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 [Q] L'autoportrait

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Eiko
~ Orine ~ Niveau I ~

~ Orine ~ Niveau I ~
◈ Parchemins usagés : 248
◈ YinYanisé(e) le : 14/11/2020
◈ Âme(s) Soeur(s) : Aurel
◈ Activité : Manger des mochis avec Papa Jun, chanter, danser, et remanger des mochis
Eiko
Ven 08 Juil 2022, 16:23


Image par HannaH L & Sainker_
L'Autoportrait
Eiko

Intrigue ; Eiko va a un cours de peinture. L'enseignante leur demande de réaliser une série d'autoportraits en s'inspirant du style d'un peintre venant de races différentes à chaque fois. (C'est une professeure de maternelle qui a fait ça avec ses élèves et je trouvais l'idée trop chouette pour éveiller les enfants à l'art.  nastae )


Eiko ouvrit grand la bouche face au petit miroir d'appoint qui avait été installé sur la table basse. Amusée, elle laissa entendre un « Aaaah » sonore tout en tirant la langue à son reflet, comme on lui demandait de le faire lorsqu'elle était malade et que Baba Yaya cherchait à examiner sa gorge endolorie. La fillette pencha ensuite la tête d'un côte, puis de l'autre, en avant puis en arrière, observant l'intérieur de sa bouche sous tous les angles, comme si elle la découvrait pour la première fois. C'était amusant mais, après quelques secondes, l'excitée se lassa de l'exercice puis retrouva un visage normal, bien qu'un sourire espiègle barrait toujours ses lèvres. « Hum... » L'enfant commença alors à faire toutes sortes de grimaces face à son double : les yeux qui louchent, les joues gonflées, les indexes étirant ses lèvres tandis que sa langue battait bruyamment l'air. A côté d'elle, Byeol lui tapota doucement sur l'épaule. « Cesse tes bêtises, Eiko. » la réprimanda-t-elle. Pourtant, le timbre délicat de sa voix et la mine amusée qu'arborait son visage chassèrent toute trace de sévérité dans sa remontrance. « Tu risques de briser le miroir. » expliqua-t-elle calmement à sa cadette. « Tu sais pourquoi ils sont là les miroirs, dis ? » questionna la fillette en retrouvant une posture plus sage : elle s'était de nouveau assise en tailleur sur l'épais coussin, fasse à la table basse qui lui servait de bureau. Chaque poste de travail avait été pourvu d'une glace similaire à celle de la petite Hanatsu. La plus grande - elle était de cinq ans son aînée - secoua négativement la tête. « Non, je ne sais pas. Attendons madame Chae, elle nous expliquera tout. » proposa la plus âgée. Cette réponse ne sembla pas satisfaire la curieuse, qui fit une moue boudeuse. Elle savait que sa camarade avait raison, leur professeure saurait expliquer la présence de ces accessoires atypiques, mais l'attente semblait interminable pour la plus agitée. « D'accord... » maugréa-t-elle cependant du bout des lèvres. Soupirant légèrement, la brunette reporta son attention sur les visages des autres élèves. La salle était remplie de jeunes Hanatsu. La majorité des enfants présentes étaient toutes jeunes, comme Eiko, mais d'autres, comme Byeol, avaient au moins une dizaine d'années voire plus, comme Ayami, qui approchait de ses quatorze ans. L'âge n'avait que peu d'importance ici. Ce qui comptait était le niveau et l'expérience de chacune des élèves. L'éducation des jeunes filles d'Onikareni était plutôt libre et, bien qu'on leur inculqua des bases communes, chacune était était ensuite libre de partir étudier ce qui lui plaisait et l'intéressait. Il n'était donc pas rare de retrouver dans des cours d'initiation comme celui-ci des disparités dans l'âge. Certaines ne s'intéressaient jamais à la peinture, ou bien ne développaient un attrait que tardivement; mais ces filles là avaient privilégié des cours sur la menuiserie, le combat ou la poésie. Celles qui se focalisaient sur un domaine en particulier trouvaient rapidement leur Art Divin mais d'autres devaient naviguer un peu plus longuement avant de trouver leur vocation. Surtout, se spécialiser dans une compétence ne signifiait pas abandonner toutes les autres et il était rare de ne s'intéresser qu'à une unique discipline.

Une femme entra dans la salle où étaient rassemblées les novices et, presque aussitôt, les bavardages s'éteignirent et le calme s'imposa naturellement. Cet effet n'était pas dû à une quelconque sévérité de la part de l'enseignante, mais était induit par sa simple présence. L'Orine dégageait une aura charismatique qui attirait les regards dans sa direction, qui aspirait l'attention de telle sorte qu'elle devenait le point de l'attention. Un sourire se dessina sur son visage tandis qu'elle constatait l'air ébahi de ses disciples. « Bonjour, mes petits bourgeons. » les salua-t-elle d'une voix mélodieuse. « Comment allez-vous ? » demanda-t-elle à l'assemblée, et une série de réponses fusa de la bouche des enfants. Quelques discussions s'engagèrent sur les commentaires de ceux qui avaient pris la parole, ranimant peu à peu la salle de classe. Plusieurs minutes s'écoulèrent tandis que la professeure passait au milieu des élèves, les gratifiants de sourires radieux ou de caresses sur les cheveux. « A quoi ça sert, les miroirs ? Et c'est quoi, ça ? » demanda Eiko en désignant des chevalets dont les toiles étaient dissimulées derrière des draps, lorsque la peintre s'approcha d'elle. « Ça, Eiko, ça va être notre sujet d'étude pour aujourd'hui. » répondit l'adulte sans détailler davantage ses pensées. A la place, elle tapa délicatement dans ses mains et, comme lors de son arrivée, le calme chassa les bavardages tandis qu'elle regagnait le devant de la salle.

