu pouvait se targuer d'avoir glané ce mérite.

" Non, parce que… " Son regard s'évada alors que sa voix s'éteignit, face à son rapport avec ses fameuses racines.

Elle fut une Alfar, de surcroît Linèsienne. Des notions qu'il ne pourra point comprendre. Personne ne pourrait comprendre, hormis les Marcheurs dans une moindre mesure. Elle était le fruit des Chants et d'une volonté supérieure. Bien après, elle fut une anomalie parmi les Esprits, une Hozro que le Cycle avait rejeté sous le courroux – ou devrait-on dire la bénédiction – d'Ezechyel. Son existence, du début à aujourd'hui, se montrait si chaotique.

" Mes parents ne m'ont pas enseignée tout cela. Je n'ai jamais visité Megido non plus. Je te l'ai dit : je suis avant tout une Marcheuse. Son attention retomba sur la lame, qu'elle travaillât à nouveau ; le tapoté frénétique sur le tambourin reprit son ascendant. Il m'a fallu beaucoup, beaucoup de temps pour la trouver, cette place. Il ne suffit pas de naître quelque part et le tour est joué. Ta sœur et toi semblez bien le savoir. Elle lorgna en sa direction, neutre. Vous la trouverez un jour, cette place que vous attendiez. Bien que l'air détaché, son affirmation revêtait un voile de sincérité. Des fois, il faut se tourner dans la bonne direction, vers les bonnes personnes. D'autres fois, il faut avancer, encore et encore. " Un long voyage.

C'était bien son cas, tant elle semblait avoir traversé les époques et les communautés jusqu'à trouver celle-ci, cette place et ce nom. Elle espérait alors y périr un jour, toujours fidèle à elle-même, afin de partir le sourire aux lèvres avec cette pensée en tête : J'ai mérité mon humanité.

" Comme tu peux le voir, mon Troisième Œil est translucide. C'est-à-dire qu'il n'est pas totalement éveillé… Pour les Orishas, la Marcheuse devait être à peine plus qu'une enfant. J'ai vu l'Invisible, mais ses autres capacités me sont encore inatteignables. Un jour, il prendra une couleur en particulier et les réjouissances pourront commencées. Vision, interprétation, manipulation, un tout autre monde se dessinera sous ses trois yeux. Comme… ce fichu Lien qu'il y a entre nous. "

Si la pierre à aiguiser cessa de lécher les impuretés, la percussion poursuivit sa route jusqu'à leurs tympans. Depuis leur "nouvelle" rencontre, Latone n'arrêtait pas d'être incommodée par ce fameux Lien qui persistait entre eux. Il lui était pénible, parce qu'il lui semblait aussi significatif qu'avec certaines personnes chères à ses yeux. Pourtant, Priam Belegad ne figurait pas parmi ce cercle restreint et précieux pour la Kirzor. Des pistes, des réponses, des dizaines s'en étaient accumulées au fil de leurs interactions ici même. Et toutes la rendaient perplexes, à la limite du scepticisme. Pourquoi lui, pourquoi elle ? Ses yeux se plissèrent alors qu'elle le dardait à ses côtés.

" Celui-là, je peux clairement le voir. Métaphoriquement parlant ; c'était bien tout autre chose qui la rendait méfiante. Plus que cela, c'est comme… le sentir. Elle ignorait s'il partageait ce sentiment, néanmoins elle désirait poursuivre sur sa lancée malgré tout. Il a une odeur, agréable, envoûtante. Il a cet attrait pour un affamé qui se retrouve devant un buffet. Songeuse, elle chercha un reliquat de réponse dans ses prunelles et sur ses lèvres. Est-ce que tu crois aux Rêves, toi ? "

Qu'importait sa réplique, fort était de constater que Latone se retrouvait embuée de cette appétence inextinguible, celle dont étaient capables certains hommes de réveiller, pour le meilleur comme pour le pire. Ces hommes susnommés se montraient bel et bien malicieux avec elle, ils se moquaient bien d'elle et de ses propres désirs. Et maintenant qu'elle constatait que cet Ange là n'était pas mieux qu'eux, l'Éclat reprenait le flambeau frénétique ; puisque telle était son unique moyen d'assouvir ces pulsions.

