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Le Son de la Lune

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— Encore un endroit ... Perdu.

Neah avait clos ses paupières, se retenant de relâcher un soupir audible. Dans sa main, il détenait encore la clé lui ayant ouvert l'interstice vers ce lieu, incarnant une sorte de maison grandeur nature qui, de l'extérieur, ressemblait à une modeste maison de poupées. L'Ange n'avait rien ressenti de mauvais émanant de l'objet et s'était ainsi laissé berné par une magie ingénieuse. Comme un débutant. Il avait eu envie de grincer des dents devant sa bêtise, mais se retint devant l'absence d'ondes négatives ayant pu le renseigner sur une éventuelle nocivité. Allait-il voir le Chat venir le hanter à nouveau, dissimulé dans une pénombre après avoir endormi ses sens ? Ce n'était pas vraiment son style, de ce qu'il en avait pu voir et cet endroit était assez luminescent, comparativement à toute la masse du Mal rongeant l'être qui croisait son chemin, un peu trop souvent, pour n'être qu'un être de légendes. Est-ce qu'il s'agissait d'un énième tour de Reine ? Il en doutait également dès que l'idée eu effleuré son esprit, elle l'aurait sûrement capturée au moment où il s'y attendait le moins pour le conduire ... là-bas, où que ce soit. Et donc ? Encore une énigme pour rejoindre des étrangers dans un puzzle grandeur nature et casse-tête ? L'Ange en avait tellement vu qu'il ne savait plus où donner de la tête. Pour l'instant, rien de tel. Rien. Juste une téléportation imprévue, encore.

Il ne cessait jamais de courir, décidément.

Du moins, là, il avait eu une courte pause pour aller chercher des courses, son regard s'étant égaré quelques instants. Pourquoi s'intéressait-il à une demeure dédiée aux poupées, à son âge ? Ah, ça, quand vous avez des enfants que vous aimiez de toute votre Coeur, vous aimiez leur créer des petits plaisirs. Lui-même avait été séduit sur l'aménagement des meubles et l'architecture, étant en mesure de distinguer les détails luxueux lui remémorant la vaste demeure de Nylmord, au point d'y reconnaître ces petites caractéristiques qui avait attiré son oeil et qui n'aurait pas manqué de plaire à quiconque aurait regardé celui-ci avec goût. Pourquoi une telle clé conduisait-elle dans une version agrandie de la maison, sans la moindre prévention ? Le Capitaine ne pouvait demeurer là, à attendre qu'une réponse tombasse du ciel. Il se dirigeait vers l'une des sorties, conduisant vers l'extérieur, comme si sa taille reviendrait normale lorsqu'une autre porte serait franchie, mais en direction de cet extérieur, malgré un Soleil clair, il ... neigeait. Ce n'était pas les Terres du Lac Bleu, mais la puissance magique qui créait cette possibilité lui arrachait un frisson. En un essai, Neah voulu ouvrir la porte, mais elle se bloquait, peu importe la force qu'il voulu y employer, rien ne cédât. Il n'insistât pas. Si une énigme, ou une sortie existait quelque part, il allait devoir la découvrir. Tout d'abord, le principe de base était d'explorer l'endroit.