« Est ce que quelqu'un saurait nous expliquer ce qu'est un autoportrait ? » interrogea la Yoenæ. Quelques mains timides se levèrent dans les airs et l'artiste en désigna une au hasard. L'élève se redressa, de façon à ce que toute la classe puisse mieux la voir et l'entendre. « C'est une représentation de soi-même. » proposa timidement l'interrogée. Son air effrayé s'envola devant l'approbation de l'enseignante. « Bravo Bumi, c'est cela. Un autoportrait, c'est un portrait que nous faisons de nous-même. C'est une façon de montrer au monde qui nous sommes, de définir comment les autres nous verront. » La brune désigna les miroirs qui avaient tant intrigué les plus jeunes lorsqu'ils étaient arrivés en classe ce matin là. « Vous pourrez vous aider de ces glaces pour savoir comment vous peindre vous-même. N'hésitez pas à les utiliser et, si besoin, à demander de l'aide à votre voisin pour vous le tenir. » encouragea la peintre. Elle sourit en apercevant quelques enfants faire des mimiques à leurs reflets. « Mais ce n'est pas tout. Nous allons également nous inspirer de grands artistes pour réaliser nos autoportraits. Kôta, veux-tu bien m'aider s'il te plait ? » demanda-t-elle au garçon qui était assis juste devant elle. Ensemble, ils retirèrent les draps, dévoilant les tableaux qu'avaient sélectionnée la professeure. « Ces tableaux ont été réalisés par Yames Beddoe, un Réprouvé de Stenfek. » expliqua l'historienne artistique. Il était peu banal de débuter un cours en parlant de l'art des Manichéens. Leur peuple barbare n'était pas reconnu pour leur fibre artistique et, si l'on avait dû en sélectionner un, on aurait davantage pensé à la sculpture sur bois ou à leur talent de forgeron. Mais cela ne signifiait pas pour autant qu'ils n'avaient jamais vu de peintre dans leurs rangs. Ils n'étaient simplement pas mis en avant. « Voici votre consigne pour aujourd'hui : peignez un autoportrait en vous inspirant de son travail. Vous avez le droit de venir observer ses tableaux de plus près si vous le désirez mais, rappelez-vous, on ne touche pas les toiles, d'accord ? » Une approbation générale s'éleva. « Bien, dans ce cas, vous pouvez commencer. » Madame Chae ne donnait jamais ses leçons sur les artistes avant d'avoir donné les travaux pratiques. Elle ne souhaitait pas influencer la perception de ses élèves. Si les plus âgés, qui avaient développé un esprit critique et un sens de l'observation plus poussé, parvenaient souvent à reproduire presque à l'identique les toiles qu'elle donnait en modèle, les créations des plus jeunes étaient souvent plus excentriques. Elle aimait découvrir leur façon d'appréhender le monde, laisser libre court à leur Dakao. Et donner des règles strictes brisait, selon elle, cet instinct ingénu et créatif qu'elle appréciait tant. Parfois, lorsque l'oeuvre était trop loin de ce qui était attendu, l'élève pouvait recommencer son travail en ayant toutes les clés en main. D'autres demandaient d'eux-même à rectifier leur travail.

Eiko se tenait devant l'une des cinq toiles. Le visage était peint d'une façon étrange : fait uniquement de rectangles, les angles du faciès étaient durs, sévères, presque effrayants. A moins que ce ne soit les teintes sombres qui lui donna ce sentiment étrange. L'artiste avait choisi de n'utiliser, pour ses œuvres, que de noir et du blanc, et des dégradés de ces couleurs - ou plutôt de ces non couleurs, comme le leur avaient appris madame Chae lors de ses leçons précédentes. Les ateliers de peintures duraient souvent une semaine, à raison d'une demie journée de classe par jour. La semaine précédente avait été dédiée aux couleurs, celle d'avant aux pinceaux et au différents ustensiles de peintures - la Hitoka avait particulièrement apprécié le jour où elle avait pu peindre avec son corps : elle avait utilisé ses mains, ses pieds, ses cheveux, son genoux gauche... Lorsqu'elle était rentrée, Akiko avait exigé de lui faire prendre un bain. La fillette passa au tableau suivant. L'étrange sentiment qui l'étreignait ne la quittait pas. Les tableaux avaient quelque chose de solennels qui la dérangeait. Une précision et un détail déroutant, également : malgré les formes géométriques, le peintre était parvenue à créer un visage détaillé. Tous ne l'étaient pas : la toile du milieu était étrangement simpliste, presque vide... Eiko continua son inspection des œuvres puis, finalement, regagna sa place après s'être arrêtée devant les placards pour prendre de la peinture ainsi que des pinceaux.

« Du vert ? » s'étonna Byeol en voyant sa cadette arriver les bras chargés. « Oui. J'aime bien le vert. » répondit simplement la fillette pour toute explication. La palette chromique utilisée pour ces portraits faisait, pour elle, partie intégrante de la description des œuvres. Ils ajoutaient une dimension supplémentaire pour décrire le sujet de l'oeuvre. Lors de son voyage dans le Désert de Näw et sur les Terres du Lac Bleu, les rencontres lui avaient permis d'en apprendre davantage sur les races de l’extérieur. Elle y avait notamment appris ce qu'était un Réprouvé. Un être unissant les Anges et les Démons. Le Bien et le Mal. La Vertu et le Vice. Toutes ces notions étaient des concepts flous pour la fillette, mais une part d'elle-même avait associé le noir et le blanc aux tendances ambivalentes de ce peuple. Or, elle-même ne se définissait pas par ces caractéristiques - cela n'évoquait rien en elle. Ainsi, plutôt que de se focaliser sur cette bipolarité, elle avait souhaiter illustrer son travail par une couleur plus joyeuse, qui la définissait mieux. C'était, après tout, ce qu'avait expliqué l'enseignante : choisir comment le monde nous percevrait. Et bien la Hanatsu avait décidé de se présenter en vert. Comme un rappel à son lien avec Hahanaru Shizen. Ou bien pour la paix qui en émanait. Ou parce que ça lui rappelait la menthe, et qu'elle avait très envie de sirop de menthe. La peintre néophyte s'appliqua pour réaliser son autoportrait. Elle mélangeait le vert et le blanc pour obtenir des dégradés de couleurs différents, qu'elle mettait dans des petits pots de terre cuite. Elle jouait sur le contraste des teintes pour dessiner des formes et dévoiler ses traits. Elle superposait les rectangles, jouait avec les angles et les tailles. Un petit rectangle pour la lèvre supérieure, un plus large et plus épais pour la seconde. Un long rectangle vertical, encadré de deux petits carrés pour le nez. Deux carrés sur le sommet de la tête, d'où tombaient d'autres carrés miniatures, telle des mosaïques, pour illustrer ses chignons et les cheveux tressés qui s'en évadaient. Parfois, elle était obligée d'attendre pour que la peinture sèche avant de passer une nouvelle couche. Dans ces moments là, elle allait rejoindre un camarade pour discuter ou voir son travail. Finalement, la matinée passa et la professeure les libéra.
1976 mots



