L'île aux bulles
Aurel & Eiko

Intrigue ; Aurel et Eiko sont accueillis sur la mystérieuse île de Segmaë, dont ils sont les souverains.

Cubs (Cinematic) - Library of the Human soul

« Bienvenu à Segmaë, votre altesse. » Eiko reporta son attention sur la femme qui s'était avancée pour l'accueillir. Elle affichait un sourire bienveillant qui détendit aussitôt la fillette. C'était aussi simple que ça : un sourire lui suffisait pour accorder sa confiance, dans une innocence fragile et naïve. L'enfant pencha légèrement la tête sur le côté, perplexe. « C'est quoi ça, un "Altesse" ? » demanda-t-elle. La question arracha un léger rire à leur hôtesse, qui constatait sans doute avec amusement la similarité des réactions de leurs deux souverains. « C'est vous, notre souveraine. » expliqua calmement la femme. « Moi, je m'appelle Eiko. » rappela la brunette. Elle ne comprenait pas trop cette explication et préférait s'assurer que cette inconnue connaisse son prénom. « Et toi, comment tu t'appelles ? » « Je suis Douria. » « Enchanté, Douria. » récita l'enfant en effectuant une révérence respectueuse de la tête - sa mère lui avait rappelé les règles de bonnes manières avant qu'elles descendent du navire pour accoster sur l'île.

Eiko se pinça les lèvres. Elle trépignait d'impatience : dès qu'elle était descendue de la barque, son regard avait capté la silhouette du roi insulaire et l'envie de le rejoindre la rongeait. Maintenant qu'elle avait terminé de se présenter, son attention était retournée vers le garçon qu'elle dévisageait avec intensité. Un mélange d'excitation, de curiosité et de joie bouillonnait en elle. « Et qui vous accompagne ? » demanda l'habitante. « Je suis Akiko, la mère d'Eiko. Et voici Bae, un jeune Hanatsu qui nous accompagne. » L'hôtesse sembla décontenancée par le titre donné à l'éphèbe mais ne s'attarda pas sur la problématique. « Merci d'avoir accompagné notre reine jusqu'ici. Maintenant que vous êtes arrivés, nous sommes au complet. Nous allons enfin pouvoir commencer les festivités. » « Les festivités ? » « Oui. Pour célébrer le retour de nos souverains bien-aimés. Nous attendions ce jour avec impatience. » fit Douria tout en désignant, derrière elle, la famille qui était arrivée avant eux, se mettant en marche pour les rejoindre.

Ce fut le signe que la petite Orine attendait. Sans demander la permission, elle s'élança vers le second groupe qui était resté à l'écart le temps que la conseillère les accueille. Ne prêtant attention à personne d'autre que le petit garçon, elle fonça vers lui, ne s'arrêtant qu'à quelques centimètres de lui. « Tiens ! » fit-elle en tendant l'un des parchemins qu'elle avait apportée avec elle. « C'est pour toi. » Il s'agissait d'un dessin les représentant tous les deux. Elle s'avança d'un pas de plus. Elle l'observa pendant quelques secondes, en silence, un sourire se dessinant lentement sur ses lèvres. Elle l'aimait bien, Aurel.

« Bonjour. » fit Akiko en s'approchant à son tour. Contrairement à sa fille, l'Orine prenait grand soin de détailler tout le monde, qu'il s'agisse de l'insulaire resté auprès du roi ou bien de la femme et de l'enfant qui semblaient accompagner le gamin. « Vous devez être la mère d'Aurel. » Elle tendit la main dans sa direction. « Je suis Akiko. »

