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 Les Portes - Chapitre V

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Jämiel Arcesi
~ Alfar ~ Niveau II ~

~ Alfar ~ Niveau II ~
◈ Parchemins usagés : 749
◈ YinYanisé(e) le : 01/03/2019
◈ Activité : Étudiant à plein temps ; Luthier en parallèle
Jämiel Arcesi
Lun 14 Nov 2022, 18:40

Love's Grip par Eva Soulu
Les Portes

La danse arrivait déjà à son terme. Adénaïs avait, le temps de la partition, cherché ses enfants dans la foule. Après de longues minutes à parcourir la salle des yeux, elle trouva enfin l'un d'eux. Déodatus. Seul. Elle chercha alors Zebella, sans succès. L'avait-elle délaissée dès la première danse ? La blonde n'en serait pas étonnée. D'un trait, elle vida son verre dans l'espoir que l'amertume de l'alcool balaie de nouvelles pensées moroses qui tentaient s'infiltrer dans son esprit solitaire. Elle avait pourtant réussi à trouver la compagnie de Dames cherchant elles aussi un peu de repos après avoir enchaîné les premières danses. Celles-ci semblaient dans l'ignorance complète de sa condition. À moins qu'elles ne fassent semblant de l'être. Ça n'avait guère d'importance à ses yeux. Elle avait l'occasion de discuter de choses parfaitement banales de la vie, ce qu'elle ne faisait plus que rarement, et pouvait échanger sur le dernier ouvrage du dernier écrivain à la mode, sur les peintures ornant les murs de la salle, sur les derniers potins de la ville, ou sur le charme des hommes à marier. Elle ne put retenir une œillade à l'intention de Childéric, au côté du médecin. La discussion allait bon court, jusqu'à ce que la tranquillité des danseurs soit interrompue par de fortes injonctions. En même temps que ses comparses, Adénaïs leva la tête pour découvrir qui était à l'origine de ce tapage. Elle comprit rapidement qu'il s'agissait de la princesse d'Uobmab, à voir l'épée qu'elle brandissait avec hargne en se fendant un chemin à travers la foule. Elle semblait particulièrement irritée. Puis, suivant des yeux la direction qu'elle prenait, Adénaïs devina après qui elle en avait. « Déodatus. » souffla-t-elle, à présent paniquée. Son sang ne fit qu'un tour dans ses veines et, avant même qu'un début de réflexion ne naisse dans son esprit, elle s'élança à son tour pour rejoindre son fils et tenter lui faire éviter le pire. Dans la précipitation, elle lâcha simplement son verre qui se brisa au sol en un millier de fins cristaux, afin d'attraper chaque côté de sa robe et la soulever pour s'offrir une plus grande amplitude de marche. La menace de la jeune femme l'empêcha cependant de faire un pas de plus, l'arrêtant à quelques mètres de l'accusé, et elle ne put qu'assister impuissante à la déferlante de rage qui se dégageait de la princesse. Le voile cachait son visage, mais il était aisé d'en deviner les traits déformés par la colère. Puis la sentence tomba, tranchante et sèche comme le fil glacé de la guillotine. Et pourtant. Si ce qu'elle disait était vrai, il lui était incapable de totalement en vouloir à Zebella. Elle se trouvait tiraillée entre le sentiment de justice pour une femme bafouée et celui de l'amour inconditionnel d'une mère pour son enfant. Elle devait éclaircir cette histoire. Maintenant. Qu'importât la garde ou le regard des gens, elle ne se contenterait pas de la parole de la fille de Judas.

La blonde se hâta ainsi de terminer les derniers mètres la séparant de son fils, une fois Zebella partie. « Déodatus. » l'interpella-t-elle à portée de regard d'une voix grave mais l'œil brillant d'inquiétude. « Suis-moi. » ordonna-t-elle d'un ton qui ne tolérait aucune protestation, s'écartant ensuite du groupe de badaud une fois assurée que le garçon l'accompagnait. Elle rejoint ainsi la porte la plus proche qu'elle poussa pour se retrouver dans un couloir quelconque qu'elle quitta immédiatement en ouvrant la première porte qu'ils croisèrent. Elle attendit toutefois qu'il pénétrât la pièce le premier avant refermer derrière elle. « Peux-tu m'expliquer ce qu'il se passe ? » commença-t-elle sans préambule et avec autorité en faisant face au garçon pour s'approcher de lui. « Je veux bien admettre que les d'Uobmab peuvent parfois réagir de façon démesurée mais... ». À l'arrêt, elle ferma les yeux et porta la main à son front un court instant, le temps d'une inspiration, avant de reprendre. « Les accusations que te porte la princesse Zebella sont graves, Déodatus. ». En cela elle espéra du plus profond de son âme qu'il ne s'agît que de calomnie. Elle en doutait cependant fortement. Elle attaqua ainsi sans détour. « Est-ce que ce qu'a dit Zebella est vrai ? Et ne me mens pas. Ce n'est pas ainsi que tu pourras arranger ta situation. Il est moins aisé de douter d'une parole royale, même en connaissance du caractère de celle-ci. » gronda-t-elle avec le plus de calme qu'elle pût offrir. Un calme qu'elle sentait s'essouffler à mesure que Déodatus lui dévoilait sa version de l'histoire. C'était à peine croyable, et pourtant elle ne remit pas un instant en doute ce que lui révélait son fils. La panique se lisait sur son visage et s'entendait dans ses mots. Mais c'était exactement parce qu'elle avait le détail de l'histoire qu'elle ne put tenir plus le silence, et explosa. « Par tous les dieux, Déodatus ! ». Son corps n'arrivait plus à supporter le tourbillon des évènements et elle commença à traverser la pièce, y tournant comme un lion en cage sans aucun repère. « À quoi as-tu bien pu penser ?! N'as-tu pas réfléchi une seule seconde aux conséquences d'un tel acte ?! Crois-tu que ce soit normal de prendre une femme sans consentement de sa part ?! Surtout lorsque la dame en question est de sang royal ! Et plus encore lorsqu'elle porte le nom de d'Uobmab ! ». Son acte n'était pas la seule cause de son tourment. Depuis la provocation de Zebella, deux mots ne cessaient de tourner en boucle dans sa tête. Pas encore. Pas encore. Pas encore. « Mais qu'est-ce qu'il t'est passé par la tête ?! » s'exclama-t-elle une dernière fois en cessant enfin ses allés et venus. Elle en avait bien une idée. Elle connaissait ce qu'il avait vécu. La menace d'un homme forçant au dilemme et finir par commettre une action répugnante en croyant faire le bon choix pour son bien. Y songer l'acheva. Judas trouvait-il cela si amusant de troubler sa famille ? De lui retirer ses enfants ? Elle s'effondra sur le canapé, le regard dans le vide et le cœur en cendres. Son cerveau fonctionnait à toute allure derrière ses yeux vitreux, cherchant difficilement une solution à ce problème. Elle ne pouvait soustraire Déodatus à la punition, c'était un fait. Mais elle ne pouvait accepter celle que Zebella lui réservait. « Je vais lui parler. » fit-elle dans un souffle à peine audible, sans bouger pour autant. « Je vais aller lui parler. » se répéta-t-elle, plus fort, avant enchaîner, sévère. « Ne crois pas que je pourrais t'innocenter, ni même que je le ferais. Porter atteinte à l'intégrité d'un sang royal ne se fait pas sans conséquence à assumer par la suite. ». La veuve se redressa, prenant un instant pour trouver un équilibre qui lui manquât. La migraine lui était revenue, plus tabassant qu'en début de journée. Elle était plus épuisée qu'au début de sa maladie. En d'autres termes, elle ne se trouvait pas dans le meilleur des états pour rejoindre Judas. « Mais je ne peux pas laisser mon fils aller droit à l'échafaud. » ajouta-t-elle avec tout l'amour d'une mère.

Elle quitta la pièce, laissant Déodatus seul avec lui-même. Probablement ne le serait-il pas longtemps. Retrouvant un minimum de contenance, elle retourna dans la salle de bal où, à peine y eut-elle mis un pied, elle dévisagea vivement et avec attention chacun des convives présents. Malgré les nombreux regards qu'elle rencontra, il n'y en avait plus qu'un seul qui lui importât actuellement et il ne semblât pas être présent. Un sifflement agacé fuita entre ses dents serrées et, sans s'attarder plus, elle sortit dans les jardins, faisant peu cas du monde alentour et espérant que Judas ne se promenât pas dans les couloirs du château où il serait bien trop difficile à trouver. La tâche ne s'avéra cependant pas plus aisée dans les ténèbres de la nuit. Scrutant les ombres, elle sut enfin quelle direction prendre au son de sa voix brisant le silence nocturne. Elle reprit alors sa marche rapide, se hâtant de trouver le souverain avant qu'il ne disparaisse à nouveau. Entre la tension qui nouait ses muscles, la fatigue de ses états d'âme, les restes de sa fièvre, la précipitation pour atténuer la condamnation de Déodatus... Elle était épuisée et à bout de souffle quand elle le vit enfin. Ce qui ne l'arrêta pour autant pas et, après une profonde inspiration, elle reprit sa marche de plus belle encore. « Monseigneur ! » l'interpella-t-elle, avant de ralentir la cadence. Son regard fut pourtant happé par une autre présence à laquelle elle ne s'attendait pas. « Natanaël ? » lâcha-t-elle, autant étonnée que surprise de le trouver seul ici. « Où se trouve Yvonelle ? » l'interrogea-t-elle mécaniquement avant se rappeler ce qui l'avait mené ici. Pouvait-elle lui porter toute son affection, il y avait plus urgent à régler pour l'instant, aussi chercha-t-elle à nouveau l'attention de Judas. « Votre Majesté, j'espère ne pas vous déranger. » commença-t-elle dans une vive révérence. Bien qu'elle abhorrât sa personne, elle ne pouvait faire fi des mœurs et du respect dont elle devait faire preuve à son égard. Pas ici. Aussi révoltée pouvait-elle en être, elle ne pouvait se permettre un trop excès de zèle quand elle s'apprêtait à lui demander un service. « Toutefois je souhaiterais m'entretenir avec vous pour une affaire importante concernant votre fille, la princesse Zebella, et mon fils, Déodatus. ». En même temps qu'elle prononça ces mots, elle usa de toute sa volonté pour ancrer son regard dans le sien. « Je vous en prie. » ajouta-t-elle, suppliante. Elle savait ce qu'une discussion avec cet être risquait d'impliquer, et que le supplier à genoux ne serait jamais suffisant. Elle cèderait pourtant. Elle cèderait à tout pour la vie de son fils.
:copyright: ASHLING POUR EPICODE




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Mer 16 Nov 2022, 22:33

Chelae
Le Conte
Son visage se leva vers son interlocuteur pour s'adoucir.

-Merci.

Gustave était gentil de la complimenter et de lui proposer son oreille attentive, et en cela elle se surprenait à être surprise. Elle aurait dû s'en douter : si on le disait séducteur, alors il devait avoir plus d'un atout dans sa poche. Néanmoins, elle s'était attendue à se heurter à un homme bien moins accessible, et donc – elle imaginait – enviable de la sorte. Clémentine se sentit soulagée.

-Ce n’est rien dont il faille s'inquiéter.

Comme à l'usuelle, la d'Ukok rabaissait ses ennuis à de simples petits tracas personnels. Ça ne devait pas l'intéresser, comme cela ne devait intéresser personne. De plus, elle comptait régler cela seule. Ernelle l'avait déjà suffisamment aidée et à présent, elle préférait se débrouiller, afin d'éviter de déranger ou d'entrainer d'autres à sa suite, dans une spirale de tourments qu'ils n'auraient guère demandée. En se concentrant sur son cavalier, Clémentine espérait se détendre. Ainsi, elle danserait mieux et surtout, elle voulait être d'une compagnie plus agréable pour le De Tuorp. Les paupières closes, elle se força à se laisser entrainer par l'homme dans la valse. Ce lâcher-prise l'apaisa encore et étira doucement ses lippes en un sourire doux et reconnaissant. Elle fut heureuse que cela suffît. Le cas contraire, elle se serait éventuellement penchée sur la question de l'alcool, bien qu'elle sût cela indécent. Elle avait failli y céder tout à l’heure pourtant. Comme quoi, la panique n’était pas son amie. Clémentine ne buvait pas beaucoup quand la boisson ne consistait pas en des thés, des infusions, ou bien tout simplement de l'eau. Pieuse, elle s'interdisait souvent les folies de ce que l'on savait être une drogue sans pour autant se l'admettre.