[Q] L'autoportrait B6vi

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Eiko
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Eiko
Ven 08 Juil 2022, 20:04


Image par HannaH L & Sainker_ & KK辰未
L'Autoportrait
Eiko


Eiko s'approcha de l'Humaine avec un regard illuminé, presque émerveillé devant les arabesques tracées sur son corps. La jeune femme esquissa un sourire embarrassé tout en tendant ses mains pour que les jeunes enfants qui s'étaient attroupés autour d'elle puissent mieux observer le henné qui avait été fait sur elle. Plusieurs murmures impressionnés s'élevèrent en admirant le travail minutieux exécuté sur sa peau. Les arabesques, les fleurs, les cercles et les points décoraient son corps d'une manière que les jeunes Orines n'avaient jamais vu auparavant. La Hitoka, qui s'était rendue à la capitale Humaine, avait aperçu quelques étranges personnes arborant ce maquillage particulier mais n'avait pas eu la chance de l'observer d'aussi près. « On dirait comme des bijoux... » s'extasia la brunette en frôlant l'un des dessins sur la main de la jeune femme : une bande encerclait son poignet, et descendait tel un gant de dentelle sur le dos de la main, s'invitant jusque sur les phalanges. « C'est comme un tatouage ! » rectifia l'un des voisins de la brunette. « Un tatouage ? » Eiko se retourna avec horreur vers Esha. « Est ce que ça t'a fait mal ? » Depuis qu'elle avait découvert que ces peintures corporelles nécessitaient l'intervention d'aiguilles, la fillette avait décidé qu'elle n'aurait jamais de tatouage. Heureusement, la magie permettait à certains talentueux artistes de se passer de cette étape douloureuse, ou tout simplement d’anesthésier la zone pour amoindrir voire éliminer la sensation de douleur. Cela n'avait pas rassuré la fillette, qui avait vite déchanté. L'humaine esquissa un sourire rassurant. « Non, pas le moins du monde. » rassura la Fille de Sympan. « Le henné n'est pas un tatouage permanent. Avec le temps, il s'efface. Ça signifie que les pigments n'ont pas besoins d'être ancrés profondément sur la peau... Nous n'utilisons pas d'aiguilles. Je pourrai vous montrer tout à l'heure, si vous le souhaitez. » proposa la jeune femme. Elle avait apporté avec elle le matériel nécessaire à la pose de henné. Elle aiderait la Yoenæ à conduire ce cours et l'animerait en proposant de maquiller les jeunes élèves avant de partir. Comme à l'habitude de l'Orine, les apprenties peintres débutaient le cours sans avoir les bases théoriques. Elles pouvaient cependant admirer un exemple vivant : Esha était venue d'Utopia et arborait cet art ancestral pour l'occasion. Son corps en était recouvert : ses mains avaient été peintes de motifs distincts pour apporter davantage de diversité ; il en allait de même pour ses jambes. Son dos et son ventre étaient également recouverts d'arabesques mais elle n'avait pas encore retiré son sari. Quand à son visage, son front et ses tempes avaient été élégamment tatouées. Madame Chae s'approcha du petit groupe d'enfants. « Vous avez pu regarder ? Très bien, dans ce cas, libérez notre invitée pour qu'elle puisse montrer son travail à vos camarades. » La classe avait beau n'avoir qu'un petit effectif - un peu plus d'une quinzaine d'élèves - la voir entièrement d'un seul coup aurait été complexe. La professeure avait donc décidé que l'Humaine circulerait entre plusieurs petits groupuscules pour faciliter l'examen de ses mains.

« Kôkô, tu viens m'aider ? » appela la Hitoka une fois qu'elle fut retournée à son bureau. Son ami s'était installé à celui d'à côté - il n'y avait pas de place attitrée et les élèves bougeaient librement entre chaque classe. « D'accord. » répondit le garçon en se relevant. Ce jour-là, les miroirs avaient été rangés et remplacés par des toiles anormalement grandes : le but était de pouvoir capturer la silhouette entière. Les Orines les plus âgées avaient la possibilité de figer tout leur corps. Les plus novices et les plus jeunes, comme Kôta et Eiko, devaient se contenter de toiles plus standards, aux proportions moins impressionnantes. Cela ne rendait pas le travail moins complexe pour les enfants. « On commence avec moi, et ensuite on le fait avec toi, hein ? » « Ça me va. » répondit le voisin. Il attendit que sa camarade se soit installée par terre, plaquant sa main sur une toile vierge. Là, il s'empara d'un pinceau fin trempé dans de l'encre noire, et commença à détourer l'avant bras et la main, s'approchant le plus possible afin de respecter les proportions de son modèle. « Écartes bien les doigts. » ordonna-t-il lorsqu'il arriva à ce moment fatidique. Ils répéta l'opération pour une demie-jambe et un pied. Puis, enfin, Eiko se positionna de profil pour que son camarade capture la forme de son visage. « Ferme les yeux. » demanda le garçon. « Et ne rigole pas, ça me fait trembler. » rouspéta-t-il. Kôta aimait que les choses soient bien faites. Il n'aurait pas apprécié que la silhouette qu'il avait dessiné soit toute tremblotante. « Mais ça chatouille. » souffla doucement la modèle. « Retiens toi, sinon, on va croire que tu as deux nez, ou bien des lèvres énormes. » L'argument sembla faire mouche : la brunette s'immobilisa et le laissa reprendre son travail. Une fois qu'il eu terminé, ils échangèrent leurs rôles et ce fut à son tour de tracer le corps de son ami. C'était une étape plus complexe qu'elle ne l'avait envisagé : il fallait maintenir le pinceau dans une inclinaison constante si l'on ne souhaitait pas dessiner de disgracieuses vagues.