L'île aux bulles
Aurel & Eiko

Kittens (Intimate) - Library of the Human soul

« De rien. » fit la brune en s'approchant légèrement plus. Elle avait envie de prendre le rouquin dans ses bras, ou de lui prendre la main et d'aller explorer l'île, ou bien de se trouver une cabane et de jouer jusqu'à ce que la nuit tombe. Ces longs mois séparés lui avaient parus douloureusement vides, sans sa présence. Elle ne comprenait pas d'où lui était venu ce manque mais, depuis le festival d'Aïkisu, le visage du garçon lui revenait souvent à l'esprit. Parfois, elle avait demandé à Akiko où son Sūrya pouvait bien se trouver. Sa mère n'avait jamais réussi à comprendre de qui il s'agissait, et ses réponses s'étaient à chaque fois trouvées sans réponses. Les chagrins s'étaient accumulés, jusqu'à ce que la fillette comprenne qu'il ne servait à rien d'insister, bien que la frustration soit toujours présente. Finalement, lorsqu'on lui avait annoncé qu'ils se retrouveraient sur Segmaë, Eiko avait retrouvé son enthousiasme. « Qu'est ce qu'il se passe ? » demanda, inquiète, l'Orine en constatant le mal-être de son Petit Soleil. Peut-être n'aimait-il pas ce qu'elle avait dessiné ? « Oh, mais c'est pas grave ça ! » le rassura-t-elle, affichant aussitôt un sourire rassurant. Elle lui avait offert un cadeau, mais elle n'avait pas espéré qu'il lui en retourne un en échange. « Ce que j'ai envie ? Hum... » La brunette fronça les sourcils et regarda les alentours, en quête d'inspiration. « Je sais ! » s'exclama-t-elle avant de se retourner vers Aurel. « Tu sais faire des colliers de coquillages ? On pourrait en faire ensemble, qu'est ce que tu en dis ? » proposa-t-elle avec enthousiasme.

« Coucou ! » La Hanatsu s'était retournée vers la petite fille qui s'était glissée aux côtés du roux. L'inconnue avait deux grandes ailes blanches dans le dos, qui captèrent immédiatement l'attention de la fille d'Onikareni.  « Bonjour, Antona-ni-ja ! » La brune s'était emmêlée les pinceaux mais, ne s'en étant pas rendue compte, elle afficha un grand sourire à l'adulte, avant de reporter son attention vers la petite humaine. « Moi, je m'appelle Eiko. Mais tu peux m'appeler Koko. Et toi, je peux t'appeler Shasha ? Ou tu préfères Zaza ? » L'Orine aimait déjà les deux enfants. La complicité se faisait naturellement, entre eux. Peut-être à cause du lien qui unissait naturellement les souverains de l'île. « Oh, ça va, tu t'es pas fait mal ? » s'inquiéta la brune, lorsque l'ailée tomba sur les fesses. La voyant rire, elle partit dans le même élan, glissant un coup d’œil complice vers Aurel. « Oh oui, ça doit être vachement bien d'en avoir un ! » Lors de leur voyage à Utopia, Akiko avait explique à sa fille ce qu'étaient les Anges et, plus spécifiquement, la relation qu'ils pouvaient entretenir avec les enfants de Sympan. « Mais j'aurai le droit d'en avoir un, moi aussi ? » demanda-t-elle en s'asseyant à son tour dans le sable, pour se mettre à la hauteur de sa nouvelle copine. Son regard curieux revenait sans cesse sur la paire d'aile dans son dos. Aussi ne put-elle retenir sa question. « Dis, elles sont jolies tes ailes. T'es une ange gardienne toi aussi ? Et est ce que je peux les toucher ? »

« Enchantée, Antonija. » sourit Akiko. Bae la salua d'un signe de tête. « Ça a été. Mis à part quelques Sirènes, le voyage a été sans encombre. » « Quoi qu'une certaine Orine était impatiente d'arriver. » ajouta Bae en glissant un regard vers la fillette, un sourire aux lèvres. Il était plus aisé pour les adultes de contenir leur excitation, mais divertir une enfant en bas âge se révélait parfois compliqué. Akiko s'apprêta à retourner la question lorsque leur hôte intervint.

« Oh oui, j'adore les fêtes ! » La voix aiguë de la fillette raisonna dans l'air. « On peut danser, et puis chanter, et y'a toujours à manger, et puis comme ça, on a le droit de se coucher tard ! » s'extasia la petite, son visage faisant des allers et retours entre ceux de ses deux camarades. Elle se releva avec empressement. « On va à la fête ? » demanda-t-elle à Douria, qui acquiesça avec amusement. « Ouiiii ! » Excitée comme une puce, elle passa ses bras par dessous ceux de ses nouveaux amis et suivit la femme. « Y'aura beaucoup de gens à la fête ? Et est ce qu'on aura des mochis ? Vous aimez manger quoi, dans les fêtes ? » s'interrogea la gourmande en se retournant vers les deux humains.