Clémentine rouvrit les yeux sur son partenaire et un doux rose vint poudrer ses joues. Malgré l'étrange atmosphère qui stagnait dans la salle de bal comme une brume matinale, elle parvenait à se ressourcer en ondes positives. C'était, bien entendu, sans compter sur l'intervention de Gustave, qui stoppa net ce processus de photosynthèse. Là, ses yeux s'écarquillèrent, et le rose vira au rouge. La prise qu'elle avait sur son cavalier se serra sensiblement.

-Ah... ah oui ?

Hermilius, amoureux d'elle ? Ses prunelles se baladèrent dans la salle, ne cherchant rien de particulier autre que d'éviter tout contact visuel avec Gustave. Hermilius avait dit ça ? Était-ce donc là toutes ses intentions ? Alors même que la révélation croulait sous l'évidence, l'entendre sonnait d'une manière aussi déconcertante que nouvelle.

-Eh bien...

Un silence, qui lui parut durer une éternité, passa. Elle ne savait pas du tout quoi dire.

-Il est vrai qu'Hermilius est venu me voir à deux reprises, mais nous ne nous sommes pas vraiment parlé. Nous ne nous connaissons pas, pour ainsi dire.

Sa sœur l'avait mise en garde. Devait-elle le lui dire ? Considèrerait-il cet avis, ou se tiendrait-il du côté de son cousin ? Malheureusement, il était plus probable que le De Tuorp reste chez les De Tuorp. Les deux familles se connaissaient trop mal pour que l'un de ses membres ne s'aventure dans l'autre parti sur le plan des opinions.

-A l'heure actuelle, j'ai peur de ne pas pouvoir prétendre partager ses sentiments.

Elle disait cela avec une petite voix aiguë, que probablement seul Gustave pouvait entendre. Elle se sentait presque impudente à répondre de la sorte, d'autant plus qu'elle n'omettait pas l'hypothèse de se tromper. Et si, en discutant un peu plus avec le concerné, elle finissait effectivement par l'apprécier autant que lui pouvait le faire ? Même si elle voyait difficilement cette éventualité se concrétiser, qui, autres que les dieux, pouvait savoir ? Après tout, son amour pour Placide relevait davantage de la fantaisie qu'autre-chose. Mais parviendrait-elle à aimer un autre, autant qu'elle aimait le prince actuellement ?

-Je crains avoir besoin d'y réfléchir.

Elle accentua son expression affable, bien qu'elle sût qu'elle paraitrait imminemment fausse. Elle ne se sentait pas de lui exprimer à quel point sa relation avec Hermilius la mettait mal à l'aise, et plus encore maintenant. Heureusement, ou malheureusement tout compte fait, Zébella mit fin à son supplice psychologique. En apercevant la lame placée sous la gorge du d'Etamot, une exclamation d'effroi s'échappa de la gorge de la couturière. La danse cessa aussitôt, au même titre que la musique. Sa main se plaça devant sa bouche et Clémentine se pressa instinctivement contre son cavalier. Ses yeux faisaient des va-et-vient entre les principaux protagonistes. Au fur et à mesure des révélations de la princesse, l'horreur déformait son visage. Comment était-ce possible ? Déodatus, un si jeune homme, avait-il véritablement... ? Alors qu'elle ne connaissait même pas l'enfant, la désillusion la frappait de plein fouet. Par-dessus cela, la pauvre Adénaïs devait subir l'accusation de son propre fils. C'était affreux. La détresse enflammait les entrailles de Clémentine et elle s'en retrouvait paralysée. Elle aurait aimé pouvoir agir, aider d'une quelconque façon, mais le pouvait-elle seulement ? Elle se colla davantage à Gustave, effrayée, alors que l'altercation prenait fin. Elle s'en rendit compte et reprit immédiatement de la distance, rouge de honte.

-Excusez-moi, je suis vraiment désolée !

Les larmes aux yeux, elle ne parvenait plus à regarder son cavalier en face.

-Pardonnez-moi, je... je crois que j'ai besoin de prendre l'air...

C'était trop. Si elle restait ici, elle allait finir par suffoquer. Clémentine n'eut d'autre choix que de quitter Gustave. Elle s'en voulut de ne pas prendre le temps de se confondre en excuses.


~885 mots~
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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Jeu 17 Nov 2022, 13:39



Les Portes


« Oui… » soufflai-je, sans détailler davantage. Je ne voulais pas décevoir Montarville, bien qu’une partie de moi se demandait encore pourquoi est-ce qu’il m’avait confié cette tâche. L’autre se disait que je ne devais pas douter des ordres du Roi. Je ne savais pas. Il m’avait troublé. Il aurait pu me jeter au cachot là où il s’était montré compréhensif. Je m’en voulais d’avoir perdu les Princesses de vue et ma culpabilité me faisait penser qu’il n’aurait jamais dû demander à un adolescent de garder à l’œil deux autres adolescentes. Je croyais néanmoins ne pas être le seul à être dans la confidence. Peut-être m’avait-il chargé de l’affaire simplement pour s’assurer de mon honnêteté ? Peut-être testait-il ma loyauté ? Un simple test. La garde devait être chargée de la même mission. S’il s’agissait d’une épreuve, j’étais en train de l’échouer lamentablement. Pourtant, lorsque je voyais Rosette, le monde autour de moi me semblait aussi lointain qu’inintéressant. Sa chevelure attirait mon regard et, comme l’aurait fait le soleil, j’avais la sensation de me brûler les yeux, sans que ce ne fût pour autant désagréable. « C’est vrai. » Si nous restions ensemble, il n’y avait aucune certitude. Néanmoins, je voulais tellement prolonger cet instant que j’aurais confirmé n'importe quelle proposition. Mes yeux descendirent sur nos mains lorsque je sentis son trouble. Sa peau était douce. Cela ne devait pas toujours être le cas, d’autant plus si elle jardinait. Parfois, ses mains devaient être rêches, pleines de terre. Ses ongles devaient être noirs. Mes pensées coulèrent et je l’imaginai s’enfoncer une écharde dans le doigt durant la construction d’un nichoir. Si j’avais été de son rang, si j’avais pu me tenir à ses côtés, j’aurais pu l’aider à la retirer, en prenant sa main dans la mienne et en me penchant sur le problème. De cette proximité, peut-être aurions-nous pu… Je fermai les yeux et bougeai légèrement la tête. Non.

« Je ne suis pas sûr de pouvoir vraiment… » Cela dit, comme elle venait de l’avancer, Montarville était son oncle. « Hum… » J’ouvris une première porte. Deux hommes étaient en train de discuter à l’intérieur d’un petit salon. Leurs yeux se tournèrent vers nous. Je fis une révérence en m’excusant, avant de refermer le battant. J’espérais que ceux que nous cherchions ne se trouvaient pas dans le jardin. Si c’était le cas, alors nous étions en train de faire fausse route. J’étais néanmoins rassuré à chaque fois que je voyais un garde passer. Si l’armée était si présente, il n’y aurait probablement pas de problèmes. J’ouvris une deuxième porte. Dix femmes étaient agglutinées les unes sur les autres, à glousser, tant et si bien qu’aucune ne remarqua ma présence. Je lâchai la poignée doucement et reportai mon attention sur Rosette. « La situation est un peu compliquée… » Je ne savais pas ce que je devais lui dire. Pourtant, je me voyais mal lui cacher quoi que ce fût, pas en l’ayant devant les yeux, encore moins après l’avoir prévenue de ne pas s’approcher du Prince Merlin d’Uobmab.

J’ouvris une troisième porte. La pièce était vide. Mon regard se porta sur Rosette et ma main attrapa son poignet afin de l’attirer avec moi. « Venez. » lui dis-je, discrètement, avant de l'inviter dans mon sillage. Je fermai la porte derrière nous et fis tourner la clef dans la serrure avant de m’avancer vers la rousse. Mes mains se posèrent doucement sur ses épaules. « Est-ce que vous pouvez garder un secret ? » lui demandai-je, avant de continuer. « Comme vous l’avez deviné, le Roi m’a chargé de surveiller les Princesses à cause du Prince Merlin. » Je voulais me montrer déterminé mais plus je l’observais, si proche, plus ma fermeté s’effritait. Elle devait me prendre pour un rustre, à l’avoir attirée ainsi dans cette pièce qui semblait servir aux répétitions musicales ou à la pratique de la danse de salon. Les deux sans doute. « C’est à cause de la Princesse Zébella… » continuai-je. « Elle m’a demandé de tuer son frère, sous prétexte qu’il est violent. » Je déglutis. « Bien sûr, je n’avais pas l’intention de le faire, malgré la contrepartie qu’elle me proposait. » Dans ma position, en revanche, il valait mieux ne pas refuser explicitement. Quant au refus, je préférais ne pas préciser que j'avais longuement hésité. « Je pensais aller au bal en tant que faux noble d’Uobmab, afin de profiter de la soirée, et aviser ensuite. Mais je suis proche de la Princesse Adolestine et… j’ai appris que Merlin avait été violent avec elle également. » Pourquoi m’étais-je enfermé dans une pièce avec elle ? De là où je me tenais, je sentais son parfum. J’inspirai et me détachai d’elle, gêné. Je me mis à marcher, pour arrêter de penser à ses yeux qui me regardaient et à ses lèvres qui m’appelaient. Je devais rester concentré sur mon histoire. Cependant, plus je la racontais, plus je réalisais que Zébella ne manquerait sans doute pas de se venger. Être avec Rosette ce soir me paraissait donc d’autant plus précieux. Ce serait peut-être la seule et unique fois. « Je suis donc allé voir le Roi qui m’a chargé de les surveiller. » Je m’arrêtai. « Mais je me suis laissé déconcentrer. » avouai-je enfin. Mon cœur s’emballait à chaque fois que je l’admirais. J’espérais qu’elle me remettrait dans le droit chemin, qu’elle s’écrierait que nous devions absolument trouver les Princesses parce que, malgré tout, malgré l’urgence, je n’en avais plus vraiment envie. « Vous... » J'avais envie de lui demander si elle avait déjà embrassé quelqu'un mais ma voix céda lorsque mon poing se referma à côté de ma cuisse. Je ne devais pas m'aventurer dans ce sentier-là. Ce serait trop dangereux. Dangereux et stupide.

906 mots
Erasme (Clémentin):
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Adriæn Kælaria
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Adriæn Kælaria
Jeu 17 Nov 2022, 18:37

Les Portes - Chapitre V  - Page 18 Zwbn
Image par Kelogsloops
Les Portes - Chapitre V



Rôle:

Lambert suivit le regard de Montarville lorsqu’il parla de sa femme. Aux côtés de son amie, elle parlait avec Judas d’Uobmab. Elle n’avait pas l’air si impactée par leur dispute. Il soupira et s’avança lentement dans la pièce, en frôlant les murs et les tables des buffets comme s’il désirait en borner la parcelle. Childéric discutait avec Ezidor. Il attendit donc qu’une opportunité se créât. Les conversations possédaient toujours des points ou des points virgules. S’ils tardaient trop à se présenter, il interviendrait au moment d’une simple virgule. Il attrapa un verre par réflexe et le porta à ses lèvres. Le Roi avait raison : sa fille n’était pas dans la salle. Il manquait beaucoup d’adolescents. Par réflexe, il chercha Clémentin. Il savait qu’il aurait dû être là. Il n’était pas là. Les paroles de Madeline lui revinrent en tête, sur l’inclination de son soi-disant fils pour Rosette. Il se frotta le front, légèrement las. Généralement, lors des célébrations, il était enjoué. Ce n’était pas le cas actuellement. Il avait un mauvais pressentiment et cela n’avait rien à voir avec Rosette et Clémentin. Sur leur cas, il pensait qu’il fallait bien que jeunesse se fît. Il était passé par là, lui-aussi. Il ne le dirait jamais tout haut mais il espérait que sa fille aurait plusieurs expériences avant de se marier. Ensuite, il serait trop tard. Du moins, il voulait croire que Rosette respecterait l’institution et, surtout, le ferait de bon cœur, après avoir trouvé un homme qui lui conviendrait. Ce qui le préoccupait était davantage de l’ordre de l’avenir du Royaume. La présence de Judas n’était jamais une bonne chose, bien qu’il n’eût jamais cherché à acquérir Lieugro par le passé. Lambert se demandait s’il n’avait pas une attache ici, quelqu’un qu’il appréciait ou avait apprécié. Un enfant, peut-être ? Il ne venait pas souvent de manière officielle mais il avait une propriété à la campagne, entourée de forêt. Un jour, il avait regardé les plans cadastraux. Une autre demeure se trouvait non loin. Ça l’avait marqué parce qu’elle appartenait à Garance et qu’elle ne lui en avait jamais parlé. Il n’avait rien demandé par la suite mais, en y repensant, ça lui paraissait plus que hasardeux. Il n’aimait pas ça.