Ce n'était pas très compliqué, puisque ses vastes baies vitrées donnaient sur trois axes ; l'une dans une salle de bain ouverte, se trouvant devant une cheminée, une autre sur une table richement décorée et couverte de nourriture et, le dernier, une salle de musique. C'est celle-ci qui attitrait son regard, pour une unique raison. En son côté trônait un piano. Son coeur eu un léger soubresaut, un soupir nostalgique quittant ses lèvres. Depuis combien de temps n'en avait-il pas joué ? Son instrument, chez ses parents, était entretenu, mais l'Ange le délaissait désormais, devant ses charges et ... comme il était souvent avec Mancinia, ces derniers mois, la musique avait pris une place secondaire. À tort, sans doute. Son ami avait été plus que précieux pour améliorer sa précision, sa patience, accompagné ses nuits d'insomnie, rongé par l'absence sa Liée, par la privation des siens, de l'effondrement de tout ce en quoi il avait cru. Ce n'était pas un bon retour des choses, il l'admettait. En entrant de ce côté de la pièce, il observait la large table blanche, aux rayures d'or véritables, ainsi que les deux sièges présents. Cet endroit était-il là où des individus débattaient des dernières partitions à la mode ? Il se sentait idiot d'avoir perdu cette habitude. Au final, il ne tenait qu'a lui d'y remédier. Neah prit une légère inspiration et prit place sur le siège, droit, posant instinctivement sa main sur le clavier, retrouvant des sensations perdues. Son index presse une des touches, le son clair émanant de l'instrument emplit le lieu silencieux et un sourire naquit sur ses lèvres. Ça le faisait encore vibrer. Devait-il reprendre la musique ? Il y réfléchirait lorsqu'il ne se sentirait plus enfermé.

Post I - 825 mots

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Le Son de la Lune

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Personne n'avait idée du bien-être qu'il avait de sentir de nouveau ses doigts appuyer sur les touches, comme si ses sens n'avaient plus été en éveil depuis un long moment. Neah sentait la rigidité de ses membres, devant sa pratique négligée au profit d'autres travaux, mais son corps se réhabituait assez aisément à cette mélodie de débutant, longuement apprise après ses sessions entraînements, lorsqu'il n'était encore qu'un Soldat dont l'Humaine, frappée d'une Malédiction, avait laissé un trou béant dans son coeur. Dans ce marasme émotionnel, se remettre les idées en place avec la musique était souvent recommandé et c'était le piano qui l'avait attiré. Un instrument difficile, capricieux, demandant une relative paix intérieure au risque de laisser des notes distordues émanées. Un véritable reflet de l'Âme. Au creux de son oreille, il entendait la voix de Mancinia, comme un murmure, comme si elle était toujours à ses côtés. Sa voix lui rappelait qu'une musique douce apaisait, ralentissant le rythme cardiaque, baissant la tension artérielle en diminuant le stress accumulé. Les études médicales allaient avec la véracité de ses propos. Il le savait, non pas parce qu'il l'avait entendue le dire, mais parce que l'Humaine l'avait étudié. Cette emprise exercée dans son esprit par le Lärtnessh pouvait paraître envahissant, mais les Écuyers de l'Aurore parvenaient à le contenir, ne se perdant pas dans l'existence de l'autre. Ils avaient acceptés les combats et les blessures, les manquements et les réussites, les intérêts de l'un et les passions de l'autre. Les ambitions de l'une et la vision de l'un. Néanmoins, s'ils s'abandonnaient dans l'un et l'autre de cette manière spirituelle, ils perdraient l'essence même de leur vie.

Ce serait ... une non-vie, même.

Il ne voulait pas que Mancinia soit son spectre et il ne désirait pas être le sien. Ce Lien qui les unissait était désormais stable, puissant et rassurant. L'un comme l'autre connaissait la souffrance d'un arrêt ... de sa brisure. Lui avait expérimenté durant dix ans ce Lien en suspens, comme sur le point de se briser et, Mancinia, quant à elle, avait connu sa fracture nette durant plusieurs minutes, durant la Guerre du Pardon. C'était tellement intense que ses mains appuyaient un peu plus durement, avant qu'une voix enjouée ne vienne interrompre ses pensées maussades, sans pour autant stopper nette sa musique, laissant quelques notes supplémentaires s'échapper de l'instrument. En dehors de cet excellent piano, Neah constatait la présence de cette harpe aux finitions en acajou, à laquelle cet homme venait de s'installer. Il ne l'avait pas vraiment entendu arriver, mais ce n'était pas le point le plus important. Encore une personne perdue dans cet univers curieux ? Ne ressentant aucune animosité, l'Ange ne put que répondre à cette invitation.

— Bien.