« Hum... » La Hanatsu observa les trois formes qui la représentaient. Puis elle fit glisser son regard vers les tableaux qui avaient été exposés. Ce jour là, ils étudiaient les autoportraits d'Anjali Yanav. Elle s'était représentée d'une manière plus originale encore que Yames. Elle avait imprimée sa silhouette dans différentes position : debout, une jambe repliée contre le genoux opposé et les bras écartés, le pouce joint à l'index ; assise en pleine méditation ; cachée derrière un rideau de sorte à ce que l'on ne perçoive que la moitié de son corps ; de profil sur toute la longueur de son corps. Ces silhouettes étaient ensuite remplies d'étranges arabesques et de motifs semblables à ceux qu'arborait Esha. En voyant cela, Eiko avait immédiatement pensé à la visite de Papa Jun, et aux tatouages similaires qu'ils s'étaient fait. Le groupe des licornes magiques. La licorne s'était depuis longtemps effacé du dos de sa main et la brunette avait songé à remédier à ce problème en immortalisant ce souvenir ici. Elle n'aurait eu qu'à tracer une licorne sur sa toile pour réaliser son désir. Cependant, maintenant qu'elle avait vu le travail minutieux sur la peau de l'Humaine, elle désirait essayer de reproduire quelque chose de similaire. C'est comme un bijou. Est ce que Mancinia savait aussi faire du henné ? Est ce qu'elle en portait ? Est ce qu'elle s'en inspirait pour créer ses œuvres ? La future joaillière se posait plusieurs questions sur le sujet. Elle devrait lui envoyer une lettre pour trouver des réponses. Un sourire s'esquissa sur ses lèvres à cette idée. Elle aimait beaucoup discuter par courrier avec la Matasif. C'était leurs échanges qui l'avaient motivé à apprendre à écrire - bien qu'elle eut encore besoin d'un modèle, elle parvenait à présent à former ses lettres correctement. Elle souhaitait également apprendre à lire mais, pour l'instant, elle n'en était pas encore capable.

L'Orine sentit une agitation perturber l'ordre de son Hanfu. Elle baissa les yeux et, bientôt, elle vit une petite boule de poils s'extirper de sous ses vêtements. Un léger rire lui échappa. « Bonjour Moko ! » salua-t-elle le Jishi. Elle passa un doigt pour caresser son pelage duveteux. La créature produisit un petit son aigu, comme pour témoigner de son contentement face à ce geste de tendresse. Lentement, la petite peluche commença à escalader le vêtement de sa protectrice. « A ton avis, de quelle couleur je devrais colorier mon bras ? » demanda-t-elle à son animal de compagnie. Celui-ci, une fois arrivé sur son épaule, se mit à trembloter - quelques secondes plus tard, son pelage avait changé de coloris, n'arborant plus une teinte rouge vive mais une couleur bleue toute aussi électrique. « Du bleu ? D'accord ! » approuva l'artiste en herbe avant de  se prêter à l'exercice. Elle s'empara d'un pinceau fin, le trempa dans l'un des ramequins contenant la couleur désirée, puis entreprit de débuter l'exercice. Elle commença par tracer des lignes au niveau du poignet puis se figea. Elle ne savait pas quoi dessiner. Comment se décider sur les motifs à encrer lorsqu'elle ne savait pas exactement ce qu'elle voulait représenter ? A sa propre surprise, Eiko réalisa que cet exercice se révélait plus complexe que celui de la veille. Elle avait pourtant été plus enthousiasmée en découvrant ces tableaux : leur beauté l'avait captivé. La réalisation était cependant plus ardue. Percevant sa détresse, Esha s'arrêta à son niveau. « Tout va bien Eiko ? » demanda-t-elle. La fillette secoua la tête. « Je ne sais pas quoi dessiner. » Il ne s'agissait plus simplement de créer une bouche, un œil ou une oreille : elle devait remplir un vide, avec des choses qu'elle ne comprenait pas. L'Humaine esquissa un sourire. « Et bien, pourquoi ne commences-tu pas par faire ce qu'il te plait ? Ce que tu trouves joli, ou ce qui t'intrigue ? » proposa la fille du désert. « Oui, mais comment je sais ce que je trouves joli ? On peut pas dessiner tout ce qu'on veut, si ? » Les tatouages des Humains suivaient des codes, bien qu'une large marge de manœuvre n'entrava pas leur créativité.  Le but n'était pas d'étouffer l'imagination, mais bien de la retranscrire sur la peau. Malgré tout, la fillette percevait qu'elle ne pouvait pas demander à dessiner des licornes et des dragons, ou bien des fleurs et des étoiles... Percevant la réticence de l'élève, l'accompagnatrice s'installa à ses côtés et s'empara d'un morceau de papier vide. « Dis moi Eiko, qu'est ce que tu aimes ? » Après une seconde d'hésitation, la demoiselle énuméra les choses qu'elle appréciait. La liste était longue et, amusée, ce fut à l'Humaine de l'interrompre. Elle avait dessiné sur son papier les formes énoncées par la fillette. « Voilà pour t'aider : utilise ces formes là. Rempli-les avec des formes géométriques que tu aimes et, une fois que ce sera fait, tu n'auras qu'à les recopier sur ton portrait. Qu'est ce que tu en dis ? » « Oh oui, merci Esha ! T'es trop forte ! » approuva l'apprentie. Le résultat final fut coloré : chaque silhouette était d'une pigmentation distincte. Une fleur rose, un cheval vert, une note de musique bleue, un Oniyumi jaune.