Alors qu’il ressassait ses soupçons, il capta que quelque chose était en train de se passer. La réaction de la foule l’avertit bien avant son propre regard et il fut le témoin silencieux de la scène initiée par la Princesse d’Uobmab. Il sentit des frissons remonter son échine. Si ce qu’elle disait était vrai, et il n’avait aucune raison de ne pas la croire, alors la situation risquait de déraper. Il chercha Montarville, qu’il ne trouva pas. Il chercha Judas, pour le même résultat. À croire que les Souverains aimaient bien disparaître aux moments où leur présence était souhaitée. Lambert espérait juste qu’ils n’avaient pas disparu ensemble. Laisser son ami avec l’autre fou était la dernière chose qu’il désirait faire. Avec un peu de chance, le Roi de Lieugro était avec Madeline. Quant à Judas…

Une fois la scène terminée, le Conseiller du Roi rejoignit Childéric. « Attendez que l’agitation se calme et placez Déodatus d’Étamot en détention le temps que le Roi puisse se saisir de l’affaire. Aucun duel n’aura lieu sans son consentement et je doute qu’il y consente. » murmura-t-il. Il n’était pas à cent-pour-cent convaincu. Le problème c’est qu’il s’agissait de la fille d’un autre Roi. Qui pouvait savoir ce que ce dernier exigerait comme compensation ? Quand bien même Judas ne serait-il pas impliqué dans l’histoire, il n’hésiterait pas à en profiter pour asseoir une forme quelconque de domination. Lambert pensa brièvement qu’il serait toujours possible de marier les deux concernés pour éviter tout scandale, puisque c’était parfois ce qu’il se faisait, mais l’idée lui déplaisait. Si Zébella avait réellement été violée, elle ne consentirait jamais à épouser son violeur. Néanmoins, si Déodatus méritait la prison, il ne méritait certainement pas la mort. Il était encore jeune et les circonstances de l’affaire n’étaient pas connues. « Je compte sur vous. » dit-il, avant de héler un domestique afin qu’il lui apportât de quoi écrire. « Je vous remercie de trouver le Roi et de lui confier ce mot. Vous comprenez que c’est urgent. » Il avait résumé la situation.  

Lorsqu’il vit la Princesse s’avancer vers le buffet, il attrapa deux nouveaux verres et fit deux pas en avant pour aller à sa rencontre. « Princesse. Je suis Lambert d’Eruxul, le conseiller du Roi. Vous vous souvenez de moi ? » Il lui tendit l’un des verres qu’il tenait. « Sachez que je vous crois et que c’est pour cette raison que je vous prie de bien vouloir me suivre. Il n’est pas bon de rester dans votre état après un événement comme celui-ci. » Là-dessus, et sans qu’ils se fussent concertés, les idées de Lambert rejoignaient pleinement celles de Childéric. « Le médecin De Xyno qui se trouve ici pourrait vous examiner pour s’assurer que vous ne souffrez d’aucun problème physique et vous confectionner une potion pour éviter les désagréments qui pourraient survenir à cause de la semence de votre agresseur. » dit-il, en désignant le docteur. « Bien sûr, je ne vous oblige à rien et nous pouvons faire intervenir une médecin si vous préférez, mais… » il décida d’aller dans son sens, pas à son encontre. « … si par malheur il arrivait que Déodatus survive au duel, le fait de vous avoir examinée le conduirait à être jugé. La prison à vie est parfois pire que la mort, surtout pour un si jeune homme. D’autres pourraient profiter de son physique gracile. » Ce qu’il voulait insinuer, sans le dire, c’est qu’il se ferait sans doute violer à son tour s’il se faisait enfermer. Il était trop faible pour lutter, contre le viol et les autres sévices qui se déroulaient souvent en prison.

941 mots



Les Portes - Chapitre V  - Page 18 4p2e
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Adriæn Kælaria
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Adriæn Kælaria
Ven 18 Nov 2022, 00:11

Les Portes - Chapitre V  - Page 18 4yi9
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Les Portes - Chapitre V



Rôle:

« Bien sûr. » répondit-il, lorsqu’elle l’interrogea sur le fait de savoir s’il était joueur. « Mais je n’aime pas jouer à perte. » Il y avait toujours un risque lorsqu’il était question de jeu. Néanmoins, il était généralement aussi prudent que patient. Vu la conversation qu’il venait de surprendre, il aurait dû l’être plus encore. Il aurait dû reculer et ne pas se montrer. Pourtant, il n’avait pas pu s’en empêcher. Peut-être que ses échecs constants à courtiser correctement Clémentin l’avaient rendu d’autant plus cruel et entreprenant ? Cruel, il l’était souvent. Il ne pouvait le nier. Derrière ses manières et ses atours d’homme respectable se cachait un esprit fourbe qui se repaissait volontiers du malheur d’autrui. Il ne l’avait jamais nié ou, du moins, il ne s’était jamais plongé lui-même dans le déni. « Nous le saurons bien assez tôt. » Si les plans du Prince d’Uobmab aboutissaient. Hermilius sourit. Il ne pensait pas Ezidor être du genre à se faire prendre. Il était bien trop malin. Vu tous les crimes qu’il avait commis, il aurait sans nul doute croupi en prison sans un esprit affuté. Bien sûr, le de Tuorp ne les connaissait pas tous mais il lui avait lui-même demandé d’assassiner Gustave. Le médecin n’avait pas refusé. Combien de nobles faisaient-ils appel à ses services ? Combien de secrets connaissait-il ? Surtout, combien feraient-ils tout pour le sauver afin d’éviter que ces secrets ne se baladassent dans la nature ? Il se doutait qu’Ezidor les tenait tous par la peau des couilles, lui y compris. Néanmoins, ça lui allait. Ils étaient tous les deux des monstres, certes, mais ils pouvaient cohabiter sans s’entre-dévorer. Il sourit. « J’en doute. À moins que cela ne soit déjà fait ? » Avait-elle seulement déjà été loyale ? Qui recevait les confidences d’un prince étranger dans un jardin aussi sombre ? Hermilius avait toujours considéré Garance comme une femme droite. La découvrir sous un nouveau jour excitait ses sens. Néanmoins, peut-être n’était-ce là qu’une parade ? Peut-être avait-elle attiré ce jeune coq près d’elle afin de savoir ce qu’il mijotait ? Peut-être allait-elle tout murmurer à l’oreille de son frère dès qu’elle en aurait l’occasion ? Il valait mieux être prudent. « Le Prince est encore jeune. » répondit-il simplement. « Je ne suis pas de ce genre-là et, pour être honnête, je ne crois pas qu’une femme comme vous puisse être soumise. » Plus il lui parlait, plus il se persuadait qu’elle était du même genre que lui : le genre à côtoyer la nuit d’un peu trop près et à aimer les frissons que procurait l’idée d’être un monstre, caché dans l’obscurité de cette dernière. « Vous ne le saurez que si l’on coopère. » dit-il, un sourire aux lèvres et sans faire le lien avec la Princesse Coline. Il ne savait pas qu’elle savait. Elle ne l’avait jamais dénoncé.

« Ma cousine ? » Il pensa à Eléontine. Ses idées n’étaient pas particulièrement tendres à son égard. Il était partagé. Elle savait ce qu’il était, il l’avait aimée durant des années et peut-être sa relation avec elle reflétait-elle au mieux qui il était réellement. Maintenant qu’il essayait de se ranger, elle l’encombrait. Elle en savait trop sur lui et, surtout, il avait conscience que sa langue pouvait être particulièrement bavarde. Néanmoins, il n’avait aucune certitude sur le fait qu’elle le trahirait si elle apprenait qu’il aimait réellement Clémentine. Cet amour était dangereux : il essayait de le forcer à changer sans y parvenir tout à fait. Hermilius ne côtoyait pas assez la brune pour mesurer pleinement l’impact qu’elle avait sur lui. Loin d’elle, il redevenait fourbe. Près d’elle, il se sentait différent. Il n’aimait pas ça mais avait du mal à lutter. Il tentait de se guérir de ses habitudes mais le simple fait de séduire lui plaisait. Il aimait faire le mal, arracher la virginité des jeunes filles et faire revivre leur premier amour aux plus âgées. « Je vous assure que non. » susurra-t-il à son oreille avant de se déplacer pour lui faire face. Son corps, au milieu de la végétation, ne faisait presque aucun bruit. Le silence de la nuit leur répondait. « Et vous, est-ce votre frère qui vous envoie séduire le Prince d’Uobmab afin de le poignarder dans le dos ? » susurra-t-il. Il sourit et se pencha un peu. « C’est fou comme il est aisé de perdre quelqu’un en utilisant ses plus bas instincts. Surtout les adolescents impétueux. » Il ne savait toujours pas ce qu’elle comptait faire. Il se rapprocha, pour pouvoir de nouveau murmurer à son oreille. Il ne voulait pas qu’on les surprit comme il avait pu surprendre Merlin plus tôt. Son corps contre le sien épousait très bien ses formes. « Comme vous l’aurez compris, je peux être à vous si nos intérêts convergent. En d’autres termes, si vous ne coopérez pas avec ces étrangers, vous pourrez m’utiliser comme vous le désirerez. » Il avait bien une petite idée de comment elle pourrait l’utiliser mais, bien que le sexe fût une préoccupation dominante chez lui, il pensait surtout à son avenir. « Dans la mesure du raisonnable. » Il aimait bien être proche d’elle. Il n’avait jamais essayé avant. « Sinon, nous n’aurons qu’à dire que cette conversation n’a jamais eu lieu et repartir chacun de notre côté. Je sais être discret. » Il était sincère. Il n’avait rien à gagner à se la mettre à dos, ni même à dévoiler ce qu’il avait pu entendre. Il trouvait que Montarville avait fait son temps et ses enfants étaient bien trop jeunes pour le remplacer. Garance lui semblait être bien plus taillée pour la couronne, surtout à présent qu’il lui parlait véritablement. Elle s’avérait être bien plus intéressante qu’il n’avait pu l’envisager jusqu’ici.

946 mots



Les Portes - Chapitre V  - Page 18 4p2e
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Min Shào
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Min Shào
Ven 18 Nov 2022, 09:42


Image par Pauline Voß
Les Portes - V


Je souris en réponse à l'invitation gracieuse d'Ernelle. Ma main se posa sur la sienne et notre danse commença. Dès que nos corps se mouvèrent au rythme de la danse, le monde sembla disparaître autour de moi. Mon amie avait ce talent de me ramener dans les moments les plus heureux de ma vie. Le contexte était différent, mais notre lien était intact. Mon cœur bondit dans ma poitrine à cette réalisation et mes inquiétudes disparurent en un instant.

Soudain, elle changea de pas. La D'Ukok n'avait pas besoin de ce stratagème pour me faire voyager, mais c'était ce genre d'attention qui faisait d'elle mon rayon de soleil. Mes pieds s'adaptèrent naturellement à notre nouvelle danse, comme enchantés par mes souvenirs. Ma véritable nature reprenait ses droits. J'aurais dû m'arrêter de peur de me faire remarquer, mais une force invisible m'en empêchait. J'avais besoin de ce moment de respiration. La salle de bal et ses convives avaient disparu. Si Ernelle n'avait pas le pouvoir de remonter le temps, elle l'avait ralenti.

Soudain, ma cavalière prit la parole et me tira de ma transe. « Tu méritais de le savoir », répondis-je, la voix rêveuse. Je n'étais pas totalement prête à revenir sur terre. Une fois de plus, Ernelle obéit à mes envies secrètes et me balança d'un mouvement à la fois ferme et doux. Elle avait aussi ce talent. Je me laissai entraîner et courbai le dos, puis me redressai tout aussi promptement. Je sentais mon cœur palpiter. A la mention de son aide en retour, je réfléchis. Pourrait-elle m'aider à prendre la bonne décision ? Malheureusement, c'était en-dehors de sa portée.

Soudain, Ernelle se rapprocha de moi et me souffla à l'oreille une idée dangereuse. Son audace était certainement l'une des choses qui m'avait le plus attirée quand j'avais appris à la connaître. Je m'en étais inspirée pour faire preuve de plus de courage. Aujourd'hui n'y faisait pas exception. Je lui répondis d'un sourire entendu et cherchai mes mots, quand  la musique s'interrompit de façon inattendue. Des invités étouffèrent un cri de surprise, et je suivis leurs regards en arrêtant de danser. Je m'étais immobilisée, mais mes mains restaient collées au corps de mon amie. Mes yeux s'arrêtèrent sur la Princesse d'Uobmab et sa... victime ? Bourreau ? Et où était le Roi ? Encore une chose qui allait lui éclater en pleine face.