Neah prit une grande inspiration, avant de reposer ses doigts sur le clavier pour enfoncer les touches. Ils jouèrent longtemps. C'était amusant, de jouer tout en écoutant le rythme de la harpe dans son dos. De par son agilité et sa mémoire, Neah parvenait à s'adapter de manière déconcertante à son binôme. Ils restaient là, à jouer, au point que leurs doigts ne semblaient plus vouloir s'arrêter, pris dans un élan d'automatismes. Ils ignoraient le Temps. Ils ignoraient même d'être écouté avec attention. Au-delà des mots, seules les notes de musique semblaient exister au sein de cet espace. La musique était un mode d'expression tout à fait fascinant, une discipline rigoureuse et délicieuse à manier, capable de captiver les coeurs, subjuguer les foules, au point que deux muets pouvaient se comprendre à son travers. Néanmoins, malgré la passion qu'il avait et le plaisir qu'il en retirait, l'Ange devait mettre un terme à cette partition, au risque de se perdre définitivement. Il prit soin de s'arrêter à la conclusion de la musique.

— Merci de m'avoir accompagné, dit-il lorsque le dernier accord finit de résonner, tout en se retournant dans sa direction. C'était vraiment beau.

En se retournant vers son interlocuteur, toutefois, l'Ange se figeait. Ils n'étaient pas seuls. Ils ne l'étaient plus. Tout dans l'apparence de cet homme était à la fois impeccablement soigné et disposé à une certaine féerie, à la manière d'un mélange réalisé avec sérieux, tout en y ajoutant quelques exquis enchantements. Il se redressait du tabouret, curieux de l'identité de cette personne qu'il prenait pour le propriétaire. Maintenant que celui-ci avait leur attention, son buste s'inclinait vers l'avant en guise de salutations.

— Bonjour, messieurs. Je suis le Majordome de cette demeure.
— Avez-vous un nom ?
— Majordome.

L'Ange restait muet, intérieurement perplexe.

— Vous devez être fatigué d'avoir autant joué. Je vous ai préparé une collation et des boissons.

Comment Neah n'avait-il rien entendu ? Son ouïe était très fine et entendait parfois des animaux minuscules à plusieurs dizaine de mètres, des êtres vivants plus massifs à plusieurs centaine et lui n'avait commis aucun bruit ? C'était irréel. Est-ce qu'il vivait seul dans cette maison de poupées, victime d'un mauvais sort ? Il se le demandait sérieusement. Est-ce que lui aussi, subirait le sortilège avec son infortuné compagnon ? Difficile à dire en l'état. Cette pièce avait l'air vaste pour une seule personne, notamment lorsqu'il prit conscience que celle-ci était en mesure de s'élargit, tout en demeurant illuminée par les grandes fenêtres donnant sur cette terre enneigée. De nouvelles choses s'adaptèrent. Sur le mur situé à sa gauche s'étendait une grande fresque végétale sur un fond vert très pâle, agrémenté de quelques hibiscus incarnats. On comptait également la présence d'une vénérable bibliothèque où se bousculaient des livres de droits, d'études sociales, d'économie, de philosophie et, sous ce tas de lecture très sérieuse, des théories musicales, de la poésie et des pièces de théâtre pouvaient être lues. Mais quel était cet endroit ?

— Je suis arrivé avec cette clé, débuta-t-il en se redressant de son assise et en l'ôtant de sa poche.
— C'est la clé de la demeure, confirma Majordome d'un hochement de tête.
— Et à qui appartient-elle ? demanda-t-il en détachant bien sa phrase.
— À tous les deux.

Cette fois, le Capitaine était réellement interloqué.