L'Orisha en avait fini avec cette arme ? Bien ; elle n'en avait alors pas fini avec lui. Loin de là. D'un coup d'un seul, le tambourin retomba sur le foin fragile, alors qu'elle se levât, imprévisible. Elle déambula face à Priam, ce spectacle donnant l'impression qu'elle luttait contre un mal ancré en son corps, tant elle redoublait des allers-retours à coups de jointures craquées, d'échauffements de bras et de poings, de souffles chauds en cette grange. Il était aisé de comprendre que Latone se préparait à sa propre guerre.

" Combats-moi. La déclaration sembla cacher, au fond, une pincée de supplication. Elle trépignait sur place, prête à bondir à la moindre chance, sans le lâcher des ses iris de lionne. Je me contrefous de votre terrain d'entraînement, j'ai juste besoin de quelques échanges, ici et maintenant, alors lève-toi et frappe-moi ! "

Il fallait qu'elle fasse partir cette sensation sur-le-champ et l'unique moyen qu'elle connaissait pour s'en prémunir était celui-ci : la danse des guerriers.


1378 mots ~
Étant donné l'écart de spés, je te laisse pleinement juge de l'échange s'il accepte ♪



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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Mar 05 Juil 2022, 19:37




Sous les tournesols

En duo | Latone & Priam



Et parfois, sa place, il faut la creuser soi-même. Il faut écarteler les résistances, déchirer leurs panses gavées de préjugés, et poser un pied victorieux sur le socle d’une existence nouvelle. Priam s’humecta les lèvres. Peut-être que Laëth et lui la discernaient, cette place. Peut-être qu’ils l’entrevoyaient, vaguement. Ils savaient des choses qu’ils ne pourraient pas taire ; mais quand ils auraient réuni des preuves, quand ils prendraient la parole, qu’adviendrait-il ? Que deviendraient-ils, eux, s’ils n’étaient plus des Anges parmi tant d’autres ? S’ils faisaient voler en éclat le masque de la société angélique ? S’ils apportaient la vérité et exposaient tous les problèmes au sein desquels se morfondait le monde de l’après-génocide ? Il fallait un après après-génocide, il le savait ; une étape supplémentaire sur le long chemin de l’histoire, une nouvelle pierre à l’édifice du récit angélique. Mais quel serait-il, ce nouveau récit ? Quelles places y occuperaient-ils, Laëth et lui ? Parfois, un vertige le saisissait. Il n’était pas certain d’avoir envie de se dévoiler. La Justice l’animait, mais la peur le retenait. Avait-il les épaules assez larges pour supporter les espoirs, les accusations ou l’indifférence qui pourraient peser sur lui ? Et sa sœur ? Elle fonçait tête baissée et semblait se moquer des conséquences. Que ferait-elle s’ils parvenaient à faire bouger les choses ? Saurait-elle garder son sang-froid et gérer les suites de leurs actions ? Il l’ignorait. Tout était trop flou ; et pourtant, à chaque fois qu’ils évoquaient le sujet, il était terrifié de le voir se préciser. Il n’avançait pas, il ne se tournait vers rien ; il demeurait immobile et fixe, et cette léthargie conduisait à l’inévitable : il ne trouvait pas sa place. Désormais, il semblait trop tard pour se mettre à marcher droit devant, et trop tard pour se tourner vers qui ou quoi que ce fût. Il allait devoir l’arracher. C’était une conviction ; ses craintes ne feraient que retarder le destin.