Je tressaillis en écoutant la Princesse mentionner sa vertu. Je n'avais aucune sympathie pour les membres de ce Royaume, mais je ne pus retenir une vague d'empathie pour elle en tant que femme. Elle fut suivie par une vague de rage en regardant l'homme pris en joug. Qu'avait-il fait ? Ce qui semblait être sa mère s'était précipitée à ses côtés et l'emmena à part. Il allait passer un sale quart d'heure. Du moins, je l'espérais. « Hermilius, Gustave, Déodatus... y'a-t-il encore des hommes respectables dans ce Royaume ? » soufflai-je, incrédule. Le visage de Montarville se dessina dans mon esprit. Je me retournai vers Ernelle et l'entraînai avec moi. Nous n'avions même pas besoin d'un prétexte pour quitter la salle toutes les deux sans éveiller les soupçons : tous les regards étaient portés sur Zébella et Déodatus. « Nous devons faire quelque chose. »

Alors que j'entraînais Ernelle dans une chambre, je jetai un coup d'œil pour m'assurer que le couloir était dépourvu de regards indiscrets. J'entrai et, sans attendre, sortis de mon corset une clé à moitié rouillée. Je la fis tournoyer dans ma main et réfléchis à toute vitesse. Un univers de possibilités venait de s'ouvrir à nous. « Il nous faut un plan », m'exclamai-je, à moitié pour moi-même. J'étais fébrile, comme si je tenais dans ma main une arme mortelle. Déposer ma lettre de confession dans la chambre du Roi était la seule fois où j'avais utilisé la clé. Mais Ernelle me faisait pousser des ailes. « Que veux-tu faire ? » Je me rapprochai d'elle et hésitai un moment. « Comment pourrions-nous aider le Roi ? » Je me mordis la lèvre.

L'annonce de Coline comme héritière royale alors que les D'Uobmab étaient présents était déjà dangereux, mais avec cette affaire d'accusations au-dessus de la pile... le règne des De Lieugro était en péril. Combien de corbeaux attendaient de le voir tomber pour picorer sa chair ? « Comment prévenir la catastrophe ? » Je la voyais arriver comme un raz-de-marée. Nous pourrions fouiller dans les chambres des D'Uobmab, mais je doutais que nous trouverions grand chose. Et peu importe les preuves qui pouvaient les incriminer, ils nieraient et emploieraient la force. Il fallait simplement faire le dos rond jusqu'à ce qu'ils repartent chez eux. Ce qui était désormais impossible à cause de ce Déodatus.

Mes yeux se replongèrent dans ceux de mon amie, dont la famille avait des liens étroits avec les D'Etamot. « Pense-tu que Déodatus... en serait capable ? Comment éviter le scandale, maintenant ? J'ai la désagréable impression que les D'Uobmab attendaient un prétexte pour nous affaiblir. C'est chose faite. » J'avais peur pour nous et pour le Roi. J'avais peur pour Ernelle. La paix était un équilibre fragile. Tout pouvait être remis en question ce soir. Il suffisait d'un seul mot de Judas.


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Kitoe
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Kitoe
Ven 18 Nov 2022, 14:26

Faust
Les Portes V
TW : *ego intensifies* et mentions de fesses


-Hm.

Gustave accueillit les réponses de Clémentine avec une certaine sobriété. A vrai dire, il était un peu désappointé. Cela aurait bien arrangé ses affaires si cette femme avait fourni un effort sur le plan sentimental. Heureusement, il pensait avoir sa pierre à poser sur l'édifice de cette question. Y réfléchir ? Oh oui, il allait l'aider à y réfléchir plus vite. Si la d'Ukok pensait pouvoir se cacher derrière cette excuse pour ensuite faire la morte, elle risquait d'être déçue. L'homme répondit à son faux sourire par un sourire tout aussi faux, car après tout c'était sa spécialité. Il allait émettre qu'il comprenait, mais ils furent rapidement interrompus. Se tournant vers la princesse d'Uobmab et sa victime, Gustave leva un sourcil curieux. L'annonce d'un duel le fit souffler du nez, mais cela trahissait une certaine nervosité. S'il ne craignait pas particulièrement les muscles de Zébella, le De Tuorp n’en restait pas moins soulagé de ne pas être impliqué dans cette sombre affaire. Au vu du peu de choix que lui laissait la jeune femme, Déodatus était un homme mort.

Gustave lança une œillade à sa cavalière. Celle-ci se pressait contre lui comme s'il était à même de la sauver de quelque chose. Cette réaction étira le coin de ses lèvres. Certaines femmes étaient attendrissantes, soit parce qu'elles se montraient peureuses, soit parce qu'elles s'attendaient systématiquement à ce que l'homme le plus proche vienne à leur rescousse. Cependant, il n'y avait rien à faire dans la présente situation. Gustave aimait beaucoup faire cet effet, car cela témoignait non seulement d'à quel point il était séduisant, mais aussi d'à quel point on le croyait costaud. Pas qu'il ne l'était pas, au contraire. Le coureur de jupons s'appliquait à maintenir sa forme physique précisément dans cet objectif. La réaction de Clémentine était le résultat de ces heures d'entrainement et bien entendu, c'était extrêmement gratifiant. Au-delà de cela, il ne disait jamais non à sentir le corps d'une femme contre lui. En général, ça faisait frétiller son énorme chibre, mais puisqu'il venait de se vider les bourses un peu plus tôt, ce n'était pas vraiment le cas actuellement. De plus, s'il tenait véritablement à soulever la d'Ukok, il savait qu'il devrait se montrer patient. L'on disait que la donzelle était la plus pieuse de la bourgeoisie du Royaume, qu'elle était prude et que sa vertu était toujours intacte. Maintenant qu'il côtoyait la dame de plus près, il n'était pas étonné, bien que cette manière de se coller à lui... Cette fois-ci, il leva ses deux sourcils. Le voilà qui était rassuré : à voir à quel point Clémentine était devenu cramoisie, celle-ci était bel et bien vierge. Gustave regarda la belle fuir le cœur des festivités sans bouger ni dire mot, un peu hébété. Cette femme était très dramatique. Lisait-elle des histoires d'amour à l'eau de rose ? Oui, très probablement. Il poussa un soupir. D'avance, il plaignait Hermilius.

Depuis l'intervention de Zébella, les événements reprenaient doucement leur cours. Gustave passa récupérer deux verres de champagne auprès d'un serveur avant de partir sur les traces de sa cavalière. Il n'eut pas de difficulté à la retrouver, puisqu'elle n'avait fait qu'une dizaine de mètres en-dehors de la salle de bal, sur la terrasse. Il la rejoignit en quelque enjambées.

-Tout va bien ?

Il savait que non, alors la réponse n'avait pas d'importance. Seule la rhétorique était maitresse dans ces moments. Il lui tendit l'un des verres avant de prendre appui sur la rambarde qui les séparait des jardins.

-Tenez, pour vous détendre. Lui-même but, tandis que son regard se perdait dans l'obscurité. C'est une drôle de soirée pour tout le monde.

On pouvait même aller jusqu'à dire qu'absolument rien n'allait. Ce bal était un chaos à lui tout seul, purement et simplement.

-Au vu de votre réaction, je ne pense pas qu'il n'y ait rien dont nous devons nous inquiéter. Vous avez l'air très préoccupée.

Gustave aimait son propre talent d'acteur, en tant qu'homme concerné et dévoué. Il n'avait pas encore décidé s'il voulait, et si oui, quand est-ce qu'il mettrait Clémentine dans son lit. Pour le moment, il continuait de tâter le terrain tout en essayant d'attirer sa sympathie.

-Est-ce à cause de l'accumulation de mauvaises nouvelles au cours de la soirée, ou bien est-ce autre chose ? Il marqua une pause afin qu'elle puisse y réfléchir. Ou bien est-ce au sujet d'Hermilius ? Il scruta son visage pour y déceler une réaction. Aimez-vous quelqu'un d'autre ?

Cela n'allait pas du tout dans son sens, alors il espérait se tromper. Pour autant, il pensait ne pas faire fausse route. Si Clémentine n'avait personne dans son collimateur – ce qui serait inquiétant à son âge – alors elle lui aurait répondu par des "pourquoi pas", plutôt que d'essayer maladroitement de repousser ses propositions tout en restant polie. Car oui, il était urgent de la caser si cette vieille fille ne voulait pas finir en vieille fille incapable de procréer. Il était assez terrifiant de constater que son propre neveu était déjà promis, là où l'aînée ne l'avait pas été ne serait-ce qu’une seule fois.

-Si tel est le cas, vous devriez vous marier dès que possible. Mais si tel était le cas, il imaginait que la relation était impossible. De qui pouvait-il bien s'agir ? Un homme déjà marié ? Sachez qu'Hermilius est réellement éperdu de vous. C'est un homme réservé, mais très attentionné. Vous savez, depuis qu'il n'a d'yeux que pour vous, il ne cesse de lire des encyclopédies et autres revues sur le jardinage.

Bon. Peut-être qu'il allait un peu trop loin. Il rit. Cela aurait au moins le mérite de détendre l'atmosphère.

-D'ailleurs, que diriez-vous d'une promenade ?

949 mots



Bijin
nastae:
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Min Shào
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Min Shào
Ven 18 Nov 2022, 14:39


Les Portes - Chapitre V


Rôle:

Natanaël voguait sur une mer sans fin. Il ramait, mais sa barque n'avançait pas. Il fouillait l'horizon à la recherche d'une berge, mais ne voyait rien d'autre qu'un bleu infini. Il lui semblât qu'il vogua pendant une éternité. Alors il se pencha et fouilla les abysses à la recherche d'un signe de vie. Mais il n'y avait rien. Les remous des vagues laissaient transparaître un vide béant qui s'étendait jusqu'aux entrailles de la terre. Un frisson de peur mêlée d'excitation le parcourut. Il se sentait attiré par cette gueule obscure. Et, irrémédiablement, le blond se laissa plonger sous l'eau.

Quand la surface disparut derrière un voile transparent, Natanaël se retourna et se laissa tomber, hypnotisé par les mouvements flous des vagues à la surface. Les bruits de l'océan avaient laissé place à un silence comme il n'en avait jamais fait l'expérience auparavant. C'était un silence absolu et total. Il ne respirait plus, mais ne se noyait pas pour autant. Il tombait, mais ne sentait pas son corps se mouvoir. Il s'accrochait à la seule sensation qu'il avait encore : la vue de la surface, qui s'éloignait de plus en plus. Et bientôt, elle fut si éloignée que les mouvements devinrent indistincts. L'eau devenait de plus en plus sombre. Il coulait de plus en plus profond. Le futur marin ferma les yeux. A moins que sa vision s'était tout simplement assombrie ? Il ne savait plus.

« Natanaël... » Un écho rompit le mutisme qui l'avait engourdi. Son corps se raidit et il tourna la tête à la recherche de l'origine du bruit. « Natanaël... » Il se retourna encore. Comme si ses mouvements avaient déclenché un courant marin, il commença soudain à être entraîné vers la surface. Le blond se débattit contre la menace invisible, paniqué. « Natanaël. » Mais ses mouvements ne l'emmenèrent nulle part. Il fut aspiré par le courant et retrouva un semblant de conscience. Ses paupières s'ouvrirent sur une bulle jaune. La lune régnait sans bruit dans la nuit. Lentement, les souvenirs commencèrent à lui revenir. La musique... le Bal. Yvonelle. Ezidor. Ses mains enserrèrent ses tempes. Il avait un mal de crâne et attendit un moment avant d'essayer se lever. Mais quand il s'exécuta, une douleur lui déchira le bas-ventre. « Aïe ! » Cette douleur lui était aussi inattendue qu'inconnue. *Est-ce que je suis tombé sur mon coccyx ? Mais combien de verres j'ai bu ?*  Il essaya de retracer les événements de la soirée, mais ses souvenirs s'entremêlaient dans un flou artistique. Avait-il parlé une minute ou une heure avec Ezidor ? Il n'en avait aucune idée.