Post II - 997 mots

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Le Son de la Lune

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Pourquoi se retrouvait-il propriétaire de cette curieuse demeure ? Était-ce encore une des blagues de Reine ? S'interrogeant, ses yeux se posèrent sur les détails de cette clé ouvragée. Ce n'était pas impossible, mais il en doutât en quelques instants ; il avait pris la clé sur le côté de la maison de poupées, pour en observer l'intérieur et s'était retrouvé là. À moins que la surprise ne vienne de l'autre propriétaire ? Maintenant qu'il entendait sa voix claire résonner dans cet endroit incongru, l'Ange prit conscience de sa clarté en demi-teinte. Miirafae. Ça ne lui disait rien, mais il se retrouvait également à détenir l'exacte clé qui se trouvait encore dans sa main et qu'il remit sagement dans une des poches de sa veste. D'un hochement de tête, Neah acceptait la collation, même si Majordome anticipait leur décision en s'engageant dans le couloir. Autrefois, il aurait trouvé cette situation déroutante, mais maintenant qu'il vivait en compagnie des domestiques de Mancinia sur les différents territoires où elle officiait, le Capitaine avait pris l'habitude de les voir performants et réactifs. Conduits dans une sorte de serre intérieure toute en verre, offrant une vision incomparable sur l'extérieur tout enneigé, la chaleur ambiante tranchait avec le froid polaire devant régner au-dehors. Quant à la table basse entourée de coussins, comment ne pas y voir la mode des Humains ? En dehors que lui-même n'en était pas un et qu'il était conscient que son interlocuteur non plus, sans parvenir à mettre le doigt dessus. Magicien ou Lyrienn, à son sens, même si l'apparence physique ne voulait rien dire, ses perceptions lui paraissaient brouillées ...

L'odeur de cannelle le retirait de ses pensées, lorsque les gâteaux apparurent. L'Ange n'avait pas particulièrement faim, mais ce serait un moyen de faire connaissance entre eux, vu qu'ils étaient propriétaires de cet ... endroit. Une maison de poupées, c'est pour dire. Un artefact enchanté fort dangereux à laisser là, au milieu d'un magasin. Que faire s'il se retrouvait chez quelqu'un après ? Il aurait bien du mal à expliquer cette situation sans queue ni tête au propriétaire. Sa curiosité n'y tenait plus vraiment et Neah se tournait vers Majordome.

— Est-ce le cadeau de Reine ? demanda-t-il.
— Non.
— Vous aviez dit ne pas savoir.
— Je sais vous répondre par instinct.

Le Capitaine restait perplexe tandis que son compagnon d'infortune lui servait du thé. Assurément à la manière des Mages Blancs. Personne n'aurait eu l'idée de le mettre avec un Mage Noir. Surtout pas dans un lieu où personne ne pouvait entrer ou entendre ce qu'ils échangeaient. Une idée était aussi plaisante que dangereuse, car s'il lui prenait d'envie de le tuer, personne ne saurait rien de son crime. Fort heureusement, ce n'était pas ainsi qu'il avait été éduqué et entraîné.

— Merci, dit-il en prenant la tasse de thé.

Il souffla discrètement sur le liquide fumant, ne voulant pas paraître méfiant, mais ayant tous ses sens en alerte. Qui sait ce qui les attendait ? Ayant été pris au piège plusieurs fois dans des lubies douteuses de personnes qui n'avaient visiblement aucune crainte des puissants qu'ils dérangeaient, l'Anjonù choisissait la prudence.

— Ne soyez pas angoissé. Je ne vais pas vous faire de mal, ce n'est pas trop mon genre.

À moins que ce dernier ne devienne provocateur à son encontre, il n'allait rien lui faire.

— Comme vous l'avez dit ... il s'agit de votre première fois aussi dans cette demeure ? ... C'est aussi mon cas.

Reposant sa tasse dans son assiette de porcelaine.

— Je ne me suis pas présenté, se reprit-il. Neah Katzuta.

Il en avait oublié les bases de la politesse, sans doute que cela se passait de mots lorsqu'on échangeait aussi intensément en musique avec quelqu'un. Le pianiste ressentait encore la sensation des touches contre ses doigts, quelque chose d'oublier qui reviendrait le hanter.

— J'étais en train de regarder une maison de poupées et c'est ainsi que je me suis retrouvé ici.