L’Ange quitta le cocon de ses pensées : son regard se rattacha au troisième œil de l’Orisha. Il acquiesça. Ses propos lui laissaient comprendre qu’elle était néophyte. Le temps et l’entraînement, peut-être, aideraient sa pierre à gagner en couleur et en intensité. Il scrutait celle-ci, intrigué. Il ne recentra son attention sur l’ensemble du visage de la femme que lorsqu’elle évoqua leur « lien ». Il existait entre eux, incessamment et inlassablement, comme un écho perpétuel de leur rêve. Le brun s’en rappelait avec une acuité toute particulière. Ces rêves-là paraissaient avoir la capacité de ressembler trait pour trait au réel. Il aurait pu décrire sans peine le goût de la tête de Sorcier comme celui de Latone. Il aurait pu parler de son odeur et de celle des fleurs qui les encerclaient. Il aurait pu décrire ses vêtements et le paysage alentour. Il aurait pu faire la même chose – et bien plus encore – concernant son rêve avec Aliénor. Mais que ses songes le conduisît jusqu’à la Magicienne, c’était une chose ; il la connaissait et nourrissait à son égard des sentiments qui ne se lassaient pas de tourmenter le corps, le cœur, l’esprit et l’âme. Latone… Latone, il ne l’avait vu qu’une ou deux fois, à l’arrachée, peut-être en rêve aussi – il ne savait plus vraiment ce qu’avait représenté ce terrible dîner.

Il s’apprêtait à lui répondre, troublé par sa question, quand sa musique cessa brusquement. Il suivit des yeux le tambourin qui roulait dans la paille, puis leva les yeux vers la lionne qui faisait les cent pas devant lui. Un semblant de sourire chatouilla ses lèvres. Quelle drôle de manière d’agir. « Ma réponse t’a vexée ? » demanda-t-il, taquin. « Tu vas me coller ton poing dans la figure ? » Il posa son menton sur son poing, l’amusement ancré dans ses iris dorés. La réponse de l’Orisha lui arracha un éclat de rire. Elle lui faisait penser à Za et à Laëth, qui se ressemblaient bien malgré elles. De vrais petits bicornes enragés. Tout était prétexte à se taper les uns sur les autres – tout et surtout rien. « Les Anges ne tapent pas comme ça sur les gens. » rétorqua-t-il en se levant. Il fit craquer le bas de son dos et sourit. Puis, il souffla : « En théorie. » Et il bondit sur le fauve. « À la réprouvée : pas de magie. » glissa-t-il en abattant son poing vers ses côtes.

Le fils de Réprouvés n’était pas le meilleur combattant qui fût. Bien que gagnant d’un Fus’Naakar’Lus, ses années passées aux côtés des Anges avaient amoindri sa hargne et la justesse de ses déplacements. La reprise d’entraînements avec sa cadette lui avait fait le plus grand bien. Elle était vive, solide et impitoyable. Il avait plus de force qu’elle – la sienne devait être à peu près équivalente à celle de la Bleue – mais elle était plus agile et surtout, plus experte. Elle parvenait généralement à renverser les situations périlleuses dans lesquelles il la mettait. Latone devait posséder plus de technique que lui, ou une technique différente. Elle se défendait bien et ses attaques étaient nettes. Ils dansèrent un long moment ensemble ; il n’avait pas l’orgueil de vouloir la terrasser, ni la prétention d’y parvenir. Leurs échanges lui rappelaient les combats de champ qu’il menait parfois dans sa jeunesse ; ces jeux auxquels s’adonnaient les jeunes Manichéens. Sa nature d’Ange l’avait peut-être forcé à en disputer plus que de raison – cette pensée le frappa comme ça, d’un coup. Peut-être qu’il avait cru avoir plus de choses à prouver, ou peut-être qu’on l’avait plus poussé que les autres à faire la démonstration de ses talents génétiques. Il sourit. Dans l’action, l’immobilisme de Priam trouvait l’émancipation et ses terreurs s’évanouissaient. C’était toujours comme ça : il avait besoin de se lancer pour oublier et pour se rappeler. Parfois, il avait juste besoin de se couper les ailes et de sauter dans le vide.