Le blond connaissait cet état de vide causé par l'alcool. Il l'avait vécu une fois, et cela l'avait assez effrayé pour qu'il se jure de ne plus le revivre. Il était avec Elzibert et ils avaient laissé des traces peu gracieuses de leur soirée. Le réveil avait été un choc. Mais cette fois, les choses étaient différentes. Il n'y avait pas d'alcool renversé, ni de vomi. Juste lui et sa douleur, assis sur un banc et à l'écart de l'animation. Ezidor l'avait-il posé ici en remarquant son état ? L'humiliation lui noua l'estomac. Soudain, une silhouette furtive attira son attention. Ce dernier était si pressé qu'il ne le remarqua même pas. La seconde silhouette, en revanche, s'arrêta en le voyant. En tournant la tête, il reconnut instantanément Judas d'Uobmab. C'était un Roi aussi terrifiant que fascinant. Son Royaume était une puissance militaire titanesque, et il avait lu de nombreuses choses sur leur flotte. Ce n'était pas un homme à mécontenter. Il ne comprit pas son trait d'humour et ne se formalisa pas qu'il urine sans vergogne à côté de lui, trop occupé à remettre ses propres pensées en place.

« Majesté... je l'ai vu passer. Du moins, j'ai aperçu une silhouette, peut-être était-ce lui. » Il se leva et réprima un rictus de douleur, prêt à le guider. Mais d'autres bruits de pas, plus pressés, s'approchaient d'eux. S'il s'agissait d'un D'Uobmab, il était prêt à fuir, peu désireux de se lier à leurs histoires. Mais la personne qu'il vit le surprit bien plus. Adénaïs s'immobilisa devant eux, dans un état de détresse palpable. Il s'apprêta à répondre à sa question, mais elle reporta immédiatement son attention sur le Roi. Il tiqua en l'entendant citer le nom de Déodatus. S'il y avait bien un endroit où il devait être maintenant, c'était aux côtés de son ami, plongé dans la tourmente à cause de Zébella. « Je... je vais vous laisser », balbutia-t-il sans plus d'explications.

En revenant à la salle de Bal, Natanaël songea qu'il était bientôt temps pour lui de quitter le bal. Il n'avait plus le cœur à la fête. En plus, Yvonelle et Rosette avaient gâché l'ambiance. S'il ne pouvait enlacer des femmes pendant l'événement, quel était l'intérêt ? Dans la salle, une agitation certaine égayait les discussions. Etait-ce lui qui avait provoqué cette situation ? Ne trouvant pas son ami dans la salle, il s'adressa à un domestique : « Savez-vous où Déodatus D'Etamot est parti, je vous prie ? » Ce dernier sembla surpris par sa question et pointa un couloir quelconque. Le blond s'y engouffra sans plus attendre. « Déo ? T'es où ? » Ce dernier n'osait pas ouvrir les portes, de peur d'y trouver des scènes qu'il n'avait pas envie de voir. Il attendit une réponse en réfléchissant à des hypothèses. Peut-être aurait-il dû poser cette question au domestique avant d'aller le voir.

Mots: 901

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Stanislav Dementiæ
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◈ YinYanisé(e) le : 30/01/2016
◈ Âme(s) Soeur(s) : Aggripina, la seule, l'unique.
◈ Activité : Mangeur officiel de chaire fraiche
Stanislav Dementiæ
Ven 18 Nov 2022, 20:48


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Les portes - Chapitre V
Stanislav

Save that shit - Cremona Romance
TW : Violences verbales et il a culot monstre.
Rôle:

Tu observes les danseurs avec une intensité qui trahit ta recherche visuelle. Tu ne te sens pas bien. Peut être regrettes-tu ton comportement - juste un tout petit peu. Ou peut être crains-tu simplement les retombées de ton acte. Tu t'est laissé emporter par la crainte que t'a inspiré Judas, en oubliant que la fille n'est guère mieux, voire moins côtoyable encore. Sur le moment, tu avais tiré de l'assurance du fait que la bleue tairait sans doute son mal, honteuse de ce qu'elle avait engendré et ce qu'elle n'avait pu empêcher. Il aurait été plus simple, pour la fille tout comme toi, qu'elle accepta tes avances : cela lui aurait donné un semblant de contrôle sur la situation plutôt que de la subir et t'aurait évité de te ronger les sangs en attendant que ton coéquipier ne les rejoigne pour profiter de ta surprise. Seulement voilà : tu n'aperçois Merlin nul part. Le domestique s'en était allé transmettre ton message mais tu n'avais pas vu le prince s'empresser de découvrir ton cadeau. Cet empoté de serviteur avait-il bien délivré ton annonce, ou s'était-il perdu en route ? Agacé, tu sens les paumes de tes mains péguer et tu essuies leur moiteur sur le tissu de ta tenue. Ta nervosité rebondit sur les gardes qui surveillent l'événement. Tu as l'impression que leurs regards se posent sur toi de façon suspicieuse, comme s'ils étaient capables de deviner le jeu malsain auquel tu viens de t'adonner. Las, tu soupires et te mets en marche, essayant de trouver une partenaire pour t'accompagner dans une valse. Où se trouvent Rosette, Yvonelle ou même ta mère ? En cet instant, tu serais prêt à danser avec n'importe qui, même cette dingo d'Errazib que tu avais aperçu plus tôt sans t'intéresser davantage à elle. Toutes tes potentielles cavalières sont cependant absentes et tu fronces les sourcils, déçu.

Le bruit des bottes te fait te retourner : c'est là que tu la vois foncer sur toi. Zébella. Tu écarquilles les yeux, déstabilisé. Que fait-elle déjà là ? Et surtout, pourquoi fonces-t-elle sur toi telle une furie ? Tes yeux descendent sur la lame qu'elle tient dans sa main. Vite. S'enfuir. Courir dans le sens inverse. C'est ce que te cries ton esprit mais tes jambes sont de plomb, ton cœur semble flancher sous l'assaut de l'afflux sanguin et finalement, tu n'esquisses aucun geste, paralysé par l'appréhension. Quoi, elle ne va tout de même pas - pas devant tout le monde - son honneur serait ruiné - elle est beaucoup trop fière pour avouer... Tes certitudes sont balayées par l'arme qu'elle pointe sur toi. Les yeux écarquillés, la gorges sèche, tu la laisses scander son outrage, trop sonné pour riposter à voix haute. Non, elle ment : ce n'est pas toi, c'est Judas qui te l'a ordonné ; ce n'est pas toi, c'est elle qui t'as refusé ton du, après t'avoir si vicieusement séduit et alléché ; c'est la terre entière, à part toi, qui n'est qu'une victime se pliant au poids de la masculinité. Tout le monde, c'était mieux que de reconnaître tes torts. Pourtant, un simple regard sur l'assemblée t'apprends que la majorité ne s'aligne pas sur ton innocence présumée. Sa voix à elle fait office de jugement et tout ce qu'elle inventera sera avalé et répété telle une prière. Tu ouvres la bouche, pour essayer de protester. « Non... » murmures-tu, reculant d'un pas pour essayer de préserver ta gorge de la pointe d'argent. « Non, elle... » Elle ment. Voilà ce que tu essayes de dire, mais l'ineptie ne passe pas la frontière de tes lèvres. Finalement, la scandaleuse tourne les talons, te laissant dans un flou étouffant : les regards ne pouvant plus s'accrocher à sa silhouette viennent percer la tienne de milles yeux aiguisés telles des aiguilles piquantes, capable de percer ton ego, ton assurance, ta défense. Tu n'oses plus bouger, ni respirer.

Ta mère t'arrache à ta stupeur et, la suivant docilement, tu essayes de ne pas craquer sous la pression qui s'est subitement abattue sur tes épaules. Dans la salle, seul avec elle, tu t'avachies sur un fauteuil, passant tes mains dans tes cheveux, tremblant furieusement. « Je sais ! » réponds-tu, hargneux, aux accusations d'Adénaïs. Sous les multiples regards, tu n'osais piper mot ; sous le couvert de l'intimité, cependant, tu te laisses aller aux élans de colère et d'injustice qui t'étouffent. Ce n'est pas juste. Ce n'est pas toi qu'ils devraient tous juger. « Non ce n'est pas... Je ne l'ai pas... » Alors, tu sens ta langue se délier et tu te redresses, marchant le long de la pièce tout en déballant ce qu'il s'est vraiment passé, essayant en vain de calmer tes nerfs irrités. Tu lui expliques comment la bleue t'a charmée, de façon tout à fait déplacée mais comment tu n'as pas su lui dire non : se serait-elle portée en victime, cette catin, si tu avais refusé à ce moment là ? Tu enchaînés sur l'intervention de Judas, qui vous a coupé de votre élan, portant Coline dans ses bras. La menace non dissimulée qu'il a proféré à ton adresse : ce n'était pas la vie et l'honneur de cette dévergondée qu'il allait mettre en péril, mais bien ta possibilité de te reproduire. Tu relates le soudain refus de cette allumeuse et la panique qui s'est emparé de toi et comment, finalement, tu n'as fait qu'exécuter l'ordre du monarque tyrannique. « Peu importe son nom et son rang ! » ripostes-tu à ta mère, comme si tu étais en position de lui faire la morale. « Mais qu'aurais-je dû faire ? J'étais dans l'impasses ! Tu aurais préféré que je la laisse partir et laisse son père me... » Tu degluttis et poses ta main devant ton entrejambe, comme si la sentence du Uobmab était imminente. « Et puis, elle en avais envie, deux secondes avant ! Elle s'est juste dégonflée, j'y peux rien ! » renchéris-tu. Finalement, la solution d'Adénaïs t'apaise. Un calme souffle ton trouble. Elle va parler en ton nom. Voilà. Elle s'apprête à tout arranger, encore une fois. « Maman... Merci ! Merci, tu es une sainte, tu es la meilleure. » Tu veux t'approcher pour la serrer dans tes bras mais son regard t'en dissuade et elle s'éloigne avant que tu ne puisses esquisser le moindre geste pour la retenir une dernière fois.

Seul, tes démons ressurgissent, se faisant plus bruyant que jamais. Que faire ? Devrais-tu appeler Merlin, pour qu'il te vienne en secours ? Tu pourrais peut être tout mettre sur son dos ? Après tout, si le prince avait bien reçu ton invitation, il se serait peut être dirigé dans la direction de la princesse : trouverais tu des témoins, ou des fous à soudoyer ? Non, s'il les avait véritablement rejointe, le Prince aurait déjà commencé à assurer sa couverture. Quoi alors, convoquer Zébella ? Elle ne méritait pas ton aide mais pour sauver ta peau, tu étais prêt à vendre son frère - ou qui qu'il fût. Assurer ta survie était devenue l'unique urgence. Que devrais tu faire ? Fuir ? Ce serait comme avouer ton crime : or, tu refusais de plier face à cette catin à la petite vertu. Elle l'avait voulu, le regrettait maintenant, et voilà que tu devais en payer les pots cassés, seul ? Hors de question.

Furieux, tu donnes un coup dans le mur, qui t'arraches un gémissement de douleur, avant d'entendre une voix familière dans le couloir. Tu te précipites vers la porte et lui ouvres. « Nat ? » croasses-tu. « Entre. » Tu refermes derrière lui, peu désireux d'avoir d'autres spectateurs indésirables. « Oh Nat, je te promets, elle ment ! Elle ment, il faut que tu me croies ! Tu me croies, n'est ce pas ? » t'agites-tu en t'agrippant à la tenue de ton ami d'enfance. Cependant, il ne s'agit pas d'un geste brutal, mais qui témoignait davantage ton désespoir face à cette situation.
1388 mots



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Lana Kælaria
Sam 19 Nov 2022, 07:52




Les Portes – Chapitre V

En groupe | Lana


Rôle :


Le sourire qui s’étala sur le visage d’Elzibert souleva le cœur d’Yvonelle, et elle ne put s’empêcher de le lui rendre, malgré la situation, leur clandestinité, la nécessité de faire reconnaître le brun par un père, ses soupçons sur Natanaël, ce qu’il faudrait lui dire, et tout ce que cela impliquerait. « Non, pas encore. » Elle n’avait pas envie de le lui annoncer, cependant, son amant avait raison. Elle devait le faire. C’eût été proprement irrespectueux d’essayer de l’écarter d’elle par la force de manigances – si tant était que les révélations de la blonde étaient vraies et vérifiables. Lui avouer la vérité serait sans doute plus pénible et douloureux, mais ce serait être plus intègre. Le prendre en considération, vraiment. Lui témoigner une marque de respect qui ne saurait jamais sauver tout le reste. Plus les secondes s’égrenaient, plus l’adolescente réalisait qu’ils se rapprochaient lentement de la fin de leur amitié. Peut-être Rosette et elle avaient-elles commencé à la détruire dès qu’elles avaient fait le choix de jouer avec les garçons ? Elle se mordit les lèvres, avant de passer sa langue dessus. « Mais je ne pense pas que ce soir… » Elle soupira. Il aurait été cruel de lui annoncer une telle nouvelle au beau milieu d’une festivité. Il valait mieux attendre un temps plus calme, un temps où ils pourraient discuter et où il pourrait exprimer ses émotions dans la solitude de sa chambre.