Le Capitaine hésitait à dire « coincé » de crainte que cela ne vexe son interlocuteur ou, pire, de passer pour un ignorant, car en y réfléchissant bien, Majordome n'avait rien dit là-dessus. Si ça se trouve, ils pouvaient tous les deux ressortir sans le moindre problème ... Peut-être qu'il serait dehors et qu'ils devraient faire équipe contre lui. Que c'est compliqué de ne pas savoir les choses avec exactitude, pensa-t-il. Surtout lorsqu'on avait tendance à recevoir des présents de plus en plus farfelus au fil des mois ...

Post III - 794 mots

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Le Son de la Lune

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Son aura d'Ange devait le suivre où qu'il aille, raison pour laquelle aucun de ses interlocuteurs ne devait se sentir ennuyé. Neah n'avait pas de raison de le cacher, soit on le connaissait de réputation, soit il était prêt à répondre aux éventuelles attaques tournées à son encontre. Certains avaient tout fait pour se dissimuler, en crainte des représailles et des mauvais tours que l'on pouvait infligés à ceux de son peuple pour les dénoncer aux Démons sur des territoires peu sécurisés. De son côté, il ne parvenait pas à savoir la race de son interlocuteur. Ce n'était ni un Ange, ni un Humain et il ne percevait pas cette aura dégagé par les Magiciens. Il n'y avait pas non plus de mauvaises intentions dissimulées, mais comme la Nith-Haiah lui avait appris, autant être préparé à toutes les éventualités.

— Ah, vous aussi ?

Comment ne pas se sentir amusé à l'écoute de sa propre arrivée en ces lieux ? Ils étaient au moins d'accord là-dessus. Entre ces artefacts que le Capitaine estimait dangereux pour la sécurité public, ces disparitions intempestives durant ces amusements de riches inconnus aux Portes et le reste, autant dire qu'il aimerait bien que les Aetheri lui laisse sa petite vie tranquille. À lui ou à Daé, à tout le monde même. Ils en avaient assez fait avec la Guerre des Dieux. Sa question le laissait quelque peu perplexe, comment était-il devenu connu ? ... C'était une bonne question. Comme Mancinia, sa réputation s'était tissée au fil du temps, mais certainement pas de la même manière. Son Humaine avait acquis des choses sur lesquels personne n'aurait parié.

— J'imagine que ça a commencé avec la Coupe des Nations ...

Ce devait être le tout premier épisode majeur auquel il avait participé. Il n'avait alors pas été classé et il se souvenait à peine de sa prestation lui-même, sans doute n'était-elle pas restée dans les annales de l'événement et personne ne devait réellement se rappeler comment était-il à l'époque. Jeune, maladroit, amoureux sans l'admettre et certainement pas un combattant ... L'Ange avait l'impression que cette époque datait du siècle dernier, mais ce n'était à peine que vingt ans. Les suivantes avaient mieux démontrées ses capacités, étant revenu sur le devant de la scène en même temps que Mancinia. Comme si tout voulait qu'ils soient ensemble.

— Ensuite, c'est ma réputation militaire qui a dû prendre le dessus.

S'il était devenu la Canine Blanche en tuant tous les Démons qui croisaient son chemin depuis la Chute de la Terre Blanche, ce n'était pas pour rien. Celle-ci le dépeignait plus comme une machine à tuer heureux de massacrer ses adversaires les uns après les autres, mais c'est seulement qu'il répondait en souriant avec insolence aux provocations lancées par les Vils sur le terrain. Ça le suivait et Neah ne changeait rien à cela. Qui allait lui reprocher ?

— Et le fait d'être fiancé avec la femme au destin le plus improbable a dû parachever le tout.