« Est ce que quelqu'un sait ce qu'est la Ma'Ahid ? » demanda Esha, nerveuse. Elle n'était pas habituée à voir autant de visages avides et curieux tournés vers elle. Cette fois-ci, Eiko put lever bien haut la main. Sa maman lui avait expliqué de quoi il s'agissait, lorsqu'elles s'étaient rendues à Utopia : il s'agissait d'une magie propre aux humains, un don spécial qui leur permettait d'effacer la magie des autres êtres vivants. Eiko avait perçu qu'Akiko craignait cette capacité, mais elle-même n'avait pas souffert de leur effet, dû à sa faible Kan’Ghar. Qu'elle fut libre ou bridée, sa magie était trop faible pour l'impacter véritablement. L'Humaine se tourna vers un autre enfant, un garçon de onze ans que la fillette connaissait mal. « C'est la capacité des humains à annihiler la magie environnante. » récita-t-il. L'institutrice lui donna raison d'un sourire encourageant. « Tout à fait. » La demoiselle élabora un peu plus la définition de ce que pouvait être l'anti-magie, et la Hitoka se montra particulièrement attentive : ces paroles résonnaient en elle d'une drôle de manière, comme si elle se sentait concernée. « Un mouvement de pensé tend à dire que la Ma'Ahid serait semblable à la Kan’Ghar - ce que vous appelez magie - dans son mode de fonctionnement. Qu'il s'agirait d'un réseau d'énergies traversant le corps. » Eiko observa curieusement ses mains à cette déclaration, comme pour observer la magie affluer entre ses doigts. « Anjali Yanav est une fervente croyante de cette idée. Selon elle, chaque Humain est plus ou moins sensible à certains type de magie, et serait plus ou moins à même de les bloquer, plus ou moins bien en fonction de ses affinités. Chaque Humain disposerait donc de plusieurs centres de Ma'Ahid, plus ou moins développés. » La jeune femme s'était approchée des toiles de sa compatriote. « Et c'est cela qu'elle représente ici. Observez comment les motifs partent à chaque fois de centres stratégiques, puis irradient à travers tout son corps. » expliqua-t-elle en désignant l'une des toiles.

2170 mots



[Q] L'autoportrait B6vi

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Eiko
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Eiko
Mar 19 Juil 2022, 15:29


Image par HannaH L & Sainker_ & KK辰未
L'Autoportrait
Eiko


« Est ce que ce que tu vois te plaît, Eiko ? » La fillette s'était arrêtée devant les tableaux exposés en tant que modèles et les observait depuis maintenant plusieurs longues minutes. Son intérêt transparaissant d'autant plus qu'elle était de ces enfants dynamiques qui ne restaient jamais en place plus de quelques instants. Elle se mettait toujours à fredonner ou à bavarder avec ses voisins, comme si le silence avait quelque chose d'angoissant pour elle. A moins qu'elle n'essaya de combler un vide qui grandissait en elle. La Chae aimait à penser que l'Art, et en particulier la Peinture, était capable de telles prouesses, d’apaiser les maux et guérir les âmes. La contemplation dans laquelle s'était plongée son élève lui laissait présumer qu'un tel phénomène se produisait en cet instant. « C'est triste. » répondit la fillette d'une voix basse, presque peinée. « Triste ? » répéta l'enseignante. La brunette acquiesça lentement, reportant son attention vers la toile. « Qu'est ce qui est triste ? » chercha à comprendre l'adulte. Elle appréciait toujours découvrir la sensibilité des plus jeunes, de ceux qui se laissaient envahir par leurs émotions sans chercher à les canaliser, à les transformer ou les ignorer. Elle ne s'était cependant pas attendu à ce genre de commentaire : elle avait soigneusement sélectionnée les toiles à exposer ici. L'Art des Alfars était tout particulier - non pas seulement de part l'étrange mais fascinante capacité de ce peuple à les animer, mais également par l'atmosphère qui se dégageait de leurs œuvres. Plusieurs courants artistiques caractérisaient les productions des Elfes Noirs, notamment le Nimuvæned*, avec ses courbes harmonieuses et sa végétation abondante et sauvage, ou encore l'Aedvalwí* et ses métaphores visuelles, ses allégories puissantes et intimidantes. L'Orine s'était cependant cantonnée à un style accessible, pas trop impressionnant ni oppressant pour de jeunes enfants et avait choisi des représentations plus lumineuses qu'à l'accoutumée. Intriguée, et sentant une pointe de culpabilité l'étreindre, elle observa à son tour le tableau qui avait interloqué son élève sans y trouver d'élément mélancolique.

« Hahanaru Shizen. » répondit la petite fille. « Elle a l'air de... De pleurer. Ou de se cacher. » Elle tendit le doit pour souligner la végétation qui encadrait le portrait, foisonnant au pied de la silhouette féminine. Épines, ronces, branches dénudées et de lierres s'entremêlaient harmonieusement. Quelques fleurs ou des feuilles se glissaient également ici et là. Les teintes restaient cependant sombres pour la plupart. Un schéma similaire se reportait sur les toiles voisines, à l'exception de celle de Ludesa Yivrih, qui usait de couleurs vives et outrancières, comme pour narguer ses concurrents. Un sourire en coin s'étira sur le visage rassurant de l'enseignante. Elle percevait mieux, désormais, le trouble de la fillette. Mère Nature avait gracié ses filles d'une flore luxuriante et enchanteresse. Les arbres étaient verdoyants, avec des fruits appétissants et des sons mélodieux. L'ingénue était habituée à cette représentation bienfaitrice de la déité. Elle ne lui connaissait pas d'autre visage, n'avait jamais vu à quel point leur Protectrice pouvait se révéler cruelle avec celles et ceux qui la déshonoraient. Elle n'avait jamais été témoin d'un tremblement de terre, d'une éruption volcanique, d'une sécheresse ou d'un ras de marré. La végétation de Drosera et ses représentations se rapprochaient inconsciemment de ces désastres, dans l'esprit de la fillette, qui n'avait connu que cette vision magnifiée de l'environnement. La Yoenæ s'accroupit pour être à la hauteur de l'enfant. Elle s'empara de ses mains pour attirer son attention. « Tu te souviens, lorsque tu as voyagé à Utopia ? » demanda-t-elle. La petite acquiesça sans comprendre ce que sa visite sur la Terre des Enfants de Sympan avait à voir avec la déperdition de l'Aether de son peuple. « Est ce que tu te souviens comment étaient les fleurs ? Et les arbres ? » continua l'adulte. « Ils étaient différents d'ici, n'est ce pas ? » « Oui. » confirma la petite. « As-tu trouvé qu'ils étaient tristes ? » « Non. » Sa réponse avait été catégorique. Elle se souvenait des parfums qui embaumaient les ruelles marchandes, des fleurs exotiques et colorées, du goût savoureux de l'eau de coco... « La nature là bas était différente d'ici, mais elle était tout aussi éblouissante. Parce que c'est un cadeau de Hahanaru Shizen. Toutes ses créations sont sublimes, n'est ce pas ? » De nouveau, la brunette marqua son approbation. « Et bien, la nature de Drosera - là d'où viennent les artistes que nous étudions aujourd'hui - est différente également, à sa manière. Elle prend une forme que tu ne connais pas encore et qui, pour le moment, peut t'inquiéter mais que tu apprendras à aimer également avec le temps. » Ou peut-être pas. La peintre n'était pas objective : elle avait étudié un temps auprès des Alfars et avait développé une fascination pour leur vision particulière de la Nature. Un intérêt qui n'était pas partagé par tous. « Hum... Ca veut dire que je ne suis pas obligée de faire la même chose pour ma peinture ? » demanda Eiko, rassurée par cette perspective. C'était ce qui l'inquiétait véritablement. « Non, tu n'es pas obligée. Souviens toi, c'est un autoportrait. C'est toi qu'elle doit décrire. »