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L'île aux bulles
Aurel & Eiko

Newborns (Cinematic) - Library of the Human soul

« J'adore trop les Loukoum ! » A l'intonation de sa voix, on pouvait deviner qu'Eiko se régalait à la simple énonciation de la gourmandise. Elle avait pu y goûter lors de son séjour à Utopia et, sans grande surprise, la sucrerie avait ravi son palais. « Les quoi ? » demanda-t-elle de répéter en se retournant vers la petite ailée. Ce dessert là, en revanche, lui était inconnu. Elle paraissait presque outrée de ne pas avoir pu déguster une spécialité locale. La brunette continua son jeu d'interrogatoire avec ses deux camarades. Aimaient-ils danser ou préféraient-il jouer de la musique pour les autres ? Chantaient-ils souvent ou allaient-ils plutôt jouer à cache-cache ? Préféraient-ils manger ou bien admirer les spectacles des Sœrei ? La Hanatsu se plaisait à écouter les réponses de ses nouveaux copains. Elle s'amusait autant car elle aimait en apprendre davantage sur eux. Chaque détail de leur personnalité qu'elle ne connaissait pas encore était une énigme à résoudre. Une pièce de puzzle à placer. Une curiosité vivace la dévorait à leur encontre, plus insistante encore qu'à l'accoutumée. Parfois, lorsqu'elle interrogeait les Humains, un pressentiment lui faisait anticiper la réponse du rouquin - et  ces fois-là, elle était toujours ravie de constater que leurs centres d'intérêts étaient similaires. Sharihzad, en revanche, lui était plus mystérieuse. Elle était plus souvent surprise par ses réponses. Les questions tombaient sans interlude. L'intérêt qu'Eiko témoignait aux deux Enfants de Sympan était candide. Leurs interactions restaient spontanées : la joie était vive, les éclats de rires sincères, la surprise ingénue. Leurs émotions se passaient de filtre et leurs réactions également. Pour des âmes aussi jeunes, qui n'ont pas eu le temps de voir ce que le monde à offrir, il est naturel d'explorer l'inconnu, de découvrir l'autre et ses merveilles.

« Vous n'avez jamais entendu parler de magie ? » répéta Akiko, incrédule. Une légère pointe d'appréhension la gagna en constatant que Douria confirmait ses dires. En débarquant sur l'île, l'Orine avait bien sentit sa magie lui échapper. Elle avait simplement supposé que les habitants étaient majoritairement composés d'Humains. Peut-être que cette alliance était la suite logique de la nouvelle entente passée entre les deux peuples. Pourtant, l'Ange avait également été privée de ses pouvoirs. Et cela venait mettre à mal sa théorie. Il ne s'agissait pas seulement de Ma'Ahid. « Avez-vous déjà accueilli des étrangers, avant nous ? » Si d'autres personnes étaient venues jusqu'ici, aucun doute que la question s'était également posée pour eux. Peut-être avaient-ils un début de réponse à leur apporter. « Non, vous êtes les premiers visiteurs à venir sur Segmaë. » informa leur hôte. « Mais ne vous faites pas d'inquiétude... Peu importe ce qu'est la maji, si nos souverains en ont besoin, l'île la leur prodiguera. » assura la femme, pleine d'assurance, déposant un regard empli d'affection sur les deux enfants. Akiko glissa un regard en direction d'Antonija. Cette réponse ne lui convenait pas mais elle n'avait pas l'impression qu'elle pourrait en tirer davantage de la part de celle qui les avait accueilli. Elle préféra donc la questionner sur d'autres sujets qui la tracassaient également. « Vous avez parlé de festivités. De quoi s'agit-il exactement ? » Le peuple souhaitait-il déjà voir leurs souverains couronnés et monter sur le trône, alors qu'ils n'étaient que des enfants ? Ou bien s'agissait-il simplement d'une célébration en l'honneur de leur venue ? Ou peut-être une tradition locale, tombant le jour précis de leur arrivée ?