Finalement, il parvint à faire chuter son adversaire. Il roula avec elle, puis réussit à la coincer sous lui, assis sur son bassin et les mains fixées à ses poignets, maintenus au-dessus de sa tête. Pour augmenter sa masse et mieux la tenir, il déploya ses ailes. Essoufflé, il la regarda. « Pour te répondre, je crois que les rêves ne sont pas toujours ce dont ils ont l’air. » Il sourit. « C’est comme pour les Anges. Il y a la théorie, et puis il y a la pratique. » Il sentait la sueur perler le long de sa peau ; c’était une sensation qu’il adorait, parce qu’elle lui conférait avec intensité le sentiment d’être vivant. Comme le cœur qui bat dans les tempes, comme le souffle qui brûle la gorge. Il passa sa langue sur ses lèvres. « Qu’est-ce que tu crois, toi ? » Il aurait pu reposer les questions auxquelles elle n’avait pas répondu, mais préférait ne pas insister. Il ferait ses recherches lui-même.



Message VII – 1154 mots

J'espère que ça te va comme ça nastae Si elle le pousse/lui dit de se lever, il le fera =)




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Latone
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Latone
Dim 07 Aoû 2022, 15:43




Ce rite persistait, se raccrochait aux rouages de son destin. À travers la Mort ou la Vie, Latone ressentait une plénitude totale qu'en s'élançant dans cette danse endiablée en compagnie d'un partenaire de choix. Lolaha avait beau se désoler d'être une piètre danseuse, son existence s'entrelaçait intrinsèquement aux chorégraphies les plus barbares, le primitif des parades nuptiales. Autrefois, elle dansa pour Gandr, elle lui chanta une ode afin qu'il cédât à la ferveur de son cœur. Puis, le gel enserra ses os et son âme jusqu'au poing tendu par Ezechyel. La Bleue se souviendra pour toujours de sa confrontation avec Jun dans cette taverne de Ciel-Ouvert, de ce qu'il avait été capable d'insuffler au spectre qu'elle fût, normalement détachée, insensible, impossible à atteindre. Depuis, via de multiples artifices, Latone était parvenue à remonter la corde jusqu'à la lumière, à devenir ce qu'elle était aujourd'hui et à se tourner vers ce qu'elle aspirait le plus. Combattre n'était plus une question de gagner ou de perdre : c'en était devenue une expérience exquise, une façon propre à elle de satisfaire ses pulsions les plus fortes, de se forger davantage sous les impacts et, surtout, découvrir une facette insoupçonnée d'autrui. Le baiser des phalanges sur sa peau la galvanisait, ses propres coups cherchèrent à créer des faiblesses, ses chausses frottèrent la terre sur un tempo aussi dynamique que harmonieux. Rien ne semblait être laissé au hasard dans cette spirale artistique, puisque chaque impulsion musculaire provenait du plus profond de son cœur. Lorsque la Marcheuse dansait ainsi, ce n'était pas par caprice de victorieuse, et elle espérait bien – à l'instar de Gandr par le passé – que son partenaire de piste la comprendrait. Sous les tournesols, elle avait choisi d'entraîner Priam sur ses pas et d'ainsi se confesser de la plus franche des manières. Des actes plus forts que ses mots.

Le final se résulta en un statut quo, ce que la Kirzor espérât dès l'instant où elle émit cet ordre de la frapper. Pas de victoire, pas de défaite, seuls deux âmes meurtries qui mêlaient leurs souffles chauds et laissaient le fruit de leur confrontation s'évaporer sous la chaleur ambiante. La poitrine de la demoiselle se soulevait à intervalles malgré l'emprise de son adversaire sur elle, c'était bien l'une des seules libertés que le Belegad semblât vouloir lui accorder. Il avait été tenace, endurant, malin. En ce sens, Priam était un bon guerrier. Elle aurait bien voulu l'entraîner dans la Marche par pure égoïsme, mais après tous ces échanges et secrets dévoilés, il lui était impossible d'arracher l'Ange à ses convictions et devoirs. Durant quelques secondes, ses iris de nuances bleutées s'éperdirent sur la majesté des ailes déployées. On prêtait énormément de merveilleuses symboliques au peuple des Vertus ; l'Orisha devrait alors se sentir honorée d'être graciée par l'un de ses plus fervents représentants. Il s'était battu comme un Réprouvé et pourtant il reluisait d'une aura aussi envoûtante qu'au sein du Songe. À une époque, ça aurait pu lui être pénible ; aussi pénible qu'un Dieu la faisant tourner en bourrique autour d'un feu chamanique, aussi pénible qu'un père de famille qui lui instillerait des sentiments malgré leurs interdits. Maintenant, Latone était en toute définitive une femme, avec ses choix, ses appétences.