Qui naissait pauvre et démunie, dans une race opprimée et menacée, pour devenir la plus improbable des Chevalières Magiciennes après avoir secourue une Noble dans la détresse ? Qui naissait avec un Ma'Ahid écrasant pour devenir Marquise au sein des Mages Blancs ? Qui réalisait son métier de Sertisseuse avec une dextérité pointilleuse pour devenir connue sur tout le Continent ? Qui devenait Ambassadrice par ambition de devenir Reine, mais qui avait choisi de en charge des Anges par amitié envers les Immaculés et Amour envers lui ? Ah ça ... Il aimait Mancinia, mais quand Neah voyait tout le chemin qu'elle avait parcouru, même lui en était saisi d'incompréhension tant son histoire était longue et pleine de rebondissement pour une personne à peine âgée de trente ans. Et puis, au-delà du Lien que seuls les Humains et les Anges semblaient plus ou moins appréhender, leur Amour à lui seul soulevait parfois les plus folles rumeurs ... Daé essayait d'apporter plus de légèreté à la conversation en parlant de cet endroit. En regardant à l'extérieur et voyant la neige s'y amoncelé, il ne pouvait penser qu'à deux endroits.

— Ça me rappelle Boraür ...

Encore un endroit où il était connu, entre l'adoption de Sif et son rôle de Prophète, nommé au sein même de l'Île en tant que tel. En vérité, son interlocuteur avait beau lui avoir demandé, Neah ne mesurait pas l'importance de sa réputation en dehors des faits militaires.

— Mais aussi Ciel-Ouvert.

La Cité des Chants, où Naan l'avait conduit par magie et l'avait conduit à se produire au sein de celle-ci. En y repensant, il se sentait un peu honteux. Il comprenait l'importance des apparitions publiques quand on était un personnage important, mais ça ... Heureusement, ce n'était pas vraiment resté dans les mémoires non plus. Personne n'avait vraiment du lui prêté attention, tant il ne valait rien contre les vrais Cantateurs de l'Empire.

— J'en porte pour le travail, mais évidemment, rien de très raffiné.

C'était un militaire et non un véritable membre d'une haute société, peu importât qu'il devienne Marquis en épousant Mancinia. Il lui arrivait bien sûr de se détendre aussi, mais ce n'était que des habits communs ou usés, n'ayant pas l'habitude des grandes dépenses, avant d'émettre un petit rire.

— Non, je ne suis pas pointilleux à ce point ! Nous avons tous nos habitudes lorsque nous sommes chez nous.

Il aurait très bien pu être sur le point de se coucher et selon l'endroit où Mancinia était, il lui arrivait de dormir presque nu. Le Désert était frais de nuit, le Marquisat de Nylmord était doux et Haute-Terre se situait dans le même environnement que les Jardins, mais dormir auprès de l'être aimé faisait grimper parfois la température. Et puis, Daé était un homme. Il n'aurait pas réagi de la même manière avec une femme inconnue. L'Ange prit un macaron à la rose entre ses doigts, le regardant, amusé.

— Tu sais tout de moi, mais moi, je ne sais rien de toi.

C'était l'inconvénient quand son nom était connu, en bien ou en mal, par des rumeurs ou par des faits. De ce fait, son interlocuteur l'intriguait réellement. Il s'était mis à le tutoyer, de sorte à créer une proxémie, ne pouvant se contenter de rester poli tous les deux alors qu'ils allaient devoir passer du temps ensemble. Surtout qu'ils ne savaient pas combien de temps exactement.

— Raconte-moi un peu qui tu es.

1070 mots

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Le Son de la Lune

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Comment ne pas tiquer à la mention du Dîner et du Conte ? Neah ne se souvenait pas de l'y avoir vu, ni à l'un ni dans l'autre, mais rien ne lui aurait permis de l'identifier pour deux raisons ; durant ce repas apocalyptique, ses yeux étaient rivés sur Kitoe, qui ne cessait de causer du tort à Helsinki, ainsi que sur Reine, qui discutait avec Isiode tout en le narguant de loin. Quant au Conte des Trois Royaumes, il ne l'avait pas particulièrement relu après le souvenir de l'avoir vécu. Ce n'était pas vraiment une bonne expérience, de son point de vue. À l'inverse, Daé avait réagi à chacun des lieux dont il avait fait mention ; il s'agissait bel et bien d'un voyageur. Et plus encore.