« Déodatus ? » Pourquoi lui parlait-il de leur frère ? C’était une suite plutôt originale à tout ce qu’elle venait de lui dire. Son sourire avait-il été là pour se moquer ? S’était-elle trompée sur ses intentions ? Se fichait-il qu’elle en parlât à Natanaël ? La blanche retint sa respiration, saisie d’une incertitude qui lui donnait l’impression d’être stupide. Comment pouvait-on douter si facilement ? Fallait-il douter ? Reculer ? Et pourquoi Déodatus et elle ? « Qu’est-ce qu’il se passe ? » demanda-t-elle, doucement, avant de l’écouter. Abasourdie, sa figure se décomposa. Elle savait pertinemment que leur frère avait des mœurs étranges vis-à-vis des femmes mais jamais, ô grand jamais, elle n’avait envisagé qu’elle pût être le sujet de l’un de ses fantasmes tordus. Bouche-bée, elle fixa Elzibert, sans savoir quoi dire. Cela expliquait la réaction qu’il avait eue en présence de la Princesse Zébella. Cet accès de violence soudain, cette rage incontrôlée et sauvage. Elle déglutit ; et dans sa gorge se répandirent des graines d’ire, portée par la sensation d’avoir été souillée. Les mains d’Elzibert sur ses épaules l’arrachèrent à cette impression pigmentée de colère. Elle secoua la tête. « Il ne m’a jamais touchée. » Jamais elle ne l’aurait laissé faire. Et s’il avait essayé, au diable les liens familiaux. Elle l’aurait dénoncé. Sans doute. Peut-être. Oui. « Irène ? Irène d’Errazib est folle. » souffla-t-elle. « Et comment pourrait-elle savoir ce qui se cache sous le lit de Déodatus ? » Que se passait-il, ce soir ? Pourquoi des inconnus leur avouaient-ils les travers de leurs plus proches amis ? Une pointe d’appréhension piqua sa poitrine : quelqu’un dirait-il à Rosette ce qu’elle avait commis, des années auparavant, et qu’elle regrettait si amèrement ? Elle se mordit l’intérieur des joues. Pourquoi leur groupe semblait-il tant sur le point d’imploser, qu’elle voulût rompre ses fiançailles ou non ? Yvonelle inspira, partagée entre les désagréables révélations qui s’abattaient au sujet de ses proches et les mots poignants d’Elzibert. Elle avala encore une fois sa salive, et retourna se blottir contre lui. « Oui… » Ses mains caressaient tendrement son dos. Elle avait besoin de son contact pour oublier. « On devrait essayer de demander à ton véritable père… » Gustave de Tuorp. « Peut-être que si on lui en parle et qu’on lui explique la situation, il acceptera de te reconnaître ? » Elle en doutait. Tout le monde savait qu’il trompait sa femme, mais reconnaître un enfant, c’était autre chose. Elzibert entrerait directement en concurrence avec Ludoric, son seul fils légitime.

Le son de l’herbe froissée par des pas lui fit vivement relever la tête. Elle se dégagea de l’étreinte de son demi-frère et pivota pour discerner, sous le clair de lune, la silhouette d’Hermilius de Tuorp. Rouge cramoisie, elle le fixa sans savoir quoi dire, sans être capable de penser. Seule l’urgence tambourinait dans son crâne, propulsée par la course affolée de son sang à travers ses artères. Jamais personne ne les avait surpris – à sa connaissance, tout du moins. Jamais elle n’avait senti sur eux le poids d’un regard qui les scrutait pour ce qu’ils semblaient être : deux enfants incestueux. Elle ne s’attendait pas, néanmoins, à ce qu’il leur proposât son aide. Elle le jaugea, les yeux écarquillés, jusqu’à ce qu’il ne s’éclipsât. Encore de longues secondes après, son palpitant battait un rythme infernal. La blanche se tourna vers son amant, la boule au ventre. « … » Aucun son ne sortit de sa bouche. Elle la referma et s’humecta les lèvres. Puis, brutalement, elle lâcha : « On pourrait s’enfuir. » Elle attrapa la main d’Elzibert et la couvrit des siennes. « On pourrait partir, quelque part où personne ne nous connaît. » Loin d’Hermilius, loin de tous les autres, loin des menaces de refus de leur union. L’adrénaline rugissait dans tout son corps. « Ou rester et tout avouer, et demander à ton père de te reconnaître. » Elle prit une grande inspiration. « Je veux juste être avec toi. Dis-moi ce que tu veux faire et comment, puis on retournera dans la salle de bal. J’ai bien peur qu’on en soit partis depuis trop longtemps. » Elle le laisserait valser au bras d’autres femmes à regret, avec pour seul baume cette promesse d’avenir que portaient leurs « je t’aime » : ils feraient tout pour être ensemble.



Message XI – 967 mots


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Stanislav Dementiæ
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Stanislav Dementiæ
Sam 19 Nov 2022, 11:41


Les portes - Chapitre V
Thessalia

Rôle:
« Merci. » Irène glissa la récompense dans la main de l'enfant. Un sourire sur les lèvres, elle se délectait de ce que venait de lui rapporter sa petite espionne. Personne ne se méfiait jamais des minots. Encore moins des jeunes domestiques. On les ignorait ou les maltraitait, croyant pouvoir les intimider et les entourlouper pour qu'ils gardassent les secrets que l'on ne voulait pas voir s'ébruiter. Pourtant, la blanche les considérait comme des mines d'or. Des joyaux qu'elle se devait de tailler à sa convenance, pour qu'ils viennent magnifier sa couronne. Invisibles, ils voyaient et entendaient bien des choses et, lorsqu'on savait tendre l'oreille, ce qu'ils avaient à raconter se révélait précieux. C'était ainsi qu'elle en avait appris autant sur les autres nobles et qu'elle avait battit ses armes pour le jour ou elle en aurait besoin. Un garçon d'écurie, le fils d'un domestique, ou la fille de compagnie d'une noble. Tous avaient des choses à raconter. « Tu peux retourner t'amuser, si tu le veux. » fit-elle à l'adresse de sa protégée. « Bien madame. Passez une agréable soirée. » « Je n'y manquerai pas. » fit l'adolescente en baladant son regard sur la foule. Elle cherchait Judas. Où s'était-il éclipsé, durant son absence ?

La D'Errazib termine sa flûte de champagne d'une traite puis reposa le verre sur le plateau d'un serveur. Elle avait masqué le goût et, elle l'espérait, l'odeur que le De Tuorp avait laissé en elle. Elle pouvait de nouveau s'entretenir avec ses pairs sans craindre qu'on la repérât.

L'esclandre de la princesse d'Uobmab fit hausser les sourcils à la blanche. Son chouchou s'était mis dans de sales draps et maintenant, il payait les pots cassés de ses sottises. La jeune femme soupira, lasse. Il était attendrissant mais, visiblement, il n'était pas très malin et avait encore beaucoup de lacunes à combler avant d'atteindre le niveau qu'elle espérait un jour voir chez le garçon. L'esseulée repéra Ezidor en compagnie du chef des armées. Ils étaient en pleine discussion mais, bientôt, le d'Ukok abandonna la compagnie du médecin. L'air hâtif qu'il avait pris pour s'éloigner intrigua la folle qui le suivit du regard tout en continuant de s'approcher de l'empoisonneur. Une fois à son côté, elle pencha la tête de côté tout en observant la scène scandaleuse que tout à chacun dévorait avec avidité. Les papiers, demain, se régaleraient de cette honteuse conduite tout en se réjouissant d'avoir quelque chose d'aussi croustillant à raconter. « Mmh, j'ai toujours su que ce garçon avait quelques penchants pour les ennuis. » fit-elle en parlant à l'homme. Elle s'approcha de lui et s'empara d'une coupe derrière lui. « Mais il ne sait pas encore comment s'y prendre pour réaliser ses méfaits sans en être ennuyé. » continua-t-elle, visiblement contrariée par cette constatation. Elle parlait suffisamment bas pour que leurs voisins ne les entendissent pas. « S'il survit à cette soirée et à son duel... » Elle posa enfin son regard pleinement sur son interlocuteur. « Il aura besoin de quelqu'un pour lui apprendre comment se débrouiller. » L'instigatrice but une première gorgée. « Quelqu'un pour lui apprendre comment maîtriser ses proies... Visiblement, la princesse se souvient un peu trop bien de ce qu'il s'est passé. » Un sourire entendu se dessina sur ses lèvres. Elle connaissait le jeu du voyageur et ne cherchait même pas à le cacher. « Peut-être qu'elle aurait besoin d'oublier ces choses désagréables, afin de ne pas en garder de séquelle. » Irène laissa un rire lui échapper tandis qu'Adénaïs emmenait son fils à l'abri des regards outrés  et réprobateurs. Elle se moquait éperdument de la princesse et des conséquences, mais tenait au fou qui s'était mesuré à elle. « C'est un garçon prometteur, vous savez. Si vous cherchiez quelqu'un à prendre sous votre aile, il serait un excellent candidat. » Elle laissa une légère pause avant de se reprendre. « Bien sûr, il faudrait déjà l'innocenter. Personne ne lui ferait plus jamais confiance, s'il était réellement reconnu coupable. » Et alors, personne ne boirait plus dans les verres qu'il proposerait, ni même ne se présenterai dans les soirées où il oserait mettre les pieds : il deviendrait un pariât. « Mais je suis certaine que bon nombre d'indésirables pourraient le remplacer dans le rôle du coupable. »

758 mots



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Dim 20 Nov 2022, 12:11



Unknown

Les Portes – Chapitre V

En groupe | Dastan


Rôle :


Ludoric afficha aussitôt une moue embêtée. Il n’était pas aussi doué que sa mère pour feindre ce qui n’était pas. De ce côté-ci, il tenait plutôt de son père et des émotions que la vie peignait trop facilement sur son visage, comme s’il s’était agi d’une toile vierge qui rendait la moindre esquisse repérable de loin. L’adolescent fouilla sa mémoire, à la recherche d’une jeune fille blonde aux grands yeux clairs. Était-elle l’une des dames que son paternel avait tenu à lui présenter ? L’avait-il courtisée ? L’avait-il repoussée ou s’était-il contenté de lui imposer une glaciale indifférence, feignant de s’intéresser à une autre qui ne le regardait même pas ? Il en avait vu tellement qu’il ne parvenait pas à se rappeler. Aucune de ces femmes n’avait su effacer de sa mémoire le faciès de Placide. Encore moins de son cœur. Il ne cavalait qu’au rythme de ses battements de cils. Le roux inspira, à la fois désolé et attristé. « Je suis navré, j’ai une mémoire terrible. » Il pinça les lèvres et détourna les yeux. Fut un temps, il avait éprouvé du plaisir à mépriser et rejeter toutes ces filles : cela avait été la traduction concrète de la colère qu’il ressentait contre Gustave – qui lui imposait de courtiser toutes ces dames, comme s’il avait désiré le modeler à son image – et contre lui-même – cette colère de la découverte de sa sexualité et de la désillusion totale. Jamais il ne pourrait avoir la vie d’un homme comme les autres, parce qu’il n’était pas comme les autres. Avec le temps, cette rage s’était noyée dans l’acceptation de soi et la résignation face aux machinations de son père. Les femmes qu’il lui présentait n’étaient en rien responsables de cette situation. C’était une affaire entre eux, entre père et fils. Il n’avait aucune raison de se montrer mesquin ou désagréable avec elles.

« Faisons comme ça. » lui souffla-t-il, en esquissant un sourire d’apparat. Celui-ci s’évanouit aussitôt lorsqu’elle lui révéla qu’il était l’homme qu’elle convoitait. Même quand son père n’agissait pas, des femmes lui tombaient dans les bras. Il s’en trouvait immanquablement gêné et désolé. Quoiqu’elles attendissent, il ne pouvait ni ne voulait leur offrir. Le contact de sa main le fit frémir. Il baissa les yeux dessus, figé d’appréhension. Son palpitant martelait bruyamment sa poitrine. Il releva la tête. « La Princesse Coline, oui. » Quel enfer. Des scènes de sa potentielle vie future se dessinèrent dans son esprit. Il révélerait tout avant. « Ah oui, vous croyez ? » Elle s’engageait sur une pente glissante. Ce n’était pas Coline qui ne l’intéressait pas. C’était toutes les femmes de la terre entière. « Vous devriez faire attention à la façon que vous avez de parler d’elle. On ne sait jamais. » lui rappela-t-il, sur le ton protecteur qu’il avait l’habitude d’employer quand il prodiguait des conseils de cette sorte. Il ne voulait rien de la blonde, mais il ne voulait pas non plus qu’il lui arrivât malheur par sa faute. Elle serait bien assez triste lorsqu’il devrait l’éconduire.