« Oh, regardez ! » s'écria Eiko en pointant son doigt devant elle. Elle avait aperçu le village, et surtout, les habitants qui avaient commencé à se rassembler aux abords des maisonnettes. Il s'agissait de simples huttes en bois. Excitée à l'idée de rencontrer de nouvelles personnes, la brunette attrapa la main d'Aurel. Elle cherchait son contact, comme si le fait de le tenir lui assurerait qu'il resterait à ses côtés. « On va les voir ? » proposa-t-elle avant de se tourner vers Sharihzad et d'enlacer ses doigts également. « Viens avec nous, Shasha ! » puis, sans crier gare, elle se mit à trotter le plus vite possible en direction de celles et ceux qui les attendaient. « Eiko, attends ! » héla sa mère. « Il n'y a pas d'inquiétude à avoir. Ils sont en sécurité, ici. » assura Douria d'un ton rassurant. « Je vais avec eux. » dit cependant Bae, passant une main rassurante dans le dos de la mère. Mais, effectivement, les enfants ne craignaient rien, ici. La population était simplement curieuse de rencontrer enfin ceux qu'ils suivraient. En les voyant arriver, les réactions étaient variées. Beaucoup s'approchaient, essayant de tendre une main pour les effleurer sans oser les toucher. « Bonjour ! Bonjour, tu vas bien ? Bonjour, comment tu t'appelles ? » Eiko avait lâché la main de l'Humaine - mais tenait toujours celle de son frère - et s'était mis à serrer les mains qui s'étaient tendus dans sa direction. C'était amusant, elle avait l'impression de faire comme les adultes. « Bonjour, moi je m'appelle Eiko. Est ce que vous aimez chanter ? » voulut-elle savoir.

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Douria : #660B37

L'île aux bulles
Aurel & Eiko

Newborns (Cinematic) - Library of the Human soul

Ploc. Ploc-ploc. Eiko sautait en l'air pour essayer de percer les bulles qui s'envolaient tout autour d'elle, telle une envolée de papillons ou de lucioles. Elle avait d'abord essayer de les attraper entre ses deux mains, mais l'exercice s'était vite révélé trop complexe, ou exigeant une patience et une délicatesse qu'elle ne possédait pas, et l'enfant s'était donc mise à les faire éclater. Le bruit que produisait l'impact de son doigt sur la surface irisée l'amusait grandement, la poussant à réitérer son geste, encore et encore. Parfois, son rire résonnait en écho de celui d'Aurel. « Oh, regarde Sūrya ! Celle-ci elle est trop grosse ! » Plus elles étaient grandes, plus la détonation était sonore et plus le résultat devenait satisfaisant. « Anh ! Woah ! » Une nouvelle gerbe de bulles venait de jaillir du sol, ravivant l'excitation générale. La fillette agita plus fervemment encore ses doigts et ses poignets pour poursuivre les fuyardes. « Oh Shasha ! Regarde ! » Une bulle venait de se poser sur ses cheveux blonds sans exploser. « Attends, ne bouge plus ! » invectiva la petite reine, s'approchant lentement de sa voisine, comme pour ne pas effrayer la bulle. Délicatement, la brunette fit glisser son doigt pour la récupérer, puis tendit sa main devant l'Humaine aux ailes d'anges. « Tiens, fais un vœux ! » l'invita-t-elle. « Et ensuite, il faut souffler dessus pour qu'elle s'envole ! » La petite fille inventait la coutume comme si cela lui paraissait naturel, comme si elle avait toujours vécu sur l'île et qu'elle avait formulé des centaines de vœux avant ça. « Celle-ci, il ne faut pas la casser d'accord ? » prévint-elle en glissant un regard vers les garçons. Bae, qui s'était approché des enfants, avait attrapé Aurel et l'avait perché sur ses épaules, afin que celui-ci puisse atteindre les bulles qui avaient réchappé à la traque de sa sœur et de son amie. Ils représentaient donc le plus grand danger pour le souhait qu'avait formulé Sharihzad.