" Ce que je crois… " Répéta-t-elle, son visage exprimant une profonde amertume.

Il y avait la théorie et la pratique. Priam l'avait si bien démontré et il la plaçait pourtant face à ses scrupules. Son regard ne se fit aucunement faillible, elle était assez solide pour soutenir une telle effronterie. Elle avait déjà vécu ça, deux fois au moins. Ces hommes avaient vraiment tendances à la contraindre, à lui faire cracher le morceau sur ses ressentis. Était-elle si difficile à lire ? Était-elle trop renfermée derrière ses actes inespérés ? Ses yeux se plissèrent. Ce constat effrita sa conscience ; la fillette qu'elle fût autrefois aurait pu en pleurer. Néanmoins, Latone était une Vivante revenue d'entre les Morts : elle n'avait plus de larmes sous sa carapace.

" Je crois que j'aimerais te revoir. " Un Écho de leur Rêve.

Oui, ils pourraient se retrouver, dresser une table près d'un champ fleuri, goûter aux spécialités de leurs peuples respectifs, boire à foison. Tourner autour du nefas, yeux dans les yeux, et succomber à nouveau. Cela lui plairait. Elle en avait besoin, demain et même maintenant. Et pourquoi même attendre, finalement ? Parce que l'Ange l'appelait à la Tempérance ? Ce n'était pas suffisant de la dominer de la sorte, puisqu'il savait très bien qu'elle était plus ce qu'elle montrait. De l'Invisible s'étendit son toucher jusqu'à la joue du Belegad, sa "main" caressa cette dernière et laissa tout le loisir à son second Sereëkim pour s'immiscer derrière la nuque du fils de Bouton d'Or. Elle le poussa en sa direction et l'étreignit de toutes ses forces contre elles. Dans la chute qu'elle lui imposât, la Bleue se saisit de ses lèvres et ils tombèrent alors ensemble. Le goût de sa chair était aussi authentique, la fougue de sa langue aussi prononcée. Il n'y avait bien plus qu'un pas entre leur Réel et leur Rêve. Par ce geste, Latone avait décidé – encore une fois – de céder à ce Monde sur lequel elle n'avait aucun pouvoir.

Malgré le désir grandissant, leur rixe de tantôt avait décemment inhibé ses forces, ce qui engendra son courage de couper court à ce baiser sur une note douce, fanée. Elle rouvrit les yeux et retroussa sa bouche par réflexe, comme pour ne laisser aucune miette de cette délicieuse offrande lui échapper. Son Troisième Œil, aveuglé, cherchait à décrypter la réaction de Priam. Consternation ? Acceptation ? Résignation ? Dans tous les cas, le mal était fait et Latone ne comptait guère lui laisser le choix sur un fait.

" Là, comme ça, tu seras obligé de survivre à ta guerre pour venir me le rendre. Sa peau ne cacha point son embarras. C'est comme ça qu'on fait… avec moi. Donner, rendre, échanger, un baiser était si cruel et satisfaisant à la fois. Alors bats-toi, reviens au bercail, et… – elle haussa les épaules – envoie-moi une lettre ? "

Latone connaissait bien les affres de Haziel, d'autant plus depuis Arcadia. Pourtant, la Hurabis aimait à croire qu'avec sa bénédiction, le téméraire Belegad s'en sortira. Par tous les moyens, il reviendra d'Amestris et lui rendra son offrande. Quand bien même la bataille s'envenimât, la Bleue saura le retrouver parmi les Esprits, un autre jour.

" Et puisque je veux être sûre que tu y arrives, je vais de ce pas aiguiser encore plus de lames pour toi. "


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