« On ferait mieux de… » Il cligna des paupières. L’herbier posé sur son bureau lui revint aussitôt en mémoire. Comment…? Son souffle contre son oreille le fit frissonner. Il serra ses doigts autour des siens et lâcha dans un murmure le nom qui lui donnait vie : « Placide. » Comment avait-il pu ne pas le reconnaître ? Les lumières dans ses yeux, les contours de son visage, la forme de sa silhouette, le toucher de sa main. Sa volonté de venir déguisé en femme. Ludoric oublia ses réticences à ce sujet et tous les griefs qu’il aurait pu avoir contre lui. Il était trop heureux de l’avoir à ses côtés. Des larmes d’euphorie gravirent ses cornées et se posèrent le long de ses paupières, spectatrices de son amour accrochées aux balcons de son âme. Il voulut le serrer contre lui, cependant, le blond s’écarta et continua son jeu de taquineries. Le rouquin le détailla. Sous les ornements féminins, il discernait désormais sans peine son amoureux. Il pinça les lèvres et rit par le nez, avant qu’un large sourire ne s’étale sur son visage. « Imbécile, va. Bien sûr que je vais danser avec toi. Ici et devant tout le monde. » Il se rapprocha, le prit dans ses bras et le serra contre lui. « J’avais tellement envie que tu sois là. » Il se courba pour perdre son visage dans son cou et respirer son odeur. Une vague de réconfort le parcourut.

Le futur soldat demeura ainsi quelques longues secondes, puis se détacha de Placide et disposa ses mains de sorte à mener la danse. « Tu t’es entraîné, alors ? » Lentement, il entama les premiers pas. Voyant qu’il suivait sans problème, il adopta un rythme plus soutenu. « Je suis tellement heureux que tu ne sois pas là-bas, dans cette maison de campagne… Qui y est à ta place ? » Il avait forcément dû trouver quelqu’un pour le remplacer, sinon l’alarme aurait été sonnée depuis longtemps. Il le scruta. Il n’imaginait pas sa vie sans lui, non. Il déglutit. Il devait le lui dire. Il devait lui dire ce qu’il avait dit à Adolestine. « Je ne compte pas épouser Coline. » lâcha-t-il. « Je n’y arriverai pas. Je serai incapable de lui faire des enfants et je trouve sa compagnie détestable. » Un poids se souleva de sa poitrine. « C’est toi que je veux épouser. » Il se rapprocha de lui. Ses prunelles étincelaient. « Toi et seulement toi. Je veux que tout le monde sache que je t’aime. Je veux qu’ils sachent tous que je veux construire ma vie avec toi et seulement avec toi. J’en ai assez de me cacher et je ne veux pas fuir. De toute façon, ça ne sert à rien. Adolestine m’a dit que des bruits de couloir couraient déjà sur nous, et Coline m’a fait comprendre qu’elle savait. Je m’en fiche. Je veux qu’on puisse vivre au grand jour. Je veux réaliser mes rêves ici et je veux que tu puisses réaliser les tiens aussi. Et si jamais ils ne peuvent pas l’accepter et préfèrent nous chasser, je veux qu’ils sachent pourquoi nous partons. » Il se tut et s’humecta les lèvres, avant de mordre l’inférieure. À mesure que les mots étaient sortis de sa bouche, ils avaient gagné en joie et ses pas s’étaient faits de plus en plus souples, légers et rapides. Il ralentit progressivement, puis interrompit leur danse pour prendre le visage du blond entre ses mains. « Mais je ne ferai rien si tu n’es pas d’accord. » Ses pouces caressèrent ses pommettes. Il avait terriblement envie de l’embrasser.



Message XI – 1117 mots

Placide et Ludoric sont au pays des poupous, loin de toutes les vilaines histoires qui se trament tout autour d'eux. Ne pas déranger <3




Les Portes - Chapitre V  - Page 18 1628 :


Les Portes - Chapitre V  - Page 18 2289842337 :
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Kyra Lemingway
~ Déchu ~ Niveau III ~

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◈ Activité : Tenancière d'un Bar à vin (rang I) ; Négociatrice (rang I) ; Brasseur (rang I) ; Reine du monde des contes à mi-temps
Kyra Lemingway
Dim 20 Nov 2022, 12:44


Les Portes

Je m'attendais à ce que ce soit la musique et les rires qui m'accueillissent, au lieu de ça ce furent des inspirations choquées, des regards effarés et un silence pesant seulement brisé par les murmures réprobateurs, curieux ou terrifiés. Mis à part que ce semblait être grave, je ne compris pas tout à la scène qui s'était déroulée, n'ayant assisté qu'à la dernière injonction jetée froidement par Zebella. « Soldat. » interpellai-je le plus proche d'entre eux. « Pouvez-vous m'expliquer ce qu'il se passe ici ? ». J'étais aussi étonnée qu'inquiète de la tournure des évènements, et le récit que m'offrit le garde me glaça d'effroi. Un regard panoramique sur la pièce me fit comprendre qu'il n'y avait nul mensonge ni exagération dans ce qui venait de m'être révélé. « Trouvez le Roi. Qu'importe la raison pour laquelle il n'est pas présent, la situation me parait être trop urgente ici pour qu'il ne soit pas mis immédiatement au courant. » ordonnai-je sans quitter les invités des yeux et constatant l'absence de mon père. Cette soirée était un véritable fiasco. Où se trouvait Coline également ? N'était-elle pas censée assurer la régence à la suite de notre père. « Et faites venir la Princesse Coline également je vous prie. » ajoutai-je ainsi vivement avant que l'homme ne soit hors de portée de voix. Pendant quelques secondes je ne sus quoi faire. Le moment paraissait des plus opportuns pour partir. Personne ne le remarquerait, trop attentifs à Zebella et Déodatus. Toutefois, ce serait également le pire des moments pour ça. Je rêvais ma liberté, certes. Elle aurait toutefois un terrible goût d'amertume si je m'en allais en plein milieu d'une crise comme celle-ci. Cette affaire allait causer bien des tracas à mon père, et je ne souhaitais pas en ajouter plus que nécessaire. Encore moins alors que toute la royauté d'Uobmab était présente. Je pris alors une inspiration et le plancher, à la recherche d'une figure autoritaire que je trouvai en la personne de Lambert. À ses côtés, Zebella. Enfin une bonne nouvelle. « Lambert. Je suis heureuse de vous savoir présent et avec la Princesse. » intervins-je en me rapprochant à pas vif, m'adressant ensuite à Zebella. « On m'a mise au courant de la situation. Outre la tête du garçon, si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à le faire savoir, y compris s'il s'agit de quitter le palais le temps que les choses s'apaisent et que cessent les regards des badauds. D'autant plus que la soirée ne doit plus se montrer des plus plaisante à présent. ». C'était le moins que l'on puisse dire. « Puis-je vous laisser vous occuper de Mademoiselle, au moins le temps que n'arrive mon père ? » fis-je à l'attention de mon oncle avant reporter mon attention sur la princesse, rétorquant plus vivement qu'elle ne s'apprêtait à le faire. « Je vous sais indépendante et entends que vous refusiez. Toutefois ce crime, en plus d'avoir été commis à l'encontre d'une invitée de marque, s'est déroulé au sein de ce château, sur nos terres. J'insiste donc pour nous laisser prendre la suite des événements en main et s'assurer que l'aîné d'Etamot ne profite de l'agitation pour fuir ses responsabilités. ». Ces mots me crevèrent la poitrine. Je n'étais après tout pas des mieux placée pour les prononcer. Toutefois il le fallait. Les d'Uobmab étaient imprévisibles en plus d'avoir le sang chaud. Si c'était une chose que mes quelques entretiens avec Merlin m'avaient appris, c'était qu'il n'était pas une bonne chose de les laisser maître de la situation. « Lambert. Princesse. » conclus-je mon intervention dans un salut révérencieux avant de tourner les talons.

Arrivée au niveau de l'orchestre, tout aussi perturbé que le reste de la salle par la scène qui avait eu lieu, je me rapprochai d'un violoncelliste. « Puis-je vous emprunter votre chaise je vous prie ? » lui demandai-je, celui-ci ne me refusant bien sûr pas ma demande. J'installais alors l'assise à côté d'une table à proximité, sur laquelle je grimpai, me trouvant de cette façon au-dessus de tous les invités. J'en profitai pour détailler un peu plus longuement la salle et avoir confirmation de ce que j'avais pu observer en premier lieu : tous ceux que je cherchais étaient absent. « S'il vous plaît. ». Aucune réaction. « S'il-vous plaît ! » insistai-je plus fort. Si quelques têtes se tournèrent, ma voix ne porta cependant pas assez loin pour attirer toute l'attention que je désirais. Avec un soupir exaspéré, je fis signe à l'un des musiciens de se rapprocher comme je descendis de mon estrade improvisée, puis lui murmurai une consigne qu'il répéta sans tarder à ses collègues. La seconde qui suivit, et le temps que j'escalade une nouvelle fois la chaise, un son des plus dysharmonieux, à en faire saigner les oreilles, se propagea dans la salle avec effet immédiat de tourner les yeux sur les responsables, donc indirectement sur moi. « Merci. » souris-je d'abord à l'intention des musiciens. « Merci à tous pour votre attention. » repris-je cette fois pour les danseurs encore présents, avec le plus d'autorité dont je pouvais faire preuve. Je n'étais absolument pas certaine de ce que je m'apprêtais à faire. Mais il me paraissait important d'apaiser les tensions qu'avaient causées les accusations de Zebella. « Inutile de s'étendre plus en commérage quant à ce qu'il vient de se passer. La situation est à présent entre les mains de la royauté qui se chargera de mettre au clair cette histoire. ». J'avais bien conscience que Déodatus ne ressortirait jamais indemne de cette histoire, même si par chance les faits pouvaient donner tort à Zebella. Sans parler du fait qu'elle ait clamé haut et fort l'offense que lui aurait causée le garçon, le simple fait qu'elle soit princesse de sang ne jouait pas en la faveur de celui-ci. Dans une inspiration hésitante, je continuai. « Je vous invite donc à retourner à vos occupations à présent. L'importance de cette affaire peut avoir troublé la majorité d'entre vous. Je sais cependant que certains et certaines ont fait le déplacement de loin, et nous serions tous attristés de ne pas vous voir profiter plus de cette soirée malgré ce terrible incident. ». Je me tournai vers l'orchestre pour leur signifier d'un signe de tête de reprendre là où ils s'étaient arrêtés. « Si certains d'entre vous ont des requêtes, ou même des interrogations, nous sommes ouverts à vous offrir les explications adéquates, dans la mesure du possible tout du moins. Merci. » conclus-je ma harangue, pressée de passer le témoin à quelqu'un d'autre. Je déglutis avant retrouver le contact rassurant du carrelage sous mes pieds. Les jambes tremblantes, je bénis le fait que ma robe soit si longue, me permettant de camoufler l'incertitude qui m'envahissait et qu'elles révélaient si impunément. Je n'avais pas l'habitude de ces discours publics et solennels. Ils revenaient normalement à mon père, à Garance, ou même à Lambert parfois. Les longues allocutions de ce genre étaient particulièrement effrayantes en plus d'être fatigantes. Je pris alors réellement conscience de la tâche que devait être celle d'être roi, ou reine. Pour une fois, je ne pus que plaindre Coline.
©gotheim pour epicode


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Dim 20 Nov 2022, 13:55



La stupéfaction ou l'embarras ne représentaient qu'une partie du cachet de ces soirées mondaines. En vérité, dès le départ, Ernelle avait suivi les manigances partir à vau-l'eau alors qu'elle n'était aux bras de Hermilius. Quoi qu'il se produisît entre les D'Eruxul et la royauté semblait être d'une gravité rarissime pour voir les hommes s'isoler aussitôt, de même pour Dame Madeline dont on ne connaissait que la délicatesse et le calme olympien. Le fait étant que lorsque la lame de la Princesse D'Uobmab lécha la chair du fils D'Etamot, la machiniste n'aurait pu réagir que par un soupir supplicié. Au fond, elle regrettait une fois d'être venue à ce bal ; non pas à cause du danger potentiel engendré par ce prétendu violeur, mais parce que ces inepties apparemment obligatoires devaient systématiquement fleurir lorsqu'Ernelle se sentait comme sur un nuage. Si elle s'écoutait elle seule, elle partirait sur-le-champ. Sa fratrie se débrouillera, Natanaël grandira comme il l'entendait. Et elle… Son séjour au Royaume de Xirtam l'avait tant charmée qu'à son retour, sur plusieurs jours étalés, elle s'était bercée d'illusions : si elle s'y rendait pour toujours, peut-être que les choses seront plus simples. Peut-être sera-t-elle enfin elle-même, comme Lénora le lui avait faite découvrir ?