— Je comprends, on a tous nos secrets.

Et l'Ange pouvait dire que ce n'était pas un être lié au Mal. Il enchaînait rapidement sur son propre vécu ; tout en lui dévoilant ce que lui avait hésité à dire à autrui, le laissant assez perplexe. Dans tous les cas, ils n'étaient que deux et lui ne le crierait pas sur les toits, c'était un fait.

— Tu as une vie plus mouvementé que la mienne ces dernières années ! se mit-il à rire.

Elle était ordonnée selon la rigueur militaire et sa vie personnelle, même si ce n'était pas une voie simple que de servir sa Nation, mais il s'y prêtait avec une volonté inébranlable. Il y avait néanmoins un point sur lequel l'Ange devait rebondir, quelque chose d'évident qui lui faisait enlever sa casquette de membre de la Nith-Haiah pour en revêtir une autre.

— Tu es le Roi d'une des îles de l'Archipel de Maggie, n'est-ce pas ?

Cette déduction lui semblait la plus plausible puisque c'est ce que leur avait annoncé leurs Conseillers ; il y avait d'autres îles, d'autres Souverains ... Ce n'était pas si surprenant de se dire qu'ils venaient tous de l'en-dehors de ce territoire, seulement que la probabilité qu'ils soient tous les deux ici était presque improbable.

— C'est aussi mon cas ... Ce n'est pas une chose dont je parle habituellement, puisque personne ne connaît l'existence de cet endroit en dehors des régents qui y officie.

Devait-il mentionner sa Reine ? Mancinia résonnait comme une évidence dans tous les cas. Est-ce que Daé en avait une ? Ou un Roi ? Ce serait un peu étrange que ce soit différent vu l'épitaphe prophétique trouvé sur Koelyë annonçant leur arrivée ... la situation était-elle la même dans tout Maggie ou des variances existaient-elles ? Aucun des deux n'avait su réellement se renseigner puisqu'ils ne pouvaient se consacrer à son développement.

— Il est rassurant de savoir qu'un de mes voisins ne sera pas hostile aux habitants de Koelyë. Quand j'y retournerai, je pourrais te rendre visite, si tu es là.

Neah piquait le bout de sa fourchette dans son fraisier. Il favorisait une entende avec ses voisins, tant qu'ils n'étaient pas ... démoniaques. Ce n'était pas quelque chose qu'il supporterait ; au contraire, pour lui, ce serait le début d'une guerre, peu importe la manière dont elle serait menée. Sous ses sombres pensées, l'Ange pensait que ce gâteau était bon, avant de reprendre la conversation là où Daé l'avait interrogé ;

— C'est vrai que ... Je ne songe jamais à inclure quelque chose de plus militaire dans mes vêtements ... Faisons ça.

Des épaulettes ... Oui, cette idée lui plaisait bien. Il savait que Mancinia adorait en revêtir également, mais elle ne pouvait pas vraiment en raison de l'étiquette lorsqu'elle organisait des choses chez les Magiciens ... et il faisait bien trop chaud dans le Désert. Ce petit changement, elle serait sans doute la première à le voir et l'apprécier. Neah se retournait vers une porte attenante de là où ils étaient.

— Majordome ?
— Oui.

Il était apparu presque naturellement dans la salle dès que l'un des propriétaires en eusse fait la demande. Devait-il être étonné ? Non, c'était presque venu naturellement.

— Nous voulions savoir si vous avez du matériel de couture.
— Nous avons salle dédiée à cette pratique.

Oh ... Une salle, carrément. Ce n'était pas Daé qui s'ennuierait entre ses murs.

— ... Et vous n'avez vraiment aucun nom ?
— Non.
— Dans ce cas ... Si Daé et vous êtes d'accord, que diriez-vous d'Ahn Le ?

Parce qu'il lui rappelait la servitude que lui inspirait les Orines.

750 mots