Un peu en retrait, Akiko et Antonija s'entretenaient discrètement, échangeant des messes basses. « La magie est au cœur même des liens que nous tissons. » L'Orine supposait que c'était à cette magie en particulier que faisait allusion l'Ange. La question étant spécifique à son peuple, elle en déduisait que la réponse devait se concentrer sur ce qui faisait la spécificité de leur race. « C'est grâce à elle que nous pouvons nous unir à nos Aisuru. Ce n'est pas anodin que l'alliance avec le peuple des Humains ait pris tant d'année à se faire. » Quelques exceptions avaient pu marquer l'histoire par le passé, mais ces liens là étaient tellement anecdotiques qu'on ne pouvait parler d'entente ou d'alliance entre les deux nations. « Si le Lien peut se tisser malgré la Ma'Ahid de l'Aisuru, il n'est viable qu'à la condition que l'Orine maîtrise davantage ses pouvoirs. Ou que les Ætheri se montrent généreux et acceptent l'union de nos deux peuples. Dans un cas comme dans l'autre, la magie est omniprésente. » Akiko observa ses mains, refermant puis rouvrant ses doigts sur ses paumes, comme si elle essayait de palper la magie qu'elle ne percevait plus. C'était étrange : elle se retrouvait privée de ses pouvoirs, mais l'effet n'était pas aussi étouffant que lors de sa visite à Utopia. « D'une manière générale, notre peuple s'est développé sur son utilisation quotidienne, comme beaucoup d'autres nations. J'imagine que nous serions pénalisées si nous nous en retrouvions dépossédées. » Comme beaucoup de peuples, des tâches du quotidien étaient devenues enchantées et il devenait parfois compliqué d'imaginer la vie sans en user. Des techniques, qui paraissaient instinctives pour les Enfants de Sympan, étaient devenues aberrantes pour les peuples sachant user de magie. « Mais... Si ces gens et vos protégés parviennent à vivre sans... Il n'y a pas de raison pour que nous n'arrivions pas à nous débrouiller également. » Akiko observa son interlocutrice. Elle avait sur le visage une mine contrite. « Qu'en est-il de vous ? Supportez-vous la soudaine privation de vos pouvoirs ? » Elle avait deviné, aux réactions de l'ailée, qu'elle subissait ici le même traitement que les autres êtres magiques. La sensation devait être nouvelle et déstabilisante : bien qu'elle resta aux côtés des Humains, elle n'avait jamais eu à subir leur Ma'Ahid.

« Les enfants ? Le repas a été servi. Par ici s'il vous plaît. » Eiko se désintéressa presque instantanément des bulles. L'appel du ventre était plus fort que tout. « C'est vrai que j'ai un petit peu faim. » constata-t-elle en se dirigeant vers la petite chaumière que lui avait désigné l'hôte. Une longue table avait été aménagée, croulant sous les plats. En réalité, il ne s'agissait pas d'un festin aussi succulent que pouvaient l'être ceux organisés pour des cérémonies du monde extérieur, mais l'estomac enfantin serait facilement comblé par ce qui se présentait à eux. Eiko s'installa à une place puis tapota celle à sa droite. « Aurel, tu viens ? »

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L'île aux bulles
Aurel & Eiko

Anone - Arekun & Yuika

« Parce que, c'est Surya. » répliqua Eiko, sous le coup de l'évidence. Elle ne savait pas vraiment l'expliquer, c'était juste ainsi. L'appellation s'était imposée d'elle-même, dans ce rêve qui les avait unis et qui les rassemblait dans chacune des vies qu'ils avaient partagés. Quand Aurel était là, l'Orine se sentait apaisée. Elle ressentait sa présence comme une douce caresse apportant du baume au cœur : un peu à la manière d'un rayon de soleil qui vous réchauffe de l'intérieur et chasse les tourments. « C'est Aurel, mais c'est mon Surya. » insista-t-elle. C'était le surnom qu'elle était la seule à lui donner. Sa façon de marquer leur relation si particulière. « Mmh ? » Eiko venait de tourner la tête vers sa moitié, observant avec curiosité le fruit dont il s'était emparé. Aussitôt, elle fut attirée par l'aspect singulier de son écorce. Presque dorée. « Une étoile ! » s'émerveilla-t-elle. « Tu crois que c'est Subarashī qui nous l'a envoyé ? » demanda-t-elle, excitée à l'idée que la divinité de son peuple eut pu leur envoyer un tel présent. « Non, pas tout à fait. » répondit Bae en se tournant vers la petite ailée. Il lui dédiait son entière attention. « Mais je vis avec elle et Akiko. Alors, c'est vrai que je suis un peu comme un grand-frère, et qu'elle est un peu ma petite sœur. » Il veillait sur elle et en retour, elle le berçait de tendresse. Bien sûr, il leur arrivait de se chamailler mais leur relation reposait avant tout sur une affection sincère. « Et toi, est ce que tu as d'autres frères et sœurs à part Aurel ? » interrogea le blond. Eiko fronça les sourcils lorsque leur guide démentit son hypothèse. Sa mine contrariée s'évapora cependant aussi vite qu'elle était apparue lorsqu'il leur présenta l'intérieur du fruit. Avec autant d'entrain que le roux, elle s'empara d'un quartier qu'elle goûta après en avoir admiré la chaire atypique et juteuse. « Maman maman ! Tu veux goûter ? C'est drôlement bon ! » Encore plus que les myrtilles ou les fraises. Bae, amusé par les réactions des plus jeunes, les imita et croqua dans l'un des morceaux qui lui avait été offert. Le goût coula sur sa langue et glissa jusque dans sa gorge, faisant vibrer ses papilles. « Tu as raison Sharihzad. C'est drôlement bon. » confirma-t-il, attendri. « Tu crois que c'est notre nouveau fruit préféré ? » questionna la petite Orine en se tournant vers son voisin de table. Elle avait un peu envie qu'ils puissent avoir les mêmes goûts, les mêmes aliments préférés, des couleurs fétiches semblables, ce genre de choses qui les auraient rapprochés.