" Nous devons faire quelque chose. "

Aucune surprise à ses yeux, enfin de compte. Ernelle s'y attendait de la part de son amie. Pourtant, les iris désabusées de la noble trahirent tout son ressenti face à ce calvaire dans lequel on la plongeait encore. D'ordinaire, à cause de sa carrure, personne n'oserait la traîner où que ce soit ; elle seule décisionnaire de sa route. Mais Lénora avait ce pouvoir de la toucher comme si elle n'était que de la soie entre ses mains, si légère et malléable. Bien sûr qu'elle fera quelque chose, uniquement parce que la fameuse décisionnaire n'était nulle autre que la Princesse de Xirtam.

La porte se referma derrière elle. Son tambour s'emballa. Trop de forces opposées s'abattaient sur elle et elle commençait à ressentir cette chambre, doucereuse et recluse, comme une cage. Tic. Tac. Le timbre mélodieux de son amie réussit à diluer ce tourment qui la hantait depuis sa grossesse. Elle la fixa avec beaucoup d'attention, muette car aussi impliquée que perdue. Le passe-partout réel, il assénait la fausse domestique d'une myriade de responsabilités sur ses épaules si avenantes. Ce n'est pas ainsi que je voulais utiliser cette clé, ma chère. Elle offrit une brève œillade au lit non loin d'elles, si propre et tentateur. Enfin, presque. Elle se mit une claque spirituellement parlant, ce n'était hélas plus le moment de penser à ce genre de fantaisies. Lénora avait raison sur un point : quelque chose devait être fait au sujet de ce scandale. S'il y avait bien un fait sur lequel elles se rejoignaient, c'était l'incroyable toxicité des hommes et leur culot de demeurer sous leurs toits.

" Je… ne pense pas. Elle se remémorait le maximum de ses interactions avec Adénaïs et les apparitions de Déodatus. C'est un garçon encore jeune et la Princesse D'Uobmab m'a tout l'air d'une fille très impressionnante. D'ailleurs, quelques années de plus, et Ernelle n'aurait pas rechigné à l'attirer dans ses draps. Désolée, je ne vois pas comment, avec les éléments en ma possession, je peux me prononcer davantage… "

Elle n'avait bien plus que sa libellule, par moments clairs avec le poison De Tuorp s'écoulant dans ses oreilles. Il lui était encore assez incommodant de l'écouter avec la régente De Lieugro, puisque cette dernière n'avait clairement pas besoin de ce parasite pour arriver à ses fins. Lasse, elle porta sa poigne à l'unique boucle d'oreille et la rangea. Elle avait tant besoin de calme et de respirer.

" En as-tu l'"impression" ou la "certitude" ? Elle seule avait pu côtoyer – de près ou de loin – les invités au palais. Lénora… C'est une affaire d'État. Le mieux que nous pourrions faire, ce serait d'en discuter avec les autorités compétentes. Comme son frère. En théorie… Précisa-t-elle du moins, puisque s'il y avait bien une chose qu'Ernelle comprenait, c'était que l'exilée trouvât un intérêt dans ce scandale. Pourquoi cherches-tu tant à t'impliquer ? L'interrogation apparut comme une plainte. J'entends bien que mon Royaume, dont notre Roi, se retrouve dans une position indélicate, mais c'est dangereux… Elle maintint sa focalisation sur elle, parce qu'elle tenait à elle et à ce futur qu'elles pourraient continuer de voir s'épanouir si elles s'y prenaient bien. Par réflexe, Ernelle alla chercher la main tenant la clé et l'emprisonna entre les siennes. Tu es mon amie, et je te chérie. Elle serra un peu plus fort ; pas au point de lui broyer les phalanges, entendons-nous. Si tu désires tout de même emprunter cette voie, je ne t'en dissuaderai pas. Elle lui sourit, sincère. Mieux, je t'aiderai. Danser avec toi sous leurs regards médusés de merlan frit est loin de représenter ce que je peux accomplir pour ma Princesse. "

Les mots avaient des pouvoirs et seule Lénora saurait les décrypter, tout comme Ernelle avait su décortiquer les rouages de leurs désirs et de leurs enveloppes. Résolue et convaincue par la motivation de sa compagne, elle extirpa à nouveau le bijou récepteur et le glissa auprès de la clé.

" Tiens, garde cette boucle avec toi. Elle la libéra. Elle ne te servira que lorsqu'un second élément – la libellule – sera en notre possession. Mais il faut attendre un peu qu'il arrive… " Ernelle se pinça les lèvres, elle n'était pas bien sûr de la fiabilité de son mécanisme ; peut-être qu'il dysfonctionnera sur le retour, peut-être que quelqu'un le découvrira ou le détruira par mégarde.

Sans crier gare, la noble ressentit ce frisson glaçant le long de son échine. Entre ça, les manigances de Hermilius et le comportement de Déodatus, la torpeur s'insinuait en ses entrailles et tétanisait son sang bleu. S'embarquer dans une telle aventure ombragée l'incommodait sans doute, mais sa survie en dépendait. C'était bien tout autre chose qui l'effrayait, ce Tic. Tac. qui l'attendait lorsqu'elles sortiront de cette chambre. Elle ne voulait pas y retourner, elle ne désirait pas goûter à cet interdit si peu de fois. Soudaine, elle écourta la distance avec sa Princesse et l'enlaça, reposant sa tête sur sa frêle épaule. Son parfum l'enivrait et apaisait son âme, sa chaleur et son contact l'aidaient à garder pied et à ne pas chuter dans ces ténèbres que la D'Ukok exécrait.

" S'il te plait, reste un peu… Je ne veux pas sortir… Entre ces murs, avec elle, Ernelle renouait avec sa véritable nature. Je veux rester comme je suis… " Et cela lui fit un bien fou ; une dose de bien-être qui lui fit défaut durant tant d'années.


1194 mots ~ (sans les mots de Lénora)



By Jil ♪
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Kaahl Paiberym
Dim 20 Nov 2022, 15:46



Les Portes


Une vague de soulagement s’infiltra dans ma cage thoracique lorsqu’elle me confirma que Déodatus ne l’avait pas touchée. Je l’aurais tué, qu’importât le moyen, qu’importassent les conséquences. J’inspirai et fermai les yeux. L’équilibre de notre amitié à tous n’existait plus. La colère et le ressentiment m’avaient tellement rongé que j’aurais été prêt à épouser Irène dans l’espoir qu’elle m’aidât à régler mes problèmes. La frustration avait été tellement présente que j’avais égalementy sérieusement envisagé d’épouser Rosette. Il valait mieux que je n’en parlasse pas à Yvonelle. Si la rousse le lui rapportait, la conversation aurait lieu mais si elle ne disait rien, je garderais tout ça pour moi. J’étais certain d’aimer ma sœur mais mes sentiments pour sa meilleure amie n’étaient pas clairs. À force de l’envisager comme ma future femme potentielle, j’avais développé des attentes qui n’auraient pas dû advenir. C’était la faute de la situation. Imaginer la blanche avec Natanaël m’avait rendu fou et continuait de le faire. Et si elle changeait d’avis ? Je ne devais pas penser à cette possibilité parce que je n’avais aucune idée de ce dont je serais capable si elle m’échappait encore. « On essaiera. » lui murmurai-je, à propos de mon père. Il le fallait. Il fallait que nous réussissions là où notre mère avait probablement échoué. Comment ? Je n’en savais rien. Je n’avais pour ainsi dire jamais parlé à Gustave. « Ou peut-être demander à Childéric ? » dis-je. « Si Gustave refuse. » Après tout, nous savions tous les deux qu’il fréquentait notre mère. Cela faisait trop longtemps pour n’être qu’une lubie passagère. Gustave, lui, était marié. Childéric ne l’était pas. « Tu crois qu’il veut épouser mère ? » demandai-je, après un instant de réflexion. J’évitais de me mêler de la vie privée de notre mère mais il était évident que je n’étais pas le fils de son premier mari. Il était mort avant ma naissance. Elle n’en parlait jamais et nous n’avions jamais fait attention, enfants. En grandissant, cependant, cette vérité s’était imposée. Personne ne savait si elle entretenait déjà une liaison avec Gustave du vivant de son époux mais ni Yvonelle ni moi-même n’avions à juger des mœurs d’Adénaïs. Nous avions trop uni nos corps pour nous faire juges des pratiques de chacun.

Je tournai les yeux dès que j’entendis du bruit. Alors que la jeune femme s’éloignait de moi, je ne bougeai pas. Mon regard dévisagea le faciès du visiteur. J’étais prêt à me battre s’il le fallait. Mes muscles en alerte, mon esprit attendit la suite. Qu’avait-il vu ? Qu’allait-il faire ? Nous dénoncer ? « J’espère bien. » répondis-je, les sourcils froncés. Hermilius de Tuorp était le cousin d’Eléontine de Tuorp, épouse de mon père. « » C’était ça ! C’était ça la clef ! Si Gustave ne désirait pas me reconnaître, je pourrais toujours le faire chanter. J’étais certain qu’il n’aimerait pas apprendre que sa femme s’amusait à dépuceler des adolescents. Et lui ? Le savait-il ? Savait-il pour sa cousine et moi ? Il n’avait pas l’air. « Vraiment ? » demandai-je, incrédule, avant qu’il ne se retirât. Peut-être qu’il pourrait nous aider…

Mes prunelles de nouveau dans celles d’Yvonelle, je pris conscience que si je voulais faire chanter Gustave, il faudrait que je lui avouasse mon aventure avec la blonde. Néanmoins, lorsque je lus la panique dans son regard, elle m’ancra de nouveau dans le moment présent. « Fuir ? » Je ne voulais pas fuir. « Non, nous allons rester. » dis-je. « Je suis sûr que certains font mille fois pire que nous. Ce ne serait pas juste de devoir fuir… » Fuir pourquoi ? Pour cacher notre amour ? Pour ménager des cœurs ? Hors de question. Je caressai sa joue. « J’ai un plan pour que Gustave accepte de me reconnaître… » murmurai-je, conscient que si ce n’était pas lui, ce serait un autre. J’avais juste besoin d’un père qui n'était pas le même que celui d’Yvonelle. « Mais je pense que le plus sage serait d’attendre quelques jours. Nous n’allons pas pouvoir le mettre en place maintenant… » Ce serait complexe puisque ça concernait également notre mère. « Si Gustave me reconnaît, ça voudra dire qu’il devra avouer officiellement avoir eu une liaison. Je ne sais pas s’il acceptera mais je… » Je pris quelques secondes, afin de me donner du courage. « J’ai eu une liaison avec sa femme il y a quelques années. Je n’y connaissais rien et j’étais trop jeune pour… » Je n’en avais jamais parlé avant. Ça me gênait. Je n’étais pas encore très clair avec ce que je ressentais pour Eléontine. Elle m’avait plu mais, en me revoyant à l’époque, j’avais plutôt l’impression d’avoir été démuni et pas tout à fait conscient de ce qu’il s’était réellement passé entre elle et moi. « C’est avec elle que je l’ai fait la première fois… » avouai-je. « Je me dis que ça pourrait jouer. Peut-être qu’Hermilius pourrait nous aider aussi… comme il l’a proposé. Si Gustave ne veut rien savoir, lui pourrait me reconnaître. Il n’est pas marié et n’aurait commis aucune faute réellement répréhensible… » Je soupirai et passai l’une de mes mains sur mon front. Tout se mélangeait dans ma tête. « Peut-être vaudrait-il mieux en parler plus tard… Il a raison, nous ne sommes pas à l’abri d’oreilles indiscrètes. »

Sur le chemin du retour, je lui souris. « On passe par le labyrinthe ? » L’idée m’était venue comme ça. Les haies nous protégeraient des regards extérieurs et peut-être pourrais-je lui voler un baiser furtif. J'en avais besoin. « … Ce n’est pas la fille de tout à l’heure, avec Ludoric ? » lui demandai-je, tout bas, lorsque nous fûmes assez près pour voir les deux silhouettes.

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