La fillette tourna sa tête vers un second tableau, qu'elle pointa du doigt. « Pourquoi il y a trois dames, sur celui-ci ? » questionna-t-elle. Effectivement, trois femmes se tenaient côte à côte. L'une était petite et frêle, au centre de l'image. Elle ressemblait en tout point à sa créatrice, Oceca Elnis. Elle tenait une lyre et affichait une mine affable. Deux femmes à l'air grave l'encadraient, la surplombant de toute une hauteur magistrale et écrasante. Celle de gauche tenait un fruit local de la cité cachée, qui se flétrissait peu à peu. Elle arborait une mine menaçante, et tout de sa posture jusqu'à son aura éveillait le danger. Si l'on était attentif, on pouvait remarquer l'arme qu'elle tenait dans sa main, celle qui ne soutenait pas le fruit. La silhouette de droite, quand à elle, était lumineuse et envoûtante, entourée d'animaux. De toutes les œuvres présentes, c'était sans doute celle qui pouvait paraître la plus effrayante. La Yoenæ esquissa un sourire. « A ton avis, Eiko ? Qu'est ce que ça peut signifier ? » Ne jamais dévoiler les clés de compréhension sans avoir laissé l'opportunité à ses élèves de trouver une explication ou une solution par eux-même. « Hum... » la fillette se mit à réfléchir, fronçant les sourcils dans une mimique presque comique. « Peut-être que... Peut-être que ce sont des triplées ? » proposa-t-elle, pleine d'entrain. « Peut-être que comme elles sont sœurs et qu'elles se ressemblent beaucoup, c'est un peu comme si elles étaient toutes les trois la même personne ? » Elle ne percevait pas à quel point ses paroles recelaient de vérité. Si les esprits restaient disparates, les âmes jumelles liaient les individus comme s'ils n'étaient qu'une unique entité. Ce n'était cependant pas le cas de cette artiste renommée, qui était la seule enfant de ses parents - du moins, la seule qui avait survécut à la rude sélection élitiste des castes Alfars. Les trois figures représentaient simplement trois traits de personnalité de la peintre. Si on la voyait souvent comme une demoiselle fragile et sans importance, elle pouvait se révéler manipulatrice et ambitieuse au point d'en devenir mortelle, tout en conservant une candeur ingénue en ce qui concernait la beauté du monde qui l'entourait. C'était cette ambivalence que la femme avait cherché à retranscrire sous ses coups de pinceau. « Oui, peut-être. » répondit simplement madame Chae, amusée par la proposition de la plus jeune.

La petite Hanatsu était retournée à son bureau. Ce jour là, elle avais pris place à côté de Wao. Il s'agissait de l'Orine la plus âgée du groupe. En réalité, il n'avait pas participé à l'étude de Yames Beddoe, ni à celle d'Anjali Yanav les jours précédents. Plus tard, la fillette réaliserait que son voisin ne reviendrai plus pour assister aux leçons suivantes. L'Orine possédait déjà des dispositions dans le domaine de la peinture. En réalité, il ne faisait aucun doute pour personne, sinon pour le concerné, qu'il se tournerait vers cette discipline pour en faire son Art Divin. Il n'avait donc pas réellement sa place au milieu de ces néophytes : son travail était d'un tout autre niveau, et cela se voyait à l'aisance qu'il avait de manipuler ses outils, à travailler les couleurs et les textures. Pourtant, l'adulte l'avait invité à participer à sa classe de ce jour-là en particulier. Tout comme l'enseignante, la Sœrei en devenir se rendrait bientôt à la Majestueuse, pour y rencontrer l'un de ses prétendants Aisuru. Il avait donc été jugé judicieux de l'instruire sur les coutumes de ce peuple et, particulièrement, de renforcer ses connaissances à l'Histoire de leur Art. Sa famille était déjà proche de ce peuple et l'avait initié à leur sensibilité toute particulière.

« C'est beau ce que tu fais. » commenta Eiko avec envie en observant le travail de son camarade. L'expérience et la passion avaient facilité son aisance. Contrairement à la néophyte, sa silhouette était définie. Les traces de nature qu'il avait incorporé à sa création soulignaient sa personnalité et embellissaient le tableau. Malgré l'inspiration des artistes Alfars, l'Orine avait réussi à refléter son propre style, innovant de telle sorte que sa composition soit unique et lui corresponde parfaitement. C'était un travail soigné, remarquable pour une Hanatsu. La Hitoka fit la moue en regardant sa propre toile. La sienne n'était pas aussi réussie. Elle avait pris modèle sur l'oeuvre de Ekneni Dhostros : elle s'était représentée au centre du tableau, assise sur une balançoire - et non pas sur un tronc d'arbre. En haut, une arche laissait place à des cercles où étaient représentés des choses que la fillette appréciait : une note de musique pour symboliser son amour de la musique ; une noisette qui rappelait l'écureuil qui était devenu son camarade d'enfance ; un mochi et une fraise trahissant sa gourmandise ; un rubis pour parler de la passion pour la joaillerie qui l'animait depuis quelques temps. Au pied de la trame, un parterre de fleurs aux pétales multicolores s'étendait. « Tu m'apprendras à peindre, dis, Wao ? » demanda-t-elle sans se formaliser. La demoiselle reconnaissait le talent de son aîné mais, plus que de l'envie ou de la jalousie, elle éprouvait de l'admiration. C'était ainsi que les jeunes Hanatsu étaient éduquées : chacune avait ses lacunes et l'entraide était nécessaire pour que chacune puisse évoluer. « Si tu veux moi je t'apprendrai à chanter ! » proposa-t-elle en échange avec un sourire.