Eiko, qui avait commencé à inspecter le reste des plats, à la recherche de nouvelles saveurs, n'avait écouter que distraitement la conversation des adultes mais lorsque le rouquin lui fit sa proposition, elle n'aurait rien pu répondre d'autre que : « Bien sûr ! Comme ça, on pourra cueillir plein de steirines pour les desserts ! »

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Le groupuscule avait pu voir les alentours du campement où vivaient les indigènes. L'île n'était pas des plus grandes et pouvait facilement se visiter en une simple journée, à dos d'animal. Cependant, la journée avait été longue pour les voyageurs et leurs guides avaient préconisé de ne pas s'éloigner trop loin de Gemsyce - c'était le nom du village où ils se trouvaient. Parce que la nuit tomberait bientôt, mais aussi parce que les festivités que les habitants avaient passé des jours à préparer débuteraient bientôt. Phelip et Douria avaient cependant pris soin de leurs indiquer les points les plus marquant de Segmaë. Ils les avaient fait monter sur une colline dont la hauteur était suffisante pour avoir une vue impressionnante sur le paysage. On leur avait indiqué le Champ de bulles, à l'est de l'île, les différents bois qui entouraient le village, la falaise à la pointe nord, et même le lac, qui représentait la principale source d'eau douce. Sur le chemin, les enfants avaient pu cueillir d'autres fruits étoilés, ainsi que des vaysnies, petites sphères blanchâtres qui elles ressemblaient à des lunes perchées entre les branches. Son goût était plus acide mais étrangement, ce n'était pas pour déplaire à la fillette, qui y décelait un arrière goût semblable à la vanille.

Après que les enfants se fussent amusés, les hôtes conduisirent les souverains et leurs familles jusqu'à leurs huttes, où leurs affaires avaient été rassemblées. Eiko fit sa toilette puis se changea dans un hanbok un peu plus confortable. Dès qu'elle fut prête, elle se présenta à la hutte voisine. « Surya, Shasha, vous êtes prêts ? » A la vue de ses deux camarades, la brunette marqua une pause. Elle observa leurs tenues et, aussitôt, une pointe de jalousie l'étreignit. Elle trouvait les tenues des humains très jolies et, puisqu'elles ne lui étaient pas habituelles, elle avait envie de les adopter. Elle se mordilla légèrement les lèvres mais ne fit pas de commentaire, afin de ne pas faire de peine à Bae et sa maman, qui l'avaient préparé avec attention. « Dites, est ce qu'on pourra tous faire dodo dans la même chambre, cette nuit ? » Elle avait l'impression de passer une soirée chez des copains. A Okinareni, ça arrivait souvent. On mettait alors tous son futon les uns à côtés des autres, et l'on dormait dans la même pièce. « Si tout le monde est prêt, nous pouvons nous joindre aux célébrations. » proposa Bae, après avoir complimenté Aurel sur sa tenue.

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