1832 mots
Nimuvæned : mouvement artistique populaire chez les alfars, correspondant au mouvement de l'Art Nouveau.
Aedvalwí : mouvement artistique populaire chez les alfars, correspondant au mouvement du Symbolisme.
Merci à Min de m'avoir laissé parler de Wao. nastae



[Q] L'autoportrait B6vi

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Eiko
~ Orine ~ Niveau I ~

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◈ Activité : Manger des mochis avec Papa Jun, chanter, danser, et remanger des mochis
Eiko
Mar 19 Juil 2022, 20:50


L'Autoportrait
Eiko


« Est ce que je peux te piquer ta résine ? » demanda Eiko en se tournant vers Tsuyu. Sa voisine, elle aussi âgée de cinq ans, acquiesça tout en lui tendant le pot en céramique. La brunette s'en empara et se redressa. A l'aide de la spatule qui était déjà dans le bol, elle remua énergiquement la texture noirâtre. Il s'agissait d'une sève particulière, récoltée à partir des arbres présents dans le désert de Mow. Madame Chae donnait rarement des instructions supplémentaires, mais elle avait cette fois-ci insisté pour que ses élèves usent de cet ingrédient secret pour dessiner leurs portraits. Elle avait promis de leur expliquer plus tard la raison de cet engouement. Eiko ne s'était pas formalisée de cette contrainte : elle trouvait cela plutôt amusant. Aussi, elle s'empara de l'outil et commença à faire des moulinets du poignet, bien au dessus de sa toile, sans que le bâton de bois ne toucha la surface de sa trame. Elle ne dessinait rien de particulier, elle se laissait simplement guider par ses envies, traçant un gribouillis qui lui plaisait. Tsuyu, elle, avait pris soin de dessiner un tourbillon, qui avait pris tout l'espace vierge de sa feuille. Elle utilisait désormais un autre pic de bois pour séparer certaines sections de sa spirale. La Hitoka releva son poignet d'un geste soudain - une giclée de sève s'étala sur l'atelier de peinture. « Hum... » L'artiste en herbe pencha la tête sur le côté, évaluant les formes qui remplissaient son parchemin. Repiochant un peu de matière sur sa spatule, la fillette ajouta quelques retouches ici et là, sur des zones qui semblaient aléatoires mais qui, dans son esprit, ne l'étaient pas.

Ce matin là, la classe étudiait les travaux de Ceraon, un peintre Orisha prolifique qui avait fait connaître l'ärt voülioo. Plusieurs de ses toiles étaient entreposées près du tableau de craie. Pourtant, aucune ne semblaient se ressembler, si l'on omettait l'étrangeté présente dans chacune et la présence de cette résine particulière. Les formes ne représentaient aucunement des silhouettes humanoïdes, ni même certaines parties de l'anatomie. En réalité, mis à part la toile du centre, qui évoquait vaguement un violoncelle aux musiciennes du groupuscule présent ce jour là, les toiles ne semblaient pas avoir de sujet spécifique. Les tableaux ne représentaient pas de scènes, pas d'objet, pas de nature... Seulement des formes géométriques et hasardeuses. Certaines étaient monochromes, d'autres presque entièrement noires - celles-ci jouaient avec la superposition de couches de sève - et les dernières étaient au contraire une profusion de couleurs. La diversité des styles avait déconcerté Eiko. Il lui était complexe d'imaginer qu'une seule personne soit à l'origine d'autant de styles différents. C'était un peu comme s'il n'avait pas réussi à se décider sur quelle technique lui correspondait le plus. Un peu comme quand la fillette devait choisir quel dessert prendre après le repas - une longue réflexion prenait alors place : avait-elle encore faim ou fallait-il privilégier une douceur légère qui ne ferait pas gonfler son ventre ? ; avait-elle envie de quelque chose de très sucré ou d'une saveur discrète et fruitée ?

Une fois satisfaite des arabesques tracées par la sève, Eiko se dirigea vers les établis installés contre les murs de la salle de classe, à l'endroit où le matériel était entreposé. Là, elle s'empara de plusieurs pigments dont les teintes lui plaisaient. Elle sélectionna du jaune, car ce fard la mettait souvent de bonne humeur, du vert, car elle avait toujours apprécié cette couleur, du rose car il lui rappelait les pétales des cerisiers en fleurs, du bleu, car il lui évoquait les yeux bleus de son amoureux. Une fois qu'elle eu récupéré ses peintures, elle retourna à son bureau. Elle s'arma d'un premier pinceau. Elle récupéra un peu de couleur et, comme elle l'avait fait avec la spatule en bois, elle leva bien haut son nouvel outil. Des gouttes de colorants éclaboussèrent la feuille en dessous, créant de nouvelles formes. Parfois, la fillette restait plus longtemps sur une zone ou imbibait davantage les poils de son pinceau, de telle sorte que les empruntes d'encre s'étalaient davantage. Elle répéta le processus avec toutes les couleurs qu'elle avait choisi, jusqu'à être satisfaite du résultat. Lorsque ce fut le cas, elle alla déposer délicatement son travail sur un plateau, afin de le laisser sécher.

La peintre amatrice usa du temps libre qu'il lui restait pour aller observer le travail de ses camarades. Elle aima tout particulièrement celui de Gaya : la résine laissait deviner deux silhouettes qui se faisaient face, de profil. L'Orine avait volontairement expliqué le déroulé de ses pensées et expliqué que le second visage, celui de gauche, représentait son futur Aisuru. Un peu plus âgée qu'Eiko, la demoiselle avait déjà pu passer plusieurs mois au côté de l'un des hommes inscrits sur sa liste. Elle avait particulièrement apprécié son séjour et avait longuement répété que c'était à lui qu'elle se lierait, plus tard. Elle représentait donc son Lien au travers de l'exercice : chaque couleur se faisait écho, chez les deux silhouettes, comme un miroir. L'espace qui les séparait était teinté de courants pastels qui les reliait une fois de plus. Plus que la symbolique, c'était l'esthétique qui avait plu à la plus jeune, mais elle s'était gardée de le préciser, ne souhaitant pas contrarier l'artiste.




Eiko, la tête en appuis sur la main, laissa un long soupir lui échapper. Elle n'avait pas d'idée. Elle ne semblait plus capable de se connecter au Dakao ambiant. Pourtant, l'énergie créatrice n'avait pas quitté la salle de classe : ses camarades étaient tous occupés à peindre activement, déversant leur créativité sous forme matérielle. Si la veille, la fillette avait été captivée par l'art abstrait de l'Orisha, grâce à ses formes simples et sans logique, elle trouvait l'exercice du jour plus complexe. Les toiles de Matia Kirstein étaient aussi ésotériques qu'avaient pu l'être celles de Ceraon : il n'y avait dans ces représentations aucune silhouette humaine. Pourtant, le thème de leur travail restait bien l'autoportrait. Les toiles de l'Ange étaient particulièrement réalistes, ajoutant une complexité qui bloquait la fillette dans son élan. Elle n'était pas capable de dessiner des paysages aussi détaillés, ni même des objets qui, s'ils n'avaient pas été tracés en deux dimensions, auraient semblé réels, presque palpables. Contrariée, la jeune fille laissa son regard violacé traîner sur la toile de son voisin. Il ne s'était pas embarrassé de réalisme et s'était contenté de dessiner des formes qui demandaient à ce que l'on en devine l'essence, plus qu'à une interprétation métaphorique. Pendant un instant, la Hanatsu repensa à ce qu'on lui avait dit au sujet du Neishan. Une énergie négative et nocive, qui privait les meilleurs artistes de leur force créatrice, de leur inspiration et de leur connexion avec la présence de Línggǎn. Était-ce ce qui était en train de lui arriver ? Était-elle tourmentée par l'ombre de Geomi ? Avait-elle envoyé l'un de ses terrifiants enfants pour roder autour d'elle ? La petite fille releva la tête de chaque côté, comme pour vérifier qu'aucun monstre ne se cachait sur ses épaules ou derrière son dos.

En y réfléchissant bien, peut-être était-ce l'art du Vertueux qui troublait la fillette - quoi qu'en découvrant qu'il s'agissait d'un membre de la famille de Neah Katzuta, cette hypothèse lui paraîtrait soudainement absurde. L'ambiance de ses toiles étaient tout aussi variées qu'avaient put l'être celle de l'artiste étudié la veille. Certaines dégageaient une atmosphère sereine, paisible. L'une de celles affichées dépeignait un paysage sous la forme d'un champ, baigné par un soleil radieux. Quelques animaux étaient en train de paître tranquillement. Un ruisseau à l'eau claire serpentait d'un bord à l'autre du cadre doré. Il aurait semblé incongru que quelque chose ou quelqu'un vienne troubler cet équilibre. Pourtant, l'accalmie était déchirée dans la peinture suivante, comme une discontinuité discordante. Au contraire de son voisin, le paysage semblait là ravagé. Un volcan déversait un torrent de lave destructeur. De ces flammes liquides s'évadaient des formes monstrueuses, prêtes à semer le chaos : leurs vilenies se devinaient sur leurs faces intimidantes. Ils ne portaient pas de masques et pourtant, les figures faisaient échos aux Hùipà que l'on retrouvait parfois dans les arts des Orines. Étaient-ce ces créatures qui perturbaient la fillette ? Cette dernière se posa la question.

Finalement, ce furent ces personnages terrifiants qui allumèrent l'étincelle de l'imagination. Eiko repensa à un cauchemar qu'elle avait fait, quelques nuits plus tôt. Il l'avait laissé en larmes lorsqu'elle s'était réveillée, le cœur battant la chamade. Elle avait mis plusieurs secondes à réaliser qu'il ne s'était agit que d'un rêve et qu'elle ne craignait rien. Pour se rassurer, elle avait serré l’œuf de son Bilhelie contre sa poitrine.

« Qu'est ce que tu dessines ? » demanda Shika. La soudaine agitation de sa voisine de table l'intriguait. Elle s'était levée d'un seul coup, était allée chercher du matériel et s'était enfin mise au travail après être revenue. Elle arborait une mine concentrée et déterminée, comme si elle se raccrochait férocement à une idée, de crainte de la voir lui échapper. « Mes cauchemars ! » répondit la fillette avec entrain, comme poussée par un effet cathartique. « C'est à ça qu'ils ressemblent, tes cauchemars  ? » s'étonna le garçon. Eiko acquiesça. Elle avait commencé par peindre le fond de sa toile en bleu. L'effet n'était pas volontaire mais la couleur était plus sombre sur le haut de la toile et s'éclaircissait progressivement vers le bas. Elle était désormais occupée à dessiner une sphère blanche, qui semblait irradier en contraste de l'arrière plan. « C'est pas encore fini. » contredit l'artiste débutante avant de se remettre à la tache. Usant cette fois-ci d'un pinceau et d'encre noire, la chanteuse commença à tracer des lignes qui zigzaguèrent autour de la sphère. Chaque arabesque suivait la précédente, donnant une superposition de courbes. Sur les extrémités de la partition, la fillette commença à dessiner des notes de musique. Elle avait vu à quoi elles ressemblaient, notamment en assistant aux répétitions de Bae, lorsque celui-ci s'entraînait à jouer de son Hurdy-Gurdy. Elle les plaça sans se soucier de la cohérence du solfège. Pourtant, plus elle s'approchait de la boule lumineuse, plus les notes se faisaient éparses, jusqu'à finalement disparaître aux abords de la sphère. Seul un silence opaque, sourd, entourait le cœur de la toile. « Sūrya répond moi ! » avait appelé la fillette. Pourtant, le mutisme de son camarade l'avait plongé dans une profonde angoisse, qu'elle exprimait désormais au travers de sa toile.

1840 mots
ärt voülioo : mouvement artistique populaire chez les orishas, correspondant au mouvement de l'art abstrait.
FIN



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